Note d'actualité n°441 - Décembre 2017

Frappes aériennes Israéliennes en Syrie.

...par Alain Rodier.

Dans la nuit du 4 au 5 décembre, six missiles sol-sol israéliens ont frappé le Centre d’Etudes et de Recherches Scientifiques (CERS) de Jamriya situé à cinq kilomètres au nord-est de Damas. Ces installations, soupçonnées effectuer des recherches dans le domaine RNBC (armes radiologiques, nucléaires, bactériologiques et chimiques), avaient déjà été visées par Israël le 31 janvier 2013.

Dans la nuit du 1er décembre dernier, les Israéliens avaient pilonné avec des missiles air-sol – et peut-être sol-sol – une base militaire syrienne située à Al-Kiswa, à 13 kilomètres au sud de Damas. La défense anti-aérienne syrienne aurait détecté les avions israéliens alors qu’ils survolaient le Liban d’où ils auraient tiré leurs missiles l. Selon Damas, deux missiles sol-sol israéliens auraient par ailleurs été interceptés – mais aucune photo de débris identifiables n’a été publiée, ce qui est étonnant sur le plan de la propagande. Selon l’Etat hébreu, les installations militaires visées avaient été complétées et rénovées depuis le début de l’année de manière à pouvoir accueillir un contingent iranien.

Le chef d’état major israélien, le général Gadi Eizenkot, avait renouvelé en novembre 2017 l’exigence israélienne d’un retrait iranien de Syrie, en précisant qu’une consolidation du dispositif militaire de Téhéran dans ce pays ne serait pas admise.

Un bombardement avait déjà eu lieu dans la nuit du 21 au 22 septembre visant un convoi d’armes destiné au Hezbollah, dans la région de l’aéroport international de Damas. Le chef d’état major de l’armée de l’air israélienne, le général Amir, avait confirmé que l’Etat hébreu menait des dizaines de frappes depuis 2012. Israël avait par ailleurs prévenu qu’il ne tolèrerait pas la livraison d’armements au Hezbollah, notamment de missiles sol-sol Scud et M-6001.

Quelques jours plus tôt, le 6 septembre 2017, quatre appareils israéliens s’en étaient pris à un site « suspect » situé à Al Tala’i, à l’est de la ville de Maysaf, dans le district de Hama. Il s’agit officiellement d’installations dépendant du Centre d’études et de recherches scientifiques (CERS). A 02 h 42, les aéronefs auraient tiré des missiles depuis l’espace aérien libanais sur l’objectif situé à une trentaine de kilomètres de la frontière nord du Liban. Ce bombardement a eu lieu dans une zone où un cessez-le-feu a été conclu entre les forces syriennes et les rebelles sous la supervision des Etats-Unis et de la Russie. Israël a toujours exprimé son mécontentement sur ce qui est qualifié de « zones de déconfliction (désescalade) » qui ne prendraient pas en compte les intérêts de l’Etat hébreu. Ce bombardement s’est intégré dans le plus grand exercice militaire (baptisé Or HaDagan) mené depuis vingt ans par l’Etat hébreu dans le nord du pays. Il s’est déroulé sous la responsabilité du commandement Nord des forces de défense israélienne, dirigé par le major général Tamir Heyman, et a engagé les trois armées ainsi que des réservistes. Cet exercice était destiné à prévenir une future potentielle offensive du Hezbollah dans la région. A cette occasion, Ronen Manelis, le porte-parole de l’armée israélienne a prévenu : la prochaine guerre « sera difficile pour Israël, mais pire pour le Liban ». Il a ajouté qu’Hassan Nasrallah serait une « cible », ce qui semble logique. A noter que le Hezbollah, dont il est le secrétaire général, est désormais désigné comme « terroriste » par la Ligue arabe, depuis une conférence tenue à Riyad fin novembre 2017. Cela ne peut que satisfaire Israël.

En Syrie, les installations « douteuses » sont nombreuses dans la région de Maysaf. Elles sont gardées en permanence et certaines seraient équipées de bunkers et de tunnels se prolongeant sous les montagnes environnantes. Les autorités israéliennes et un militant des Droits de l’Homme syrien ont prétendu en 2004 que Saddam Hussein avait transféré une partie de ses armes chimiques en Syrie, notamment dans la région de Maysaf2. Aujourd’hui, ces sites serviraient surtout à fabriquer des armes classiques comme des roquettes de 122 et 300 mm destinées aux forces armées syriennes et au Hezbollah libanais. Mais Damas aurait aussi relancé la chaîne de production du missile M-600.

 

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Depuis cinq ans, l’armée de l’air israélienne a mené des douzaines de raids en Syrie visant des convois de transport d’armes à destiantion du Liban pour équiper le Hezbollah. Depuis près d’un an, elle vise désormais des installations “en dur“.

Aujourd’hui, l’ennemi numéro un désigné par Tel-Aviv reste l’Iran. L’Etat hébreu est atteint par le « syndrome de l’encerclement3 » avec, au nord, le Hezbollah libanais, au sud, le Hamas[4 qui a retrouvé les faveurs de son allié iranien après des années de bouderies suite à l’attitude favorable aux rebelles anti-Assad adoptée par le Hamas au début de la révolte.]  et le Jihad islamique palestinien. Il est donc intolérable pour les Israéliens que des forces iraniennes – et le Hezbollah libanais – stationnent en permanence en Syrie à proximité immédiate du plateau du Golan. Plus globalement, l’effort balistique iranien et le surarmement du Hezbollah inquiètent au plus haut point l’Etat hébreu car la totalité de son territoire est dorénavant à portée de tir.

 

  1. Le M-600 est une copie syrienne du Fateh-110 iranien. Ce missile à carburant solide peut emporter une tête militaire de 450 kilos à 250 kilomètres de distance avec une précision de moins de 50 mètres grâce à son système de guidage inertiel couplé avec un GPS. ↩
  2. L’ONU a officiellement attribué le 6 septembre le bombardement à l’arme chimique de Khan Sheikhoun d’avril 2017 à Damas. Cette assertion est contestée par le chercheur du MIT, le professeur Ted Postol. ↩
  3. Toutes les grandes puissances y sont sensibles : l’URSS – puis aujourd’hui la Russie – « encerclée » par l’OTAN, l’Iran « encerclé » par les bases américaines, etc. ↩

 

Source : https://www.cf2r.org/actualite/frappes-aeriennes-israeliennes-syrie/

 

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