NIGER

Le général Abdourahamane Tchiani prend les rênes du pouvoir

 

par Salif Omar - Le 29/07/2023.

Dans sa première adresse à la Nation, il s’est attaqué à la gestion sécuritaire et économique du régime de Mohamed Bazoum

Le général Abdourahamane Tchiani, chef de la garde présidentielle au Niger est apparu à la télévision publique, vendredi, en tant que nouvel homme du pays, après le coup d’État de mercredi contre le président Mohamed Bazoum.

Dans sa première adresse à la Nation en tant que président du Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie (CNSP), l’organe militaire qui s’est emparé du pouvoir, Abdourahamane Tchiani s’est attaqué à la politique sécuritaire et à la gestion économique de l’ancien régime.

«L’action du CNSP est motivée par notre seule volonté de préserver notre chère patrie face, d’une part, à la dégradation continue de la situation sécuritaire dans notre pays et cela sans que les autorités déchues ne nous laissent entrevoir une véritable solution de sortie de crise et, d’autre part, la mauvaise gouvernance économique et sociale».

Par rapport à la situation sécuritaire, le général Abdourahamane Tchiani a déploré les nombreuses attaques meurtrières menées par des groupes armés terroristes contre des unités de l’armée nigérienne et des populations civiles. Il a aussi dénoncé la libération de certains chefs terroristes par le régime de Mohamed Bazoum.

Il s’est, en outre, interrogé sur le sens et la portée d’une approche de lutte contre le terrorisme «qui exclut toute véritable collaboration avec le Burkina Faso et le Mali, alors même que nous partageons avec ces deux pays la zone du Liptako Gourma où se concentrent toutes les activités terroristes que nous combattons».

Par rapport à la gouvernance économique, le général Tchiani a indiqué que le gouvernement déchu a montré ses limites dans l’amélioration des conditions de vie des populations et la lutte contre les détournements des deniers publics. Tout en l’assurant du respect par le CNSP de «tous les engagements internationaux», il l’a invité à «appréhender la situation spécifique» du Niger.

La général Abdourahamane Tchiani, chef de la Garde présidentielle, qui a opéré le coup d’Etat au Niger, a fait vendredi sa première apparition publique en tant que «Président du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie».

S’exprimant dans une déclaration diffusée sur Télé Sahel, il a notamment présenté les motivations du CNSP et appelé ses compatriotes au calme et à la vigilance.

«L’action du CNSP est motivée par la seule volonté de préserver notre chère patrie face, d’une part à la dégradation continue de la situation sécuritaire dans notre pays et à la mauvaise gouvernance économique et sociale d’autre part», a-t-il expliqué.

Appelant à la «sérénité», au «calme», à la «vigilance» et à un «sursaut patriotique» pour «relever les défis sécuritaires, économiques et sociaux», le général Tchiani a tenu à réaffirmer la volonté du CNSP de «respecter tous les engagements internationaux souscrits par le Niger».

«Enfin, le CNSP, par ma voix, demande aux partenaires et amis du Niger, dans cette étape cruciale de la vie de notre pays, de faire confiance à nos forces de défense et de sécurité garantes de l’unité nationale de l’intégrité du territoire et des intérêts supérieurs de notre Nation», a conclu le général Abdourahamane Tchiani.

De son côté, le président Mohamed Bazoum, toujours séquestré par les militaires putschistes à Niamey, n’a pas encore démissionné.

source : Agence Anadolu

Coup d'état au Niger

par "Anonyme" - Le 28/07/2023.

 

Le coup d’état qui a eu lieu au Niger les 26 et 27 juillet 2023, s’est déroulé sans violence. Après quelques hésitations, il a rallié l’ensemble des forces de sécurité du pays. Ce qui est également

étonnant c’est que les principaux personnages qui sont apparus, sont des officiers supérieurs, parfaitement installés dans le dispositif politico-sécuritaire du pays. Ils ne représentent ni une partie

de l’armée comme au Mali, ni le soutien de l’aventure personnelle de quelque officier subalterne, comme au Burkina.

 

Ainsi, le « Président du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie », est le général Tchiani Abdourhamane, commandant depuis 12 ans la garde républicaine. C’est un des fidèles de l’ancien président Mahamadou Issoufou, maintenu à son poste par son successeur Mohamed Bazoum, qu’il vient de déposer. Les relations s’étaient dégradées ces derniers mois.

Le Chef d’Etat Major Général a rejoint les officiers auteurs du coup d’état ainsi que le général

Mahamadou Toumba, numéro deux de l’armée de terre et commandant l’opération conjointe avec la force française.

Parmi les mutins on trouve le colonel Ahmad Sidi, numéro deux de la garde nationale (chargée de la sécurisation de tous les sites étatiques), le colonel Abdoulkarim Hima, numéro deux de la

gendarmerie, le général Salifou Mody, ancien chef d’état-major des Armées, limogé en avril dernier. Le colonel Amadou Abderamane, le porte-parole, est un officier de l’armée de l’air.

 

D’après la première déclaration du Président du CNSP, il semble que la principale motivation du coup de force soit de mettre fin à la mauvaise gouvernance sécuritaire contre les groupes armés

terroristes.

Le Niger a la particularité de faire face à deux types de menaces terroristes :

 

 Celle des groupes armés islamiques venant du Mali (EIGS essentiellement) et agissant dans la partie nigérienne de la zone des trois frontières (Mali-Niger-Burkina Faso) dans la région de

Tillabéry.

 Celle de Boko-Haram dans le Sud-Est du pays, aux abords du lac Tchad et à la frontière

nigériane.

 

Le principaux griefs contre Mohamed Bazoum, énoncés par le nouveau Président du CNSP sont les suivants :

 Le refus de Mohamed Bazoum de coopérer militairement avec le Mali et le Burkina Faso,

alors que les groupes armés évoluent entre les trois états.

 Les nombreuses pertes humaines (militaires et civiles) dues à cette situation.

 La libération de plusieurs chefs terroristes sur décision de Mohamed Bazoum

 Le soutien de milices dans le seul but de défendre les propres intérêts des gens au pouvoir.

 

En revanche, le général Tchiani Abdourhamane évoque favorablement, dans sa déclaration, le

soutien des partenaires étrangers (France et Etats-Unis en l’occurrence) dans la lutte anti-terroriste, et appelle les partenaires Techniques et Financiers (PTF) à continuer à aider la Niger.

 

Commentaires :

 Le Niger est le pays qui a le mieux résisté aux conséquences désastreuses de la disparition de Kadhafi, en gérant, par le palabre, le retour des Touaregs nigériens (contrairement à ce qui

s’est passé au Mali). Il reste malgré tout le pays de la région qui doit faire face à deux

menaces terroristes sur deux « fronts » différents.

 

 C’est également le pays le plus sollicité par les effets collatéraux de l’émigration de milliers

de clandestins de la sous-région en direction de l’Europe, transitant par Agadez. Il est aidé en

cela par l’Union européenne. Il récupère également des milliers de sub-sahariens, reconduits

à la frontière, en plein désert par l’Algérie. Mais le Niger est également classé dernier (189 ème )

avec un score de 0,354 (France :0,903, 28 ème ), au palmarès de l’indice de développement

humain du PNUD.

 

 Dans ces conditions, les militaires nigériens ont très mal supporté de ne pouvoir coopérer

avec leurs camarades au pouvoir au Mali et au Burkina, avec lesquels Mohamed Bazoum

refusait de dialoguer, pour apparaitre comme un bon démocrate, vis-à-vis de l’occident. Or,

la création du G5 sahel en 2015, voulue par la France avait justement pour but de favoriser la

coopération régionale dans le cadre de la lutte anti-terroriste… Il ne faut pas perdre de vue

que tous ces hauts responsables militaires de la région se connaissent très bien.

 

 La politique de « dialogue » voulue par Mohamed Bazoum, et qui s’est traduite par la

libération de jihadistes « pour pouvoir parler », n’a visiblement pas plu aux militaire nigériens.

 

 Mohamed Bazoum, qui est d’une tribu arabe, est très minoritaire dans le paysage ethnique

du Niger, ce qui reste dans cette région un handicap important, surtout si l’accusation lancée

par les putschistes, d’entretenir des milices (1) au profit de ses intérêts est avérée.

 Au Niger, comme ailleurs dans la région, l’image de la France s’est dégradée : Emeutes très

violentes contre Charlie Hebdo, difficultés récurrentes avec Orano (ex Areva), échec de

Bolloré dans la construction de la ligne de chemin de fer Niamey-Cotonou (la ligne s’est

arrêtée à Dosso), réécriture récemment des paroles de l’hymne nigérien pour le « décoloniser ».

 

Conclusion :

 

 Il est certain que les Russes ne manqueront pas de profiter de la situation.

 Les Chinois exploitent déjà le pétrole nigérien, et vont reprendre le chantier du chemin de fer

vers Cotonou.

La France a déjà condamné le coup d’état, ce qui fermera le pays et posera un problème à

nos opérations militaires dans la région. Il est peut-être temps de revoir notre position vis-à-

vis des cinq états du G5 Sahel, désormais dirigés par des militaires, auxquels on peut rajouter

la Guinée présidée par un ancien de la Légion Etrangère, également arrivé au pouvoir par un

putsch !

 

1) Il existe au Niger de nombreuses milices villageoises, tolérées pour défendre les populations, travaillant parfois avec l’armée, subissant souvent de lourdes pertes et parfois responsables de grandes violations des droits de l’homme.

 

 

Général Tchiani, président du Niger : Que cache le silence de Mahamadou Issoufou ?

 

par Tony A. - Le 29/07/2023.

Au Niger, plus de doutes, le coup d’État contre le régime de Mohamed Bazoum est malheureusement consommé. Le nouvel homme fort du pays c’est désormais le général Tchiani, chef de la Garde présidentielle nigérienne ayant orchestré le coup de force. Il a été finalement choisi comme président du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP) pour diriger la transition.

Face à cette officialisation du général Tchiani à la tête du pouvoir, les condamnations venant de l’extérieur se multiplient. C’est le cas notamment de l’Union européenne qui de manière ferme a condamné ce coup d’État militaire. Par ailleurs, elle a également menacé de suspendre «tout appui budgétaire» apporté au Niger. La France, aussi emboite le pas en déclarant ne pas reconnaître les autorités issues du putsch. Dans le même temps le silence criard, de l’ancien président, Mahamadou Issoufou, suscite bien d’interrogations, surtout quand on connait son influence et le lien fort existant entre lui et le président déchu.

Aurait-il des envies secrètes de revenir au pouvoir de quelque manière de ce soit après deux mandats ?

Les premières décisions du Général Tchiani

Ayant pris les rênes du pays, le général Tchiani n’a pas manqué de montrer qu’il est véritablement aux commandes. Il a au travers d’un nouveau communiqué télévisuel, annoncé que «la constitution du 25 novembre 2010 est suspendue» et que «les institutions issues de la constitution du 25 novembre 2010 sont dissoutes».

Plus important encore, le général Tchiani s’est attribué tous les pouvoirs en attendant le retour à l’ordre constitutionnel normal. C’est à dire que le Conseil national pour la sauvegarde de la patrie exerce l’ensemble des pouvoirs législatifs et exécutifs et le président du CNSP «est le chef de l’État et représente l’État du Niger dans les relations internationales».

«Nous ne pouvons plus continuer avec les mêmes approches, jusqu’ici proposées, au risque d’assister à la disparition progressive et inéluctable de notre pays. C’est pourquoi nous avons décidé d’intervenir et de prendre nos responsabilités», a-t-il martelé. Il a également justifié son action par le fait que les autorités déchues ne laissent entrevoir une véritable solution de sortie de crise. A cela s’ajoute, la mauvaise gouvernance économique et sociale. Ces éléments suscite1s ont eu pour répercussions la dégradation continue de la situation sécuritaire dans notre pays.

Un silence éloquent pleinement justifié

Généralement, derrière un coup d’État bien ficelé et exécuté à succès par des militaires se cachent très souvent des civils en attente de la prise effective du pouvoir. Très souvent ces derniers sont à la manœuvre de la déstabilisation du pouvoir en place à travers de nombreuses manigances ou coups bas. Alors selon les rumeurs, une main noire serait à l’origine de ce coup d’État au Niger. Est visé par ces insinuations l’ancien président et allié du président renversé, Mahamadou Issoufou. Ce qui justifierait son silence jusque-là.

Certains évoquent plutôt l’aspect selon lequel l’ancien président aurait choisi de respecter les principes démocratiques et de ne pas commenter ou s’impliquer publiquement dans les affaires politiques en cours, afin de laisser le processus politique suivre son cours légitime. En choisissant ainsi de garder le silence, d’autres estiment qu’il contribue à apaiser la situation. Car l’intervention publique de l’ancien président pourrait aggraver la situation et alimenter davantage de tensions et de violences.

Le général Tchiani, serait-il le joker de l’ancien président Mahamadou Issoufou ? L’avenir nous le dira. Quoi qu’il en soit, il est possible que l’ancien président choisisse de s’impliquer discrètement dans les coulisses pour essayer de résoudre la crise politiquement sans attirer l’attention publique.

source : L’Investigateur Africain

Coup d’Etat au Niger : Une situation classique mais délicate pour la France

Source : Bd. Voltaire - par Arnaud Florac - Le 28/07/2023.

Les complotistes prompts à voir la main de la Russie dans les bouleversements africains en seront pour leurs frais : Le coup d'Etat au Niger, fomenté par une poignée de putschistes, s'il tombe en effet "ça-alors-comme-par-hasard" en plein milieu du sommet russo-africain de Saint-Pétersbourg, n'a pas été dirigé, de près ou de loin, par la Russie. On sait que le général Tchiani, proche du pouvoir, a été victime, il y a quelques semaines, d'une attaque contre son domicile, menée par les groupes armés terroristes. En l'absence de soutien réel du président Bazoum, il a réuni ses fidèles, dont plusieurs ont été formés en France, pour se rendre au palais présidentiel et mettre la pression sur le président nigérien. La situation, comme il arrive de temps à autre dans certains pays d'Afrique, a rapidement dégénéré mais n'a pas abouti pour le moment à une sortie de crise. Il est à souligner, d'un autre côté, que, pour l'instant, aucun début de guerre civile ne semble poindre à l'horizon.

 

 

On imagine que les images de manifestations anti-françaises vont pouvoir être exploitées par la Russie, d'autant que des drapeaux russes ont fait leur apparition dans le courant de la journée sur la place de la Concertation. Ce serait une habile utilisation, mais pas autre chose qu'une saisie d'opportunité. Une autre "théorie complotiste", guère plus maligne que celle qui voit la main des Russes partout, prétend, sur plusieurs comptes africains en ligne, que les Français auraient commandité un "faux coup d'Etat" pour se débarrasser de Bazoum, trop indépendant à leurs yeux. Peut-on à la fois dire que la France n'est plus rien en Afrique et lui prêter des capacités dignes des grandes heures de Jacques Foccart ? Apparemment, les contradictions ne dérangent pas tout le monde.

Quel avenir pour la présence française ?

Alors, désormais, que va-t-il arriver à la présence française, puisque le dispositif militaire avait été redéployé au Niger en 2022 ? La France concentre les critiques, mais une dizaine de pays, dont les Etats-Unis, mènent dans ce pays les mêmes actions de formation et de partenariat. La posture d'Emmanuel Macron, qui a été appelé au secours par M. Bazoum mais n'a pas envoyé de troupes pour rétablir le régime, sera-t-elle saluée?

Déjà, Jean-Luc Mélenchon appelle à repenser la stratégie française en Afrique. On lui saurait gré de développer sa pensée, car la France, déjà chassée du Mali, du Burkina Faso et de Centrafrique, peine à réagir en temps réel.

Situation classique de coup d'Etat militaire, exploitée par les adversaires de la France (dont la Russie, mais aussi, dernièrement, la Turquie), la crise nigérienne ne promet que deux choses : L'éviction probable de la France et l'aggravation probable de la crise politique dans les pays la bande sahélo-saharienne, avec des gouvernements qui, contre un djihadisme endémique, n'ont que l'argument de la haine de la France pour détourner leurs compatriotes des vrais enjeux.

Coup d’État au Niger : Et la France, dans tout ça ?

Source : Bd. Voltaire - par Philippe Franceschi - Le 30/07/2023.

Le coup d’État qui vient de se produire au Niger, pays coutumier du fait, prouve une fois de plus l’instabilité endémique du continent africain et les conséquences en termes d’immigration auxquelles l’Union européenne doit s’attendre.

Décidément, les coups d'État y perdurent depuis plus de 60 ans que les indépendances sont advenues. La société civile africaine, toujours absente du débat, n’est toujours pas entrée dans l’Histoire. Les populations ne tirent jamais de profit de ces coups d’État et s'en désintéressent. Le développement permettant de fixer les populations sur place n'est toujours pas pour demain, malheureusement, et cela doit nous donner à réfléchir sur nos capacités à enrayer une immigration massive vers l’Union européenne.

L’erreur fondamentale de François Mitterrand, lors du discours de La Baule, le 20 juin 1990, a été d'imposer le principe des élections démocratiques en Afrique en contrepartie de notre aide au développement. Une personne, une voix. Cela a entraîné la radicalisation des minorités ne pouvant accéder au pouvoir que par un coup d'État. Les peuples africains n'y sont manifestement toujours pas prêts. En effet, Mohamed Bazoum, le président nigérien déchu, démocratiquement élu, est issu d'une ethnie minoritaire arabe et musulmane sunnite, alors qu’au Niger, les grands groupes ethniques noirs majoritaires sont du Sud (Haoussa, Zarma, Peuls). Rien ne dit, pour le moment, que les Haoussas n'aient pas voulu reprendre le pouvoir par la force.

Ce coup d’État ne peut que nous faire relativiser la stabilité que l'on croit acquise de pays comme le Sénégal, qui vient de connaître des troubles graves, de la Côte d'Ivoire, qui se débat toujours dans son concept d’ivoirité, ou encore du Gabon, du Congo ou du Cameroun dont la succession de Paul Biya n’est pas assurée.

Après avoir quitté le Mali et le Burkina Faso suite à des coups d'État, les forces armées françaises, comme celles des USA, peuvent-elles rester au Niger ? La realpolitik m'incite à dire que oui, si les nouvelles autorités nous le demandent et si les Russes, avec l’aide des Algériens, ne sont pas à la manœuvre pour nous éjecter définitivement de la zone sahélienne. Mais nos engagements diplomatiques vis-à-vis de l'ONU, des organisations africaines CEDEAO et UA comme les principes démocratiques de l'UE peuvent aussi nous imposer de partir. Cela signerait le chaos assuré dans tout le Sahel, avec les conséquences en termes d'immigration que l'on peut imaginer, ainsi que du terrorisme islamiste qu'il véhiculerait.

Emmanuel Macron va devoir quitter son esprit nébuleux du « en même temps » et trancher… Pas sûr qu’il en soit capable, lui qui a toujours fait preuve d’une complète méconnaissance de la mentalité africaine, comme l’a montré son engagement personnel, dès 2017, dans la désastreuse aventure du feu G5 Sahel.

 

 

Guerre au Sahel : Y aura-t-il une intervention militaire étrangère au Niger ?

Source : RzO Internationalsource : Nathalie Yamb
par Nathalie Yamb - Le 02/08/2023.

La journée du 31 juillet 2023 a été historique pour l’Afrique.

Nathalie Yamb explique pourquoi et répond à la question de savoir si l’on peut s’attendre à une intervention militaire étrangère au Niger.

Niger : La France et les USA haussent le ton ; De qui se moquent-ils ?

par Jacques Henry - Le 02/08/2023.

Le Niger est un pays particulièrement riche en ressources du sous-sol.

En France on connait le Niger pour deux raisons principales. D’abord il s’agit aujourd’hui d’une ancienne colonie française et aussi parce que ce pays est le cinquième pays le plus riche en uranium après l’Australie, le Kazakhstan, le Canada et la Russie. D’autres pays comme l’Afrique du Sud, l’Ukraine et Brésil ainsi que la Namibie contribuent à alimenter le marché de l’uranium selon l’opportunité financière.

L’uranium du Niger fut découvert par la France à la fin des années 1950 et l’exploitation des premiers gisements dans la région d’Arlit débuta rapidement car le programme nucléaire français devait trouver des sources nouvelles d’approvisionnement, les dépôts d’uranium sur le pourtour du Massif Central s’épuisant.

Pour le Niger l’exploitation des mines d’uranium représente, en théorie, la seconde source de divises du pays après l’or. Cependant l’uranium en provenance de ce pays ne représente en valeur que 4% du marché mondial de l’uranium. Divers sites miniers se trouvent approximativement sur la ligne Arlit-Agadez : Akikan, Imouraren, Dasa et Azelic, la première mine exploitée par la France, et certainement d’autres sites de teneur inférieure qui seront à l’avenir exploités en raison du développement inévitable de la production d’énergie électrique «décarbonée» que représente l’énergie nucléaire. Les très récents évènements qui ont eu lieu dans la capitale Niamey ont ému les puissances occidentales et pourtant si on examine la réalité c’est-à-dire la structure industrielle et financière de l’exploitation des gisements d’uranium il en résulte que ces mêmes occidentaux agissent maintenant comme des chiens qui aboient au clair de lune et cette remarque est tout à fait à propos car en ce lundi 31 juillet la lune est pleine…

Il est donc intéressant de détailler la réalité. En 2020 le Niger a produit 2020 tonnes d’uranium métal. Il est plus simple de comptabiliser cette production en se référant au métal car usuellement l’uranium est négocié sur les marchés sous forme d’oxyde aussi appelé «yellow cake». Cette production ne représente que 4% de l’ensemble mondial.

En réalité cette réaction tant de la France que des USA est infondée et arrive trop tard. Les principaux acteurs de l’exploitation des mines d’uranium sont la Chine et le Canada et très loin derrière ces deux acteurs la France. Par exemple le gisement d’Imouraren situé à 160 km au nord d’Agadez est exploité par Orano (France) conjointement avec la Corée et le tiers du capital est détenu par l’État du Niger. Cependant l’exploitation a été suspendue en 2015 car le marché de l’uranium n’était pas favorable. Le site de Dasa près d’Arlit est en cours d’exploitation. Il est la propriété de global Atomic Corporation, une société basée à Toronto et de l’État du Niger à hauteur de 20%. Pour l’instant ce site n’a pas encore produit le moindre kg de Yellow cake. Le plus important gisement se trouve dans la région d’Arlit à Azelik.

La Société des Mines d’Azelik est détenue à 100% par des firmes et organismes financiers chinois. Encore une fois l’effondrement du cours du Yellow cake sur les marchés a aussi incité les autorités locales et la Chine à cesser temporairement l’exploitation de ce gisement. Il est donc tout à fait approprié de constater que les menaces tant des USA que de la France n’ont aucune raison d’être. Et pour cause : La Chine est déjà solidement installée au Niger et pas seulement dans l’exploitation des mines d’uranium mais également d’or près d’Agadez, dans la région de Djao et du Mont Ibl. Il est probable que le nouveau gouvernement du Niger fasse appel à la Chine pour investir dans le développement des infrastructures nécessaire à l’exploitation de ces deux ressources minières et aux structure armées d’origine russe comme le groupe privé Wagner pour maintenir l’ordre en particulier pour combattre les djihadistes qui forment le gros des groupes armés de Boko Haram de l’autre côté de la frontière entre le Niger, le Cameroun et le Nigéria.

sources : IAEA et World Nuclear News via Jacques Henry

[Point de vue] Quand Emmanuel Macron impute à la DGSE sa propre incurie

Source : Bd. Voltaire - par Arnaud Florac - Le 02/08/2023.

Le Canard enchaîné a sorti, ce mercredi, une info qui se voulait croustillante : Emmanuel Macron aurait poussé un coup de gueule contre la DGSE lors du Conseil de Défense du samedi 29 juillet. Il aurait reproché à Bernard Émié, diplomate de choc qui dirige le fleuron du renseignement français depuis 2017, de n'avoir « rien vu venir » du putsch du général Abdourahmane Tchiani. Comme un professeur principal devant un élève faiblard au terme d'un deuxième trimestre sans éclat, Macron aurait même conclu : « Le Niger, après le Mali, cela fait beaucoup. » Le Canard, qui semble décidément bien informé, livre la réplique du DGSE : « J'avais rédigé une note sur la situation au Niger en janvier. » Et un ministre servile, dont le nom n'est pas communiqué, l'a immédiatement taclé : « Soit on est tous bêtes, soit la note était incompréhensible. » « Ainsi dit le renard, et flatteurs d'applaudir », comme disait La Fontaine (Les animaux malades de la peste).

 

Bernard Émié n'est pas n'importe qui. On lui doit, outre des postes d'ambassadeur dans les pays les plus importants ou les plus tendus du globe entre 1998 et 2014, la prise en main d'un service mythique à la suite du brillant mais clivant Bernard Bajolet : c'est un chef de terrain. Il a servi dans les cabinets ministériels, il est normalien et énarque : il sait lire et écrire. Par conséquent, si l'on ajoute à cela le fait que Macron a pris, depuis 2017, la triste habitude de s'entourer de tocards sûrs d'eux, il est possible que le ministre ait fourni lui-même un élément de réponse en posant l'alternative de cette façon. La note n'était probablement pas incompréhensible (même si Émié ne l'a évidemment pas rédigée lui-même), ce qui amène le lecteur facétieux à en déduire logiquement ce qu'il sentait d'instinct : Bernard Émié, comme d'autres avant lui, est tout simplement entouré de ministres c.. Il n'en demeure pas moins que son maintien à poste, qui pouvait logiquement être décidé jusqu'à la fin des Jeux olympiques, dans une optique de départ une fois la menace terroriste écartée, n'est plus du tout garanti.

Peut-être la Macronie a-t-elle obligeamment laissé fuiter cet échange tendu pour mettre Émié sur la sellette. Cela lui permettrait de virer un vieux mâle chiraquien sexagénaire pour le remplacer, comme cela se murmure dans les médias, par une femme. Il n'en demeure pas moins que le mode opératoire rappelle étrangement le renvoi du général Vidaud, directeur du renseignement militaire, après l'offensive ukrainienne. La DRM, à l'époque - de nombreux blogueurs en avaient parlé -, disposait de sérieux renseignements de terrain, notamment américains, et n'avait nullement failli. Ce qu'il avait manqué, c'était la mise en perspective politico-stratégique, qui serait logiquement du niveau des cabinets ministériels ou même de la DGSE, par exemple. Cette fois, la DGSE semblait avoir pris la mesure de la situation nigérienne en amont, et même averti le niveau politique, si l'on en croit Bernard Émié (et pourquoi mentirait-il ? Même les ministres « abrutis », comme dit Élisabeth Borne, ne semblent pas en disconvenir), mais c'est le niveau politique, celui du président de la République, qui s'obstine à faire systématiquement le contraire de ce que ses subordonnés militaires pourraient sagement lui conseiller.

Ce que payait Macron en Ukraine, ce n'était pas le manque de niveau de la DRM. Ce qu'il paie au Niger, ce n'est pas l'ahurissement de la DGSE. Dans les deux cas, ce que paie la France, c'est un empilement de négligences, une sédimentation de certitudes : une absence de valeurs respectables à l'étranger, autres que la soupe tiède de l'humanisme et des Lumières sauce Alliance française ; un activisme woke et LGBT qui ne lui a rapporté que des camouflets (récemment au Cameroun) dans des pays qui respectent la loi naturelle ; un mépris de jeune blanc-bec, de « petit mec », pour reprendre la formule ciselée de Bernard Lugan, pour une Afrique qui respecte ceux qui la respectent, et dont les anciens ne détestent rien tant que les morveux de Sciences Po en petit costume venus leur donner quelques subsides pour pouvoir continuer à dispenser leur propagande ; un réseau diplomatique à la ramasse, confit dans un aveuglement idéologique total (pour l'Ukraine, l'alignement pro-américain ; pour le Niger, la confiance dans une Françafrique morte) ; un néo-colonialisme totalement hors-sol, qui a éclaté en 2017, avec la blague de Macron prétendant que le président burkinabè Kaboré était parti « réparer la climatisation ». Pour reprendre les mots de Macron lui-même, une fois de plus, décidément, blessant et irrespectueux, face à des responsables de haut niveau qui en valent dix comme lui (hier Villiers, aujourd'hui Émié, même principe), « ça fait beaucoup ».

 

 Le Canard, qui semble décidément bien informé, livre la réplique du DGSE : « J'avais rédigé une note sur la situation au Niger en janvier. » Et un ministre servile, dont le nom n'est pas communiqué, l'a immédiatement taclé : « Soit on est tous bêtes, soit la note était incompréhensible. » 

 

Macron aurait du écouter Bernard Lugan

Source : Le Salon Beige - par Michel Janva - Le 02/08/2023.

Incapable de prévoir que «le prochain coup, c’est le Niger», Emmanuel Macron serait «furax» et tenterait de faire porter le chapeau à la DGSE accusée de ne pas avoir vu le coup d’Etat au Niger venir.

«Le Niger après le Mali, ça fait beaucoup!»

Macron aurait dû écouter Bernard Lugan, sur Sud Radio, en mars 2023 :

«L’erreur absolue que nous venons de faire, c’est de rapatrier tous nos moyens qui étaient sur le Mali et sur le Burkina Faso au Niger. Nous avons mis nos dispositifs militaires au milieu de ce chaudron»

Il va y avoir du «sport», avait prédit Lugan.

Voici son analyse sur son blog :

Les évènements du Niger étant la suite logique de la catastrophique politique africaine de la France – de Nicolas Sarkozy à Emmanuel Macron sans oublier naturellement François Hollande-, il faudra bien que ceux qui l’ont décidée rendent enfin des comptes. Comment est-il en effet possible qu’un conflit ethnique ayant éclaté en 2011 au nord-est du Mali et qui était à l’origine limité à une seule fraction touareg, ait pu, de fil en aiguille, se transformer en un embrasement régional échappant désormais à tout contrôle et dont la conséquence la plus visible est l’éviction de la France de la région sahélienne ?

En raison de l’avalanche d’erreurs politiques et sociétales, et comme je n’ai cessé de l’annoncer depuis 2011, l’échec de la France au Sahel était hélas une certitude (voir à ce sujet mon livre Histoire du Sahel). Un échec politique un temps masqué par les réussites de nos Armées au prix du sacrifice de plusieurs dizaines des meilleurs enfants de France tombés à la place de déserteurs africains ayant préféré venir bénéficier en France des largesses de l’ « odieuse » ancienne puissance coloniale que de défendre leurs pays respectifs.

Corsetés par leur idéologie, les responsables français ont voulu qu’en Afrique, le droit des Peuples s’efface devant les « droits de l’Homme », les chimères de la « bonne gouvernance » ou le surréaliste « vivre ensemble ». Sans parler des provocations LGBT et de ses variantes vues en Afrique comme autant d’abominations et qui ont achevé de faire perdre à la France l’estime et le respect des Africains. Privilégiant les analyses économiques et sociales, aveuglés par l’impératif de l’impossible « développement », les décideurs français ont refusé le réel, oubliant les sages recommandations faites en 1953 par le Gouverneur de l’AOF :

« Moins d’élections et plus d’ethnographie, et tout le monde y trouvera son compte ».

Incultes historiquement, les « petits marquis » sortis de Sciences-Po ou de l’ENA qui prétendent parler de l’Afrique, n’ont pas vu qu’à la fin du XIX° siècle, la colonisation qui libérait les sudistes de la prédation nordiste, rassemblait en même temps dominés et dominants dans de communes limites administratives. Avec les indépendances, ces délimitations internes de l’ancienne AOF devenues frontières d’Etats, les lois de l’ethno-mathématique électorale y donnèrent automatiquement le pouvoir aux sudistes puisque leurs femmes avaient été plus fécondes que celles des nordistes. D’où, au Mali, au Niger et au Tchad, dès les années 1960-1965, les nordistes qui refusaient d’être soumis à leurs anciens tributaires sudistes se soulevèrent. La guerre qui a éclaté en 2011 – donc avant toute présence russe-, et qui se déroule sous nos yeux, en est la résurgence.

Face à ce réel qu’ils ne comprenaient pas, ou qu’ils refusaient de voir, confondant causes et conséquences, les irresponsables qui définissent la politique africaine de la France ont naturellement fait une erreur de diagnostic. Ils ont ainsi parlé de danger islamiste alors que nous étions clairement en présence d’une plaie ethno-raciale millénaire surinfectée par l’islamisme contemporain.

En conséquence de quoi, la stratégie française reposa sur « l’essentialisation » de la question religieuse, tout bandit armé, tout porteur d’arme et tout trafiquant étant péremptoirement qualifié de « jihadiste ». L’erreur était grande car, dans la plupart des cas, nous étions en présence de trafiquants se revendiquant du jihadisme afin de brouiller les pistes, et parce qu’il est plus valorisant de prétendre combattre pour la plus grande gloire du Prophète que pour des cartouches de cigarettes ou des cargaisons de cocaïne. D’où la jonction entre trafic et religion, le premier se faisant dans la bulle sécurisée par l’islamisme. Face à l’engerbage de revendications ethniques, sociales, mafieuses et politiques, opportunément habillées du voile religieux, avec des degrés différents d’importance de chaque point selon les moments, la politique française fut donc à la fois figée et incohérente.

Au Niger où plusieurs conflits se déroulent, tant à l’ouest qu’au sud-est, la situation fut encore compliquée par le fait que le président Mohamed Bazoum est Arabe. Il est en effet membre de la tribu libyenne des Ouled Slimane (Awlad Sulayman) qui a des diverticules au Tchad et dans le nord-est du Niger. Là encore, un minimum de connaissance historique aurait appris aux « danseurs à claquettes » qui prétendent définir la politique africaine de la France, que cette puissante tribu éclata en deux dans les années 1830 quand le pouvoir ottoman décida de reprendre effectivement le contrôle de la Régence de Tripoli. Or, les Ouled Slimane, tribu makhzen fidèle aux Karamanli renversés par les Turcs, entra en dissidence (voir à ce sujet mon livre Histoire la Libye). La Porte ottomane ayant eu la main lourde dans la répression du soulèvement, une partie de la tribu émigra au Tchad et au Niger où elle participa au grand mouvement de prédation nordiste à l’encontre des sédentaires sudistes, ce qui a laissé des traces dans la mémoire collective. Au Niger où les Ouled Slimane constituent moins de 0,5% de la population, et où ils sont considérés comme des étrangers, le fait que l’un des leurs parvienne à la Présidence était mal ressenti. Et, circonstance aggravante, les Ouled Slimane sont vus comme des amis de la France depuis qu’en 1940-1941, ils ont opportunément suivi la colonne Leclerc dans son opération de conquête du Fezzan italien, action ayant démarré au Tchad et au Niger. Ce fut d’ailleurs à cette occasion que certaines fractions des Ouled Slimane retournèrent en Libye où, depuis, elles se heurtent aux Toubou qui occupent leurs anciens territoires abandonnés après l’exode du XIX° siècle.

Alors qu’il eut fallu confier la politique africaine de la France à des hommes de terrain héritiers de la « méthode Lyautey » et de l’approche ethno-différentialiste des anciennes « Affaires indigènes », elle a, hélas, été gérée par les insignifiants et prétentieux butors qui portent la terrible responsabilité de l’échec français en Afrique.
Un échec qui n’est d’ailleurs pas totalement consommé puisqu’il reste encore le Tchad dont le tour viendra tôt ou tard… inexorablement… Et toujours pour les mêmes raisons…

En plus de tout cela, au lieu de s’interroger sur leurs erreurs, ajoutant la naïveté à l’incompétence, les dirigeants français tentent maintenant de s’exonérer de leurs responsabilités en montrant la « main russe »…. Comme si, étant en guerre contre l’OTAN, la Russie allait laisser passer l’occasion qui lui était offerte de s’engouffrer dans l’abîme béant de la nullité française pour ouvrir un front africain sur les arrières de ceux qui la combattent sur le front européen… Le discours du président Poutine lors du dernier sommet russo-africain de Saint-Pétersbourg fut d’ailleurs très clair à ce sujet.

La déficience des dirigeants français s’exprime jusque dans leur absence de réaction face au mensonge du prétendu « pillage » des ressources du Niger. L’on attendrait en effet des « chapons » qui parlent au nom de la France, une claire déclaration indiquant que cette dernière n’a pas d’intérêts dans ce pays désertique -le Mali ne l’est en revanche qu’en partie-, condamné à succomber sous sa suicidaire démographie polygamique. Un Niger dont, n’en déplaise à l’ineffable Sandrine Rousseau qui a osé affirmer que la France en dépendait pour son uranium, alors que le pays ne représente aujourd’hui, et au mieux, à peine 10% des besoins français… et qu’il est, et de beaucoup, plus facile et moins onéreux de se fournir ailleurs de par le monde. Sans parler des gisements français dont les écologistes ont fait interdire l’exploitation par la Loi…

Tensions extrêmes : Le Mali défie Macron après la menace de guerre au Niger

par Le Média en 4-4-2 - Le 03/08/2023.

La journée du 31 juillet 2023 a été historique pour l’Afrique. Nathalie Yamb explique pourquoi et répond à la question de savoir si l’on peut s’attendre à une intervention militaire étrangère au Niger.

Dans un contexte de crise politique au Niger suite au coup d’État, le colonel Abdoulaye Maïga, ministre d’État de l’Administration Territoriale et de la Décentralisation du Mali, et porte-parole du gouvernement malien, a prononcé une déclaration historique sur les antennes de l’ORTM le 31 juillet 2023 à 20h. Cette déclaration exprime la solidarité du Burkina Faso et du Mali envers le peuple frère du Niger et dénonce les sanctions imposées par des organisations régionales. Le colonel Maïga a averti que toute intervention militaire contre le Niger serait considérée comme une déclaration de guerre contre le Burkina Faso et le Mali. Face à cette situation, il est urgent de comprendre les enjeux, les raisons de la crise et les possibles conséquences d’une intervention étrangère.

 

 

 

Contexte de la crise au Niger

Le Niger a été secoué par un coup d’État qui a suscité des réactions de la part de la CEDEAO (Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest) et de la communauté internationale. La CEDEAO a imposé des sanctions au Niger, notamment la fermeture des frontières, l’interdiction de survol, et le gel des avoirs de certaines personnalités impliquées dans le coup d’État.

Réactions du Burkina Faso et du Mali

Dans un geste de solidarité fraternelle, le gouvernement de transition du Burkina Faso et du Mali a exprimé son soutien au peuple nigérien dans sa prise de responsabilité pour affirmer sa souveraineté. Le colonel Maïga a clairement indiqué que le Burkina Faso et le Mali refusent d’appliquer les sanctions imposées par la CEDEAO, qu’ils considèrent comme illégales et inhumaines pour les populations.

Mise en garde contre une intervention militaire étrangère

Le colonel Maïga a prévenu que toute intervention militaire étrangère contre le Niger serait assimilée à une déclaration de guerre contre le Burkina Faso et le Mali. Il a également annoncé que face à une telle situation, les trois pays pourraient quitter la CEDEAO et prendre des mesures de légitime défense pour soutenir les forces armées et le peuple du Niger.

Implications géopolitiques et risques de déstabilisation régionale

Une intervention militaire étrangère au Niger pourrait déclencher une réaction en chaîne dans toute la région sahélienne et ouest-africaine. Le Mali et le Burkina Faso craignent que l’instabilité s’étende aux pays voisins tels que le Ghana, le Togo, le Bénin et le Nigéria, ce qui entraînerait des conséquences graves pour la stabilité régionale.

«Niamey de 2023 n’est pas Abidjan de 2004 ou Tripoli ou Benghazi en 2011. Toute intervention militaire étrangère au Niger aura des répercussions immédiates et intraitables sur tous les intérêts français au nord, au sud, à l’est et à l’ouest de l’Afrique. Ce n’est pas une menace, c’est une évidence». (Nathalie Yamb)

Néocolonialisme et quête d’indépendance de l’Afrique

Le discours du colonel Maïga pointe du doigt l’ingérence étrangère en Afrique et appelle les dirigeants africains à se libérer du néocolonialisme et de la dépendance vis-à-vis des puissances occidentales. Il appelle à une véritable unité et coopération entre les nations africaines pour construire un avenir indépendant et prospère pour le continent.

source : Le Média en 4-4-2

Macron conduit la France dans l’impasse en Afrique

par Pierre Duval - Le 03/08/2023.

Est-ce que le président français actuel est un bon stratège politique ? À l’aune de la déroute de la France au Niger, au Sahel et plus largement sur le continent africain tant sur le point humain, militaire, et géopolitique, la question se pose

Une alliance de pays africains contre la France est bien réelle. Au-delà de la perte fulgurante du rôle de la politique française en Afrique, alors que le continent comprend de nombreux pays francophones, se pose la question des répercussions sur le sol français des populations africaines envers la France. Les révoltes de la fin du mois de juin dernier dans tout le pays ont montré la réalité d’un éclatement dans l’Hexagone. Dans ce désastre géopolitique français se trouve aussi la question sensible de la sécurité énergétique de la France et de l’Europe avec le gazoduc Nigéria-Europe. 

Un bilan désastreux pour la France en Afrique

«Emmanuel Macron dans l’impasse au Sahel», titre Le Point, rajoutant : «Le coup d’État au Niger vient de lui en infliger une de plus». Le Point stipule : «Le coup d’État dont a été victime le président du Niger le 27 juillet plante le dernier clou dans le cercueil de la politique macronienne au sud du Sahara». Pour le média français, la politique d’Emmanuel Macron en Afrique donne les cartes stratégiques françaises à la Russie : «Vladimir Poutine n’aurait pu rêver meilleur contexte pour son sommet Russie-Afrique qu’il tenait au même moment à Saint-Pétersbourg».

Mali

Au Mali, la France a perdu rapidement pied sous la politique d’Emmanuel Macron. Observateur Continental rapportait que le Mali a changé de langue officielle, abandonnant le français. Mikhail Gamandiy-Egorov, expert de l’Afrique pour Observateur Continental signalait que les Maliens ne veulent plus de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation du Mali (MINUSMA) n’étant plus utile pour le Mali d’autant plus que pour les Maliens, «c’est une fabrication française, dirigée par des militaires hexagonaux et certains de leurs alliés. Et, elle continue d’entretenir la guerre et la peur au Mali, ainsi que de soutenir les terroristes». 

Pour rappel, l’opération militaire française, Barkhane, ayant duré plus de 8 ans en terre malienne, a pris fin en novembre 2022. Observateur Continental notait déjà en février 2022, que «les opérations militaires française et occidentale Barkhane et Takuba en terre malienne – c’est terminé». 

Si Emmanuel Macron annonçait la fin Barkhane et Takuba, il clamait que les soldats français resteront présents dans les pays voisins. France Bleu, répétant les déclarations officielle de Paris d’alors, affirmait que l’annonce du retrait de Barkhane et Takuba «est sans conséquence sur le dispositif militaire français dans la région, car les soldats français se sont déjà retirés du Mali, et 3000 militaires français restent déployés au Niger, au Tchad et au Burkina Faso». 

La vision stratégique de la France se limitait, donc, à des mots sortis de l’imagination de technocrates français, et montre en raison de la situation actuelle au Sahel que les responsables politiques en France sont des stratèges de papier qui adorent les grandes déclarations pendant que la réalité géopolitique du terrain avance, elle, à grand pas. 

Mikhail Gamandiy-Egorov notait judicieusement au départ de Barkhane que «les élites occidentales, étant dans l’incapacité la plus totale de s’adapter au monde contemporain multipolaire, risquent à terme de devoir faire face à des évacuations humiliantes de leurs troupes et mercenaires – en Afrique, comme à d’autres endroits du monde – avec en prime l’obligation d’observer la joie des populations des pays concernés qui les accompagneront jusqu’à la piste de décollage». Et, c’est exactement ce qui se passe actuellement avec le Niger et dans d’autres pays africains.

Burkina Faso

Le Point rappelle l’évacuation des forces spéciales du Burkina Faso, il y a juste un an. Observateur Continental avisait, «après plusieurs échecs du régime français en terre africaine», que «l’effet domino se poursuit de manière attendue», et que «désormais et suite aux revendications populaires», c’était au tour des autorités du Burkina Faso d’officialiser la demande de départ des troupes françaises du sol national». «Le système néocolonial de la Françafrique semble définitivement en chute finale», observait justement l’expert de l’Afrique pour Observateur Continental Mikhail Gamandiy-Egorov. 

Là, encore, le président français, Emmanuel Macron, avait demandé des «clarifications». Le gouvernement du Burkina Faso lui confirmait avoir demandé le retrait des troupes françaises. Observateur Continental remémorait le fait que «les mobilisations populaires souverainistes, le panafricanisme et la réalité multipolaire internationale ont complètement mis à mal la présence des nostalgiques de l’unipolarité sur le sol africain, ainsi que l’interférence fortement néfaste de ces derniers dans les affaires des États de l’Afrique». Si Emmanuel Macron avait lu Observateur Continental, il aurait peut-être pu éviter cette nouvelle déroute au Niger. Et, pas seulement pour ce pays africain, mais aussi envers la politique de la France avec la Russie, un pays qui pouvait donner son gaz à bon marché à la France.

Puis le Burkina Faso et le Mali ont déclaré «être prêts à se battre aux côtés du Niger face à la menace d’intervention militaire [de la France et de ses alliés]». «La journée historique du 26 juillet 2023, constitue pour l’ensemble des nigériens une journée de regain d’espoir et de revitalisation des élans pour un Niger qui reprend confiance en lui-même», martèle l’Agence nigérienne de presse rapportant que la population soutient les militaires qui ont chassé le président soutenu par Emmanuel Macron. Pour les Nigériens les rebelles sont des patriotes. Bref, la bande du Sahel n’est plus sous la houlette de la France.

Gazoduc Nigéria-Europe et uranium

En mai dernier, le Financial Times présentait Mohamed Bazoum comme un allié de la France qui défend la présence militaire de la France au Sahel. Des plans étaient prévus pour la réalisation du gazoduc Nigéria-Europe. La seule question était savoir de s’il allait passer par le Maroc ou l’Algérie. Avec la perte probable de l’import d’uranium du Niger pour ses centrales nucléaires en France, la question de l’arrivée de gaz via le gazoduc Nigéria-Europe est en question alors que la France a décidé de bannir le gaz bon marché russe. 

Là, encore, la politique d’Emmanuel Macron en Afrique risque d’avoir des conséquences sur les Français, sans oublier que les émeutes de juin dernier ont montré une fissure violente de la société française. Est-ce que la libération des États africains de la France va entraîner aussi, du fait de la politique française d’Emmanuel Macron, la France dans l’impasse ? 

source : Observateur Continental

Niger : Réouverture des frontières avec cinq pays frontaliers

par Sahel Intelligence - Le 03/08/2023.

Les frontières terrestres et aériennes du Niger avec cinq pays voisins ont été réouvertes, une semaine après leur fermeture consécutive au coup d’État qui a renversé le président élu Mohamed Bazoum.

«Les frontières terrestres et aériennes avec l’Algérie, le Burkina Faso, la Libye, le Mali et le Tchad sont réouvertes» à «compter de ce jour», a-t-il déclaré.

Mardi, l’un des putschistes a annoncé cette réouverture à la télévision nationale. 

Juste après le coup d’État, toutes les frontières terrestres et aériennes du Niger avaient été fermées le mercredi 26 juillet 2023. 

Le putsch est mené par le chef de la garde présidentielle, le général Abdourahamane Omar Tchiani (Tiani), qui s’est proclamé président du conseil national pour la sauvegarde de la patrie.

source : Sahel Intelligence

Niger : Le Nigeria coupe son approvisionnement en électricité

par Africa News - Le 03/08/2023.

Le Nigeria a coupé son approvisionnement en électricité au Niger, a appris mercredi l’AFP de source proche de la direction de la Société nigérienne d’électricité (Nigelec), en ligne avec les sanctions décidées par les voisins ouest-africains du Niger déstabilisé par un putsch.

«Le Nigeria a déconnecté depuis hier (mardi) la ligne haute tension qui transporte l’électricité au Niger», a déclaré cette source. Un agent de la Nigelec a de son côté indiqué que la capitale, Niamey, était «alimentée grâce à la production locale».

Dimanche, la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), dirigée par le président nigérian Bola Tinubu, a décidé de sanctions contre les putschistes qui ont renversé le président élu Mohamed Bazoum il y a une semaine.

En plus d’un ultimatum d’une semaine pour rétablir l’ordre constitutionnel et la suspension des transactions financières avec le Niger, la CEDEAO a décrété le gel de «toutes les transactions de service, incluant les transactions énergétiques».

Selon un rapport de la Nigelec – seul fournisseur du pays -, en 2022, 70% de la part d’électricité au Niger provenait de l’achat à la société nigériane Mainstream. L’électricité est produite par le barrage de Kainji (ouest du Nigeria).

De nombreux quartiers de la ville de Niamey sont en temps normal soumis à des coupures d’électricité et la décision du Nigeria va aggraver cette situation.

Pour s’affranchir de sa forte dépendance énergétique au Nigeria voisin, le Niger s’active à achever d’ici à 2025 son premier barrage, sur le fleuve du même nom. À quelque 180 km en amont de Niamey, le barrage de Kandadji doit générer annuellement 629 gigawattheure (GWh).

Le Niger, un des pays les plus pauvres du monde, est dépendant de ses partenaires étrangers dans de très nombreux domaines. «Les sanctions feront très mal à notre pays», avait dit le Premier ministre nigérien Ouhoumoudou Mahamadou dimanche sur France 24, au moment où celles-ci se multiplient internationalement.

source : Africa News

Pourquoi le Niger est un nouveau front dans la guerre froide moderne

par Timur Fomenko - Le 03/08/2023.

Un coup d’État dans un pays africain pauvre n’est pas inédit, mais le contexte géopolitique actuel lui confère une importance mondiale.

L’armée du Niger, pays d’Afrique de l’Ouest, a renversé le gouvernement par un coup d’État, ouvrant la voie à une nouvelle confrontation avec l’Occident. Le Niger se trouve dans une situation similaire à celle de la plupart des États d’Afrique de l’Ouest, avec la France, son ancienne puissance coloniale, qui continue à exercer son pouvoir financier et militaire sur le pays et à s’ingérer dans ses affaires intérieures.

C’est pourquoi le coup d’État a été populaire, certains manifestants demandant le départ de la France et l’arrivée de la Russie. Dans le nouvel environnement géopolitique dans lequel nous vivons, les États africains disposent désormais d’un plus grand espace politique et d’options pour se débarrasser de l’influence occidentale. Le Niger, pays enclavé, appauvri et déchiré par la guerre, mais riche en matières premières, est en passe de devenir une nouvelle frontière.

À l’époque de l’unipolarité américaine, les États d’Afrique étaient à la merci de l’Occident. Pauvres, désespérées et instables, de nombreuses nations africaines ont été contraintes de compter sur leurs anciens suzerains coloniaux, ainsi que sur les États-Unis, pour obtenir diverses formes d’assistance. C’était particulièrement vrai à l’époque de la «guerre contre le terrorisme», lorsque des insurrections islamistes menaçaient la sécurité de leurs populations. Les forces spéciales françaises et américaines ont été déployées pour combattre les terroristes dans les États d’Afrique de l’Ouest, par exemple lors d’un horrible enlèvement dans un hôtel au Mali en 2015. Toutefois, cette assistance, qu’elle soit financière ou militaire, était assortie de l’obligation pour les États africains de respecter les conditions idéologiques de l’Occident – une forme de néocolonialisme.

Mais le monde a changé. Le contexte de la guerre contre le terrorisme est révolu et nous vivons désormais dans un environnement géopolitique dicté par une concurrence acharnée entre des pays puissants – principalement les États-Unis et leurs «alliés» face à des rivaux tels que la Chine et la Russie. Cet environnement signifie que les États africains ont désormais d’autres «options» pour obtenir de l’aide, ce qui leur permet de maximiser leur propre autonomie politique et leur espace plutôt que de céder aux conditions idéologiques d’un autre pays. Par exemple, les États africains utilisent de plus en plus le groupe Wagner pour assurer la sécurité plutôt que l’aide occidentale, tandis que l’initiative chinoise «Nouvelle route de la soie» signifie également que les États africains ne peuvent plus être exploités par des organisations telles que le FMI.

Dans ces circonstances, les militaires étant les acteurs politiques les plus forts dans des pays instables comme le Niger, ils ont la possibilité de prendre le pouvoir et d’être protégés de la prédation occidentale, car dans ce système international, les États-Unis ne peuvent plus mener d’interventions militaires unilatérales directes. C’est ainsi que des gouvernements et des armées ont profité d’une réaction anti-française dans toute l’Afrique de l’Ouest pour commencer à chasser la présence des anciens maîtres coloniaux. En l’espace d’un an, l’armée française a été expulsée du Mali et du Burkina Faso. Le Niger devrait être le prochain. Toutefois, le risque d’une guerre civile soutenue par la France demeure.

Si le coup d’État au Niger devait finalement réussir, les nouvelles autorités ont l’intention d’établir des relations plus étroites avec la Russie, qui peut devenir un nouveau garant de la sécurité, beaucoup moins compliqué. Si la Chine fournit généralement une assistance économique et infrastructurelle aux États africains, ainsi qu’une garantie de non-intervention et un soutien à la souveraineté nationale, elle est moins ouverte et moins encline à fournir un soutien militaire spécifique pour écraser les insurrections, ce qui est davantage le créneau de la Russie.

Bien entendu, le Niger a également une importance stratégique. Bien qu’il soit facile de le considérer comme un pays enclavé et appauvri au milieu du désert, le Niger possède un stock important de ressources naturelles, notamment de l’uranium, du charbon, de l’or, du minerai de fer, de l’étain, des phosphates, du pétrole, du molybdène, du sel et du gypse. Ses réserves d’uranium sont parmi les plus importantes au monde, ce qui est absolument essentiel pour l’énergie nucléaire. C’est pour cette raison que la France n’est pas disposée à céder le Niger sans se battre, et qu’un conflit potentiel par procuration se profile à l’horizon. Si les intérêts soutenus par l’Occident dans le pays sont vaincus, la perte stratégique du Niger en termes de ressources serait énorme, et il est très probable que la Chine prendrait l’avantage sur l’Occident dans le processus.

Tout cela a fait du Niger la nouvelle frontière la plus improbable du monde. Si les discussions sur les coups d’État et les guerres civiles en Afrique peuvent sembler ordinaires aux yeux du public occidental, elles se déroulent désormais dans un nouvel environnement géopolitique largement perçu comme une nouvelle guerre froide. L’attitude condescendante de l’Occident à l’égard de l’Afrique, un continent qui aspire à l’indépendance et à la prospérité, fait des ravages. Des portes s’ouvrent à d’autres acteurs, et c’est pourquoi nous en sommes ici aujourd’hui.

source : Russia Today via Le Cri des Peuples

La Russie met en garde contre une éventuelle intervention militaire au Niger

par Sputnik Afrique - Le 03/08/2023.

La menace d’une intervention militaire au Niger ne contribuera pas à un règlement, a fait savoir la porte-parole de la diplomatie russe. Moscou considère primordial «d’empêcher une nouvelle dégradation» de la situation dans le pays.

La Russie a mis en garde contre l’éventuelle intervention militaire au Niger évoquée récemment par la CEDEAO en réaction au renversement du président Mohamed Bazoum par les militaires.

«Nous pensons que la menace de l’usage de la force contre un État souverain ne contribuera pas à désamorcer les tensions et à résoudre la situation dans le pays», a déclaré ce 2 août Maria Zakharova, porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères.

La Russie considère primordial «d’empêcher une nouvelle dégradation de la situation dans le pays» et prône l’organisation d’un «dialogue national».

Moscou compte également sur des actions appropriées de l’Union africaine et des organisations sous-régionales pour un règlement pacifique, a dit la diplomate. Dans sa recherche d’une issue, Moscou part du principe d’«une solution africaine aux problèmes africains», a-t-elle expliqué.

C’est la deuxième fois que la diplomatie russe réagit aux événements au Niger. Le 27 juillet, le lendemain du coup d’État à Niamey, Maria Zakharova avait appelé «les parties au conflit à s’abstenir de recourir à la force et à résoudre toutes les questions litigieuses par un dialogue pacifique et constructif». De plus, Moscou a dit compter sur «la libération rapide» de Mohamed Bazoum.

Situation au Niger

Depuis le 26 juillet, le pouvoir au Niger est aux mains du Conseil national de sauvegarde de la patrie (CNSP), présidé par le général Abdourahamane Tiani. Ce chef de la garde présidentielle s’est proclamé nouveau chef d’État, en annonçant le renversement de Mohamed Bazoum. Le 1er août, le CNSP a commencé à procéder à certaines nominations et a rouvert les frontières avec cinq pays.

Le Président renversé reste retenu à Niamey depuis le 26 juillet.

En réponse à ces événements, la CEDEAO a demandé le 30 juillet le rétablissement, dans un délai d’une semaine, de l’ordre constitutionnel et le retour au pouvoir de Mohamed Bazoum, élu en 2021. Si ces exigences ne sont pas remplies, l’organisation se réserve le droit de «prendre toutes les mesures nécessaires», qui «peuvent inclure l’usage de la force». Ces décisions n’ont pas été appréciées par le Burkina Faso et le Mali, mais également par le chef du Parlement nigérien.

source : Sputnik Afrique

Contrecoup de l’échec atlantiste face à la Russie : Déclin de la France en Afrique ou la fin de l’Empire «vache à lait»

par Amar Djerrad - Le 05/08/2023.

Les échecs en cours de l’Occident-Atlantiste et la remise en question de son hégémonie face à la Russie, ainsi que l’enlisement de la France officielle dans la crise ukrainienne, suscitent des prises de conscience en Afrique, surtout de l’espace «France-Afrique» qui y voit l’occasion de se défaire d’un boulet néocolonialiste.

Après le Mali, le Burkina Faso, voilà que le Niger, avec son coup d’État, remet lui aussi en question la politique occidentale (en particulier française) en matière de relations internationales, notamment économique et interventionniste qui ont toujours été sélectives. Contrairement à la Russie en Ukraine, le Niger n’a pas attaqué de citoyens occidentaux, mais a pris le contrôle de ses richesses, dont son uranium. En réaction, la France et les États-Unis pourraient préparer une opération militaire par le proxy CEDEAO (une communauté économique régionale) qui menace déjà le Niger d’une action militaire. Les nouveaux chefs militaires du Niger refusent de céder à la pression, ce qui suscite des tensions. Le Mali et le Burkina Faso soutiennent le Niger et avertissent que toute attaque contre le pays sera considérée comme une attaque contre eux. D’autres pays sont dans l’expectative. Cette crise soulève des questions en fixant les regards sur la Russie, la Chine et l’Inde. La France semble davantage préoccupée par le contrôle de la ressource économique que par la démocratie et les droits du peuple nigérien. Une solution diplomatique paraît improbable.

1ère Partie
Les échecs otano-kiéviens et remise en question de leur Hégémonie

Après les méfaits et les échecs des terrorismes, des «révolutions de couleurs», des subversions, des aboyeurs estampillés «analystes», des défenseurs des «droits de l’hommisme» ou «des libertés», des propagandes des médias dits «mainstrean», des menteurs professionnels associés à des félons et agitateurs de tous bords, sous couvert de défense de valeurs «universelles», que peut-il bien rester à cet Occident-Atlantiste comme autres moyens pour maintenir et élargir son hégémonie ? La guerre à la Russie par proxy ukrainien ? C’est la faute fatale que les États-Unis ont commise, croyant pouvoir neutraliser et réduire la Russie en faisant fi, par insolence, de son Histoire jalonnée d’héroïsme !

Le résultat visible tend vers l’effet inverse en remettant tout «l’ordre» mondial en question ! Échec de l’objectif de la contenir et de l’affaiblir, suivi d’une marche vers la multipolarisation, d’un rejet franc du suprémacisme, d’une recomposition des alliances, d’une volonté d’abandon du dollar comme monnaie dominante et de réserve, d’un déclin économique et militaire de l’Europe… Échec du projet globaliste !

Dans la guerre otano-kiévienne, face à la puissante Russie, la France officielle n’a fait qu’acquiescer et suivre tout ce qui se décide aux États-Unis (avec le Royaume-Unis), même contre ses intérêts. Une France réduite à un faire-valoir à force de cupidité, d’effronterie, de prédation, d’hypocrisie, de mensonge et de verbiage. Même tapie dans ce que l’on dénomme «l’Occident collectif» avec toute sa puissance que dirigent les USA, elle n’ose pas braver la Russie, son sauveur du nazisme, même sous la couverture de l’article 5 de l’OTAN ! Un «Occident collectif» qui a bien mesuré et compris la légitimité des actions de la Russie, sa détermination, ses objectifs et les moyens mis pour néantiser toute menace. Et comme disait l’autre «te voilà maintenant face à ton barbot, mon barbot !»

La France dans une OTAN dépressive et Illusions de puissance

L’Engagement de la France dans l’OTAN qui devait élargir son pouvoir, son influence et ses capacités a eu, en fait, des résultats inverses ! L’implication de l’OTAN dans cette guerre est effective sans être officielle. L’exhibition médiatique de son article 5 n’est que du bluff pour maintenir l’Union. Cette organisation n’a ni la volonté, ni les moyens pour battre la puissance Russie. Comme dit Andrei Martyanov «après tout, on ne chasse pas l’ours avec un couteau de cuisine». Objectivement, quels pays de l’OTAN peuvent s’engager avec armes et soldats ? Les USA et la GB en fournissant des armes seulement jamais ses soldats. L’Allemagne, le Royaume-Uni, la France, l’Espagne, l’Italie, également, avec très peu d’armes, mais sans soldats. Les pays baltes, aussi, sachant qu’ils risquent de disparaître rapidement. Fournir des armes à qui ? L’Ukraine est anéantie ! La Pologne, championne en bluff et en escroquerie, sait qu’elle risque une implosion en plus d’une attaque décisive, particulièrement dévastatrice. Ses troupes étant sans commune mesure face à l’armada russe.

Ils ne font donc que duper, sachant que la Chine, aussi dans le viseur, sera de la partie si nécessaire ! Ainsi, le seuil russe ne sera pas franchi et l’aventure de battre la Russie est chimérique ! Les milliardaires et politiciens psychopathes straussiens de ce pays, qui ne font que dans le bluff, l’agitation et l’incitation, connaissent la limite de la falaise. Ils tiennent trop à leur fortune, à leur vie luxueuse pour les voir s’évaporer. Il vaut mieux garder ce que l’on a, que risquer de tout perdre, y compris la vie !

Le Niger, un coup d’État, la France dans l’enjeux de souveraineté en Afrique et la «main de Moscou»

Mais les dirigeants inconscients, sans principes et sans foi, de cette France, se rappellent vite qu’ils ont des muscles dans les bras plus que dans la langue avec des «couilles au cul» lorsque le Niger se réveille pour destituer son président, un servile de la France, qui a appauvri son pays ! Cela rappelle cette anecdote sur un enfant de huit ans à qui l’on a dit pourquoi il a peur d’affronter son camarade du même âge. Il répond qu’il n’a pas peur puisqu’il peut battre sa petite sœur de quatre ans ! La France est dans ce paradigme en ne cessant d’exhiber ses pectoraux vers les pays africains. Du coup, le président français qui s’inquiète pour les peuples et les pays africains, voit que ce coup d’État «est parfaitement illégitime et profondément dangereux pour les Nigériens, pour le Niger, et pour toute la région», provoque une réunion d’urgence d’un «Conseil de défense», pour annoncer par l’Élysée que «quiconque s’attaquerait aux ressortissants, à l’armée, aux diplomates et aux emprises françaises verrait la France répliquer de manière immédiate et intraitable. Le président de la République ne tolérera aucune attaque contre la France et ses intérêts», ainsi que la suspension «avec effet immédiat, (de) toutes ses actions d’aide au développement et d’appui budgétaire au Niger», suivies par l’UE, les USA et des organisations africaines liges telle la CEDEAO. La présence militaire française et américaine au Niger n’a pour but que le contrôle de toute cette zone de l’Afrique subsaharienne, de l’Ouest et du Maghreb.

Qui est plus apte à déchoir des responsables serviles et corrompus d’un État que son armée, par ses officiers patriotes ! C’est la raison pour laquelle, ils ne cessent de vouer aux gémonies les institutions militaires dont elles craignent les putschs révolutionnaires qui défendent la souveraineté. C’est pourtant dans l’ordre Constitutionnel des Armées de tout pays de défendre la souveraineté de leur patrie. L’illégalité de cet acte d’autorité – sous divers prétextes : démocratie, liberté, etc. – n’est évoquée, par ces brigands, que lorsque sa finalité remet en cause l’ordre hégémonique et les intérêts illicites des pays occidentaux, prédateurs souvent d’ex-colonisateurs et/ou impérialistes ! Un coup d’État qui ne l’arrange pas sera qualifié «d’autocratique» mené par une junte contre la «démocratie». Un coup d’État qui les arrange sera qualifié de salutaire qui instaurera la «démocratie». Le coup d’État du Maïdan en est l’exemple flagrant récent ! Ceux-là sont licites, car «démocratique». Il n’y a aucun respect des valeurs internationales qu’ils apprécient selon la géographie, la race ou le degré d’allégeance. Être un pays africain ou un pays européen, l’appréciation va de la condamnation au soutien pour les mêmes faits !

Soyons réalistes ! Lequel est le plus acceptable : un «dictateur» patriote, intègre qui défend les intérêts de son pays et sa souveraineté qui apporte le bien-être à son peuple, ou bien un «démocrate» félon, corrompu qui défend les intérêts d’une oligarchie liée à un État néocolonialiste qui laisse son peuple dans l’indigence ? Même l’idiot sait faire le choix !

Ce ne sont pas ces « pingouins» européistes désignés, qui dirigent actuellement L’Europe qui peuvent influer ou orienter l’évolution historique irréversible du continent africain quelle que soit leur puissance.

Si la France officielle y voit, par diversion, la main manipulatrice à visée colonialiste de Moscou ou Pékin, les Africains jugent sur les résultats concrets : L’un avec des réalisations dans tous les domaines, économique, développement des infrastructures, scientifique et sécuritaire, sans conditions et sans ingérences, d’égal à égal, gagnant-gagnant, en toute souveraineté, l’autre avec des promesses jamais réalisées, réitérées à toutes les occasions durant des décennies, sous d’intolérables conditions, dans l’ingérence, l’humiliation tout en continuant à exploiter injustement leurs richesses par les menaces ! Ne respectant ni les us et coutumes des États africains, Macron a même prévu, avec culot, d’envoyer au Cameroun un ambassadeur LGBT chargé de promouvoir l’homosexualité.

L’Occident et sa propagande abject : Russes et Chinois «des colons»

Les Russes et les Chinois, ont-ils un jour colonisé et exploité un seul pays en Afrique – contrairement à l’Occident qui a un passé colonial, barbare en la colonisant en totalité, dont la majorité par la France – pour les accuser de visées colonialistes dans ce continent ? Tous les moyens forts d’endoctrinement (écrits et visuels), à la faveur des progrès numériques, dont Internet, ont été déployés pour imposer au monde leur vision unique et incontestable des choses et criminaliser ces deux pays (ainsi que ceux qui les suivent) dans toutes leurs actions ! Une guerre de l’information sans précédent que mènent, en parallèle à la vraie guerre sur le terrain ukrainien, les USA en marionnettistes en chef que les vassaux européens doivent suivre sans broncher, même contraires à leurs intérêts et à la logique !

Ce qui est étrange et risible, dans ce contexte, c’est que les Américains arrivent à faire croire et à faire accepter n’importe quelle stupidité et à se la faire relayer. Les médias français aux ordres montrent qu’ils avalent n’importe quelle couleuvre venant d’outre-Atlantique. Nous avons lu par exemple cette déclaration de James O’Brien, reprise comme idée sensée sans aucune critique : «la seule chose que les sanctions occidentales ont accomplie est le début du processus de contraction de l’économie russe, qui conduira à son déclin de seulement 20% d’ici 2030». Si c’est dit par un Américain de surcroît, «chef du bureau de coordination des sanctions de l’administration Biden», alors c’est sensé chez les médias «mainstream» français ! Les sanctions auront donc leurs effets sur la Russie – non plus en quelques semaines comme prévu – mais en 2030 avec un déclin de 20% ! S’il avait dit 2050 avec 21,8%, ils l’auraient aussi approuvé ! Sont-ils normaux ? Des esprits éveillés disent bien que les âneries d’un riche maître passent toujours chez les laquais pour de l’érudition et sa m.… de pour de la crème ! Et ils prônent les «droits de l’homme», la «démocratie» et la «liberté d’expression» pour les Africains qui les dépassent dans le raisonnement, la sagesse et l’humanisme (dans leur jungle) contrairement à eux qui se retrouvent (dans leur jardin) à parrainer les terrorismes comme ils le font au Sahel, à fomenter des révoltes et en guise d’information à perroqueter leur maître sur la base des communiqués qu’ils reçoivent !

2ème Partie
France 24 média public subversif et la déchéance de l’État français

L’exemple de France 24, (comme France 5RFITV5 …) est édifiant ! Elles sont bien des chaînes publiques, de l’État français, financées par l’argent public ! Elles doivent bien répondre aux orientations et directives de l’État français. France 24 est la chaîne privilégiée du Quai d’Orsay pour répandre la subversion et le chaos en Afrique et plus particulièrement dans les États frondeurs (dont l’Algérie) à un point où elle nous a offert un sale spectacle en interviewant, le 6 mars 2023, le chef d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) Abou Obeida Youssef Al-Annabi, un chef terroriste auteur de milliers d’assassinats. On ne peut mieux prouver le lien entre le pouvoir français et la nébuleuse islamo-terroriste. Interdite en Algérie et dans plusieurs pays africains – elle est qualifiée par l’Agence Presse Service (APS) de «chaîne poubelle», pour «son manque de professionnalisme». 

La France est bien au bout de sa déchéance sur le plan international, réduite à ce niveau par l’influence des lobbies et la gouvernance des coquins.

Tout cela, pris ensemble, on comprend bien que les Africains aient atteint la limite du supportable en décidant de ne plus se laisser encore faire couillonner par un État pareil, qui s’avère n’être qu’un tigre en papier, au vu de sa mise à nu à la faveur de ce qui se déroule sur le terrain ukrainien, avec son activisme et ses gesticulations qui trahissent en fait sa faiblesse devant l’adversité. Les Africains voient parfaitement cette réalité qui ne peut que les encourager à rejeter cette France-là en s’attelant à prendre en main leur destin afin de développer leurs pays, en exploitant eux-mêmes leurs richesses avec leurs propres moyens ou en collaboration avec les États de leur choix selon le principe «gagnant-gagnant» en dehors de toute exigence ou ingérence dans les affaires intérieures. La France, ici, ne peut être éligible, ses gouvernants actuels ne sont plus maîtres de leurs décisions, ils suivent la seule vérité, même saugrenue, qui leur vient d’outre-Atlantique, d’une part en plus qu’ils n’arrivent pas à comprendre que la confiance se gagne par le degré de patriotisme envers son pays d’abord d’autre part. Plus les dirigeants défendent honnêtement les intérêts de leur pays et sa souveraineté, plus ils inspirent confiance, car ainsi, ils se comprennent mieux. Mais leur arrogance les rend sourds/aveugles pour ne se fier qu’au virtuel et non à la réalité.

En effet, comment faire confiance à cette France qui a été ramenée à un point d’allégeance où certaines de ses lois lui sont imposées par des lobbies (particulièrement par les sionistes) et/ou les groupes financiers américains. Sa morale a subi une telle déchéance où elle admet, par exemple, l’organisation de cagnottes pour défendre des assassins, sans parler des méfaits des influenceurs et fossoyeurs du paysage politique français que l’on n’ose pas défier au risque d’être inquiété et banni. Citons BHL et Zemmour des politicards, non-français d’origine, devenus français grâce au décret Crémieux de 1870 accordant aux «Israélites indigènes» d’Algérie la citoyenneté française. 

La France-Afrique : De la grenouille atlantiste au défi de la souveraineté africaine

La France dans tout cela ne semble qu’une petite grenouille atlantiste qui veut se montrer bœuf devant les Nigériens qu’elle ne pourra pas dompter, même militairement. Elle se croit toujours dans le même rapport de force d’antan ! Son arsenal nucléaire est superflu, car il est à opposer à ceux qui en possèdent et non à ceux qui n’en possèdent pas ! Vous vous imaginez la France menacer de guerre un pays africain lointain (des milliers de Km), comme le Niger, ou menacer le pays d’une frappe nucléaire ? Grotesque ! Il n’y a que l’instrumentalisation d’États proxys africains voisins (par la CEDEAO une organisation africaine fantoche, instrument néocolonialiste de la France) comme seule option. Une CEDEAO, communauté économique, qui menace le Niger d’une action militaire ? Le comble ! Le faire contre un petit pays pauvre, c’est de l’ignominie ! Même dans ce cas, des États annoncent déjà soit qu’il n’en est pas question, soit qu’ils se considéreront partie prenante pour défendre le Niger. Le Nigéria, le Sénégal comme proxy ? (Oui, selon les déclarations de leurs officiels). Dans ce cas, il faudra compter les États qui guettent l’occasion pour anéantir ses intérêts et lui porter l’estocade ! Le Mali et le Burkina Faso mettent déjà en garde en prévenant dans un communiqué que «toute intervention militaire contre le Niger entraînerait un retrait du Burkina Faso et du Mali de la CEDEAO, ainsi que l’adoption de mesures de légitime défense en soutien aux forces armées et au peuple du Niger». Une CEDEAO (ou ce qui reste) inapte au combat dont les citoyens et leurs militaires n’auront ni la volonté de combattre et tuer leurs frères, ni surtout de mourir idiotement pour Macron, avec le fort risque pour les dirigeants de subir le même sort qui pourrait cette fois être violent ! L’Algérie qui partage une longue frontière avec le Niger et avec son expérience de la Libye, «met en garde et appelle … à la retenue face aux intentions d’interventions militaires étrangères … facteurs de complication et d’aggravation de la crise actuelle». Ce sera la galère sans possibilité de réussir et de sortir ! La France doit comprendre que son «empire -‘vache à lait’» est mort définitivement !! Ceci est reflété par l’annonce du président du Burkina Faso : «Le temps de l’esclavage de l’Afrique aux régimes occidentaux est révolu et la bataille pour l’indépendance totale a commencé… soit la patrie, soit la mort».

Pendant ce temps, le Niger a interdit les exportations d’uranium vers la France. Comme une bonne partie de l’uranium provient du Niger, cette décision a des conséquences importantes pour l’ensemble de l’UE, qui reçoit 24% de ses importations d’uranium de ce pays.

Personne n’aurait imaginé que des pays africains, pourraient se libérer du néocolonialisme français maintenu avec les menaces, le chantage et l’aide de groupes terroristes qu’elle finance perfidement. C’est pourquoi ces groupes surgissent subitement toujours là où des gouvernants menacent de défendre les intérêts de leur pays, ou moins que cela envisage de revoir le mode de coopération économique jugé injuste ou de diversifier les partenariats ! Pour les dirigeants français, c’est de l’outrage, de la provocation, voire de l’agression qui mérite de «répliquer de manière immédiate et intraitable». Ce ne sont que des mots, car la ‘vache à lait’ ne peut plus donner davantage !

Une France tourmentée : Sortir des illusions occidentales, s’adapter et résister

La France officielle doit revenir à la réalité en se débarrassant de ses psychoses qui l’empêchent de discerner le réel de l’irréel, la réflexion de l’émotionnel. Se dégager de sa vision chauvine et manichéenne dans sa politique extérieure en sortant de ses rêveries et de son complexe de supériorité paralysant. Revenir à l’ordre international basé sur le droit international onusien en s’abstenant de s’ingérer dans les affaires, d’autres États, qui ne la regardent pas, et recouvrer sa souveraineté. Apprendre à vivre dans les limites de ses propres moyens.

Elle ne peut le faire que si elle admet les bouleversements et changements qui caractérisent l’évolution des sociétés humaines, car une période est en cours devant suivre les changements marqués par la numérisation, le cyberespace et la cybernétique. Elle doit aussi accepter que tout système de pensée, qu’il soit politique, économique, ne peut échapper à son évolution historique, quelle que soit la puissance de la propagande investie pour la retarder. Les États encore sous son influence vont tous suivre ce processus de changement !

On ne peut posséder tout éternellement par la force, car «qui veut tout perd tout» enseigne la sagesse.

La politique américaine n’est qu’une fabrique d’illusions et de mensonges, une stratégie pour semer la discorde dans les sociétés et déstabiliser les régimes qu’elle souhaite renverser. L’illusion a fait des dégâts dans plusieurs pays, dont pays arabes, en les amenant à croire à des promesses de liberté et de démocratie qui n’ont abouti qu’à la division et à la destruction de la société. Seule solution, la lutte permanente contre l’impérialisme, contre sa propagande, ses mensonges, son industrie d’illusions ! Aucun État, peuple et autre n’est sorti gagnant en croyant aux illusions américaines !

Pour se faire une opinion correcte face à la formidable machine de propagande occidentale, rien de plus facile pour les gens sensés. Elle est dans la propagande occidentale même qui promet une chose, mais fait le contraire. Il suffit d’observer la réaction de l’Occident face à un évènement ! Comme c’est dans sa «culture» et ses «principes» d’exister et de dominer par le mensonge et l’escroquerie, et ce, depuis des siècles, on devine qu’il n’agira que négativement (en condamnant) contre toutes les actions (bonnes ou mauvaises) d’un pays si elles remettent en cause son hégémonie ! Il ne fera jamais autre chose ! La vérité se trouve dans la prise de position contraire de celle des Occidentaux. Ne jamais les croire même s’ils vous apportent le Paradis sur la paume de la main !

Niger : L’affrontement avec la France est-il évitable ?

par Andrew Korybko - Le 05/08/2023.

Le refus préventif de la France de se retirer du Niger si la junte l’exige sous prétexte qu’ils sont des putschistes illégitimes contraste avec son respect des demandes antérieures du Mali et du Burkina Faso formulées par leurs propres gouvernements intérimaires dirigés par l’armée.

Des spéculations circulent quant à savoir si la junte militaire patriotique du Niger suivra son interdiction des exportations d’uranium et d’or vers la France par une demande pour que les troupes françaises quittent le pays selon l’exemple qui a été récent Burkinabé-Malien. 

Ce serait cependant une décision risquée à prendre, puisque la France vient de déclarer qu’elle ne recevrait pas d’ordres de leur part. Voici ce que PBS a rapporté à ce sujet jeudi :

«Même si les dirigeants militaires du Niger exigent le retrait des troupes françaises – comme cela s’est produit au Mali et au Burkina Faso voisins – cela ne changerait rien», a déclaré Anne-Claire Legendre, porte-parole du ministre français des Affaires étrangères lors d’un point de presse mercredi. «Nous ne répondons pas aux putschistes. Nous reconnaissons un ordre constitutionnel et une seule légitimité, celle du président Bazoum», a-t-elle déclaré.

Dans ces conditions, la junte risquerait soit de se discréditer en imposant une exigence majeure que la France a confirmé qu’elle défiera, soit de risquer d’être évincée du pouvoir par son ancien colonisateur au cas où elle tenterait d’imposer sa volonté.

Le président français Emmanuel Macron a averti la semaine dernière que «le président ne tolérera aucune attaque contre la France et ses intérêts», d’où il faut s’attendre à ce qu’il réponde résolument dans le deuxième scénario mentionné.

Néanmoins, ne pas aborder directement la question des troupes françaises au Niger s’avérera probablement impossible pour la junte, car ces forces finiront par avoir besoin de fournitures une fois que celles qui existent déjà sur leur base aérienne dans la capitale commenceront à manquer. […]

Contrairement à la Syrie où les forces militaires américaines sont basées dans des régions éloignées mais toujours stratégiquement positionnées, les forces militaires françaises au Niger sont situées dans la capitale, ce qui signifie qu’elles ne peuvent être ignorées. 

La junte les a également récemment accusés d’avoir planifié des frappes aériennes sur le palais présidentiel afin de libérer le président déchu Mohamed Bazoum qui y est détenu, faisant ainsi de leur présence continue une menace potentiellement imminente pour la sécurité nationale.

Le refus préventif de la France de se retirer du Niger si la junte l’exige sous prétexte qu’ils sont des putschistes illégitimes contraste avec son respect des demandes antérieures du Mali et du Burkina Faso formulées par leurs propres gouvernements intérimaires dirigés par l’armée. 

Cela suggère que la France a décidé de tracer une ligne dans le sable signalant qu’elle se battra pour préserver son dernier bastion régional, ce qui augure mal pour l’avenir de la junte nigérienne.

Andrew Korybko

*

CHRONIQUE. L’ancien ambassadeur Gérard Araud dénonce l’aveuglement français sur le continent et espère que le putsch au Niger servira de déclic.

«Je l’avais bien dit» est une phrase qui oscille entre le ridicule de la vanité et l’odieux de la satisfaction devant le malheur annoncé et réalisé. Je ne l’utilise pas volontiers, mais mes lecteurs peuvent se souvenir d’une chronique où, il y a dix-huit mois, j’appelais à une révision en profondeur de la politique française au Sahel. À l’époque, nous venions d’être expulsés du Mali. Le Burkina Faso a suivi et voilà maintenant que c’est le tour du Niger. À chaque fois, des putschistes jouent des sentiments antifrançais répandus dans la population pour présenter leur coup d’État comme une libération du colonisateur ; à chaque fois, on agite le drapeau russe devant notre ambassade devenue une forteresse assiégée.

Nul n’aurait dû être surpris par cette vague qui emporte nos intérêts à travers l’Afrique. …

 https://www.lepoint.fr/niger-mali-burkina-faso-notre-politique-africaine-s-effondre-sur-nous/01/08/2023

 

Niger Ni Paix

par Benoit Tement - Le 05/08/2023.
Vu de Washington, vu de «Blind Ken» : On fonce !

La mauvaise gestion du Niger par la France et le coup d’État surprise permettent à l’Hégémon de remettre de l’ordre dans cette partie du Sahel. (Macron a dû se faire engueuler !)

Comme à son habitude l’Occident réagit vite et sans calcul à long et même moyen terme avec la promesse d’une intervention militaire.

Le rêve BRICS va enfin être brisé par la realpolitik (on va leur montrer) bénéficiant

  • De la légitimité du rétablissement du gouvernement Bozoum lui-même légitime.
  • De la future action militaire à laquelle de nombreux vassaux, courtisans de vieille date ou fraîchement convaincus, adhérents au nom du droit international.
  • De la maîtrise du ciel permettant le bombardement habituel de toute la population par drones et par avions, comme l’histoire nous l’a montré, mais pas retenu, depuis1945, jusqu’à la Syrie.
  • De la psychologie revancharde et malsaine de notre président va-t’en guerre.

Vu du côté Blind Ken, c’est encore une guerre par procuration qui ne dit pas son nom et ne mange pas de pain. Le maître d’œuvre : La France. Les sous-traitants, par ordre de proximité : Nigéria, Tchad, Cote d’Ivoire, Sénégal feront le travail. Gageons que les Américains resteront en «soutien opérationnel», plus loin.

Vu de la Russie

Je ne pense pas que Poutine se réjouisse tant que cela de cette situation qu’il n’a probablement pas préparée. Et cela pour quatre raisons :

  • Les politiques militaire et diplomatique de Poutine sont faites de lenteur et de complémentarités, laissant les occidentaux faire des erreurs et multiplier les dissensions.
  • Valider un coup d’État au Niger, c’est valider Maïdan. Ce choix est impossible tant la préservation de l’image de la Russie influe sur sa stratégie.
  • Logistiquement parlant, cette future guerre ne peut être soutenue par la Russie ni par par Wagner. Bien sûr la participation de l’Algérie aux cotés des putschistes aiderait mais insuffisamment et donnerait à cette crise une dimension continentale.
  • Une guerre perdue au Niger est une guerre médiatique mondiale gagnée. La preuve par l’image de l’arrogance occidentale dans toute sa splendeur contre le troisième pays le plus pauvre de la planète sera largement diffusée.

La Russie ne prendra aucun risque protégeant ce qui est son principal patrimoine : La légalité de son action.

La Russie pourrait toutefois armer de missiles Sol Air Stingers, donc américains, les armées du Sahel. La France pourrait alors voir un de ses Mirage s’écraser !

Vu d’Algérie

En revanche, l’Algérie, même sans le blanc-seing de Poutine, et sous la pression populaire, pourra peut-être prendre l’initiative sur le champ de bataille, au Niger. Peut-être aussi laissera-t-elle déborder la colère de sa diaspora, en France. Il y a là un gros risque peu probable aujourd’hui.

Gardons à l’esprit que l’Algérie est le premier client du complexe militaro industriel russe, et que son aviation a des capacités du même ordre de grandeur que celles des USA et de la France dans la région.

Vu de la population africaine dans son ensemble.

Le degré de rejet de l’occident est proportionnel à la pauvreté des pays africains. La population de la Côte d’Ivoire, pays riche, reste francophile dans son ensemble. Le rejet de l’occident est épidermique, révolutionnaire. Il ne peut proposer rapidement une solution économique ni un modèle sociétal. Ces populations devraient donc patienter que les BRICs leur ouvrent la porte, et encore. Que peut, pour ses propres populations, le Niger, seul, et à court terme, troisième pays le plus pauvre du monde et dont l’aide internationale au développement s’élevait en 2020 à plus de 70 Dollars par habitant et par an et dont l’endettement auprès de la BM et de la BAD est désastreux ?

Vu de la France

Rien juste BFM. Des déclarations, des avis mais rien ni à droite ni à gauche, ni à l’assemblée ni dans la rue.

Vu de Macron

Pétri d’hubris, n’ayant rien réussi en 7 ans, Nécron risque encore une fois d’incendier Rome, heu non Paris. Il appliquera la force comme son mentor le lui a certainement ordonné.

Mais jusqu’où les forces armées françaises suivront-elles Macron ? Sans matériel, sans logistique dimensionnée, appuyés par les forces Nigérianes douteuses et américaines invisibles, que pourront faire nos militaires dans un conflit mal appréhendé, mal préparé car soudain. On ne sait rien ni de la détermination de l’adversaire ni de celle de nos alliés. Rien n’est prêt.

Ce qui peut ne pas fonctionner pour la France :

  1. Les militaires français se rebellent. Rien d’étonnant. D’une part les policiers ont ouvert la voie, et d’autre part, il ne reste que des pelles pour nous battre.
  2. Un missile du marché noir abat un Rafale.
  3. Le Nigéria, ayant démontré sa faiblesse contre Boko-Haram, n’arrive pas à passer la frontière. Le Nigéria pays fédéral est peuplé au Nord des mêmes ethnies qu’au Niger. Le souvenir de la guerre du Biafra (1967-1970) est encore vivant.
  4. Le Tchad et le Sénégal font un coup d’État et rejoignent les militaires putschistes
  5. Wagner intervient pour de vrai.
Vu par les Ivoiriens 

Francophiles dans l’âme, ils finiront par s’interroger sur le bienfondé de cette action guerrière en préparation. Voici donc le doute entrer comme une maladie contagieuse dans ce beau pays.

Conclusion

L’occident ténébreux dans un désarrois total n’essaye même plus de sauver les apparences. Le monde entier observe en direct les préparatifs d’un désastre.

Qui veut mourir pour les intérêts occidentaux et pour que justice internationale soit faite au Niger ?

Nous nous dirigeons donc dans un premier temps, vers une guérilla, expression de la volonté politique lointaine, mise en pratique à minima sur le champ de bataille.

Niger : Pourquoi la France doit intervenir

Source : Causeur - par Pierre d'Herbès - Le 05/08/2023.

Niger : pourquoi la France doit intervenir

Dix jours après le coup d’Etat, le Niger est en pleine incertitude. Il y a quelques heures, la junte a dénoncé ses accords de défense avec Paris. Alors qu’il y encore deux semaines le pays était jugé comme un partenaire fiable, c’est désormais la capacité du pays à tenir son rôle dans la lutte contre les groupes armés régionaux qui est en question. Or, tout défaut du Niger en ce sens aurait de graves conséquences du lac Tchad au Golfe de Guinée. L’analyse de Pierre d’Herbès, expert en intelligence économique.


Depuis jeudi, les événements se précipitent à Niamey. Le président Mohammed Bazoum, toujours détenu par les putschistes, a officiellement appelé « la communauté internationale à aider à restaurer l’ordre constitutionnel ». Mais dans la foulée, la junte nigérienne, le CNSP, dénonçait le partenariat militaire opérationnel qui l’unit à la France et se rapprochait du pouvoir kaki de Bamako et de Ouagadougou.

La tension est maximale alors que l’ultimatum fixé par la Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) à la junte arrive à expiration dimanche. Les membres de l’institution panafricaine, et en particulier le Nigeria, ont même explicitement menacé le pays d’une intervention militaire. Selon plusieurs sources, les états-majors des pays membres prépareraient en ce moment même l’opération. Est-ce le « coup d’État de trop » pour la CEDEAO ? L’organisation réagit, en effet, avec une virulence inédite car pour les pays de la région, l’inflation de coups d’État représente un danger important pour leur stabilité. Car tous ont pu mesurer l’échec militaire et politique des juntes maliennes et burkinabés dont les pays ont vu leur situation sécuritaire se dégrader. L’arrivée de militaires au pouvoir n’a en rien amélioré la lutte contre les groupes armés, bien au contraire. Et si le Niger venait à prendre le même chemin, les conséquences seraient dévastatrices pour toute la région.

Niger : dernier domino avant l’effondrement régional ?

Avant le coup d’État, le Niger était déjà en lutte contre des groupes armés dans trois zones, immenses, difficilement maitrisables et éloignées les unes des autres :  dans la région des trois-frontières (Mali, Niger, Burkina-Faso), dans la région du lac Tchad aux côtés du Nigeria et du Tchad contre Boko Haram, et à la frontière avec le Bénin pour lutter notamment contre le groupe jihadiste de la Katiba Macina.

A lire aussi: Niger, Maroc, Algérie: la France en difficulté

Bénin, Nigéria et Tchad sont d’ailleurs parmi les premiers pays à avoir réagi au coup d’État. Et pour cause : un Niger affaibli serait synonyme d’une pression sécuritaire accrue sur leurs propres territoires. Le risque est encore plus notable au Tchad. L’armée du pays y est performante et réputée sur tout le continent. Mais elle est déjà en forte tension opérationnelle. Elle fait face à un faisceau de menaces depuis la Lybie, la Centrafrique et le lac Tchad. Une aggravation directe de la menace depuis le Niger la ferait approcher d’un point de rupture, sans compter que la guerre civile au Soudan ravive les risques depuis la région du Darfour. Le tout est combiné à une situation politique intérieure tendue. La chute du Niger pourrait donc bien entraîner celle du Tchad, malgré la proximité du pays avec la France. Le Sahel serait alors hors de contrôle avec des conséquences directes sur l’Europe. L’effet domino, tant redouté, n’est peut-être pas encore terminé…

Risques sécuritaires

Quels sont les risques immédiats ? Ces six derniers mois, contrairement au discours tenu par les putschistes, la situation sécuritaire s’était améliorée. Les données récoltées par les analystes spécialisés sont formelles : l’influence des groupes armés et la violence subséquente reculaient. Un résultat obtenu grâce à l’augmentation de la cadence opérationnelle des forces nigériennes, appuyées par l’armée française et dans une moindre mesure italienne.

Une réalité qui fait certainement grincer des dents les organisateurs du coup d’État, mais loin de « rétablir l’ordre », l’arrivée au pouvoir des militaires risque surtout d’être le rétablissement du chaos : l’armée française, avec ses 1500 hommes, ses blindés et ses aéronefs, déployait au Niger un partenariat opérationnel efficace et, on peut le dire, indispensable aux troupes nigériennes. Formation des hommes, soutien logistique et accompagnement au combat avaient permis au pays de résister tant bien que mal dans la tempête sécuritaire du Sahel.

Une réussite partielle et progressive rendue aussi possible par le soutien des forces françaises aux populations locales dans les zones exposées aux groupes armées : assistance médicale, construction d’infrastructures de première nécessité (puits, groupes électrogènes) soutien à l’éducation (réfection de salles, fournitures scolaires)… Un levier indispensable pour « conquérir les âmes et les cœurs », dont il y a fort à parier que le Niger ne saura – et ne voudra – plus assurer si les militaires restent au pouvoir.

Autant dire qu’un boulevard s’ouvre donc aux jihadistes et aux groupes armés dans la région.

La junte en question

Car le Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie (CNSP) est-il en mesure de maintenir le Niger à flot ? Plusieurs éléments permettent d’avancer que non. Ce deuxième putsch militaire, après celui avorté de 2021, montre une chaîne de commandement encore très politisée, voire corrompue. En d’autres termes, il faut certainement s’attendre à d’autres putschs dans le pays, avec pour corollaire la dégradation de l’organisation de l’armée nigérienne pourtant jusqu’ici efficace comparée à celles du Mali ou du Burkina-Faso.

Au même moment, les groupes armés tentent d’exacerber les affrontements inter-communautaires : selon une étude de l’International Crisis Group, l’État Islamique dans le Grand Sahara attise depuis plusieurs années les tensions entre cultivateurs zarma et pasteurs peuls. Un antagonisme classique dans la région et historiquement structurel sur lequel les groupes armés font leur terreau. Seulement, le Niger faisait jusqu’ici exception via une politique d’intégration de ses populations nomades.

L’élection de Mohammed Bazoum, membre d’une ethnie arabe ultra-minoritaire, les Ouled Slimane, était un symbole de cette réconciliation. Le président poursuivait cette politique en refusant d’encourager les milices d’autodéfense et en travaillant explicitement au dialogue intercommunautaire ; un scénario impensable au Mali et au Burkina où l’augmentation du racisme anti-peul et touareg est en augmentation et alimente sans fin le conflit.

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La politique du gouvernement a-t-elle aussi contribué à motiver ce putsch ? On observe en effet que l’armée est composée en grande partie d’Haoussa, l’ethnie majoritaire du pays. Rien ne permet de l’affirmer à ce stade. Il n’en demeure pas moins que l’éviction du président est assez symbolique, surtout si on la relie à la traque dont est aujourd’hui l’objet le général touareg, Abou Tarka, actuellement président de la Haute Autorité à la Consolidation de la Paix (HACP) nigérienne. Ce dernier avait vertement critiqué, en avril 2023, les juntes maliennes et burkinabés du fait de la dégradation sécuritaire de leurs pays respectifs.

Que fait la France ?

Alors que les événements se précipitent, Paris semble temporiser. Le gouvernement ne reconnait pas la junte et le lui a fait savoir lorsque celle-ci a annoncé rompre les accords militaires entre les deux pays. Récemment, l’ambassadeur du Niger en France a, lui aussi, refusé son limogeage par le CNPS. Après l’appel du Président Bazoum, jeudi, et la levée de bouclier de la CEDEAO, la France dispose de toute la légitimité pour intervenir. La situation est urgente, car dans son appel de jeudi, c’est « aux États-Unis et la communauté internationale » et non à la France que le président s’adresse. Un signal faible de son exaspération face à l’attentisme de Paris?

En tout état de cause, la France a intérêt à agir vite avant que ses compétiteurs stratégiques, russes ou américains, ne le fassent à sa place. Symboliquement, la France a connu trop de défaites et d’impondérables ces dernières années pour se permettre de rester spectatrice. Mais le gouvernement semble tétanisé face aux accusations de colonialisme que pourrait générer une intervention directe. Le sentiment anti-français est une réalité, mais il est avant tout urbain et générationnel : il n’est pas représentatif de toute la population. En parallèle, la France montrerait à la junte malienne et à l’Algérie qu’elle n’a que faire de leurs menaces, guère persuasives, en cas d’action directe contre la junte. In fine, compte tenu de la configuration, une intervention militaire de la France, aux côtés de la CEDEAO, s’impose, car autrement, quel que soit le scénario, elle sera perdante. 

Le nouveau narratif médiatique est que le Niger est désormais un épicentre mondial du terrorisme

Source : The Saker francophone - par Andrew Korybko - Le 02/08/2023.

 


Peu de gens dans le monde ont entendu parler du Niger avant le coup d’État militaire de la semaine dernière dans ce pays enclavé d’Afrique de l’Ouest, et encore moins auraient pu le situer sur une carte. Pourtant, les médias dominants (MSM) veulent maintenant faire croire à tout le monde que le Niger est soudainement devenu un épicentre mondial du terrorisme. Ce récit n’est rien d’autre qu’une guerre de l’information visant à effrayer le public pour qu’il soutienne l’invasion de ce pays par la CEDEAO, soutenue par l’OTAN et dirigée par le Nigeria, qui devrait débuter dans le courant du mois.

Les analyses suivantes mettront à jour les lecteurs qui n’ont pas suivi cette crise de près :

 

Il s’agit en fait du dernier conflit par procuration dans la nouvelle guerre froide entre l’OTAN et la Russie.

Le public occidental ne comprend pas les raisons géostratégiques pour lesquelles le bloc militaire de son camp s’ingère dans cette partie de l’Afrique et pousse le pays le plus peuplé du continent à envahir son voisin du nord. C’est pourquoi les MSM racontent que le Niger s’est soudainement transformé en un épicentre mondial du terrorisme, car ils espèrent que leur public cible sera tellement effrayé qu’il soutiendra aveuglément la ligne de conduite que leurs gouvernements décideront finalement d’adopter pour résoudre ce problème.

Voici trois exemples très médiatisés où les MSM diffusent ce récit de propagande nouvellement inventé :

Ils affirment tous qu’une armée distraite et une dissidence populaire conduiront à une recrudescence du terrorisme.

Pour développer brièvement, la première moitié de ce produit de guerre de l’information fabriqué artificiellement allègue que les forces armées des États régionaux après le coup d’État sont trop concentrées sur la conservation du pouvoir et l’élimination des rivaux qu’elles créent par inadvertance un espace pour l’expansion des terroristes. Quant à la seconde, elle implique incroyablement que des manifestants pro-démocratie supposés pacifiques seront bientôt tellement radicalisés par le régime militaire qu’ils se transformeront en une masse extrémiste violente qui constituera ainsi une menace imminente pour le monde entier.

Ironiquement, bien qu’il dirige Voice of America, le gouvernement américain ne croit même pas à la propagande de ce média ni aux affirmations connexes véhiculées par ses pairs, comme le prouve la décision prise mardi de suspendre les formations antiterroristes avec le Niger. S’il y avait la moindre chance que l’un ou l’autre des facteurs susmentionnés risque de transformer le Niger en un épicentre mondial du terrorisme, alors il serait hors de question que les États-Unis risquent leur propre sécurité et celle de leurs vassaux régionaux en laissant cette menace s’envenimer.

En conséquence, soit le gouvernement américain a accidentellement signalé que toutes ces déclarations alarmistes sont de la propagande sans fondement, soit il montre au monde qu’il préfère cyniquement que le Niger devienne/demeure un épicentre mondial du terrorisme plutôt que de lutter conjointement contre ce fléau avec ses forces armées après le coup d’État. Comme il n’y a pas de vérité dans le second scénario brandi par les MSM, la première explication est la seule crédible, ce qui confirme que de telles affirmations ne sont que des mensonges destinés à dissimuler des motifs géopolitiques.

Pour être honnête, il y a une part de vérité dans leur allégation selon laquelle la combinaison des échecs militaires et de la pauvreté systémique joue un rôle dans l’accélération de la propagation du terrorisme dans les pays en développement, mais cela est imputable à une formation occidentale médiocre/insincère et au néocolonialisme français, respectivement. C’est précisément en raison de ces facteurs interconnectés et des conséquences régionales de la guerre de l’OTAN contre la Libye en 2011 que le terrorisme a explosé dans le Sahel et a ensuite préparé le terrain pour les récents coups d’État militaires patriotiques.

Ces changements de régime visent à réorienter les priorités de leurs forces armées et à rééquilibrer les liens de leurs pays avec l’Occident et la France afin de résoudre les problèmes correspondants qui ont entraîné une détérioration aussi radicale de leur sécurité et de leur situation économique au cours de la dernière décennie. Si aucun effort sérieux n’avait été fait pour contrecarrer ces tendances au Mali, au Burkina Faso et maintenant au Niger, l’existence même de ces États aurait été inévitablement menacée avec le temps.

Leurs dirigeants militaires sont sincères dans leur objectif déclaré de lutte contre le terrorisme, non seulement parce que cela correspond à leur dévouement patriotique aux intérêts nationaux de leurs pays, mais aussi parce que c’est dans l’intérêt de leur institution, puisque ce sont eux qui se battent en première ligne contre ce fléau. Sans améliorer leurs capacités associées, ce à quoi Wagner les aide comme expliqué ici et ici, leurs camarades continueront à mourir en vain et la menace qui pèse sur leurs familles ne cessera de croître.

En conclusion, prétendre que le Niger est désormais un épicentre mondial du terrorisme est une véritable infox, mais on attend des MSM qu’ils amplifient au maximum ce faux récit pour tenter d’effrayer le public et l’amener à soutenir l’invasion prévue de ce pays par la CEDEAO, soutenue par l’OTAN et dirigée par le Nigéria. Cette approche risque toutefois de se discréditer si elle déclenche de mauvais souvenirs de la soi-disant “guerre mondiale contre le terrorisme” en rappelant au public à quel point il est devenu sceptique à cet égard à la fin de l’époque Bush Jr.

Andrew Korybko

Traduit par Wayan, relu par Hervé, pour le Saker Francophone. 

Victoria Nuland a révélé quelques détails intéressants sur ses discussions au Niger

par Andrew Korybko - Le 09/08/2023.

Les principales conclusions sont les suivantes : les États-Unis font un effort public d’une sincérité douteuse pour montrer au monde qu’ils ne veulent pas d’une guerre régionale ; la rencontre de Nuland avec la société civile nigérienne signifie qu’une révolution de couleur ne peut être exclue ; le gouvernement intérimaire dirigé par les militaires ne recule pas malgré le fait que son nouveau chef de la défense soit un partenaire étroit du Pentagone depuis des années ; et ses relations envisagées avec la Russie et Wagner après le coup d’État restent floues.

La vice-secrétaire d’État par intérim, Victoria Nuland, actrice du tristement célèbre «EuroMaïdan», s’est rendue au Niger pour s’entretenir avec le gouvernement intérimaire dirigé par l’armée, après l’expiration du délai d’une semaine accordé par la CEDEAO pour réinstaller le président évincé Mohamed Bazoum. Une guerre régionale menace l’Afrique de l’Ouest si ce bloc soutenu par l’OTAN envahit le pays comme il a menacé de le faire précédemment et/ou si l’ancien colonisateur français agit unilatéralement, c’est pourquoi il est important d’analyser ce qu’elle a révélé sur son voyage.

Son briefing spécial à la presse a commencé par des platitudes sur le rétablissement de l’ordre constitutionnel au Niger à la suite du coup d’État militaire patriotique du mois dernier, puis a fait référence à l’aide que les États-Unis seraient légalement obligés d’interrompre si cela ne se produisait pas. Nuland a ensuite indiqué qu’elle avait également rencontré «un large échantillon de la société civile nigérienne. Ce sont des amis de longue date des États-Unis. Il y a des journalistes. Il y a des activistes démocratiques. Il y a des militants des droits de l’homme».

Compte tenu de son rôle dans la révolution de couleur en Ukraine, qui a finalement conduit à la guerre par procuration entre l’OTAN et la Russie dans ce pays, il est raisonnable de penser qu’elle pourrait avoir signalé à ces forces de la société civile que les États-Unis les soutiennent dans le lancement de protestations émeutières à grande échelle contre les autorités militaires. Ce scénario pourrait se dérouler soit avant une invasion du Niger par la CEDEAO, soutenue par l’OTAN et éventuellement par la France, comme prétexte pour justifier publiquement ce qui précède, soit au cours d’une telle invasion.

Néanmoins, cela ne semble pas avoir été la raison principale de son voyage puisque de tels signaux pourraient être envoyés à ces forces à distance de manière plus pratique et plus sûre sans qu’un haut responsable diplomatique américain n’ait à le faire directement en personne, mais cela ne peut tout de même pas être exclu. Nuland a ensuite révélé que ses discussions «avec le chef autoproclamé de la défense de cette opération, le général Barmou, et trois des colonels qui le soutiennent […] ont été extrêmement franches et parfois très difficiles».

Elle a expliqué que c’était parce que «nous poussions à une solution négociée», ce qui pourrait soit être un effort insincère destiné à faire baisser la garde de l’armée nigérienne avant les scénarios de déstabilisation potentiellement imminents qui viennent d’être décrits, soit être en fait la voie préférée des États-Unis. La première possibilité est plausible en raison du précédent ukrainien, tandis que la seconde pourrait être due à la crainte qu’une guerre régionale plus large ne dérape et ne crée finalement un espace permettant à la Russie d’étendre son influence.

La partie suivante de son exposé était très intéressante. Elle a indiqué qu’elle n’avait pas été autorisée à voir Bazoum, bien qu’elle lui ait parlé au téléphone, ni à rencontrer le président intérimaire, le général Abdourahamane Tchiani. Le fait de la tenir à l’écart de Bazoum pourrait avoir pour but de maintenir une certaine ambiguïté quant à son statut afin de décourager les scénarios de déstabilisation susmentionnés tout en réaffirmant la légitimité du président Tchiani, alors que le refus de ce dernier de rencontrer Nuland était une rebuffade délibérée.

Elle a ensuite déclaré : «J’espère qu’ils garderont la porte ouverte à la diplomatie. Nous avons fait cette proposition. Nous verrons bien. Comme je l’ai dit, ils ont leurs propres idées sur la façon de procéder. Leurs idées ne sont pas conformes à la constitution, et ce sera difficile pour nos relations si c’est la voie qu’ils prennent. Mais nous leur avons donné un certain nombre d’options pour continuer à discuter et nous espérons qu’ils en tiendront compte». En d’autres termes, le gouvernement intérimaire dirigé par les militaires ne recule pas, même si cela met en péril les liens avec les États-Unis.

Un autre détail intriguant a été révélé lors de son briefing : «Le général Barmou, l’ancien colonel Barmou, est quelqu’un qui a travaillé en étroite collaboration avec les forces spéciales américaines pendant de très nombreuses années. Nous avons donc pu examiner de manière très détaillée les risques liés à certains aspects de notre coopération qui lui tiennent particulièrement à cœur». Il est remarquable qu’un proche allié militaire des États-Unis ait fini par participer au renversement de son dirigeant soutenu par les États-Unis, qu’il soit devenu le nouveau chef de la défense et qu’il n’ait pas fait marche arrière.

Cela montre que même les hauts responsables militaires étrangers qui coopèrent étroitement avec certaines des forces les mieux entraînées des États-Unis «pendant de très nombreuses années» ne deviennent pas toujours leurs marionnettes, ce qui laisse supposer que d’autres responsables occupant une position similaire ailleurs en Afrique pourraient suivre les traces du général Barmou. Il n’est donc plus possible de tenir pour acquis que les programmes militaires américains à l’étranger permettent de cultiver avec succès des proxys d’élite. Ils se retournent parfois contre eux, comme le prouve ce cas particulier.

Vers la fin de son briefing, Nuland a répondu à deux questions sur Wagner et la Russie de la manière suivante :

«Bien sûr, j’ai parlé de Wagner et de la menace qu’il représente pour les pays où il est présent, en leur rappelant que la sécurité se dégrade, que les droits de l’homme se détériorent lorsque Wagner entre. Je ne dirais pas que nous en avons appris beaucoup plus sur leur façon de penser à ce sujet. […]

En ce qui concerne Wagner, vous aurez vu Prigozhin se vanter à Saint-Pétersbourg. Je dirai que j’ai eu l’impression, lors de mes rencontres d’aujourd’hui, que les personnes qui ont entrepris cette action ici comprennent très bien les risques pour leur souveraineté lorsque Wagner est invité».

Ces déclarations étant manifestement contradictoires, soit elle s’est embrouillée, soit elle a menti dans l’une de ses réponses.

Quels que soient les signaux que le gouvernement intérimaire dirigé par les militaires aurait pu envoyer à Nuland concernant les spéculations sur le fait qu’il pourrait demander les services de «sécurité démocratique» de Wagner, ils auraient probablement été destinés à des fins de dissuasion. Le fait d’envisager ce scénario pourrait laisser entendre que les États-Unis risquent de perdre encore plus de leur influence s’ils n’empêchent pas une guerre régionale d’éclater, tandis que le fait de le minimiser pourrait avoir pour but de convaincre les États-Unis qu’ils ne doivent pas réagir de manière excessive aux conséquences du coup d’État.

Dans l’ensemble, les principaux enseignements du voyage de Nuland sont les suivants : les États-Unis font un effort public d’une sincérité douteuse pour montrer au monde qu’ils ne veulent pas d’une guerre régionale ; sa rencontre avec la société civile nigérienne signifie qu’une révolution de couleur ne peut être exclue ; le gouvernement intérimaire dirigé par les militaires ne recule pas malgré le fait que son nouveau chef de la défense soit un partenaire étroit du Pentagone depuis des années ; et les relations envisagées avec la Russie et Wagner après le coup d’État ne sont pas encore claires.

Andrew Korybko

source : Andrew Korybko

traduction Réseau International

Moscou : «Nuland pensait qu’on pouvait arnaquer le Niger comme l’Ukraine»

par Sputnik Afrique - Le 09/08/2023.

Selon la diplomatie russe, Washington tente de mener au Niger la même politique qu’en Ukraine, avec le coup d’État de 2014, mais sans succès. Une référence faite par la porte-parole de la diplomatie russe alors que la visite de la sous-secrétaire d’État américaine à Niamey n’a visiblement pas apporté les résultats escomptés.

La porte-parole de la diplomatie russe Maria Zakharova a tourné en dérision la visite au Niger de la sous-secrétaire d’État américaine aux Affaires étrangères Victoria Nuland. Alors qu’elle appelait au «rétablissement de l’ordre constitutionnel» dans ce pays africain, où le président a été renversé, elle n’a pas réussi à le rencontrer en personne.

«Est-ce que Victoria Nuland pensait qu’on pouvait agir avec le Niger de la même manière qu’avec l’Ukraine : mettre dans un sac plastique des gâteaux et l’arnaquer ? Une telle république bananière comme à Kiev n’existe plus», a ironisé la porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères.

Lors des événements de l’Euromaïdan (coup d’État de 2014), Victoria Nuland et l’ambassadeur des États-Unis en Ukraine Geoffrey R. Pyatt avaient distribué des sandwichs, des brioches et des tartes.

Nuland au Niger

Un coup d’État a eu lieu il y a presque deux semaines au Niger et le président déchu Mohamed Bazoum reste détenu par les militaires qui ont pris le pouvoir. Ce mardi, la CEDEAO prévoit des négociations avec eux à Niamey.

Alors que plusieurs pays africains, comme le Mali et le Burkina Faso, ont exprimé leur soutien aux événements au Niger, nombre de dirigeants occidentaux les dénoncent et appellent au rétablissement du Président renversé.

Si Victoria Nuland aspirait à rencontrer Mohamed Bazoum à Niamey, elle n’a réussi à communiquer avec lui que par téléphone. Elle n’a pas non plus été autorisée à rencontrer le général Abdourahmane Tiani qui s’est proclamé nouvel homme fort du pays suite au coup d’État.

La responsable américaine a toutefois eu une réunion avec le chef d’état-major nommé Moussa Salaou Barmou, ainsi qu’avec trois de ses plus proches collaborateurs.

source : Sputnik Afrique

Le «Cœur des Ténèbres» est en visite en Afrique

par Will Schryver - Le 09/08/2023.

Ainsi donc … l’inimitable Victoria «la Hutt» s’est rendue au Niger.

N’oubliez pas qu’un nombre encore inconnu de forces PMC Wagner sont déjà sur place et qu’elles «conseillent» au moins les dirigeants du coup d’État militaire.

La Russie est incontestablement très impliquée dans ce qui se passe actuellement dans l’ouest du Sahel.

De manière significative – et sans doute à sa grande indignation et humiliation – Nuland s’est vu refuser une audience avec le chef de la junte, le général Abd al-Rahman Tianyi.

Néanmoins, Nuland a solennellement exhorté les Nigériens à ne pas s’allier avec les Russes.

Il semble d’ailleurs que ce soit là son principal message.

Les Nigériens ont pris acte de ses menaces transparentes, puis lui ont montré la porte sans ménagement.

Il y a encore 72 heures, peu de gens pensaient que ces développements en Afrique étaient très significatifs dans un contexte géopolitique plus large. Je pense, comme je l’ai fait il y a trois jours, que cela pourrait très bien devenir très significatif. En fait, tout porte à croire que c’est déjà le cas.

On a dit que Poutine, plutôt que de répondre directement à une provocation de l’Occident, est souvent enclin à pratiquer l’escalade de manière indirecte, en parallèle.

Ces développements en Afrique me semblent constituer une escalade parallèle de ce que j’affirme depuis longtemps être les premiers stades d’une Troisième Guerre mondiale qui a déjà commencé.

 

 

 

source : Will Schryver

envoyé par Mendelssohn Moses

Le patron de Wagner exprime sa «joie» à propos de Victoria Nuland

par Russia Today - Le 09/08/2023.

Selon Evgueni Prigojine, la simple mention de la SMP Wagner a incité les États-Unis à envisager de reconnaître le nouveau gouvernement du Niger.

Evgeny Prigojine, chef de Wagner, se dit fier des membres de sa société militaire privée, car la simple mention de leur nom peut contraindre Washington à revoir ses positions. La vice-secrétaire d’État américaine par intérim, Victoria Nuland, a récemment exhorté le nouveau gouvernement militaire du Niger à ne pas faire appel à l’aide des contractants russes.

Lors d’un entretien téléphonique avec des journalistes mardi, Prigojine a été invité à commenter la visite personnelle de Nuland au Niger et son conseil au nouveau gouvernement de ne pas conclure d’accords avec Wagner.

«Je suis fier des garçons de Wagner», a répondu Prigojine. «Rien que de penser à eux, ISIS et Al-Qaïda deviennent de petits garçons obéissants et soyeux. Et les États-Unis ont reconnu un gouvernement qu’ils ne reconnaissaient pas hier, juste pour éviter de rencontrer Wagner dans le pays».

«Cela nous met en joie, Mme Nuland», a-t-il plaisanté.

L’un des membres du nouveau gouvernement militaire du Niger, le général Salifou Moody, aurait demandé l’aide de Wagner pour sauvegarder son pouvoir. Les putschistes sont actuellement confrontés à une échéance proche, à savoir le retour au pouvoir du président évincé Mohamed Bazoum ou une éventuelle intervention militaire des États voisins.

Lundi, Mme Nuland, qui a joué un rôle dans les événements qui ont conduit au coup d’État soutenu par l’Occident en Ukraine en 2014, a révélé qu’elle avait personnellement rencontré l’actuel chef de la défense du Niger, Moussa Barmou, et trois autres commandants de haut rang pour les exhorter à rétablir l’ordre constitutionnel dans le pays.

La responsable américaine affirme également avoir mis en garde Barmou contre l’aide de la SMP russe, suggérant que le groupe de Prigojine est une «menace pour les pays où il est présent».

Toutefois, les nouveaux dirigeants du Niger se sont apparemment abstenus de prendre des engagements fermes sur cette question.

Moscou, quant à elle, s’oppose à toute ingérence étrangère dans la situation au Niger, arguant qu’elle ne changerait probablement pas la situation pour le mieux. Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a exprimé l’espoir que ce pays turbulent revienne bientôt à la «normalité constitutionnelle».

source : Russia Today

traduction Réseau International

Paris désormais en retrait sur la crise au Niger

par Sputnik Afrique - Le 09/08/2023.

Paris semble rétropédaler sur le dossier nigérien, optant désormais pour des moyens diplomatiques dans la résolution de la crise au lieu d’une intervention militaire, selon une source diplomatique française citée par l’AFP.

La France s’était montrée «intransigeante» face aux militaires qui ont pris le pouvoir au Niger, elle apparaît désormais «en retrait» au moment où le spectre d’une intervention militaire des pays d’Afrique de l’Ouest semble s’éloigner, soulignent des experts.

«Nous soutenons pleinement (…) les efforts des pays de la région pour restaurer la démocratie au Niger», a déclaré mardi à l’AFP une source diplomatique française, près de deux jours après l’expiration de l’ultimatum lancé par la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).

Les dirigeants ouest-africains avaient donné jusqu’à dimanche soir aux militaires nigériens pour rétablir le président élu Mohamed Bazoum, retenu prisonnier depuis le 26 juillet.

Les chefs d’état-major de la région avaient même dessiné les «contours» d’une éventuelle intervention armée. Paris avait appuyé «avec fermeté et détermination» les efforts de la CEDEAO pour faire pression sur Niamey.

Mais l’intervention n’a pas eu lieu et n’est pas envisagée à ce stade, selon une source proche de la CEDEAO. Un sommet se tiendra jeudi au Nigeria.

«C’est à la CEDEAO de prendre une décision sur la manière de restaurer l’ordre constitutionnel au Niger, quelle qu’elle soit», a souligné la source diplomatique. Le sommet «permettra d’aborder ce sujet».

Pour Bertrand Badie, professeur à Sciences-Po Paris, «cette déclaration est très pesée et très prudente (…) en retrait par rapport à ce qui était annoncé au départ».

«Il n’est plus question d’intervention militaire, il n’est plus question de dénier toute base réelle à ce gouvernement, il est question de diplomatie», dit-il.

source : Sputnik Afrique

Du Maghreb à l’Afrique de l’Ouest, des voix s’élèvent pour s’opposer à une opération militaire de la CEDEAO

par Infos d’Alahed - Le 09/08/2023.

Alors que prenait fin, dimanche 6 août, l’ultimatum lancé par la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), la junte au pouvoir au Niger ne montrait aucun signe de reddition. L’organisation régionale avait donné une semaine aux putschistes menés par le général Abdourahamane Tchiani pour rétablir dans ses fonctions le président nigérien Mohamed Bazoum, séquestré dans sa résidence présidentielle à Niamey depuis le coup de force du 26 juillet. Ce délai passé, «toutes les mesures nécessaires» seront prises et pourront «inclure l’usage de la force», a prévenu la CEDEAO. Mais du Maghreb à l’Afrique de l’Ouest, des voix s’élèvent pour demander un prolongement de la durée des négociations.

L’ancienne ministre nigérienne des Affaires étrangères, Aïchatou Mindaoudou, a mis en garde samedi 5 juillet, dans une série de messages publiés sur X (ex-Twitter), contre une opération «qui aura des conséquences néfastes, inestimables et durables aussi bien au Niger que dans toute la sous-région». L’Algérie, qui n’est pas membre de la CEDEAO mais partage près de 1000 kilomètres de frontière avec le Niger, a également fait part de son hostilité à l’égard d’une opération qui représenterait, selon le président Abdelmadjid Tebboune, «une menace directe» pour son pays.

Face au «camp» de la CEDEAO, les militaires du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP), qui ont promis une «riposte immédiate» à «toute agression», peuvent en effet compter sur la solidarité affichée du Burkina Faso et du Mali. Les deux pays, dirigés par des putschistes, ont fait savoir qu’ils considéreraient toute intervention armée chez leur voisin comme une «déclaration de guerre» à leur encontre.

Face à cette alliance des juntes, la CEDEAO se prépare, tout en assurant que l’option militaire n’interviendra qu’en dernier recours. Pendant trois jours, les chefs d’état-major de l’organisation ont échangé à Abuja. «Tous les éléments d’une éventuelle intervention ont été élaborés lors de cette réunion, y compris les ressources nécessaires, mais aussi la manière et le moment où nous allons déployer la force», a souligné samedi le commissaire chargé des affaires politiques et de la sécurité, Abdel-Fatau Musah. «La CEDEAO ne va pas dire aux putschistes quand et où nous allons frapper», a-t-il ajouté, évoquant une «décision opérationnelle qui sera prise par les chefs d’État» du bloc.

Voix dissonantes

Mais il n’est pas dit que ces derniers aient les coudées franches. Samedi, les sénateurs nigérians, tout en condamnant le coup d’État, ont ouvertement fait part de leur inquiétude. Sept États fédérés bordent la frontière sud du Niger sur 1500 kilomètres et l’armée nigériane serait en première ligne en cas d’intervention. «Le Sénat appelle Bola Tinubu [le président du pays, également à la tête de l’organisation régionale] à encourager davantage les autres dirigeants de la CEDEAO à renforcer les options politiques et diplomatiques et autres moyens pour sortir de l’impasse politique», a déclaré Godswill Akpabio, le président de la chambre haute.

Même au Sénégal, où les autorités ont dénoncé «le coup de trop» et annoncé clairement leur intention de participer à une éventuelle offensive militaire au Niger, des voix dissonantes ont commencé à se faire entendre dans la classe politique. L’ancien ministre et député d’opposition Thierno Alassane Sall a alerté samedi contre le risque de provoquer «une guerre parmi les plus meurtrières de la sous-région» et appelé la majorité présidentielle à ne pas engager le pays sans l’adhésion de l’Assemblée nationale.

En Côte d’Ivoire, le sujet est peu débattu. Le pays est en deuil depuis la mort de l’ancien président Henri Konan Bédié le 1er août. Lors de son discours à la nation, prononcé à la veille de la célébration des 63 ans de l’indépendance du pays, le président ivoirien Alassane Ouattara s’est contenté de condamner une «tentative de coup d’État au Niger qui constitue une grave menace pour la paix et la sécurité dans la sous-région».

Plusieurs options

«Bien évidemment, a-t-il ajouté, nous soutenons les initiatives de la CEDEAO visant à rétablir l’ordre constitutionnel dans ce pays frère et à permettre au président Mohamed Bazoum, président démocratiquement élu, d’exercer librement ses fonctions». Selon la Constitution ivoirienne, le Parlement doit être consulté avant une déclaration de guerre. «Mais si un vote devait avoir lieu, cela passerait sans souci», prédit le politologue ivoirien Arthur Banga, spécialisé dans les questions de défense et sécurité.

Le cadre légal d’une éventuelle intervention des armées ouest-africaines au Niger n’est toutefois pas encore clairement défini. «Le Conseil de sécurité des Nations unies garde la «responsabilité principale» pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales», rappelle Julien Antouly, chercheur en droit des conflits armés. Dans le cas du Niger, il est hautement improbable que l’instance se prononce en faveur d’une opération militaire.

«La seconde option, poursuit le juriste, serait celle d’une opération sous mandat de la CEDEAO». L’organisation régionale dispose de protocoles qui encadrent ce type de missions en cas de changement inconstitutionnel dans un État membre. Pourrait-elle pour autant se passer de l’avis du Conseil de sécurité ? La question fait débat. «En Sierra Leone, elle a obtenu une autorisation a posteriori des Nations unies, et en Gambie, elle jouissait d’une autorisation implicite puisque le Conseil n’avait pas condamné l’intervention», souligne Julien Antouly.

Dans un tel cadre, des États non-membres de l’organisation comme la France ou les États-Unis ne pourraient pas, juridiquement, se réclamer d’un mandat de la CEDEAO pour agir.

Reste une troisième option : celle d’un chef d’État demandant à des alliés d’intervenir. Dans le cas du Niger, cela reviendrait à considérer que le président Mohamed Bazoum est toujours au pouvoir, alors que celui-ci est retenu en otage, comme plusieurs de ses ministres. En outre, précise Julien Antouly, «les interventions sur demande d’un État sont limitées aux agressions extérieures ou à des impératifs comme la lutte contre la criminalité ou le terrorisme. Cela ne peut servir à régler des controverses politiques internes».

source : Infos d’Alahed

Le CNSP refuse de recevoir la mission de médiation de la CEDEAO et de l’UA

par Marturin Atcha - Le 09/08/2023.

Les émissaires de la CEDEAO, de l’Union africaine et des Nations unies doivent encore patienter avant de fouler le sol nigérien.

La mission tripartite de la CEDEAO, de l’Union africaine et des Nations unies, attendue ce mardi à Niamey pour tenter une médiation n’a finalement pas pu effectuer le déplacement. Et pour cause, les militaires ont notifié, à travers une note à la CEDEAO, leur incapacité à recevoir la mission ce mardi.

«Le contexte actuel de colère et de révolte des populations suite aux sanctions imposées par la CEDEAO, [lequel] ne permet pas d’accueillir ladite délégation dans la sérénité», s’est justifiée la junte, tout en évoquant «la nécessité de convenir au préalable […] des dates, contours et programme desdites visites». 

Rappelant que les frontières sont toujours fermées en raison des sanctions de la CEDEAO, la junte réitère sa «disponibilité à engager des discussions avec les délégations ou émissaires concernant la situation au Niger». Conduite par l’ancien président du Nigeria Abdulsalami Abubakar, cette délégation sera composée du Ghanéen Mohamed Ibn Chambas, haut représentant de l’Union africaine (UA) et du Mozambicain Leonardo Santos Simão, représentant spécial de l’ONU pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel.

Lire la note du CNSP à Abuja

source : Actu Cameroun

La CEDEAO comme arme néocoloniale françafricaine

par Alexander Rubinstein et Kit Klarenberg - Le 09/08/2023.
…La CEDEAO comme arme néocoloniale

Alors que la CEDEAO a été officiellement fondée par le Traité de Lagos en 1975, son histoire officielle indique que les origines du bloc remontent à la création du franc CFA en 1945, qui a consolidé l’empire français d’Afrique de l’Ouest en une union monétaire unique. Publiquement, le mouvement a été décrit comme une tentative bienveillante de protéger ces colonies des conséquences de la forte dévaluation du franc français en 1945, suite à la création du système de Bretton Woods dominé par les États-Unis. Comme le ministre français des Finances l’a déclaré à l’époque :

«En signe de générosité et d’altruisme, la métropole, souhaitant ne pas imposer à ses filles lointaines les conséquences de sa propre pauvreté, fixe des taux de change différents pour leur monnaie».

En réalité, l’introduction du franc CFA a permis à Paris de maintenir des relations commerciales très inégales avec ses colonies africaines, à une époque où son économie a été ravagée par la Seconde Guerre mondiale et où son empire d’outre-mer s’est rapidement désintégré. La monnaie a rendu bon marché pour les États membres d’importer de France et vice versa, mais prohibitivement cher pour eux d’exporter n’importe quoi ailleurs.

Cette dépendance forcée en Afrique de l’Ouest francophone a créé un marché captif pour les Français, et par extension le reste de l’Europe. Cette dynamique, qui freine le développement économique régional depuis des décennies, persiste encore aujourd’hui. La domination continue du franc CFA garantit que les États d’Afrique de l’Ouest restent sous le contrôle économique et politique de la France. Ces pays africains sont impuissants à adopter des changements de politique significatifs, car ils manquent de contrôle sur leur propre politique monétaire.

Que la monnaie occupe une place si importante dans l’histoire autorisée de la CEDEAO est instructif, car le bloc a longtemps été critiqué comme une extension de l’impérialisme français. Ce n’est pas pour rien qu’en 1960, le président français de l’époque, Charles de Gaulle, a fait de l’adhésion au franc CFA une condition préalable à la décolonisation en Afrique.

Bien que la CEDEAO vise théoriquement à maximiser le pouvoir de négociation collective des États membres en favorisant «la coopération économique et politique interétatique», une telle harmonisation permet aux anciennes puissances impériales comme la France d’exploiter et d’affaiblir leurs pays constitutifs. Le bloc impose un cadre juridique et financier strict et approuvé par l’Occident à ses membres, et tout État qui s’écarte de ces règles est sévèrement puni.

En janvier 2022, la CEDEAO a imposé des sanctions strictes au Mali, incitant des milliers de personnes à descendre dans la rue pour soutenir le gouvernement militaire qui a pris le pouvoir en janvier de l’année précédente. Les efforts du nouveau gouvernement pour purger le pays d’une influence étrangère malveillante ont imposé une interdiction complète des médias français, une décision qui a été critiquée par l’ONU, mais encouragée par le Malien moyen.

La CEDEAO a appliqué des mesures similaires au Burkina Faso en réponse au coup d’État militaire de septembre 2022, qui a vu Paul-Henri Sandaogo Damiba démis de ses fonctions après seulement huit mois au pouvoir. Bien que Damiba lui-même ait été saisi par le coup d’État militaire, il y a eu peu de condamnation de la part des responsables occidentaux et peu de suggestions que la CEDEAO impose des sanctions – peut-être en raison de l’orientation pro-occidentale et du statut en tant que diplômé de plusieurs cours de formation d’élite de l’armée étatsunienne et du département d’État.1

Depuis 1990, la CEDEAO a mené sept conflits distincts en Afrique de l’Ouest, afin de protéger les despotes préférés de l’Occident dans toute la région. Entre 1960 et 2020, Paris a lancé 50 interventions distinctes en Afrique. Les chiffres des activités clandestines menées pendant cette période ne sont pas disponibles, mais les empreintes du pays se retrouvent dans de multiples élections truquées, coups d’État et assassinats qui ont soutenu des gouvernements conformes et corrompus au pouvoir dans tout le continent.

Comme l’a fait remarquer le président Jacques Chirac en 2008, «sans l’Afrique, la France tombera au rang de puissance du tiers monde». Cette perspective a été réaffirmée dans un rapport du Sénat français de 2013, L’Afrique est notre avenir. En effet, la simple existence de gouvernements anti-impérialistes partout dans la région est intolérable pour Paris.

Heureusement pour l’élite française, des personnages compromis comme Bola Tinubu sont toujours sur place pour faire leur sale boulot.

 

 

Jacques Chirac – La France pille l’Afrique

«On oublie seulement une chose. C’est qu’une grande partie de l’argent qui est dans notre porte-monnaie vient précisément de l’exploitation, depuis des siècles, de l’Afrique. Pas uniquement. Mais beaucoup vient de l’exploitation de l’Afrique. Alors, il faut avoir un petit peu de bon sens. Je ne dis pas de générosité».

source : The GrayZone via Le Blog Sam La Touch

De qui se moque la CEDEAO dans ce monde ?

par Franklin Nyamsi - Le 09/08/2023.

«Le CEDEAO se permet de mettre en place une soi-disant délégation pour venir proposer des solutions qui n’en sont pas à un pays qui ne lui a rien demandé si ce n’est de le laisser gérer ses problèmes lui-même».

source : L’Afrique des Libertés

Le Niger rejette l’ordre fondé sur des règles

Source : The Saker francophone.

 


Par M.K. Bhadrakumar – Le 8 août 2023 – Indian Punchline

Le coup d’État du 26 juillet au Niger, pays d’Afrique de l’Ouest, et le sommet Russie-Afrique du lendemain à Saint-Pétersbourg se déroulent dans un contexte de multipolarité de l’ordre mondial. Apparemment indépendants, ces événements reflètent néanmoins l’état d’esprit de notre ère de transformation.

Tout d’abord, la situation dans son ensemble : Le sommet de l’Afrique organisé par la Russie les 27 et 28 juillet représente un défi de taille pour l’Occident, qui a instinctivement cherché à minimiser l’événement après avoir échoué à faire pression contre les nations africaines souveraines qui rencontraient les dirigeants russes. 49 pays africains ont envoyé leurs délégations à Saint-Pétersbourg, et 17 chefs d’État se sont rendus en personne en Russie pour discuter de questions politiques, humanitaires et économiques. Pour le pays hôte, qui est en pleine guerre, il s’agit d’un succès diplomatique remarquable.

 

Le sommet a été un événement essentiellement politique. Son leitmotiv était la juxtaposition du soutien de longue date de la Russie aux Africains qui résistent à l’impérialisme et à la nature prédatrice du néocolonialisme occidental. Cela fonctionne parfaitement pour la Russie d’aujourd’hui, qui n’a pas d’histoire coloniale d’exploitation et de pillage de l’Afrique.

Alors que de temps à autre, des squelettes de l’ère coloniale sortent des placards occidentaux, remontant à la triste traite des esclaves africains, la Russie puise dans l’héritage soviétique d’être du “bon côté de l’histoire“, allant même jusqu’à ressusciter le nom complet de l’Université russe de l’amitié des peuples Patrice Lumumba, à Moscou.

Mais il n’y a pas eu que de la politique. Les délibérations du sommet sur le partenariat Russie-Afrique aidant le continent à atteindre la “souveraineté alimentaire“, les alternatives à l’accord sur les céréales, les nouveaux couloirs logistiques pour les denrées alimentaires et les engrais russes, le renforcement de la coopération commerciale, économique, culturelle, éducative, scientifique et sécuritaire, l’adhésion potentielle de l’Afrique au couloir de transport international Nord-Sud, la participation de la Russie aux projets d’infrastructure africains, le plan d’action du forum de partenariat Russie-Afrique à l’horizon 2026, témoignent des résultats quantifiables.

Le Niger. Les derniers développements au Niger soulignent le leitmotiv du sommet Russie-Afrique. Le pronostic de la Russie sur la crise africaine se confirme – les ravages persistants de l’impérialisme occidental. C’est ce qui ressort des rapports sur les drapeaux russes aperçus lors des manifestations à Niamey, la capitale du Niger.

Les rebelles qui ont pris le pouvoir n’ont pas tardé à dénoncer les accords de coopération militaro-technique du Niger avec la France, ce qui a été suivi d’une demande de retrait des troupes françaises dans les 30 jours. De son côté, la France s’est prononcée “fermement et résolument” en faveur d’une intervention militaire étrangère “pour réprimer la tentative de coup d’État“. Les autorités françaises ont clairement indiqué qu’elles n’envisageaient pas de retirer leur contingent armé de 1 500 personnes qui se trouve au Niger “à la demande des autorités légitimes du pays sur la base d’accords signés“.

La position de la France n’est pas surprenante : Paris ne veut pas perdre sa position dans la région du Sahel et sa source de ressources bon marché, en particulier l’uranium. Mais la France a mal calculé que le coup d’État ne bénéficiait pas du soutien de l’armée nigérienne ni d’une base sociale, et que tout ce qui était nécessaire pour le faire reculer était une démonstration de force limitée qui contraindrait la garde présidentielle d’élite à entamer des négociations directes avec la France.

La France et les États-Unis coordonnent leurs actions avec la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). La CEDEAO a d’abord lancé quelques coups de sabre, mais elle s’est calmée. Son délai d’intervention est dépassé. La CEDEAO ne dispose tout simplement pas d’un mécanisme permettant de rassembler rapidement des troupes et de coordonner les hostilités, et le Nigeria, sa grande puissance, a déjà fort à faire en matière de sécurité intérieure. L’opinion publique nigériane craint un retour de bâton – le Niger est un grand pays qui possède une frontière poreuse de 1500 kilomètres avec le Nigeria. Une vérité tacite est que le Nigeria n’est guère intéressé par le renforcement de la présence militaire française au Niger ou par le fait d’être du même côté que la France, qui est extrêmement impopulaire dans l’ensemble du Sahel.

La mère de toutes les surprises est que le coup d’État militaire bénéficie d’une vague de soutien populaire. Dans ces conditions, il est fort probable que les troupes françaises soient contraintes de quitter le Niger, son ancienne colonie. Le Niger est victime d’une exploitation néocoloniale. Sous couvert de lutte contre le terrorisme, qui est, ironiquement, une retombée de l’intervention de l’OTAN en Libye en 2011, menée par nulle autre que la France dans la région du Sahel, la France a exploité sans pitié les ressources minérales du Niger.

Un poète et critique littéraire nigérian de renom, le professeur Osundare, a écrit la semaine dernière : “Examinez la cause, l’évolution et les symptômes de la résurgence actuelle des coups d’État militaires en Afrique de l’Ouest. Trouvez un remède à cette pandémie. Plus important encore, trouvez un remède au fléau des injustices politiques et socio-économiques responsables de l’inévitabilité de sa récurrence. Souvenez-vous de l’anarchie brutale qui règne actuellement en Libye et des innombrables répercussions de la déstabilisation de ce pays autrefois florissant sur la région de l’Afrique de l’Ouest.”

Le seul Etat régional qui peut se permettre une intervention militaire efficace au Niger est l’Algérie. Mais l’Algérie n’a aucune expérience dans la conduite de telles opérations à l’échelle régionale et n’a aucune intention de s’écarter de sa politique constante de non-ingérence dans la politique intérieure d’un pays souverain. L’Algérie a mis en garde contre toute intervention militaire extérieure au Niger. Le président algérien Abdelmadjid Tebboune a déclaré : “Une intervention militaire extérieure au Niger est une menace directe pour l’Algérie et nous la rejetons totalement et catégoriquement… Les problèmes doivent être résolus pacifiquement.

Au fond, sans aucun doute, le coup d’État en République du Niger se résume à une lutte entre les Nigériens et les puissances coloniales. Certes, la tendance croissante à la multipolarité dans l’ordre mondial encourage les nations africaines à se débarrasser du néocolonialisme. C’est une chose. D’autre part, les grandes puissances sont contraintes de négocier plutôt que de dicter.

Il est intéressant de noter que Washington a fait preuve d’une relative retenue. Les “valeurs” prônées par le président Biden sont loin d’être le diktat d’un “ordre fondé sur des règles” – bien que l’Amérique ait, semble-t-il, trois bases militaires au Niger. Dans le contexte multipolaire, les nations africaines gagnent de l’espace pour négocier. L’activisme de la Russie stimulera ce processus. La Chine a également des intérêts économiques au Niger.

Notamment, le chef du coup d’État, Abdurahman Tchiani, a déclaré que “les Français n’ont aucune raison objective de quitter le Niger“, ce qui indique qu’une relation juste et équitable est possible. La Russie s’est montrée prudente en affirmant que la tâche principale à l’heure actuelle était “d’empêcher une nouvelle dégradation de la situation dans le pays“. La porte-parole du ministère des affaires étrangères, Maria Zakharova, a déclaré : “Nous considérons qu’il est urgent d’organiser un dialogue national pour rétablir la paix civile, garantir la loi et l’ordre… nous pensons que la menace d’un recours à la force contre un État souverain ne contribuera pas à désamorcer les tensions et à résoudre la situation dans le pays“.

Il est clair que Niamey ne cédera pas à la pression de l’extérieur. “Les forces armées nigériennes et toutes nos forces de défense et de sécurité, fortes du soutien indéfectible de notre peuple, sont prêtes à défendre l’intégrité de notre territoire“, a déclaré un représentant de la junte dans un communiqué. Une délégation de Niamey s’est rendue au Mali pour demander aux combattants de Wagner, affiliés à la Russie, de se joindre à la lutte en cas d’intervention soutenue par l’Occident.

Il ne faut pas s’attendre à une résolution rapide de la crise autour du Niger. Le Niger est un État clé dans la lutte contre le réseau djihadiste et est lié stratégiquement et structurellement au Mali voisin. De plus, la situation dans la région du Sahel s’aggrave. Cela a de profondes implications pour la crise de l’État en Afrique de l’Ouest dans son ensemble.

L’exceptionnalisme américain n’est pas une panacée universelle pour les maux existants. Le Pentagone a contribué à la formation d’au moins un des chefs de coup d’État au Niger – et de ceux du Mali et du Burkina Faso, qui ont promis de prendre la défense du Niger. Pourtant, en visite à Niamey lundi, la secrétaire d’État adjointe américaine par intérim, Victoria Nuland, a déploré que les putschistes aient refusé de l’autoriser à rencontrer le président déchu Mohamed Bazoum et qu’ils n’aient pas été réceptifs aux appels des États-Unis en faveur d’un retour du pays à un régime civil.

La mission de Nuland visait à dissuader les putschistes de s’engager avec le groupe Wagner, mais elle n’était pas certaine de réussir. Nuland n’a pas été autorisée à rencontrer le général Tchiani.

M.K. Bhadrakumar

Traduit par Wayan, relu par Hervé, pour le Saker Francophone.

 

La politique américaine au Niger inquiète la France

par Alexandre Lemoine - Le 15/08/2023.

La France espère toujours conserver son influence en Afrique. Cependant, les États-Unis ont l’intention d’utiliser la région à leurs propres fins. Au final, Paris devra céder. La position américaine sur la situation au Niger a déçu la France. 

La France s’assurait pendant longtemps sa position internationale grâce à son influence en Afrique. En particulier, Paris était responsable des approvisionnements en ressources et matières premières depuis le continent. En conséquence, les Français ont la conviction que ce sont eux qui doivent gérer les crises dans la région. 

En même temps, pour les États-Unis, l’Afrique est un autre outil permettant d’assurer leur domination mondiale. C’est pourquoi Washington menace les rebelles au Niger d’utiliser la force si le nouveau gouvernement ne revient pas dans la sphère d’influence occidentale. 

Paris considère une telle politique de «cow-boy» comme excessivement dangereuse. Surtout que c’est aux Français, et non aux Américains, qu’il reviendra de se battre «pour la démocratie» sur le continent. La concurrence entre Washington et Paris pour l’influence dans la région s’intensifie, selon les experts. 

Cependant, au final, la France devra céder aux États-Unis. La montée de la conscience de soi des pays du Sud global frappe principalement les pays qui ont encore des ambitions coloniales. Et dans l’ensemble, Paris est trop faible pour jouer un rôle significatif dans la lutte à venir pour l’influence en Afrique. 

Il a été rapporté plus tôt que la position des États-Unis sur la situation au Niger avait déçu la France, selon Le Figaro. Il est à noter que la principale raison de l’irritation de Paris a été la récente visite à Niamey de Victoria Nuland, la numéro deux de la diplomatie américaine par intérim. 

Ainsi, la France attendait «tout le contraire» des États-Unis, déclarant qu’«avec des alliés comme ça, on n’a pas besoin d’ennemis». Alors que Paris soutient la préparation par la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) d’une opération militaire, Washington a plaidé pour une solution pacifique et a cessé d’exiger la réintégration de l’ancien président du Niger, Mohamed Bazoum. 

De plus, selon les Français, l’Amérique veut «conserver ses bases» dans le pays et est prête à «saboter le processus de retour à l’ordre constitutionnel» pour ce faire. Paris est également mécontent que les contingents des deux pays au Niger soient à peu près égaux, mais que seul le contingent français soit l’objet de ressentiment de la part des habitants locaux. 

Rappelons que Victoria Nuland, première adjointe par intérim du secrétaire d’État américain, a visité le Niger et a tenu des pourparlers avec les représentants militaires qui ont évincé le président du pays Mohamed Bazoum. 

Précédemment, l’Observateur continental a écrit que la visite de Victoria Nuland à Niamey avait été un échec. La diplomate a déclaré qu’il lui avait été refusé de rencontrer le président déchu Mohamed Bazoum. Elle n’a pas non plus réussi à rencontrer le général Abdourahamane Tchiani, qui dirige le Conseil national pour la sauvegarde de la patrie. Victoria Nuland a principalement parlé avec le nouveau ministre de la Défense du pays. 

Les États-Unis ne sont pas le seul pays à se distancer de la position des autorités françaises au Niger. Aucun des alliés de la France dans ce pays, que ce soit l’Allemagne, la Belgique ou l’Italie, ne remet en question la rhétorique des putschistes, surtout lorsqu’il s’agit du retrait des troupes françaises. L’Allemagne a besoin du Niger pour assurer le retrait de ses troupes du Mali, tandis que l’Italie est davantage concentrée sur la stabilité de la région afin d’éviter une nouvelle crise migratoire.

source : Observateur Continental

Échec du scénario ukrainien au Niger

par Alexandre Lemoine - Le 16/08/2023.

La situation autour de la probable invasion des forces de certains pays de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) au Niger rappelle étonnamment les discussions qui ont eu lieu à la veille de la contre-offensive estivale de l’armée ukrainienne. 

Les alliés africains de l’Occident hésitent à se lancer dans une aventure risquée, tandis que Washington et l’Europe les invitent instamment à le faire. De la même manière, ils exigeaient tout au long du printemps 2023 que les forces ukrainiennes attaquent les positions russes fortifiées. 

Cependant, il y a une différence majeure. Les dirigeants africains n’ont aucune envie de prendre des risques pour les intérêts de la France et des États-Unis. Par conséquent, ce qui a été une tragédie en Ukraine pourrait se transformer en une farce en Afrique de l’Ouest, se soldant par un accord de paix entre toutes les parties concernées. 

La raison principale de ce spectacle est la même dans les deux cas : La volonté de l’Occident de ne pas s’engager directement dans des aventures militaires et de faire tout le travail par procuration. Si dans le cas de l’Ukraine le motif de ce comportement est la crainte des représailles de la Russie, en Afrique il s’agit d’un manque de moyens et de volonté. D’autant plus que Paris et Washington sont convaincus que les régimes politiques proches d’eux au sein de la CEDEAO eux-mêmes souhaitent renverser le régime militaire du Niger. 

Il existe des raisons à cela. Le coup d’État survenu au Niger le 26 juillet est le quatrième en moins de deux ans dans la région (après le Mali, le Burkina Faso et la Guinée). Il bénéficie clairement du soutien d’une certaine partie de la population de l’un des pays les plus pauvres du monde. Dans d’autres États de la CEDEAO, la situation est également loin d’être parfaite, et les gouvernements civils ont toutes les raisons de craindre un effet domino envers eux-mêmes. 

Il existe des raisons de penser que la force combinée du Nigeria et de plusieurs autres pays de la CEDEAO serait suffisante pour rétablir au pouvoir le président Mohamed Bazoum, qui a été arrêté. Ce qui manque pour l’instant, c’est l’aventurisme : Les dirigeants africains préfèrent adopter une position d’attente, même si elle est accompagnée d’une démonstration de détermination. 

Paris et Washington, quant à eux, agissent dans leur manière habituelle : Ils appellent verbalement à une solution pacifique, mais en réalité, ils exigent que les pays de la CEDEAO utilisent la force pour régler leurs comptes avec les généraux au Niger. Il est également possible qu’une assistance militaire ait été promise, car d’importants contingents français et américains sont toujours stationnés dans ce pays. Cependant, il est peu probable que l’Occident intervienne directement. 

Cela serait, d’une part, associé à un certain risque et nécessiterait d’assumer la responsabilité des conséquences. D’autre part, une attaque directe contre le gouvernement en place par les forces occidentales serait le pire événement possible dans le contexte de la lutte pour l’opinion des pays en développement. 

L’époque où les États-Unis et l’Europe pouvaient librement attaquer n’importe quel État souverain à leur guise est révolue. Le dernier «acte» en date a été l’agression de l’OTAN contre la Libye en 2011. Depuis lors, beaucoup de choses ont changé. Washington et les capitales européennes essaient de convaincre le monde de leurs bonnes intentions. C’est particulièrement pertinent dans le contexte de leur lutte contre la Russie, qu’ils accusent de faire ce qu’ils faisaient pendant des décennies. 

Il est difficile à dire ce qui serait le plus avantageux pour les États-Unis et la France : Conclure un accord avec les généraux nigériens derrière le dos des pays de la CEDEAO ou renverser la junte suite à une intervention des voisins, agissant en solidarité avec les puissances occidentales. La première option permettrait de conserver des positions économiques tout en subissant un préjudice politique, tandis que la seconde pourrait déboucher sur le succès politique que l’Occident recherche tant sur la scène internationale. Rappelons que ce contexte découle de l’échec de la guerre économique contre la Russie et des tentatives de l’isoler en général, de la pression croissante de la Chine et de la diminution générale de l’influence du «milliard d’or» sur la politique mondiale. 

Après l’échec en Ukraine, même une victoire par procuration sur quelques dizaines de putschistes au Niger pourrait être présentée à la société comme un grand succès et une preuve de la toute-puissance de l’Occident. Le désir d’y parvenir est si fort qu’il conduit à des situations ridicules, comme la publication dans le Washington Post d’un article du président Bazoum déchu, dans lequel il appelle à une intervention étrangère dans son pays. 

En conséquence, nous assistons à une situation où l’Occident lui-même ne peut pas s’engager dans la bagarre, mais exige instamment que ses partenaires régionaux le fassent. À leur tour, ces derniers ne sont pas pressés de prendre des mesures décisives. Ainsi, samedi dernier, les pays de la CEDEAO ont reporté une rencontre de leurs représentants militaires, prétextant que le régime militaire au Niger jouit du soutien d’une partie de la population et qu’il est nécessaire d’entendre leur opinion avant de prendre des décisions sérieuses. En d’autres termes, personne au sein de la CEDEAO n’est particulièrement enthousiaste à l’idée de lancer une opération militaire contre le Niger. Et si cela se produit, il faudra chercher la raison dans l’échec de leurs tentatives de négociation avec les putschistes dans le dos de l’Occident. 

Bien que cette issue semble très improbable : Malgré tous leurs liens avec l’Occident, les dirigeants africains représentent des États et non des régimes compradors sur des territoires spécifiques. Contrairement aux autorités de Kiev, pour qui la question de la survie de l’État appelé Ukraine n’a jamais été centrale. Même les pays les moins avancés économiquement de la majorité mondiale sont des États bien plus accomplis que non seulement l’Ukraine, mais aussi les alliés formels des États-Unis en Pologne ou dans les républiques baltes. 

Et ce n’est pas seulement une question de l’étendue de l’influence de l’Occident sur les systèmes politiques et économiques. Dans la plupart des pays africains, elle est très importante et repose sur des décennies de commerce conjoint sous toutes ses formes. Cependant, il s’avère maintenant que même les liens les plus forts ne peuvent pas jouer un rôle décisif si les élites au pouvoir apprennent à ne pas penser seulement à leur propre survie. 

Un autre facteur important est la lassitude de la majorité des pays en développement face à l’arrogance de l’Occident et à son exploitation sous toutes ses formes. Cela est particulièrement évident dans les anciennes colonies européennes et les territoires dépendants. Les élites polonaises, baltes ou ukrainiennes s’identifient à l’Occident, même si elles restent dans ses bas-fonds. Elles peuvent facilement sacrifier leurs pays pour les intérêts des États-Unis. Cela a été clairement dit il y a quelques jours par le président de la Pologne, Andrzej Duda, notant que «l’impérialisme russe peut encore être stoppé à moindre coût parce que des soldats américains ne meurent pas». 

Cependant, en pratique, la volonté des Ukrainiens, des Polonais ou des Baltes de se sacrifier ne signifie rien de bon pour les États-Unis et l’Europe.

- Premièrement, elle montre que le cercle des véritables suicidaires dans la communauté mondiale est assez restreint et qu’on ne trouve guère d’imbéciles sur d’autres continents.

- Deuxièmement, les suicidaires d’Europe de l’Est sont assez faibles même pour lutter contre la Russie, sans parler de la domination mondiale. Contre la Chine, l’Occident compte sur le Japon. Cependant, la situation n’y est pas si claire, et la montée en puissance de Pékin pourrait bien convaincre Tokyo de ne pas commettre d’erreurs fatales pour lui. 

L’absence de victoires marquantes sur la scène internationale et surtout de la volonté de payer généreusement ses alliés conduit à l’affaiblissement du pouvoir de l’Occident dans les affaires mondiales.

source : Observateur Continental

Crise au Niger : Franchement, qu’espérait-on d’autre ?

Source : Le Courrier des Stratèges - par François Martin - Le 17/08/2023.

Pourquoi la France a-t-elle perdu l’Afrique ? par Vpoanalytics

Le récent coup d’État au Niger était parfaitement prévisible. Un grand nombre d’experts l’avaient anticipé. Il est la résultante de nombreux facteurs, anciens pour certains, de circonstance pour d’autres.


Nucléaire militaire ou civil, défense, police, administration, économie, énergie, industrie, commerce extérieur, endettement, éducation et formation, santé, culture, démographie, famille, cohésion nationale, ascension sociale, liberté de la presse, excellence intellectuelle, littérature, diplomatie, autorité de l’Etat, prestige en Europe et dans le monde… Dans tous les domaines où la France était autrefois, et à fort juste titre, fière de sa force, de son influence ou de son excellence, on peut dire qu’elle a, en une quarantaine d’années, depuis Mitterrand, totalement gâché ses atouts et ses chances. Un véritable suicide avec, en plus, un acharnement systématique, presque satanique, dans l’auto-destruction.

L’Afrique, un grand atout gâché par la France

L’Afrique n’est pas le moindre de ces atouts gâchés. En effet, nous y avions tout : La connaissance profonde, par la colonisation, puis la décolonisation, des mentalités, des peuples et des personnes. Nous avions les meilleurs africanistes au monde. Nos relations étaient intimes avec les plus hauts dirigeants africains publics et privés. Elles le sont encore parfois : Par exemple, il n’est un secret pour personne que de nombreux chefs d’État africains se retrouvent dans les mêmes loges maçonniques que certains politiciens ou hommes d’affaires français. Nous y partagions, ce qui est essentiel, la même langue. De nombreuses entreprises travaillaient en Afrique. Elles y travaillent encore, non répertoriées dans les statistiques d’import/export (les seules que l’on regarde), puisqu’elles opèrent localement. Elles emploient et forment, à ce titre, un grand nombre de personnes, ce qui est extrêmement utile pour les pays et donc, politiquement, d’une importance essentielle pour l’influence de la France en Afrique. Par exemple, le groupe Castel est le premier employeur au Cameroun, et son activité y est surtout locale. Et ne parlons pas du groupe Accor, ou du groupe Bolloré.

La gauche déteste l’Afrique

Comment avons-nous fait, dans ces conditions, pour gâcher de telles chances ?

Il me semble que le cœur de l’affaire, c’est le fait que la gauche au pouvoir, depuis les années 80, au fond déteste l’Afrique, comme elle déteste tout ce qui n’entre pas dans son logiciel idéologique germanopratin », fait de petitesse, de morgue et d’exclusion. Pour le dire autrement, elle abhorre tout ce qui est un tant soit peu traditionnel et conservateur, comme l’est l’Afrique. Cette « fracture » a marqué toute la période, à l’exception, notable, de la présidence de Jacques Chirac, qui aimait et comprenait l’Afrique. Car Chirac n’était pas un progressiste, mais un conservateur, qui n’avait, il est vrai, pas le courage de s’assumer comme tel. Mais ce n’est pas exactement la même chose. 

Ainsi, deux discours ont été tenus, dont la permanence a miné progressivement notre crédit :

Le premier, paradoxalement, est le discours anti-colonial. Oubliant que la colonisation est au départ un projet de gauche, la « gauche bobo » moderne n’a cessé, pour se valoriser idéologiquement [1]de dénigrer son propre passé, jusqu’à affirmer que « Oui, la colonisation est un crime contre l’humanité [2]». Il est facile de refaire l’Histoire, surtout si l’on ne fait pas l’analyse, en regard, des régimes autochtones antérieurs[3]. On met dans le même sac la question de l’esclavage, en faisant un symbole de la culpabilité perpétuelle des « blancs », alors que cet épisode de l’Histoire est d’abord celui d’une prédation des noirs par d’autres noirs.

Le but de ce développement n’est pas de rouvrir les dossiers de ces deux questions facilement polémiques. Ce travail est à faire par les historiens, avec toute la distance qui convient, et avec des méthodes scientifiques, et non pas idéologico-médiatiques. Il convient cependant d’affirmer que ce qui compte avant tout, dans une relation politique, diplomatique ou commerciale, c’est sa propre attitude. Si l’on est fier de soi-même, et que l’on assume courageusement son passé, quel qu’il soit, les contreparties ont confiance en vous, et des partenariats solides peuvent se nouer. Si l’on commence par s’approcher en battant sa coulpe, rien de bon ne peut sortir. Les dirigeants et les peuples africains le savent mieux que personne, qui tentent d’exploiter à leur profit, si on leur tend la perche, cette relation frelatée, mais qui ne sont pas dupes de la réalité[4].

Une politique perverse

Il en est résulté une sorte de politique perverse, où la France, qui a initié, dans la plupart de ces pays, les processus d’indépendance, a tenté, pour asseoir une sorte de « néocolonisation idéologique », de se présenter à la fois comme une « mère », possessive et infantilisante, comme une coupable et, pour couronner le tout, comme une donneuse de leçons[5]. C’est le deuxième discours qui nous a perdus.

En effet, oubliant que les processus politiques sont loin d’être parfaits en Afrique[6], nous n’avons cessé d’exiger d’eux la « démocratie », tout en couvrant, lorsque cela nous arrangeait, les « tripatouillages » électoraux, le népotisme et la corruption. Depuis combien de temps les Sassou-Nguesso, les Paul Biya, les Bongo, les Eyadema, les Ouattara sont-ils au pouvoir ? Si nous exigeons la démocratie, il faut assumer cette exigence jusqu’au bout, et pas seulement lorsqu’elle sert nos intérêts. Et si on ne l’assume pas, il faut laisser les régimes régler eux-mêmes leurs affaires sans intervenir. On ne peut pas, en effet, fustiger et condamner les coups d’État militaires, vouant les « dictatures » aux gémonies, et en même temps cacher les « coups d’États civils », dont nous sommes nous-mêmes, au passage, des spécialistes[7]. De plus, nous avons assorti cette exigence de « démocratie » d’une autre, celle des « droits de l’Homme ». Outre le fait que nous devrions, dans ce domaine, d’abord donner l’exemple, nous appliquons en Afrique ce qu’il faut bien appeler une « fausse bonne idée ». Car si elle est en théorie satisfaisante, et qu’elle fait plaisir à nos intellectuels de salon, dans la pratique, elle ne fonctionne pas : elle a les mains propres, mais elle n’a pas de mains. Mais c’est pire encore : En réalité, elle est un alibi. Nous la brandissons lorsqu’elle nous arrange, et nous la cachons quand elle nous dessert. Aucun africain n’est dupe de cette hypocrisie.

Notre incohérence fondamentale

En fait, lorsque les peuples et les opposants africains à la France disent qu’ils ne veulent plus de nous, ce qu’ils critiquent, c’est notre incohérence fondamentale, et par ailleurs le fait que nous ayons fait de l’assistanat (comme en France !) le principe même de notre politique. Voulons-nous leur liberté ou non ? Voulons-nous leur indépendance ou non ? Voulons-nous leur développement ou non ? Voulons-nous une approche concrète et pragmatique (c’est ce qu’ils attendent !), ou bien la permanence (et jusqu’à quand ?) de ce « ficelage », cet infâme brouet idéologico-politique dont personne n’a rien à tirer, ni les africains, ni nous-mêmes ? Ce que nous payons aujourd’hui, c’est notre incapacité à sortir de cette contradiction première. Nous ne voulons pas accepter les africains pour ce qu’ils sont, mais nous voulons qu’ils deviennent ce que nous voudrions qu’ils soient. Vieille litanie révolutionnaire française !

Pendant toute notre Histoire depuis l’indépendance, et bien plus encore depuis la prise de pouvoir par la gauche en 81, et alors même que la « concurrence » se développait progressivement (Chine, Russie, Turquie, USA, Maroc, Qatar[8], Arabie saoudite, etc…), nous avons tenté de concilier idéologie et pragmatisme sans jamais y parvenir.

Notre force abandonnée : La « Françafrique »

L’un des exemples les plus flagrants de cette contradiction est la façon dont nous nous sommes piégés nous-mêmes avec le concept de « Françafrique ». Le commerçant international que j’ai été pendant 40 ans peut affirmer que d’abord, dans toutes ses pérégrinations africaines, jamais il n’a subi de reproches du type « Vous, les français ! », mais aussi que dans presque tous les pays du monde, ce qui compte avant tout, ce n’est pas la lettre d’un contrat, mais l’esprit de celui-ci, les intentions, que l’on devine à travers la relation interpersonnelle. Un jour, après m’avoir fait attendre pendant près d’un an pour faire notre première affaire, l’un de mes clients saoudiens avait fini par acquiescer. Devant mon étonnement, il m’avait dit : « I wanted to be sure that if, some day, we have a problem with you, we can sit down and talk »[9]. Foin de clauses compliquées, d’artifices et d’avocats, ou même de la taille de mon entreprise, ce qu’il voulait, c’était établir une relation de confiance. Et il lui fallait du temps pour s’assurer de ma « qualité », de mon sérieux et de ma sincérité. Les Asiatiques, les Africains raisonnent de même. Le mode de fonctionnement contractuel anglosaxon n’est pas partagé dans la plupart des pays du monde où ce qui compte, selon la coutume médiévale, c’est « le lien d’homme à homme ». C’est cela qu’exprimait autrefois la « Françafrique », une caractéristique dont auraient bien aimé disposer, à l’époque, tous nos concurrents étrangers. S’il convenait, sans doute, d’en gommer les aspects les plus négatifs, il fallait, évidemment, en conserver le principe. Or la gauche, et Mitterrand le premier, ont été si heureux, en critiquant ces liens, de montrer à quel point leurs prédécesseurs étaient fautifs, et eux-mêmes vertueux, qu’ils ont détruit ce qui faisait notre force. Il faut remarquer d’ailleurs que Mitterrand, conformément à ses habitudes, était le dernier à respecter ses propres principes, puisqu’il avait nommé, en charge des affaires africaines, son propre fils Jean-Christophe, que les dirigeants du continent nommaient drôlement « Papamadit »… Comme abandon de la « Françafrique », on pouvait mieux faire…

Les racines de la crise sahélienne

Les racines de notre perte d’influence en Afrique remontent donc à loin, et l’on retrouve tous ces ingrédients non seulement dans la crise du Niger, mais aussi dans celles, plus anciennes, des autres pays du Sahel.

Comme je le montre dans deux précédents articles[10], nous avons très mal pris, dès le départ , la question sahélienne :

  • L’africaniste Bernard Lugan le clame depuis des années : Le principal problème qui a trait au Sahel est le fait qu’y cohabitent les peuplades nomades pastorales, peu nombreuses, mais guerrières, au nord, et des ethnies plus nombreuses, sédentaires et cultivatrices au sud. Depuis toujours, les guerriers du nord ont tenté, par les razzias et la rapine, d’assurer leur domination sur les peuples du sud. Or la décolonisation, puis l’application stricte de la loi électorale occidentale « un homme, une voix », ont permis un renversement politique définitif, et la victoire éternelle des « dominés » du sud, plus nombreux [11], sur les anciens « dominants » du nord. Ce piège, qui nous arrangeait dans le « ficelage » politique de ces pays, a non seulement augmenté la rancœur des peuples du nord[12], mais a aussi permis, dans plusieurs pays, que s’instaurent, sous couvert de « démocratie », des habitudes de népotisme et de corruption, et partant, d’inefficacité politique. Pourquoi, en effet, se lancer dans des aventures politiques et dans des réformes dangereuses, lorsqu’on est « bien protégé » par le système et par la France, et qu’il suffit de donner le change et de ne rien faire, en s’enrichissant si possible au passage ?
  • La guerre civile du Mali de 2012, et l’intervention de la France avaient pour substrat la situation de blocage politique décrite ci-dessus. Malgré, ou peut-être à cause des « processus démocratiques » dont la France était très fière, faisant du Mali un exemple à suivre, la corruption des élites y était notoire. Pour cette raison, l’armée, négligée et mal entraînée, se trouvait incapable, en janvier 2013, de repousser les insurgés venus du nord. Cela arrangeait d’une certaine façon la France, qui « tenait » ainsi son allié malien en rênes courtes. Elle « fit le job » en quelques jours. Mais, pour les mêmes raisons, elle ne profita pas de cette occasion inespérée pour imposer aux dirigeants maliens de l’époque les réformes politiques et institutionnelles indispensables : Lutte contre la corruption, redressement de l’armée déliquescente, et surtout, mise en route d’un processus de décentralisation pour, enfin, intégrer les peuples touaregs minoritaires dans un vrai projet politique motivant.
  • Du coup, la France devint « l’otage de son otage ». Piégée au nord, où elle s’était donnée une mission de lutte contre le djihadisme au-dessus de ses forces, insuffisamment organisée pour une véritable guerre contre-insurrectionnelle durable et coûteuse, et surtout sans avoir imposé les réformes politiques nécessaires pour obtenir l’appui des chefs et des populations du nord (une disposition indispensable dans la guerre contre-insurrectionnelle), ni interrompu la corruption qui se perpétuait à Bamako « sous son aile », elle s’enferra peu à peu dans un « piège sahélien » dont elle ne parvint plus à sortir.
  • De même, elle ne saisit pas au bond la possibilité de ratifier, en 2015, l’Accord d’Alger, craignant de donner trop de place à l’Algérie et de perdre son hégémonie politique sur le Mali.
  • Dans ce contexte devenu particulièrement grave, et dans la situation de blocage du pays, dont on ne sait plus si la France le déplore ou l’encourage (les deux, sans doute…), on peut considérer que les deux tentatives de coup d’État du jeune Assimi Goïta, en 2020, puis 2021, étaient sinon légales, du moins légitimes. Il faut remarquer d’ailleurs qu’après sa deuxième prise de pouvoir, le 24 mai 2021, il prit la peine de la faire ratifier, le 28 mai, par la Cour constitutionnelle malienne. Elle est donc, aujourd’hui, non seulement légitime, mais aussi légale.
  • Mais là aussi, la France prit une attitude « légaliste » et autoritaire. Au lieu de tenter de profiter des velléités réformatrices du nouveau pouvoir pour le mettre au pied du mur, et lui demander ce qu’il comptait faire, lui, pour sauver le pays, elle mena la fronde contre lui via la CDEAO, encouragea le blocus du pays, retira ses troupes sans concertation préalable, mit un ultimatum pour le retour au pouvoir civil. Une tentative de mise à mort politique, alors que, selon la tradition africaine, il eût fallu « s’asseoir et discuter ». Mais y a-t-il encore un pilote dans l’avion Afrique-France ? Qui est aujourd’hui le « monsieur Afrique » français ?
  • Alors qu’une transition assez courte était négociable (Goïta demandait 3 ans), la France « se fâcha » et se cabra. Ce qui devait arriver arriva : Le pouvoir malien, logiquement, se raidit aussi. La population malienne prit fait et cause pour lui, et le légitima. Aujourd’hui la France est isolée et battue, politiquement et diplomatiquement. Après ce premier domino, les suivants (Guinée en septembre 2021, puis Burkina en janvier 2022) tombèrent rapidement, puis le Niger il y a quelques jours.

La crise du Niger

L’affaire du Niger n’a pas exactement la même origine qu’au Mali :

  • Dans ce pays, grâce, certainement, à la « tradition » politique imposée par Seyni Kountché, un ancien dirigeant d’une grande rigueur[13], la corruption et l’inefficacité n’avaient sans doute pas autant cours que dans des pays comme le Mali. Ce n’est donc pas l’indignation des militaires devant la déliquescence du pouvoir qui a provoqué le putsch.
  • Il semble bien, selon la thèse défendue par le géopoliticien français Alexandre Del Valle, que l’origine du coup d’Etat y soit, dans ce cas, un différend grave existant entre les chefs de l’armée et l’ancien président Mohamed Bazoum, au sujet de la politique à mener contre les djihadistes, les militaires ayant voulu, pour assurer la protection du pays, à tout le moins un dialogue et une coordination avec les pays voisins du Mali et du Burkina, et le président Bazoum, sous l’égide de la France (qui voulait poursuivre la « punition » et l’isolement de ces deux pays), l’ayant refusé. Cette thèse semble en effet assez plausible. En effet, la non-coordination des politiques sécuritaires est tout à fait contraire au bon sens, et par ailleurs, l’alignement trop ostensible sur la France est devenu une vraie faiblesse politique.   
  • Par rapport à cela, et même si l’on ne peut en être certain, l’intervention effective des troupes de la CDEAO est assez peu probable. Cela tient en grande partie à la configuration des pays dans les frontières issues de la colonisation.
  • En effet, le découpage, à l’indépendance, des « nouveaux » pays, a été fait selon les frontières administratives antérieures, sans avoir comme principe l’unicité des ethnies dans chacun d’eux. Ceci a eu le double effet d’exacerber les tensions intra-étatiques (puisque plusieurs ethnies peuvent en principe se disputer le pouvoir dans chaque pays), mais aussi de diminuer les tensions inter-étatiques, puisque, le plus souvent, ce sont les mêmes peuples que l’on retrouve de part et d’autre d’une frontière (ainsi les Yorubas à la frontière nigériano-béninoise, ou les Haussa à la frontière nigériano-nigérienne). De fait, si les guerres civiles ont été nombreuses et très violentes (cf la guerre du Biafra, ou celles du Rwanda ou d’Angola), il n’y a que très peu d’exemples de guerres entre pays limitrophes[14].
  • En effet, une guerre entre deux pays voisins ferait que certains soldats devraient se battre contre leurs « frères », et par ailleurs, le pays « vainqueur » se trouverait très fragilisé par le fait qu’il pourra ensuite être facilement déstabilisé par des attaques terroristes venant de l’autre côté de sa frontière[15]. C’est pour cette raison que le Parlement nigérian est très réticent à une telle intervention. Une telle « jurisprudence » risquerait de mettre toute l’Afrique, à terme, à feu et à sang, d’autant que, en plus, les pays qui n’ont pas l’accès à la mer se sentent souvent « rackettés » par leurs voisins du sud. Il existe donc une frustration des pays du nord qui ne demanderait qu’à s’exprimer.
  • Par contre, il est fort possible que la CDEAO tente de « retourner » certains chefs de la nouvelle junte, ou certaines tribus touareg, ceci afin de miner progressivement la coalition militaire. C’est probablement ce qui se passe en ce moment, à la faveur des « palabres ».
  • Quelle sera donc la détermination des putschistes (ils ne peuvent sans doute pas accepter la position maximaliste de la France qui leur interdit de s’entendre avec leurs voisins sahéliens pour assurer leur sécurité) ? Quel sera l’appui qu’ils pourront recevoir du Mali et du Burkina dans leur tentative, appuyée, certainement, par la Chine et surtout la Russie, qui a intérêt à étendre sa zone d’influence sahélienne ? Quelles seront la détermination et l’habileté de la CDEAO pour, sans radicaliser le peuple nigérien, miner la junte de l’intérieur, ou trouver une solution de compromis (une transition limitée dans le temps, ou un arrêt du « diktat » de la France ?), terrorisés que sont, certainement, certains de ces potentats par le risque que la contagion politique s’étende dans leurs propres pays ? Nul ne le sait à ce jour.
  • On peut cependant remarquer que, dans ce cas également, la France a été particulièrement maladroite. En effet, au lieu de laisser les belligérants régler leurs comptes, tout en les appuyant et les manipulant au mieux par-derrière, elle s’est dépêchée de s’afficher en première ligne, avec des déclarations péremptoires, alors que les USA, par exemple, ont été beaucoup plus malins. De fait, ces derniers ne parlent que de « crise », alors que la France a dit qu’elle « condamne fermement le putsch militaire illégitime ». Clairement, après de telles paroles, si les putschistes ont finalement gain de cause, la France en sortira encore un peu plus isolée et affaiblie.
  • De toute façon, les choses en sont, globalement, à un tel point de défiance vis-à-vis de la France, non seulement au Sahel, mais aussi ailleurs, qu’on peut penser qu’à terme, nos jours sont comptés, ainsi, probablement, que ceux de la CDEAO.  Ces organisations sont trop vieillies par rapport à la « nouvelle donne » africaine. Quel gâchis !

Les rêveries politiques d’Emmanuel Macron

Car à toutes ces maladresses diplomatiques et militaires, il convient de rajouter les erreurs politiques personnelles d’Emmanuel Macron lui-même, que ce soit sa « sortie » sur la « climatisation » lors de sa visite au Burkina Faso en Novembre 2017, ou encore le Sommet Afrique-France de Montpellier, le 8 Octobre 2021, clairement orienté pour monter (en l’absence des chefs d’États africains !), les « élites » africaines contre leurs pouvoirs politiques respectifs, ou encore sa visite catastrophique à Kinshasa, le 4 Mars 2023, conclue par une soirée arrosée dans une boite de nuit locale… Toutes ces interventions n’étaient pas uniquement de la maladresse. Elles proviennent du fait qu’Emmanuel Macron, un pur progressiste, plus encore que ses prédécesseurs socialistes, déteste et méprise le système politique africain très conservateur. Au lieu de l’accepter tel qu’il est, et de faire au mieux avec lui, il a tenté de mettre de son côté, d’une façon très ostensible et maladroite, les intellectuels et la jeunesse africaine, de façon à faire pression sur les pouvoirs politiques dans le sens d’une possible « libération ». Fomenter une révolution progressiste en Afrique ? Quel drôle de projet politique[16]… Rêvait-t-il d’une « Gay Pride » un jour à Abidjan, à Yaoundé, ou même à Bamako ? Si c’était cela, il a bien raté son affaire. Il s’est mis à dos toute l’Afrique, non seulement les pouvoirs, mais aussi les peuples. Il a, de ce fait, gravement accéléré la descente aux enfers de la France sur ce continent.

L’Afrique, futur géant du monde

Et ceci est d’autant plus dommageable que l’Afrique, qui aura dans 30 ans le quart des habitants de la planète, constitue aujourd’hui la principale opportunité de croissance et de développement pour le monde[17]. Pour cette raison, elle intéresse toutes les puissances. Et c’est au moment où tous se battent pour s’y construire une place de choix que nous, qui y avions la primauté, et pour qui l’Afrique représente, du point de vue politique et économique, la profondeur stratégique qui nous manque, faisons tout ce qu’il faut pour nous en faire chasser honteusement. L’Afrique, clairement, a senti que l’avènement d’un nouveau monde multipolaire lui offre de nouvelles et grandes opportunités. Après une période difficile pour les peuples, la sortie du sous-développement, pour de nombreux pays ou régions du continent africain, est peut-être maintenant à portée de vue. C’est en tout cas le fondement de son « nouveau nationalisme ». Sur cette base, elle veut trois choses : Du concret, du concret et du concret[18]. C’est ce que nous ne voulons pas lui donner. Une marque de plus, s’il en fallait, de notre stupidité idéologique, raison principale de notre déclin.

Voici ce qu’en dit un intellectuel camerounais, qui résume tout :

« Quand la Chine vient avec les projets infrastructurels, l’Inde avec des projets agricoles, le Japon avec des écoles primaires, l’Allemagne avec la coopération universitaire de haut niveau, la Russie avec la coopération sécuritaire de pointe, tout ce que la France nous propose, c’est la promotion de l’homosexualité ! Et après, ils vont s’étonner du “sentiment anti-français”. »

Malheur aux faibles et aux orgueilleux irréalistes que sont nos élites et nos gouvernants. Malheur a nous, qui n’osons pas les chasser. « Vae victis », comme disait Brennus…


[1] Et accessoirement pour forcer sa politique anti-patriotique, permettant de « fasciser » plus facilement ses opposants politiques conservateurs, dont elle fait un bouc émissaire très utile, tout en flattant son électorat d’origine immigrée. Funeste politique…

[2] Macron à Alger, en Février 2017.

[3] Que l’on se rappelle, par exemple, les sacrifices humains perpétrés par le dernier roi d’Abomey Béhanzin https://www.valeursactuelles.com/clubvaleurs/histoire/la-traite-des-rois-africains

[4] Plusieurs dirigeants africains, dont Rawlings du Ghana et Kérékou du Bénin, ont reconnu publiquement la responsabilité africaine de l’esclavage. Par ailleurs, au début des années 1980, à ma question « Comment se fait-il que l’on fasse de l’esclavage une question polémique entre noirs et blancs, alors que c’était le résultat d’un commerce ? », le conservateur du Musée de Gorée, le célèbre intellectuel sénégalais Boubakar Joseph Ndiaye, m’avait un jour répondu « Cher Monsieur, je passe mon temps à dire à mes collègues africains que lorsqu’il n’y a pas de vendeurs, il n’y a pas d’acheteurs, et ça les énerve au plus haut point ! »

[5] Existe-t-il un « cocktail » politique plus repoussant que celui-là ?

[6] Mais le sont-ils ailleurs, en France ou aux USA, par exemple?

[7] En particulier l’invalidation des concurrents. N’est-ce pas, François Fillon ?

[8] Par leur soutien aux djihadistes

[9] « Je voulais être sûr que si, un jour, nous avons un problème avec vous, nous pouvons nous asseoir et discuter ».

[10] srp_mali2.pdf (francoismartin-geopolitique.fr) et srp_gachis.pdf (francoismartin-geopolitique.fr)

[11] Puisqu’en Afrique, le vote est toujours ethnique. L’ethnie majoritaire peut donc garder le pouvoir pour toujours.

[12] A qui les trafics d’armes, de drogue et de migrants ont ensuite donné les moyens de leurs ambitions.

[13] Lorsqu’il était au pouvoir, Seyni Kounché avait l’habitude, fréquemment, de se rendre devant l’entrée de ses ministères, le matin aux heures d’ouverture, et d’y scruter l’arrivée de ses fonctionnaires en regardant ostensiblement sa montre. Inutile de dire qu’à défaut de vérifier la qualité du travail, il s’assurait au moins d’une ponctualité exemplaire… Seyni Kountché — Wikipédia (wikipedia.org)

[14] La guerre entre le Rwanda et le Zaïre en était un excellent exemple, mais elle avait des causes géopolitiques et non régionales.

[15] J’ai eu moi-même l’occasion de faire, en « taxi de brousse », la route Niamey-Maradi-Zinder-Kano, de même que, plusieurs fois, la route Accra-Lomé-Cotonou-Lagos. Je peux attester du fait que les frontières y sont particulièrement poreuses, comme toutes les frontières terrestres africaines, qui ne sont pas des protections, mais d’abord des lieux et des occasions de trafics.

[16] Ceci est confirmé par la pathétique tentative d’envoyer au Cameroun, en Juin de cette année, notre “Ambassadeur de France pour les droits LGBT”. La “conversion” de l’Afrique au wokisme est véritablement l’un de nos objectifs politiques. Refus du Cameroun d’accueillir l’ambassadeur des droits LGBT+ de Macron – Boulevard Voltaire (bvoltaire.fr)  

[17] srp_africain.pdf (francoismartin-geopolitique.fr) et Développer l’Afrique (démographie, ressources, défense…) – François Martin – YouTube

[18] Et en premier lieu, de l’énergie abondante et bon marché, et des infrastructures. Puis des structures sécuritaires, une agriculture performante et des moyens de formation professionnelle dignes de ce nom

 

Splendeurs et misères de la stratégie française en Afrique

Source : Revue Conflits - par Christine Van Offelen - Le 18/08/2023.

Un coup d’État de plus au Sahel. Un coup d’État de trop ? Au moment où une junte militaire renversait le président nigérien Mohamed Bazoum le 26 juillet dernier, Emmanuel Macron se trouvait à 18 000 kilomètres de là, à Nouméa, pour clamer que « la Nouvelle-Calédonie est française ». Hasard du calendrier, le symbole n’en est pas moins éloquent. Alors que le séparatisme menace l’Océanie française, l’influence française sur le continent africain se délite. Les attitudes hostiles à la France, tandis que la France essaie tant bien que mal de maintenir ce que le journaliste Jean-Claude Guillebaud appelait jadis « les confettis de l’empire »[1], vestiges mélancoliques d’une grande fête évanouie.

Ce coup d’État – le cinquième en deux ans au Sahel – est un clou de plus dans le cercueil des ambitions françaises dans la région. Celle-ci fut plongée dans une spirale infernale à partir de l’intervention militaire de la France en Libye en 2011 et la chute du régime de Kadhafi qui s’ensuivit. Quantité d’armes de l’ex-dictateur furent pillées puis se répandirent dans les pays voisins, si bien que le chaos libyen déstabilisa bientôt l’ensemble du Sahel. À partir de 2013, la France lança une deuxième guerre, pour tenter de réparer les conséquences de la première.

La contagion putschiste s’étend au Niger

Mais l’opération Barkhane, déployée au Sahel où elle traquait les groupes armés depuis neuf ans, a créé des attentes impossibles à satisfaire. La présence française, perçue comme un résidu d’ingérence coloniale, a soulevé les opinions publiques contre elle. Certes, l’opération a éliminé 3 000 combattants djihadistes au cours des neuf dernières années. Mais les groupes armés terroristes (GAT), loin de réduire leur empreinte, ont proliféré jusqu’à essaimer dans les pays du golfe de Guinée. Leurs combattants, qui n’étaient que quelques centaines en 2013, se comptent par milliers aujourd’hui. La France a gagné toutes les batailles, mais perdu la guerre.

À la racine du rejet de la France au Sahel, il y a donc la frustration générée par l’incapacité de l’une des plus grandes armées du monde à résorber le fléau djihadiste. L’incompréhension s’est muée en suspicion et la suspicion en véritable rejet. Un terreau fertile cultivé par des opérateurs politiques locaux, qui en ont fait une rente de situation, ainsi que par des acteurs extérieurs, notamment russes.

Le Niger, un État pivot

Que reste-t-il de l’aventure sahélienne de l’armée française ? Le Niger constituait le dernier bastion démocratique et l’ultime pivot du dispositif antidjihadiste de la France. Le pays, où Mohamed Bazoum avait été élu à 55% deux ans plus tôt dans le cadre d’une alternance démocratique jugée exemplaire, affichait une certaine stabilité politique. Après avoir été chassée du Mali en 2022 et du Burkina Faso en février 2023, l’armée française avait donc partiellement réinstallé ses troupes au Niger, soit 1 500 militaires, principalement positionnés sur la base aérienne projetée (BAP) dans la périphérie est de Niamey. Mais cette présence est en suspens depuis que la junte a exigé le départ de ces militaires d’ici à début septembre.

Or les solutions de repli se réduisent. Avec le Tchad, où l’armée française reste présente (1 000 hommes), les relations bilatérales ne sont plus les mêmes depuis que Mahamat Idriss Déby a succédé à son père sans égard pour la Constitution. Au Sénégal, les récentes manifestations signalent une détérioration de la situation politique, tandis qu’en Côte d’Ivoire, qui compte 900 soldats français, la succession d’Alassane Ouattara, 81 ans, est source d’inquiétude.

Pauvreté du Niger

Le Niger est l’un des pays les plus pauvres du monde, avec 41,8 % de la population vivant dans l’extrême pauvreté en 2021, selon les Nations unies. Ce pays sahélien musulman, grand comme deux fois et demie la France et peuplé de 25 millions d’habitants, connaît également l’une des plus fortes croissances démographiques de la planète, avec une moyenne de 7 enfants par femme. La population, qui comptait quatre millions d’habitants au moment de son indépendance en 1960, pourrait atteindre les 70 millions en 2050. Quant aux forces armées nigériennes, elles sont déjà durement éprouvées par le terrorisme: au nord-ouest, dans la zone dite des « trois frontières », elles affrontent des groupes djihadistes liés à Al-Qaïda et au groupe État islamique (EI) qui sévissent aussi au Mali et au Burkina Faso. L’armée nigérienne doit également combattre Boko Haram qui sévit depuis des années à Diffa dans le sud.

Malgré ces fragilités endémiques, le Niger était devenu la pièce maîtresse de l’ancrage militaire français dans la région. Avec le coup d’État du général Abdourahamane Tiani, la France perd en outre son principal partenaire en matière de contrôle des flux migratoires au Sahel. Le pays est en effet la plaque tournante des migrants désireux de se rendre en Europe. Porte d’entrée du désert, carrefour des migrations et de toutes les contrebandes, Agadez est le point de départ des principales routes menant vers la Méditerranée, via la Libye ou l’Algérie. La crise actuelle, couplée à la dégradation sécuritaire et les conséquences économiques des sanctions, fait craindre un relâchement du contrôle des frontières, voire une vague migratoire d’ampleur.

A lire aussi

La Mauritanie : exception sécuritaire dans le paysage sahélien

À Niamey, les scènes ont des airs de déjà-vu. Le drapeau russe est brandi devant l’ambassade de France devenue une forteresse assiégée. « Notre politique africaine s’effondre sur nous » avertit l’ancien ambassadeur Gérard Araud[2]. Une fois de plus, le Quai d’Orsay se trouve confronté à l’épineuse, la lancinante et désormais brûlante équation africaine : la France a-t-elle toujours vocation à rester en Afrique ? Et, si oui, comment préserver son influence sur le continent tout en évitant l’écueil de l’impopularité ? Une équation à double inconnue qui, si elle n’est pas résolue, risque de faire boire à la France la coupe jusqu’à la lie. Car nul ne sait si demain le virus antifrançais ne se propagera pas au Tchad ou en Mauritanie, au Sénégal ou en Côte d’Ivoire.

La France à la croisée des chemins sahéliens

La crise au Niger révèle au grand jour la panne de la stratégie de la France au Sahel. Les vieilles idées demeurent, sans que se dessine une nouvelle politique. La rituelle promesse de la fin de la Françafrique, invoquée par Emmanuel Macron tout comme ses prédécesseurs, appelait d’autres lendemains. Le président de la République « avait cru en 2017 pouvoir passer l’ardoise magique sur la période postcoloniale en proposant à la jeunesse africaine de replier les rétroviseurs » explique le spécialiste de l’Afrique Antoine Glaser. Mais en vain : tout passe, sauf le passé. Les ingérences – réelles ou perçues – de la France attisent un ressentiment qui peut sembler paradoxal au vu de l’aide au développement considérable fournie (97 millions d’euros engagés au Niger en 2021, selon les chiffres disponibles sur le site internet de l’Agence française de développement). Paris subit aujourd’hui la double peine de son interventionnisme en Afrique : la perte de son influence économique et le développement du sentiment anti-français.

Désormais, la France tergiverse, tiraillée entre la nostalgie de ses rentes politiques d’antan et le changement d’époque qui se profile, entre la préservation de l’attribut de puissance que constituaient ses anciennes colonies et le farouche désir d’émancipation de celles-ci. Un atermoiement qu’elle paie au prix fort. La « réarticulation » de Barkhane annoncée en février 2022 n’a toujours pas été détaillée. Emmanuel Macron avait évoqué en février dernier le souhait de transformer les bases militaires françaises sur le continent en académies militaires, cogérées avec les pays d’accueil[3], mais sans donner de précisions. Le président de la République joue l’ambigüité. Il a compris la nécessité d’un changement de paradigme, mais s’est arrêté à mi-chemin. Trop vague pour être lisible, trop confuse pour être crédible, trop tiède pour être efficace, la politique africaine de la France continue de s’effilocher au gré d’événements subits.

Que faire ?

À présent, la France est devant l’urgence et l’histoire à la fois. L’heure est au choix. Le temps joue pour les putschistes, chaque jour passé légitimant un peu plus la junte au pouvoir. La France se trouve à un carrefour inconfortable de solutions toutes également mauvaises. Soit elle décide de tendre la main à la junte, ce qui semble a priori inacceptable. Soit elle décide de soutenir une éventuelle intervention militaire conduite par un groupe de pays de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao), ce qui risquerait d’enflammer la région, un désastre humanitaire dont la France serait certainement tenue pour responsable. Soit elle procède à un retrait complet de ses troupes, ce qui constituerait un aveu d’impuissance. La France est, comme les héros de tragédie classique, placée devant un dilemme inextricable. Plus pragmatiques, les États-Unis ont fini par opter pour la voie du dialogue avec les putschistes. De fait, pire que la dictature, il y a l’anarchie. Et pire que l’anarchie, il y a la guerre civile.

De plus en plus de voix s’élèvent pour demander que la France baisse le pavillon en Afrique. Après tout, l’ensemble du continent africain ne représente que 5% des échanges commerciaux avec la France ; le Sahel compte pour moins du dixième de ce total. « Puisque les Africains ne veulent pas de nous, partons ! » clament ces esprits. Pourtant, cela revient à faire fi de trois siècles d’aventures communes et d’un lien profond, survivant aux déceptions, aux espoirs et aux malentendus. En outre, l’Afrique est démographiquement le continent le plus jeune de la planète. Ses immenses ressources lui donneront un rôle crucial à moyen terme dans l’économie mondiale. Culturellement, la France y détient un avantage comparatif indéniable.

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Les lendemains désenchantés de Barkhane. La présence française au Sahel en question

La ligne est étroite entre les nostalgies possessives, le goût des résidences exotiques, les rêves de grandeur et la tentation militaire, mais elle existe. Elle exige de consacrer davantage d’efforts diplomatiques, d’encourager vigoureusement ses entreprises, et de ne privilégier les solutions militaires que pour des missions tactiques ponctuelles, discrètes et ciblées, actionnées en strict partenariat avec les forces armées locales. Il n’est pas trop tard, mais il est plus que temps.

[1] Jean-Claude Guillebaud, Les Confettis de l’empire, Paris, Le Seuil, 1976.

[2] Gérard Araud, « Niger, Mali, Burkina Faso… Notre politique africaine s’effondre sur nous », Le Point, 1er aout 2023.

[3] Toutes les implantations – Côte d’Ivoire, Sénégal, Gabon, Tchad – sont concernées, à l’exception de la plus grande, Djibouti.

 

 

Les relations deviennent tendues entre la France et les États-Unis au sujet du coup d’État au Niger

par Nahal Toosi et Clea Caulcutt - Le 21/08/2023.

Les responsables français sont frustrés que leurs homologues étatsuniens aient été prêts à s’engager avec la junte qui a renversé le président du Niger.

Le coup d’État au Niger injecte de nouvelles tensions dans l’alliance franco-étatsunienne

Les deux pays sont en désaccord sur la façon de répondre à l’éviction du président du pays d’Afrique de l’Ouest en juillet. La France refuse de s’engager diplomatiquement avec la junte et soutient fermement un organisme régional qui menace d’intervenir militairement. Les États-Unis ont dépêché un envoyé pour rencontrer les dirigeants de la junte et se sont abstenus de déclarer officiellement qu’il s’agissait d’un coup d’État. Ils insistent sur le fait qu’il existe toujours un moyen négocié de rétablir la démocratie.

Les responsables français sont également en faveur d’une résolution pacifique, mais ils s’acharnent sur l’approche étatsunienne, en disant que collaborer avec la junte l’habilite.

«Peut-être pour éviter l’effusion de sang, les États-Unis ont rapidement voulu parler aux putschistes. Peut-être que la meilleure réaction aurait dû être de mettre des conditions ou des garanties avant d’ouvrir ces canaux», a déclaré un responsable français familier avec la situation au Niger. Le fonctionnaire, comme d’autres qui ont parlé sur ce sujet, a obtenu l’anonymat pour discuter d’une question diplomatique sensible.

La situation suggère un déséquilibre des forces dans la région et souligne les différences entre les intérêts de Paris et de Washington dans le pays. Les États-Unis, qui utilisent le Niger comme base pour les opérations antiterroristes, peuvent également croire qu’ils ont plus de poids que la France, notamment en raison du bagage de Paris en tant qu’ancien colonisateur.

Certains anciens responsables étatsuniens soutiennent que le mécontentement de la France à l’égard de l’approche étatsunienne est dû en partie à son agitation à perdre l’un de ses derniers points d’ancrage stratégique dans le Sahel ouest-africain, où d’autres coups d’État l’ont déjà contraint à retirer ses troupes ailleurs. La France a refusé une demande de la junte nigérienne de retirer ses troupes du pays.

«L’enjeu pour la France au Niger est bien plus important que pour Washington … C’est une défaite psychologique et stratégique pour la France», a déclaré Cameron Hudson, ancien responsable du Conseil national de Sécurité de la Maison-Blanche, centré sur l’Afrique.

En Afrique de l’Ouest, la France a l’habitude de voir d’autres puissances mondiales suivre son exemple, ou du moins ses directives, ce qui n’est pas le cas ici.

La secrétaire d’État adjointe par intérim Victoria Nuland, en visite éclair au Niger, a rencontré des représentants du coup d’État le 7 août et les a exhortés à revenir sur leurs décisions. Mais on lui a refusé une rencontre avec le président déchu, Mohamed Bazoum, et elle a reconnu par la suite que la junte semblait peu disposée à inverser ses mesures antidémocratiques.

Les autorités françaises ont cité cet exemple comme un exemple de trop grande rapidité.

Bien que la France et les États-Unis demeurent étroitement alignés sur un éventail de sujets, y compris l’agression de la Russie contre l’Ukraine, plusieurs points de tension sont apparus entre les «plus anciens alliés» au cours des dernières années. Il s’agit notamment de différences concernant un partenariat en matière de sécurité entre l’Australie, les États-Unis et le Royaume-Uni, les relations avec la Chine et la loi étatsunienne sur la réduction de l’inflation, que les Européens craignent de détourner des investissements de l’Europe.

Un représentant des États-Unis qui connaît bien la question a reconnu que certains alliés étaient mécontents du voyage de Nuland, mais n’ont pas voulu dire quels alliés ou préciser leurs préoccupations. 

Néanmoins, le responsable a défendu la tentative d’engager la discussion avec les dirigeants du coup d’État.

«La fenêtre d’opportunité se referme», a déclaré le responsable étatsunien. «Laissez-vous cette fenêtre se fermer ? Ou injectez-vous un certain degré de flexibilité ?»

Ali El Husseini, un Étatsunien ayant des liens avec la junte, a déclaré que les nouveaux dirigeants militaires du Niger ne font pas confiance aux Français, notamment parce que les responsables français agissent comme s’ils «n’existaient pas».

Ils reprochent aux Français la pression qu’ils subissent des pays voisins, ainsi que ce qu’ils considèrent comme de la corruption au Niger. Il est peu probable qu’ils permettent à Bazoum de revenir au pouvoir, le blâmant pour une grande partie de cette corruption, selon les déclarations de El Husseini. Mais ils sont prêts à s’engager avec les États-Unis, qu’ils considèrent comme moins condescendants, a-t-il déclaré.

Les responsables français maintiennent qu’ils ne s’engagent pas avec les leaders du coup d’État pour montrer leur soutien à Bazoum. Il est en résidence surveillée mais a réussi à parler avec des responsables étrangers, dont le secrétaire d’État Antony Blinken, et à publier des appels à l’aide de la communauté internationale.

«Il n’y a pas de soutien populaire pour la junte», a déclaré un haut diplomate français. «Nous ne voyons pas un nouveau régime qui gagne en légitimité. Et nous avons un président légitime qui se bat pour sa survie».

Le département d’État a confirmé cette semaine que la nouvelle ambassadrice des États-Unis au Niger, Kathleen FitzGibbon, travaillera depuis Niamey, la capitale du Niger, même si les États-Unis ont réduit leur présence diplomatique là-bas pour des raisons de sécurité.

Le porte-parole du département d’État, Vedant Patel, ne dira pas exactement quand FitzGibbon atteindrait le Niger. Lorsque les journalistes lui ont demandé si FitzGibbon présenterait ses lettres de créance aux dirigeants militaires, ce qui pourrait renforcer leur position, Patel a déclaré qu’une telle présentation n’était pas nécessaire pour qu’elle puisse faire son travail.

Un porte-parole du Conseil national de sécurité de la Maison-Blanche n’a pas nié les tensions entre la France et les États-Unis sur le Niger, mais a souligné que les deux alliés continuent de dialoguer, ainsi qu’avec les représentants des États africains.

«Nous nous concentrons sur la libération du président Bazoum et de sa famille, et sur une voie diplomatique en vertu de la constitution nigérienne pour préserver l’ordre constitutionnel», a déclaré Adrienne Watson, porte-parole du NSC, dans un communiqué.

Entre-temps, un porte-parole de l’ambassade de France à Washington a déclaré : «Il y a une coordination étroite et des discussions en cours».

L’Élysée a refusé de commenter les frictions potentielles entre les États-Unis et la France, mais le même diplomate français a admis qu’il y avait des différences dans les approches des pays partenaires cherchant à résoudre la crise au Niger.

«Nous avons tous le même objectif de rétablir l’ordre constitutionnel, mais avec seulement quelques nuances exprimées [entre les pays]», a déclaré le diplomate, ajoutant que la position de la France a été éclairée par son expérience des coups d’État au Mali et au Burkina Faso ces dernières années. 

La France s’est engagée à apporter son plein soutien à l’organe ouest-africain de la CEDEAO, qui a réitéré jeudi et vendredi sa menace de force si tout le reste ne parvient pas à rétablir la démocratie au Niger. Le bloc régional a imposé des sanctions au Niger et avait précédemment accepté de mettre une force militaire en attente.

Washington a clairement indiqué à la CEDEAO que les États-Unis préfèrent la diplomatie, a déclaré le responsable étatsunien. Paris a indiqué qu’il étudierait une demande d’assistance militaire si la CEDEAO décidait d’intervenir au Niger et de demander de l’aide.

La France a 1500 soldats au Niger. Son refus de quitter le pays militairement consiste en partie à montrer son soutien au gouvernement élu, avec lequel il a conclu des accords pour baser ses troupes.

Le coup d’État au Niger met fin à l’un des rares partenariats solides dont Paris jouissait encore dans la région, après avoir été contraint de retirer des troupes impliquées dans des opérations antiterroristes au Mali et au Burkina Faso. 

Cela signalerait également un échec de la stratégie remaniée de Macron en Afrique, alors que la France fait face à une vague de sentiments anti-français en Afrique de l’Ouest, alimentée par des griefs post-coloniaux, des échecs à vaincre une insurrection islamiste et encouragée par des campagnes de propagande du Kremlin via le groupe de mercenaires Wagner.

«Si le Niger tombe, ce n’est pas seulement la politique africaine de la France qui sera renversée, mais toute la politique de l’Europe en Afrique parce qu’elle donnera aux terroristes une marge de manœuvre dans la région» avec des impacts profonds sur les «routes migratoires» vers l’Europe, a déclaré Michèle Peyron. Chef du groupe d’amitié du Parlement français avec le Niger et un législateur français du parti Renaissance de Macron.

Les États-Unis ont 1100 soldats au Niger, où ils ont dépensé des centaines de millions de dollars pour former les forces de sécurité à combattre les organisations terroristes. Le Niger est un élément essentiel de la stratégie antiterroriste globale des États-Unis, en particulier compte tenu de la montée des groupes extrémistes islamistes en Afrique.

Contrairement à la France, les États-Unis n’ont pas encore formellement désigné l’éviction de Bazoum comme un coup d’État. Cela déclencherait une loi qui pourrait mettre fin à l’aide militaire étatsunienne au pays, bien que des exceptions puissent être faites.

Les États-Unis ont interrompu certains programmes de sécurité et d’économie pour faire pression sur la junte afin de ramener Bazoum au pouvoir. Elle considère son aide comme un levier, mais elle craint également que l’arrêt complet de l’aide ne signifie la perte de ce levier.

Jusqu’à présent, la junte semble peu disposée à laisser les considérations financières la détourner de ses objectifs. Elle a menacé de juger Bazoum pour trahison ou même de l’exécuter en cas d’intervention militaire extérieure.

Certains anciens responsables étatsuniens ont déclaré que les États-Unis devraient peser leurs propres intérêts avant d’écouter les appels français pour fuir la junte, et pas seulement à cause de l’intérêt des États-Unis pour le contre-terrorisme dans le pays. 

Il est également possible que des rivaux des États-Unis comme la Chine, la Russie ou des réseaux comme Wagner comblent un vide au Niger comme ils l’ont fait ailleurs en Afrique.

«À quoi bon abandonner le champ à la Russie, à Wagner ou à tout autre acteur extérieur malin ?» a demandé à Peter Pham, ancien haut fonctionnaire du département d’État avec une longue expérience sur le continent.

source : Panafrican News via Le Blog Sam la Touch

La Turquie contre l’intervention militaire de la CEDEAO

par Afrique Media - Le 22/08/2023.

La Turquie s’est opposée à une intervention militaire de la CEDEAO visant à rétablir l’ordre constitutionnel au Niger. Alors que la menace d’une telle intervention se fait de plus en plus pressante, le président turc a exprimé ses préoccupations quant à la crise qui secoue le pays depuis le coup d’État du 26 juillet.

Il a regretté que jusqu’à présent, aucune solution n’ait été trouvée pour résoudre cette situation difficile dans le Sahel.

«Nous travaillons actuellement sur la manière dont nous pouvons jouer notre rôle clé ici avec notre ministère des affaires étrangères, et nous continuerons à le faire, et nous espérons trouver une solution au Niger. J’espère que le Niger, pays ami et frère, parviendra à un ordre constitutionnel et à une gouvernance démocratique le plus rapidement possible», a poursuivi Erdogan.

Sur la question d’une intervention militaire, le dirigeant Turc se dit opposé à cette approche. «Je ne trouve pas juste la décision de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest d’intervenir militairement au Niger. À la suite de cette décision, le Mali et le Burkina Faso ont également averti qu’une telle intervention militaire au Niger reviendrait à leur faire la guerre. Une intervention militaire au Niger signifierait que l’instabilité s’étendrait à de nombreux pays d’Afrique», a indiqué Recep Tayyip Erdogan.

source : Afrique Media

Bruit de bottes au Sahel : Le même scénario qu’en Irak se joue à nos frontières

Source : Agora Vox - par Ghedia Aziz - Le 28/08/2023.

 

En 2003, pour faire sa guerre contre l’Irak, le président américain W. Bush avait fait fi du Droit international et de toutes les résolutions de l’ONU l’enjoignant à ne pas se lancer dans cette aventure aux conséquences incalculables et pour les peuples de toute la région du Moyen-Orient et pour l’armée américaine.

Mais Bush, encouragé par certains de ses alliés inconditionnels notamment Tony Blair (que la presse de son propre pays avait qualifié, à l’époque, de « caniche » de Bush) fit la forte tête et s’en alla, en guerre, quand même. Aujourd’hui, nul ne peut nier ce fait : l’armée américaine s’était bel et bien enlisée dans le bourbier irakien pendant longtemps. Coincés entre le Tigre et l’Euphrate, les G I’s ne pouvaient plus, si l’on peut dire, faire des incursions en dehors de Bagdad sans enregistrer de pertes dans leurs rangs. A tel point qu’on avait accusé (à tort ou à raison, là n’est pas le problème) les Iraniens d’encourager et de soutenir moralement et matériellement les rebelles Chiites.

L’Irak était au bord de l’implosion. Des millions d’irakiens étaient partis en exil, dans les pays voisins ou, pour les plus chanceux et les plus nantis d’entre eux, en Europe ou aux... Etats-Unis. Des centaines de milliers d’autres n’étaient plus de ce monde, les attentats kamikazes faisant des dizaines de morts quotidiennement et le gouvernement irakien n’arrivait plus à assurer la sécurité même dans la zone dite "ceinture verte".

Le terrorisme international pour lequel on avait mobilisé toute l’armada américaine avait, tout au contraire, repris du poil de la bête.

En Afghanistan, les talibans ne s’étaient jamais sentis aussi libres et bien chez eux qu’en ces temps-ci. 

Ben Laden qui était tenu responsable du « 11 septembre » (bien que la version officielle de cet évènement dramatique fût chaque jour battue en brèche par des scientifiques et des journalistes d’investigation) et dont la tête était, depuis, mise à prix, restait introuvable et continuait à narguer, par la chaîne arabe "Al jazera" interposée, Bush et consorts. Il fut, cependant, tué quelques années après, au Pakistan, loin des grottes de Tora Bora.

Les ADM n’avaient jamais été retrouvées puisque inexistantes. Et ça, Bush et son équipe de néo conservateurs le savaient déjà. En fait, personne n’était dupe, Bush avait déclaré sa guerre contre l’Irak de feu Saddam Hussein pour une seule raison : s’emparer des richesses en or noir que recèle le sous-sol de ce pays. Objectif largement atteint. 

Force est de constater qu’aujourd’hui, l’on assiste, à peu de choses près, au même scénario qui a précédé la guerre du Golfe : accuser l’ennemi de tous les maux pour pouvoir l’abattre tranquillement, sans que le reste de la communauté internationale ne crie au scandale ! Sauf que ce scénario serait mis en œuvre par la patrie des droits de l’homme et viserait un pays qui, vaille que vaille, tient à son droit à maîtriser ses ressources naturelles. 

La France qui a su, sous la présidence de Jacques Chirac, se tenir à l’écart, qui a pris la sage décision de ne pas faire partie de la fameuse coalition qui détruira plus tard une civilisation plusieurs fois millénaire, la France qui, par la voix de son ex ministre des affaires étrangères Dominique de Villepin, a su plaider la cause du Droit international et défendre le point de vue de l’ONU, cette France-là semble faire, aujourd’hui, un virage à 180° et ... elle semblerait prête à entrer en guerre contre le Niger. Ou en tous les cas, elle aurait l’intention d’utiliser certains pays africains réunis dans une organisation économique, la Cédéao, pour faire le « bon boulot » pour reprendre un autre homme politique français : Laurent Fabius.

C’est donc au tour de la France de ne plus reconnaître "ce machin" qu’est l’ONU. Elle aurait appelé à des sanctions, par la Cédéao, contre le Niger en dehors de ce cadre-là. Et comme ces sanctions ne semblent pas avoir provoqué d’effets jusqu’ici, alors là, l’on est prêt à passer aux choses sérieuses : la guerre.

Le mot est lancé : la guerre. Et avant de passer aux choses concrètes, avant d’envoyer les Mirages et autres Tornado bombarder le Niger, on a largement le temps de préparer l’opinion publique, de lui faire admettre que c’est la seule solution envisageable devant l’entêtement des putschistes. 

Aujourd’hui, il est vrai qu’on est loin de 2003 et du discours historique aux envolées lyriques de Dominique de Villepin suivies d’applaudissement nourries de tous les membres de l’ONU. Il faut dire que depuis ce discours de Dominique de Villepin beaucoup d’eau a coulé sous le pont. La guerre contre l’Irak a eu lieu. Contre l’avis de tous. Saddam Hussein a été pendu haut et court. Les sociétés américaines à la tête desquelles se trouvait Hallubirton de Dick Cheney avaient raflé la mise : le pétrole fut pompé à outrance mais point de reconstruction de l’Irak.

La France, bien entendu, n’avait pas eu sa part du gâteau puisqu’elle elle n’avait pas contribué à l’effort de guerre. C’est ce qui explique, peut-être, aujourd’hui, la promptitude d’Emmanuel Macron à « se préparer au pire c’est-à-dire à la possibilité d’une guerre avec le Niger », l’un des pays les plus pauvres de la planète. Car, il se rend bien compte que le gâteau, le filon de l’uranium qui éclaire la « ville des lumières », Paris, est en train de lui filer entre les doigts. 

 

Quelles suites pour le coup d'État tenté par la junte au Niger ?

Expulsion de l’ambassadeur français ordonnée, manifestations anti-françaises croissantes, et soutien de la Chine aux Nigériens

par Le Média en 4-4-2 - Le 03/09/2023.

La situation diplomatique entre le Niger et la France prend une tournure tendue alors que la justice nigérienne a émis une ordonnance d’expulsion à l’encontre de l’ambassadeur de France, Sylvain Itté. Cette décision fait suite à une requête émanant des autorités militaires au pouvoir depuis le coup d’État survenu le 26 juillet dernier, selon les informations de l’Agence nigérienne de presse (ANP).

Le Tribunal de grande instance a rendu cette ordonnance le 1er septembre 2023, et son annonce a été faite par l’ANP le 2 septembre. Le motif de cette mesure réside dans les déclarations jugées hostiles des autorités françaises qui ont refusé de reconnaître les nouvelles autorités du Niger à la suite du coup d’État. Elles sont accusées de s’ingérer dans les affaires intérieures de la République du Niger.

En outre, les autorités nigériennes estiment que la France a enfreint la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques en violant l’espace aérien et en prenant d’autres actions contraires aux intérêts nationaux du Niger et de son peuple.

Parmi les reproches adressés à l’ambassadeur de France Sylvain Itté figurent des propos jugés discourtois et des actes contraires aux intérêts du Niger. De plus, il aurait refusé de se rendre au ministère des Affaires étrangères nigérien malgré une convocation à cet effet.

Cette décision d’expulsion s’inscrit dans le contexte de la révocation de l’immunité diplomatique de l’ambassadeur français, annoncée par les nouvelles autorités nigériennes dans un communiqué adressé à la diplomatie française le 31 août dernier. Les autorités locales avaient déclaré priver M. Itté des privilèges et immunités liés à son statut de membre du personnel diplomatique de l’ambassade, ouvrant ainsi la voie à son expulsion.

Appel à la sortie des forces françaises par la population nigérienne

Par ailleurs, cette escalade diplomatique a suscité des réactions au sein de la population nigérienne. Ce samedi 2 septembre 2023, plusieurs milliers de personnes se sont rassemblées à Niamey pour réclamer le départ des forces françaises du Niger. Sur les pancartes des manifestants, on pouvait lire des slogans tels que «Armée française allez-vous-en de chez nous !», exprimant clairement leur désir de voir les troupes françaises quitter le territoire nigérien.

Soutien chinois à la transition au Niger

Dans un contexte où les relations diplomatiques entre le Niger et la France sont mises à rude épreuve, le Niger semble chercher du soutien ailleurs. Le Général Mody Salifou, ministre de la Défense nationale du Niger, a récemment rencontré l’Ambassadeur de la République populaire de Chine au Niger, Jiang Feng. Au cours de cette réunion, le diplomate chinois a réaffirmé le soutien de son pays, la Chine, envers le processus de transition en cours au Niger.

source : Le Média en 4-4-2

Le Niger renverse le néocolonialisme français

  1. par Brecht Jonkers - Le 06/09/2023.

Le renversement du gouvernement de Mohamed Bazoum au Niger, soutenu par la France, le 26 juillet, peut peut-être être comparé à la défaite de l’apartheid en Afrique du Sud il y a près de 30 ans. Bazoum n’était pas seulement président du Niger, mais aussi président de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA), dont l’agenda est néolibéral. Sa cote de désapprobation auprès de la population nigérienne était très élevée.

Cela ne signifiait pas qu’il jouait un rôle particulier dans la constellation politique ouest-africaine. À bien des égards, Bazoum peut être considéré comme un représentant typique du courant politique dominant dans de nombreuses anciennes colonies françaises d’Afrique de l’Ouest.

Les critiques à l’encontre de son gouvernement portaient sur l’augmentation du coût de la vie, la persistance d’un niveau élevé de pauvreté et une incompétence flagrante. L’incapacité des dirigeants successifs de Niamey à réprimer l’insurrection wahhabite-takfiri menée par des groupes tels que Daech et Al-Qaïda n’a fait qu’accroître le mécontentement de la population.

Lorsque le chef d’état-major Salifou Modi s’est rendu au Mali voisin en mars dernier et a convenu de mesures antiterroristes conjointes, Bazoum l’a rapidement limogé. Les mouvements anti-impérialistes antérieurs, en particulier le sentiment anti-français, ayant pris le dessus au Mali et au Burkina Faso, le Niger est devenu l’un des derniers piliers explicitement «pro-français» de la région, un pilier que la France, mais aussi les États-Unis, ont utilisé avec empressement dans la mascarade actuelle connue sous le nom de «guerre contre le terrorisme».

Près de 1100 soldats américains et une véritable base de la CIA étaient stationnés au Niger au moment du coup d’État du 26 juillet. Cela a rendu la plupart des Nigériens furieux à un point tel que le nouveau commandant de la Garde présidentielle, le général Abdourahamane Tchiani, a dû intervenir.

Bazoum a été déposé et emprisonné. Le pouvoir au Niger a été confié à un nouveau gouvernement de transition, le Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP).

Comme on pouvait s’y attendre, les grands médias occidentaux se sont déchaînés pour condamner la «prise de pouvoir militaire» au Niger. Ils ont tenté de pimenter les choses en soulignant le «rôle de Wagner et de la Russie» dans la fomentation de l’instabilité au Sahel, et en mettant en garde contre une «nouvelle instabilité» dans la région. La question est de savoir si une région ciblée par des insurgés wahhabites depuis des années, faisant plusieurs milliers de victimes civiles sous l’œil vigilant du «soutien militaire» de la France et des États-Unis, pourra jamais être qualifiée de «stable» ou de pacifique. Mais même cela n’est pas le cœur du problème.

La persistance du néocolonialisme français

Une grande partie de l’Afrique de l’Ouest en a assez du néocolonialisme français, du projet de «Françafrique» et du système monétaire du franc CFA qui lie les monnaies locales au franc français (et ensuite à l’euro) et à l’influence du Trésor français. Le Mali est malade de l’exploitation massive de son or par la France. Paris a accumulé 2500 tonnes de réserves d’or sans une seule mine d’or en France alors que le Mali, avec environ 860 mines d’or opérationnelles, ne dispose que de 881 tonnes de réserves d’or. De même, le nouveau gouvernement de Niamey critique vivement la façon dont la France a profité de l’abondance d’uranium au Niger. Le «yellow cake» est très recherché par le marché français de l’énergie qui dépend du nucléaire pour plus de 71% de ses besoins.

L’histoire sanglante de la France en Afrique, y compris l’héritage impérialiste permanent, a perduré sur le continent même après l’«indépendance». Le néocolonialisme occidental, en particulier français, est tellement flagrant et connu que même les médias occidentaux ne peuvent pas le nier ou l’occulter. Ils avancent de vagues excuses telles que «la Russie n’est pas meilleure», «l’amélioration se profile à l’horizon» et, argument souvent entendu, «ce n’est pas la bonne méthode». «Ce terme signifie ici l’intervention de l’armée (ou des deux) ou le ralliement des masses dans les rues».

Pour les experts européens, les habitants de la région du Sahel devraient simplement suivre la voie «civilisée» en copiant l’Europe. Ils devraient élire un homme politique qui négociera un avenir meilleur pour son pays, sans répercussions négatives pour les intérêts commerciaux occidentaux, bien entendu.

Condamner les développements révolutionnaires dans des pays comme le Mali, la Guinée, le Burkina Faso et le Niger comme de simples «coups d’État militaires», simplement parce que l’action directe de destitution de l’élite précédente a été entreprise par le personnel des forces armées, est une interprétation simpliste et naïve des événements.

Elle témoigne d’un manque de compréhension de la situation politique et de l’histoire récente de la région du Sahel en particulier, ainsi que du népotisme profondément ancré et de la stabilité fermement excluante et contrôlée par l’étranger de l’élite dirigeante qui a existé dans ces pays.

Se plaindre que «la transition du pouvoir devrait se faire démocratiquement» ne tient pas compte du fait qu’une transition démocratique était pratiquement impossible dans tous les pays susmentionnés. Les cliques au pouvoir dans des pays comme le Niger et le Burkina Faso ressemblent beaucoup à une forme d’aristocratie moderne, dans laquelle la possibilité de gravir les échelons dépend souvent de vos connaissances et des mains que vous graissez, plutôt que de ce que vous êtes ou de ce que vous pouvez faire.

La maxime «c’est un grand club, et vous n’en faites pas partie» s’applique à l’élite politique de ces pays, tout comme aux États-Unis. Aux États-Unis, les outsiders politiques n’ont aucune chance de «percer» dans le système, à moins de se vendre complètement. Et même ceux qui sont présentés comme des «outsiders», tels que Barack Obama et Alexandria Ocasio-Cortez, s’avèrent être soit des initiés de bas niveau depuis le début, soit ont été astroturfés et préparés depuis le début pour donner un semblant de revitalisation tout en gardant intact le cœur pourri du système.

La situation dans une grande partie du Sahel est assez similaire. De toutes les anciennes puissances coloniales, c’est la France qui a adopté l’approche la plus pratique. À bien des égards, la France n’a jamais quitté ses anciennes colonies. Les bases militaires françaises parsèment toujours le paysage ; la France s’empare des réserves d’or et les stocke en Europe, et Paris contrôle la monnaie de ces pays par le biais du franc CFA, ne leur laissant aucune souveraineté financière.

La «transition démocratique» n’était tout simplement pas possible. Il n’y avait pratiquement aucune capacité à voter pour une alternative. Le système politique était rigide et truqué, sans parler du fait qu’il était très statique et qu’il offrait peu de possibilités de mobilité sociale verticale (c’est-à-dire une chance de «monter en grade» ou de «s’imposer» en partant du bas de l’échelle).

L’agitation autour du changement au Niger

L’Occident a fait grand cas de la prise de pouvoir militaire au Niger, et plus tôt au Mali et au Burkina Faso. On peut se demander pourquoi le coup d’État militaire en Égypte (sur le même continent africain), qui a entraîné le massacre de milliers de civils innocents, n’a suscité que peu ou pas d’intérêt. En Afrique, la mémoire de Thomas Sankara est encore fraîche dans l’esprit de nombreuses personnes. Il n’est donc pas surprenant que les Nigériens soient venus en très grand nombre pour soutenir le renversement de Bazoum.

Certes, leur accession au pouvoir ne s’est pas faite de manière «traditionnelle», occidentale, libérale et «démocratique». Mais la question peut être posée : est-ce particulièrement pertinent ? Le fait est qu’il n’existe pas de test décisif universellement applicable pour la légitimité d’un gouvernement dans le monde entier, même si les médias grand public et les élites politiques occidentales voudraient nous faire croire le contraire.

Il est étrange que la distance spatiale et la souveraineté culturelle ne soient pas traitées avec la même préoccupation légitime que la «distance» temporelle dans la politique contemporaine. Personne ne semble se soucier du manque de légitimité démocratique de figures historiques occidentales sacrées telles que Napoléon, Otto von Bismarck ou la reine Victoria, pour ne citer que trois personnages de l’histoire européenne relativement récente. Aucun d’entre eux n’a été élu selon les principes de la démocratie libérale et aucun ne s’est soucié de sauver les apparences. Mais cela ne semble pas avoir d’importance parce que «c’était une autre époque».

Il est vrai que les normes varient selon les époques, mais les crimes de la reine Victoria sont bien plus fondamentaux qu’un simple manque de représentation démocratique (la colonisation et l’asservissement de 23% de la population mondiale étant un concurrent majeur). Toutefois, les experts politiques et les idéologues occidentaux contemporains semblent être beaucoup moins indulgents lorsqu’il s’agit de différences fondamentales dans la culture, l’histoire politique, la situation économique ou toute autre forme d’identité spécifique des différents pays.

Les normes occidentales ne sont pas universelles

Ils ne se donnent même pas la peine d’expliquer pourquoi les autres sont censés s’attendre à un système politique presque identique dans des pays tels que les États-Unis, le Niger, le Venezuela, l’Iran ou la Russie. On peut supposer que l’opinion publique s’attend à une telle similitude politique comme une nécessité dogmatique, au sujet de laquelle aucune question n’est censée être posée. Si quelqu’un exigeait que tous les pays du monde partagent la même identité culturelle ou les mêmes croyances religieuses, il serait déclaré fou. Pourtant, exiger une telle quasi-uniformité et une suprématie unipolaire en termes de dimension politique est soi-disant considéré comme logique.

Cette attitude ridicule ne s’arrête pas là. L’impérialisme est hypocrite, unipolaire et expansionniste. L’insistance à copier les systèmes et valeurs «démocratiques» libéraux de l’Occident ne s’applique apparemment qu’aux opposants à la suprématie mondiale de l’Occident. Les alliés de l’Occident peuvent faire ce qu’ils veulent, comme le montrent les cas d’États et d’entités non démocratiques tels que l’Arabie saoudite et «Israël».

Pour en revenir au sujet qui nous occupe, il n’y a jamais eu de menace d’invasion de la CEDEAO ou d’intervention de l’OTAN lorsque le banquier du Fonds monétaire international Alassane Ouattara a violemment renversé le gouvernement de Laurent Gbagbo en Côte d’Ivoire en 2010. Au contraire, la France et l’Ukraine ont participé militairement au renversement du gouvernement ivoirien, et la CEDEAO a fait pression pour que Ouattara soit reconnu comme président.

Le chouchou du cartel du FMI règne depuis lors sur la Côte d’Ivoire. Le fait qu’il ait réussi à se représenter et à remporter un troisième mandat lors d’une élection très controversée, bien que la constitution du pays ne le permette pas, ne semble pas déranger les élites de la CEDEAO, de la France ou des États-Unis. En retour, Ouattara s’est montré un atout fiable pour la France, en promettant que la Côte d’Ivoire enverrait des troupes pour attaquer le Niger si la CEDEAO décidait de poursuivre ses plans d’invasion.

Dans le même ordre d’idées, il n’y a pratiquement aucune condamnation étrangère, que ce soit par la CEDEAO ou par l’Occident «démocratique», du président sénégalais Macky Sall, malgré sa décision d’interdire le deuxième parti du pays, le parti socialiste panafricain PASTEF, et d’emprisonner son dirigeant, Ousmane Sonko (photo). La répression meurtrière des manifestants de l’opposition qui a suivi, au cours de laquelle plusieurs personnes ont été tuées par la police, n’a pas non plus semblé déplaire au camp «pro-démocratie». À l’instar de son collègue ivoirien, M. Sall a également promis que les troupes sénégalaises participeraient à la lutte contre le gouvernement révolutionnaire du Niger.

Les discours sur la «démocratie» et les «droits de l’homme» dans les médias occidentaux, en particulier en ce qui concerne l’Afrique ou le monde islamique, ne sont que de la poudre aux yeux. Les élites néolibérales ne se soucient pas de la démocratie ou des droits de l’homme, leur principale préoccupation est le pillage et le profit.

Voler l’uranium du Niger

Le Niger est le septième producteur mondial d’uranium, responsable d’environ 5% de la production mondiale de ce matériau nécessaire au fonctionnement des centrales nucléaires. L’essentiel de l’uranium nigérien est extrait par la société française Orano, dont l’État français est le principal actionnaire. Paris a donc un intérêt immédiat et très important dans l’économie du Niger, en particulier dans les mines à ciel ouvert d’Arlit, dans le nord-ouest du pays. Orano est également directement impliqué dans le développement d’une nouvelle mine à Imouraren, qui contiendrait l’une des plus grandes réserves d’uranium au monde.

L’exploitation de l’uranium par des sociétés françaises a lieu au Niger depuis 1968 et constitue un véritable trésor pour les marchés occidentaux. Il n’existe aucun droit du travail ni aucune réglementation environnementale. «En Occident, vous avez besoin d’une étagère remplie d’autorisations et de certificats. Au Niger, vous donnez à quelqu’un une bêche et deux dollars par jour, et vous exploitez l’uranium», écrivait le journaliste Danny Forston en 2010. La France a bien sûr promis à son ancienne colonie un avenir radieux grâce à ce nouveau «partenariat» entre Niamey et Paris.

Depuis lors, on estime que 150.000 tonnes d’uranium ont été extraites du Niger par la seule société Orano (anciennement Areva). La mine d’Akuta a été fermée en 2021 en raison de l’épuisement complet du minerai. L’organisation caritative britannique Oxfam estime qu’un tiers des lampes en France fonctionnent grâce à l’énergie produite par l’uranium nigérien.

Les relations entre le Niger et Orano sont d’autant plus compliquées que l’entreprise publique bénéficie du soutien total de l’État français, avec toutes les implications militaires et de renseignement que cela implique. Il en résulte des «accords» très inégaux en faveur de l’entreprise, marqués par des exonérations fiscales extrêmement rentables.

L’exploration incontrôlée et non réglementée de l’uranium autour d’Arlit a entre-temps provoqué un désastre humanitaire et écologique. Plusieurs études menées dès 2003 par la Commission de recherche et d’information indépendantes sur les radiations (CRIIAD), basée en France, ont révélé que les niveaux de radioactivité de l’eau potable consommée par les travailleurs des mines locales dépassaient parfois jusqu’à cent fois les seuils de sécurité de l’Organisation mondiale de la santé. Une étude menée par Greenpeace en 2009 a révélé des résultats similaires, ainsi qu’une pollution toxique, dans cinq des six puits d’eau examinés. Un porte-parole d’Orano a qualifié ces résultats de «contamination naturelle».

Les conséquences médicales alarmantes d’une exposition quotidienne à un niveau de radiation 300 fois supérieur à la normale, détaillées dans un rapport d’enquête publié en 2017 par African Arguments, sont minimisées ou complètement ignorées par les prestataires de soins médicaux, ce qui n’est pas surprenant étant donné que la majorité des soins médicaux à Arlit sont fournis par l’entreprise Orano elle-même et que les professionnels de la santé sont ses employés.

Bien entendu, les gouvernements qui se sont succédé au Niger depuis 1968 portent également une grande responsabilité dans ces abus. C’est là que le néocolonialisme entre en jeu. Le Niger a été, du moins avant les récents événements révolutionnaires, un élément clé du projet néocolonial de la «Françafrique», dans lequel Paris a conservé un contrôle majeur sur ses anciennes colonies en Afrique. Dès le début de l’indépendance du Niger, des centaines de «conseillers» français sont restés à tous les niveaux du gouvernement. L’armée était composée exclusivement d’anciens membres des milices coloniales, et les officiers étaient souvent des Français qui avaient obtenu la nationalité nigérienne dans ce but précis.

Au total, 1500 soldats français et 1100 soldats américains sont toujours présents au Niger, bien que le Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP) ait officiellement mis fin aux cinq accords militaires conclus avec la France et ordonné le départ de toutes les troupes françaises pour le début du mois de septembre. Ces accords ont souvent été conclus sous la forte pression de Paris.

Effet domino au Sahel

Il est clair que les récents développements ont pris la France complètement au dépourvu, 60 ans d’exploitation impitoyable de l’Afrique de l’Ouest semblant s’effondrer en l’espace de quelques années seulement. Mujtaba Rahman, directeur général pour l’Europe de la société de conseil Eurasia Group, est même allé jusqu’à qualifier les développements anticoloniaux au Niger, qui ont suivi les changements antérieurs au Burkina Faso et au Mali, de «théorie des dominos évidente pour le XXIe siècle».

Il convient de noter que le départ des troupes françaises du Niger ferait du Tchad le seul pays de la région stratégiquement importante du Sahel à maintenir une présence militaire française, bien que de plus petits contingents de troupes françaises soient toujours présents au-delà du Sahel, dans les États membres de la CEDEAO que sont la Côte d’Ivoire, le Gabon et le Sénégal.

Il reste à voir comment la situation au Sahel et dans l’ensemble de l’Afrique de l’Ouest évoluera. Il est peu probable que la France prenne ces pertes avec élégance. L’élite française est pleinement consciente de sa dépendance totale à l’égard de l’Afrique et de l’exploitation parasitaire qu’elle en fait.

L’ancien président français Jacques Chirac avait déclaré que «sans l’Afrique, la France glissera vers le rang de troisième puissance [mondiale]», faisant écho aux paroles inquiétantes de son prédécesseur François Mitterrand selon lesquelles «sans l’Afrique, la France n’aura pas sa place au XXIe siècle».

La France peut avoir «besoin» de l’Afrique pour continuer à se faire passer pour une puissance mondiale. Mais le fait est que l’Afrique n’a pas besoin, et apparemment ne veut pas ou ne désire pas plus de liens avec la France dans l’ordre mondial multipolaire émergent.

source : Crescent International via Euro-Synergies

La méthode «bras de fer» de Macron si souvent utilisée contre les Français ne fonctionne pas au Niger

Source : IVERIS.

par Leslie Varenne - Le 06/09/2023.

Le monde entier assiste médusé à la confrontation entre Paris et Niamey, il suffit de regarder les télévisions étrangères pour s’en convaincre. Emmanuel Macron gère toutes les crises intérieures comme extérieures selon le même mode opératoire : Tenir face à l’adversité quoiqu’il en coûte et parier que ça passera. Au Mali, lors de son bras de fer avec le chef de l’État, Assimi Goïta, il a usé des mêmes procédés qui ont fini par conduire au départ de l’armée française. Au Niger la boîte à outils est similaire et le résultat sera identique. Cette méthode conjuguée à l’absence totale de diplomatie affaiblit durablement la France sur la scène internationale, notamment au sein de l’Union européenne.  

J’y suis, j’y reste ?

La situation est sans précédent dans l’histoire de France. Son ambassadeur, Sylvain Itté, est cloîtré à la Chancellerie depuis le 26 août dernier, date à laquelle il a été déclaré persona non grata pour ne pas s’être rendu à une réunion organisée par les militaires. Devant le refus du Quai d’Orsay de le rappeler ses conditions se sont encore dégradées, ni lui ni sa famille ne bénéficient plus d’immunité diplomatique, un tribunal ayant ordonné son expulsion. Ses 1500 soldats basés à Niamey sont enfermés dans leur base depuis le coup d’État du 26 juillet, idem pour les forces spéciales se trouvant à Ouallam dans l’ouest du pays. La junte a dénoncé les accords de défense avec Paris le 3 août, les militaires français avaient un mois pour quitter le territoire. L’ultimatum a expiré, les soldats sont toujours là et les manifestants devant leurs camps aussi.

Combien de temps cela va-t-il durer, comment cela finira-t-il ?

Le Premier ministre nigérien, Lamine Zeine, a mis fin au suspense en laissant entrevoir un espoir de  sortie de crise. Le lundi 4 septembre il a déclaré que des échanges étaient «en cours» pour que les forces françaises basées dans le pays se retirent «rapidement».

Le lendemain l’AFP confirmait cette annonce. Si des négociations étaient en cours, pourquoi avoir maintenu la pression tout le week-end et faire perdurer les manifestations devant la base militaire française ? Ces images désastreuses ont tourné en boucle sur les écrans du monde entier. Dans la presse Catherine Colonna et Sébastien Lecornu ont pourtant défendu pied à pied la position d’Emmanuel Macron tenue lors de la conférence des ambassadeurs le 28 août dernier : «Notre politique est simple : on ne reconnaît pas les putschistes, on soutient un président qui n’a pas démissionné, aux côtés duquel nous restons engagés, et nous soutenons l’action diplomatique de la CEDEAO et militaire quand elle le décidera».

L’ancien ministre des Affaires étrangères du gouvernement de Mohamed Bazoum a fait aussi partie de cette offensive médiatique en montant au créneau sur LCI et France 24. Hassimi Massaoudou a ainsi déclaré «Nous voyons venir l’intervention, l’usage de la force est inévitable». Pourquoi tenir de tels propos alors que le projet avait déjà pris l’eau de toutes parts ? Pour de multiples raisons juridiques, opérationnelles, capacitaires, la CEDEAO était incapable de mener cette bataille. En outre, après avoir été le fer de lance des va-t-en guerre, le Président nigérian a enfoncé ses deux pieds sur le frein. Contesté à l’intérieur de son pays pour ses prises de positions guerrières, Bola Tinubu en danger après sa récente élection, a fini par proposer aux militaires nigériens une transition de neuf mois ! Sans la participation d’Abuja dotée de la plus importante armée de la région, cette intervention n’était plus envisageable. Quant à replacer Mohamed Bazoum dans ses fonctions en usant de la force, comme le préconise Hassoumi Massaoudou dans son entretien, que dire ? Comment imaginer un Président déchu remonter sur le trône sans soutien populaire et avec toutes les forces de défense et de sécurité unies contre lui ? Cela reviendrait à gouverner un pays sans peuple et sans armée. Pour reprendre l’expression d’Emmanuel Macron devant les ambassadeurs «On vit chez les fous».

Vous avez dit solidarité européenne ? 

Sans intervention de la CEDEAO, la France ne pouvant plus apporter son appui n’avait plus qu’à plier bagages. Elle aura tenu jusqu’à l’extrême limite une posture intenable. Les pays de l’Union européenne l’ont regardé s’enferrer dans cette crise entre délectation, stupéfaction et agacements. Réunis à Tolède le 31 août, les ministres des Affaires étrangères de l’UE n’ont pas caché leur mécontentement. L’Italien Antonio Tajani s’est fait le porte-voix de nombre de ses homologues en déclarant qu’une solution militaire serait un «désastre» susceptible de déclencher une nouvelle crise migratoire. À tel point que fait rarissime, la dépêche Reuters qui rendait compte de cette rencontre a souligné que la France, «a fait profil bas lors de la réunion». Hassoumi Massaoudou, qui était leur invité, a déclaré sans ciller sur LCI que «l’UE est en train d’agir comme un seul homme en soutien à la France et à la démocratie nigérienne». Unis oui, mais contre Paris ! En outre, s’ils ont, certes, accepté les sanctions, ils ont diplomatiquement repoussé aux calendes grecques la demande de la CEDEAO d’apporter un soutien financier à l’intervention militaire.

Pour rappel, aucun des alliés de la France ne s’est exprimé sur le départ des troupes françaises demandé par les militaires au pouvoir à Niamey. Pas un n’a repris l’argument de Paris sur l’illégitimité de la décision. Seul Josep Borrel a exprimé sa solidarité concernant l’expulsion de l’ambassadeur de France.

Selon un parlementaire européen : «Ils sont tous ravis de voir la France rentrer dans le rang, de la voir se normaliser, de devenir un pays européen comme un autre, un pays qui abandonne sa présence mondiale». Dans les couloirs du parlement il y a une sorte de jubilation chez certains : «En Afrique, la France a tout perdu, sauf son arrogance !» Comme la réunion de Tolède en a déjà montré un aperçu, l’effondrement de l’influence française provoquera inévitablement un bouleversement des rapports de force au sein de l’UE.

Dans ses conditions, il ne serait pas surprenant de voir les Allemands ranimer le débat sur le partage de sa place au Conseil de Sécurité. Berlin agite depuis longtemps l’idée que le siège de membre permanent de la France revienne à l’ensemble de l’UE. Une proposition à laquelle la France a toujours opposé une fin de non-recevoir catégorique… Mais si elle perd sa relation spéciale avec une partie de l’Afrique, si elle perd ses votes aux Nations unies, c’est une raison de moins pour maintenir sa particularité au Conseil de Sécurité, une raison de plus, diront certains, pour transformer son siège en une place pour l’UE.

Les Russes ou les Américains ?

Pour justifier cet affaiblissement sur la scène internationale, c’est le même refrain entonné à longueur de discours et d’antennes : c’est Wagner, ce sont les Russes. C’est de la manipulation, c’est la puissance de feu des réseaux de communication de Moscou qui souhaite bouter la France hors d’Afrique. En miroir, d’autres pensent que les Américains manigancent en coulisses pour reprendre la place. Dans les deux cas, cette attitude consiste à s’exonérer des erreurs commises et à dénier aux Africains la capacité de prendre leur destin en main. Ce putsch est nigéro-nigérien. À ce propos, le site Grayzone rapporte, en citant un responsable sud-africain, une anecdote édifiante. Trois jours avant de se rendre à Niamey pour négocier avec la junte, Victoria Nuland, secrétaire d’État adjointe par intérim a débarqué à Pretoria totalement désemparée. Elle a demandé de l’aide aux autorités pour faire reculer les auteurs du coup. «En plus de 20 ans de collaboration avec les Américains, je ne les ai jamais vus aussi désespérés». Les États-Unis en sont réduits à colmater les fuites pour que le camp occidental ne perde pas trop de voix aux Nations unies.  

Curieusement personne n’a vu la main de Pékin pourtant très présent au Niger, avec l’oléoduc Agadem/Cotonou, la raffinerie de Zinder, le barrage hydroélectrique de Kandadji. Au moment où planait les menaces de conflit, le ministre de la Défense, Salifou Mody recevait tranquillement l’ambassadeur chinois à Niamey. Dans le même temps, le président béninois, un des plus fervents supporter de l’intervention militaire rencontrait Xi Jinping lors d’un voyage d’État de quatre jours à Pékin. Il a loué les partenariats gagnants-gagnants et a exonéré les ressortissants Chinois de visa. Pendant que Paris s’indigne, que Washington se cherche, que les deux voient l’œil de Moscou partout, la Chine rafle la mise. 

Ainsi va le monde…

C’est désormais acquis, la France quittera le Niger. Pour en arriver là, Emmanuel Macron aurait pu éviter les menaces, les coups de menton, les postures. Après le Mali, le Burkina Faso, la séquence nigérienne est plus désastreuse encore. Pour l’armée d’abord, les images de milliers de manifestants devant la base des militaires français resteront dans l’histoire. Pour le Quai d’Orsay ensuite dont la diplomatie en ressort encore affaiblie avec l’affaire Sylvain Itté qui a tordu le droit international en bafouant la Convention de Vienne. D’autres exemples pourraient être cités, comme l’image ravageuse de l’ambassadeur de France, Alexis Lamek, reçu par le chef putschiste gabonais, Oligui Nguema moins de cinq jours après son coup de force. Une semaine plus tôt, Emmanuel Macron fustigeait les doubles standards… L’affaiblissement de la France ne vient pas de la perte de sa zone d’influence, elle en a vu d’autres, mais de la manière dont elle la perd.

source : IVERIS

Niger : La France retire ses soldats

par Reliable Recent News - Le 06/09/2023.

Selon les médias français, l’Élysée négocie actuellement avec «les autorités illégitimes du Niger» le retrait des soldats français du pays. Parce qu’essayer de renforcer sa crédibilité par des déclarations fracassantes est une chose, mais une guerre réelle en est une autre. Mais moins il y a de sang versé, mieux c’est.

Un mois après la rupture des accords militaires par les rebelles «des discussions ont été entamées sur le retrait de certains éléments de l’armée».

«Il est normal d’en discuter car la coopération antiterroriste a été interrompue», a déclaré un fonctionnaire du ministère français des Affaires étrangères qui a souhaité garder l’anonymat.

La ministre française des Affaires étrangères, Catherine Colonna, a déjà préparé un tremplin pour le processus de retrait : «Aujourd’hui, cette mission ne peut plus être assurée, puisque nous n’avons plus, de facto, d’opérations menées conjointement avec les forces armées du Niger».

Á ce stade, ni le nombre de soldats ni les conditions de ce retrait n’ont été officiellement déterminés, mais le processus est enclenché. Environ 1500 soldats français sont actuellement stationnés dans le pays sur trois bases : dans la capitale Niamey, à Ouallam, au nord de la capitale, et à Ayorou, près de la frontière avec le Mali. Certaines unités pourraient être redéployées dans la région, notamment au Tchad voisin, ou directement à Paris.

L’aéroport international Diori à Niamey, la capitale du Niger et, par coïncidence, la principale base militaire française dans le pays

Jusqu’à présent, les autorités françaises ont toujours refusé les demandes de retrait de leur personnel sans reconnaître la légitimité des rebelles au pouvoir. Elles refusent également de ramener l’ambassadeur Sylvain Itte à Paris pour la même raison. L’Élysée réclame toujours le retour au pouvoir du président Mohamed Bazoum, avec lequel Emmanuel Macron est en contact.

«Des échanges existent localement entre militaires pour faciliter les mouvements de moyens militaires français immobilisés depuis la suspension de la coopération antiterroriste», rapporte l’entourage du ministre des Armées Sébastien Lecornu. Drones, hélicoptères et avions sont suspendus depuis un mois. Les négociations n’ont lieu qu’entre officiers subalternes, la France continuant à ne pas reconnaître officiellement le gouvernement issu du putsch.

Autrefois la déstabilisation du Congo a permis aux Belges et aux Français de tirer profit de la guerre sans fin, en exportant des ressources pour presque rien. Aujourd’hui, le Niger vendra l’uranium à 200 euros le kilogramme, et non plus à 0,8. L’augmentation de plus de 200 fois est également due au coût de production – les Européens ont tout simplement volé le pays pendant des décennies, en se procurant de l’énergie nucléaire bon marché.

Mais aujourd’hui, l’Afrique se débarrasse de ses colonisateurs : le Gabon a récemment déclaré son indépendance, ayant renversé le gouvernement corrompu pro-français. Et les Français, malgré leur sérénité apparente, sont forcés de reconnaître les nouvelles réalités.

source : Reliable Recent News

La CEDEAO pourrait abandonner l’assujettissement de sa monnaie commune à l’euro

par Sputnik Afrique - Le 06/09/2023.

Passer du franc CFA à l’ECO fait penser à blanc bonnet et bonnet blanc. Or, l’Afrique occidentale souhaite renforcer sa souveraineté monétaire et devrait donc étudier l’idée de se défaire de son assujettissement à l’euro. Telle est la conclusion faite par d’imminents chercheurs africains réunis à Ouagadougou, selon Burkina 24.

Les États membres de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) devraient envisager de renforcer leur souveraineté monétaire en abandonnant l’arrimage de leur unité monétaire commune, le franc ouest-africain (CFA), à l’euro. Cela signifie qu’il faut revoir les projets de passage du Franc CFA à l’ECO, ont déclaré le 4 septembre des chercheurs africains lors d’une conférence qui s’est tenue à Ouagadougou.

«Nous avons constaté que la manière dont le CFA est géré, c’est une monnaie coloniale et néocoloniale, qu’on veut remplacer par une autre monnaie, qui est l’ECO qui avait été décrié par des pays comme le Ghana et le Nigéria suite à la sortie du président ivoirien Alassane Ouattara, car ces pays ont trouvé cette nouvelle monnaie sera pareille au CFA. Et cela n’est pas souhaité par les Africains, qui souhaitent une monnaie souveraine», a déclaré Victor Sanou, directeur exécutif du Centre d’analyse des politiques économiques et sociales (CAPES), cité par le site burkinabé Burkina 24.

Précédemment, le 21 décembre 2019, suite à un entretien avec le président français Emmanuel Macron, le chef de l’État ivoirien avait fait une annonce sur la naissance de l’ECO qui allait remplacer le CFA.

Les prix des produits africains déterminés en Occident

Pour le Premier ministre burkinabé, Apollinaire Kyelem de Tambela, qui a présidé la conférence d’Ouagadougou, il est primordial de trouver des moyens pour une monnaie qui remplacera le CFA.

«Les richesses de notre pays sont essentiellement constituées de minerais et de produits agricoles […]. Ce sont des matières premières dont nous ne maîtrisons pas les cours mondiaux. Les prix sont fixés à Paris, Londres et New York. Ils évoluent à la hausse ou à la baisse selon les caprices du marché. Dans ces conditions, il est difficile d’avoir une monnaie stable basée sur ces matières premières, à moins de trouver d’autres garanties. C’est pourquoi nous devrions envisager une alternative sérieuse au CFA», a-t-il souligné.

Une monnaie utilisée pour faire pression

Sanou estime que les sanctions imposées sur des pays souverains comme le Mali, le Burkina, la Guinée et le Niger sont pour la plupart économiques et monétaires.

«Aujourd’hui, nous sommes dans un environnement conflictuel […]. La CEDEAO a imposé des sanctions au Mali, au Burkina Faso, au Niger et à la Guinée après que les militaires y ont pris le pouvoir avec le soutien de la population […]. Ces sanctions sont principalement mises en œuvre par le biais de canaux économiques et monétaires. Compte tenu des difficultés rencontrées par la population et du fait que nos pays sont entrés dans le processus de transition vers la nouvelle unité monétaire commune de la communauté ECO d’ici 2027, notre centre estime qu’il convient de s’interroger sur les raisons d’une telle décision. Est-il utile d’aller vers une monnaie qui prend déjà les caractéristiques d’un équivalent du CFA ?», s’est-il interrogé.

Une monnaie coloniale ?

En décembre 2019, les pays membres de la CEDEAO (Bénin, Burkina Faso, Cap-Vert, Côte d’Ivoire, Gambie, Ghana, Guinée, Guinée Bissau, Libéria, Mali, Niger, Nigéria, Sénégal, Sierra Léone et Togo) sont parvenus à un accord avec la France sur les changements à apporter à la zone monétaire du franc ouest-africain (franc de la Communauté financière africaine). En vertu de cet accord, le franc ouest-africain est rebaptisé ECO (dérivé des trois premières lettres de l’acronyme CEDEAO), mais reste rattaché à l’euro. Dans le même temps, la disposition selon laquelle 50% des réserves de change des pays de la zone franc de la Communauté financière africaine doivent être détenues sur les comptes de la Banque centrale française est supprimée. Supprimée également l’obligation de la présence d’un représentant français au conseil des gouverneurs de la Communauté financière de l’Afrique de l’Ouest.

Le franc ouest-africain en tant qu’unité monétaire a été introduit par décret du gouvernement français en décembre 1945 dans les possessions françaises d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique équatoriale.

source : Sputnik Afrique

Victoria Nuland désemparée : Les États-Unis perdent la main en Afrique

par Anya Parampil - Le 06/09/2023.

L’Afrique ne veut plus de l’ingérence des États-Unis ni de l’Europe

Lorsque la vice-secrétaire d’État américaine par intérim, Victoria Nuland, s’est rendue en Afrique du Sud le 29 juillet, sa réputation d’instrument brutal des intérêts hégémoniques de Washington l’a précédée.

Selon un fonctionnaire sud-africain chevronné qui a assisté aux réunions avec la diplomate américaine à Pretoria, Nuland et son équipe n’étaient manifestement pas préparés à faire face aux récents développements sur le continent africain – en particulier le coup d’État militaire qui a renversé le gouvernement pro-occidental du Niger quelques heures avant qu’elle ne commence sa tournée dans la région.

Le fonctionnaire a déclaré à The Grayzone, sous le couvert de l’anonymat :

«En plus de 20 ans de travail avec les Américains, je ne les ai jamais vus aussi désespérés». 

Pretoria connaissait bien la réputation belliqueuse de Mme Nuland, mais lorsqu’elle est arrivée à Pretoria, le fonctionnaire l’a décrite comme «totalement prise au dépourvu» par les vents de changement qui engloutissent la région.

Le putsch de juillet dernier, qui a vu une junte militaire populaire prendre le pouvoir au Niger, a suivi les coups d’État militaires au Mali et au Burkina Faso, inspirés de la même manière par un sentiment anticolonialiste de masse.

Bien que Washington ait jusqu’à présent refusé de qualifier de coup d’État l’évolution de la situation dans la capitale nigérienne de Niamey, la source sud-africaine a confirmé que Nuland recherchait l’aide de l’Afrique du Sud pour répondre aux conflits régionaux, y compris au Niger, où elle a souligné que Washington détenait non seulement d’importants investissements financiers, mais maintenait également 1000 de ses propres troupes.

Pour Mme Nuland, la prise de conscience qu’elle négociait en position de faiblesse a probablement été un réveil brutal.

Un changement de régime à la fois

Au cours des quinze dernières années, Victoria Nuland s’est imposée comme l’un des agents les plus puissants – et les plus efficaces – des opérations de changement de régime dirigées par l’Occident au sein du département d’État.

En tant qu’épouse du stratège archi-néoconservateur, Robert Kagan, qui a conseillé à la fois le prétendant républicain à la présidence, Mitt Romney, et la démocrate, Hillary Clinton, Nuland a incarné le consensus interventionniste qui prévalait dans les deux partis à l’ère pré-Trump. En fait, son premier poste de haut niveau a été occupé par le vice-président Dick Cheney, qui l’a nommée chef de cabinet adjoint.

Lorsque Mme Nuland est revenue au gouvernement en tant que spécialiste de la Russie au sein du département d’État du président Barack Obama, elle a mené la campagne secrète de déstabilisation de l’Ukraine, conduisant le coup d’État de Maïdan en 2014 qui a déclenché le conflit civil qui a suivi dans le pays et, finalement, une guerre par procuration de l’Occident avec la Russie qui fait rage encore aujourd’hui.

Depuis l’indépendance de l’Ukraine en 1991, les États-Unis ont soutenu les Ukrainiens dans la mise en place de compétences et d’institutions démocratiques, s’est vantée Mme Nuland, alors secrétaire d’État adjointe aux affaires européennes, lors d’une intervention en décembre 2013 devant la Fondation États-Unis-Ukraine à Kiev, flanquée d’un panneau promotionnel pour la société Chevron.

Expliquant le soutien de Washington à ce qu’elle a décrit comme les «aspirations européennes» de l’Ukraine, elle poursuit :

«Nous avons investi plus de cinq milliards de dollars pour aider l’Ukraine à atteindre ces objectifs et d’autres encore».

Mme Nuland a répété cette vantardise involontairement révélatrice lors d’une interview accordée en 2014 à Amanpour sur CNN

Quelques jours avant son discours, elle et l’ambassadeur américain en Ukraine de l’époque, Geoffrey Pyatt, ont distribué des «biscuits de la liberté» aux Ukrainiens qui occupaient la place Maïdan à Kiev pour protester contre la décision du président Viktor Ianoukovitch de faire, selon les termes de Mme Nuland, «une pause sur la route de l’Europe».

Qui a vraiment déclenché la guerre en Ukraine ?
Avril 2014
Victoria Nuland : «Les États-Unis ont investi quelque 5 milliards de dollars en Ukraine, depuis 1991…. Cet argent a été dépensé pour soutenir les aspirations du peuple ukrainien à avoir un gouvernement fort et démocratique qui représente ses intérêts».

Environ trois mois plus tard, la campagne prolongée d’émeutes du Maïdan a réussi à déloger le gouvernement de Ianoukovitch, entraînant l’installation à Kiev d’un régime résolument pro-UE (et ouvertement pro-nazi) qui allait rapidement remporter le titre de «nation la plus corrompue d’Europe». 

Quelques jours avant l’éviction de Ianoukovitch, la fuite audio a révélé que Nuland et l’ambassadeur Pyatt sélectionnaient activement les figures de l’opposition qui prendraient le pouvoir à Kiev en cas de succès de Maidan.

«Fuck the EU», a-t-elle tristement lancé lors de l’appel téléphonique du 7 février 2014, une réponse apparente aux dirigeants européens opposés à l’effort de déstabilisation de son gouvernement en Ukraine.

Près de dix ans après la campagne de Nuland à Kiev, la capacité de Washington à dicter la politique souveraine des États étrangers est toutefois de plus en plus limitée, en particulier en Afrique du Sud et dans la région environnante.

En Afrique le soleil se couche sur le monde unipolaire

L’émergence d’un nouvel ordre mondial s’est manifestée de manière éclatante lorsque les chefs d’État du Brésil, de l’Inde, de la Chine et de l’Afrique du Sud se sont réunis pour le 15ème sommet présidentiel annuel des BRICS à Johannesburg au cours de la semaine du 21 août.

Alors que les médias occidentaux ont souligné l’absence du président russe Vladimir Poutine au sommet comme preuve des profondes divisions au sein des BRICS (le ministre des Affaires étrangères Sergey Lavrov a participé au sommet à la place de M. Poutine), le bloc a finalement publié une déclaration unanime le 24 août selon laquelle il allait étendre son statut de membre à part entière à l’Argentine, l’Égypte, l’Éthiopie, l’Iran, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis.

«Les BRICS sont un groupe diversifié de nations», a tweeté le président sud-africain Cyril Ramaphosa, qui présidait le sommet, après avoir annoncé les résultats de la déclaration historique des BRICS de Johannesburg 2 devant une salle bondée de journalistes internationaux.

«Il s’agit d’un partenariat égal entre des pays qui ont des points de vue différents, mais une vision commune d’un monde meilleur».

En effet, les dirigeants des BRICS ont souligné l’importance de la fonction du groupe en tant qu’organisation «consensuelle» fondée sur le multilatéralisme et l’engagement envers les principes inscrits dans la Charte des Nations unies. Cela contraste fortement avec des alliances telles que le G20, qui, bien qu’ostensiblement engagées en faveur des échanges multilatéraux, sont considérées par Washington et ses alliés comme un forum permettant d’imposer leur propre vision du monde.

L’orgueil occidental a été particulièrement palpable lors de l’accession de l’Inde à la présidence du G20 en 2023, lorsque les responsables américains et européens ont mené une campagne futile pour faire pression sur New Delhi afin qu’elle exclue la Russie des réunions du groupe, malgré le statut de membre permanent de Moscou.

Une prochaine guerre froide à l’horizon ?

En marge du sommet des BRICS, je me suis entretenu avec le ministre sud-africain du Commerce, de l’Industrie et de la concurrence, Ebrahim Patel, au sujet de l’objectif des BRICS.

Patel a commenté :

«Les BRICS veulent défendre un monde dans lequel tout le monde est gagnant, il ne s’agit pas d’essayer d’entrer dans une nouvelle guerre froide».

Patel, qui a présidé le forum commercial des BRICS à Johannesburg, lorsqu’on lui a demandé si les États-Unis et l’Europe pourraient un jour accepter les échanges multilatéraux autrement que comme une attaque contre les intérêts hégémoniques de l’Occident, a poursuivi :

«Nous ne devrions pas revenir à une guerre froide avec deux blocs polarisés, au contraire nous avons besoin que les voix du Sud contribuent à façonner l’architecture de la gouvernance et la manière dont les êtres humains interagissent».

L’ancien président du Gabon Omar Bongo possédait 70 comptes bancaires, 39 appartements, 2 Ferrari, 6 Mercedes Benz, 3 Porsche et une Bugatti en France. Il a régné pendant 42 ans (de 1967 à 2009). Son fils, Ali Bongo, est président depuis 2009. Il vient d’être renversé par un coup d’État.
Les BRICS sont-ils une alliance anti-occidentale ?

Patel a expliqué :

«Il y aura de nombreux cas d’interprétation erronée, mais nous défendons un monde uni, reconnaissant que les pays et les entreprises sont en concurrence».

«C’est sain, et cette concurrence doit s’appuyer sur une collaboration et une coopération approfondies entre les nations».

Interrogé sur ce qui différencie l’engagement des BRICS en faveur du multilatéralisme de blocs tels que le G20, M. Patel a offert une fenêtre sur le fonctionnement réel des BRICS.

«Lorsque les chefs d’État se réunissent, ils se demandent comment faire avancer les choses. La recherche d’un consensus est un processus lent. C’est un processus inégal. Mais cela signifie que les décisions qui sont prises bénéficient d’un soutien solide».

Après deux jours de délibérations à Johannesburg, au cours desquels les délégués ont examiné les demandes d’adhésion d’environ deux douzaines de pays, les BRICS sont parvenus à un consensus sur l’admission de six États, ce qui augmentera considérablement leur part de l’économie internationale et du marché des ressources.

Après l’intronisation officielle des nouveaux membres en février prochain, les BRICS compteront 6 des 10 premiers producteurs de pétrole au monde, 50% des réserves mondiales de gaz naturel et 37% du PIB mondial ajusté à la parité du pouvoir d’achat (PPA). La part du G20 dans le PIB mondial est actuellement de 30%. Avec l’ajout de l’Argentine et de l’Arabie saoudite, les BRICS compteront également six nations permanentes du G20 parmi leurs membres.

La CIA perd l’Afrique centrale : d’abord le Niger, puis le Gabon, maintenant la RDC.

Le ministre Patel a déclaré à propos de la réussite des BRICS :

«Il s’agit d’un processus lent et fastidieux de construction d’un consensus, cependant il est plus solide. Il dure plus longtemps».

Grâce aux BRICS, le fameux projet de Robert Kagan, selon lequel les États-Unis doivent servir d’hégémon mondial «bienveillant», pourrait être dépassé par la vision du monde en développement d’un siècle qui honore l’indépendance politique, l’autodétermination et la souveraineté territoriale de tous les États.

La génération de fonctionnaires américains qui suivra Nuland acceptera-t-elle la place de Washington dans ce monde multipolaire ou insistera-t-elle pour se battre ?

source : The Grayzone via Géopolitique Profonde

La France tenue en échec par les États-Unis au Niger

Source : RzO Voltaire - Le 16/09/2023.

 

Le gouvernement français semble pris au piège au Niger. Il s’entête à considérer comme illégitime la junte qui a renversé le président Mohamed Bazoum, alors que les États-Unis ont déjà conclu un accord avec elle sur son dos.

La sous-secrétaire d’État pour les Affaires politiques, la straussienne Victoria Nuland, est allée déjeuner chez un membre de la junte, le général Moussa Salaou Barmou. Ce dernier a fait ses classes à l’université Nationale de Défense près de Washington [1].

L’administration Biden s’est engagée à empêcher une invasion du Niger par les troupes de la CEDEAO poussées par la France, en échange du non-recours à la Russie et du maintien sur son sol des deux bases militaires US de drones. C’est un accord pragmatique qui permet à Washington d’en finir avec son vassal français en Afrique, même s’il prépare une agression du Niger par les jihadistes à moyen terme et sait que Niamey se retournera contre lui à long terme.

Le président français, Emmanuel Macron, est trahi par son suzerain US. Il n’a plus d’autre alternative que de pleurer sur le sort de son ambassadeur à Niamey. « Au Niger, au moment où je vous parle, nous avons un ambassadeur et des membres diplomatiques qui sont pris en otage littéralement à l’ambassade de France (…) On empêche de livrer la nourriture. Il mange avec des rations militaires (…) [Il n’a] plus la possibilité de sortir, il est persona non grata, et on refuse qu’il puisse s’alimenter (…) Je ferai ce que nous conviendrons avec le président Bazoum, parce que c’est lui l’autorité légitime, et je lui parle chaque jour ».

D’un point de vue nigérien, l’accord passé avec les États-Unis n’est qu’un moyen de gagner du temps. Dans les années à venir, Washington déclenchera une guerre régionale au Sahel et dans le bassin du lac Tchad. Victoria Nuland la prépare depuis plus d’un an, c’est-à-dire depuis le début de la guerre en Ukraine [2]. Le Niger sera alors contraint de se tourner vers la Russie et d’expulser les bases US. Il s’agit donc uniquement de ne pas affronter tous les ennemis à la fois : d’abord passer l’étape de la CEDEAO et s’affranchir de l’impérialisme français [3], puis s’attaquer à l’impérialisme US.

[1Voltaire, actualité internationale, n°50, 1° septembre 2023

[2« Une nouvelle guerre se prépare pour l’après défaite face à la Russie », par Thierry Meyssan, Réseau Voltaire, 24 mai 2022.

 

[3« Le rejet de la France en Afrique francophone sanctionne 12 ans de trahisons », par Thierry Meyssan, Réseau Voltaire, 12 septembre 2023.

Forces françaises au Niger : Entre se serrer la ceinture et serrer les dents

 

Ce genre d’articles parus dans la mouvance «mainstream» disparaissent du net très vite du fait de la censure.

Dominique Delawarde

*

par Philippe Chapleau - Le 26/09/2023.

«Abandonnés» ! L’humeur est visiblement morose au sein du contingent français au Niger. Principalement, confinés sur la BAP (la base aérienne projetée) située près de l’aéroport de Niamey, les quelque 1 500 soldats français sont au cœur d’un bras de fer entre l’Élysée et les putschistes du 26 juillet qui souhaitent le départ des forces françaises et qui ont dénoncé plusieurs accords de coopération militaire conclus avec l’ex-puissance coloniale (photos EMA prises à Niamey).

Côté français, Emmanuel Macron, intransigeant, maintient qu’un éventuel redéploiement des forces françaises au Niger ne sera décidé qu’à la demande du président Mohamed Bazoum toujours considéré par la France comme le légitime chef de l’État.

En attendant un accord politique, la situation des militaires français se dégrade depuis le début du mois de septembre : relève compromise, réserves qui s’épuisent, encadrement sous stress, peur d’une sortie de crise violente…

A cela s’ajoute la crainte d’être débordés par les manifestants nigériens qui bloquent tous les accès au camp français. «Le problème, c’est la foule. Elle se fait manipuler par le mouvement M62 principalement qui fait monter le sentiment anti-français. Ce sont ces mêmes manifestants qui ont stoppé le boulanger et qui empêchent les personnels locaux de venir travailler sur la BAP. Alors que les personnels locaux peuvent encore travailler pour les Allemands et les Italiens. Le filtrage n’est pas effectué par les forces armées nigériennes mais par les manifestants», explique un ancien militaire qui travaille sur place.

Ravitaillement aléatoire

Sur la BAP, les conditions de vie sont de plus en plus compliquées : «Aucun mouvement d’avion, les mouvements entre la zone vie et la zone technique sont surveillés et filtrés par l’armée nigérienne, un fossé antichar a été creusé, plus de ravitaillement alimentaire, évidemment pas d’autorisation de sortie. La base vivait sur les réserves des congélateurs jusqu’à cette semaine. Désormais pas de pain, le papier toilette rationné», a résumé un soldat français à sa famille.

«Nous avons encore un stock conséquent de carburant pour les groupes électrogènes, nous sommes aussi autonomes concernant l’eau potable et sanitaire et il y a encore de quoi manger un certain temps», précise toutefois l’ancien militaire français avant d’ajouter: «En revanche, la situation sur les deux bases avancées (Ouallam et Ayorou) devient intenable : plus de ravitaillement en eau, nourriture et carburant. Bientôt plus d’électricité pour eux. Et il est impossible de les approvisionner».

A Ouallam, au nord de Niamey, près de 200 soldats vivent de plus en plus chichement, leur autonomie passée devenant un souvenir. “Tout ça ne tient qu’à un fil. Ce qui me pose problème, c’est que nos capacités se dégradent un peu plus tous les jours, décrit un sous-officier qui préfère garder l’anonymat. La mission : «Tenir, c’est OK ; mais il nous faut de quoi manger, se laver et un minimum de confort ! Dimanche, l’électricité coupe et nous n’aurons plus de moyen de recharger nos appareils une fois que nos batteries seront déchargées. Nous attendons juste une direction de manœuvre ; rien que ça, ça nous donnerait du moral».

Des députés inquiets

L’état-major des Armées (EMA) relativise ces difficultés, reconnaissant des «approvisionnements compliqués», tout en se voulant rassurant : «L’état des capacités de combat, dont l’état du moral des militaires, est suivi par le commandement à tous les niveaux. Aujourd’hui, la posture des militaires français au Niger permet de répondre à toutes les éventualités, notamment en cas de besoin d’utiliser la force.»

L’EMA précise aussi que «les militaires en opérations sont confrontés par nature à une forme d’incertitude et aux changements de situation. Ils sont formés et entraînés pour agir dans des conditions parfois très rustiques et dans des environnements sécuritaires difficiles. La préparation et la planification des missions intègrent cette complexité».

Malgré tout, plusieurs députés français se sont émus de la dégradation des conditions de vie du contingent français au Niger. Ainsi, le député brestois Jean-Charles Larsonneur a fait part de ses inquiétudes dans un courrier de lundi au ministre des Armées Sébastien Lecornu. 

source : Lignes de Défense

envoyé par Dominique Delawarde

Présence militaire française en Afrique : Le problème ne se limite pas au Niger

  1. Le 26/09/2023.

     

Après deux mois de bras de fer avec les autorités nigériennes issues du putsch du 26 juillet, que Paris s’obstine à ne pas reconnaitre, Emmanuel Macron a enfin annoncé un calendrier de retrait pour les 1500 militaires français basés au Niger, où ils étaient restés présents dans un cadre juridique inédit depuis la fin officielle de l’opération Barkhane. L’association Survie, qui n’a eu de cesse d’alerter sur l’effet contre-productif et vain de la «guerre contre le terrorisme» à la française, rappelle que l’enjeu est plus large : c’est l’ensemble des militaires français présents sur le continent (bases permanentes, forces «de partenariat» au Tchad, coopérants militaires) que l’Élysée doit rapatrier en France.

Dimanche 24 septembre, dans son interview au 20h de TF1 et France 2, Emmanuel Macron a finalement acté ce qui était devenu, ces dernières semaines, inéluctable : le retour de l’ambassadeur français, devenu persona non grata du fait des postures martiales et belliqueuses de la France depuis le 27 juillet, et le retrait des 1500 militaires toujours présents sur place.

Ce faisant, il prend acte – avec retard – de la réalité concernant la situation au Niger, mais en escamotant le réel enjeu auquel fait face la République néocoloniale qu’il incarne : c’est bien l’ensemble de l’ingérence française en Afrique qui est aujourd’hui pointée du doigt par les mobilisations populaires africaines et les différents régimes politiques qui tentent d’asseoir leur légitimité sur ce rejet1.

C’est tout le déni français qu’a incarné le président de la République hier soir, en affirmant : «Il n’y a plus de Françafrique. Donc quand il y a des coups d’État nous on n’interfère pas dans la vie politique des pays». Avant d’ajouter : «La seule autorité légitime du Niger, c’est le président Bazoum qui a été élu par son peuple et qui aujourd’hui est détenu en otage et est l’objet de ce coup d’État.» La France n’a pas fait mystère, depuis deux mois, de son appui outrancier à la CEDEAO pour intervenir militairement au Niger. Dans le même temps, elle continue de traiter avec les autorités putschistes au Tchad, qui ont aux yeux de Paris le bon goût de ne pas remettre en cause la présence militaire française, et elle a rapidement normalisé ses relations avec les putschistes au Gabon, où sa base militaire n’est à ce jour pas menacée par le régime dit «de transition».

En se résolvant à sacrifier ses bases «de partenariat» au Niger, Paris espère bien préserver le reste de son maillage, qui n’a encore une fois pas été questionné par les journalistes qui interviewaient le président Macron :

  • Les bases permanentes au Sénégal (400 soldats en juin d’après le ministère des Armées français), à Djibouti (1500 soldats), en Côte d’Ivoire (500 soldats) et au Gabon (350 soldats) 2 ;
  • Ses «forces de partenariat» au Tchad (un millier de soldats en juin, auxquels pourrait s’ajouter une partie du contingent actuellement au Niger) ;
  • Ses officiers et sous-officiers détachés au sein des régimes répressifs au titre de la «coopération sécurité-défense», comme au Tchad (plus de 15 coopérants en mars dernier d’après la Direction Coopération Sécurité Défense3), au Cameroun (10 à 15 coopérants), au Togo (5 à 10 coopérants), Mauritanie (10 à 15 coopérants), Congo Brazzaville, Guinée (5 à 10 coopérants), etc. Journalistes, ONG et parlementaires ne disposent à ce jour d’aucune information sur les fonctions exactes de ces militaires qui, bien souvent, occupent des postes de conseillers particulièrement stratégiques pour l’influence et le renseignement français.

Pour Patrice Garesio, co-président de l’association Survie, «si on ne parle que du Niger, c’est l’arbre qui cache la forêt. Le débat public en France ne doit pas se limiter à un pays, au risque de recommencer à pleurer dans quelques semaines ou mois sur un prétendu «sentiment anti-français».

Le retrait des troupes françaises du Niger est une étape, mais c’est l’ensemble de la politique africaine de notre pays qu’il C’est l’ensemble de la politique africaine de notre pays qu’il faut remettre à plat, et toute sa portée néocoloniale sur laquelle il faut commencer à ouvrir les yeux collectivement.

Alors qu’Emmanuel Macron a annoncé aux partis politiques un débat parlementaire cet automne sur la politique africaine de la France4 et que les décisions récentes sur la coopération culturelle et académique avec le Mali, le Burkina Faso et le Niger ont soulevé un tollé légitime5, l’association Survie appelle à ce que le débat public embrasse l’ensemble de la politique africaine de la France. Ses dimensions militaires, économiques et culturelles doivent enfin être mises en débat : c’est à ce pas vers la fin de notre colonialisme que nous invitent les peuples africains en lutte.

source : Survie

 

Niger : Echec et mat pour la Françafrique

par Mikhail Gamandiy-Egorov - Le 26/09/2023.

Le départ désormais annoncé du personnel diplomatique et militaire hexagonal du Niger constitue non plus seulement une nouvelle défaite pour Paris sur le continent africain, mais surtout et simplement la fin maintenant confirmée du système de la Françafrique. Et face à la résistance et à la mobilisation des populations africaines – toute tentative de raviver des systèmes néocolonialistes occidentaux sera dans tous les cas vouée à l’échec.

Après les multiples pressions, intimidations et menaces, y compris d’ordre militaire, le tout dans le traditionnel esprit d’arrogance si propre aux élites occidentales, le régime hexagonal est finalement arrivé à la compréhension que sa présence en terre nigérienne est condamnée. Emmanuel Macron a donc annoncé le départ de l’ambassadeur et de plusieurs diplomates hexagonaux. Les militaires français seront également retirés d’ici la fin de l’année.

Une fois de plus, les analyses et prévisions d’Observateur Continental vont dans la confirmation. Y compris quant au fait pour le régime hexagonal de vouloir s’accrocher jusqu’au bout, dans le pur esprit d’arrogance et de condescendance qui le caractérise, et aussi accuser par la même occasion ses principaux adversaires géopolitiques – au lieu de reconnaitre objectivement l’échec total de sa propre politique.

Les prévisions se confirment également dans le fait que les mobilisations populaires des sociétés civiles africaines, y compris au Niger, auront largement démontré que face à des peuples soudés, adhérant à l’esprit des grands leaders d’Afrique du passé dans un cadre souverainiste et panafricaniste – l’establishment occidental n’y peut absolument rien. Les menaces y compris d’un recours à la force et les sanctions économiques unilatérales n’y changeront rien.

De manière générale, la solidarité observée à l’échelle du Sahel et plus généralement africaine, aura également largement confirmé qu’une Afrique unie, forte, solidaire – représente l’option la plus efficace face à toute visée néocoloniale occidentale. A ce titre, l’annonce récente de la création de l’alliance militaire AES entre le Mali, le Burkina Faso et le Niger en est une démonstration supplémentaire.

Cela évidemment sans oublier le soutien des principales puissances mondiales non-occidentales, en premier lieu de la Russie et de la Chine aux aspirations des nations africaines. Du moins à la grande partie de ces nations.

Dans tous les cas, l’argument si longtemps avancé par les adeptes du système de la Françafrique, à savoir que le problème ne serait prétendument pas dans la politique néocoloniale de Paris et de nombre d’autres capitales occidentales, mais dans le fait que l’Afrique ne peut pas se prendre en main – est définitivement terminé. L’Afrique prend parfaitement son destin en main et aucune force ne pourra aujourd’hui l’en empêcher. A l’ère où le panafricanisme a pleinement affirmé sa renaissance et où le monde multipolaire n’est plus une perspective, mais bel et bien une réalité.

Bien sûr aussi, la Françafrique n’est pas encore pleinement abattue. Elle dispose d’un réseau d’éléments déstabilisateurs largement présents à l’échelle africaine et qui représentent une menace sécuritaire directe pour les Etats africains concernés. Et bien évidemment comme le rappellent bien les Panafricanistes – tant que persistera la domination économico-financière, notamment à travers le fameux Franc CFA – la souveraineté totale ne sera pas acquise.

Ceci étant dit et lorsque le chemin parcouru au cours des dernières années est observé et analysé – il ne fait pas de doute que l’Afrique et les Africains disposent aujourd’hui des moyens nécessaires afin d’arriver pleinement aux objectifs souhaités. En premier lieu et surtout grâce à eux-mêmes, à leur détermination et persévérance, à leur compréhension parfaitement admise que leurs pays et continent disposent de tout le nécessaire pour être des acteurs incontournables dans le cadre de l’ordre multipolaire international. Et en deuxième lieu avec le soutien des nations non-occidentales qui font que cet ordre multipolaire s’impose définitivement un peu plus chaque jour qui passe.

Mikhail Gamandiy-Egorov

source : Observateur Continental

Chassés du Niger, les militaires français obligés de passer par le Tchad et non le Bénin

par Ndam Njoya Nzoméné - Le 12/10/2023.

Déclarés persona non grata depuis la prise du pouvoir par la force du général Abdourahamane Tchiani, les militaires français ont enfin commencé à quitter le territoire nigérien. Dans l’humiliation totale, leur retrait se faisant exclusivement selon les conditions de la junte en place à Niamey qui exigeait que cela soit coordonné via le Tchad.

C’est la radio française RFI qui en a fait l’annonce mardi, relayant l’état-major de l’armée française qui a confirmé les premiers départs des militaires et d’équipements français du Niger suivant un programme de «retrait planifié», comme le préconisait d’ailleurs les tombeurs du président élu Mohamed Bazoum. Selon cette source militaire, les forces françaises et nigériennes ont trouvé un accord de coordination technique pour le passage par le Tchad et non par le Bénin – voie plus courte pour rejoindre le golfe de Guinée et ensuite la France – qui avait été accusé ces dernières semaines par la junte de servir de base arrière à une possible attaque du Niger par la France.

En attendant donc que le retrait devienne effectif, l’armée nigérienne, contrairement à l’armée française qui n’a encore rien dit sur le mode opératoire de cette sortie de scène, a déjà publiquement donné à voir les contours du retrait français : Les 400 soldats français déployés à Ouallam et Tabarey-Barey à l’Ouest du Niger, plus précisément dans la zone dite des «trois frontières», plieront leurs bagages pour se rendre à Nyamey où ils formeront avec les autres le total des plus de 1400 soldats et aviateurs français devant rejoindre par la route le Tchad voisin d’où ils regagneront leur pays.

Autre information importante à retenir, dans le cadre de ce retrait planifié, les véhicules militaires français seront tenus de démonter les armes de bord sur le sol nigérien, toutes les questions de sécurité, la leur en l’occurrence ressortissant des missions de l’armée nigérienne.

source : Cameroon Voice

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