... sous le crâne de D. Trump

...par Jean-Luc Baslé - Le 02/07/2019.

Economiste

 

Diplômé de Columbia University et de Princeton University

Directeur de Citigroup New York (1972-1995)

Enseignant associé aux Ecoles de Saint-Cyr Coêtquidan

Vice-président de l’Institut de Locarn

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The international monetary system : challenges and perspectives" (1982) - L'euro survivra t-il ? (2016) -

Tempête sous le crâne de Donald Trump

 

Sa décision de sortir de l’Accord de Vienne sur le nucléaire iranien a pour Donald Trump une conséquence inattendue : doit-il ou non bombarder l’Iran ? De la Corée à l’Irak en passant par le Vietnam, le Cambodge, la Lybie, le Panama, la Bosnie, le Kosovo, etc., bombarder une nation n’a jamais posé de cas de conscience aux présidents américains. Alors pourquoi hésite-t-il ? Parce ce qu’un conflit ouvert avec l’Iran provoquerait non seulement une crise économique mais éliminerait toute chance d’être réélu.

 

La situation au Moyen Orient prend son origine dans les attaques du 11 septembre. George W. Bush a entamé une guerre contre le terrorisme qui s’est matérialisée par l’invasion de l’Afghanistan et de l’Iraq, la destruction de la Lybie et la guerre en Syrie. Israël qui depuis sa création se sent isolé dans une région entourée d’ennemis, appuie la politique américaine. Mais, comme nous l’apprend la troisième loi d’Isaac Newton, toute action crée une réaction. La Russie et l’Iran ont donc répondu favorablement à la demande d’assistance de Bachar el-Assad dont le pays était au bord de l’effondrement. Grâce à cette aide, le dirigeant syrien a pu récupérer la presque totalité de son territoire.

 

Les choses auraient pu en rester là si l’aviation israélienne se cachant derrière un Il-20 pour bombarder la Syrie n’avait pas provoqué la destruction de cet avion et la mort de quinze membres d’équipage par la défense antiaérienne syrienne. Les Russes ne s’y sont pas trompés et blâmés Israël. Dans un récent article, Youssef Hindi considère qu’il s’agit là d’une grave erreur des Israéliens. Alors que jusqu’à présent, Vladimir Poutine avait réussi à maintenir l’équilibre entre les factions israélienne et russe à l’intérieur de son gouvernement, l’abattage du Il-20 l’a fait pencher en faveur de la faction russe, soutenue par l’Armée.

 

Il existe un même équilibre instable au sein du gouvernement américain. Les conseillers de Donald Trump se partagent entre partisans des thèses israélienne et nationale. Henri Kissinger a d’ailleurs déclaré : "A la Maison Blanche, c’est la guerre entre juifs et non juifs". Donald Trump est dans le camp des seconds (America First), mais il doit sa victoire en partie aux premiers (Sheldon Adelson et Robert Mercer lui ont apporté un soutien crucial à un moment critique de sa campagne en juin 2016). Pour éviter une guerre qui ruinerait ses chances d’être réélu, il finasse (nouvelles sanctions, négociation sans préconditions, etc.). Sa stratégie de "pression maximale", destinée à faire tomber le régime iranien de l’intérieur, rend bombardements et invasion inutiles. Mais que se passe-t-il si l’effet attendu ne se produit pas ?

 

Le Pentagone pourrait-il, comme en Russie, faire pencher la balance au profit des thèses nationales ? Non seulement les guerres au Moyen Orient ont entaché son image (en particulier à l’étranger) mais, plus grave, elles le privent des ressources nécessaires pour se préparer à un conflit avec la Russie ou la Chine. Or, les généraux américains pensent que c’est là leur premier devoir. Donald Trump prétend d’ailleurs avoir "reconstruit" le Pentagone.

 

Si le Pentagone réussissait à faire pencher la balance de son côté, Israël serait isolé, sans appui à Moscou et à Washington. Dans ces conditions, n’est-il pas l’intérêt de Benjamin Netanyahu de créer les conditions d’un conflit inévitable entre l’Iran et les Etats-Unis ? Cela détruirait l’ennemi qui soutient la Syrie et le Hezbollah, et aurait aussi l’avantage d’assurer sa réélection en octobre prochain. Quant à Donald Trump, il pourrait dire au revoir à la sienne en novembre 2020. La tempête sous son crâne doit lui donner des maux de tête.

 

Source : http://www.magistro.fr/index.php/template/lorem-ipsum/de-par-le-monde/item/3773-sous-le-crane-de-d-trump

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