Biélorussie : Tout comprendre sur les dessous des événements

...par Franck Buhler - Le 14/08/2020.

Source : Riposte laïque

En préambule l’auteur tient à préciser qu’il est divorcé d’une Russe de Biélorussie et remarié à une citoyenne de cette Biélorussie. Qu’il connaît bien le pays et est en contact plusieurs fois par jour avec des habitants de Minsk dans différents quartiers.

La Biélorussie est le dernier dinosaure de la guerre froide en Europe, le dernier pays où une inextricable jungle de services secrets divers se surveillent et avancent leurs pions pour prendre le contrôle de ce pays calme, sûr, propre et où la modernisation et le niveau de vie sont en constante progression. Un genre de « Suisse » de l’Est en somme.

Il faut garder à l’esprit que ce pays a un statut étrange…  Son indépendance est provisoire, par traité, et la Russie, qui n’y a pas commercialement intérêt, peut à tout instant activer le « traité d’union d’États » signé en 1999 et renouvelé en février 2019, et intégrer instantanément la Biélorussie à la fédération de Russie. De façon absolument légale et incontestable par l’Occident.

Lors de la Seconde Guerre mondiale, une grande partie du peuple russe blanc (biélorusse) a été exterminé par les Allemands et la ville de Minsk entièrement rasée. Ce sont donc des personnes d’origine russe qui peuplent en majorité le pays et la langue biélorusse n’est plus utilisée, et souvent inconnue de la population. De plus ce pays n’a jamais existé, dans toute l’histoire, en tant qu’État indépendant jusqu’à l’éclatement de l’URSS, la Russie blanche indépendante est donc un accident de l’histoire.

Pour autant la population souhaite majoritairement le maintien de sa demi-indépendance compte tenu d’une tranquillité de vie et d’une absence de délinquance qui leur fait peur chez la « mère patrie » russe.

Le Président Loukachenko est au pouvoir depuis 25 ans. Mis en place par feu Boris Eltsine, tout comme Poutine, il s’agit d’un ancien chef d’un petit kolkhoze (ferme communiste), conducteur de tracteur. Un vieux moujik dont l’accent à couper au couteau fait beaucoup rire (en cachette) son peuple… En temps normal, aucune ville d’Europe n’est plus propre, calme et joyeuse que Minsk. Le grand bâtiment jaune du KGB (il a gardé ce nom en Biélorussie) fait certes un peu frissonner, mais c’est un genre de croquemitaine apathique qui n’a, habituellement, pas grand grand-chose à faire dans ce pays placide. Le MVD, rival du KGB, chargé de la police mais aussi de la surveillance politique est en concurrence avec l’autre service et les coups en douce ne sont pas sans rappeler les rapport d’autrefois en France entre police et gendarmerie.

Beaucoup de hauts gradés du KGB sont des anciens du KGB de l’URSS et nul ne sait vraiment les rapports qu’ils ont pu garder avec leurs ex-collègues qui aujourd’hui forment le FSB russe… Il existe donc un vraie incertitude sur ce que fait ou pas le KGB de Minsk. Loukachenko compte donc plutôt sur le MVD sans oser toucher au KGB. Un accident est si vite arrivé…

Le dernier élément de la pièce de théâtre qui se joue à Minsk est la présence de l’armée russe sur le territoire biélorusse et en particulier du centre de commandement des forces aériennes et spatiales de la Fédération de Russie.

Venons-en aux élections. Mon analyse personnelle me semble logique mais lorsqu’au moins 5 services secrets interviennent en même temps dans un pays opaque, tout reste possible.

Le peuple biélorusse, majoritairement, « aime bien » son Président mais une partie de la jeunesse, qui ne connaît pas son bonheur, rêve d’Union européenne et d’Occident… d’où une réelle envie de changement d’une partie de la population. Et cette nouveauté a fait peur à Loukachenko alors qu’il était ASSURÉ d’être réélu même sans tricher… Avec une estimation de 60 % des suffrages, selon les rares études disponibles.
Lorsqu’un animal sent la peur, les prédateurs rappliquent… CIA, FSB, GRU et KGB de Minsk se sont donc mêlés de tout ça, chacun voulant défendre ses intérêts :

La CIA, faire basculer à l’Ouest ce pays géographiquement ultra-stratégique et qui aurait pu lui servir de cheval de Troie pour déstabiliser la Russie ;

Le GRU (service espionnage et action de l’armée russe), repérer, bloquer et si possible faire avoir des « accidents » aux gens de la CIA ;

Le FSB, garder à tout prix la Biélorussie dans l’orbite russe et renforcer son pouvoir sur le KGB local ;

Le KGB biélorusse, maintenir la proximité avec Moscou et être plus efficace que le MVD pour remonter en grâce dans l’esprit de Loukachenko ;

Le MVD : prouver que le KGB est inutile et que sa police anti-émeute est le seul rempart du régime.

Et voilà que des candidats se présentent… qui est manipulé par qui ? Le Président perd ses nerf et fait arrêter l’un d’entre eux, pendant que l’autre part se réfugier en… Russie (le coup du FSB est raté). L’épouse du candidat arrêté se présente à sa place pendant que Loukachenko, coutumier du fait, accuse la Russie d’être responsable de tout ce « binz »…

La candidate restant seule en piste réussit à cristalliser autour d’elle les amateurs de changement mais, même s’il est CERTAIN que le Président sortant aurait de toute façon été réélu, ce dernier commence à perdre son sang-froid, se réconcilie la queue entre les jambes deux jours avant le scrutin avec un Poutine goguenard, lui demande son aide et met le MVD et l’armée en état d’alerte. Le FSB sous les ordre de Poutine s’en mêle à nouveau… Pendant ce temps internet est inondé d’infos « made in CIA », ce qui provoquera la veille du scrutin et pour plusieurs jours une coupure du net dans tout le pays.

Le jours du scrutin, le vieux renard, affolé sans raison proclame les résultats UNE HEURE avant la fermeture des bureaux de vote, donnant ainsi lui-même le top départ des troubles. La tricherie est évidente mais n’était pas nécessaire !

La CIA tente d’attiser le feu mais moins de 20 000 personnes (sources concordantes) manifestent le premier soir. Ils ne sont plus que quelques centaines à ce jour.
La candidate battue a en effet elle-même démobilisé ses troupes, leur demandant de cesser les manifestations et d’accepter le scrutin. Réfugiée en Lituanie avec ses enfants, elle attend son mari encore emprisonné à Minsk et il semble évident qu’elle a passé un « deal » avec le FSB.

Le jeu d’échec est terminé. Perdants : CIA, KGB, opposition au Président réélu. Vainqueurs : le Président réélu, le MVD et le FSB… ET le GRU ? Personne ne sais jamais rien de ce que fait le GRU.

Franck Buhler

Source : https://ripostelaique.com/bielorussie-tout-comprendre-sur-les-dessous-des-evenements.html

Lire les commentaires, en particulier celui de Stratediplo.


Les manifestations en Biélorussie : Les éléments démontrant l’ingérence étrangère

...par Karine Bechet-Golovko - Le 15/08/2020.

Les manifestations de contestation de l’élection de Loukachenko en Biélorussie sont présentées, sans aucun recul ni aucune tentative d’analyse, comme « la révolte spontanée d’un peuple contre le tyran ». Si le score de 80% fait effectivement sourire, si l’existence d’une fatigue de la population face à l’éternelle présidence Loukachenko doit objectivement exister, l’ampleur des manifestations n’a rien de naturel, ni de spontané, c’est un processus qui a été préparé depuis des années (et je le sais pour certains aspects personnellement) et largement coordonné dans sa phase de réalisation. Car ces tristes parodies de révolution populaire, auxquelles nous assistons ces dernières années, ne sont in fine que des tentatives plus ou moins fructueuses de renversement d’un pouvoir non-aligné pour mettre le pays – et ses ressources – sous tutelle globaliste. La démocratie et les droits de l’homme (j’entends et les droits et les hommes) n’y sont strictement pour rien. Et concrètement dans cette crise biélorusse, plusieurs éléments apparaissent laissant percer l’organisation volontaire.

L’on peut regarder les images choisies puis diffusées des manifestations en Biélorussie, la larme à l’oeil, le coeur battant plus fort, comme si tout un peuple se soulevait contre l’oppresseur. Un peuple qui a évidemment ses difficultés, mais qui n’a quasiment pas de problème de chômage, qui a une industrie, une agriculture, un système social, un système d’enseignement classique, qui n’a pas été assigné à domicile pendant le premier délire du Covid, à qui l’on n’impose pas de masques ni de vaccin, que l’on ne fait pas plier à coup de propagande fin du monde ni d’amendes. Bref, c’est l’ennemi à abattre, la globalité incontestable de ce monde ne peut se permettre une telle infamie. Seuls les contestataires ont le droit d’exister – médiatiquement et politiquement.

Or, les gens sont fainéants par nature, il est plus facile de faire de l’activisme avec un smartphone à la main que de la véritable politique, ce qui ne concerne pas que la Biélorussie, ou il faut s’occuper des égouts, du système électrique, des usines, etc. Ainsi, Loukachenko se retrouve donc sans réel opposant – puisque l’idole toute fraîche et photogénétique dont tout le monde aura oublié le nom dans un mois, n’a jamais, Ô grand jamais, fait de politique et n’avait donc aucun capital politique pour se faire élire. Certainement sur le modèle macronien de « l’absence d’expérience est un avantage », dont nous voyons les effets dévastateurs dans un pays pourtant fortement structuré comme la France. Et si des Biélorusses en ont assez de Loukachenko, cela ne veut pas dire qu’ils ont envie de se retrouver dans la situation des Ukrainiens, puisque malheureusement, c’est la seule alternative réaliste aujourd’hui si l’on sort du monde Bisounours. (Voir notre article à ce sujet ici)

 

Pourtant, cela fait des années, une quinzaine au moins, que la société est travaillée au corps. Par hasard et par naïveté, je me suis retrouvée un moment engagée dans ce processus, en donnant des cours de droit à des activistes et à des étudiants. Ce qui est intéressant, c’est que tout cela se passait à Vilnius, justement là où l’égérie s’est enfuie. Il s’agissait de programmes internationaux financés par l’UE, par les pays du nord de l’Europe et par les Etats-Unis. Et en dehors de mes cours de droit, que je voulais académiques, il y a avait des séminaires beaucoup plus orientés. Lorsque j’ai compris de quoi il s’agissait réellement, je suis partie. Mais ces activistes ont été formés.

 

Ca, c’est le travail de fond : comment faire évoluer le cursus idéologique d’une société. Lorsque l’on arrive dans une phase de réalisation, comme nous le voyons aujourd’hui, certains mécanismes concrets se mettent en marche.

Il faut des hommes de combat, qui vont entraîner les foules. Le triste Sire Iaroch, à la tête des terroristes de Secteur Droit en Ukraine, a déclaré que depuis les années 2000, des membres du groupe nazi UPA (la fraction ukrainienne qui faisait partie de l’armée nazie pendant la Seconde Guerre mondiale) ont participé à la formation militaire des « patriotes » biélorusses anti-Loukachenko. Bref, avec l’aide d’Ukrainiens, qui ont patrouillé tout le pays, des forces d’attaque ont été mises dans la rue le moment venu.

Il faut de l’argent, pour recruter des coordinateurs et des statiques. Le ministère de l’Intérieur biélorusse a interpellé un homme qui distribuait de l’argent à des manifestants et avait encore 10 000 $ dans son sac à dos. Par ailleurs, un individu ayant retenu une chambre d’hôtel à Minsk, a été interpellé. Il coordonnait l’activité de trois autres personnes, qui elles-mêmes coordonnaient des groupes.

Il faut maîtriser le discours médiatique et diriger la mise en scène. La chaîne Nexta sur Telegram est devenu le centre de ce spectacle, avec environ 1,5 million d’abonnés, sans oublier que ces infos sont reprises telles qu’elles par de nombreux médias et sur les réseaux sociaux. Nexta a été fondé par Stepan Putito, qui dès 2015 avait tout d’abord mis en place une chaîne d’opposition sur Youtube et participait activement aux différents mouvements contestataires en Biélorussie. Lorsqu’une affaire pénale a été ouverte contre lui suite aux manifestations de 2017, il est parti en Pologne, où il a animé une émission de divertissement. Mais surtout, en 2018, il a fondé la chaîne Nexta, qui vient de prendre l’ampleur qui lui était désignée, à savoir être de facto l’état-major des manifestants. Ainsi, il la dirige depuis la Pologne.

Evidemment, la mise en scène est un élément fondamental de la construction d’une conscience collective déterminée. L’on ne vous montrera pas le « manifestant pacifique » avec une grenade dans la main, qui est le seul mort, car elle a explosé avant qu’il ne la lance sur les forces de l’ordre pour les tuer, l’on ne montrera pas la bonne centaine de policiers blessés, mais l’on a droit à ceci :

Le blanc est le symbole de la pureté, face à ce qui doit être vu comme de la brutalité :

A genoux en signe de soumission, pour faire ressortir le caractère revendiqué a priori illigitime de la force – et de l’Etat :

Un homme seul, d’âge mûr, face aux forces de l’ordre, adaptation post-moderne circonstanciée de David et Goliath :

 

Comme le déclare la porte-parole du ministère russe des Affaires étrangère, Maria Zakharova :

«On aperçoit une pression sans précédent exercée par des partenaires étrangers sur les autorités biélorusses. Des tentatives éloquentes d’ingérence dans les affaires d’un État souverain sont détectées, dans le but de diviser la société et de déstabiliser la situation»

Il serait bon que l’implosion recherchée de la société biélorusse devant conduire au départ de Loukachenko et à l’entrée glorieuse du pays dans le giron globaliste, ne conduise pas à une division trop violente des élites et de la population en Russie. Car si le ministère russe des affaires étrangères garde le cap de l’intérêt national, beaucoup de questions se posent quant à la ligne tenue par différentes forces néolibérales à l’intérieur du pays, à un doigt et demi de reconnaître l’Ukaine contre la Biélorussie …Si les forces néolibérales qui l’on voit sévir à l’intérieur du pays ces dernières années et dangereusement se renforcer prennent le contrôle de la politique extérieur, combien de temps la Russie, dans ces frontières, pourra-t-elle exister ?

 

PS : Toutes proportions gardées, la situation de Loukachenko rappelle celle de Poutine – un pouvoir au long cours, dont le terme se confond avec l’horizon, sans réelle opposition politique et avec un réel soutien populaire. Ces forces globalistes en Russie, dont certaines évoluent au sein même du parti présidentiel Russie Unie ou dans l’opposition très systémique, après l’enchaînement des réformes impopulaires, après la gestion juridico-politique discutable – et discutée – de la crise du Covid, vont-elles sortir un jour, les médias à l’appui, pour déclarer, comme à l’égard de Loukachenko, que « le peuple est prêt pour renverser » Poutine ? Si les élites globalistes, quelle que soit la couleur de leur passeport, sont en droit de prendre ces décisions, comme elles veulent le faire pour Loukachenko, elles le feront sans aucun doute, un jour, pour Poutine. Dès que la situation sera mûre, ce à quoi elles travaillent activement ces dernières années.

 

Karine Bechet-Golovko

source:http://russiepolitics.blogspot.com/2020/08/les-manifestations-en-bielorussie-les.html

 


Biélorussie – Une révolution de couleurs d’une autre nuance ?

...par Peter Koenig - Le 16/05/2020.

Une zone tampon entre la Russie et l’OTAN

Le Bélarus dans la tourmente, après une élection où le président sortant Alexandre Loukachenko – 25 ans déjà au pouvoir (en fonction depuis 1994) – l’a emporté avec 80% des voix. C’est ce que disent les statistiques officielles et les médias. Vrai ou faux ? Est-ce que cela a de l’importance ? – La marge est suffisamment importante pour ne pas être contestée ou remise en question par les « recompteurs ». Alors, les gens descendent dans la rue. La première réaction de la police contre les manifestants est violente.

Washington réprimande la Biélorussie [Bélarus]- pour calmer la violence policière – à la base pour protéger les manifestants. La réaction générale de l’Occident face à l’élection est négative. Ils affirment unilatéralement, que « les élections étaient injustes et truquées ». Cela pourrait être vrai ou faux.

L’Occident critique depuis des années le comportement de Loukachenko en ce qui concerne les droits de l’homme. N’est-ce pas un peu ironique ? Chaque fois que l’Occident émet une critique pour laquelle il n’a pas de réel motif, il se plaint de « violations des droits de l’homme ». C’est un peu le cas de tous les pays dans le monde. La Russie, la Chine et tous ceux qui sont associés à ces deux pays qualifiés de diaboliques présente un « bilan horrible en matière de droits de l’homme ». Ce n’est pas vraiment une question de substance que l’Occident met en avant, ou si c’est le cas, c’est parce qu’ils inventent la  » teneur  » de ces droits humains. La Chine en est un bon exemple.

Juste en passant – quelqu’un a-t-il jamais remis en question ou même critiqué le bilan de l’Occident en matière de droits de l’homme ? Pensons simplement à toutes les guerres et « sanctions » initiées par l’Occident au Moyen-Orient – Afghanistan, Irak, Syrie, Yémen, Palestine par procuration, Israël, Somalie ; aux agressions contre l’Iran, le Liban ; au fait de priver le Venezuela, Cuba et la Corée du Nord de médicaments essentiels, de nourriture – et de pièces détachées qui pourraient faire fonctionner leur économie – sans parler des calomnies, des sanctions et des agressions contre la Chine et la Russie. Personne en Occident n’ose dire « stop ». Les médias contrôlés par les Anglo-Étasuniens se taisent. – Où sont les véritables auteurs de violations des droits de l’homme, dans des proportions gigantesques, plus graves que celles de la Russie, de la Chine et du reste du monde réunis ? – Il y a de quoi alimenter la réflexion.

Revenons à la Biélorussie. La Biélorussie est aussi un « allié » de la Russie. Ou, disons, d’une autre manière : La Biélorussie est une zone tampon entre la Russie et l’OTAN. L’alliance du Bélarus avec la Russie est donc importante. Il est également important pour l’Occident de rompre cette alliance. Pour se rapprocher des portes du Kremlin.

Et c’est précisément ce qui se passe. Le fait est que Pompeo est allé voir Loukachenko au début de l’année 2020 en lui serrant la main, en lui souriant et en lui promettant son amitié – et lui offrir sa politique « d’aide à la démocratie ». Malgré la critique des droits de l’homme, la plupart des sanctions occidentales ont été levées à l’encontre du Bélarus, car Loukachenko a libéré certains prisonniers politiques. Le discours de Pompeo affirme que Washington soutient l’indépendance de la Biélorussie, alors qu’ils sont conscients des liens étroits de Minsk avec la Russie.

Pompeo a déclaré (une citation de Reuters) : « Il y a une longue histoire avec la Russie. Il ne s’agit pas de nous choisir entre les deux. Nous voulons être ici ». Comme c’est sage. Le « choix » se fera par un bras de fer de Washington, ou pire, si nécessaire.

Par pure coïncidence, lorsque la Russie et le Bélarus ont eu un désaccord à propos des livraisons de pétrole et la prolongation du contrat fin 2019 et début 2020, Washington a immédiatement proposé des approvisionnements alternatifs. Pompeo a dit également ceci :

« Les États-Unis veulent aider la Biélorussie à développer son indépendance. Nos producteurs d’énergie sont prêts à livrer 100% du pétrole dont vous avez besoin à des prix compétitifs ». – Et, « Votre nation ne devrait pas être forcée de dépendre d’un seul partenaire pour votre prospérité ou votre sécurité. »

Mais un accord de contrat pétrolier a été conclu avec Moscou, et les livraisons ont repris le 4 janvier 2020.

En prévision de la visite de Pompeo à Minsk au début de l’année, l’administration Trump a laissé entendre que « [Le Bélarus] vit une époque de grande rivalité entre puissances et c’est une opportunité d’exercer davantage d’influence [dans la région] ».

Et voilà. Les élections sont souvent des moments stratégiques pour frapper un pays quand vous voulez le dominer. Qui sait si les États-Unis ont été derrière les résultats des élections, directement ou par procuration – les manipulant, sachant très bien que la popularité de Loukachenko est tombée à un niveau très bas. Loukachenko a dirigé son pays comme un État policier. Une nouvelle victoire de Loukachenko pourrait (et devrait – comme le souhaite l’Occident) provoquer des révoltes sociales – qui, comme dans d’autres endroits du monde – comme actuellement à Hong Kong, pour ne citer qu’un seul cas – peuvent être provoqués par Washington et ses larbins et se prolonger aussi longtemps qu’il faudra pour provoquer un changement de régime – ce dont Washington ne cesse de rêver en ce qui concerne la Biélorussie.

Le Bélarus n’a pas de ressources naturelles à mettre en valeur et le pays dépend ainsi économiquement de la Russie. Par ailleurs sa situation géographique stratégique est une zone tampon pour la Russie. La Russie n’a jamais cessé d’aider économiquement le Bélarus. Il est très peu probable que la Russie intervienne dans les élections du Bélarus, malgré ce que dit Washington sur l’ingérence politique et électorale de la Russie. Ce n’est pas le style de la Russie, mais c’est clairement le style de Washington d’intervenir dans les élections dans le monde entier. Il n’y a pas eu une seule élection « libre » – « libre » signifiant sans ingérence, directe ou indirecte, des États-Unis, au cours des dernières décennies dans le monde. Pas une seule.

Contrairement à l’Ukraine, en Biélorussie, il n’y a pas eu d’intervention apparente de l’UE et du FMI (jusqu’à présent). Seuls les États-Unis ont été visibles lors la visite de Pompeo à Minsk le 1er février 2020. Mais nous ne savons vraiment pas ce qui s’est passé derrière les coulisses, quels accords ont été signés « verbalement ».

Cependant, quels que soient l’implication des secrets derrière la visite de Pompeo, cela ressemble à une nouvelle sorte de révolution de couleurs en préparation. Une révolution dont les instigateurs ne sont pas visiblement Washington et/ou leurs alliés contrôlés par l’OTAN, l’Union européenne. Mais plutôt une « tierce partie », proche alliée des États-Unis, dont la survie dépend des États-Unis, comme l’Ukraine. Il est possible que l’Ukraine, dirigée par Washington, ait infiltré ses services de renseignement et autres fauteurs de troubles (peut-être avec des passeports russes) en Biélorussie, principalement à Minsk, avant les élections, pour orchestrer la victoire écrasante de Loukachenko, ainsi que les troubles civils qui ont suivi – et qui, à ce jour, ne se sont pas atténués.

Ce n’est peut-être pas une coïncidence si la seule véritable adversaire de Loukachenko, Svetlana Tikhanovskaya (qui n’a obtenu que 10 % des voix) s’est enfuie en Lituanie, où elle était « en sécurité », comme l’a déclaré le ministre lituanien des affaires étrangères.

Les Etats-Unis condamnent officiellement la brutalité policière de Loukachenko, mais en secret, ils veulent que Loukachenko reste au pouvoir, jusqu’au moment approprié, lorsque le contrôle sera suffisamment avancé, comme ce fut le cas avec l’Ukraine. En attendant, ils pourraient préparer Svetlana à prendre la relève de Loukachenko – quand le temps sera venu de créer une autre « Maïdan » – de style biélorusse.

Le président Poutine en est sans doute conscient – et probablement d’autres scénarios sont possibles. Tirant les leçons de l’expérience ukrainienne, il pourrait choisir de « remplacer » Loukachenko avant qu’il ne soit trop tard. Car si la Biélorussie tombe – et avec l’Ukraine à la porte sud, Moscou serait en réel danger.

source : https://www.globalresearch.ca

traduit par Maya pour Mondialisation

via:https://www.mondialisation.ca/belarus-une-revolution-de-couleurs-dune-autre-nuance/5648321

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