Le billet du Col. Georges Michel

Colonel à la retraite. Éditorialiste à Boulevard Voltaire.

 Gabriel Attal : « L’islamisme n’est pas une religion. » Oui, et alors ?

Source : Bd. Voltaire - Le 26/03/2024.

Ça partait pourtant bien, tout ça, et puis, c’est parti dans le grand n’importe quoi. Voilà ce qu’on pourrait, malheureusement, retenir de la déclaration de Gabriel Attal, ce lundi 25 mars, depuis le poste de commandement sécurité de la gare Saint-Lazare à Paris. Flanqué du préfet de police en uniforme et du gouverneur militaire de Paris en tenue de combat, le Premier ministre devait passer un message clair aux Français : après l’attentat islamiste de Moscou, la France ne baisse pas la garde et est prête à toutes les éventualités. On n’en attend pas moins de ceux qui nous gouvernent.

 

 

De mâles accents...

« La menace terroriste islamiste est réelle ; elle est forte. Je le dis, elle n’a jamais faibli… L’ennemi, je le dis, il a un nom, c’est le terrorisme islamiste. » Les propos du Premier ministre sont clairs et nets. Il est loin, le temps où un François Hollande peinait à nommer les choses. Certes, on pourrait être plus précis dans l’emploi des mots et, d’ailleurs, c’est là, à bien y réfléchir, que le bât blesse déjà : stricto sensu, le terrorisme n’est pas un ennemi, c’est un mode d’action qui consiste à susciter la terreur dans la population pour imposer sa volonté avec des objectifs qui peuvent être politiques ou religieux, voire les deux à la fois, pour ce qui concerne le terrorisme islamiste. Mais bon, on ne peut pas trop en demander à un Gabriel Attal qui n’a sans doute pas eu le temps de réfléchir à tout ça, jeune home pressé qu'il est.

Stricto sensu, il faudrait dire que l’ennemi, c’est l’islamisme qui veut s’imposer à nous par le terrorisme. Mais passons. La suite de la déclaration de Gabriel Attal se poursuit sur de mâles accents : « Il s’immisce partout, l’islamisme. Nous baissons le regard, nous acceptons le "pas de vagues", nous laissons l’angélisme triompher. Alors, partout, nous ne devons pas laisser le moindre millimètre au terrorisme islamiste… » En deux phrases, écrites sur un bout de papier, le Premier ministre glisse de l’islamisme au terrorisme islamiste. Comprendre qu’il y a bien un continuum entre les deux phénomènes, que le second se nourrit du premier. On ne peut qu’approuver ce qui relève du factuel.

C'est quoi, ce charabia ?

Et puis, tout d’un coup, les propos du Premier ministre se gâtent.« Je le redis ici, l’islamisme n’est pas une religion, ce n’est même pas une simple idéologie, c’est une spirale, un engrenage de la haine qui se nourrit de notre naïveté et qui veut tuer la République. »Mais c'est quoi, ce charabia ? Bien sûr, que l’islamisme n’est pas une religion. Et alors, du coup, ça fait quoi, ça change quoi, ça apporte quoi, que de dire ça ? Mais l’islamisme n’existerait pas s’il n’y avait pas d’islam. L’islamisme ne serait pas une idéologie : ah bon, c’est nouveau, ça ! Les islamistes ne veulent pas tuer la République dont ils se fichent sans doute comme de leur premier kamis : ils veulent imposer la charia partout où ils s’immiscent, notamment en France, et encore plus notamment dans ces fameux « territoires perdus de la République ». Nuance.

 

En fait, toute cette logorrhée relève d’un « en même temps » qui vise, justement, à éviter de faire des vagues là où vous savez et relève au mieux d’un certain angélisme, au pire d’une certaine lâcheté, à moins que cela ne soit le contraire. Osons poser cette question : que craignent-ils le plus ? Un nouvel embrasement des banlieues ou les attentats islamistes ? On n'ose imaginer le chaos possible si, d'aventure, la France devait envoyer des troupes en Ukraine. « Pourvu que l'arrière tienne bon », disait-on sur le front, pendant la Grande Guerre...

Macron face aux Français : Demain, la guerre ?

 

Source : Bd. Voltaire - Le 14/03/2024.

« Le Président va rendre compte de la situation de manière pédagogique », rapportait la presse, ce jeudi matin. Les Français ne sont pas des enfants, mais bon… En tout cas, il était grand temps qu’Emmanuel Macron s’adresse directement aux Français après ses saillies va-t-en-guerre des dernières semaines et après que le Parlement a débattu et s’est prononcé, cette semaine, sur l’accord bilatéral de sécurité signé récemment entre la France et l’Ukraine. Grand temps, d’autant que les deux tiers (68 %) de nos compatriotes considèrent que le chef de l’État a eu tort de prendre des positions ressenties comme bellicistes, selon un sondage Odoxa-Backbone Consulting réalisé fin février pour Le Figaro.

Des propos qui ont « créé une forme de peur », soulignait un député Renaissance, selon La Nouvelle République, qui ajoutait : « Il faut rassurer, dire qu’on fait tout pour éviter la guerre, que la France use toujours de la voie diplomatique et qu’il ne faut jamais abandonner l’Ukraine. » Alors, ce jeudi soir, interviewé par Anne-Sophie Lapix et Gilles Bouleau, Emmanuel Macron a donc voulu faire de la pédagogie. Tout du moins au début de son interview. « Vous êtes assis devant moi. Est-ce que vous êtes debout ? Non. Est-ce que vous excluez de vous lever, à la fin de votre interview ? À coup sûr vous n’allez pas l’exclure. » Référence à ses récents propos selon lesquels il n’excluait pas d’envoyer des troupes au sol en Ukraine. La comparaison est un peu boiteuse, mais le Président semble content de sa trouvaille. A-t-il rassuré les Français ? Sans doute pas. A-t-il convaincu que la France use toujours de la voie diplomatique ? Encore moins. Qu’il ne faut jamais abandonner l’Ukraine ? Oui, sur ce point, le message a été clair.

Macron n’a pas rassuré.

Tout d’abord sur la situation tactique sur le terrain, là-bas, sur la ligne de front : « La situation est difficile », reconnaît le Président. « Une litote », lui répond Gilles Bouleau. Traduire : la situation tactique est mauvaise pour les Ukrainiens. Mais Macron va plus loin en rappelant que « la guerre est sur le sol européen », que « ce n’est pas une fiction loin de nous ». C’est une évidence que les Français savent mais ne veulent sans doute pas croire, il faut bien l'avouer. Et donc, Macron n’a pas voulu rassurer en affirmant que c’est la sécurité de l’Europe, de la France et des Français qui se joue là-bas. « Guerre existentielle pour la France et l’Europe », dit-il carrément. Sur l’envoi de soldats français en Ukraine, a-t-il rassuré ? Non plus. « J’ai peut-être raison de ne pas être précis. » C’est la fameuse « ambiguïté stratégique ». On n’en saura pas plus. Pourtant, Le Monde révélait, ce 14 mars, que Macron, le 21 février dernier, dans un salon de l’Élysée, aurait déclaré « d’un air dégagé » : « De toute façon, dans l’année qui vient, je vais devoir envoyer des mecs à Odessa. » Propos que dément formellement le Palais, ce même 14 mars. Ambiguïté stratégique.

« Nous sommes prêts », assène-t-il...

Rassurer sur le fait que « les choses bougent » en tentant de faire oublier le cinglant désaveu qu’il a reçu de la part des alliés après ses propos lors de la conférence de soutien à l’Ukraine, le 27 février dernier. On verra cela après qu’il aura rencontré Scholz, ce 15 mars. Macron a voulu rassurer quant à nos capacités militaires. Nous avons un « modèle d’armée complet », se plaît-il à rappeler. Un modèle que les esprits chagrins qualifient d’« échantillonnaire »... Et le chef des armées d'évoquer notre récent engagement au Sahel pour prouver notre capacité opérationnelle. Bouleau a beau rétorquer que ce n'était pas tout à fait le même genre d’ennemi et de guerre que celle qui est menée en Ukraine, Macron balaie l’argument d’un revers de manche. « Nous sommes prêts », assène-t-il. La France produit moins de cent obus par jour, ce que consomment les Ukrainiens en quelques minutes ? On va chercher partout dans le monde des munitions et accélérer les cadences. Tout ça coûte cher. 4,8 milliards ont déjà été donnés à l’Ukraine. 3 de plus sont prévus. Va-t-il falloir emprunter sur les marchés internationaux ? Ne pas l’exclure. Et de rappeler ce que l’on a fait durant le Covid (« Quoiqu'il en coûte » ?) pour tenir le pays à flot. Donc, se préparer à ce que la France s’enfonce un peu plus dans la spirale infernale de l’endettement.

Et la diplomatie, dans tout ça ? « Je suis disposé à mener les discussions », affirme Macron. Ce n’est sans doute pas lui qui les mènera, ces discussions, le jour où elles viendront... « Mais en face quand on ne dit pas la vérité… », ajoute-t-il. En clair, le temps où la France se positionnait comme une grande nation diplomatique est révolu.

 

 

[EDITO] Droit du sol, un pilier fondamental de notre République : Vraiment ?

Source : Bd. Voltaire - Le 12/02/2024

 

Le fameux droit du sol est une de ces vaches sacrées de notre République. Il serait donc, par définition, intouchable. « Un des piliers fondamentaux de notre République », déclare le député LFI des Bouches-du-Rhône Manuel Bompard, vent debout, comme toute la gauche, par les propos de Gérald Darmanin qui veut modifier l’application de ce droit à Mayotte en passant par une révision constitutionnelle.

Droit du sol : un droit fondamental ?

Droit fondamental, vraiment ? En 1993, le Conseil constitutionnel avait été saisi par des députés de gauche (socialistes et communistes) concernant une réforme (déjà !) du Code de la nationalité. Ces parlementaires estimaient notamment que le projet de loi porté par la majorité de droite (on était sous Édouard Balladur) méconnaissait « un principe fondamental reconnu par les lois de la République ». Déjà ! Voici la réponse du Conseil constitutionnel à l’époque : « Le législateur a posé en 1851 et réaffirmé à plusieurs reprises en 1874, 1889 et 1927 la règle selon laquelle est français tout individu né en France d’un étranger qui lui-même y est né, il n’a conféré un caractère absolu à cette règle qu’en 1889 pour répondre notamment aux exigences de la conscription… » De quoi relativiser les embardées lyriques de la gauche sur ce sujet. Ce droit du sol n’est donc pas un droit fondamental. Mais en appeler aux grands principes, aux fameuses « valeurs » de la République, s’appuyer sur ces supposés « piliers fondamentaux » est un grand classique à gauche pour mobiliser ses troupes et tenter de faire rentrer la « bête immonde » dans sa tanière.

Plus d'immigration pour lutter contre l'immigration...

Les habitants de Mayotte n’en peuvent plus de la submersion migratoire ? Manuel Bompard, comme toute la gauche, a la solution : « Je crois que pour résoudre les problèmes de Mayotte, on n’a pas besoin de moins de République, on a besoin de plus de République et donc certainement pas le fait d’entamer le droit du sol… » C’est quoi, « plus de République » ? Investissement dans les services publics, nous dit l'insoumis. Sans doute. Renégociation avec les Comores ? Très bien, mais si les Comores ne veulent pas renégocier, on fait quoi, on envoie la canonnière ? Et puis, « plus de République » - nous y voilà -, c’est aussi, pour Bompard, accueillir une partie des mineurs étrangers présents sur l’île dans l’Hexagone. En fait, à l’écouter, on n’a pas besoin de plus de République mais de plus d’immigration. On n’y avait pas pensé.

La République une et indivisible ?

Autre étendard brandi à gauche après la déclaration de Darmanin : l’indivisibilité de la République. Elle est menacée, estime l’historien de gauche Patrick Weil, spécialiste des questions d’immigration et de citoyenneté et directeur de recherche au CNRS et, accessoirement, ancien membre du PS. On répondra que dans son Histoire, la République a montré à de nombreuses occasions qu’elle n’était pas si indivisible que ça. Ainsi, durant la période coloniale en Algérie, la République ne semblait pas trop inquiète pour son indivisibilité lorsqu’elle accordait des droits différents aux Européens et aux indigènes musulmans. Encore moins lorsqu’elle accorda l’indépendance à l’Algérie, constituée de départements français…

Pour la gauche, l'occasion de repartir en guerre

Mais on l’aura compris, les propos de Darmanin sont pour la gauche l’occasion de repartir en guerre, moins de deux mois après la bataille sur la loi Immigration. Une guerre de postures plus que de positions. Tout était d’ailleurs écrit et la bataille s’est terminée en jus de boudin grâce aux charcutiers du Conseil constitutionnel. Darmanin, qui parle vite et beaucoup, a donc évoqué une révision de la Constitution pour revenir sur le droit du sol à Mayotte. La démarche prospérera-t-elle ? Il faut l’espérer pour les habitants de Mayotte. Là où la gauche a raison, c’est que cette remise en cause du droit du sol dans un département ne peut qu’amener à une réflexion plus large, c’est-à-dire pour l’ensemble du territoire de la République, dans un contexte de non-maîtrise de l’immigration. Mais, entre nous, il ne faut pas trop compter sur Darmanin.

Quoique ! Le 15 mars 2018, celui qui était alors ministre de l’Action et des Comptes publics était face à Jean-Marie Le Pen. Vient la question de Mayotte. Le Menhir dénonce une situation déjà catastrophique à l'époque. Mais cela ne fait que dix mois que nous sommes aux affaires, lui répond Darmanin. Aujourd’hui, cela fait bientôt sept ans qu’ils y sont… Et pas question, à l’époque, de revenir sur le droit du sol, rétorquait-il à Le Pen : « Il n’y a pas deux catégories de territoires », déclarait un Darmanin, très républicain. Si, quand même un peu, non, avec ces tristement célèbres « territoires perdus de la République »...

 

 

 Discours de politique générale de Gabriel Attal :   Vous n’avez rien raté

Source : Bd. Voltaire le 30/01/2024

Ça y est, c’est fait. Gabriel Attal a prononcé son discours de politique générale : cette espèce de grand oral, de figure imposée de notre Ve République qui en a vu d’autres en soixante-cinq ans. Ce matin, en milieu de matinée, l’auteur de ces lignes faisait une petite halte au bistrot du village. Des retraités attendaient sagement l’heure de l’apéro, un plombier faisait une pause avant de retourner sur le chantier ou se prendre la tête avec la paperasse qui s’entasse sur le coin du bureau. Une question traverse alors l’esprit de celui qui va devoir, dans quelques heures, se coltiner le discours du Premier ministre pour préparer cet édito : combien de ces braves gens attendent vraiment quelque chose de cet exercice ? Sans vouloir être irrespectueux envers le Premier ministre, sans doute pas grand monde. Un retraité ou deux, peut-être, qui, dans l’après-midi, hésitent entre une crapette au club des anciens ou une séance de sieste devant La Chaîne parlementaire. On ne vous fera pas ici le catalogue des annonces faites par le chef de gouvernement, ce serait trop fastidieux. On retiendra simplement quelques punchlines, comme on dit aujourd’hui dans cet univers de la com’ qu’est devenu le monde politique.

« Désmicardiser » la France

D’abord, Gabriel Attal veut « désmicardiser » la France. Très bien. La formule restera peut-être, mais comment ne pas voir là le constat d’échec des politiques conduites depuis des décennies en France, et notamment par Emmanuel Macron depuis bientôt sept ans. La France se prolétarise. Alors, Gabriel Attal veut « faire en sorte que ceux qui vont travailler puissent vivre de leur travail ». Fort bien. C’est un peu le principe du travail, « à la base », non ? La semaine dernière, Marie Delarue évoquait le « grand déclassement » des classes moyennes. Ce déclassement est une réalité dont les classes moyennes ont pleinement conscience, puisqu’elles sont majoritairement convaincues que leurs enfants vivront moins bien qu’elles. Mais il n’y a pas que le salaire qui smicardise la France. Aller travailler, cela veut dire se déplacer, souvent loin de chez soi, donc des frais de route, des taxes, etc. Travailler est une chose, mais il faut aussi se loger. L’accroissement des normes, notamment environnementales, aggrave la crise immobilière et se loger décemment va devenir un luxe. Alors, Attal veut créer « un choc d’offre » pour « déverrouiller » le secteur du logement. Cela passera, notamment, par la simplification des normes (la révision des diagnostics de performance énergétique). À suivre.

Agriculture : Des preuves d'amour ?

Mais c’est sur la crise agricole qu’on attendait Gabriel Attal. Une belle déclaration d’amour pour « nos agriculteurs, nos pêcheurs, qui travaillent matin, midi et soir pour nous nourrir », notre agriculture qui « est notre force et notre fierté aussi ». Ce n’est pas du Sully, mais c’est pas mal. Mais nos pêcheurs et agriculteurs resteront sans doute sur leur faim pour les preuves d’amour. La suppression de dix normes françaises suffira-t-elle ? Car Gabriel Attal sait très bien que la solution n’est qu’en partie en France, que les leviers sont à Bruxelles. Alors, certes, c’est beau d’entendre un Premier ministre déclarer : « Je le dis ici solennellement, il doit y avoir une exception agricole française. » On connaissait l’exception culturelle française, jolie façon de dire « préférence nationale » ; on aura donc l’exception agricole française. Comment traduit-on ça en langage technocratique de Bruxelles ? On demande à voir ce qu'Emmanuel Macron obtiendra...

L'identité, maintenant

Pour finir, on saluera le clin d’œil appuyé à droite de Gabriel Attal : « Dans un monde où tout s'accélère et se transforme, je refuse que notre identité puisse se diluer ou se dissoudre. » On applaudit. Mais l’identité de la France (si c'est bien de celle-ci qu'il a voulu parler), c’est quoi, au juste, pour Gabriel Attal ? Après la dévitalisation d’une loi Immigration qui n’était pourtant pas bien méchante, dévitalisation dont se réjouissent Emmanuel Macron et son gouvernement, que compte faire le Premier ministre pour que cette identité ne se dilue pas dans le grand tout ? Quand on voit que dans le même discours, il a annoncé qu’il compte traiter la question de l’AME par voie réglementaire, donc en contournant le Parlement, on comprend qu’on n’est peut-être pas à la hauteur des enjeux et qu'on va continuer comme avant.

En attendant, les retraités sont retournés à la crapette ou sont passés sur une autre chaîne. Demain matin, le plombier râlera toujours autant au coin du zinc.

 

[EDITO] Gabriel Attal : Taper sur le cul des vaches suffira-t-il ?

 

 Source : BdVoltaire - Le 28/01/2024.

 

 

La semaine qui vient s’annonce cruciale pour Gabriel Attal. Vous me direz qu’au rythme où vont les choses, des semaines cruciales, il y en a pratiquement tous les jours ! Mais quand même. On saura très vite si le fringant et nouveau chef de gouvernement est un laboureur de fond ou un simple butineur. En effet, mardi, il prononcera son discours de politique générale devant l’Assemblée nationale. Trois semaines après sa nomination à Matignon. Autrement dit, une éternité… au rythme où vont les choses ! Entre-temps, Emmanuel Macron lui a coupé l’herbe sous le pied avec sa conférence de presse du 16 janvier et les agriculteurs ont déversé des tonnes de lisier devant les grilles des préfectures. Sans parler d’une loi Immigration effeuillée ou - si vous préférez être moins bucolique et plus charcuterie - désossée par les « sages » du Conseil constitutionnel.

Gabriel Attal face aux « injonctions contradictoires »

Certes, vendredi dernier, Gabriel Attal a fait fort. En tout cas, a minima, sous l’angle de la com’. Frédéric Sirgant a démontré toutes les limites de ce bel exercice champêtre. Et la menace d’un « siège » de la capitale, ce lundi 29 janvier, par la FNSEA et les Jeunes Agriculteurs confirme ces limites. La preuve : ce dimanche, Gabriel Attal a dû se rendre, une fois de plus, sur le terrain, cette fois-ci en Touraine, pour faire de nouvelles annonces. Il envisagerait des mesures « supplémentaires » au niveau national et européen pour protéger nos agriculteurs de la concurrence déloyale. Nous y voilà. « Je veux qu'on clarifie les choses et qu'on voie les mesures que l'on peut prendre, supplémentaires, sur ces histoires de concurrence déloyale », a-t-il déclaré. Les choses étaient pourtant claires depuis longtemps, semble-t-il. Des années, en effet, que les agriculteurs se plaignent de cette concurrence déloyale. Le Premier ministre, ce dimanche, a évoqué « les injonctions contradictoires », ajoutant : « On ne sait plus où on va. » On lui répondra que si, on sait où on va. Au rythme où vont les choses, dans le mur. Mais comment ne pas s’étonner, s’indigner même, justement, de ces « injonctions contradictoires ». Un exemple très concret : les accords de libre-échange entre l’Union européenne et plusieurs pays, grands producteurs agricoles. C’est vrai – et Gabriel Attal l’a rappelé aux agriculteurs -, la France, par la voix d’Emmanuel Macron, s’oppose à la signature de l’accord commercial entre l’Union européenne et les pays d’Amérique latine du Mercosur (Brésil, Argentine, Paraguay, Uruguay). Bientôt vingt-cinq ans que ce projet est en discussion ! En décembre dernier, le président de la République, alors à Dubaï, avait déclaré : « Je ne peux pas demander à nos agriculteurs et à nos industriels […] d’œuvrer à la décarbonation de leurs activités et, dans le même temps, supprimer les droits de douane sur des biens qui ne respecteraient pas ces règles. » Très bien. Et, pratiquement dans le même temps, plus exactement deux semaines avant cette déclaration, le Parlement européen votait à une très large majorité, comme le rappelait ici même Nicolas Gauthier, la ratification du traité de libre-échange entre l’Union et la Nouvelle-Zélande. Et, la semaine dernière, la commission du commerce international au Parlement européen a approuvé l’accord de libre-échange avec le Chili. Il est vrai que le Chili ne fait pas partie du Mercosur. Il n’est que pays associé... Inutile de préciser que les députés macronistes siégeant dans le groupe Renew Europe à Strasbourg ont voté des deux mains la ratification de ces accords. Comprenne qui pourra.

Comment Gabriel Attal se sortira-t-il des ronces de ces « injonctions contradictoires » ? Pas certain que taper sur le cul des vaches suffira. On se souvient de François Hollande, en 2012 à Florange, huché sur un camion pour promettre, en pleine campagne présidentielle, de défendre l’acier français. Aujourd'hui, Attal est aussi en campagne (élections européennes) et c’est devant une botte de paille qu’il a promis de sauver notre agriculture. La paille dont on fait les feux ou qui cache la poutre ?

 

 

 

 Bien sûr, le Conseil constitutionnel ne fait pas de politique

 

Invitée, sur le plateau de CNews, au lendemain de la décision du Conseil constitutionnel sur la loi Immigration, Maud Bregeon, députée des Hauts-de-Seine, en bon petit soldat de la Macronie, affirme comme une vérité indiscutable : « Le Conseil constitutionnel ne fait pas de politique. » Il fait quoi, alors, du tricot ? Non, mais, à l’évidence, du détricotage.

 

 

Entre gouvernement et Conseil constitutionnel, il n'y a plus rien

Darmanin a beau fanfaronner en insistant, avec la finesse qu’on lui connaît, sur le fait que le texte qui ressort de la rue Montpensier est « l’intégralité du texte du gouvernement », la loi votée par une majorité de députés (dont, faut-il le rappeler, l’écrasante majorité des députés de la majorité présidentielle) ressemble désormais plus à une serpillière qu’à un gilet (on renvoie nos lecteurs au film Le père Noël est une ordure…). Au passage, le ministre de l’Intérieur saisit-il toute l’incongruité de ses propos ? Que doit-on comprendre, en creux ? Que la représentation nationale compte pour du beurre, qu’entre gouvernement et Conseil constitutionnel, il n’y a plus rien, du moins pas grand-chose. En effet, le gouvernement présente un texte au Parlement. L’Assemblée nationale rejette le texte du gouvernement à la surprise générale, puis vote un texte largement modifié après un passage en commission mixte paritaire et, au final - pirouette, cacahuète -, c’est le texte gouvernemental qui sort du chapeau. Ce n’est pas du détricotage, c’est de la prestidigitation. On dit chapeau, l’artiste !

Mais, on est bien d’accord, « le Conseil constitutionnel ne fait pas de politique ». Sur les neuf membres de cette institution, on compte tout de même quatre anciens ministres, dont deux ex-Premiers, et un ancien sénateur. On imagine qu’après plus de quarante ans de vie politique, sans pratiquement aucune interruption dans le cursus honorum, un Laurent Fabius ou un Alain Juppé ont pu laisser, comme ça, du jour au lendemain, au vestiaire du Conseil constitutionnel, leurs oripeaux et cerveaux de politicien pour se draper dans la toge impeccable du juge constitutionnel. Que l’homme de l’« identité heureuse », regrettant trente ans après ses propos au bon temps du RPR qui fleureraient bon aujourd’hui leurs relents d’extrême droite, a fait abstraction de toute idéologie pour faire une lecture strictement juridique du texte de loi. Oui.

D’ailleurs, « qui siège au Conseil constitutionnel ? », demande la députée macroniste Maud Bregeon. Réponse de la même députée : « Des femmes et des hommes de grande qualité, qui viennent de la gauche, qui viennent de la droite. » C'est bien la preuve. « On parle de Laurent Fabius, on pourrait parler d’Alain Juppé, qui jugent en droit », nous dit la dame. Pas de n'importe qui, hein ! Des personnes connues et reconnues. Incontestables. Qui jugent en droit, peut-être, mais qui, sans doute, ne vont pas déjuger la politique qu’ils ont menée à tour de rôle en matière d’immigration pendant quarante ans. Donc, circulez, il n’y a rien à voir.

Nous n’avons pas la prétention d’avoir la science de ces « juges », mais avouons tout de même notre étonnement. En effet, plus du tiers des articles ont été jugés comme étant des « cavaliers législatifs », c'est-à-dire sans rapport avec la loi initiale. D'où censure. Or, ce même Conseil constitutionnel, l’an passé, lorsqu’il avait eu à se prononcer sur la constitutionnalité de la loi sur la réforme des retraites, n’avait rien eu à redire sur le fait que pour porter cette réforme importante, le gouvernement avait utilisé une loi de financement rectificative de la Sécurité sociale. Un véhicule législatif considéré à l’époque par certains spécialistes de droit constitutionnel comme plutôt... cavalier. Mais à part ça, « le Conseil constitutionnel ne fait pas de politique ».

 

 

Conférence de presse de Macron : "On ne doit pas vivre dans le même pays"

Source : Bd. Voltaire - Le 16/01/2024. 

 On le savait déjà, mais c’est toujours bien d’avoir la confirmation : Emmanuel Macron est Premier ministre. Alors que Gabriel Attal n’est pas encore monté à la tribune de l’Assemblée nationale pour prononcer son discours de politique générale, le président de la République lui a grillé la priorité en donnant une conférence de presse-fleuve ce mardi 16 janvier. Une récidive : il avait fait à peu près le même coup à Édouard Philippe le 3 juillet 2017 en prononçant un discours devant le Parlement réuni en congrès à Versailles, tout juste la veille du discours de politique générale du Premier ministre.

« D’où nous venons, où nous allons », déclare-t-il pour introduire l’exercice. Allons droit au but, au bout de cette très longue conférence de presse, on ne le sait toujours pas. Durant plus d’une demi-heure, le chef de l’État nous a d'abord délivré un discours liminaire censé nous tracer une perspective pour les trois ans qui viennent, une vision pour notre pays, comme on dit, un truc qui fasse « Waouh », nous transporte au septième ciel. Mais non, au lieu de ça, nous avons eu droit à des préliminaires fastidieux emplis de détails laissant finalement peu d’espace au discours de politique générale du Premier ministre.

Une conférence de presse, une tisane et au lit

Un mot, peut-être, sur l’heure choisie pour l’administration de ce pensum : 20 h15, c’est-à-dire l’heure du JT, une tisane et au lit. Evidemment, la cible visée était celle de son électorat de prédilection, les séniors, ceux qui iront voter à coup sûr le 9 juin prochain. Du reste, lorsque est abordée plus tard, la question si centrale du Rassemblement national par Benjamin Duhamel, que dit le Président, en gros (nous citons de mémoire) ? Le RN, c’est le contraire de l’Europe des vaccins, avec les populistes en Europe, nous n'aurions pas eu les vaccins. Si vous voyez ce que je veux dire. Et puis, une conférence de presse à l’ancienne, avec les ministres en rangs d’oignons qui luttent pour ne pas s’endormir, ça rappelle le bon vieux temps du Grand Charles quand est-ce qu’on étaient jeunes. D’ailleurs, le symbole de la République avec la Croix de Lorraine est ostensiblement projeté au-dessus de l’estrade présidentielle. Un détail ? Pas tant que ça.

Macron, ministre de l'Education nationale 

Emmanuel Macron est Premier ministre, mais il est aussi ministre de l’Éducation nationale. Un long passage sur ce sujet. On ne peut que s’en réjouir après les zigzags qui nous ont baladés de Blanquer à Attal en passant par Ndiaye. Il est vrai que les ministres ne comptent pas beaucoup pour Macron. La preuve, lorsque interrogé plus loin sur la valse des ministres de la Santé (six ministres en six ans, sans compter l’intérimaire Le Bodo), il aura cette réponse magique : « Les ministres, c’est la vie politique ! »

L’éducation, donc. Macron veut « un choc des savoirs ». Très bien. « On va revoir tout ça ». On dirait qu’il est arrivé à l’Élysée avant-hier. « Une instruction civique refondée ». Refondée, c’est-à-dire ? L’idée : « faire des républicains ». Elle ne lui a pas dit, Brigitte, que le verbe « faire » n’est pas joli et qu’on enseignait autrefois aux écoliers de toujours chercher à remplacer ce verbe par un autre plus riche ? Et puis, il entre, non pas dans les détails, puisqu’il laisse ça à son gouvernement, mais quand même, il nous donne presque le programme : désormais, le théâtre sera un « passage obligé » à l’école. Là, tout de suite, on comprend à quoi sert Brigitte à l’Élysée. Un petit coup de focus sur l’uniforme : d’abord, on ne dit pas « uniforme » mais « tenue unique ». Ensuite, on testera mais avec les établissement volontaires. Pourquoi pas.

Un grand moment de cette longue introduction aura tout de même été le couplet sur la natalité. Là, on se dit, avec le soi-disant virage à droite, qu’il va nous parler de familles nombreuses, d’allocations familiales, de bonification de points de retraite, de quotient familial, que sais-je. Vous rigolez, faudrait surtout pas que les féministes crient au retour de Pétain ! Non, on va lutter contre l’infertilité. Cela est sans doute juste et bon mais avouons que c’est un peu court pour freiner notre dégringolade démographique. Manquait seulement un couplet sur le danger des jeans trop serrés. Tiens, au fait, puisqu’on y est : interrogé sur la question du passage de la franchise médicale de 50 centimes à 1 euro, Macron justifie cette mesure sur la nécessité de responsabiliser les assurés sociaux. Très bien. Le même qui, l'an passé, annonçait solennellement la gratuité des préservatifs pour les moins de 18 ans. Responsabiliser qu'il disait…

Les émeutes ? Ces petits s'ennuyaient

Là où on a bien compris qu’on ne devait pas habiter le même pays, c’est lorsque prit fin ce propos liminaire. Pas un mot sur l’immigration. Si, très indirectement : « Mieux contrôler nos frontières ». D'accord. L’insécurité  qui explose ? Rien. Le communautarisme, le séparatisme, comme il dit : rien. Si, lorsque le journaliste du Figaro Louis Hausalter aborda la question des émeutes de l’été dernier. Une conséquence de l'immigration ? Pas du tout. Tout juste, concède-t-il un léger problème d'intégration. D'ailleurs, la plupart des émeutiers étaient de nationalité française. Darmanin a bien fait son rapport. Non, le problème, c’est l’oisiveté. Ces gamins auraient eu école, on n’aurait pas eu ces émeutes. « Ils s’ennuyaient », nous explique-t-il. Et les réseaux sociaux, bien sûr. « La télé ! », disait Madame Mado dans Les Tontons flingueurs. On va s’arrêter là, la coupe et pleine et il se fait tard !

 2023 : L’année du garçon de bain ou du petit baigneur?

Source : Bd. Voltaire - Le 26/12/2023.

Entre Noël et jour de l’An, c’est l’heure du bilan et, comme souvent, c’est la dernière impression qui compte. Et il faut avouer que les propos d’Emmanuel Macron sur le plateau d'Élisabeth Lemoine, au lendemain du vote de la loi Immigration, donne le la de cette année 2023. « Une manœuvre de garçon de bain » : c’est ainsi qu’est qualifié, par le garant de nos institutions, le vote du Rassemblement national pour le projet de loi Immigration, que du reste le gouvernement aurait très bien pu retirer de l’ordre du jour de l’Assemblée nationale. Faut avouer que c’était drôlement gonflé, comme un Zodiac™ prêt à prendre la mer, de la part de celui qui fait du cabotage, depuis qu’il en a été réduit à abandonner le paquebot confortable de la majorité absolue pour le frêle esquif d’une majorité relative, soumise aux vents contraires et obligée d’aller de Charybde en Scylla (nous renvoyons nos chers lecteurs à nos non moins chères pages roses du dictionnaire).

2023, l'année des émeutes

En 2016, lorsqu’enfin Emmanuel Macron vint, on nous avait promis une sorte de nouveau Grand Timonier qui allait conduire notre pays vers de nouveaux horizons dont on n’avait même pas idée. Le capitaine au long cour s’avéra, finalement, comme une sorte de marin d’eau douce, cabotant et cabotinant, cahin-caha, au gré des vents. En 2023, il (lui, le Président) nous avait promis une sorte de nouvel élan, après le vote aux forceps de la loi sur la réforme des retraitesIl se donna cent jours. Mais qui avait donc pu lui souffler cette idée à la coque de noix ? Les Cent Jours… Franchement ! On est consterné par tant d’inculture historique. En guise de nouvel horizon, 2023 aura finalement été l’année des émeutes qui enflammèrent le pays : pas seulement les « quartiers », les « cités », mais aussi des petites villes de notre France péri-urbaine dont « tout le monde » (celui qui vit à l’intérieur du périphérique) se fiche comme de son dernier costume slim. 2023 aura donc été l’année où, parce qu’un petit voyou avait fait un refus d’obtempérer et avait été abattu par un policier dans des circonstances qu’il reste à définir, des mairies, des écoles, des bibliothèques auront été saccagées, vandalisées, brûlées. Tournez ça comme vous voulez, c’est la France de Macron !

Bardella, l'invité de Saint-Denis

Mais un clou chassant l’autre, on passa vite à autre chose. Jusqu’à la prochaine fois. C’est le principe même du cabotage. Notre petit baigneur nous promit alors, au cœur de l’été, une « initiative politique d’ampleur ». On allait voir ce qu’on allait voir à la rentrée. En attendant, salut les filles et bonnes vacances ! Ce furent les Rencontres de Saint-Denis. Une sorte de conclave organisé à la fin de l’été, à l’ombre de la nécropole de nos rois qui firent la France, auquel étaient invités les chefs des partis représentés au Parlement. Si l’on devait retenir un seul fait saillant de cette machine à fabriquer du temps perdu, c’est incontestablement l’émergence de Jordan Bardella, s’imposant comme un interlocuteur crédible et incontournable face à un Président baratineur et pagayant à contre-courant. Impression confirmée par le renouvellement de ces rencontres en novembre, auxquelles les LR décidèrent de ne pas se joindre, ces mêmes LR avec qui, quelques semaines plus tard, le Premier ministre devait discuter en boucle courte lors du vote de la loi Immigration. « Va comprendre, Charles ! », comme disait le regretté André Pousse au non moins regretté Guy Marchand.

Loi Immigration : brasse coulée ?

Et puis, vint le 7 octobre. Un conflit séculaire, se déroulant loin de chez nous, vint percuter de plein fouet la barcasse macronienne. Toutes ses paroles comme ses « initiatives » firent « flop » : sa proposition de coalition internationale contre le Hamas, son idée de conférence humanitaire pour Gaza, comme sa tournée proche-orientale. Jamais la sentence de Francis Blanche dans Les Tontons flingueurs ne se sera autant appliquée à notre capitaine : « C’est curieux, chez les marins, ce besoin de faire des phrases. » On en rigolerait s’il ne s’agissait de la France. Un conflit qui s’invita dans notre France largement islamisée : le terrible assassinat d’un professeur, Dominique Bernard, par un islamiste qui a toute sa place dans notre pays, si l’on en croit les bonnes âmes qui s’opposeront, bec et ongles, quelques semaines plus tard, à la loi Immigration. Et puis, enfin, cette loi vint. Le petit baigneur envoya alors au plongeoir son surveillant de baignade en chef, Gérald Darmanin, coiffé de son petit bonnet réversible (« gentil pour les gentils, méchant pour les méchants »). Un plat magistral, appelé « motion de rejet », une nage à l’indienne ou en crabe quelque peu approximative et laborieuse à l'occasion du vote après le passage en commission mixte paritaire. Brasse coulée pour une Macronie déboussolée ? Les garçons de bain se posent encore la question dans les vestiaires. En attendant 2024, année olympique...

 

Loi Immigration : ça se complique pour Darmanin !

Source : Bd. Voltaire - Le 05/12/2023.

 

« Pour ce qui est du jour ou de l’heure, personne ne le sait ». Cette phrase tirée de l’Evangile s’applique malheureusement aux attentats islamistes qui frappent notre pays depuis des années et des années. Et l’on pourrait ajouter, « pour ce qui est du lieu, personne ne le sait non plus ». Qui aurait imaginé en effet qu’une commune comme Trèbes, moins de cinq mille habitants, comme il y en a des milliers en France, serait le théâtre du drame que l’on sait en 2018 ? Les attentats, jadis, c’était à Paris, pas dans la France périphérique. On sait que cela peut aussi frapper n’importe où, et donc, encore et toujours, à Paris, comme dimanche au pont de Bir-Hakeim. Et n’importe quand.

 

 

Un attentat qui tombe mal pour Darmanin

Et cet attentat, pour Gérald Darmanin, tombe plus mal que jamais. Qu’on ne se méprenne pas sur nos propos : nous ne voulons pas dire que parfois cela peut bien tomber comme l'insinua en 2021 Jean-Luc Mélenchon, évoquant les attentats de Toulouse à quelques jours de l’élection présidentielle de 2012. Mais il faut bien reconnaître qu’à quelques mois des Jeux olympiques alors qu’on s’interroge sur cette « folie » que serait la cérémonie d’ouverture, si l’on en croit l’avocat Thibault de Montbrial, invité de BV, il y a deux semaines, on est en droit de se poser quelques questions. Le déploiement de milliers de policiers, gendarmes, militaires, les restrictions de déplacements à coups de QR codes, suffiront-ils face à l’action, ne serait-ce que d’un fou, puisque maintenant il est convenu que nous avons affaire à des psychopathes et que ce serait un peu la faute aux psychiatres, pour faire court, s’il y a des attentats ?

Une loi Immigration détricotée, souligne le RN

Mais cet attentat tombe d'autant plus mal que s’ouvre le débat à l’Assemblée nationale sur une xième loi sur l’immigration. Mais que dites-vous donc là ? Le terrorisme islamiste n’a rien à voir avec l’immigration, clame la gauche, depuis toujours, certes de moins en moins fort. Un peu quand même, non ? La preuve en est : Darmanin lui-même qui déclare que « si nous avons moins de délinquants étrangers à suivre sur notre territoire, nous pourrons concentrer nos efforts ailleurs ». Darmanin ventriloque de Marine Le Pen qui s’époumone depuis des années à le dire et répéter… Comme quoi, ça doit finir par infuser. Darmanin, qui aurait pu vendre des cravates vertes à rayures mauves sur les marchés, si la politique ne l’avait pas biberonné jeune, est passé maître dans l’art de nous faire prendre des vessies pour des lanternes : « Je veux dire l’importance de voter la loi immigration. Il y a une responsabilité immense de ceux qui, s’ils votaient contre pour empêcher son adoption, nous empêcheraient d’expulser des délinquants étrangers radicalisés ou de droit commun ». Alors que, comme l’expliquait au micro de BV, samedi dernier, la députée RN Edwige Diaz, le projet de loi durci au Sénat a été détricoté en commission des Lois à l’Assemblée. Le RN votera contre, on le sait.

Les LR à l'offensive. Jusqu'où ?

Reste le cas des LR. Et c’est sur eux que Darmanin met la pression en leur faisant le chantage du procès en irresponsabilité. La honte pour un parti labellisé « parti de gouvernement » ! Des LR qui ont compris que la meilleure défense est l'attaque et qui vont poser deux actes forts à l’occasion de leur niche parlementaire de ce jeudi 7 décembre : la dénonciation de l’accord franco-algérien de 1968, comme le préconisait ici même Xavier Driancourt, ancien ambassadeur de France en Algérie, et la proposition d’une loi constitutionnelle qui permettrait d’en appeler au peuple par référendum sur la question de l'immigration. Cela dit, le Rassemblement national ne dit pas autre chose depuis des mois. La gauche sera sans doute vent debout et la Macronie ratiocinera comme elle sait si bien faire. Si ces deux propositions de loi ne prospèrent pas, les LR iront-ils jusqu’à faire chuter le gouvernement, lorsqu’il faudra en passer par le 49.3 pour faire adopter cette loi Immigration ? Qu’on nous permette d’en douter. Un tout petit peu.

Quoiqu’il en soit, les Français ont bien compris le lien étroit entre immigration, islamisme et terrorisme islamiste et ce n’est sans doute pas à travers le vote d’une loi à « caractère administratif », faite de mesurettes, qu’on créera les conditions d’un sursaut avant qu’il ne soit vraiment trop tard.

 

Crépol : Ils savaient

 

Ils savaient. Ils savent. Ils savent même très bien. Ils ? Les « celles et ceux » qui nous gouvernent. Qui nous gouvernent depuis plus de quarante ans, aux doux accents de la social-démocratie ou de la démocratie libérale, interchangeables qu’ils et qu'elles sont. C’est la première réflexion qui nous vient à l’esprit, lorsqu’on lit ceci : « Ils sont français, mais pas un seul n’a un nom à consonance française, confie, après coup, ce ministre, en soupirant. Vous verrez ce que ça suscitera dans le pays… Cette affaire traumatise légitimement nos compatriotes. Il faut remettre des règles et de l’ordre, sinon le pays partira à vau-l’eau. » Cela est tiré du Figaro : des propos rapportés par le journaliste Louis Haushalter. « Ils » ? Pour le coup, pas les « celles et ceux » qui nous gouvernent mais les suspects de la razzia meurtrière de Crépol. En marge du Conseil des ministres, nous raconte le quotidien, le ministre de l’Intérieur montre cette liste à l’un de ses collègues qui aurait donc eu cette réaction. Une réaction qui dit tout, révèle tout, résume tout.

Une réaction qui dit la réalité que l’on devine depuis des jours à travers les non-dits, les mal-dits, les trop-dits. Un procureur, aux ordres de la Chancellerie, rappelons-le, obligé de préciser que le principal suspect serait de nationalité française, né de mère française. Pourquoi, aujourd’hui, en France, est-il nécessaire d’apporter d’emblée cette précision ? Du reste, une précision bien maladroite : et le père, du coup, de quelle nationalité est-il ? Des non-dits, mal-dits ou trop-dits qui en disent long. Parce que les Français savent très bien lire entre les lignes : ils ont le décodeur. Si ces suspects avaient été des jeunes issus de la mouvance d’extrême droite, comme on dit, si l’un d’eux avait été le cousin issu de germain par alliance d’un candidat FN en 1985 à une élection cantonale dans la Creuse, pas de doute qu’on ne se serait pas gêné pour nous révéler ce scoop avec, en sus, son prénom et, pourquoi pas, sa généalogie depuis Louis XIV.

La prédiction de Gérard Collomb

Une réaction qui révèle que le pouvoir sait et qu’il a peur. Qu’il a peur que la prédiction de Gérard Collomb se réalise. Ou, plutôt, que cela aille bien au-delà de la prédiction. Jusqu’à maintenant, cette « France des territoires » n’a pas provoqué d’émeutes, n’a pas trouvé son Assa Traoré. Il y a bien eu les gilets jaunes, dont on « fêtait », la semaine dernière, le cinquième anniversaire. Les gueux s’étaient levés contre le coût du carburant et cette dîme des temps modernes qui consiste à payer, à travers des taxes, le droit d’aller travailler à une demi-heure, voire plus, de chez soi. Le sinistre Castaner avait réprimé tout ça comme il se devait et Macron avait terminé le travail à travers une grande séance d’anesthésie collective baptisée « Grand débat national ». Mais cette France ne brûle pas de bagnoles, ne se victimise pas et rentre sagement chez elle après la marche blanche. Jusqu’à quand ? C’est bien là, la grande peur du gouvernement : « Vous verrez ce que ça suscitera dans le pays… », confesse ce ministre. Et puis, en juin prochain, il y a les élections européennes. Si vous voyez ce que je veux dire…

Une réaction qui résume tout. L’échec, le gâchis, le désastre, après des décennies de politiques de la ville, de plans ci, de plans ça, de lutte contre un racisme plus ou moins fantasmé, de politique de l’excuse. Tout ça résumé dans la pitoyable intervention d’Élisabeth Borne, ancienne directrice de cabinet de Ségolène Royal, mercredi au Sénat, nous resservant l’éternelle rengaine que l’on connaît par cœur : « Ce moment appelle à la retenue et à la décence. Utiliser ce drame pour jouer sur les peurs, c’est manquer de dignité et de respect pour les victimes. » L’idée, on l’a bien compris : tout finit par se savoir et « cela » va donc se savoir. Alors, gagnons du temps. Glissons sur l’émotion du moment. Demain sera un autre jour et les Français, vous savez, ont la mémoire courte. Regardez comment ils ont été « résilients » (le grand mot à la mode, depuis une décennie) face aux attentats islamistes. Alors, une « rixe » en marge d’un bal de village, vous pensez-bien… Jusqu'à quand ?

Droit à l’avortement dans la Constitution :

ça pressait vraiment ?

Source : Bd. Voltaire - Le 31/10/2023.

Mais à quoi joue donc Emmanuel Macron ? La guerre fait rage entre Israël et le Hamas, les risques d’une régionalisation du conflit, voire d’une guerre mondiale, ne sont pas à exclure, la menace de nouveaux actes terroristes islamistes sur notre territoire est au plus haut. Sur le front socio-économique, l’inflation fait des ravages chez les ménages modestes qui n’arrivent plus à joindre les deux bouts et continue d’essorer les classes moyennes. La vague Lampedusa va bientôt irriguer nos villages, etc. Mais l’on apprend, un beau dimanche matin, que le président de la République a décidé de déposer en Conseil d’État un projet de loi pour constitutionnaliser le droit à l’avortement. Il n’y avait donc rien de plus urgent ? Le monde peut s’effondrer, le chaos s’installer à tous les étages de notre société, mais vite, sans plus attendre, car ça presse, constitutionnalisons ce qui est désormais considéré comme un droit fondamental.

Constitutionnalisons, on ne sait jamais...

C’est quoi, l’idée ? Il y a un risque que ce droit soit remis en cause ? Pas du tout, mais on ne sait jamais. Faute de pouvoir peser sur le cours des choses dans le monde – on ne peut pas dire que la tournée moyen-orientale d'Emmanuel Macron ait été un triomphe romain -, le chef de l'État se raccroche aux branches du sociétal. Oui, mais on ne badine pas avec les grands principes, les droits fondamentaux, d’autant – c’est bien connu – que la France est un phare pour l’humanité ! Quelques États américains, dont on a déjà oublié les noms, remettent en cause ce droit à l’IVG, alors la France se doit de montrer l’exemple.

Pourtant, l’évidence crève les yeux : il n’y a aucune chance que ce droit soit remis en cause - on peut le déplorer ou pas, c'est ainsi - par une quelconque majorité de circonstance. Mais on ne sait jamais… Tiens, justement, penchons-nous sur ce « on ne sait jamais ». Ça veut dire quoi, en fait ? Que les lois seraient gravées sur des tables de marbre pour l’éternité, comme une sorte de Décalogue républicain ? Que le peuple français dans dix, trente, cinquante ans ou plus serait lié par des lois prises par les représentants de leurs parents, grands-parents, arrière-grands-parents ? Et si dans dix, trente, cinquante ans ou plus - hypothèse d’école tout à fait théorique, étant donné l’évolution de notre société -, il prenait l’envie au peuple français, par la voix de ses représentants, de remettre en cause cette loi ? Donc, dès aujourd’hui, mettons tout en place pour réduire ce risque au maximum. C’est ce qu’on doit appeler l’État de droit, notion qui, au final, revient à dire que le peuple ne peut pas faire sa loi comme il le souhaite.

Constitution fourre-tout

Passons sur la transformation de notre Constitution en texte fourre-tout où l’on inscrit, désormais, des principes qui vont bien au-delà de ce que devrait être une Constitution (pensons au principe de précaution inscrit dans la Charte de l'environnement, elle même intégrée dans la Constitution), c’est-à-dire un texte fondamental régissant schématiquement le fonctionnement des grandes institutions de la République entre elles : pouvoir exécutif, pouvoir législatif, autorité judiciaire. Si ce projet de loi constitutionnelle va à son terme (pardons pour l’expression plutôt mal appropriée), ce sera la vingt-cinquième modification de notre Constitution depuis son entrée en vigueur, il y a bientôt 65 ans. Autant dire qu’on est loin du texte et sans doute de l’esprit du texte de 1958, rédigé par Michel Debré. Que dirait, d’ailleurs, ce dernier, grand défenseur de la natalité française, s’il voyait son « bébé » ériger le droit à l’avortement en droit fondamental ?

Pas de référendum sur l'immigration mais...

Emmanuel Macron aura probablement sa réforme constitutionnelle. Les Présidents veulent tous la leur. Sauf Hollande qui n'en fit pas : c'est peut-être là son œuvre majeure ! La Macronie votera comme un seul homme. La gauche aussi, à qui Macron veut sans doute faire un petit geste commercial alors que se profile une loi Immigration qui la hérisse. La droite et l’extrême droite seront sans doute divisées mais, globalement, ça devrait passer crème avec les abstentions. Belle opération en perspective. On ne fera pas de référendum sur l’immigration qui, pourtant, menace gravement, réellement, l’identité de la France, mais on réformera la Constitution pour se protéger d'un risque plus que chimérique. En 2022, 234.000 avortements ont été enregistrés en France. Un chiffre en augmentation, le plus haut depuis... 1990. Au fait, y a-t-il encore des gens pour croire qu’Emmanuel Macron est de droite ?

Lire aussi : La natalité s’effondre, Macron sanctuarise l’avortement

Le Conseil constitutionnel au secours de Fillon et Sarkozy

Source : Bd. Voltaire - Le 30/09/2023.

Énième rebondissement dans les affaires Fillon et Sarkozy ? Le Conseil constitutionnel a déclaré inconstitutionnel un article du Code de procédure pénale ayant trait au régime des nullités de procédures. Cette décision fait suite au dépôt d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) déposée par les avocats des deux personnages, condamnés tous deux en appel, l’un pour son affaire d’emplois fictifs, l’autre pour ce que la presse a baptisé « l’affaire Bismuth ». Suite à cette QPC, le Conseil constitutionnel a donc rendu son jugement dans la séance du jeudi 28 septembre où siégeaient, notamment, Laurent Fabius (président), les anciens ministres Jacqueline Gourault et Jacques Mézard : pour être objectif, pas vraiment des fillonistes ou des sarkozystes de la première heure, ni même de la dernière ! On ne vous détaillera pas les arguments juridiques avancés par les avocats de Fillon et de Sarkozy, ni les attendus du jugement, mais, pour résumer, cet article d’une loi qui ne date pas de Napoléon mais du 15 juin 2000 méconnaît les droits fondamentaux de la défense. Il était temps de s’en rendre compte ! En effet, l’article invalidé interdisait au prévenu d’invoquer devant le tribunal correctionnel, une fois l’instruction close, un vice de procédure constaté durant l’instruction, vice de procédure qui pourrait conduire à l’annulation de ladite instruction. Et donc ?

Et donc, il se trouve que François Fillon et Nicolas Sarkozy estiment avoir eu connaissance d’éléments de nature à invoquer le vice de procédure, mais après la clôture de l’instruction de leur dossier. Il s’agit, pour l’ancien Premier ministre, des déclarations de l’ancien procureur de la République financier, Éliane Houlette. Auditionnée le 10 juin 2020 à l’Assemblée nationale par la commission d’enquête sur les obstacles à l’indépendance judiciaire, l’ancienne magistrate avait évoqué une « pression très lourde » exercée par le parquet général au moment le plus chaud de l’affaire Fillon, c’est-à-dire en pleine campagne présidentielle. Des pressions, non pas pour orienter l’enquête, mais pour faire remonter rapidement les informations. Nuance importante, certes, mais dans le contexte politique du moment, cela pouvait avoir son importance. De plus, l’ancienne patronne du PNF avait carrément parlé de demandes d’« un degré de précision ahurissante ». Ce souci du détail… Concernant Nicolas Sarkozy, le vice de procédure résiderait dans une enquête parallèle menée par le PNF dans « l’affaire des écoutes ».

Et donc, encore ? Bien évidemment, cette décision des sages n’annule pas les condamnations de Fillon et Sarkozy. L’avocat de l’ancien président de la République, Me Spinosi, crie victoire : « Pour Nicolas Sarkozy, c’est une grande victoire, un camouflet à la cour d’appel qui a appliqué une loi qui est anticonstitutionnelle. » Argument, il faut bien l’avouer, un peu spécieux. Faudra-t-il, désormais, que les cours d’appel saisissent le Conseil constitutionnel avant d’appliquer une loi pour s’assurer de sa constitutionnalité ? On n’est pas sorti des ronces… Mettons cela sur le coup de l’émotion ! En tout état de cause, après cette décision du Conseil constitutionnel, la Cour de cassation pourrait bien avoir à ordonner un nouveau procès pour François Fillon et Nicolas Sarkozy qui, après tout, sont des justiciables comme les autres.

Quelle aurait été l’issue de l’élection présidentielle de 2017 s’il n’y avait pas eu cet empressement zélé de la Justice à s’emparer de l’affaire Fillon ? Le 13 septembre dernier, le successeur de Mme Houlette au PNF, Jean-François Bohnert, était reçu à la matinale de RTL. Interrogé, à la fin de l’interview, sur les enquêtes menées actuellement par le PNF autour du comité d’organisation des Jeux olympiques de 2024, notamment pour des soupçons de prise illégales d’intérêts et de l’éventualité de gardes à vue durant les Jeux qui « feraient mauvais genre », selon la journaliste, le magistrat, sur un ton bonhomme, a eu cette réponse : « Notre objectif, c’est de permettre un déroulement serein d’une activité qui va être un événement planétaire, une fête universelle. Il ne nous appartient pas de venir déranger cet ordre-là… » C’est vrai, ça, une élection présidentielle, ça peut se saboter, mais pas les Jeux olympiques…

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 01/10/2023 à 15:38.

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Affaire Fillon : Un mois pour le détruire, dix ans pour le juger

Macron accueille Charles III : Le roi est son cousin ?

Source : Bd. Voltaire - Le 20/09/2023.

 

De bien belles images ce mercredi après-midi : Emmanuel Macron, accompagné de son épouse, accueillait le roi Charles et la reine Camilla. Enfin, après le rendez-vous manqué du printemps dernier ! À l’heure où nous écrivons ces lignes, on doit s’affairer aux fourneaux à Versailles pour le dîner d’État. Rien à dire là-dessus : La France doit être à la hauteur et, comme dans les grands concours, qui ne sont pas que de circonstances, tout compte : Du brushing des chevaux de la Garde en passant par celui de la « Première dame » aux petits plats dans les grands. Au passage, on ne dira jamais assez tout ce que la République doit à la monarchie pour ne pas passer pour une souillon sur la scène internationale : Les culottes blanches du régiment de la cavalerie de la Garde, la vaisselle, l’argenterie, les hauts plafonds dorés et toutes ces sortes de choses.

Tout compte, donc. Or, peu de personnes, à part quelques grincheux, n’ont relevé les fautes protocolaires d’Emmanuel Macron, qui se targue de parler à l’oreille des rois comme le roi à celle de son cheval. Les fautes du Président mais aussi de sa dame. Que cette dernière ne fasse pas la révérence au roi, passons. Mmes Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy s’y étaient pliées devant la reine Elisabeth. Mais le protocole n’oblige pas à cet exercice de gymnastique pas toujours évident pour tout le monde. Donc, rien à dire là-dessus. En revanche, que Mme Emmanuel Macron, née Trogneux, claque la bise à la reine, même consort, comme à ses copines du Touquet ou du gouvernement, là, franchement, on se pince sans rire. Mais bon… On va dire que c’est pour la bonne cause, histoire de mettre tous les atouts de notre côté dans le cadre du rapprochement entre nos deux nations. Mettons.

Le pompon revient tout de même à Emmanuel Macron himself. Tout à son extase monarchique, le chef de l’État n’a pas hésité à poser sa républicaine main gauche sur le royal avant-bras droit du souverain, comme il le ferait après une remise de décoration, un meeting politique ou un tour de table avec des représentants syndicaux. Ils lui ont dit, ceux du protocole, que cela ne se fait pas ? Cela ne se fait pas de toucher le roi. Il vous tend la main, vous lui tendez la vôtre, sans lui écraser les doigts. Point barre. Sans doute, le côté décomplexé d’Emmanuel Macron : Je peux tout me permettre, je suis l’égal des grands de ce monde. Mais le pompon du pompon, sans nul doute, aura été cette main passée dans le dos du roi à plusieurs reprises. Le roi a été élevé à Buckingham. Autrement dit, il est très poli. Des décennies qu’il fait le job « à l’international ». Aucun risque, donc, qu’il ne provoque un incident diplomatique. Pas du genre à inviter Emmanuel Macron à aller monter le chauffage dans la Galerie des Glaces.

Mais, dans un énième épisode de The Crown, on pourrait imaginer ce dialogue after the dinner in Versailles Palace, alors que la reine Camilla aura fait valdinguer ses escarpins à travers le salon de la suite royale et que Charles dénouera le nœud papillon de son smoking (s’il le fait tout seul comme un grand). « Dites donc, ma chère Camilla, ils sont gentils comme tout ces Macron. Un peu petit bourgeois, Emmanuel et Brigitte, bras dessus, bras dessous, pour nous accueillir, mais charmants quand même. Mais, entre nous, ça manque un peu d’éducation tout ça. N’est-il pas ? » Et la reine, enfilant sa nuisette en dentelle, de répondre : « Oui, il est » (traduction libre et approximative).

Samedi, à Marseille, avec pape François, presque un copain, celui-là, ça promet…

...quand "on" est Président de la République Française, "on" ne se comporte pas comme cela...JMR

 

De Richelieu à Catherine Colonna : La diplomatie LGBT+ d’Emmanuel Macron

Source Bd. Voltaire.

Un an après avoir nommé un ambassadeur à la cause LGBT+, voici que le ministre des Affaires étrangères, Catherine Colonna, vient d’annoncer la création d’un fonds de deux millions d’euros pour défendre les droits des personnes LGBT+ dans le monde. Qui pourra désormais oser dire qu’il n’y a pas de cohérence dans la politique étrangère d’Emmanuel Macron ? Le reproche lui est souvent fait d’avoir conforté comme jamais notre pays dans son rôle de remorque de la politique étrangère américaine dans le monde. Cet ajout sociétal au train diplomatique de la France va bien dans ce sens, les États-Unis de Joe Biden n’étant pas en reste sur ce sujet.

Est-ce bien là que l’on attend la diplomatie française ?

Certes, il existe tout un tas de pays à travers le monde qui se moquent comme d’une guigne des droits des « personnes LGBT+ ». Prenons, par exemple et au hasard, l’Arabie saoudite et le Qatar, avec qui la France entretient les meilleures relations du monde et dont les souverains sont reçus par Emmanuel Macron avec tous les honneurs dus à leur rang et à leur portefeuille ainsi qu'avec force embrassades et accolades sur le parvis de l’Élysée. On ne peut pas dire que, dans ces pays, le miel et le lait coulent pour les homosexuels. Nos ambassadeurs de Riyad et de Doha vont-ils puiser dans ce fonds pour soutenir « celles et ceux qui défendent les droits des personnes LGBT+ au quotidien, parfois au péril de leurs vies », pour reprendre les mots du porte-parole du Quai d’Orsay ? On pose ça là.

Certes, il ne paraît pas incongru de se soucier des personnes LGBT+. Mais est-ce bien là que l’on attend la diplomatie française, si tant est qu'il y ait encore une diplomatie française ?

« Les États n’ont pas d’amis, seulement des intérêts », disait de Gaulle, qui reprenait et assumait à travers cette boutade toute la tradition héritée de la monarchie. Une tradition qui faisait que François Ier pouvait s’entendre avec le Grand Turc ou le très catholique Louis XIII, sur les conseils du très catholique cardinal de Richelieu, avec les puissances protestantes, et ce, dans le but séculaire de desserrer l’étau des très catholiques Habsbourg qui menaçaient la France. Du reste, cela n’empêchait pas la monarchie de combattre le protestantisme au sein du royaume. Pour parler le langage d’aujourd’hui : pas d’idéologie, seulement du pragmatisme. Voire du cynisme. Talleyrand fut un maître en la matière.

La France inaudible

Aujourd’hui, il faut reconnaître que l’on peine à discerner la voix de la France dans le monde. Son siège de membre permanent au Conseil de sécurité de l’ONU est lorgné par nos chers amis d’outre-Rhin selon le fameux principe que ce qui est à moi est à moi et ce qui est à toi est éventuellement à moi. Et si nous n’avions pas l’arme nucléaire, l’affaire serait peut-être déjà entendue. Il suffit de regarder ce qu’il se passe en Afrique, où notre pays subit revers et humiliations à répétition, pour réaliser l’ampleur du recul de notre pays sur le plan diplomatique.

Comment, d’ailleurs, pourrait-il en être autrement, alors qu’Emmanuel Macron ne conçoit la souveraineté qu’à travers l’Union européenne ? La France n’étant plus audible, pour ne pas dire plus crédible, il reste à notre pays la diplomatie des bonnes causes comme celle, donc, des droits LGBT+. Il y a des ONG qui font ça très bien. La France, une ONG+, comme l’Église catholique dont le chef actuel, comme par hasard, s’entend si bien avec notre Président ? Si l’on voulait s’inspirer à l’envers de la devise de Fouquet, on pourrait se demander : jusqu’où ne descendrons-nous pas ? Au fond, un Roland Dumas, ministre des Affaires étrangères sous Mitterrand, était plus proche de Talleyrand que de Colonna. La chute aura été rapide.

...et "ON" s'étonnera que nos ambassadeurs soient expulsés, pris en otage.... sans aucun respect pour leur statut de représentants de la France...! JMR...

 

De mieux en mieux : Une Américaine à la Concurrence de l’Union européenne !

Source : Bd. Voltaire - Le 12/07/2023.

« Donc, c’est une Américaine tout droit venue du département de la Justice américaine qui devient la chef de la Concurrence européenne, en pleine guerre économique avec Washington ? Et tout le monde trouve ça normal ? » Tout le monde ? Sans doute pas ! Ce tweet a été lancé par Julien Aubert, ancien député LR de Vaucluse et président de Oser la France. On attend avec impatience la réaction de Bruno Le Maire, ministre de l’Économie et des Finances de la région France au sein de l’Union européenne, et, bien évidemment, d’Emmanuel Macron qui, on le sait, n'a qu’un mot à la bouche : « Souveraineté ». À condition qu’elle soit européenne, ça va sans dire.

 

 

On peut parier qu’on va nous fourguer que c’est une femme qui succède à un homme, le Belge Pierre Régibeau, en poste depuis 2019. Et que, donc, c’est très bien. Un message fort adressé à toutes les femmes de l’Union européenne qui aspirent à plus d’égalité, de responsabilités, et qui travaillent dur, etc. Ursula von der Leyen fera ça très bien : dérouler les éléments de langage avec la précision d’une belle mécanique de fabrication allemande.

Mettons que tout cela ne soit que ragots

Bien entendu, on va nous vendre le CV long comme le bras de cette dame, Mme Fiona Scott Morton, qui a travaillé pour l’administration de Barack Obama (elle aurait bossé pour Trump que cela nous aurait étonnés !). Tiens, justement, parlons-en, de son CV. Pressentie depuis quelque temps, Mme Scott Morton a été pointée du doigt par plusieurs médias, notamment Marianne qui écrivait, à son sujet, le 27 juin dernier : « Dans le passé, elle a conseillé plusieurs multinationales qui sont aujourd’hui dans le collimateur de l’institution [la Commission européenne]. » En outre, La Lettre A notait, toujours fin juin, que cette « économiste à Yale et ancienne fonctionnaire de la Justice conseille également deux des plus grosses entreprises du secteur – Amazon et Apple – alors qu’elles affrontent des enquêtes fédérales anti-monopole ». Cela la fiche peut-être mal pour celle qui était présentée, sous Obama, comme la grande experte anti-trust. Par ailleurs, le magazine économique The American Prospect révélait, en 2020, que cette dame avait omis de divulguer ses contrats de conseil auprès de Apple et Amazon et titrait : « Fiona, Apple et Amazon : comment les grandes technologies paient pour gagner la bataille des idées. »

Mais mettons que tout cela ne soit que ragots, mauvaise interprétation, que sais-je encore. Est-ce bien là l’essentiel ? Non, finalement. Et l’on revient à la question de Julien Aubert : « Une Américaine devient chef de la Concurrence européenne… Et tout le monde trouve ça normal ? » Et c’est là que se révèle, à ceux qui avaient encore des illusions, la vraie nature de ce qu’est l’Union européenne à travers ses institutions : un monstre froid et apatride. Sous couvert, on imagine, d’un primat à l’efficacité, à la compétence. Toutes choses, du reste, qui restent largement à démontrer… Et l’on comprend mieux, alors, l’idéologie qui guide, au fond, la politique d’immigration de l’Union européenne. On manque de bras sur le continent européen pour faire tourner la machine économique ? Qu'à cela ne tienne : importons de la main-d’œuvre d’Afrique. Bien sûr, essayons, « dans le respect de nos valeurs », tant bien que mal (plutôt mal, pour l’instant), que cela se passe au mieux : « Dispatchons » les migrants à travers l’UE afin que chacun prenne sa part, évitons les drames en mer, diabolisons ces horribles racistes qui veulent préserver l’identité de leur pays. Mais, surtout, ne perdons pas de vue l’objectif : faire tourner la machine.

 

Au sommet de la pyramide, pareil. Un.e Européenne ou un.e Américain.e, peu importe. Et puisque aujourd’hui une Américaine peut être à la tête de la Concurrence de l’UE, demain, cette même UE viendra nous dire qu’il n’y a aucune raison que, par exemple, un haut fonctionnaire à Bercy soit obligatoirement de citoyenneté française. Et puis, on pourra pousser le bouchon toujours plus loin, dans tous les secteurs, à tous les niveaux. Tiens, pourquoi pas celui des armées ? Paraît qu’on appelle ça le mercenariat… « La France est notre patrie, l’Europe est notre avenir », disait Mitterrand, en 1989.

Avec de telles décisions, l’Europe n’est pas près de devenir notre patrie…

 

 

Pour les banlieues, on parle en milliards ; pour la ruralité, en millions…

Source : Bd. Voltaire - Le 07/07/2023.

C’était le 15 juin dernier. Autant dire avant. Avant les émeutes. Élisabeth Borne, en déplacement dans la Vienne où elle fut jadis préfète, assistée de pas moins de trois ministres, venait présenter son plan France Ruralités. Tout ce beau monde, devant un parterre d’élus locaux (région, département, intercommunalités, communes) s’était même dépaysé à Montmorillon, charmante petite ville du Poitou de 6.000 habitants. Un remake du sous-préfet aux champs.

Le Premier ministre se voulait presque bucolique. Jugez plutôt : « Quitter les rives de la Vienne, longer la Gartempe [la transcription officielle du site gouvernemental mentionne la « Gare Tempe »…] pour atteindre Montmorillon, c'est comprendre un peu de l'âme des ruralités de la France. Ici, c'est l'histoire de notre pays qui résonne. Ici, on retrouve la beauté de notre patrimoine naturel, la force de notre agriculture, et cet esprit de solidarité, de fraternité si propre à nos villages. » Cela aurait presque pu être beau si elle avait évoqué, par exemple, « nos campagnes françaises » au lieu « des ruralités de France ». Mais bon, on ne peut pas trop en demander à une technocrate pur sucre. Un petit effort et elle nous faisait le coup de la terre qui ne ment pas…

Mais la réalité de la ruralité n’est pas qu’idyllique. Le chef du gouvernement le reconnaissait lui-même : « Aujourd'hui, bien trop souvent, nos compatriotes ont le sentiment que les services reculent, que la vie de tous les jours devient un défi. » On notera tout de même qu’elle évoque « le sentiment ». On dirait qu’elle nous fait le même coup que pour l’insécurité...

D’où le plan France Ruralités. On ne va pas détailler ici ce plan qui, selon un député ni RN, ni LR, ni socialiste, mais apparenté Horizons, le député de Mayenne Yannick Favennec, représente certes « une avancée intéressante » mais « manque cruellement d’ambition pour lutter contre la désertification médicale », ou plutôt contre le « sentiment de désertification médicale », si l’on voulait rester dans le ton gouvernemental. Nous avons fait le calcul : si on additionne les chiffres lâchés par Élisabeth Borne dans son ode aux ruralités, on compte 217 millions d’euros, sauf erreur de notre part. Sans parler du déploiement des « 100 Médicobus », sans doute une adaptation à nos ruralités de la vieille médecine de brousse, pour les nostalgiques du temps des colonies. Une mesure phare dont le Premier ministre semble d'ailleurs très fier. Pour les 22 millions de Français qui habitent les campagnes (chiffres donnés par le Premier ministre), n’est-ce pas trop ?

C’était donc le 15 juin. Il y a une éternité. Entre-temps, « les ruralités de France » ne se sont pas embrasées, même si, pour la première fois, notre pays a connu des scènes d’émeutes dans des petites villes où, de chez soi, la campagne est à quelques coups de pédale, quand on veut bien s’extraire de son canapé.

Mais quittons les rives de la Gartempe et remontons vite à Paris en faisant un petit crochet par les fameuses banlieues. On dit que les différents plans banlieues enquillés depuis une trentaine d’années auraient coûté plusieurs centaines de milliards d’euros pour le succès que l’on sait. Vous noterez que là, on parle en milliards. Chacun son échelle de valeur. On n’est pas chez les pousse-mégot. D’ailleurs, les festivités de la semaine dernière auraient provoqué, au bas mot, un milliard de dégâts, selon l’ancien patron des patrons Geoffroy Roux de Bézieux. Et on ne compte pas les faux frais ! Du genre frais de déplacements des policiers et gendarmes. Tant qu’à faire les choses, autant les faire en grand. On dit aussi que, cette fois-ci, il n’y aura pas de nouveau « plan banlieues », si l’on en croit l'hebdomadaire Marianne qui rapporte que « dans le camp d’Emmanuel Macron s’esquisse l’idée que la réponse aux émeutes ne saurait être économique, mais axée sur l’autorité et l’éducation ». On attend de voir…

On attend aussi de voir si la gare de Tempe va rouvrir…

[Émeutes] Petit tour (très incomplet) de cette France des terroirs qu’on aime

Source : Bd. Voltaire - Le 02/07/2023.

Où faut-il habiter, maintenant, pour être épargné par les « émeutes » ? Je veux dire habiter en France. Sans aller bien loin, tenez, par exemple, l’Italie, ce pays auquel nos gouvernants voulaient donner de condescendantes leçons de démocratie lorsque Meloni accéda au pouvoir, l’Italie ne connaît pas ce genre de « phénomènes de société ». Il faudra qu’on se demande un jour pourquoi. Donc, restons dans « l’Hexagone », pour reprendre une expression chère à Macron. Jusqu’à maintenant, lorsqu’on brûlait des voitures, caillassait des commissariats de police ou jetait des boules de pétanque sur les pompiers, ça concernait - dans l’imaginaire du Français moyen qui passe plus de trois heures par jour devant son écran - les banlieues, les cités périphériques des grandes villes. Mais pas lui. Ça, c’est fini.

Alphonse Allais voulait implanter les villes à la campagne. Avec l’émeute qui se répand comme un feu de paille, on y est presque. La République du Centre rapportait, samedi matin, qu’un feu avait pris dans un champ, durant la nuit, à Pithiviers, ville du Loiret, d’origine gauloise, comptant aujourd’hui 12.000 habitants. Toujours selon La République du Centre« si l'origine du feu reste pour l'heure inconnue, les riverains pensent aux jeunes qui ont brûlé, dans la nuit du mercredi au jeudi, des voitures dans le quartier ». On n’en sait pas plus aujourd’hui. Dans la nuit de jeudi à vendredi, dans le centre-ville, des vitrines ont été fracassées et des boutiques pillées (la presse écrit « cambriolées », ça doit faire moins émeute). Les riverains ont raconté qu’il s’agissait d’une bande d’une vingtaine d’individus cagoulés.

Faisons un bon de quelque 280 kilomètres, cap sud-est, pour nous rendre en Côte-d’Or, à Beaune, 22.000 habitants, « là où les bons vins sont », comme on le chante dans la vieille chanson « Réveillez-vous Picards ». « Boulangerie et station-service attaquées, véhicules brûlés, tirs de feu d’artifice contre le commissariat », titre Le Bien public. Et d’évoquer aussi – c’est un classique, désormais - des « affrontements » entre « forces de l’ordre et jeunes ». Comme on parlerait d’affrontements entre bandes rivales. Samedi matin, le préfet de Côte-d’Or est venu constater les dégâts. Espérons que les assureurs seront aussi réactifs.

Passons notre chemin et poursuivons notre petit tour de cette France des terroirs qu’on aime tant en filant, 200 kilomètres plus au sud, à Belley, en évitant sagement Lyon. Belley, dans l’Ain, ville de 9.000 habitants, capitale du Bugey et siège d’un très vieil évêché. Dans la nuit de jeudi à vendredi, pareil : nombreuses dégradations, rapporte Le Progrès. Voitures incendiées, vitrines de commerces cassées, la terrasse d’un bar complètement détruite par une « vingtaine de jeunes ». On poursuit, 150 kilomètres plus au sud : Annonay (Ardèche), 16.000 habitants. Annonay, pour qui connaît un peu son Histoire de France, c’est les papetiers Montgolfier et leur montgolfière qui s’éleva dans le ciel de la cité du Vivarais, un beau jour de juin 1783. 240 ans plus tard, on y a brûlé un camion de l'agglomération qui sert à ramasser les encombrants ainsi qu’une douzaine de voitures dans un parking souterrain, dont deux qui ont été lancées en direction des gendarmes et des sapeurs-pompiers. France Bleu rapporte qu’ils étaient une « trentaine de mineurs ». On voudrait ironiser, on ferait remarquer que la presse, dans les circonstances actuelles, repère plus vite les mineurs lorsqu’ils sont en bande que ne le font les services sociaux des conseils départementaux pour détecter les mineurs lorsqu'ils sont isolés. Là aussi, passons.

Passons et cap sur le sud-ouest. Tenez, partons pour Pau, la ville du bon roi Henri et, accessoirement, de François Bayrou, donneur de leçons perpétuel et rescapé du giscardisme. Pau n’est pas à proprement parler une petite bourgade (77.000 habitants), mais elle garde cette belle image de carte postale, nichée au pied des Pyrénées. Un bureau de police, un collège et une médiathèque ont été endommagés, rapporte actubéarn. Pas de gros dégâts, mais c’est une première fois à Pau, souligne France Bleu« Notre responsabilité autant que possible est de maintenir la paix dans la rue et l’ordre qui fait que l’on peut vivre ensemble », a déclaré Bayrou. Dans bien des endroits en France, il ne s’agit pas de la maintenir, la paix, mais de la rétablir !

Remontons plein nord en nous arrêtant dans le Tarn-et-Garonne, à Moissac. Moissac, 13.000 habitants, son fameux cloître de la fin du XIe siècle. Dans la nuit de samedi à dimanche, ce sont quatre voitures de la police municipale qui ont été incendiées, nous dit La Dépêche. À une heure de Moissac, Villeneuve-sur-Lot, moins de 23.000 habitants. « Les zones rurales ne sont pas épargnées par les violences urbaines constatées partout en France », fait remarquer justement Le Républicain Lot-et-Garonne. Au bout de deux nuits de violence, on comptabilise deux véhicules de la police municipale, un « bâtiment public ciblé ».

Achevons ce tour de France très incomplet en Touraine. Même Amboise, ville de 13.000 habitants, délicieusement posée au bord de la Loire et surplombée par son château, n’a pas été épargnée : la salle municipale Clément-Marot a été partiellement incendiée, dans la nuit de jeudi à vendredi, relate La Nouvelle République. L’agglomération tourangelle a d’ailleurs été frappée par de nombreuses violences, au point que le préfet Latron, ancien officier, a arrêté un couvre-feu pour les mineurs de 22 heures à 6 heures du matin, durant ce week-end.

Emmanuel Macron fera-t-il ce tour de France ?

 

Macron l’Insomniaque

Source : Bd Voltaire - Le 15/04/2023.

3h28 : c’est l’heure à laquelle Emmanuel Macron aurait promulgué la loi portant réforme des retraites, rapporte France Culture. Il aurait pu faire ça à minuit, l'heure du crime. Ça aurait pu être mal pris, on sait jamais. L’homme est insomniaque ou matinal ? Allez savoir. C’est bien connu : y a ceux qui sont du matin et ceux qui sont du soir. Pour tout plein de choses dans la vie. Macron, on ne sait pas trop. 3h28 : la chose était donc pressante, comme une envie irrépressible. Maintenant, la scène s'est-elle vraiment déroulée à 3h28 ? BFM TV, de son côté, à la rescousse du noctambule de l'Élysée, semble dire que ce n'est pas si évident que ça. Mais qu'importe au fond ! On retiendra qu'il ne fallait pas que ça traîne.

En tout cas, à cette heure-là, sauf aux alentours des sorties de boîtes de nuit, « un grand silence règne sur la terre », pour reprendre le poème d’un Père de l’Eglise. « Un grand silence et une grande solitude », ajoutait-il pour évoquer la nuit de Pâques. 3h28 (ou 22h73, qu'importe !), on imagine qu’Emmanuel Macron, effectivement, devait être bien seul à cette heure-là. Les têtes des gardes républicains devaient dodeliner sous les ors d’une République barricadée, casquée, comme vendredi devant le Conseil constitutionnel. 3h28, c’est presque l’heure des « paumés du petit matin » qui « ont l’assurance des hommes dont on devine que le papa a eu de la chance », comme chantait Brel. Celle aussi du laitier et des éboueurs, chers à feu Giscard d’Estaing, et  qui devront désormais travailler deux ans de plus… Merci patron ! 3h28 : c'est peut-être l'heure à laquelle la ministre de la Culture Rima Abdul Malak faisait valdinguer ses escarpins à travers sa chambre après avoir assisté à un concert de rap. Cette journée mémorable méritait bien de terminer sur un air de teuf.

 

Bien sûr, lorsqu’on est à la tête d’un pays comme la France, il n’y a pas de jour, il n’y a pas de nuit. Il n’y a pas d’heure pour les braves. 24 heures sur 24, sept jours sur sept et 365 sur 365. Non stop. Richelieu, insomniaque, perclus de douleurs, gouvernait la France à la lumière de sa chandelle en caressant ses chats. Balzac composait La Comédie humaine en engloutissant café sur café. Bon, Macron n’est ni Richelieu, ni Balzac, ça se saurait. Mais un peu quand même, vu de loin, non ? La preuve, sa main n’a pas tremblé, comme celle du cardinal, et depuis six ans, il nous déroule une comédie qui prend le chemin d’une tragédie humaine.

On l’avait bien dit que ce deuxième quinquennat serait « Open bar ». Dès 2021, nous le prédisions. Pour lui, pas pour les Français. On commençait à en douter depuis quelques temps mais nous voilà rassurés. Et l’on a encore en mémoire les propos prophétiques et quasiment hallucinés de Marisol Touraine, ancienne ministre de Hollande, le jour de son investiture, le 8 mai 2022 : « Maintenant tu as les mains libres. Tu peux faire tout ce que tu veux ». Vendredi soir, Elisabeth Borne, qui visiblement ne sert plus à grand-chose dans le dispositif, tweetait en bonne social-démocrate qu’elle est : « Ce soir, il n'y a ni vainqueur, ni vaincu ». Presque évangélique, la Babeth. Et patatras, Emmanuel l’Insomniaque – car c’est ainsi qu’il pourrait avoir acquis de dure lutte son surnom pour la postérité - lui casse la baraque nuitamment.

Ne nous y trompons pas, dans cette comédie humaine, la réforme des retraites devient un épiphénomène, un prétexte, un détail de l’histoire, comme disait l’autre. Certes, Macron peut légitimement ressentir la satisfaction du bon élève qui a tout fait comme lui ont dit de faire ses maîtres. Nous ne sommes pas dans sa tête, mais on peut imaginer que, plus encore, il a dû ressentir, au moment où le cadran de l’horloge indiquait 3h28, alors que la tête des gardes républicains dodelinait, ce sentiment de toute puissance qu’au final on ne ressent que très rarement dans une vie d'homme. Rien que pour ça, ça valait le coup, non ?

Dernière minute : Emmanuel macron s’adressera aux Français à la télévision ce lundi soir suite à la promulgation de la réforme des retraites. On imagine à l'heure de Bonne nuit les petits.

Emmanuel Macron ne souhaite pas l’écrasement de la Russie. Merci pour elle !

Source : Bd. Voltaire - Le 19/02/2023.

L’avion doit avoir des effets spéciaux quelque peu euphorisants sur les grands de ce monde. La preuve par ceux bien connus du pape François lorsqu’il rentre à Rome après une longue tournée. De même pour , de retour de la conférence sur la sécurité qui s’est tenue à Munich, et qui vient de préciser sa vision sur l’issue de la guerre en  en se confiant à plusieurs médias (JDDLe Figaro et France Inter). « Je veux la défaite de la Russie et je veux que l’ puisse défendre sa position, mais je suis convaincu qu’à la fin, ça ne se conclura pas militairement. » Faudrait savoir.

Du « en même temps » pur jus. En effet, comment être convaincu que la diplomatie finira par l’emporter tout en souhaitant la défaite de la Russie ? N’est-ce pas, d’ailleurs, s’interdire le rôle central de négociateur privilégié qui s’inscrirait dans la tradition gaullienne de la France ? Mais en s’alignant d’emblée sur les positions américaines, otaniennes et « unioneuropéistes »,  a depuis longtemps condamné notre pays, au mieux, à une place en tout bout de table des négociations et non au centre, lorsque ces négociations viendront, au pire à en être exclu voire, au pire du pire, à servir de secrétaire à Mme von der Leyen. Les relations internationales répondant aussi à des ressorts psychologiques, il n’est pas certain que cette nouvelle saillie aéronautique d’Emmanuel Macron soit très bien perçue par Poutine.

Ni, du reste, par Zelensky. En effet, le président de la République ajoute : « Je ne pense pas, comme certains, qu’il faut défaire la Russie totalement, l’attaquer sur son sol. Ces observateurs veulent avant tout écraser la Russie. Cela n’a jamais été la position de la France et cela ne le sera jamais. » On est rassuré. Mais au fait, qui sont ces « certains » ? Seulement des « observateurs » ? Il suffit de relire les déclarations récurrentes de Zelensky, poussant à la surenchère, c’est-à-dire à l’escalade des armes, c’est-à-dire à la victoire totale de son pays. Dernière en date, celle de Munich : « Il n’y a pas d’alternative à la victoire de l’, pas d’alternative à l’ dans l’UE, pas d’alternative à l’Ukraine dans l’OTAN. ». Il ne dit pas « S’il vous plaît, puis-je adhérer à l’OTAN, puis-je entrer dans l’Union européenne ? » Non, son discours est « Vous n’avez pas le choix ». Jadis, l’Union européenne était un club de pays bien élevés où, pour entrer, il fallait montrer patte blanche. Ça, visiblement, c’est fini. Désormais, c'est : « On a tout, on veut le reste. » Zelensky fixe le cadre général de l’action : « Pas d’alternative à la victoire », c’est-à-dire pas de négociations ? Et au fait, la victoire, est-ce jusqu’à la récupération de la Crimée ?

En tout cas, on retiendra des propos d’ qu’il ne souhaite pas l’écrasement de la Russie. Monsieur est trop bon ! Monsieur est-il sérieux, d’ailleurs ? Car si l’on peut douter que la Russie puisse emporter cette guerre d’un autre âge, on peut, de la même manière, douter que les troupes ukrainiennes puissent entrer un jour dans Moscou ! Décidément, la voix de la France devient inaudible. Pire : ridicule.

Sur le même sujet : Macron ne veut pas “écraser la Russie” ! On croit rêver !

par Jacques Guillemain.

OQTF : Bien triste automne

Source : Bd. Voltaire - Le 25/10/2022.

Bien triste automne, en effet. Lundi 24 octobre ont eu lieu les funérailles de la petite Lola à Lillers, dans le Pas-de-Calais. L'évêque d'Arras, Mgr Leborgne, qui présidait la cérémonie dans la collégiale Saint-Omer archi-pleine, a évoqué le martyre de cette gamine de 12 ans : « des circonstances insupportables », a-t-il déclaré. Insupportables, en effet.

Insupportables comme les statistiques de la délinquance et de la criminalité dans notre pays. Certes, on ne fait pas des statistiques à partir de quelques cas tirés plus ou moins au hasard des « faits divers » relatés par la presse quotidienne régionale. Certes, tous les crimes et délits ne sont pas commis par des étrangers en situation irrégulière sur notre territoire. Au passage, rappelons qu’en 2021, parmi les crimes et délits perpétrés en France (Métropole et outre-mer), on a compté 842 homicides (chiffres du ministère de l’Intérieur). Cinquante-cinq de plus qu’en 2020, soit une hausse de près de 7 %, ce qui n’est tout de même pas rien. Moins de 1.000 homicides sur plus de 3,5 millions de crimes et délits constatés, c’est peu, pourrait-on se dire. C’est en tout cas 842 homicides de trop. En revanche, 3,5 millions de délits et crimes constatés pour une population de près de 67 millions, ce n’est pas rien. Notons que dans la fiche synthèse éditée par le ministère de l’Intérieur, on se garde bien de préciser combien d’étrangers ont commis ces homicides.

En tout cas, ces macro-chiffres ne peuvent pas masquer une réalité que le calvaire de Lola a cruellement mise en lumière : des crimes pourraient être évités si leurs auteurs, qui n’ont rien à faire chez nous, étaient chez eux. On aura beau philosopher sur l’universalité de la capacité de l’homme à commettre des horreurs, on ne pourra pas empêcher les citoyens d’interpeller ceux qui ont pour premier devoir d’assurer leur sécurité derrière les remparts de la Cité : avez-vous vraiment tout fait pour limiter au maximum les risques que des abominations soient commises sur notre territoire ?

Et l’on ne peut pas ne pas se poser la question en lisant les tweets publiés par l’Institut de la justice, le 24 octobre. Le premier tweet : « Ils étaient tous soumis à des obligations de quitter le territoire français. Pourtant, cela ne les a pas empêchés de commettre des crimes et des délits. » Suit une dizaine de tweets relatant des faits qui se sont déroulés en France à quelques semaines, voire quelques jours de distance.

 

Le 11 août, à Limoges, « un clandestin algérien et délinquant multirécidiviste, visé par une OQTF, interpellé pour vol et libéré » (sources Valeurs actuelles). Le 11 septembre à Paris, « une jeune femme violée dans sa voiture par un sans-papiers tchadien » (sources , qui précise que l’individu était sous le coup d’une OQTF depuis 2016). Le 7 octobre, « au tribunal de Brest, un homme de 35 ans a écopé de dix-huit mois de prison ferme pour harcèlement et  sur sa compagne » (sources Ouest-France). L’Institut pour la  précise que l’individu était sous le coup d’une OQTF. Le 17 octobre, meurtre de Lola à Paris : « La principale suspecte faisait l'objet d'une obligation de quitter le territoire » (sources Le Figaro). Le 21 octobre, à Créteil, « une magistrate agressée sexuellement par un Algérien sous le coup d’une OQTF » (sources Le Figaro). Toujours le 21 octobre, « un homme armé d'un couteau a été interpellé à Drancy, dans la mosquée de l'imam Hassen Chalghoumi. L'individu fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français » (sources ). Le 22 octobre, à Saint-Étienne, « visé par une OQTF, il crie "Allah Akbar" en pleine rue en tenant un couteau » (sources CNews). Le 23 octobre, « un Algérien faisant l’objet d’une obligation de quitter le territoire français a été interpellé dans la nuit de vendredi à samedi à Marseille, alors qu’il tentait de violer une femme en pleine rue » (sources CNews).

Des cas particuliers, sans valeur statistique, diront certains. Mais surtout, une réalité qu’on ne peut plus relativiser, occulter, masquer.

 

49-3 : ça, c'est fait - Le 20/10/2022.

Source : Bd. Voltaire.

 

On dit qu’on ne peut pas être et avoir été. Emmanuel Macron, son gouvernement et, plus largement, la Macronie le découvrent aujourd’hui à leurs dépens. Durant cinq longues années, ils ont régné sans partage avec une majorité absolue à l’Assemblée nationale. Tout cela marchait, votait ou applaudissait au coup de sifflet. C’était tout simplement beau. Comme une parade militaire. Un peu lassant, à la longue, mais beau comme peut l’être aussi une mécanique bien huilée. Lorsqu’il fallait combattre de nuit, on était assez nombreux pour se relayer, assurer la permanence, monter la garde à la tranchée, s’il y avait risque d’escarmouche. Bref, on avait l’assurance des armées réputées invincibles « parce que nous sommes les plus forts », ces armées qui ne perdent pas de temps à se remettre en cause car elles ont toujours raison. Jusqu’au jour…

Jusqu'au jour où vint le vilain mois de juin 2022. Des incongrus, des ingrats, des qui n’ont rien compris à tout ce qu’avait fait de bien pour eux Emmanuel Macron, son gouvernement et, plus largement, la Macronie eurent l’idée saugrenue d’élire une Assemblée nationale d’un nouveau genre. Une Assemblée représentant pour une fois, grosso modo, l’ensemble des sensibilités politiques du pays. Et là, effectivement, ils découvrirent qu’il est compliqué d’être et d’avoir été. Être minoritaire à l’Assemblée, du jour au lendemain, alors qu’on avait une majorité écrasante, faut reconnaître que ça doit sérieusement piquer aux yeux. On ne change pas de logiciel comme ça. C’est la tragédie que vivent Emmanuel Macron et consorts. C’est pourquoi le fameux 49-3 était inéluctable. On savait qu’ils appuieraient sur la queue de détente du fusil. Restait plus qu’à choisir le bon moment.

Mais, au fait, l’article 49, alinéa 3, de la Constitution, c’est quoi, au juste ? « Le Premier ministre peut, après délibération du Conseil des ministres, engager la responsabilité du gouvernement devant l'Assemblée nationale sur le vote d'un projet de loi de finances ou de financement de la  sociale. Dans ce cas, ce projet est considéré comme adopté, sauf si une motion de censure, déposée dans les vingt-quatre heures qui suivent, est votée dans les conditions prévues à l'alinéa précédent. Le Premier ministre peut, en outre, recourir à cette procédure pour un autre projet ou une proposition de loi par session. » Une arme constitutionnelle dans les mains de l’exécutif qui n’a son pareil nulle part ailleurs dans les autres grandes démocraties. La semaine dernière, le Conseil des ministres a armé son fusil en délibérant, comme le prévoit la Constitution. Il ne restait donc plus qu’à tirer le moment venu.

Le moment est venu. Élisabeth Borne, ce mercredi après-midi, a engagé la responsabilité de son gouvernement au titre de l’article 49-3 pour faire passer le projet de loi de finances 2023, partie recettes. Elle joue relativement (tout devient relatif, depuis que la majorité l’est !) sur du velours. En effet, les oppositions ont 24 heures pour déposer une motion de  afin de faire tomber le gouvernement. La  l'a fait immédiatement et le RN devrait probablement suivre. Partant dispersées et sans le soutien des LR, ces motions seront rejetées, le gouvernement ne sera pas renversé et le budget sera voté. Tout ça, c’est du cinéma, me direz-vous ? Oui, mais non. Car désormais, les choses auront au moins le mérite d’être claires. Ce gouvernement ne tient que par la force des institutions transmises en héritage par de Gaulle et son légiste  Debré. Il faut bien que la nation ait un budget pour 2023 parce qu’on ne peut pas faire autrement, que l’entreprise France doit bien continuer à tourner, vaille que vaille, que les factures, les pensions et les traitements soient versés, etc. Mais si l’acceptabilité de l’impôt repose sur son libre consentement par les contribuables, que dire du budget d’une nation voté par moins de 50 % des députés dans un pays profondément marqué par la notion de majorité absolue ?

Si l’on ajoute à cela un contexte social plus que tendu qui semble installer une distorsion durable entre ce que certains appellent le pays réel et le pays légal, on voit mal comment Emmanuel Macron pourra longtemps faire croire qu’il a été réélu sur son programme et qu'il peut faire ce qu'il veut.

 

Le couple franco-allemand ou l’histoire du cocu magnifique ? - Le 14/10/2022.

Source : Bd. Voltaire.

Il y a, comme ça, des informations tombant opportunément en même temps qui en disent long sur la réalité de la belle solidarité européenne tant vantée par Emmanuel Macron.

Ainsi, ce jeudi 13 octobre, « en marge d’une réunion de l’OTAN à Bruxelles »nous dit La Croix, l’Allemagne a signé avec douze autres membres de l’ une déclaration d’intention pour se constituer un bouclier antimissile européen. Et le choix de Berlin, qui est à la manœuvre, se portera sur (roulement de tambour)… le système israélien Arrow 3. L’affaire ne date pas d’aujourd’hui. Fin mars dernier, le chancelier Scholz avait déclaré qu’il réfléchissait sérieusement à acheter à Israël son système de défense antimissile. La guerre russo-ukrainienne avait évidemment précipité les choses : « Nous devons nous préparer à la nouvelle réalité d’un pays voisin [en clair, la Russie] qui utilise la force pour parvenir à ses fins. » Rappelons que l’Allemagne, qui ne fait jamais les choses à moitié, a mis cent milliards d’euros sur la table pour investir en matériel au profit de ses forces armées fédérales (Bundeswehr). Un fonds spécial a même été créé pour cela. La renaissance de l’esprit militaire allemand sous la pression de la menace venue de l’Est ?

Esprit militaire mais aussi esprit commercial. En associant douze autres pays de l’ à ce projet de défense antimissile, il est évident que l’Allemagne, si elle a moins de problèmes budgétaires que la France, n’en compte pas moins ses Deutsche Mark, pardon, ses euros. Elle espère faire ce qu’on appelle aujourd’hui des économies d’échelle. En août dernier, dans un discours sur l’avenir de l’Europe, le chancelier n’avait-il pas déclaré : « Moins cher et plus efficace que si chacun de nous construisait sa propre défense aérienne » ? Pourtant, il existe en Europe (j’allais dire « en Union européenne », mais non, car il y a aussi les Britanniques…) le système de moyenne portée terrestres (SMPT produit par MBDA, société industrielle, filiale d’Airbus, BAE Systems (société britannique) et Leonardo (second groupe industriel en Italie). Pour information, MBDA, c’est tout de même 12.000 emplois en France… Une nouvelle infidélité dans le fameux et mythique couple franco-allemand !

Mais ce couple franco-allemand est résolument moderne. La notion de cocufiage, qui relève désormais du musée des antiquités et des pièces de boulevard, n’est plus tendance. La preuve ?

En même temps qu’on apprend que l’Allemagne va se mettre en « trouple » avec la Belgique, la Bulgarie, la République tchèque, l’Estonie, la Finlande, la Norvège, la Lituanie, la Lettonie, la Roumanie, la Slovaquie, la Slovénie et les Pays-Bas, pour acquérir ce système Arrow 3, on apprend aussi que la France a commencé à livrer du gaz à l’Allemagne. Ce gaz dont l’Allemagne a tant besoin pour faire tourner ses usines. « Une première »« historique »« symbole de solidarité énergétique européenne »« la solidarité énergétique européenne est en marche », claironnent et s'émeuvent la plupart des médias. Pour ceux qui ont quelques notions historiques, c'est beau comme... Non, je n'ai rien dit. Il s’agit, bien entendu, de faire face à la fermeture du robinet de gaz russe. Emmanuel Macron, qui ne mégote pas lorsqu’il s’agit de donner des preuves d'amour au sein du couple (franco-allemand), a même promis de livrer jusqu’à 5 % des réserves de gaz françaises de cet hiver. En échange, la France espère qu’en cas de besoin, l’Allemagne pourra lui livrer de l’électricité, nous apprend Ouest-France avec l’AFP. Si l’on comprend bien, donc, la France livre le gaz en échange de promesses. Sans doute un marché équitable. De toute façon, en cas de  en France, on pourra toujours faire appel à l’esprit civique des Français en leur demandant de porter un col roulé et des mitaines. Leurs réserves de patience semblent, jusqu'à ce jour, inépuisables.

Pour résumer, si l’on comprend bien, la solidarité européenne et plus particulièrement l'amitié franco-allemande sont à géométrie variable. En gros, ça dépend des sujets et, bien sûr, il ne faut pas tout mélanger et tout ça...

Le dernier soldat français a quitté le Mali : Honneur à nos morts et blessés !

C’était le 2 février 2013, autant dire il y a une éternité. François Hollande, président de la République, sans doute enivré par l’euphorie de l’accueil qui lui avait été réservé à Bamako, dans la plus pure tradition de la défunte et très décriée Françafrique, déclarait : « Je veux ici vous dire que je viens sans doute de vivre la journée la plus important de ma vie politique. Parce que, à un moment, une décision doit être prise. Elle est grave. Elle engage la vie d’hommes et de femmes. Cette décision, je l’ai prise au nom de la France. Cette décision, elle honore la France. »

Trois semaines avant, le 11 janvier, alors que les Français sortaient à peine des fêtes du Nouvel An, François Hollande, à l’issue d’un Conseil de défense, donnait l’ordre en fin de matinée à nos armées d’engager le combat, en appui des forces maliennes, contre les djihadistes. Une intervention qui trouvait sa légitimité dans la demande d’assistance du  malien de l’époque. Le jour même, à 16 h 00, nos premiers hélicoptères d’attaque interviennent contre les colonnes  à hauteur de la ville de Konna, quelque 700 kilomètres au nord de Bamako. C’est là que meurt au combat notre premier soldat français, le lieutenant Damien Boiteux, pilote d’hélicoptères.

Ce dimanche 15 août 2022, le dernier soldat français quittait le Mali. Dans la grande indifférence d’une France en grandes vacances. Un retrait qu’un communiqué de la présidence de la République justifie ainsi : « Le 17 février dernier, constatant que les conditions politiques et opérationnelles n'étaient plus réunies pour rester engagée au Mali, la France a décidé, en concertation avec ses partenaires africains et européens, de réarticuler le dispositif de l'opération Barkhane en dehors du territoire malien. » Il est bien évidemment normal de saluer, comme l’a fait dans ce même communiqué le chef de l’État, la « réussite de cette manœuvre opérationnelle et logistique de retrait du Mali que nos armées ont conduite selon le calendrier annoncé, sans cesser leur combat contre les groupes terroristes ». Les situations ne sont pas comparables, mais tout de même, comment ne pas penser au retrait plus que chaotique, il y a tout juste un an, des forces américaines d’Afghanistan !

Comment ne pas penser, aussi, aux 59 militaires français qui ont laissé leur vie au cours de cette guerre de plus de neuf années dans la bande sahélo-saharienne contre les djihadistes. Comment ne pas évoquer les nombreux blessés, frappés dans leur pleine jeunesse, physiquement, psychologiquement, qui devront porter leur souffrance toute leur vie. Comment ne pas penser aux familles qui doivent continuer à vivre, malgré tout, et qui, elles, ne font pas de bruit.

Comment, enfin, ne pas penser à la France ? Une France qui ne cesse de perdre de son influence en Afrique. On peut invoquer les « conditions politiques » au Mali, saluer la réussite de la manœuvre logistique, la réalité n’en est pas moins là, cruelle : la France se redéploie ; en clair, elle recule. Et elle n’a pas été capable d’influer pour que ces « conditions politiques » lui soient favorables. Le 2 février 2013, François Hollande vécut peut-être la journée la plus importante de sa carrière politique. En ce 15 août 2022,  ne peut sans doute pas en dire autant.

Source : Bd. Voltaire.

 

Le professeur Delfraissy a des regrets.

Et les Français ?

Ainsi, ce 1er août 2022, prend fin l’état d’urgence sanitaire. Certes, après quelques péripéties parlementaires, le gouvernement a réussi, avec la complicité des LR, à se garder quelques cartes en main qui lui permettront, par exemple, par simple décret, de restreindre la  d’aller et venir, notamment entre les outre-mer et la métropole, mais globalement, nous voici sortis de cette sinistre période où le pouvoir avait pu tester avec succès et à grande échelle le « debout-assis-couché ». Masque-pas masque, passe sanitaire qu’on n'imposerait jamais et qui, finalement, le fut, vaccin qui ne sera jamais obligatoire mais qui, dans les faits, le devint quasiment… Ils nous auront tout fait, ou presque. Il est vrai, aussi, qu’à l’époque, ils disposaient d’une Assemblée nationale aux ordres. Les choses ont un tantinet changé depuis. C’est donc l’heure des retours d’expérience, des bilans, des évaluations. Pas pour Emmanuel Macron, qui a toujours raison et qui, s’il a tort, nous fait comprendre que c’est la faute des autres.

À l’occasion de cette fin de l’état d’urgence et de la disparition du Conseil scientifique, son président, le professeur ,a donné, samedi 30 juillet, une interview au Parisien. Reconnaissons-lui une certaine humilité face à ce phénomène qui a frappé  et notre pays, notamment lorsqu’il avoue : « Jamais je n’aurais cru qu’elle [la pandémie] durerait si longtemps. » Croire ne relève pas du domaine de la science, et pourta,nt le scientifique qu’est Delfraissy « n’aurait jamais cru »… Cela devrait faire réfléchir tous ces politiques et commentateurs de plateaux télé qui, pendant de longs mois, ont ramené leur science et leur rationalité, vouant aux gémonies ceux qui avaient l’outrecuidance d’émettre le moindre doute. La science, « idéal et méthode », pour Emmanuel Macron, érigée en véritable religion. Avec des décisions politiques qui étaient prises par un Conseil de défense sanitaire, dans le tabernacle du secret défense, après avis du Conseil scientifique, il semblait qu'une véritable théocratie était en train de s'imposer aux Français.

Autre déclaration particulièrement intéressante du professeur Delfraissy, évoquant les débuts de la crise en février 2020 : « On posait plein de questions simples aux Chinois avec qui on échangeait en visioconférence : "Quel masque utilisez-vous ?" "À partir de quel jour faut-il intuber les malades ?" Et ils répondaient toujours à côté ! Leur ambiguïté m’a fait penser que la crise était sûrement beaucoup plus grave que ce qu’on croyait. » Et le journaliste de demander : « Les Chinois ont donc caché la vérité ? » Réponse de Delfraissy : « À cette réunion, ils ne nous ont pas tout dit ! » À quand la réhabilitation des excommuniés pour cause de complotisme ? Car on se souviendra que, durant cette période, émettre la moindre hypothèse qui sortait de la doxa, c'était prendre le risque d'être inculpé pour « complotisme », variant du « populisme ».

Enfin, comment ne pas évoquer les regrets, sinon les remords, de Delfraissy. Un regret « profond » qui le suivra tout au long de sa vie, nous dit-il : « En juin 2020, lors du  dans les EHPAD, on a mis la santé avant tout, au détriment, peut-être, d’une forme d’humanité, ce qui a entraîné des syndromes de glissement, des personnes âgées qui se laissaient mourir d’ennui. » Le bon docteur  oublie d’évoquer ces enfants, ces parents, ces grands-parents qui, au début de la pandémie, ont été enterrés pratiquement comme des chiens avec pour seul linceul une housse en plastique. Le très laïcard Mélenchon s’en était même ému dans un texte de belle tenue. « Aujourd’hui, le directeur de l’EHPAD note le dernier souffle et il sera le seul témoin de la mise en bière conformément à son contrat de travail… Ce monde si prompt à tout transformer en chose est parvenu au bout de ce qu’il est, au sens ultime du néant auquel il a voué la civilisation humaine et la nature qui l’entoure. » Que pensent aujourd’hui ces familles, qui ont souffert et souffrent sans doute encore dans leur chair et leur âme des décisions gouvernementales, des regrets du professeur Delfraissy ? Peut-être de la colère qui est aussi « une forme d’humanité ».

 

Emmanuel Macron en difficulté : D’un coup, la République est en danger !

Source : Bd. Voltaire.

 

« La République, c’est moi », s'exclamait Jean-Luc Mélenchon, en 2018. « Eh bien, non, la République, c’est moi », lui répond aujourd’hui son frère siamois Emmanuel Macron. Il ne le dit pas comme ça, mais c’est tout comme : « Dimanche, aucune voix ne doit manquer à la République », a-t-il déclaré, mardi 14 juin. La République en quoi ? En marche ? Non, la République tout court. Carrément.  n’est pas président de la République, il est LA République.

Et  n’a pas lancé ça n’importe comment, n’importe où, n’importe quand. Très solennellement, avant de s’envoler pour la Roumanie, derrière un pupitre blanc, très institutionnel, avec en arrière-plan l’avion présidentiel, frappé aux couleurs nationales. Juste avant d’aller rendre visite à nos soldats déployés en Roumanie dans le cadre de l’OTAN. La dramaturgie est parfaite. Du régalien en veux-tu en voilà. Ce qui ne manque pas de sel, lui qui participe activement à la liquidation de notre souveraineté à la grande braderie bruxelloise. Mais à quoi servirait le pouvoir si on ne pouvait en abuser ? Notamment le pouvoir de l’image et du mélange des genres : mélanger une campagne électorale avec une visite à nos soldats. Et Macron y va plein pot. Rien de tel, donc, que de jouer et rejouer le coup du parti de l’ordre. « L’intérêt supérieur de la nation » : ça plaît toujours à un certain électorat qui a passé l'âge de monter aux barricades. « L’obéissance » ! Si, si. Le mot n'est pas de Macron mais d’ qui, aux abois puisqu'en ballottage défavorable dans l'Essonne, a lâché ce mot, sans peut-être y prendre garde, sur CNews, lundi. « Soyez obéissants, votez pour les candidats du Président ! » C’est en gros ce que déclarait cette jeune femme bien sage qui découvre d’un coup que les élections ne se présentent pas toujours comme celles d’un certain mois de juin 2017…

Le parti de l’ordre, donc. Un truc aussi vieux que les candidats officiels sous le Second Empire. Ainsi, Emmanuel Macron a « besoin d’une majorité solide pour assurer l’ordre à l’extérieur comme à l’intérieur de nos frontières… Rien ne serait pire que d’ajouter un désordre français au désordre mondial. » La France a été la risée du monde lors de la finale de la Ligue des champions, le 28 mai dernier ; à la moindre manifestation, les Black Blocs font la loi dans la rue ; on a été obligé, en 2018, d’inventer un dispositif policier de «  républicaine » des quartiers (au fait, on en est où, de cette reconquête-là ?) ; la délinquance explose (le nombre de victimes de coups et blessures volontaires est passé de 225.500, en 2016, à 306.700, en 2021. Les Échos, 27 janvier 2022) ; quant au front de l’immigration, n’en parlons pas… Mais à part ça, la France est un modèle du genre en matière d’ordre intérieur…

Emmanuel Macron a « besoin d’une majorité solide… » Pas tellement pour assurer la stabilité des institutions, comme lui et ses acolytes essayent de le faire croire, mais parce qu’ils ne savent pas faire autrement. On pensera ce qu’on voudra d’un  Rocard, mais ce dernier, qui fut Premier ministre de 1988 à 1991, fut capable de gouverner avec une majorité relative. Parce qu’il avait la culture du compromis et du débat. Parce qu’il avait tout simplement une culture parlementaire. Or, avant tout, un Parlement est fait pour parlementer ! Toutes choses qui ne sont pas « dans l’ADN » de la Macronie qui ne peut survivre qu’en situation monopolistique. Alors, on ne sera pas étonné, comme nous l’apprend Le Point, qu’Emmanuel Macron ait reçu, lundi, très discrètement, Gérard Larcher, président du Sénat. S’il n’obtient pas cette « majorité solide » (et souple à la fois ?), il lui restera à se tourner vers les LR. Il s’en trouvera bien pour soutenir sa politique avec, à la clé, probablement, des promesses de maroquin à plus ou moins brève échéance.

 

Gouvernement : La fine équipe ?

Source : Bd. Voltaire - Le 20/05/2022.

On ne peut pas dire qu’ se sera précipité pour que soit formé le nouveau gouvernement. Sa réélection remonte à pratiquement quatre semaines et son second mandat a commencé officiellement samedi dernier. L’art de faire durer le plaisir et de gagner du temps avant les élections législatives, cette formalité administrative barbante à laquelle il faut encore se soumettre avant de reprendre les affaires sérieuses. En déplacement aux Mureaux, ce jeudi 19 mai, le nouveau Premier ministre, Élisabeth Borne, se payait même le luxe de se moquer du monde en déclarant, aux journalistes qui l’interpellaient : « On veut la meilleure équipe, ne vous impatientez pas… On y travaille [en se rendant « sur le terrain » ?] et vous verrez ! On ne va pas se mettre la pression. » C’est vrai, ça, la France a tout son temps. Mais on se demande ce qu’a fait tout ce beau monde, depuis le 24 avril ?

Mais c’est fait. Enfin. Le secrétaire général de la présidence, Alexis Kohler (photo), celui qui gouverne en vrai la France en binôme avec Emmanuel Macron, est apparu sur le perron de l’Élysée, selon la tradition, pour annoncer la liste des ministres. La cérémonie est moins palpitante qu’autrefois à cause des réseaux sociaux qui font tourner depuis plusieurs jours les noms et les têtes, tout du moins pour ceux qui s’intéressent encore à la politique dans ce pays. Évidemment, ce gouvernement Borne 1 – car il y aura probablement un Borne 2 après les législatives – répond à tous les labels de qualité exigés de nos jours : parité quasi parfaite, contrôle des patrimoines et des déclarations fiscales, écoresponsabilité, Europe à tous les étages et jeunesse, parce que la jeunesse, c’est important. Soulignons que la liste des éconduits ou des non-retenus est tout aussi intéressante que celle des nominés.

Ainsi, Jean-Yves Le Drian quitte le gouvernement après dix ans sans interruption à la tête de deux ministères régaliens : la Défense sous Hollande, les Affaires étrangères sous Macron. Présenté comme un poids lourd de la politique, on retiendra que c’est sous son ministère que le Quai d’Orsay est devenu le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères : un symbole ! Que l’influence de la France n’a cessé de reculer en Afrique : une réalité ! Pour lui succéder, Catherine Colonna, cette inconnue du grand public, ministre délégué aux Affaires européennes dans le gouvernement Villepin de 2005 à 2007, coche pas mal de cases du cahier des charges : une femme au Quai d’Orsay (la deuxième de l’Histoire après Michèle Alliot-Marie), une des rares femmes à avoir été élevées à la dignité d’ambassadrice de France et, actuellement, ambassadrice de France au Royaume-Uni. Une désignation qui vise probablement à essayer de raccrocher la barque anglaise au paquebot européen. L’Europe dans le viseur.

Autre éconduit, Jean-Michel Blanquer. Le mouton à cinq pattes du début du premier quinquennat Macron, présenté comme une sorte de Jules Ferry du nouveau monde, est donc remercié. Est-ce sa défense d’une laïcité de stricte observance et son combat contre le wokisme qui lui auront coûté son licenciement ? En tout cas, la nomination de Pap Ndiaye pour lui succéder est un message clair et net : ce normalien et agrégé est actuellement directeur du musée de l’Histoire de l’immigration. En 2005, lorsque fut créé le Conseil représentatif des associations noires (CRAN), il intégra son conseil scientifique. Ceux qui attendaient que l’on enseigne « Nos ancêtres les Gaulois » pour « faire nation » seront servis.

Outre la nomination de Colonna et Ndiaye et la promotion de personnalités comme Amélie de Montchalin, nommée à la Transition écologique et à la Cohésion des territoires, ou Sébastien Lecornu, aux Armées, pas d’autres grandes surprises. Si, peut-être, le nouveau ministre de la Culture Rima Abdul-Malak qui, elle aussi, coche toutes les cases, voire plus. On retiendra surtout qu’ a puisé dans sa garde rapprochée pour trouver un ministre de la Culture, puisqu’elle était jusqu’à présent conseillère Culture à l’Élysée. Roselyne Bachelot va donc pouvoir poursuivre sa retraite, depuis longtemps bien méritée, sous d’autres cieux. Peut-être un retour aux « Grosses Têtes » de Ruquier ?

Sinon, pour le reste, pas grand-chose de nouveau. Le Maire et Darmanin restent à leur poste en piliers du dispositif macronien, respectivement numéros deux et trois dans l'ordre protocolaire du gouvernement. Un premier clin d’œil, tout de même, avec le transfert de Véran aux Relations avec le Parlement. Les députés se souviendront peut-être du jour où il avait littéralement « pété les plombs » en demandant aux députés qui le chahutaient de sortir de l’Hémicycle… Autre clin d’œil encore – d’aucuns diront bras d’honneur : malgré sa mise en examen, Éric Dupond-Moretti reste à la Chancellerie. Comme dans toute tragédie - ou comédie -, il faut un traître : il a pour nom Damien Abad, ministre des Solidarités, qui, à la veille de sa nomination, se désolidarisait des prises de position des LR, son parti d'origine qui n'en finit pas d'agoniser.

Enfin, un tout dernier clin d’œil : On note l'absence remarquée de Christophe Castaner dans cette fine équipe.

 

Élisabeth Borne, Premier ministre ou première collaboratrice d’Emmanuel Macron ?

Source : Bd. Voltaire.

 

Le 16/05/2022

 

Ça y est, c’est fait. On a enfin l’oiseau rare, le mouton - ou plutôt la brebis - à cinq pattes, la perle rare. Élisabeth Borne est donc le nouveau Premier ministre. Elle est la vingt-quatrième personnalité et la deuxième femme de la Ve République à être désignée pour prendre possession de l’hôtel de Matignon, considéré comme une véritable lessiveuse pour ses occupants.

Celle qui fut, cinq ans durant, ministre des différents gouvernements d’Emmanuel Macron (Transports, Écologie, Travail) est une technicienne bardée de diplômes (X, Ponts), haut fonctionnaire, préfète, patronne de la RATP de 2015 à 2017. Aucun mandat électif, aucun poids politique, ce qui est un avantage pour Emmanuel Macron. Un avantage car cette bosseuse qui connaît ses dossiers ne fera pas d’ombre au Président. Peu de chance qu’elle lui fasse le coup de celui qui veut être calife à la place du calife. On serait méchant comme Sarkozy, on dirait qu’elle sera sa première collaboratrice, on va dire sa directrice de cabinet. Elle connaît le job puisqu’elle dirigea celui de Ségolène Royal, ce qui lui donne, vite fait et de fait, un label de gauche.

Son nom avait été soufflé, au lendemain du second tour de l’élection présidentielle. Et puis d’autres noms étaient sortis du chapeau médiatique : Marisol Touraine – on a eu peur, franchement -, Audrey Azoulay – charmante personne qui fait sans doute de l’excellent travail à l’UNESCO - et même la LR Catherine Vautrin - une horreur absolue pour les progressistes que sont les macronistes : elle avait manifesté contre le mariage homosexuel ! On pourrait se demander à quoi  a joué durant ces longues semaines. A-t-il trouvé du plaisir à faire gamberger tout le petit monde  et médiatique, sachant que le bon peuple se moque probablement de cette désignation qui n’aura sans doute pas de conséquences sur le prix de l’essence à la pompe et du litre d’huile ? A-t-il vraiment hésité, coché, décoché, recoché les noms sur son petit carnet ? Ou bien cette attente était-elle calculée ? En amusant la galerie avec la désignation du successeur de Jean Castex, Emmanuel Macron a gagné trois semaines sur la campagne des  législatives qui se tiendront les 12 et 19 juin prochains. C’est toujours ça de pris. Passons sur l'événement que serait la désignation d’une femme à Matignon : on s’étonne, en effet, qu’en France, en 2022, on en soit encore à s’esbaudir d’un tel événement qui ne devrait pas en être un.

On vante les capacités de négociation du nouveau Premier ministre. Peut-être. Néanmoins, on notera que le nom d’Élisabeth Borne est associé à la suspension des  non vaccinés. Très important, il paraît qu’il faut dire « Première ministre » et non « Premier ministre ». Effectivement, le progressisme est aux commandes du pays.

 

 

Un policier jette à terre un drapeau tricolore : acte manqué ou prémonitoire ?

Le 14/02/2022.

Source : Bd. Voltaire.

 

La scène, filmée par Aymeric Couchourel pour , ne dure que quelques secondes. Elle se déroule ce samedi 12 février après-midi, en plein Paris. Des policiers arrachent le  français à un automobiliste, manifestant du Convoi de la liberté, et le jettent à terre. On doit être à quelques centaines de mètres, à peine, de l’Arc de Triomphe, là même où Macron décida que le drapeau européen flotterait, seul, sous l’arche sacrée, le 1er janvier 2022, pour inaugurer son règne de pacotille en tant que président du Conseil de l’Union européenne. Tout un symbole !

 

(Images Aymeric Couchourel)

 

Ce manifestant, sans doute un « Français moyen », vivant en zone périurbaine ou rurale, est monté à la capitale avec sa bagnole. Que n’a-t-il pas fait ? La Ville Lumière, ces grandes avenues hausmanniennes, ce n’est pas pour lui. Lui, ce qu’on lui demande, c’est, déjà, de faire un petit effort pour la planète : Par exemple en allant au boulot à vélo ou à trottinette. Mieux : En prenant les  en commun. Son boulot, l’école des gamins, le judo pour son garçon, la danse pour sa fille sont à quinze bornes ? Faudrait peut-être voir à trouver un logement plus près. La maison individuelle est un « non-sens écologique », qu’il a dit, le ministre Wargon. Bon, s’il ne peut pas faire autrement que de prendre sa voiture, au moins qu’il se contente de faire le strict nécessaire : le boulot (on l’a dit), l’école, la zone commerciale le samedi après-midi, point barre. Si, à la rigueur, une ou deux fois par an, on veut bien qu’il sorte de sa réserve de Gaulois pour en rejoindre une autre, au camping, par exemple, histoire de faire marcher le commerce. Mais monter à la capitale, vous n’y pensez pas ! Faut laisser ça aux racailles de banlieue, les soirs de match, et aux  qui font l'objet de toute la sévérité que l'on sait de la part du pouvoir.

Apparemment, ce manifestant est aussi un patriote. En tout cas, il doit le revendiquer, même si, comme l'a affirmé le ministre Beaune, avec la morgue qui le caractérise, ce convoi est celui « de la honte et de l’égoïsme », et que ces gens « ne sont pas des patriotes » mais « des irresponsables ». Cet automobiliste, qui n’agite pas le  rouge ou le drapeau noir mais le drapeau tricolore, au fond, représente tout ce qu'on peut détester en Macronie. Et brandir le drapeau tricolore, semble-t-il, deviendrait donc un acte séditieux. Le policier qui a arraché ce misérable petit drapeau et l’a jeté par terre est probablement, lui aussi, un bon patriote et il n’a sans doute pas saisi la portée symbolique de son geste. Irons-nous jusqu’à dire que cet agent public a commis un outrage au drapeau tricolore, une contravention de 5e catégorie punie d’une amende ? On laissera les juristes en juger…

Cela dit, notre souveraineté étant en grande partie transférée ailleurs, on peut à juste titre se demander à quoi rime encore ce pavoisement tricolore de nos bâtiments officiels, ce maintien d’une fiction à travers ce symbole bleu blanc rouge qui permet à un président de la République de s’imaginer souverain alors qu’il n’est plus qu’un super préfet. Ce pauvre  arraché des mains d’un « gueux » et jeté sur le pavé parisien par un policier n'est peut-être, finalement, que l'allégorie en miniature de ce qui se passe pour notre pays

Macron : Besoin de rien, envie de lui ?

Le 11/02/2022.

Source : Bd. voltaire

 

Cette campagne sera fraîche et joyeuse. Et surtout courte, le Président n’étant pas encore sorti de sa fausse ambiguïté où il se tient bien au chaud et tout à son avantage. Trop occupé ailleurs. Il y a ceux qui refont le monde (ses adversaires) et ceux, comme lui, qui le sauvent. On ne peut pas être partout : faire face à  et en même temps discutailler avec des candidats de comices agricoles sans intérêt.

Et puis, il faut savoir se faire désirer. C’est un métier, parfois une profession - pas toujours réglementée -, un art même. Se faire désirer, voire faire envie. Car, c'est bien connu, il vaut mieux faire envie que pitié. Voyez Valérie Pécresse avec sa parka moche. Les  avec Macron (JAM) l’ont bien compris. La preuve : leur dernière affiche : « On a très envie de… vous ! », slogan accompagnant la bobine du Président. On se calme,  gens ! Il paraît - nous rapporte le Huffpost – que cette envie pressante ne fait aucunement référence à la déclaration du Désiré qui avait « bien envie d’emmerder les non-vaccinés ». Ben voyons, comme dirait l’autre !

C’est en tout cas le deuxième étage de la fusée JAM pour lancer la campagne de leur idole. On n’attend plus qu’elle pour ouvrir le bal. Après « Avec vous », qui a été l’occasion de quelques détournements dont celui du Rassemblement national (« Sans lui »), voici venir l'« envie de vous ». Et puis pas qu'une petite envie, hein ! Visiblement, chez les  avec Macron, on est chaud comme la braise ou la baraque à frites. Comme nous l’expliquions en janvier dernier, l’envie, ce n'est pas toujours joli-joli. C'est, parfois, ce qui nous ramène à nos bas instincts. Invidia n'était-elle pas à Rome la déesse de l’envie et de la jalousie ? On a donc très envie de Macron, comme d'autres, le soir, de fraises tagada, ou de bagatelle, le petit matin venu. La  nous ouvre ainsi de nouveaux horizons.

Sans doute, ce slogan provocateur ne va pas manquer d’être détourné comme le précédent. Et l’on imagine, à l’envi. « Très envie qu’il s’en aille, qu’il soit battu, qu’il dégage… » Et pire, peut-être... Bien évidemment, c’est l’occasion, une fois encore, de nous rappeler les paroles inoubliables de ce chef d’œuvre de la variété française des années 80, interprété par le non moins inoubliable duo Peter et Sloane : « Le jour se lève/Dans la tendresse/Sur la Ville/Tu me fais vivre/Comme dans un rêve/Tout ce que j’aime/Besoin de rien, envie de toi/Comme jamais envie de personne. » En gros, une sorte de synthèse des années Macron. Si vous n'avez besoin de rien, vous pouvez voter pour lui...

Une statue de l’émir Abdelkader à Amboise : Il fut aussi l’ami de la France - Le 02/02/2022.

Source : Bd. Voltaire.

 

Vous verrez qu’un jour, on fera du  un défenseur de la cause LGBTQI+. Si, si, en faisant un effort, on doit pouvoir y arriver. Tenez, par exemple : du char d’assaut aux chars de la Marche des fiertés, il n’y a qu’un pas. À moins que - c’est possible aussi - on en fasse un homophobe de la pire espèce et que, du coup, on lance la petite entreprise de démolition qui ne connaît pas la crise sur le chantier. Il ne faut pas grand-chose, parfois, pour que ça penche d’un côté ou de l’autre. L’Histoire est devenue le rayon bricolage des réparateurs de mémoire en tout genre.

Emmanuel Macron aime bien le bricolage. En décembre 2020, interviewé par Brut, il émettait le souhait que soit établie une liste de 300 à 500 personnes issues des outre-mer, des anciennes colonies et de l’immigration pour aider les maires (des incultes, sans doute) dans leur  de renouvellement de noms de rues, places et bâtiments publics. Aussitôt dit, aussitôt fait – c’est l’avantage des monarchies absolues -, une liste de 318 personnalités était publiée en mars 2021. Parmi ces personnages, l’émir Abdelkader ibn Muhieddine (1808-1883), descendant du prophète. De son côté, en janvier 2021, on se souvient que  avait remis à Emmanuel Macron un rapport (le fameux rapport Stora !) dans lequel il préconisait qu’une stèle en mémoire de ce personnage devenu mythique soit érigée au château d’Amboise (Indre-et-Loire) où il fut emprisonné, de 1848 à 1852, avec sa famille et sa nombreuse suite, après sa reddition au général de Lamoricière en décembre 1847. C’est ainsi que, samedi 5 février, sera inaugurée dans la petite ville tourangelle une statue de celui qui devint l'ami de la France après l'avoir combattue. Celui, aussi, que l’Histoire officielle algérienne a consacré comme unificateur de l’Algérie et résistant à la conquête française. C'est ce que l’historien Bernard Lugan, bien connu des lecteurs de Boulevard Voltaire, appelle « une histoire fabriquée » sur laquelle repose la « légitimité » du « Système algérien ». Le bricolage ne connaît ni crise ni frontières.

Interviewé, en janvier 2021, par France Bleu Touraine, Benjamin Stora justifiait ainsi sa proposition : « Pour moi, c’est un homme passerelle, puisqu’il a défendu les chrétiens à Damas en 1860… » Homme passerelle, effectivement, si l’on considère schématiquement les trois périodes de la vie d'Abdelkader : tout d'abord, le chef d'une rébellion qui, du reste, n’eut rien d’un soulèvement national, contrairement à ce que l'Algérie indépendante a voulu faire croire, comme l’explique Bernard Lugan ; puis la phase transitoire que fut celle de sa détention en France ; enfin celle de l’ami de la France, couvert d’honneurs après l’épisode syrien dont il sera question plus loin. Cette stèle serait donc, estimait Stora, « comme un signe de réconciliation entre les deux pays ». On ne peut que s'en réjouir.

Libéré en 1852 par Napoléon III, Abdelkader, après quelques péripéties, s’installa à Damas en Syrie. En 1860, le quartier chrétien de Damas est attaqué par les Druzes. Plus de 3.000 personnes sont massacrées. L’émir, aidé de ses fils, met en sécurité chez lui de nombreux chrétiens, notamment les sœurs de la Miséricorde. En récompense, Napoléon III l’éleva directement à la dignité de grand-croix de la Légion d’honneur, décoration qu'il portait volontiers, avec toutes celles qui lui avaient été décernées par de nombreux pays européens, lors de ses visites à Paris en 1865 et 1867. Or, on notera que le pouvoir FLN s’évertua à effacer ces décorations dans l’iconographie officielle. Ainsi, dans les années 1980, le président Chadli avait demandé à un artiste la réalisation d’un portrait d'Abdelkader pour un futur musée de l’Armée. Le peintre prit pour modèle une photo où l’émir était paré de ses décorations. Décorations qui, comme par enchantement, ne figurent pas sur le tableau. Anecdote révélatrice de cette « histoire fabriquée », selon l’expression de Lugan. Représenter l'émir bardé de décorations remises par le colonisateur, c'était reconnaître l'allégeance à ce colonisateur.

La « passerelle » que Stora appelle de ses vœux est une belle idée. Mais elle ne peut s’appuyer que sur les piliers de la vérité. Qu'en est-il lorsque celle-ci est occultée ? Du reste, la statue érigée à Amboise ne représente pas l’émir, la poitrine barrée du cordon de la Légion d’honneur. C’est dommage.

Un détail ? Pas tant que ça. Un oubli, une volonté ?

 

Qui sont les politiques les plus invités aux matinales ? - Le 01/02/2022.

Source : Bd. Voltaire.

 

Le monde appartient à ceux qui se lèvent tôt, dit-on. D’où, peut-être, le succès des fameuses matinales radiophoniques ou télévisées. En trempant sa tartine dans son bol, en patientant dans les embouteillages pour aller bosser, si on écoute la radio. En faisant son repassage ou travaillant derrière son ordi, si on préfère la télé. Cinq jours par semaine, les Calvi, Mabrouk, Salamé, Bourdin (non, plus Bourdin…), Malherbe, Ferrari, Roux et les autres passent au grille-pain le tout politique.

Il y a ceux qui ont en quelque sorte leur rond de serviette et dont on connaît les habitudes de ce repas si important pour bien commencer la journée qu'on nous dit, et ceux qui ont peut-être du mal à se lever le matin. Pas certain que cela soit la bonne explication de certaines disparités. Ainsi, Le Figaro du 1er février nous fait un petit bilan pour le dernier semestre 2021. Qui sont les hommes et femmes politiques les plus souvent conviés, quelles sont les formations politiques les plus invitées ?

Parmi les quinze personnalités arrivées en tête de ce palmarès des lève-tôt de la politique, on trouve Gabriel Attal, Éric Ciotti et Jordan Bardella. Et l'on dit que les jeunes n'arrivent pas à se lever le matin ! Le porte-parole du  a été invité 21 fois, le député des Alpes-Maritimes 17 fois et le président par intérim du Rassemblement national 16 fois. Viennent ensuite Valérie Pécresse (15 fois) et Robert Ménard (14 fois). Il faut aller à la dixième place pour trouver des personnalités de gauche-gauche (Yannick Jadot, Sandrine Rousseau et Fabien Roussel, reçus tous les trois 12 fois). Pas un socialiste dans les quinze personnalités les plus invitées. Si, quand même, un ancien de la maison : Christophe Castaner, convié 11 fois, ex aequo avec l’ancienne LR, la très bourgeoise Amélie de Montchalin. Sinon, aucun socialiste, canal historique. C’est vrai que lorsqu’on est inaudible, c’est difficile de passer à la radio. L’Insoumis Adrien Quatennens arrive en queue du peloton avec Bruno Le Maire : dix matinales.

Donc, comme ça, en première lecture, on peut se dire que c’est assez bien réparti : de l’extrême droite à l’extrême gauche en passant par l’extrême centre, il y en a pour tous les goûts au petit dej’.

Maintenant, si on s’amuse à additionner les interventions dans ce peloton de 15 personnalités, que constate-t-on ? Du côté de la Macronie, avec Attal, Blanquer, Borne, Beaune, Montchalin, Castaner, Le Maire, on cumule 92 matinales sur les 213 de ce second semestre 2021, soit 43 % du temps d’antenne. C'est pas mal, non ?

Autre façon de voir les choses : en prenant en compte les interventions gouvernementales et celles des formations politiques. Que relève-t-on alors ? Sur 718 passages à la radio ou à la télé, le  arrive largement en tête : 193 fois. C’est ce qui s’appelle faire de la pédagogie. On dit aussi de la marteau-thérapie. Les Français sont le peuple le plus intelligent de la Terre, mais vous savez, il faut du temps pour tout bien leur expliquer. Ensuite viennent les Républicains (162 fois), puis le PS (87 fois), bien que ses gros calibres ne fassent pas partie des 15 pointures citées plus haut. Vient ensuite la majorité présidentielle (rien à voir avec le gouvernement, on est bien d’accord…) : 76 fois. Au total, gouvernement et majorité présidentielle cumulent 37,50 % du nombre de passages. C'est pas mal, non plus, non ? Les écolos et La France insoumise suivent ex aequo avec 46 interventions. Le RN, lui, n’a accédé au micro que 42 fois durant ce second semestre.

Vous me direz que ce n’est pas la quantité qui fait la qualité.

 

BHL, va-t-en-guerre en Ukraine ? Le 31/01/2022.

Source : Bd. Voltaire.

 

100.000 soldats russes sont donc massés à la frontière ukrainienne. Les Américains estiment, selon l’AFP et L’Obs du 29 janvier, que les Russes pourraient attaquer l’Ukraine en février. En février : c’est demain, c'est aujourd’hui…

À titre indicatif, l’armée de terre française compte environ 120.000 militaires. Un autre chiffre, pour fixer les ordres de grandeur : environ 70.000 soldats américains, dans le cadre de l’OTAN, sont déployés en permanence en Europe. En Allemagne, s’ils étaient 200.000 en 1990, ils sont encore 34.500 (chiffres de 2021). La semaine dernière, Joe Biden a annoncé qu’il allait envoyer des renforts en Europe. « Pas beaucoup », a-t-il dit. 8.500 soldats – tout de même – ont été mis en alerte. La France, de son côté, a annoncé, samedi 29 janvier, par la voie du ministre Parly, l’envoi de « plusieurs centaines » de militaires en Roumanie, pays limitrophe de la Russie et de l’Ukraine.

Alors, va-t-on vers la guerre ?

Vendredi, le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, appelait les Occidentaux à ne pas semer « la panique » en agitant le risque d’une invasion russe. Le même jour, Macron et Poutine s’entretenaient au téléphone et tombaient d’accord sur « la nécessité d’une désescalade ». Ce lundi, les États-Unis et ses alliés de l’OTAN font cependant peser la menace sur la Russie de nouvelles sanctions et, au moment même où ces lignes sont écrites, le Conseil de sécurité se réunit. Conseil de sécurité dans lequel la Russie est membre permanent avec pouvoir de veto sur les décisions… Jeu du chaud et du froid. Partie de poker ou d’échecs. Jusqu’où ne pas aller, la différence entre un incident et un accident ne tenant parfois qu’à un fil, à l’imprévu qui n’était pas dans le plan ?

Dans ce grand jeu (qui n’en est pas un) diplomatico-militaire, il ne manquait plus qu’une voix, forcément autorisée : celle de Bernard-Henri Lévy. C’est fait. Pas en France, mais aux États-Unis. Jeudi dernier, BHL donnait une interview à la chaîne Fox News, réputée pour ses positions conservatrices. « Ce que je vois, c'est un acte de guerre et de chantage incroyable de la part de Vladimir Poutine [...] Poutine n'est plus un partenaire de l'Europe. Il n'est plus un adversaire. Il agit comme un ennemi. Et vous avez eu ces derniers jours une série de déclarations menaçant l'Europe [d’] une guerre totale. C'est une situation très très grave qui va bien au-delà du sort de l'Ukraine. » Et le philosophe d’ajouter : « Nous n'avons pas le choix. Nous ne vivons pas dans un monde d'anges […] La prochaine étape pourrait être Taïwan ou ailleurs, et toute la carte du monde sera changée. Nous vivrons dans un autre monde dominé par les Chinois, dominé par les Russes. Est-ce ce que veulent les électeurs américains ? Si nous voulons la paix, nous devons accepter la guerre froide. »

Ce n’est pas faux, c’est sans doute vrai et si l’on peut ressentir une naturelle sympathie pour la Russie, liée à l’Histoire, à sa défense des valeurs chrétiennes et traditionnelles, on n’est pas obligé d’être naïf vis-à-vis de « l’ogre russe ». Alors, on va dire que BHL nous refait le coup comme en 2011 avec la Libye, lorsqu'il jouait de son influence pour que les Occidentaux dessoudent Kadhafi. Son titre de gloire, d'ailleurs. Au micro de France Inter, le 1er avril 2018, il déclarait : « Si j’ai une petite responsabilité dans le fait qu’ils ont lancé cette opération de sauvetage et qu’ils ont continué, tant mieux, je suis très fier de ça. » On sait, maintenant, le chaos migratoire qu’a provoqué par la suite cette expédition militaire...

Pour revenir à l’Ukraine, BHL, bien évidemment, est allé voir là-bas. C’est sa marque de fabrique, souvent contestée ou moquée. Il est allé dans les tranchées ukrainiennes, tel Clemenceau. Voici ce qu’il en a ramené : l’Ukraine a « une armée forte avec un moral patriotique élevé, et ils se battront. Par conséquent, cette guerre, si Poutine décide d'envahir, sera très sanglante et sale. Les Ukrainiens d'aujourd'hui sont capables de se battre, capables de se défendre. J'ai vu leurs tranchées, j'ai vu leurs armes. Ils n'en ont pas assez pour gagner, mais ils en ont assez pour se défendre. » En gros, on risque une guerre du fort au fort. Des propos qui sont, finalement, à bien y réfléchir, pas si va-t-en guerre que ça, l'opinion américaine n'ayant pas forcément envie de se relancer dans une aventure guerrière. D'autant que, si guerre il advenait, elle serait tout sauf fraîche et joyeuse.

« Une campagne de morts-vivants » : Gabriel Attal n’y va pas de main-morte ! - Le 30/01/2022

Source : Bd. Voltaire.

 

Le 10 mai 1981, la France passait « de l’ombre à la lumière ». Ainsi parlait Jack Lang. Demain, si Emmanuel Macron venait à rater cette formalité administrative quelque peu incongrue qui consiste à repasser devant les électeurs et que l’un ou l’autre de ses opposants avait le mauvais goût de gagner l’élection présidentielle, on entrerait donc dans des temps abominables où zombies et autres vampires viendraient hanter notre pays et sucer son sang. À en croire le prophète Gabriel Attal. Moins emphatique que Jack Lang, plus « punchline » ; question d’époque et de génération, dirons-nous.

Interviewé par Le Parisien, ce dimanche 30 janvier, le porte-parole du gouvernement (et non du non-candidat à l’élection présidentielle !) est interpellé par le journaliste : « Le fait que le Président retarde l’entrée dans l’arène n’aide pas à animer le débat, non ? » Le prophète a réponse à tout : « L’absence de débat est le fait des candidats déclarés. Ils installent une campagne de morts-vivants : tout est noir, pessimiste, nostalgique. » C’est pas comme Emmanuel Macron. Lui, il « a fait entrer notre pays dans le temps des conquêtes ». Carrément ! À son passage, la mer s’écarte, les serpents se transforment en bâton (et pas le contraire) et il nous fait entrer dans un pays ruisselant de miel et de lait. Et on n'a encore rien vu. « Quand la situation sanitaire et internationale le permettra, il proposera, je l’espère, d’aller encore plus loin encore pour l’avenir. » « Aller encore plus loin pour l’avenir » : c’est joli, mais ça ne veut pas dire grand-chose. Mais bon, ça ne mange pas de pain et ça n’en donne surtout pas. C’est l’esprit des premiers temps qui renaît, celui des marcheurs qui marchaient comme les Shadoks pompaient. Au fait, ça ressemblera à quoi, ce pays de cocagne, cet eldorado, cette terre promise ? Un pays « avec des devoirs qui passent avant les droits... » Bah, il existe déjà, ce pays : c'est pas la Chine ?

En face, en revanche, donc, on a une campagne de morts-vivants. De pousse-mégots, de rabat-joie, de peine-à-jouir, de faces de carême. Bref, de crevards. Il y a, paraît-il, pour faire simple, deux catégories de morts-vivants : les cadavres réanimés, tout droit sortis du cimetière où ils s’ennuyaient ferme, vu que c'est  tous les soirs, et les esprits, du  fantômes et autres spectres qui se baladent dans les couloirs du manoir revêtus d’un drap piqué dans l’armoire Henri VIII, juste à côté de l'armure rouillée. Le bon docteur Véran devrait rapidement être appelé en consultation pour donner son diagnostic afin de savoir à quelle catégorie appartiennent Valérie Pécresse, Marine Le Pen, Éric Zemmour, Anne Hidalgo, Yannick Jadot and Co. Marlène Schiappa, dont on connaît le goût pour la sorcellerie, pourrait apporter utilement sa contribution. Elle viendrait avec sa gousse d’ail : paraît que c’est efficace.

Franchement, cette campagne promet d’être passionnante. Les morts-vivants n'attendent plus que le démiurge. À moins qu'ils n'aillent le chercher. « Ils viennent te chercher, Barbara... » (in La Nuit des morts-vivants).

Emmanuel Macron, candidat « en temps voulu ». C’est-à-dire ?

Source : Bd. Voltaire.

 

« En temps voulu », il a dit. En non-campagne électorale dans la Creuse, lundi 24 janvier, Emmanuel Macron a répondu ainsi à la question d’un étudiant qui l’interrogeait sur sa candidature pour un deuxième mandat. Une expression passe-partout qui permet de gentiment botter en touche et de maintenir le suspense. Après tout, c’est de bonne guerre.

« En temps voulu » : la même expression que le président de la République avait employée, en 2019, après l’incendie de Notre-Dame. « J’ai eu le pape au téléphone. Je l’ai évidemment invité à venir et il viendra en temps voulu. » En temps voulu, c’est-à-dire le moment venu. Le moment n’est, semble-t-il, pas encore venu et le pape encore moins. N’allez pas en déduire qu’on imagine un seul instant qu’Emmanuel Macron ne sera pas candidat. Il le sera afin de terminer le travail si bien commencé. En plus, réélu, sauf si les Français décidaient en juin de ne pas mettre tous leurs œufs dans le même panier en ne réélisant pas une Assemblée aux ordres, ce sera open bar pour cinq ans et dans tous les domaines : sociétaux, sociaux, transfert des dernières bribes de souveraineté à Bruxelles, etc., and so onund so weiter...

Non, il sera candidat et, pour l’instant, il profite au maximum de son supposé statut de « maître des horloges ». En clair et en moins lyrique, il joue la montre. Faire campagne aux frais de la princesse, c’est quand même bien pratique. On s’est moqué de Valérie Pécresse nous annonçant en chuchotant qu’elle partait pour le Doubs en voiture et pas en Falcon, mais il faut reconnaître que sur le fond, elle avait raison. Du reste, ce mardi matin, sur l’antenne d’Europe 1, Éric Ciotti a invité la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) à se « saisir du problème ».

Faire campagne à bon compte, retarder le moment venu, tenter de s’imposer comme le candidat naturel de l’ordre et éviter le débat avec ses adversaires ? Pour l'instant, « ça passe crème ». Le sénateur Stéphane Ravier a beau jeu d'ironiser, dans un tweet, sur cette situation qui commence à lasser : « Son Altesse Sérénissime Emmanuel Ier ne veut pas se rabaisser à débattre ? Peut-être trouve-t-il que l'élection n'est pas de son niveau et va-t-il demander au Conseil constitutionnel de le nommer Président à vie afin d'en finir avec cette formalité ? »

La présidence du Conseil de l’Union européenne est, du reste, pour Macron, une magnifique chance, même si cela peut être un outil à double tranchant, comme notre ami Marc Baudriller le soulignait, la semaine dernière. La crise ukrainienne peut d’ailleurs être une belle occasion, pour Macron, de rafistoler sa statue régalienne : incapable de réinstaller la République sur ses « territoires perdus », il est prêt à envoyer des troupes en Roumanie pour protéger ses frontières face à la menace russe. La frontière, qui est vilaine lorsqu’il s’agit d’interdire aux migrants de pénétrer sur le territoire européen - « Seize pays demandent à Bruxelles de financer des clôtures aux frontières de l’UE… Macron refuse ! » souligne, dans un tweet, Nicolas Bay, député RN au Parlement européen -, retrouve là toutes ses vertus…

En temps voulu, donc. En 1965, le général  avait annoncé sa candidature pour un deuxième mandat le 4 novembre, soit juste un mois avant le premier tour. Refusant de faire campagne, se pensant au-dessus de tout cela, il laissa le terrain à ses adversaires, principalement Mitterrand, et se retrouva, contre toute attente, en ballottage au soir du premier tour. En 1981, Valéry Giscard d’Estaing se déclara le 2 mars, un peu plus de cinquante jours avant le premier tour. Quelques extraits de son allocution (on ne sait jamais, cela peut servir…) : « Je vous rendrai le pouvoir que vous m’avez confié en mai 1974 […] Je ne ferai appel ni à la haine, ni à la véhémence […] Je rendrai compte de mon mandat. […] Je montrerai comment j'ai respecté les engagements pris en 1974. Je vous dirai les motifs et les circonstances de toutes les décisions importantes de mon septennat… »

En 1988, c’est le 8 février que François Mitterrand annonçait qu’il était prêt à rempiler. C’était au 20 Heures d'Antenne 2. Le journaliste Henri Sannier : « Monsieur le Président, êtes-vous à nouveau candidat à la présidence de la République ? » Réponse de François Mitterrand : « Oui. » On ne pouvait faire plus concis. La suite, après, n’avait plus grand intérêt. En 2002, Jacques Chirac joua aussi la surprise. C’était le 11 février, à Avignon : « Alors, chère Marie-Josée Roig [maire RPR de la cité des papes qu'un certain Christophe Castaner n'avait pas pu empêcher, en 1995, malgré quelques vilénies, de prendre la mairie aux socialistes...], vous m’avez posé une question directe et franche. Eh bien, j’y répondrai dans le même esprit : Oui, je suis candidat. Et j’ai voulu le dire au milieu des Français, avec vous. »

En 2022, on compte sur l’imagination débordante d’Emmanuel Macron pour nous surprendre et nous dire « Voici venu le temps... des rires et des chants... c'est le pays joyeux... »

Election présidentielle : Que manigancent-ils ?

Le 12/01/2022.

Source : Bd. Voltaire.

 

Mardi 11 janvier, Gérald Darmanin, à sa demande, nous précise un communiqué laconique du Conseil constitutionnel, a rencontré Laurent Fabius, président de cette institution. « Le ministre a évoqué la possibilité que, après concertations, le Gouvernement élabore de nouvelles mesures d’organisation qui apparaîtraient rendues nécessaires par la crise sanitaire, afin de garantir le bon déroulement de l’élection présidentielle. Le Président du Conseil constitutionnel en a pris bonne note et lui a confirmé que l’adoption de telles mesures appelleraient un contrôle constitutionnel, chargé aux termes du premier alinéa de l’article 58 de la Constitution, de veiller à la régularité de l’élection du Président de la République ». Laconique, disions-nous et, il faut bien l’avouer, un peu énigmatique. Un communiqué qui n’est pas sans nous rappeler – pardon de l’évoquer une fois de plus mais l’on se rend compte que ses analyses politiques valent bien celles d’aujourd’hui et, surtout, ont gardé toute leur fraîcheur et leur actualité – les fameux « milieux autorisés » de Coluche, milieux autorisés dont vous n’êtes pas et qui s’autorisent des tas de trucs.

Comme l’a twitté Marion Maréchal : « Peut-on savoir de quel genre de mesures il s’agit ? » Pour l’instant, mystère et boule de gomme. S’il s’agit de mesures pratiques auxquelles nous sommes habitués depuis bientôt deux ans et que l’on a éprouvées lors des  régionales et départementales en 2021 (masques, distanciation, nombre de personnes maximum dans les bureaux de vote et toutes sortes d’autres choses), on ne voit pas en quoi le ministre de l’Intérieur, chargé de l’organisation des élections, a besoin de consulter le Conseil constitutionnel. Il sait faire, semble-t-il…

 

On n’imagine pas un instant, bien évidemment, que ces mesures soient, par exemple, l’obligation de présenter un passe vaccinal pour accéder aux bureaux de vote, comme on a pu le lire, ici et là. Les amendements présentés à l’ pour mettre « noir sur blanc » que tous les électeurs pourront voter aux prochaines élections (présidentielle et législatives) ont été rejetés au motif qu’« on ne met pas dans un texte de loi quelque chose qui est déjà établi par la Constitution », comme l’a déclaré à Libération, le directeur de cabinet du député LaREM Jean-Pierre Pont, rapporteur du projet de loi. Logique. Du reste, le Conseil constitutionnel avait rendu cette décision le 9 novembre dernier : « En période électorale, la présentation du ‘‘pass sanitaire’’ ne peut être exigée pour l’accès aux bureaux de vote ou à des réunions et activités politiques ». On imagine, par extrapolation, que cela exclut aussi le passe vaccinal.

Alors quelles sont ces « mesures d’organisation » ? Va-t-on, à moins de cent jours de l’échéance et à la va-vite modifier la loi organique du 29 mars 2021 portant diverses mesures relatives à l’élection du Président de la République ? Ce serait une première. Nous ne sommes pas constitutionnaliste mais l’on pourrait imaginer, par exemple, que l’on étende le vote par correspondance, prévu pour les personnes placées en détention provisoire et les détenus purgeant une peine n’entraînant pas une incapacité électorale, aux personnes non vaccinées. Après tout, si l’on en croit le président de la République, garant de notre Constitution, ces gens-là ne sont pas des citoyens à part entière. Pas comme les détenus.

Mais rassurons-nous, Jean Castex a installé, ce même 11 janvier, une instance de dialogue avec les partis politiques pour que la campagne présidentielle puisse se dérouler  dans les meilleurs conditions.

On attend donc avec impatience de savoir que seront ces mystérieuses « mesures d’organisation »…

Anne Hidalgo : Les parrainages, ça se mérite ; la défaite aussi…

Le 10/01/2022.

Source : Bd. Voltaire

 

Anne Hidalgo, 4,5 % au garrot selon le dernier sondage, ne sera sans doute pas la prochaine présidente de la République. Mais cela ne l’empêche pas de distribuer les bons points, dans la grande tradition de la « gauche morale ». C’est sa force, si l’on peut dire. À condition qu’il y ait encore assez de gogos pour y croire. Elle aurait dû faire maîtresse d’école ; elle a préféré la politique. Interviewé sur Europe 1, ce dimanche 9 janvier, la candidate à la présidence de la République déclare, à propos des difficultés de Marine Le Pen et Éric  à obtenir leurs parrainages : « S’ils ne les ont pas, c’est qu’ils ne méritent pas d’y participer. » En creux, elle, Anne Hidalgo, mérite d’y participer, à cette élection. Et d’ajouter : « Tant pis pour eux. » Nananère, moi, je les ai, pas eux ! En plus, ma liste sera plus grosse que la tienne : « On vise désormais 600 à 700 promesses de parrainage d’ici le mois de janvier », alors qu’il en faut 500. Cela dit, pour la candidate d’un parti qui monopolisa toutes les strates du pouvoir, il n’y a encore pas si longtemps, c’est une ambition relativement modeste : paraît que la Macronie vise les 4.000… Cela dit encore, si elle obtient ces 700 signatures, ça lui fera toujours une consolation pour le soir du premier tour. À moins de 5 %, c’est le fiasco financier assuré : Obligée d’aller faire des ménages pour rembourser sa campagne, c’est vraiment pas humain.

« S’ils ne les ont pas, c’est qu’ils ne méritent pas d’y participer. » Ça veut dire quoi, « mériter de participer à l’élection présidentielle » ? Faudrait qu’Anne Hidalgo développe un peu, on a du mal à saisir, là. Faut faire partie d’un club ? Au fait, c’est combien, la coti ? C’est un concours ? De circonstance, peut-être. Oui, on aimerait savoir. Ces propos sont en tout cas révélateurs de cette morgue propre à des personnages comme Anne Hidalgo, convaincus de faire partie du camp du Bien. Du Beau et du Vrai, pour faire bon poids. Pourtant, à aucun moment, bien évidemment, la loi ne mentionne la notion de mérite en ce qui concerne le parrainage ou plutôt, pour reprendre les termes exacts de la loi, la « présentation » d’un candidat au Conseil constitutionnel par les élus habilités à le faire.

De l’autre côté de l’échiquier politique, la question des parrainages se pose un peu différemment.  les aura, c’est évident. Maintenant, qu’en est-il de cette rumeur laissant entendre que les LR agiraient en sous-main pour qu’Éric  ait ses signatures, afin de pousser vers l’avant leur candidate au détriment de Marine Le Pen ? Ce serait astucieux. Mais pas du tout. La main sur le cœur, Geoffroy Didier, l’un des porte-parole de la candidate, le certifie sur facture : « Un élu LR a vocation à soutenir la candidate des Républicains ». Ce qui est logique. Et donc, en toute logique, des élus qui donneraient leur signature à Zemmour, « n’appartiendraient plus de fait aux Républicains, ils s’excluraient eux-mêmes des Républicains, de fait ». Le fait est. Cela dit, « les maires sont libres de leurs choix » et « aucune consigne n’est donnée ». Là encore, on voit l’hypocrisie d’un système qui nous éloigne encore un peu plus de ce que voulait à l’origine le législateur, et sans doute le général de Gaulle, en instituant l’élection du président de la République au suffrage universel. Il ne s’agit plus d’éliminer les candidatures farfelues, on l’aura compris. Sauf à considérer la candidature d’Éric Zemmour comme farfelue. Maintenant, Geoffroy Didier se garde bien d’évoquer le cas d’élus apparentés LR mais non membres du parti. Entre des maires encartés, investis ou ayant été soutenus par le mouvement aux dernières élections municipales, il y a toutes les nuances possibles dans le paysage  de nos « territoires » que nous aimons tant. On ne peut pas exclure quelqu’un qui n’est pas adhérent du parti. Donc, à suivre.

C’est plus fort qu’eux : Après le drapeau, l’anglais !

Le 07/01/2021.

Source : Bd. Voltaire.

 

Visiblement, ils ne peuvent pas comprendre. Ou ne veulent pas comprendre. On met le feu au torchon, le 1er janvier, en installant le drapeau européen sous l’Arc de Triomphe sans la présence de nos couleurs nationales. On le retire nuitamment et précipitamment en expliquant, de manière, il est vrai, un peu foireuse, qu’en fait, ce retrait avait été prévu d’avance. Mais on ne compte pas un sacrilège en nombre de jours. Ils ne doivent pas savoir. Ça aussi, on n’a pas dû le leur dire. L’affaire du drapeau passée, on se dit, un peu naïvement, qu’ils vont peut-être se calmer. Mais non. C’est plus fort qu’eux. Le temps de préparer le bûcher – et c’est du boulot, faut pas croire – pour ces Cathares et autres Vaudois qu’on appelle « non-vaccinés », ces gens « qu’on ne devrait même pas soigner » (dixit, non pas l’abruti du coin qui truste le Café du Commerce, mais un secrétaire d’État auprès du Premier ministre et porte-parole du gouvernement de cette République, en l’occurrence Gabriel Attal), voilà qu’un autre ministre de cette même République remet un euro dans le nourrain. Et on continue. Et on recommence.

Tweet tout chaud, datant du 6 janvier, du très dynamique Jean-Baptiste Djebarri, ministre délégué chargé des Transports : « In Europe we trust », avec en illustration la façade de l’Élysée constellée d’étoiles sur fond bleu. Au moment même, d’ailleurs, où l’Académie française prévient que, si le gouvernement ne renonce pas à la nouvelle carte d’identité bilingue, elle saisira le Conseil d’État. Le gouvernement doit être saisi d’effroi : la preuve avec ce tweet de Djebarri… Mme le secrétaire perpétuel de l’Académie française sait d’ores et déjà à quoi s’en tenir. Personne ne contestera au ministre des Transports, pilote de ligne « dans le civil », de parler l’anglais dans son cockpit – pardon, sa cabine de pilotage -, mais pourquoi exprimer cette confiance irrépressible en l’Europe dans la langue de Shakespeare quand on est ministre de la République française, qu’il paraît ? Si tant est que l’on puisse encore qualifier ainsi le sabir technico-commercial pratiqué dans les instances internationales.

 

« In Europe we trust » : mauvaise décalcomanie de la devise des États-Unis d’Amérique « In God We Trust » (« Nous avons confiance en Dieu »). Plus aucun pays de l’ n’a pour langue officielle l’anglais (la première langue officielle de l’ est l’irlandais), mais on continue à baragouiner anglais. Parce que c’est pratique, sans doute. C’est ça, l’anglais : c’est pratique. L’Union européenne aussi, c’est pratique : l’euro, le fait d’aller et venir (pour ceux qui ont un passeport vaccinal, of course) d’un pays à l’autre sans présenter ses papiers et, d’ailleurs, parfois, sans même en avoir du tout… La « souveraineté européenne », concept macronien par excellence, c’est pratique aussi. Donc, « in Europe we trust ». C’est le nouveau credo. Ne pas y croire risque de vous conduire tout droit au bûcher, si vous n’y êtes pas déjà pour d’autres raisons que l’on sait. Ne nous y trompons pas : tout cela n’est pas anecdotique, façon distribution de goodies – pardon, d’objets promotionnels -, à l’occasion d’un événement marquant comme, par exemple, le cinquantenaire de la fête de la saucisse ou d’une énième journée mondiale de ceci ou cela. C’est la feuille de route d’un éventuel second mandat d’Emmanuel Macron. Un second mandat qui sera celui de l’irréversibilité en bien des domaines, notamment en ce qui concerne le bradage de nos derniers pans de souveraineté nationale au profit du « trust » de Bruxelles.

Au fait, la photo du tweet où l’on devine l’avant de la voiture de fonction du ministre date de quand ? Du 6 janvier soir, à l’occasion du dîner de travail avec les membres de la Commission européenne. Le vassal recevait en son château son suzerain. Ce sont des choses qui se font entre contrôlés et contrôleurs de gestion.

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