INFOS MILITAIRES

LPM 2024/2030

Télécharger
LPM 2024 - 2030
Livret de présentation de la Loi de prog
Document Adobe Acrobat 6.1 MB

Le 19/05/2023.

 

TÉMOIGNAGE D'UN COMMANDANT DE BRIGADE BLINDEE UKRAINIENNE 

par  Blablachars

Le colonel HRUDSEVYCH, commandant la 17ème brigade blindée a répondu aux questions d'un media en ligne américain. A ce titre, il a participé aux combats dans la région de Marioupol et de Kharkiv, la 1èème Brigade blindée étant actuellement engagée les combats de Bakhmut. Dans son entretien l’officier ukrainien a livré quelques éléments sur l’armée ukrainienne et le rôle des blindés dans les opérations en cours. Blablachars vous livre ci-dessous les principaux points de cet entretien et les principaux enseignements que le Col HRUDSEVYCH a pu retirer de sa participation aux combats en cours.

Avant d’aborder le rôle du char dans les opérations, le Col HRUDSEVYCH, a souligné le fort degré de motivation de l’armée ukrainienne, car se battant pour la défense de son pays et de sa population. Pour lui l’autre facteur de motivation de l’armée ukrainienne est lié le soutien manifesté par les pays de l’OTAN dont la déclinaison la plus importante est selon l’officier ukrainien, la formation des soldats ukrainiens sur les équipements fournis.

 

A propos de l’utilisation des blindés, l’officier ukrainien souligne que le char a toujours été et continue de demeurer un moyen de combat puissant. A rebours de nombreuses expertises, le premier rôle du char mentionné par le Col HRUDSEVYCH est celui tenu par cet engin dans les opérations défensives. Il explique que lorsque le char est intégré aux dispositifs défensifs ukrainiens, cela diminue considérablement les volontés offensives de l’ennemi, contraint d’obtenir un rapport de forces largement supérieur (de 1 contre 4 à 1 contre 6) pour la conduite d’une action offensive. Le char est donc le moyen de combat le plus puissant au niveau tactique, supériorité qu’il partage avec l’artillerie, selon le Col HRUDSEVYCH. La formation et l’entrainement doivent permettre de disposer d’équipages techniquement formés, moralement résilients, affichant une indispensable cohésion et cultivant la subsidiarité.

 

Les évolutions quasi permanentes de la situation tactique imposent aux commandants de formation ukrainiennes une adaptation de tous les instants dans laquelle ils sont aidés par des équipements innovants comme les drones. Toujours dans le domaine du commandement, selon le Col HRUDSEVYCH il est préférable que les chefs tactiques (Escadron, Bataillon) commandent depuis une installation statique, ou à défaut à partir d’un véhicule de commandement dédié durant les phases offensives. Le commandement depuis un char ou un engin blindé se révélant inadapté à la conduite des opérations et à l’utilisation d’outils tels que les drones. Poursuivant sur les caractéristiques d’un char, le Col HRUDSEVYCH aborde le nécessaire et délicat équilibre entre puissance de feu, protection et mobilité en précisant que dans la situation actuelle, l’armée ukrainienne aimerait pouvoir disposer de chars dotés d’une meilleure mobilité et d’une protection accrue. L’utilité du chargement automatique est soulignée par l’officier ukrainien pour lequel celui qui tire le plus vite est celui qui atteint la cible le plus rapidement de jour comme de nuit, pour laquelle les équipages doivent être entrainés à combattre. Sur la distance d’engagement à propos de laquelle les constats actuels signalent peu de combats à grande distance, Col HRUDSEVYCH précise que à chaque fois que cela est possible les chars ennemis sont engagés au plus loin. Cependant l’est de l’Ukraine avec son habitat dense et un terrain très compartimenté impose un combat à courte distance, particulièrement dans les zones les plus densément peuplées. Toujours selon le commandant de la 17ème brigade blindée, les chefs tactiques ukrainiens font preuve de plus d’initiative et bénéficient d’une plus grande autonomie dans la prise de décision. Ils agissent le plus souvent en dehors des modèles établis et utilisent des moyens techniques modernes.

 

Concernant l’ennemi, l’officier ukrainien souligne le caractère prévisible des décisions prises par les chefs tactiques russes agissant le plus souvent dans des cadres plus formels. Cependant le Col HRUDSEVYCH modère cette appréciation en mentionnant la capacité d’apprentissage de l’ennemi et son utilisation de plus en plus fréquente de schémas moins formels. Le Col HRUDSEVYCH précise que les chars russes n’ont rien perdu de leur létalité et ne peuvent être vaincus que par les armes occidentales. Leurs équipages demeurent bien préparés et semblent particulièrement efficaces dans les opérations défensives, leurs chars demeurant particulièrement vulnérables en zone urbaine, dans les opérations de nuit et dans les actions offensives.

 

Le Col HRUDSEVYCH conclue son entretien en rappelant que le temps des chars n’est pas prêt de s’achever et que le pic de cette période est à venir, particulièrement au niveau tactique.

 

Au-delà de la primauté du char dans les opérations tactiques, la relative rareté des engagements entre chars a fait des armes antichars le principal ennemi du char. Cette constatation rend urgente la généralisation des systèmes de protection active, de préférence hard-kill seuls capables d'atténuer les effets des armements évoqués. Le degré d’initiative accordé aux chefs tactiques ukrainiens est une des caractéristiques de l’esprit cavalier, dont les chefs doivent être formés pour saisir toute opportunité leur permettant de vaincre l’ennemi. La stricte utilisation de cadres préétablis rendant prévisible la manœuvre ennemie, comme l‘ont démontré les unités russes dans les premiers mois du conflit. Concernant les distances d’engagement, le Col HRUDSEVYCH rappelle un vieux principe selon lequel le terrain commande et souligne ainsi la flexibilité du char, pouvant engager l’ennemi à toutes les distances sur tous les terrains, comme l’a démontré la bataille de Soledar au début de cette année. Il est en outre intéressant de constater que les chefs ukrainiens maitrisent l’utilisation de drones (le plus souvent issus du commerce) pour diriger leur action et coordonner l’utilisation des moyens interarmes.

 

Le char n’est donc pas mort en Ukraine, vaincu dans les opérations offensives par une utilisation intensive des armes antichars occidentales, il continue de se révéler comme un élément indispensable des dispositifs défensifs en attendant son utilisation dans la potentielle contre-offensive ukrainienne, qui devrait voir l’engagement des chars occidentaux transférés aux forces armées ukrainiennes.

 

Le Pentagone songe à solliciter l’aide du Japon pour transformer le MC-130J en hydravion

En cas de conflit dans la région du Pacifique, les forces américaines ne pourront plus compter sur l’hydravion PBY Catalina, qui rendit de grands services durant la Seconde Guerre Mondiale… D’où le projet du commandement américain des opérations spéciales [USSOCOM] de développer une version amphibie de l’avion de transport MC-130J Commando II, conçu pour mener des missions d’infiltration/exfiltration dans les zones hostiles ?

 

Cela étant, une telle idée n’est pas nouvelle : dans les années 1960, Lockheed proposa à l’US Navy un hydravion conçu à partir de son C-130 Hercules. Sans succès… L’industriel revint à la charge, plus tard, avec cette fois l’US Coast Guard [garde-côtière]. Mais sans plus de résultat.

 

Quoi qu’il en soit, le projet d’un MC-130J Commando II amphibie fut dévoilé en mai 2021 par le colonel Ken Kuebler, lors d’une conférence dédiée à l’industrie [SOFIC – Special Operations Forces Industry Conference]. « C’est un défi », avait-il dit, avant d’ajouter que l’ingénierie numérique permettrait de trouver rapidement une solution. Puis, quelques semaines plus tard, l’Air Force Special Force fit savoir qu’elle espérait le premier vol d’un prototype en 2023.

 

Sauf que l’ingénierie numérique n’est pas une pierre philosophale, comme en témoigne les problème que rencontre l’avion d’entraînement T-7 « Red Hawk », développé selon cette approche. En effet, celui-ci sera mis en service en 2027, soit avec trois ans de retard. Et cela « en raison de problèmes découverts au début de la phase de développement et de tests », a récemment fait savoir Andrew Hunter, le secrétaire adjoint à l’Air Force pour l’acquisition, la technologie et la logistique.

 

En tout cas, le développement de la version amphibie du MC-130J Commando II ne semble pas avoir réalisé de progrès notables depuis les annonces faites en 2021. Aussi, l’US SOCOM envisage de se tourner vers le Japon, qui a une certaine expérience en la matière, avec l’hydravion de transport ShinMaywa US-2.

 

« Le Japon est un partenaire très important dans [l’Indo-Pacifique]. Nous envisageons un partenariat pour voir ce que nous pouvons apprendre de leurs expériences avec l’US-2 », a en effet déclaré Jim Smith, le responsable des acquisitions pour le compte de l’US SOCOM, lors d’une conférence organisée à Tampa [Floride], le 9 mai.

 

Cela étant, en fonction de ce que donneront les discussions avec Tokyo, l’US SOCOM n’exclut pas de se procurer quelques US-2 auprès du constructeur nippon ShinMaywa, ses procédures d’acquisition étant particulières.

 

Pour rappel, mis en service en 2007, l’US-2 est un hydravion de 33,46 mètres de long pour une envergure de 33,15 mètres. Affichant une masse au décollage de 43 tonnes, il peut transporter une vingtaine de passagers. Doté de quatre turbopropulseurs Rolls-Royce AE 2100J, il peut voler à la vitesse maximale de 560 km. Enfin, son autonomie est de 4700 km.

 

Les difficultés de la marine britannique exposées dans un rapport

Par Francis Noudé

 

En plus des problèmes de maintenance, The Telegraph souligne dans son rapport des questions non résolues quant à la cause de l'échec de l'arbre d'hélice de l'HMS Prince of Wales. Il reste à déterminer si cet incident est dû à un défaut de conception, à une construction négligente, à un manque d'entretien ou à une autre cause. 

 

Selon un rapport révélé par The Telegraph, la marine britannique traverse des difficultés techniques majeures, illustrées par l'état de ses deux nouveaux porte-avions. L'HMS Prince of Wales, mis en service en 2019, est actuellement hors service en raison d'un arbre d'hélice cassé. Pour maintenir l'opérationnalité de son navire jumeau, l'HMS Queen Elizabeth, des pièces ont dû être "cannibalisées" du Prince of Wales. Bien que la Royal Navy qualifie cet échange de pièces entre navires de procédure normale, il met en lumière les défis auxquels la marine britannique est confrontée pour maintenir ses vaisseaux de combat en état de fonctionnement optimal.

 

 

En plus des problèmes de maintenance, The Telegraph souligne dans son rapport des questions non résolues quant à la cause de l'échec de l'arbre d'hélice de l'HMS Prince of Wales. Il reste à déterminer si cet incident est dû à un défaut de conception, à une construction négligente, à un manque d'entretien ou à une autre cause. Adm. Ben Key, premier seigneur de la mer et chef de l'état-major de la marine britannique, a souligné que la réparation de ce type de dommage n'est pas nécessairement rapide, ce qui ajoute à la complexité de la situation.

 

C'est officiel: les forces spéciales américaines se préparent à défendre Taïwan

Le retour des réseaux «stay-behind»?

 par Camille Lemaître sur  The Diplomat

 

Pour la première fois depuis l'indépendance de Taïwan, le commandement américain des forces spéciales de l'armée de terre,  l'USASOC,, a conduit des exercices simulant des opérations sur l'île revendiquée par Pékin et impliquant l'envoi de soldats américains des forces spéciales à Taïwan, le 27 avril dernier à Fort Bragg (Caroline du Nord).

 

Les opérateurs ont notamment tiré avec des fusils sans recul, percé des tunnels, utilisé des drones kamikaze Switchblade, ce qui reflète un changement considérable pour l'USASOC,  analyse le spécialiste de l'Asie A. B. Abrams dans The Diplomat.

 

Le fait que se tienne ce combat fictif marque un tournant,  déjà amorcé par le discours de certains officiels américains.. La possibilité a ainsi été évoquée que les forces spéciales américaines puissent directement aider Taïwan à combattre une invasion chinoise, notamment en participant à la formation des hommes et à la logistique –un rôle comparable à celui qu'ils jouent actuellement en Ukraine.

 

Esprit de résistance

 

«[Les Taïwanais] savent que leur entraînement doit être plus adapté au réel. […] Nous, en particulier dans la communauté des opérations spéciales, travaillons avec eux pour évoluer davantage vers un modèle de résistance partisane», déclarait fin mars le député américain et ancien militaire Mike Waltz, président d'un sous-comité de la commission défense de la Chambre des représentants des États-Unis. «[Nous devons faciliter] une résistance à l'ukrainienne.»

 

À lire aussi : Les sombres prédictions d'une simulation de conflit entre la Chine, Taïwan et les États-Unis

 

En sus du déploiement de soldats américains à Taïwan, qui continue à se développer de manière significative, cette assistance signifie également que de plus en plus de militaires taïwanais viennent s'entraîner aux États-Unis.

 

«Les opérations spéciales secrètes ont un rôle très important à jouer [en cas de guerre avec la Chine], en plus du prépositionnement et du renforcement [des arsenaux à Taïwan] qui vont être essentiels, mais ne suffiront pas. Il faudra une chaîne d'approvisionnement qui s'appuiera largement sur nos forces [conventionnelles] pour le faire», analyse un autre député et ex-militaire, Jason Crow, également membre du comité des affaires étrangères de la Chambre.

 

La Russie livre de nouveaux avions militaires à la Centrafrique

 

 Avec ces trois appareils, la Russie aura livré au total six Albatros (L-39) aux Forces armées centrafricaines (image d'illustration) REUTERS/Stringer

  par RFI

 

De nouveaux avions militaires russes sont arrivés en Centrafrique ce week-end. Trois appareils ont été débarqués à l'aéroport de Bangui, en vue d'une livraison aux Forces armées centrafricaines (Faca). Plusieurs organisations proches du pouvoir, qui dénoncent des violations de l'espace aérien centrafricain, saluent un renforcement des capacités militaires du pays.

 

« Cette livraison est une réponse aux violations périodiques de l'espace aérien du pays par des malfaiteurs », a expliqué la chaîne Telegram de la Communauté des officiers pour la Sécurité internationale, organisation russe de la galaxie Wagner qui a annoncé dimanche l'arrivée de ces avions, photos à l'appui.

 

Selon la COSI, avec ces trois appareils, la Russie aura livré au total six Albatros aux Faca, mais ce sont bien des hommes de Wagner qui devront les faire voler et les entretenir. Un premier appareil avait effectué un vol de démonstration au-dessus de Bangui fin novembre.

 

L'Aero L-39, de son nom technique, a été construit dans l'ex-Tchécoslovaquie, de la fin des années 1960 au milieu des années 1990. « Robuste, mais peu perfectionné » selon un spécialiste, il sert principalement pour l'entraînement et la reconnaissance : « Il peut permettre de surveiller des grands axes, mais ce n'est pas un avion de chasse, il n'a pas de capacité d'interception ».

 

Ces trois appareils à la peinture défraîchie ont été débarqués d'un Antonov 124, et pourraient provenir d'une base russe de Syrie, selon un site de traçage du trafic aérien...

 

Pour le Front républicain, organisation proche des autorités, cette livraison illustre le partenariat « gagnant-gagnant » avec la Russie : « Diamant/Or/Bois égal avion de chasse, égal sécurité, égal stabilité », écrit son président Héritier Doneng.

 

Equipements militaires : Kiev doit s'armer, d'abord et surtout de patience

par Philippe Chapleau

 

En matière de futures livraisons d’armes au profit de Kiev, il y a les annonces et il y a la réalité. Et les deux ne coïncident pas nécessairement.

 

Lors de sa récente visite en Europe de l’ouest, le président Zelensky s’est vu promettre de nouveaux équipements militaires par l’Allemagne, la France et le Royaume-Uni.

 

Le gouvernement allemand a annoncé, le week-end dernier, préparer un nouveau plan d’aide militaire à l’Ukraine d’une valeur de 2,7 milliards d’euros. Les livraisons en préparation incluent notamment 30 chars Leopard-1 A5 supplémentaires, 20 nouveaux véhicules blindés de type Marder et plus d’une centaine d’autres véhicules blindés de plus petite taille, 200 drones de surveillance, 4 nouveaux systèmes de défense antiaériens Iris-T et leurs plateformes de lancement, de nombreux missiles pour la défense antiaérienne, 18 canons et des munitions.

 

La France, sans faire mieux en termes de volume que l’Allemagne mais l’Élysée rappelant que « la France ne dit pas tout », va fournir « des capacités complètes dans tous les domaines. Dans les semaines à venir, la France formera et équipera plusieurs bataillons avec des dizaines de véhicules blindés et de chars légers, dont des AMX-10RC ». On sait déjà que la formation des équipages aura lieu sur le camp militaire de Canjuers (Var), le mois prochain. Blindés et équipages devraient rejoindre la 37e brigade d’infanterie de marine ukrainienne formée en février dernier et qui fait partie du corps d’infanterie de marine ukrainien.

 

Le Royaume-Uni a surenchéri, promettant de livrer à Kiev des « centaines » de missiles antiaériens et de drones d’attaques. Londres a aussi précisé que la Royal Air Force va commencer la formation de pilotes ukrainiens dès cet été, précisant que cette formation s’inscrit dans un effort multinational pour fournir des avions de chasse de type F-16 à Kiev. Précisons qu’aucun pays européen utilisateur de F-16 (Pays-Bas, Belgique, Norvège etc.) n’a encore confirmé une telle vente ou cession de ce chasseur à l’Ukraine.

 

L’agenda des livraisons

L’Ukraine et tous ses soutiens ont donc de quoi se réjouir. Ces annonces interviennent en outre après une récente déclaration américaine. Dans le cadre de l’Ukraine Security Assistance Initiative (USAI), la Maison Blanche a annoncé l’octroi d’une enveloppe d’une valeur de 1,2 milliard de dollars à l’Ukraine qui pourra utiliser ces fonds pour commander des armements (systèmes de défense sol-air, équipements pour intégrer dans le système de défense antiaérienne des postes de tir, des missiles et des radars, munitions pour les systèmes anti-drones, obus de 155 mm…).

 

Or, que ce soit les matériels américains ou ceux promis par les trois pays européens, ils ne seront pas immédiatement livrés. L’échéancier, en particulier pour les packages américain et britannique, est même long puisque ces matériels ne seront pas prélevés sur les stocks des armées US et britanniques mais commandés aux équipementiers, fabriqués et enfin livrés.

 

« It’s a long time »

Le mécanisme britannique « International Fund for Ukraine » (IFU) permet de fournir une assistance militaire à l’Ukraine. Ce fonds de 520 millions de £ (600 millions d’euros) permet d’acheter des armements dans le cadre d’appels d’offres dont plusieurs ont été passés en 2023. Le premier, clos le 26 avril, portait sur la fourniture de systèmes de défense aérienne. Le second, clos le 4 mai, portait sur les capacités de frappe dans la profondeur. Il faut désormais attendre l’attribution des marchés, la fabrication des systèmes et leur livraison. C’est ce qui explique que Londres, dans un communiqué de lundi, a bien précisé que ces équipements seront livrés à Kiev «au cours des prochains mois». A Kiev de s’armer, tout d’abord, de patience.

 

Londres a aussi détaillé son projet de février sur la formation des pilotes de chasse ukrainiens. Il a mis l’accent sur la volonté britannique de « construire une nouvelle armée de l’air ukrainienne équipée de F-16 aux standards otaniens ». Des F-16 que Kiev réclame depuis des mois pour retrouver la supériorité aérienne face aux avions russes. Londres a précisé que la formation des pilotes ukrainiens commencera cet été, formation qui s’inscrit dans un effort multinational pour fournir des F-16 à Kiev.

 

Cette formation débutera avec une phase de formation « élémentaire » pour des pilotes ukrainiens visiblement novices puisque le communiqué britannique parle de « basic training » (formation de base). Il faut donc prendre avec prudence les annonces britanniques qui s’inscrivent dans le temps long. La fourniture des équipements évoqués lundi, lors de la rencontre entre Rishi Sunak et Volodimir Zelensky ne sera certainement pas aussi rapide que celle des missiles de longue portée Storm Shadow que l’armée de l’Air ukrainienne a déjà utilisés au combat la semaine dernière.

 

Dans le domaine de la formation des pilotes ukrainiens, Paris ne veut pas être en reste. Emmanuel Macron a annoncé lundi avoir « ouvert la porte pour former des pilotes » de chasse ukrainiens « dès maintenant », au lendemain d’une rencontre avec son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky à Paris. « On étudie déjà la capacité à assurer des formations si nécessaire pour aider l’armée de l’air ukrainienne à monter en gamme », précise l’Élysée qui annonce « des concertations » avec les partenaires de la France « dans les prochains jours ».

 

Pour autant les questions subsistent. Des formations pour quels pilotes (novices ou confirmés) ? Sur quels avions ? Et à quand la conversion des pilotes ukrainiens sur F-16, avions dont ne disposent ni le Royaume-Uni ni la France ?

 

Pourquoi la France refuse de livrer des avions de chasse à Kiev

 

Pendant sa tournée européenne, le président ukrainien Zelensky a renouvelé son souhait d’obtenir des avions de chasse occidentaux, mais Paris passe son tour. Explications.

Par Théo Sauvignet

 

Comme Berlin, Paris exclut encore de fournir des avions de combat à Kiev,  la visite éclair du président ukrainien Volodymyr Zelensky à Paris, dimanche 14 mai au soir.. En février,  Emmanuel Macron estimait qu'il y avait « plus urgent » et « plus utile » pour le pays pour contrer l'invasion de la Russie.

 

Dans l'est de l'Ukraine,, les protagonistes ont très vite perdu la maîtrise du ciel sans qu'aucune des deux parties ne parvienne à la retrouver, ce qui est très handicapant pour mener des opérations au sol. Alors que ces matériels font partie des plus demandés par l'Ukraine, pourquoi la France rechigne-t-elle autant ?

 

Guerre en Ukraine: La Russie assure avoir détruit un lanceur de missiles Patriot dans son attaque "exceptionnelle" sur Kiev

 

  Un système Patriot a été abattu par des missiles Kinjal affirme la Russie.

 par Axel Heimken  (Reuters)

 

Une pluie de missiles Kinjal s'est abattue sur Kiev, dans la nuit de ce lundi à mardi. La Russie revendique avoir neutralisé un système antiaérien Patriot envoyé à l'Ukraine par les États-Unis.

 

L'Ukraine a affirmé, ce mardi, avoir abattu au cours de la nuit six missiles hypersoniques russes Kinjal, une arme pourtant présentée par Moscou comme quasiment impossible à intercepter.

 

Les autorités ukrainiennes n'avaient jusqu'à présent jamais revendiqué une telle interception d'une volée entière de missiles hypersoniques. Si cette annonce était confirmée, elle prouverait l'efficacité des systèmes de défense antiaérienne fournis par les Occidentaux et récemment déployés par les Ukrainiens.

 

Un système Patriot détruit

 

Mais, dans le même temps, la Russie a au contraire déclaré avoir détruit un système Patriot de conception américaine au coût faramineux d'un milliard de dollars. C'est à l'aide d'un Kinjal que le Patriot a été détruit, rapporte Zvezda, publication spécialisée dans le domaine militaire, précisant que ces tirs visaient des unités de combat ukrainiennes et des dépôts de munitions.

 

Ces six Kinjal font partie de 18 missiles tirés dans la nuit par la Russie contre Kyiv, une attaque d'une intensité "exceptionnelle" selon l'armée ukrainienne, qui affirme les avoir tous interceptés.

 

Les sirènes d'alerte ont retenti dans quasiment toute l'Ukraine au cours de la nuit. Elles ont fonctionné pendant plus de trois heures à Kyiv et dans sa région.

Le ciel de la capitale ukrainienne s'est illuminé d'éclairs à chaque interception de missiles, avec des pluies de débris.

 

Selon le chef d'état-major de l'armée ukrainienne, Valéry Zaloujny, la Russie a tiré six missiles hypersoniques Kinjal à partir de bombardiers stratégiques, neuf missiles de croisière depuis des navires en mer Noire et trois missiles Iskander depuis le sol.

Tous ces missiles ont été abattus, ainsi que six drones Shahed de fabrication iranienne et trois drones de reconnaissance, a-t-il affirmé sur la messagerie Telegram.

"La mission de l'ennemi est de semer la panique et de créer le chaos. Cependant, dans la zone opérationnelle Nord (dont Kyiv), tout est parfaitement sous contrôle", a dit le général Serhiy Naev, commandant des forces conjointes des forces armées.

 

Attaque "exceptionnelle"

Les autorités municipales à Kyiv ont fait état de trois personnes blessées par des chutes de débris.

"C'était exceptionnel en terme d'intensité - le plus grand nombre d'attaques de missile en un temps réduit", a déclaré le chef de l'administration militaire de la capitale ukrainienne, Serhiy Popko, via la messagerie Telegram.

 

Reuters n'a pas été en mesure de vérifier ces informations de manière indépendante.

L'Ukraine avait déjà revendiqué il y a quelques jours l'interception pour la première fois d'un missile Kinjal au-dessus de Kyiv à l'aide d'un Patriot américain.

Le président russe Vladimir Poutine a régulièrement présenté le Kinjal comme la preuve de la supériorité des équipements militaires de son pays vis-à-vis de l'Otan.

 

Ce missile d'une portée de 2.000 km, dont le nom signifie "poignard", peut transporter des ogives conventionnelles ou nucléaires et vole à 10 fois la vitesse du son. La Russie l'a utilisée pour la première fois l'an dernier dans le cadre du conflit en Ukraine, contre laquelle elle a lancé en février 2022 une "opération militaire spéciale", et elle n'a reconnu en avoir tiré qu'en quelques occasions.

 

La Russie multiplie ses attaques

 

Alors que l'Ukraine ne cache pas sa volonté de déclencher une vaste contre-offensive dans les semaines à venir, la Russie a repris fin avril ses tirs de missiles à longue portée et multiplié ces derniers jours ses attaques aériennes, principalement contre Kyiv. L'Ukraine dit être parvenue à repousser la majorité de ces attaques.

 

Les forces ukrainiennes ont déjà accompli au cours de la semaine écoulée leurs plus importantes avancées depuis novembre dernier, reprenant plusieurs kilomètres carrés de territoires au nord et au sud de Bakhmout, ville de l'Est de l'Ukraine que les Russes s'efforcent de conquérir depuis des mois.

 

La Russie a reconnu que certaines de ses unités s'étaient repliées dans ce secteur mais elle dément que ses lignes soient en train de s'effondrer.

L'Ukraine déclare que ces percées sont localisées et ne constituent pas le début de sa contre-offensive à proprement parler, qu'elle espère pouvoir mener avec les nombreux chars et véhicules blindés livrés par ses soutiens occidentaux depuis le début de l'année.

 

Le colonel Claudio Madile à la tête de la Brigade Motorisée

Le colonel Claudio Madile a pris le commandement de la Brigade Motorisée ce mardi 16 mai lors d’une cérémonie à Bourg-Léopold. Il succède au colonel  Lieven Geeraert qui avait pris ses fonctions il y a deux ans en juillet 2021. Le colonel Claudio Madile a débuté sa jeune carrière d’officier au bataillon Libération-5 Ligne où il est resté pendant dix ans, évoluant dans les différentes fonctions. D’avril 2019 à juillet 2021, il en a été le chef de corps. Durant son mandat, l’unité a été déployée en Lituanie au sein de l’opération enhanced Forward Presence (eFP) et a participé à l’opération Vigilant Guardian (OVG). Elle s’apprête à effectuer un nouveau déploiement en Roumanie pour le deuxième semestre de cette année.

 

Adjoint du chef d’état-major de la Brigade Motorisée depuis août 2022, le lieutenant-colonel Bart Van Mele en est devenu le chef d’état-major en remplacement du lieutenant-colonel Philippe Rooms lors de cette même cérémonie. Il est issu du bataillon d’Artillerie.

 

La Brigade Motorisée est composée de 15 unités et compte près de 7.500 hommes. Elle comprend cinq bataillons de manœuvre à savoir le 1/3 Bataillon de Lanciers, le Bataillon de Chasseurs Ardennais, le Bataillon Libération-5 Ligne, le Bataillon Carabiniers Prince Baudouin -Grenadiers et le Bataillon 12/13 Ligne. Ces cinq bataillons reçoivent le soutien de quatre unités de support au combat avec le bataillon de Chasseurs à Cheval (capacité ISTAR de reconnaissance), le bataillon d’Artillerie, les 4ème et 11ème bataillons de Génie ainsi que quatre unités d’appui avec les 4ème et 10ème Groupes Systèmes de Communication et d’Information et les 4ème et 18ème bataillons Logistique. Le quartier général de la brigade est réparti entre les deux sites de Marche-en-Famenne et de Bourg-Léopold.

 

La Brigade Motorisée est le fer de lance du contrat CaMo (capacité motorisée) et du partenariat stratégique avec la France. Les premiers véhicules Griffon sont attendus pour 2025. Le colonel Claudio Madile devrait assurer la dernière étape de la transition avant le début de la conversion de la brigade vers la doctrine du programme Scorpion.

 

La force aérienne norvégienne manque de techniciens pour faire voler ses chasseurs-bombardiers F-35A

 

« Pour faire voler nos avions, il faut toute une armée ». Tel est était le slogan de la campagne de recrutement lancée par l’armée de l’Air & de l’Espace en 2011, l’idée étant de rompre avec une communication qui, jusqu’alors, se focalisait surtout sur les pilotes et laissait de côté d’autres spécialitées tout aussi indispensables. Et probablement que la force aérienne royale norvégienne [Luftforsvaret] pourrait s’en inspirer…

 

En effet, la semaine passée, le ministère norvégien de la Défense a confirmé les conclusions d’un récent rapport parlementaire, à savoir que la Luftforsvaret ne disposait pas suffisamment de techniciens pour assurer la maintenance de ses chasseurs-bombardiers F-35A [30 exemplaires livrés sur les 52 commandés, ndlr]. « Nous avons pour 90 milliards de couronnes [près de 7,7 milliards d’euros] d’avions mais nous n’avons pas le personnel pour les faire voler », a-t-il résumé.

 

« Dans la situation sécuritaire actuelle, nos avions de combat sont cruciaux pour notre sécurité. On ne peut pas se mettre dans une situation où ils sont cloués au sol faute de personnel technique. Il est nécessaire de mettre en œuvre des mesures à court et à long terme », a ainsi estimé Bjørn Arild Gram, le ministre norvégien de la Défense.

 

Pour rappel, depuis le retrait de ses F-16, la Luftforsvaret ne met en œuvre que des F-35A. D’où l’importance du problème auquel elle est confrontée. Problème qui, par ailleurs, serait lié à la fermeture de la base de Bodø et le déploiement des nouveaux avions à Ørland et Evenes, beaucoup de techniciens ayant quitté le service à cette occasion.

 

Les mesures de long terme viseront à recruter puis à former de nouveaux techniciens… Une enveloppe de cinq millions d’euros va être débloquée à cette fin à l’occasion d’un « coup de pouce » au budget de la Défense qui, au passage, atteindra les 2% du PIB d’ici 2026. Mais ce processus prendra du temps, d’autant plus qu’il est question de créer une « filière nationale d’aviation à l’école secondaire de Fosen ».

 

Aussi, dans l’immédiat, la Luftforsvaret va solliciter les services de Lockheed-Martin, le constructeur du F-35A. En effet, celui-ci fournira le personnel technique dont elle a besoin pour faire voler ses chasseurs-bombardiers pour 1,75 millions d’euros. Puis Kongsberg Aviation Maintenance Services devrait ensuite prendre le relais, via un contrat au montant quasiment équivalent. Si ce dispositif sera en vigueur pour la seule année 2023, il pourrait cependant aller bien au-delà, afin de donner le temps nécessaire aux futurs spécialistes de la force aérienne norvégienne de se former et d’acquérir de l’expérience.

 

« Les subventions ne résoudront pas les problèmes court terme »,  a jugé Sigurd Myrvoll, un représentant syndical qui a travaillé sur la base aérienne de Bodø pendant plus de trente ans. « La formation d’un spécialiste ou d’un technicien en aéronautique prend du temps. Il faut cinq ans avant qu’il ne soit formé. Ensuite, il faut encore plus de temps pour qu’il ait suffisamment d’expérience pour commencer à travailler sur le F-35 », a-t-il soutenu.

 

Le ministère des Armées va accélérer le projet de satellites d’observation IRIS

Actuellement, les capacités en matière de renseignement d’origine image [ROIM] depuis l’espace des forces françaises reposent sur la constellation CSO [Composante Spatiale Optique], issue du programme MUSIS [Multinational Space-based Imaging System for Surveillance, reconnaissance and observation].

 

Pouvant prendre des clichés en très haute résolution [THR], le premier satellite, CSO-1, fut placé sur une orbite héliosynchrone phasée, à 800 km d’altitude, en décembre 2018. Deux ans plus tard, une fusée Soyouz décolla du Centre spatial guyanais [CSG] avec CSO-2 à son bord. Cet engin vole à 480 km d’altitude, afin de fournir des images dites EHR [Extrême Haute Résolution].

 

Quant à CSO-3, qui doit rejoindre CSO-1, il n’est toujours pas opérationnel… faute de lanceur, la coopération spatiale avec la Russie ayant été suspendue après le début de la guerre en Ukraine. Cela étant, lors de la séance des questions au gouvernement, à l’Assemblée nationale, le 16 mai, le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, a confirmé qu’il serait mis en orbite en 2024, par une fusée Ariane 6 [sous réserve, toutefois, que ses ennuis techniques soient réglés].

 

Quoi qu’il en soit, le rapport mis en annexe du projet de Loi de programmation militaire [LPM] 2024-30 précise que deux satellites CSO seront encore opérationnels à l’horizon 2030. Ce qui est logique étant donné que CSO-1 ne devrait plus être en service à cette échéance, sa durée de vie étant de dix ans.

 

Cela étant, le texte prévoit que les deux CSO restants seront remplacés d’ici 2035 par deux satellites issus du programme IRIS, pour lequel des études ont été lancées en 2019. Selon le chef d’état-major de l’armée de l’Air & de l’Espace [CEMAAE], le général Stéphane Mille, cette nouvelle constellation « permettra d’améliorer globalement notre taux de revisite et de bénéficier d’une meilleure résolution ainsi que du recueil d’un nombre d’images plus important ».

 

Le programme IRIS a été confié par la Direction générale de l’armement [DGA] à Airbus Space et à Thales Alenia Space [TAS]. Le premier satellite aura une capacité dite EHRmin et sera doté de miroirs en carbure de silicium. Quant au second, dit EHRmax, il devrait être beaucoup plus performant que les CSO actuels, même si sa technologie sera plus « classique ».

 

Or, depuis la publication du projet de LPM 2024-30… et l’adoption de ce dernier par la commission de la Défense de l’Assemblée nationale, la semaine passée, le ministère des Armées a revu ses priorités… et décidé d’accélérer le programme IRIS. C’est en effet ce qu’a aussi annoncé M. Lecornu aux députés.

 

« La semaine prochaine, je vais pouvoir porter un amendement du gouvernement à la Loi de programmation militaire qui va permettre d’inscrire un satellite supplémentaire, IRIS […] sans attendre 2030-2035 », a déclaré le ministre. « C’est une bonne nouvelle pour notre souveraineté et pour notre service de renseignement », a-t-il ajouté. Reste donc à voir quel autre programme sera impacté par cette décision… puisqu’il faudra bien trouver les fonds nécessaires pour la financer.

 

Pour rappel, selon le projet de LPM 2024-30, il est question d’investir 6 milliards d’euros dans le renouvellement des capacités spatiales.

 

« Les moyens de communication seront appuyés par une constellation de connectivité sécurisée et multi-orbites européenne. Nos capacités de surveillance de l’espace exo-atmosphérique seront accrues afin de détecter et attribuer un acte suspect ou agressif dans l’espace. Un centre de commandement, de contrôle, de communication et de calcul des opérations spatiales [C4OS] disposera des moyens pour piloter les actions vers, dans, et depuis l’espace. Les technologies différenciantes, renforcées de manière souveraine ou en partenariat, privilégieront la défense active pour protéger nos moyens en orbite basse, le renforcement de la connectivité, le renseignement et le lancement réactif », précise le texte.

 

Par ailleurs, s’agissant des satellites de communication [SATCOM] en orbite géostationnaire, le second engin de la constellation Syracuse 4 sera lancé le 16 juin prochain par une fusée Ariane 5. Quant au troisième qui était initialement prévu, Syracuse 4C, il ne figure pas dans le projet de LPM 2024-30. En revanche, des études « pour la construction de la génération Syracuse 5 » seront lancées, a assuré M. Lecornu.

 

« Il y a des pistes de travail actuelles sur des constellations en orbite basse ou des achats de service » mais « on garde dans notre cœur de souveraineté sur les gros satellites en orbite haute notre propre savoir-faire », a-t-il précisé.

 

Lors de sa dernière audition parlementaire, le général Mille s’en était expliqué. « Les réflexions se sont portées sur la constellation de connectivité sécurisée et multiorbite européenne Iris 2 [à ne pas confondre avec les satellites d’observation du même nom, nldr]. Nous visons une meilleure couverture et une meilleure latence, ce qui est important pour notre futur cloud de combat, ainsi qu’une plus grande résilience. Cette constellation complétera nos moyens souverains, avec un noyau étendu qui garantira notre accès à la Satcom », avait-il dit.

 

Et d’ajouter : « Les constellations qui évoluent en orbite basse ont aussi des avantages. Les deux sont complémentaires pour assurer l’efficacité et la redondance dont les armées ont besoin. Mettre tous nos objets sur l’orbite géostationnaire serait à mon sens dangereux ».

 

La marine brésilienne pourrait devoir désarmer 40% de ses navires d’ici 2028

Le commandant de la marine brésilienne, l’amiral Marcos Sampaio Olsen, a alerté les sénateurs de la commission des relations extérieures et la défense nationale de la très faible capacité de la marine, en raison des réductions budgétaires et de la limitation des moyens financiers.

 

L’amiral a assuré qu’il devra désactiver 40% des équipements, tels que les navires, diverses armes et munitions, jusqu’en 2028, en raison « de l’obsolescence et de sévères restrictions budgétaires qui empêchent un entretien ou un rééquipement adéquat ».

 

Selon le commandant, la marine a progressivement perdu 1 milliard de reais depuis 2017, date à laquelle le système de plafond des dépenses a été mis en œuvre en tant que politique budgétaire. Ce chiffre représente 72 % des dépenses de la marine.

Parmi les désarmements figurent des frégates construites au Brésil dans les années 1970, des munitions telles que des missiles sol-air et des torpilles totalement obsolètes. Selon le commandant de la Marine nationale, l’écart entre le nombre quantitatif de livraisons de nouveaux moyens navals, prévues jusqu’en 2029, considéré par lui comme "assez faible" par rapport à ce qui sera démobilisé à court terme, est un signe dangereux de faiblesse qui nécessite une attention urgente.

 

Selon le commandant, la présence de la Marine dans les actions nationales dépend des approvisionnements tels que le carburant, les munitions et le soutien logistique, ainsi que des services de maintenance. Cet ensemble de capacités a été durement touché.

 

Olsen a souligné qu’il y a un engagement envers la défense nationale, une réduction des activités de sécurité maritime, une difficulté à assister à la diplomatie navale et à apporter un soutien aux actions dans les États de la fédération.

Olsen a déclaré qu’« il n’est pas très responsable de comprendre le Brésil comme un pays exempt de menaces. Ces menaces sont présentes. Le pacifisme unilatéral qui imprègne notre société et certains décideurs semblent ignorer ces problèmes ». Précisément à cause de ce cadre budgétaire, nous avons perdu la capacité d’agir dans tout l’Atlantique Sud et dans d’autres zones d’intérêt pour l’État brésilien."

 

Pour illustrer la dimension du travail, Olsen a affirmé que le Brésil « n’est pas viable sans l’utilisation de la mer ». Il a souligné que 97% de l’exploration pétrolière et 80% de l’exploration gazière proviennent des eaux et que l’économie bleue, se référant aux ressources délivrées par la mer, correspond à 20% de l’économie brésilienne.

 

L’amiral a également déclaré qu’il considérait la question de la transmission des données comme délicate. Il a déclaré que « 99% de nos transmissions se font par mer, pas par satellite. Et elles sont susceptibles d’interférences, d’interruptions et de surveillance. Nous devons avoir une capacité de surveillance et de protection pour cela ».

 

Olsen a appelé à un renforcement dans le budget et a suggéré qu’à court terme, le montant soit débloqué des fonds qui accumulent 7,2 milliards de reais, « qui peuvent être, à condition qu’ils soient exceptionnels, affectés par la Force et utilisés dans la constitution navale ». " Le nouveau cadre budgétaire serait une solution à long terme.

 

Olsen a ajouté que « nous ne pouvons pas négliger la défense de l’Amazonie bleue. Le scénario mondial a montré à quel point il est préjudiciable pour un pays de ne pas disposer d’une capacité de dissuasion militaire crédible. Dans une menace imminente pour les intérêts de l’État et du peuple brésilien, si nous n’avons pas de force dure derrière nous, si nous n’avons pas de forces de dissuasion derrière nous, nous serons touchés. »

 

La fin de l’escadre

 

La flotte de navires de la marine brésilienne est très ancienne, quelle que soit la métrique comparative utilisée. Les frégates restantes de classe Niteroi peuvent voir 40 ans de service, et certaines des armes qu’elles utilisent ne représentent plus une létalité assurée contre les actifs navals modernes et les menaces aériennes sophistiquées, telles que les armes à distance, les drones et les missiles anti-surface.

 

La corvette Barroso a besoin d’une mise à niveau à mi-vie, ce qui signifie une escorte de moins de valeur disponible lors de la modernisation. En effet, la flotte de huit escorteurs a un âge moyen d’environ 39 ans. Les sous-marins restants de la classe Tupi Tikuna représentent en moyenne 22 ans.

 

La flotte vieillissante de patrouilleurs fluviaux datant des années 1970 et 1980 est en nombre insuffisant et doit être remplacée par des modèles plus récents capables de faire fonctionner des systèmes d’armes et de capteurs plus modernes, des drones et/ou des hélicoptères autonomes.

 

En plus des navires de patrouille océanique de 500 tonnes, dont le programme devrait être annoncé en détail plus tard en 2023, un appel d’offres pour l’acquisition de deux nouveaux navires-citernes/logistiques devrait être annoncé au cours de l’exercice biennal 2023/24.

 

Le seul navire disponible de ce type, le NT G-23 Gastão Motta, est très ancien (32 ans de service) et présente de sévères restrictions opérationnelles et environnementales en raison de sa conception, qui utilise ce qu’on appelle le monocoque, lorsque la législation internationale en vigueur qui exige des pétroliers à double coque.

 

Cette situation a empêché la marine brésilienne de naviguer avec une force opérationnelle de navires où il n’y a pas de soutien de ports amis, c’est-à-dire une courte portée opérationnelle pour la flotte brésilienne en dehors de l’Atlantique Sud, sauf lorsqu’elle opère intégrée dans une force opérationnelle avec des nations en mesure de fournir ce soutien.

 

L’Ukraine a rejoint le centre d’excellence de l’Otan pour la cyberdéfense en coopération

Son adhésion à l’Alliance atlantique ayant été bloquée en 2008, en raison notamment de l’opposition de la France et de l’Allemagne, l’Ukraine ne désespère pas d’arriver à ses fins, alors qu’elle a déjà obtenu le statut de candidat à l’Union européenne l’an passé. Cependant, cette perspective est encore lointaine…

 

Les pays membres « sont d’accord pour que l’Ukraine devienne membre de l’alliance, mais en même temps c’est une perspective de long terme », avait en effet déclaré Jens Stoltenberg, le secrétaire général de l’Otan, en février dernier. « La question actuellement, c’est de s’assurer que l’Ukraine reste une nation indépendante et souveraine et pour cela nous devons soutenir l’Ukraine », avait-il ajouté.

 

En attendant, rien n’empêche l’Ukraine ne se rapprocher de certaines structures de l’Alliance. Ainsi, ce 17 mai, elle a ainsi officiellement rejoint le Centre d’excellence pour la cyberdéfense en coopération [NATO CCD COE], créé à Tallinn [Estonie] par l’Otan en 2008. Elle y a été accueillie en même temps que le Japon, l’Irlande et l’Islande.

 

« Je suis vraiment reconnaissant que l’Islande, l’Irlande, le Japon et l’Ukraine aient décidé de nous rejoindre. Nous sommes ravis que des pays ayant les mêmes valeurs puissent partager leurs connaissances en matière de cybersécurité et échanger les bonnes pratiques pour lutter contre les cyberattaques. Notre objectif est de favoriser une coopération accrue et de récolter les bénéfices de cette coalition à grande échelle grâce à la recherche, à la formation et aux exercices », a commenté Mart Noorma, le directeur du CCD COE.

 

L’adhésion de l’Ukraine à ce centre d’excellence aurait dû avoir lieu au début de l’année 2022… Mais, selon la presse ukrainienne, sa candidature aurait été bloquée par la Hongrie. Cela étant, à la même époque, Kiev avait conclu un accord avec l’Otan afin de renforcer ses capacités de cyberdéfense, via la la plateforme de partage d’informations sur les logiciels malveillants de celle-ci.

 

Étant donné les attaques informatiques qu’elle a régulièrement subies depuis 2014, l’Ukraine aura certainement beaucoup de choses à partager avec les autres membres du CCD COE… En effet, Kiev a pris très tôt les mesures qui s’imposaient pour contrer les attaques régulièrement lancées contre ses infrastructures critiques [énergie, télécommunications] par des cyber-assaillants présumés russes.

 

L’Ukraine a opéré une « véritable révolution en montant en gamme dans sa lutte informatique défensive », avait ainsi récemment résumé le général Aymeric Bonnemaison, le commandant de la cyberdéfense française [COMCYBER]. Mais elle a également bénéficié « d’un appui occidental précoce », ce qui s’est par la suite révélé « décisif » pour sa « résilience dans les domaines des télécommunications et du numérique », avait-il poursuivi.

 

Sans doute plus décisif encore, alors que la Russie se préparait à l’envahir, l’Ukraine a profité d’un important appui de l’US CYBERCOM… et des groupes informatiques américains, comme Microsoft.

 

« L’implication directe des États-Unis s’est nettement intensifiée fin 2021. […] L’US CYBERCOM a déployé sur place une équipe d’experts militaires, chargée de découvrir si des attaquants russes avaient d’ores et déjà infiltré les systèmes ukrainiens. [Et cela] a été capital au cours des semaines précédant le conflit », avait encore observé le général Bonnemaison.

 

Le 09/05/2023.

8 mai 1945 : l’épopée finale du général Leclerc

par  Ministère des Armées

Après la libération de Paris et celle de Strasbourg, l’épopée salvatrice du général Leclerc de Hauteclocque s’est poursuivie au cœur du Reich allemand. A Berchtesgaden, il a même pris possession du Berghof, la résidence secondaire d’Hitler, et de son fameux « Nid d’Aigle » … Juste avant les Américains ! Récit de ces 15 derniers jours avant l’armistice.

 

 

28 avril 1945

« Vous foulez aujourd'hui le sol de l'ennemi, récompense tant attendue après des années et des mois de lutte. En dehors des combats, vous éviterez de tomber dans deux excès, d’une part la brutalité́ inutile et le pillage, d’autre part les relations avec la population auxquelles se prêterait toujours la platitude germanique. Il s’agit, une fois de plus, de faire honneur à votre uniforme. » Le général Leclerc s’adresse aux quelques milliers d’hommes de sa 2e division blindée (2e DB), alors en route vers Munich.

Les premières colonnes ont franchi le Rhin trois jours plus tôt, 36 heures seulement après leur départ de Châteauroux, à plusieurs centaines de kilomètres. Objectif Salzbourg, en Autriche, via Berchtesgaden, petit village au pied des alpes bavaroises.

29 avril 

 Rattachée au XXIe corps US, la 2e DB progresse facilement en territoire allemand. « Il n'y a quasiment pas de combats mais plutôt de nombreuses files de prisonniers ennemis. Les difficultés se résument principalement au passage des ponts, souvent détruits. Les Français utilisent au mieux les autoroutes puisque l'Allemagne était le seul pays qui en était dotée à l’époque », explique le général (2S) Jean-Paul Michel, président de la Fondation Maréchal Leclerc de Hauteclocque.

30 avril 

Hitler se suicide dans son bunker de Berlin. Les unités de Leclerc passent le Danube.

2 mai 

Les éléments de tête atteignent finalement Munich. C’est le jour où les Soviétiques s’emparent de la capitale allemande. 

4 mai, 17h 

Le général Leclerc aime les symboles et Berchtesgaden en est un. Non loin de la commune se trouve le Berghof, résidence secondaire d’Hitler où il se rendait régulièrement. La Kehlsteinhaus, surnommée le « Nid d'Aigle », est, elle, perchée à plus de 1800 mètres d’altitude, 1 km plus loin.

Les unités françaises d’avant-garde talonnent les Américains mais ces derniers arrivent en premiers à Berchtesgaden. Heureusement pour Leclerc, qui suit la progression de ses hommes à distance, les militaires de l’oncle Sam ne réalisent pas toute la symbolique du site. Le 4 mai, vers 17h, un sous-groupement de la 2e DB atteint finalement le centre-bourg, quelques heures seulement après les Américains…mais continue sa route jusqu’au Berghof, en grande partie détruit par les bombardements alliés.

5 mai 

Le général Leclerc arrive sur les lieux et prend une décision forte : hisser le drapeau français en haut de l’éperon rocheux où se trouve le Nid d’Aigle. « Il fait sélectionner des alpinistes parce qu'il y a encore beaucoup de neige et la paroi est très rude. L’ascenseur le desservant ayant été dévasté, neuf heures sont nécessaires au petit groupe avant d’atteindre le sommet », raconte le général Michel avec passion. Les Américains s'aperçoivent alors qu'ils ont été dupés par les Français. Ces derniers devront d’ailleurs quitter Berchtesgaden le lendemain, à la demande de l’état-major US. « Ce passage par le Berghof fait partie du mythe Leclerc car c’était un haut lieu de la politique hitlérienne, affirme Vladimir Trouplin, historien et conservateur du musée de l’Ordre de la Libération. Cela contribue à nourrir sa légende de général qui passe partout. »

6 mai 

Le général Leclerc se dirige vers Salzbourg. En chemin, à Bad Reichenhall, des soldats américains l’interpellent et lui présentent des militaires portant la tenue de la Waffen-SS. La douzaine de prisonniers sont en fait des Français de la division Charlemagne. S’ensuit un dialogue à la teneur encore floue, même aujourd’hui, entre Leclerc et un lieutenant SS. Mais le sort réservé à ce petit groupe est fatal. « Il n'y a pas de version officielle sur cette affaire et les circonstances de leur exécution ne sont pas établies avec certitude », indique le général Jean-Paul Michel.

8 mai 1945

La 2e DB se regroupe près du lac Ammersee, à l’ouest de Munich. La troupe fête l’armistice avec émotion. Le général Leclerc adresse alors un ultime message à tous les personnels de la division : « L’ennemi a capitulé, du Tchad à Berchtesgaden, partout vous l’avez battu. Au nom de la France je vous remercie, et je vous demande de montrer au service du pays, la même énergie demain dans la paix, qu’hier dans la guerre2. »

Petite histoire d'un armistice

 

 

 Michel Goya

Le 29 septembre 1918, à l’annonce de l’armistice bulgare, Ludendorff déclare au gouvernement qu’il faut demander un armistice mais aux Etats-Unis seulement. On espère qu’ils autoriseront d’abord le retour de l’armée allemande intacte et, en fondant le processus de paix sur les Quatorze Points proclamés par le président Wilson le 8 janvier 1918, que la paix sera plus clémente pour l’Allemagne que dans les projets du Royaume-Uni et surtout de la France. Wilson ayant déclaré qu’il ne s’adresserait qu’à un réel régime démocratique, l’initiation de ce processus doit être précédée de changements institutionnels. Il faut nommer un nouveau chancelier et rendre celui-ci uniquement dépendant de la confiance du Reichstag. C’est ce nouveau gouvernement qui gérera le processus de paix, déchargeant ainsi le commandement militaire de la responsabilité de la défaite.

Le 3 octobre, le prince Max de Bade, connu pour son libéralisme, devient chancelier et forme un gouvernement de majorité. Ludendorff lui décrit une situation stratégique catastrophique dont est exclue toute responsabilité de l’armée. Par l’intermédiaire de la Suisse, le nouveau chancelier envoie un message au Président Wilson dans la nuit du 4 au 5 octobre. L’accusé de réception arrive le 9, Wilson n’exige alors que l’évacuation des territoires occupés comme préalable à un armistice. Ludendorff fait alors un exposé beaucoup plus rassurant au gouvernement. L’ennemi n’a pas réalisé de percée et piétine désormais, gêné par ses problèmes logistiques. Même si la Roumanie rompait le traité de paix, ce qui couperait l’Allemagne de sa principale ressource en hydrocarbures naturels, l’armée pourrait résister encore deux ou trois mois. Le 12, le gouvernement allemand répond qu’il est prêt à l’évacuation de France et de la Belgique mais demande au préalable la cessation des hostilités.

Pendant toute cette période, les Alliés européens se sont inclus dans le processus de négociation en cours entre les Etats-Unis et l’Allemagne. Furieux de ne pas avoir été consultés, ni même informés par le Président Wilson, ils lui adressent un message lui demandant de tenir compte de l’avis technique des commandants en chef avant d’entamer toute négociation. Wilson accepte. Dans le même temps, contre toute logique diplomatique, la marine allemande poursuit sa campagne sous-marine. Le 4 octobre déjà, le navire japonais Hirano Maru a été coulé au sud de l’Irlande provoquant la mort de 292 personnes. Le 10, c’est au tour du Leinster, avec 771 personnes à bord, d’être coulé par un sous-marin qui est accusé par ailleurs d’avoir tiré aussi sur les canots de sauvetage. L’indignation est énorme et contribue à durcir la nouvelle réponse de Wilson, le 14 octobre. Le Président des Etats-Unis condamne la guerre sous-marine et les destructions dans les territoires occupés. Il exige cette fois des garanties sur le maintien de la suprématie militaire des Alliés et la suppression de tout « pouvoir arbitraire ».

La note de Wilson provoque l’indignation allemande mais les militaires sont à nouveau optimistes lorsque le ministre de la guerre, von Scheuch, déclare, hors de toute réalité, qu’il est possible de mobiliser encore 600 000 hommes. Ludendorff déclare ne plus craindre de percée et espère tenir jusqu’à l’hiver. Malgré les évènements récents et la perte des bases des Flandres, l’amiral Von Scheer se refuse de son côté à interrompre la guerre sous-marine. Le 20 octobre, le gouvernement allemand, à qui la réalité stratégique aura toujours été cachée, répond à Wilson qu’il ne saurait être question de négocier autre chose que l’évacuation des territoires envahis et tout au plus consent il à limiter la guerre sous-marine. Cela suffit à mettre en colère l’Amirauté contre ce gouvernement bourgeois et démocrate qu’elle déteste.

Le 23, la réponse est cinglante. Wilson laisse aux conseillers militaires le soin de proposer des conditions d’armistice « rendant impossible la reprise des hostilités par l’Allemagne » et suggère que le kaiser doit abdiquer. La proposition soulève un tel tollé que le haut commandement allemand lance le 24 octobre un ordre de jour appelant « à combattre jusqu’au bout » et songe à une dictature militaire imposant la guerre totale. Max de Bade exige alors le départ d’Hindenburg et de Ludendorff. Le 26, Guillaume II accepte que ce dernier soit remplacé par le général Wilhelm Grœner. Le 27, le gouvernement allemand déclare à Wilson qu’il accepte ses conditions de négociation.

Le 26 octobre, après avoir consulté les commandants en chef, Foch a terminé de rédiger le projet de conditions d’armistice. Toute la difficulté était de définir ce qui pourrait être acceptable par l’Allemagne tout en interdisant à celle-ci de reprendre éventuellement les opérations en cas de désaccord sur les négociations de paix. Le texte prévoit l’évacuation, sans destruction, des zones occupées et de l’Alsace-Lorraine dans les 15 jours qui suivront la signature. Il prévoit également deux garanties : la livraison d’une grande partie de l’arsenal (150 sous-marins, 5 000 canons, 30 000 mitrailleuses, 3 000 mortiers de tranchées, 1 700 avions) et des moyens de transport (500 locomotives, 15 000 wagons et 5 000 camions) ; la démilitarisation de toute la rive gauche et d’une bande de 40 km sur la rive droite du Rhin. Les Alliés doivent également occuper militairement la région ainsi que trois têtes de pont d’un rayon de 30 km doivent être occupées par les Alliés à Mayence, Coblence et Cologne.

Le projet est ensuite discuté par les différents gouvernements. Il est durci par les Britanniques qui exigent de plus de livrer des navires de surface. Le texte définitif est établi le 4 novembre et envoyé à Wilson. A aucun moment, il n’est demandé de capitulation militaire et la crainte est plutôt que face à des demandes aussi dures, les Allemands ne refusent. Les jours qui suivent agissent comme un grand révélateur de la faiblesse de l’Allemagne, mais on ne modifie par le projet.

Le 5 novembre, le général Grœner ordonne le repli général sur la position Anvers-Meuse mais son armée n’en peut plus. L’infanterie allemande a perdu un quart de son effectif en un seul mois. Le général Hély d’Oissel note alors dans son carnet, qu’il n’y a plus en face de lui de résistance organisée : « nous n’avons plus devant nous qu’un troupeau de fuyards privés de cadres et incapable de la moindre résistance ».

Les estimations du nombre de réfractaires et déserteurs allemands varient de 750 000 à 1,5 million, déserteurs que l’administration militaire renonce à traquer et même à comptabiliser. Il existe des poches entières de « manquants », y compris en Allemagne comme à Cologne ou à Brême où une « division volante » pille la région. Lorsque les Britanniques arrivent à Maubeuge le 9 novembre, ils ont la surprise d’y trouver 40 000 déserteurs. Cinq jours plus tard, plusieurs camps de soldats allemands en Belgique se mutinent et plus d’une centaine d’officiers sont tués.

L’effondrement est aussi matériel. Du 15 juillet au 15 novembre, les Alliés ont pris plus de 6 000 canons et 40 000 mitrailleuses, le nombre d’avions en ligne a été divisé par deux et le carburant manque désespérément pour les mettre en œuvre. La production de guerre s’est effondrée. Plus 3 000 canons avaient été produits en mars 1918, moins de 750 en octobre.

La progression des Alliés n’a plus de limites sinon celle des destructions des territoires évacués, qui freinent l’avancée de la logistique et de tous les moyens lourds, et de la grippe espagnole qui fait alors des ravages, en particulier chez les Américains et à la 4e armée française. Depuis le 11 octobre, le 8e corps d’armée français perdait plus de 1 000 tués et blessés chaque semaine mais il n’en perd que sept dans la dernière semaine de guerre alors qu’il avance de dix kilomètres par jour. Le 8 novembre, le corps apprend le début des négociations d’armistice et reçoit l’ordre de contourner et de simplement bombarder les résistances rencontrées. Le 9 novembre, la ville de Hirson est prise sans combat. Le 11 novembre, la 1e armée française est à 20 km à l’intérieur de la Belgique après avoir parcouru 150 km depuis le 8 août. Parallèlement, la 5e armée atteint Charleville le 9 novembre, alors que la 4e est enfin à Mézières et à Sedan. Le dernier combat intervient lors du franchissement de la rivière à Vrigne-Meuse qui coûte 96 morts et 198 blessés en trois jours au 163e RI dans la plus parfaite inutilité des deux côtés.

La décomposition intérieure allemande est accélérée par les décisions de l’Amirauté, toujours aussi peu inspirée en cette fin de guerre. Le 28 octobre, sans même prévenir le gouvernement, l’amiral von Scheer donne l’ordre à la flotte de Wilhelmshaven de partir au combat. Il espère attirer la flotte britannique dans un traquenard de mines et de sous-marins pour l’attaquer ensuite avec ses navires de ligne et obtenir au mieux une victoire, au pire un baroud d’honneur. Le 29 octobre, les équipages n’acceptent de n’aller qu’à Kiel. Les drapeaux rouges sont hissés sur les navires. La mutinerie se rend maîtresse de la ville, puis des détachements de marins parcourent le pays. Des bandes de pillards s’attaquent aux dépôts de l’armée. Les émeutiers occupent les gares.

Le 28 octobre, les socialistes demandent l’abdication du Kaiser pour faciliter la paix. Guillaume II se rend à Spa où il envisage un temps avec Hindenburg la possibilité de rétablir l’ordre par la force de l’armée. Guillaume II abdique finalement et se réfugie le 10 novembre aux Pays-Bas.

Le 5 novembre, Groener explique au gouvernement que la résistance de l’armée ne peut plus être que de très courte durée et il invoque les mauvaises influences de l’intérieur propres à « précipiter l’armée dans l’abîme ». Le 6, Max de Bade envoie la délégation de négociation des conditions de l’armistice. Le 7, les plénipotentiaires allemands pour signer l’armistice se présentent à la Capelle devant la 1ère armée française.

La délégation allemande est présidée par le ministre d’Etat Matthias Erzberger. Il est accompagné par le comte Oberndorff représentant le ministère des affaires étrangères, le général von Winterfledt ancien attaché militaire à Paris et le capitaine de vaisseau Vanselow, mais c’est bien le civil Erzberger qui porte la responsabilité de la convention d’armistice. Il le paiera de sa vie en 1921.

Les conditions d’armistice sont présentées le 8. Le 10, le Kaiser abdique et se rend aux Pays-Bas. Le 11 à 5h du matin, le texte de la convention d’armistice est signé. La seule modification concerne la réduction de 5 000 du nombre de mitrailleuses à fournir, afin d’armer les forces de l’ordre en Allemagne. A 11h, le soldat Delaluque du 415e RI sonne le cessez-le-feu. L’armistice est conclu pour 30 jours. Le 7 décembre, ce seront les mêmes mais avec quelques officiers supplémentaires qui iront à Trèves pour le renouvellement de l’armistice. Mais Foch ne veut recevoir que les quatre plénipotentiaires du 8 novembre. Le haut commandement allemand n’apparait donc toujours pas. La débâcle militaire allemande est réelle mais le commandement parvient à la cacher en faisant rentrer les unités en apparent bon ordre, oubliant des poches entières de déserteurs en Belgique. Ces troupes sont saluées par le chancelier Ebert comme n’ayant « jamais été surpassées par quiconque ». L’idée du « coup de poignard dans le dos » de l’armée allemande comme responsable de la défaite est déjà là et fera plus tard la fortune de la propagande nationaliste et nazie. Dans l’immédiat ce n’est pas la préoccupation première des Alliés qui sont déjà satisfaits que l’armée allemande, dont ils surestimaient eux aussi la force, ne puisse pas reprendre le combat.

Les discussions préalables au traité de paix avec l’Allemagne sont beaucoup plus difficiles et longues que prévu, les Alliés ayant des visions divergentes. Elles n’aboutissent qu’en mai 1919. Il faut encore plus d’un mois pour faire accepter le traité à l’Allemagne, traité qui n’entre en vigueur que 10 janvier 1920. En droit, la guerre avec l’Allemagne ne s’arrête qu’à ce moment-là.

La force aérienne ukrainienne prétend avoir abattu un missile hypersonique russe Kinjal

Dévoilé en mars 2018 par le président russe, Vladimir Poutine, parmi plusieurs nouvelles armes décrites comme « invincibles », le Kh-47M2 Kinjal [code Otan : AS-24 « Killjoy »] est un missile aéro-balistique pouvant être doté d’une ogive fragmentation de 500 kg ou d’une tête nucléaire. Ayant une portée [annoncée] de 2000 km, il serait en mesure de voler à une vitesse approchant Mach 10 après avoir tiré par un avion de combat MiG-31K « Foxbat ». En clair, son hyper-vélocité fait que, théoriquement, il ne laisse quasiment aucun temps de réaction aux défenses aériennes.

Ces dernières années, ce Kh-47M2 Kinjal a fait l’objet de beaucoup de publicité… Sans doute à des fins d’intimidation et de « signalement stratégique » vers l’Otan, comme l’a souligné le colonel David Pappalardo, dans un numéro de la revue Vortex, publiée par l’armée de l’Air & de l’Espace. En tout cas, utilisé pour la première fois au combat en Ukraine en mars 2022, ce missile n’a pas donné un avantage opérationnel significatif aux forces russes.

« La mise en service de missiles hypersoniques a bien eu lieu. Si leur emploi a été très médiatisé, leur efficacité opérationnelle n’est pas encore à maturité », a d’ailleurs récemment constaté le général Thierry Burkhard, le chef d’état-major des armées [CEMA]. Cependant, a-t-il aussi prévenu, « nous ne pouvons ignorer l’apparition de cette menace » car « un jour, la pleine capacité opérationnelle sera atteinte ».

 

N’ayant pas, pour le moment, apporté de plus-value opérationnelle aux forces russes engagées en Ukraine, le Kh-47M2 Kinjal est-il vraiment invincible? La question se pose, après que le site spécialisé ukrainien Défense Express a publié des photographies – non authentifiées – montrant ce qui semble être les restes d’un tel missile, celui-ci ayant été abattu dans les environs de Kiev le 4 mai, a priori par une batterie Patriot.

Seulement, la force aérienne ukrainienne a d’abord refusé de faire le moindre commentaire… Puis, via son porte-parole, le colonel Yuri Ignat, elle a démenti avoir abattu un Kh-47M2 Kinjal le 4 mai [soit après la mystérieuse attaque de drones ayant visé le Kremlin, ndlr].

Puis, à peine vingt-quatre heures plus tard, la force aérienne ukrainienne a fini par revendiquer l’interception d’un engin hypersonique russe.

« Oui, nous avons abattu le missile Kinjal, qui n’a pas d’équivalent. Je félicite le peuple ukrainien pour cet événement historique », s’est en effet réjoui le général Mykola Oleshchuk, son chef d’état-major, ce 6 mai. Et de préciser qu’une batterie de défense aérienne Patriot avait été sollicitée et que le missile en question avait été tiré par un MiG-31K depuis l’espace aérien russe.

La Marine nationale va créer des « flottilles côtières » grâce au renforcement de sa réserve opérationnelle

Comme les autres armées, la Marine nationale devrait le nombre de ses réservistes opérationnels à la faveur de la Loi de programmation militaire [LPM] 2024-30 [sous réserve que celle-ci soit adoptée par le Parlement]. Actuellement, et selon son site dédié au recrutement, elle en compte 6’000, soit près de 15% de son effectif global [40’000 marins, nldr].

« Affectés au sein des forces ou en état-major, ils contribuent à la protection des installations et des unités de la marine, à la surveillance du littoral et au contrôle naval du trafic commercial. Ils soutiennent donc pleinement la mission de protection et de défense maritime du territoire national », précise la Marine nationale.

Lors de son audition à l’Assemblée nationale dans le cadre de l’examen du projet de LPM 2024-30, son chef d’état-major [CEMM], l’amiral Pierre Vandier, a assuré qu’elle serait « pleinement engagée dans l’augmentation des réserves souhaitée par le ministre [des Armées, Sébastien Lecornu], avec une structuration en trois axes : l’appui aux marins d’active, la création de flottilles côtières pour renforcer l’action littorale […] et le développement de compétences spécifiques dont la Marine ne dispose pas ou pas assez ».

Ce renforcement significatif de la réserve opérationnelle au sein de la Marine nationale visera surtout à « durcir la défense maritime du territoire ».

« Nous sommes en train de retendre notre dispositif global, qui repose notamment sur la chaîne sémaphorique. Les moyens des sémaphores seront renouvelés et certains d’entre eux seront équipés de drones. Nous allons renforcer nos liens avec les centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage [Cross], afin de pouvoir corréler les faits qu’ils observent avec la situation militaire », a d’abord expliqué l’amiral Vandier.

Or, avec 19’000 km de côtes à surveiller, ce sera donc dans cette idée de « durcir la défense maritime » que, pour la plupart, les futurs réservistes de la Marine nationale seront affectés à des « flottilles côtières », avec l’objectif de « combler les angles morts » tout en favorisant les « interactions » avec les collectivités du littoral.

« Dans le cadre du doublement des réserves, nous allons constituer des flottilles côtières : il y en aura une par façade en métropole, avec des antennes outre-mer », a indiqué le CEMM. « L’objectif est de constituer des moyens de surveillance nautique qui seront armés par des réservistes, à la fois anciens et jeunes. Ces derniers navigueront sur des embarcations à coque semi-rigide et patrouilleront en lien avec les sémaphores dans des missions d’assistance publique et de renseignement », a-t-il ajouté.

Mettant l’accent sur leur « développement innovant », ces flottilles côtières, a expliqué l’amiral Vandier, seront progressivement créées « à partir de gens qui ont de l’expérience et en incorporant des jeunes » ayant « envie de naviguer et d’aller dans les territoires ». Et de préciser : « L’architecture retenue consiste à essaimer dans de petites escouades, sur le littoral »

Ces flottilles côtières suivront un « développement innovant », a précisé l’amiral Vandier. Ainsi, « l’idée générique est d’incorporer nos réservistes, de prendre des jeunes ayant envie de naviguer et d’aller dans les territoires », l’architecture « retenue » consistant « à essaimer dans de petites escouades, sur le littoral ».

Pour rappel, l’objectif inscrit dans le projet de LPM 2024-30 vise à atteindre le ratio d’un réserviste opérationnel pour deux militaires d’active à l’horizon 2035.

 

LES CHOSES S'ACCELERENT POUR LE RENOUVELLEMENT DES CAMIONS CITERNES !

 

BLABLACHARS

Les choses semblent s’accélérer pour le renouvellement des camions-citernes, puisque après deux longues années d'attente et la publication le 3 février dernier de l'appel d'offres, c'est au tour du DCE (Dossier de Consultation des Entreprises) d'être disponible depuis cette semaine. Ce marché destiné au "renouvellement des capacités de ravitaillement des forces armées françaises" prévoit la livraison d'un maximum de 800 camions-citernes déclinés en différentes versions. Outre la livraison des camions, le futur marché d'une durée de 10 ans et constitué de tranches optionnelles inclut également la fourniture d'un système de soutien complet (outillage, documentation, rechange,...) ainsi que le Maintien en Condition Opérationnelle par le biais de prestations de soutien et de maitrise technique. L'accélération constatée au niveau des dates de publication des différents documents est également visible dans la date de remise des premières offres, puisque celle-ci est fixée au 7 juillet ! Pour remplacer les camions en service, le marché prévoit des engins de 12 et 20m3 dont la moitié devrait recevoir une cabine blindée. Alors qu'aujourd'hui la flotte de camions citernes est composée de camions de différentes marques, le futur marché devrait être attribué à un seul constructeur, qui selon les exigences fixées doit être capable de produire annuellement au sein de l'UE 150 camions citernes de plus de 10m3 équipés de leur système de distribution de carburant. Attendu depuis deux ans et en l'absence de tout autre marché de renouvellement de camions, le renouvellement des camions-citerne devrait voir s'affronter les "poids-lourds" du secteur parmi lesquels Arquus, Iveco, RMMV (Rheinmetall Man Military Vehicles), Scania (appartenant au groupe Volkswagen comme MAN) ou encore Mercedes, qui devront donc rendre leur première copie dans deux mois ! 

 

PRECISIONS SUR LES LIVRAISONS DE M1A1 A LA POLOGNE.

 

 

BLABLACHARS
Alors que les premiers exemplaires des Abrams M1A2 SEP V3 
commandés en juillet 2021 devraient arriver en Pologne au début de l'année 2025, le gouvernement polonais a présenté, il y a quelques jours le calendrier de livraison des 116 M1A1 dont l’acquisition a été décidée en fin d'année dernière. Le général Jablonski, en charge du programme Abrams au sein du ministère de la défense a indiqué qu'un premier lot de 14 M1A1 seront livrés à la 1ère Brigade blindée à la fin du mois prochain. Ces premiers chars seront suivis de 42 autres engins livrés entre aout et septembre prochain, puis d'un troisième lot de 60 chars qui seront remis à l'armée polonaise avant le mois de février 2024. Outre la 1ère Brigade blindée, la 19ème Brigade d'infanterie mécanisée sera également dotée d'un bataillon de chars Abrams, ces deux brigades étant subordonnées à la 19ème Division d'infanterie mécanisée. Ces 116 engins seront accompagnés de 8 poseurs de pont M1074, de 12 chars de dépannage M88A2 Hercules et de 6 véhicules de commandement M577. Ce package blindé est complété par 26 Hummer SECM (Shop Equipment Combat Maintenance) et par des équipements de maintenance et de formation. La mise en Ce contrat dont le cout total est estimé à 1,4 milliard de dollars, dont sont déduits  200 millions de dollars remboursés par le mécanisme FMF (Foreign Military Financing). Ces 116 M1A1 "gap-fillers" devraient rejoints par les premiers M1A2 SEP V3 début 2025, dont les livraisons devraient se poursuivre jusqu'en février 2026, date à laquelle l'armée polonaise devrait disposer de 366 chars M1 (A1 et A2), de 38 M88A2 et de 25 M1074.

Combien couterait aux contribuables français un alignement des capacités haute intensité de l’Armée de Terre sur la Pologne ?

Depuis quelques mois, en lien à la guerre en Ukraine et à la montée généralisée du risque d’engagement majeur en Europe et ailleurs, la question des capacités des armées à faire face à un conflit dit de « haute intensité » est devenue un thème récurrent tant dans l’hémicycle du parlement que dans la communication gouvernementale, les médias et les réseaux sociaux. Très souvent, la Pologne, qui a annoncé un effort colossale pour moderniser et étendre ses capacités terrestres dans ce domaine dans les années à venir, est cité en référence, faisant de Varsovie l’exemple à suivre. La Loi de Programmation Militaire 2024-2030 en cours de finalisation semble ne pas avoir suivi cette voie, en conservant un format de la Force Opérationnel Terrestre, le bras armé de l’Armée de Terre, sensiblement identique à ce qu’il est aujourd’hui, et en ne procédant qu’à une augmentation sectorielle de certaines capacités, comme dans le domaine du Renseignement, de la défense anti-aérienne ou encore des frappes dans la profondeur et des drones. Pour autant, en 2030, selon ce schéma, l’Armée de terre conservera une force opérationnelle limitée en terme de haute intensité, avec seulement 200 chars lourds modernisés Leclerc, 650 véhicules de combat d’infanterie VBCI sur roues relativement légers et faiblement armés, moins de 120 tubes de 155 mm et une poignée de Lance roquettes unitaires, potentiellement remplacés par des HIMARS américains.

De fait, en 2030, l’Armée de terre sera effectivement plus performante, notamment avec la poursuite du programme SCORPION et la livraison des VBMR Griffon et Serval pour remplacer les VAB, et des EBRC Jaguar pour le remplacement des AMX-10RC et des ERC-90 Sagaie, et disposera de réserves considérablement accrues en terme de munitions et de personnels avec la montée en puissance de la Garde nationale. Toutefois, pour ce qui est de la haute intensité, elle sera très loin des 6 divisions lourdes polonaises alignant 1250 chars de combat modernes M1A2 Abrams SEPv3 et K2PL Black Panther, 1400 véhicules de combat d’infanterie Borsuk, 700 canons automoteurs K9 Thunder et 500 lance-roquettes mobiles K239 et HIMARS. Si dans de nombreux domaines, comme en matière de forces aériennes, navales et évidemment en terme de dissuasion, Varsovie devra s’appuyer sur ses alliés, elle disposera incontestablement de la plus importante force terrestre conventionnelle en Europe, sensiblement supérieure à la somme des forces terrestres françaises, allemandes, britanniques, italiennes et espagnoles réunies, soit les 5 économies les plus fortes du vieux continent.

Si l’on ne peut que se féliciter de voir un allier s’équiper aussi efficacement dans ce domaine, force est de constater que dans de nombreux domaines, les positions et postures polonaises sont loin d’être alignées avec celles des européens de l’Ouest. En outre, Varsovie entend, de toute évidence, prendre une position politique centrale en Europe de l’Est précisément pour contrer le pouvoir des puissances d’Europe occidentale au sein de l’UE, en s’appuyant sur l’aura que lui conférera cet outil militaire face à la menace russe. Pour équilibrer les rapports de force politiques, que ce soit face aux menaces militaires russes ou autre (Turquie..), ou au sein de l’Union Européenne et de l’OTAN, il serait naturellement bien venu, pour la France, de doter son Armée de Terre d’une puissance comparable, comme de nombreux anciens officiers supérieurs et généraux ne cessent de le répéter sur les réseaux sociaux et dans les médias. Toutefois, au delà du besoin lui-même, il convient d’évaluer les couts et les contraintes qu’engendrerait une telle transformation, de sorte à en déterminer la soutenabilité budgétaire mais également sociale. Et comme nous le verrons, l’effort budgétaire d’une telle ambition serait loin d’être hors de portée, puisqu’il serait sous la barre des 0,25% du PIB français aujourd’hui.

L’objectif de cet article n’étant pas de disserter sur l’organigramme optimal de l’Armée de Terre pour répondre à ces menaces, nous prendrons comme base de travail un format souvent évoqué par les spécialistes du sujet, avec une FOT portée à 90.000 hommes (contre 77.000 aujourd’hui) pour armer 2 divisions lourdes dédiées à la haute intensité, et 1 division de projection de puissance et d’appui rassemblant les multiplicateurs de force et troupes spécialisées que sont les Troupes de Marine, les Troupes de montagne, les forces parachutistes, la composante d’aéromobilité (ALAT) et la Légion Étrangère. En terme de matériels, nous considérerons l’acquisition de 1000 chars de combat modernes, épaulés de 1000 véhicules de combat d’infanterie lourds chenillés, de 500 systèmes d’artillerie automoteurs de 155 et 105 mm, de 300 lance-roquettes à longue portée, ainsi que de 200 EBRC jaguar supplémentaires, 120 systèmes de défense anti-aérienne autotractés SHORAD et 500 véhicules blindés spécialisés (Génie, récupérateurs de blindés, Ravitaillement des systèmes d’artillerie etc..). Les autres programmes en cours, notamment dans le cadre du programme SCORPION, sont considérés inchangés, tout comme le format de l’Aviation légère de l’Armée de terre, qui serait toutefois bien avisée de se pencher sur la possible re-acquisition des Tigre et NH90 TTH australiens pour densifier son format. L’enveloppe budgétaire pour acquérir ces équipements d’établie autour de 50 Md€, en tenant compte des couts de conception et de fabrication.

Au delà de ces couts initiaux, il convient d’évaluer les couts récurrents. En premier lieu, le parc matériel couterait 2 Md€ par an pour la maintenance et les pièces détachées, soit 4% du prix d’acquisition par an. Il conviendrait d’augmenter les effectifs professionnels de l’armée de terre de 15.000 hommes et femmes, soit un cout annuel de 1,5 Md€, auxquels il faudrait ajouter 0,5 Md€ pour les quelques 45.000 réservistes supplémentaires qui devront être recrutés pour consolider les forces. Au total, donc, sur une période de 15 ans, la montée en puissance ici envisagée couterait donc 3,2 Md€ par an pour l’acquisition de matériels, alors que l’extension des effectifs couterait en moyenne 2 Md€ par an. L’installation des nouvelles unités, quant à elles, est estimée à 300 m€ pour 3 nouvelles unités par an. Sur les 15 premières années, donc, ce programme couterait aux finances publiques 5,5 Md€, soit 0,22% du PIB. Au delà des 15 années d’acquisition, les couts récurrents s’établiraient à 4 Md€ pour les effectifs et la maintenance, auxquels il conviendra d’ajouter 2,5 Md€ pour le financement des modernisation de parc, soit un total de 6,5 Md€ par an (exprimés en Euro 2023) et 0,26% du PIB. Sur la seule prochaine LPM à venir, il serait donc nécessaire d’augmenter la dotation de 30 Md€ sur 7 ans pour financer la mesure. On notera que pour atteindre un résultat sensiblement équivalent, Varsovie va consacrer plus de 1% de son PIB sur une période équivalente.

Pour autant, et comme à chaque fois qu’il est question d’investissements de défense il convient également de considérer les recettes fiscales et sociales supplémentaires pour l’État consécutives à l’investissement. En effet, ce n’est pas tant l’investissement lui-même qui importe dans ce type de planification, mais son impact sur les déficits publics et par conséquent sur la dette souveraine française. En l’occurrence, les investissements industriels génèrent un retour budgétaire supérieur à 50%. En effet, tous les équipements et prestations de service industrielles sont soumis à la TVA immédiatement récupérée par l’Etat, alors que les industries de défense sont très faiblement exposées à l’importation. De fait, les investissent de l’état se dissipent dans l’économie essentiellement en salaires qui, rappelons le, sont soumis à un taux de prélèvement supérieur à 42%. Dès lors, considérer un retour budgétaire à 50% est une valeur par défaut, prenant en considération la somme des recettes directes et indirectes, sociales et fiscales pour l’état. Pour les investissements salariaux, un retour de 30% sera considéré, la encore par défaut. Appliqués à ce modèle, l’impact effectif du programme sur les équilibres budgétaires serait rapporté à 3,15 Md€ en moyenne sur la phase de montée en puissance, soit 0,125% du PIB, et à 3,4 Md€ au delà, soit 0,136% du PIB exprimé en euro constants 2023. A titre de comparaison, un tel montant est relativement proche de ce que dépenses les français chaque année en abonnements sur les plateforme de streaming.

Il serait bien évidemment possible d’optimiser le modèle pour en réduire l’impact budgétaire, par exemple en appliquant les mesures préconisées dans l’article « Comment l’évolution de la doctrine de possession des équipements peut permettre d’étendre le format des armées ?« , ou en approfondissant les effets potentiels de l’effort industriel notamment en terme d’exportations potentielles, ce qui tendrait à en réduire le cout budgétaire effectif, et donc d’en accroitre la soutbenabilité. Quoiqu’il en soit, deux questions demeureraient. En premier lieu, il conviendrait d’établir que cet investissement serait le plus à-même de répondre aux besoins de la France et de ses armées aujourd’hui et demain. En effet, avec une Pologne aussi forte militairement, et le renforcement sensible des forces terrestres en Europe de l’Est et du nord, il est évident que la menace militaire russe sur l’OTAN et son flanc orientale sera contenue pour de nombreuses années. Dit autrement, quitte à devoir investir 100 Md€ supplémentaires sur 15 ans, ne serait-il pas plus efficace de renforcer la composante chasse de l’Armée de l’Air, ou la composante sous-marine de la Marine Nationale, sachant que l’une comme l’autre offriraient des caractéristiques de retour budgétaire et donc d’impact budgétaire similaires ?

En second lieu, il convient de prendre en considération l’ensemble des contraintes qui s’appliqueront à la montée en puissance des armées. En l’occurrence, l’une des plus importantes, peut-être au delà des contraintes budgétaires elles-mêmes, n’est autre que la contrainte de recrutement, sachant que même si la situation s’est sensiblement améliorée ces dernières années du fait des évolutions de la condition militaire dans la LPM 2019-2025, il est loin d’être acquis que l’Armée de terre puisse effectivement recruter 15.000 militaires professionnels supplémentaires ainsi que 45.000 garde nationaux, au-delà des trajectoires déjà établies dans la LPM 2024-2030. Certes, la constitution de nouvelles unités de haute intensité équipées de matériels modernes ajoutera à l’attractivité des armées, mais il n’en demeure pas moins vrai que cette hypothèse de croissance aura sans le moindre doute fait sourciller les officiers s’étant confrontés aux difficultés RH de l’Armée de Terre ces dernières années.

Quoiqu’il en soit, il est désormais établi qu’il est loin d’être inconcevable de doter l’Armée de terre d’une capacité d’engagement comparable à celle en constitution en Pologne en matière de Haute Intensité, tout en conservant les capacités exclusives de ses unités en matière de projection et d’appui. D’un point de vue budgétaire, cet effort serait relativement limité en terme d’impact sur les déficits, et pourrait même être sensiblement optimisé vis-à-vis du modèle ici abordé. Une chose est certaine, cependant, un tel effort ferait de la France le pivot central de toute la défense européenne, et donnerait une légitimité incontestable à Paris pour soutenir l’autonomie stratégique européenne, puisqu’avec un tel modèle, le soutien militaire des États-Unis dans le domaine conventionnel face, par exemple, à la Russie, serait tout simplement superfétatoire. Eu égard à la sensibilité de l’exécutif français aujourd’hui, c’est probablement cet argument, conjointement aux couts réels de la mesure détaillés dans cet article, qu’il conviendrait de mettre en avant dans les médias et au parlement pour espérer obtenir une altération positive de la trajectoire.

Le groupe Thales visé par une enquête du parquet national financier pour des soupçons de corruption en Inde

Un intermédiaire indien affirme avoir aidé Thales à décrocher le marché de rénovation des avions Mirage-2000 en Inde, en étant rémunéré par un circuit financier offshore. La justice française a ouvert une enquête.

 

  par Benoît Collombat 

Le monde de l’armement n’aime guère dévoiler ses coulisses. C’est dire si la démarche de Sanjay Bhandari est singulière. Cet intermédiaire indien réfugié à Londres depuis 2015 a déposé plainte contre Thales devant le Tribunal de commerce de Nanterre, le 12 mars 2021, pour réclamer le paiement de commissions qu’il estime dues.

Révélée par le journal britannique The Telegraph, en janvier 2022, cette plainte, que la cellule investigation de Radio France a pu consulter, a été peu médiatisée en France, à l’exception de la lettre spécialisée Intelligence Online. Elle est d’autant plus surprenante qu’elle dévoile à la justice française ce qui pourrait s’apparenter à un circuit de corruption.

Sanjay Bhandari réclame onze millions d’euros à Thales

Si Sanjay Bhandari a fait cette démarche, c’est parce qu’il s’estime lésé par Thales. Il lui réclame onze millions d’euros pour solder ce qui lui aurait été promis en contrepartie de son aide pour décrocher en Inde le marché de rénovation d’avions de chasse Mirage-2000. Un contrat global de 2,4 milliards de dollars (1,6 milliards d’euros) remporté le 29 juillet 2011 par Thales, mais aussi par Dassault (actionnaire principal de Thales avec l’État français).

Le 28 octobre 2022, Sanjay Bhandari a été débouté par le Tribunal de commerce de Nanterre. Ses demandes d'indemnisation ne seront donc pas satisfaites. Mais selon les informations de la cellule investigation de Radio France, le Parquet national financier (PNF) a tout de même ouvert une enquête pour vérifier si les circuits de financement qu’il décrit dans sa plainte ne correspondent pas à des commissions occultes. Des policiers britanniques ont été chargés d’entendre l’intermédiaire indien aujourd’hui domicilié à Londres, afin de recueillir les éléments matériels susceptibles d’appuyer ses déclarations. De son côté, Thales dit “contester fermement les allégations” de Sanjay Bhandari.

"Agent, lobbyiste et facilitateur"

Dans sa plainte devant le Tribunal de commerce de Nanterre, l'intermédiaire affirme partager “une relation commerciale de longue date, depuis 1996” avec Thales. Il dit notamment être intervenu pour débloquer les suites de la vente de six sous-marins Scorpène à l’Inde et avoir rencontré, en octobre 2009, le responsable de la filiale indienne de Thales, François Dupont. "M. Sanjay Bhandari a convenu, par un contrat non formalisé, de fournir son appui et ses services à Thales pour [lui] permettre de résoudre ses difficultés en Inde", peut-on lire dans sa plainte. Selon ses dires, il aurait permis "à Thales d’obtenir l’ensemble des autorisations et accords nécessaires à l’exécution du contrat des six sous-marins Scorpène avec le ministère indien de la Défense". Et il poursuit : "À la suite de la signature de ce contrat et du déblocage de la situation, une relation commerciale basée sur la confiance s’est installée entre M. Sanjay Bhandari et Thales. Cette coopération n’a pas été formalisée par écrit, Thales rémunérant M. Sanjay Bhandari indirectement en passant par un autre intermédiaire."

À partir de 2009, Sanjay Bhandari aurait "formalisé cette relation" en concluant "un contrat de consulting" avec Thales à travers sa société, Offset India Solutions Private Limited (OIS), précise encore la plainte. "M. Sanjay Bhandari est devenu, durant de nombreuses années, un acteur d’intermédiation commerciale clé en Inde pour le compte de Thales", peut-on lire.

 

 "D’une caste assez élevée, Sanjay Bhandari est à la confluence de plusieurs mondes, explique le rédacteur en chef d’Intelligence Online, Pierre Gastineau : celui de la politique locale (il est très proche du parti du Congrès), le ministère de la Défense, les groupes privés… C’est à la fois un agent, un lobbyiste et un facilitateur." Un rôle qui peut être très politique, comme le souligne le journaliste spécialiste des questions de défense, Jean Guisnel, auteur du livre Armes de corruption massive : "Des industriels français m’ont confié que le système de corruption sur les ventes d’armes servait à financer les deux principaux partis indiens, le parti du Congrès et le BJP. En général, le parti au pouvoir prend autour de 15 % sur l’ensemble des contrats d’armement."

Une opération séduction menée par Thales

Dans les années 2000, Thales convoite un important contrat de modernisation des avions de chasse Mirage-2000, vendus par la France à l’Inde, au début des années 1980. "C’est ce qu’on appelle le MLU (pour mid-life update) : au bout de 30 ans, il est possible de redonner 30 ans de vie supplémentaire aux appareils, explique Jean Guisnel. Mais l’industriel qui a vendu l’avion n’a aucune garantie de procéder à cette modernisation, il y a donc un nouvel appel d’offres." Sanjay Bhandari affirme que Thales, qui "négociait avec le ministère de la Défense indien depuis janvier 2008", aurait déployé de grands moyens pour le convaincre d’intervenir dans ce dossier.

Ainsi, il "a été invité à visiter le siège de Thales en France en juin 2011", explique-t-on dans sa plainte. "Durant son séjour, M. Sanjay Bhandari a rencontré différents hauts représentants du groupe. Il a d’abord rencontré M. François Dupont, directeur général de Thales en Inde, à l’Hôtel Plaza Athénée, à Paris. Ensuite, c’est au restaurant Laurent [dans le 8e arrondissement de Paris] que M. François Dupont a présenté à M. Sanjay Bhandari, M. Guy Delevacque, vice-président senior des ventes mondiales de Thales."

Lors de ce séjour parisien, une proposition financière aurait été faite à l’intermédiaire indien. “Les représentants de Thales ont sollicité les services de M. Sanjay Bhandari pour décrocher le contrat de modernisation des Mirage-2000 en s’engageant sur une commission s’élevant à 20 millions d’euros." Un engagement supposé de Thales "qui n’est bien entendu pas formalisé par écrit, précise la plainte. La rémunération convenue devait s’ajouter à la rémunération minime versée à la société OIS [de Sanjay Bhandari] au titre du contrat de consulting."

 

Et un mois plus tard, Thales remporte effectivement le contrat pour la modernisation de la flotte de Mirage-2000 de l’armée indienne. Sanjay Bhandari estime avoir "permis à Thales de lever tous les blocages liés à la signature du contrat" et avoir fourni "régulièrement aux représentants de Thales (…) des informations sur l’état d’avancement de l’approbation du projet par les autorités indiennes. Thales, par ses représentants, sollicitait des renseignements confidentiels sur les négociations en cours", précise la plainte.

Un montage financier offshore

Mais via son avocat, Sanjay Bhandari décrit aussi le montage financier supposé qui aurait été mis en place pour le rémunérer discrètement. "Thales, par l’intermédiaire de M. François Dupont [responsable de la filiale de Thales en Inde, aujourd’hui directeur des affaires européennes de Naval Group], a informé M. Sanjay Bhandari de la mise en place d’un montage financier impliquant plusieurs structures, en Inde et à Dubaï, pour le paiement de sa commission, indique la plainte. Ce montage a été présenté à M. Sanjay Bhandari comme étant une pratique d’usage au sein du groupe Thales pour le paiement des services d’intermédiation commerciale, compte tenu de la règlementation en vigueur en France. La filiale Thales Middle East & Africa devait se charger du déploiement de la structure financière mise en place."

Selon Sanjay Bhandari, l’argent devait dans un premier temps transiter par deux sociétés basées à Bangalore, en Inde (AvioHeliTronics InfoSystems Pvt Ltd et Axiscades Engineering Technologies Ltd, indirectement détenues par Rajeev Chandrasekhar, un responsable politique membre du BJP). L’objet officiel de cette première opération était de "financer des projets de coopération avec l’industrie de défense indienne". "Le schéma consistait à ce que Thales octroie des contrats offset aux deux sociétés [indiennes]", est-il encore précisé dans la plainte. Les contrats offset, ou contrats de compensation industrielle, sont des contrats passés par l’entreprise avec le pays acheteur, en marge du contrat principal. Officiellement, il peut s’agir de faire du transfert de technologie ou d’investir dans l’économie locale, à la demande du pays acheteur.

"Vous avez beaucoup moins de contrôle et donc plus de facilité pour faire passer des pots-de-vin à travers un contrat offset qu’avec le contrat principal, explique l’avocat Nicola Bonucci, ancien directeur des affaires juridiques à l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques). J’avais tenté de développer un cadre international en matière d’offset, on en avait même discuté dans le groupe du G20 anticorruption. Les pays qui n’y étaient pas favorables étaient ceux où ce type de pratiques se déroulaient le plus : la Chine, l’Inde, le Brésil ou l’Afrique du Sud."

Dubaï, paradis bancaire et judiciaire

Dans un deuxième temps, pour rémunérer Sanjay Bhandari, une partie de l’argent passée par les deux sociétés indiennes "devait être versée à une société de consulting basée à Dubaï, nommée UHY Consulting, affirme l’intermédiaire dans sa plainte. Cette société ne devait pas en réalité fournir d’autres services à Thales que le versement des sommes dues par Thales à M. Sanjay Bhandari sur les comptes désignés. Le but de la conclusion de ces contrats en cascade était de faciliter le transit des fonds provenant de Thales vers les comptes de M. Sanjay Bhandari. À cet effet, Thales (par l’intermédiaire de M. François Dupont) a demandé à M. Sanjay Bhandari de se rendre à Dubaï, lieu à partir duquel débutait l’étape initiale de la structure de financement."

Pour le spécialiste du blanchiment et des paradis fiscaux, Eric Vernier, en règle générale, le choix de Dubaï n’est pas un hasard. "C’est un paradis fiscal, mais surtout un paradis bancaire voire judiciaire, décrypte-t-il. Il est très difficile d’obtenir une information précise et transparente sur ses affaires bancaires. Même s’il y a apparemment des échanges d’informations, c’est la place de Dubaï qui décide ou non de les transmettre."

Selon le journaliste Yann Philippin qui a révélé l’affaire des Rafale Papers sur le site de Mediapart (des soupçons de corruption autour de la vente de 36 Rafale à l’Inde en septembre 2016 pour 7,8 milliards d’euros), Thales serait également passée par Dubaï pour rémunérer un autre intermédiaire indien, Sushen Gupta, très actif quant à lui autour du contrat des Rafale.

"On sait que Thalès a versé 2,4 millions d’euros à Sushen Gupta à Dubaï entre 2004 et 2008, affirme Yann Philippin. On peut toutefois soupçonner que le groupe a continué à payer Sushen Gupta par la suite, car en 2016 le site spécialisé Intelligence Online expliquait que Thales avait de nouveau fait appel aux Gupta pendant la dernière ligne droite avant la signature du contrat des Rafale, en 2015-2016. On peut donc supposer que cette nouvelle intervention n’était pas gratuite." Interrogé sur ce point, Thales nous a répondu que "toute question concernant le programme Rafale devait être posée à Dassault Aviation". Mais lorsque nous l’avons fait, Dassault nous a dit ne faire "aucun commentaire".

Un audit de façade ?

Dans sa plainte, Sanjay Bhandari affirme qu’en "juin 2011" un "calendrier de paiement" aurait été convenu avec Thales, en passant par ce montage financier : "Neuf millions d’euros [devaient lui être payés] lors de la signature du contrat de modernisation des Mirage-2000, et 11 millions lors du paiement des fonds par l’État indien." Il assure que "de nombreux échanges de correspondances WhatsApp émanant des différents représentants de Thales (…) confirment l’existence de la structure de paiement mise en place" pour le versement de sa commission.

Sanjay Bhandari explique également que des garanties lui auraient été données par le groupe de défense pour éviter d’éventuelles poursuites judiciaires. À l’en croire, afin de donner une apparence de respectabilité à sa société de Dubaï, Thales avait envisagé de commander un audit tout à fait officiel au cabinet Ernst & Young. Et l’intermédiaire poursuit : "En date du 14 février 2019, [M.] Budin [vice-président senior Moyen-Orient, Afrique et Inde de Thales] affirmait (…) que la société intermédiaire intervenant dans le montage financier serait soumise à un audit par le cabinet Ernst & Young afin de ‘protéger tout le monde’."

Le circuit supposé emprunté pour le règlement de l’intermédiaire pose question. Car tout versement de commission pouvant s’apparenter à une forme de corruption est aujourd’hui interdit. Pendant longtemps, les entreprises françaises avaient la possibilité de déclarer des “pots-de-vin” (déductibles) aux douanes et au fisc. Mais les choses ont changé avec l’adoption de la convention OCDE anti-corruption, ratifiée par la France en 2000.

Le recours à un intermédiaire reste possible, seulement si sa mission est strictement encadrée. "En tant qu’entreprise, vous devez agir un peu comme si vous alliez être confrontée à un futur contrôle fiscal, explique l’avocat Nicola Bonuccci qui a travaillé sur la convention OCDE. Vous devez pouvoir fournir des éléments de preuve montrant que vous aviez besoin d’un intermédiaire, qu’il a fourni un travail légitime, et que vous l’avez rémunéré proportionnellement au travail effectué."

Des "migrations économiques" d’intermédiaires

Mais les récriminations de Sanjay Bhandari à l’encontre de Thales s’inscrivent dans un cadre plus large : celui d’un affrontement politique entre le parti ultranationaliste hindou (BJP) du Premier ministre Narendra Modi, actuellement au pouvoir, et le parti du Congrès national indien (principal parti d’opposition). "Lorsque vous êtes dans l’opposition, vous faites des révélations dans la presse pour empêcher le parti au pouvoir de conclure de nouveaux contrats, tandis que le parti au pouvoir tente de déboulonner les anciens réseaux avec lesquels des contrats ont été signés, analyse Pierre Gastineau d’Intelligence Online. Cette situation entraine l’exil temporaire des agents liés à chaque parti. Ceux du parti du Congrès sont tous aujourd’hui à Londres. Et le jour où le parti du Congrès reprendra le pouvoir, ses agents rentreront à New Delhi, tandis que ceux du BJP feront leurs valises ! Ce sont de véritables migrations économiques."

C’est pour cela que depuis l'arrivée du BJP au pouvoir en Inde en 2014, Sanjay Bhandari "est tombé en disgrâce et a dû quitter précipitamment l’Inde pour s’installer au Royaume-Uni", explique encore l’intermédiaire lui-même dans sa plainte. Il affirme que Thales aurait alors joué un double jeu avec lui, attendant de savoir si le parti du Congrès allait remporter les élections législatives, en 2019, pour le rémunérer.

"Durant toute l’année 2019, des représentants de Thales ont régulièrement rencontré M. Sanjay Bhandari à Londres pour le rassurer quant au versement des sommes qui lui sont encore dues par Thales", peut-on lire dans sa plainte. Mais selon l’intermédiaire : "Avec la victoire du parti BJP lors des nouvelles élections, Thales a cessé tout effort dans l’exécution de la structure (…) destinée au paiement des sommes pourtant dues à M. Bhandari. (…) Les représentants de Thales auraient ensuite “cessé tout contact avec lui, et se sont abstenus de procéder au paiement de la somme de 11 millions d’euros restant due, et ce en violation totale de leurs engagements et de la relation commerciale de confiance qui les liait."

Il appartient maintenant à la justice de vérifier ces dires. L’enquête du PNF intervient alors que les autorités indiennes réclament de leur côté l’extradition de Sanjay Bhandari pour "blanchiment" dans un autre dossier. Contactés, Sanjay Bhandari et son avocat français n’ont souhaité faire “aucun commentaire”.

Interrogé par la cellule investigation de Radio France, "Thales conteste fermement les allégations de M. Sanjay Bhandari concernant de prétendues sommes ou tout autre versement qui aurait été effectué par Thales au titre d’un projet de modernisation aéronautique. Thales n’a en effet conclu aucun contrat avec M. Bhandari ou avec ses sociétés, dans le cadre de ce projet. Thales respecte la loi et applique une politique de tolérance zéro à l’égard de la corruption et du trafic d’influence. Le programme d’intégrité du groupe est régulièrement évalué et amendé afin de refléter les évolutions des législations et des normes nationales et internationales."

La Marine nationale espère disposer de 12 hélicoptères NH-90 NFH disponibles sur 27 d’ici la fin 2024

Maintenant que les taux de disponibilité technique des principaux matériels ne sont plus rendus publics par le ministère des Armées [et cela afin qu’ils ne soit « pas exploités par nos adversaires », comme l’a récemment expliqué le général Yann Gravêthe, le directeur adjoint de la DICoD, lors d’un point presse], il est compliqué de voir si les réformes lancées en 2017/18 pour améliorer le Maintien en condition opérationnel [MCO], notamment dans le domaine aéronautique, ont donné des résultats tangibles.

Cela étant, même sans disposer de ces chiffres, on sait que certaines flottes ont plus de problèmes que d’autres… Tel est par exemple le cas des 27 hélicoptères NH-90 NFH « Caïman » mis en œuvre par l’Aéronautique navale à partir 2011. Leur faible taux de disponibilité a régulièrement été évoqué par les différents chefs d’état-major de la Marine nationale [CEMM] qui se sont succédés au cours de ces dernières années.

Ainsi, l’amiral Christophe Prazuck s’était agacé sur le coût trop élevé de l’entretien de ces NH-90 NFH ainsi que du « nombre colossal d’heures de maintenance » nécessaire pour une heure de vol, notamment à cause de « problèmes de maturité technique » et de « corrosion », ce qui est un comble pour un aéronef censé être utilisé dans un environnement marin. En outre, les mises à niveau vers le standard MR1 et les « grandes visites » ont également joué sur la disponibilité de ces appareils.

En octobre 2021, à l’occasion d’une audition parlementaire, l’amiral Pierre Vandier, l’actuel CEMM, s’était plaint de « difficultés considérables » avec le NH-90, affirmant que seulement quatre appareils étaient disponibles au moment où il s’exprimait devant les sénateurs de la commission des Affaires étrangères et de la Défense. « Nous espérons atteindre dix ou onze [appareils] d’ici un mois, avait-il dit.

Seulement, cet objectif ne fut pas tenu… En effet, la Direction de la maintenance aéronautique [DMAé] indiqua que seulement sept NH-90 étaient désormais disponibles au début de l’année 2022.

« Il ne suffit pas de concevoir, de construire et d’assembler des hélicoptères, car une fois sortis de l’usine encore faut-il les entretenir pour pouvoir les faire voler », avait d’ailleurs lancé, en janvier 2022, Florence Parly, alors ministre des Armées, à l’adresse d’Airbus Hélicopters, membre du consortium NHIndustries, mis en place pour le développement et la production du NH-90.

Quelques moins plus tard, l’amiral Vandier affirma avoir reçu l’assurance de « l’investissement total » des dirigeants d’Airbus Hélicopters sur la disponibilité des NH-90. « Une assistance technique renforcée va être mise en place sur les bases aéronavales de Lanvéoc et Hyères », avait-il dit, lors d’une nouvelle audition parlementaire.

Qu’en est-il actuellement? Eh bien la disponibilité des NH-90 est « toujours un sujet de préoccupation », a admis le CEMM, alors qu’il était entendu par les députés de la commission de la Défense, dans le cadre de l’examen du projet de Loi de programmation militaire [LPM] 2024-30. « J’entretiens à cet égard des relations soutenues avec le groupe NH Industries et Airbus Hélicopters, qui m’ont fait un certain nombre de propositions », a-t-il ajouté.

Ainsi, le plan d’action qui a été proposé par les industriels à la Marine nationale « visent à remonter à douze hélicoptères disponibles pour la fin de l’année prochaine [c’est à dire fin 2024] », a déclaré l’amiral Vandier. Soit un taux de disponibilité de 44%. « Nous y travaillons de manière régulière, de façon à identifier les points de blocage », a-t-il ajouté.

« Les principaux problèmes sont la complexité du plan de maintenance et les difficultés de la chaîne d’approvisionnement, ainsi qu’une accumulation de désagréments liés à la corrosion, due à des problèmes de conception », a encore rappelé le CEMM. « Nous espérons, à force d’efforts, parvenir à cet objectif d’une disponibilité de douze machines l’année prochaine », a-t-il insisté.

 

 

LPM 2024-2030 : Quelles orientations pour le pilier munitions ?

À moins d’un improbable arbitrage défavorable, 16 Md€ seront consacrés aux munitions des armées françaises dans la prochaine loi de programmation militaire. Un effort qui, pour l’armée de Terre, se traduit par l’achat de plusieurs milliers de missiles moyenne portée (MMP) supplémentaires. 

2,6 Md€ pour l’armée de Terre

Le chiffre est connu depuis un moment, mais le détail des 16 Md€ alloués entre 2024-2030 au pilier munitions ne se précise que maintenant à l’aune des auditions parlementaires successives. Leçon parmi d’autres du conflit russo-ukrainien, l’inflexion doit permettre « de compléter les stocks de munitions complexes et de remédier aux fragilités identifiées dans certaines secteurs », relevait le général de brigade aérienne Cédric Gaudillière, chef de la division « cohérence capacitaire » de l’état-major des armées, mi-avril en audition parlementaire.

Dans les faits, les deux tiers de la manne, environ 11 Md€, alimenteront les programmes à effet majeur, lesquels incluent des munitions complexes comme le missile antichar MMP. Restent 3 Md€ consacrés aux munitions « classiques » comme les obus d’artillerie et 2 Md€ nécessaires pour assurer le maintien en condition opérationnelle de l’ensemble des stocks. 

De ces moyens, plus de la moitié sont fléchés vers une armée de l’Air et de l’Espace dont l’arsenal s’avère aussi plus complexe, donc plus coûteux. L’armée de Terre en captera une portion moindre. Environ 2,6 Md€ selon le chef d’état-major de l’armée de Terre, le général Pierre Schill. Côté terrestre, les ressources représentent néanmoins 16 millions de munitions de petit calibre et 300 000 obus de mortier. Elles alimenteront aussi la commande de 3000 missiles antichars MMP auprès de MBDA, une cible en hausse de 30% par rapport à celle fixée dans la LPM en cours de finition. Et si la question des volumes d’obus d’artillerie, remise à l’avant-plan par le conflit en Ukraine, est passée sous silence, la LPM « prévoit bien l’acquisition de munitions d’artillerie de précision », annonce le CEMAT. 

Le document prévoit par ailleurs 300 M€ pour « concrétiser le développement incrémental de drones, qui permettront de disposer de munitions téléopérées [MTO] » et parvenir à une première capacité opérationnelle courant 2027. Environ 2000 MTO seront acquises sur la période au profit de l’armée de Terre, de quoi commencer à équiper les régiments d’artillerie, d’infanterie et de cavalerie. Le rattrapage dans ce segment a néanmoins un prix, celui du lissage du programme SCORPION. 

Produire et concevoir autrement

Sujet majeur de la LPM, la problématique des munitions se limite pas au complétement des stocks. Ces enjeux de volumes et de calendriers sont étroitement liés au « produire plus et moins cher » prôné par le ministère des Armées et aux mécanismes que celui-ci met en place depuis plusieurs mois en coordination avec la filière industrielle. 

Si la LPM privilégie la cohérence et la réactivité plutôt que la masse et l’endurance, elle devrait également offrir « de la visibilité sur le volume global de commandes en échange d’une plus grande réactivité dans les cadencements de production », souligne le général Gaudillière. Une logique déjà retenue pour les obus d’artillerie de 155 mm. Environ 20 000 ont été commandés il y a peu, et d’autres tranches suivront pour permettre au secteur d’anticiper les approvisionnements et d’accélérer les cadences « si nécessaire ». Leur livraison « ne sera pas aussi rapide qu’espéré, car les poudres, qui arrivent d’Allemagne, se trouvent sur le chemin critique », note le général Gaudillère. Les premiers arriveront l’an prochain. Le rythme s’accélérera ensuite à partir de 2025. Bien que le schéma retenu ne soit pas exempt d’obstacles, les armées espèrent l’étendre au plus vite aux missiles MMP et Mistral.

Le chef d’état-major des Armées, le général Thierry Burkhard, « a souligné l’importance de faire des choix cohérents, avant de chercher à augmenter la quantité et la taille de nos moyens militaires. Dans cette optique, la différenciation est une des clés pour générer de la masse », complète le général Gaudillière. Dit autrement, plutôt que de commander « 10 000 missiles antichar haute technologie, longs et coûteux à produire », les armées optent pour « un équilibre entre la haute technologie et l’utilisation de munitions à bas coût ». 

Ainsi, les quelques milliers de MMP envisagés s’assortissent d’un travail mené simultanément sur « un missile différencié à bas coût répondant à certains besoins spécifiques, tels que les tirs de char en milieu urbain ». Un missile « abordable et pouvant être acquis en grande quantité » et qui traduirait en réponse technologique « les leçons tirées de l’expérience ukrainienne ». Et une illustration concrète de cette volonté prioritaire de cohérence devant garantir de « finalement atteindre une certaine masse ».

Un avion polonais en mission pour l’agence européenne Frontex a été intercepté de façon agressive par un Su-35 russe

Qu’un avion de renseignement appartenant à un pays membre de l’Otan se fasse intercepter par les forces aériennnes russes alors qu’il vole près des frontières de la Russie relève de la routine… Et l’on en parle quand une interception a donné lieu à un incident, comme cela a récemment été le cas avec un drone MQ-9 Reaper américain, tombé dans les eaux de la mer Noire après avoir été accroché par un Su-27 « Flanker ».

En revanche, la mésaventure que vient de connaître un L-410 Turbolet de la police polonaise des frontières est, sauf erreur, inédit.

En effet, le 5 mai, alors en mission au-dessus de la mer Noire pour FRONTEX, l’agence européenne de garde-frontières et de gardes-côtes, cet appareil a été intercepté de manière « agressive » et « dangereuse » par un Su-35 Flanker E russe, alors qu’il volait dans l’espace aérien international, à 60 km à l’est de la Roumanie.

C’est, en tout cas, ce qu’affirme le ministère roumain de la Défense, via un communiqué publié le 6 mai.

« Les manœuvres agressives et dangereuses effectuées à plusieurs reprises par l’avion de chasse russe à proximité de l’avion polonais ont généré un niveau élevé de turbulence et des difficultés majeures pour en garder le contrôle », est-il dénoncé dans ce texte.

Et celui-ci d’ajouter : « L’équipage polonais a agi avec calme et professionnalisme dans la situation irresponsable créée par le pilote russe, réussissant à redresser l’avion, après la perte d’altitude initiale causée par les manœuvres du Su-35, puis à atterrir en toute sécurité à l’aéroport Mihail Kogălniceanu [de Constanta], vers 13h50. Aucun membre d’équipage été blessé à la suite de cet incident ».

Par la suite, précise le communiqué, deux avions de la force aérienne roumaine [sans doute des F-16, les MiG-21 roumains étant sur le point de cesser leurs opérations] et deux F/A-18 Hornet espagnols [déployés en Roumanie dans le cadre de l’Otan, ndlr] ont été mis en alerte par le Centre d’opérations aériennes combinées [CAOC] de l’Otan implanté à Torrejon [Espagne].

« Le comportement agressif d’un avion militaire appartenant à la Russie contre un avion non armé effectuant une mission FRONTEX de surveillance du risque migratoire dans le bassin de la mer Noire est totalement inacceptable. Cet incident est une preuve supplémentaire de l’approche provocatrice de la Russie en mer Noire », a fait valoir le ministère roumain de la Défense.

De son côté, la police des frontières polonaise a donné des précisions supplémentaires au sujet de cet incident. Ainsi, affirme-t-elle, le Su-35 a volé « sans aucun contact radio dans la zone opérationnelle désignée par la Roumanie », avant d’effectuer trois manœuvres « agressives et dangereuses », allant jusqu’à s’approcher de 5 mètres du L-410.

L’avion des garde-frontières polonais est déployé en Roumanie depuis le 19 avril, dans le cadre de l’opération « Western Black Sea 2023 », coordonnée par FRONTEX. Impliquant également l’Agence européenne pour la sécurité maritime [EMSA] et l’Agence européenne de contrôle des pêches [EFCA], elle vise à « prévenir la migration illégale, la pêche illégale et la pollution marine » ainsi qu’à « lutter contre d’autres types de crimes transfrontaliers dans la région de la mer Noire ».

 

 

 

Le 05/07/2022.

Il faut réaliser " une montée en puissance" de l'Artillerie.

Bon visionnage et bonne lecture.

Une étude plaide pour un « renouveau de l’artillerie française », avec 215 CAESAr et des capacités de défense sol-air

Lors des auditions parlementaires de l’automne dernier, le chef d’état-major de l’armée de Terre [CEMAT], le général Pierre Schill, avait estimé que l’un des enjeux de la prochaine Loi de programmation militaire [LPM] allait être le rééquilibrage de la « trame artillerie », en portant une attention particulière à la défense sol-air, laquelle ne repose plus que sur des missiles MISTRAL [missile transportable anti-aérien léger], censés assurer la protection à basse altitude des unités engagées en opération.
Le général Schill était arrivé à cette conclusion après l’exercice Warfighter 2021 qui, organisé quelques mois plus tôt aux États-Unis, avait souligné l’importance de l’artillerie dans le cadre d’un engagement de haute intensité. En effet, dans une telle hypothèse, une division sera engagée dans le cadre d’une coalition face à un ennemi à parité. [Or], dans de ce type de combat, l’attrition opérée par notre artillerie et la réaction à l’artillerie adverse sont primordiales, ce qui fait que les « besoins en capacités d’artillerie de cette division sont cruciaux, à la fois pour l’artillerie à longue distance et pour celle qui appuie directement les unités au contact », avait-il expliqué.
Depuis, les combats qui ont actuellement lieu en Ukraine n’ont pu que renforcer ce constat… Seulement, après les coupes budgétaires et les réductions de format effectuées après la Guerre Froide, l’artillerie française est devenue « échantillonnaire ». Et cela d’autant plus que les engagements de ces dernières années, menés dans des environnements « permissifs », ont conduit à des arbitrages que certains sont désormais tentés de remettre en cause, comme, par exemple, le transfert des Systèmes air-sol moyenne portée / Terrestre [SAMP/T ou « Mamba »] à l’armée de l’Air & de l’Espace [AAE].
Lors du salon de l’armement terrestre EuroSatory 22, en juin, le président Macron a indiqué qu’il avait demandé à Sébastien Lecornu, le ministre des Armées et au général Thierry Burkhard, le chef d’état-major des armées [CEMA] de réévaluer la LPM 2019-25 en cours « à l’aune du contexte géopolitique ». Et d’ajouter : « Ce travail donnera lieu […] à une nouvelle planification et à un investissement dans la durée, clair et fort », notamment pour « consolider notre modèle d’armée complet. »
Adossé à la Fédération nationale de l’artillerie [FNA] et réunissant des généraux 2S, d’anciens officiers ayant servi dans cette arme et des personnalités « extérieures » qualifiées, l’Observatoire de l’artillerie vient de réaliser une courte étude dans laquelle il évalue les besoins de l’armée de Terre dans ce domaine, au regard de la guerre en Ukraine.
En premier lieu, s’agissant de la défense sol-air, et sans pour autant vouloir retirer les SAMP/T à l’AAE, l’Observatoire plaide pour doter chacune des deux divisions de l’armée de Terre d’un régiment équipé de tels systèmes. Pour la protection « basse altitude », il estime qu’il faudrait 132 postes de tir MISTRAL pour renforcer les batteries sol/air des régiments d’artillerie et les deux régiments SAMP/T qu’il appelle de ses vœux.
S’agissant des « feux sol-sol », l’étude estime que les 54 véhicules blindés multi-rôles [VBMR] Griffon dotés d’un mortier [MEPAC, pour Mortiers Embarqués Pour l’Appui au Contact] prévus par l’actuelle LPM sont insuffisants. Et d’avancer que 120 mortiers seraient nécessaires.
Même chose pour les Camions équipés d’un système d’artillerie [CAESAr], dont 18 [sur 76 en dotation] ont été livrés à l’Ukraine.
« Aujourd’hui il est prévu d’acquérir 33 CAESAr supplémentaires en 2025 ce qui portera le parc à 109, nombre notoirement insuffisant. En 2030 l’armée de Terre française disposera de 200 Leclerc rénovés et de 300 Jaguar soit un ratio de 0,22 canons / chars alors qu’il était de 0,85 à la fin de la Guerre Froide. En portant le nombre de CAESAr à 215 le ratio canons /chars sera alors de 0,43 soit le double d’aujourd’hui mais cependant la moitié du ratio de la fin de la Guerre Froide », avance l’Observatoire de l’artillerie.
Quant au Lance-roquettes unitaire [LRU], dont seulement 13 exemplaires sont en service, l’étude parle de moderniser leur châssis « en transférant ce système sur un blindé à roues de type HIMARS qui ne met en œuvre qu’un seul pod de six roquettes ». Et d’ajouter : « Le besoin serait alors de 55 lanceurs, réparti entre les deux régiments d’artillerie sol-sol de division ».
L’étude souligne également la nécessité de moderniser et de renforcer les moyens d’acquisition des cibles, que ce soit par le radar de contre-batterie COBRA, le drone tactique Patroller et les mini-drones. Cependant, elle plaide pour l’acquisition de d’appareils stratosphériques de type HAPS [Altitude Platform System], comme le Zephyr d’Airbus
L’Observatoire de l’artillerie insiste évidemment sur l’importance de disposer d’un stock suffisant de munitions. Faute de disposer d’un état précis de l’inventaire de l’armée de Terre, il estime cependant que celui-ci devrait être suffisant pour au moins trente jours de combat. « Si le conflit perdure, l’approvisionnement en obus et missiles sera assurée par la montée en puissance de l’industrie munitionnaire », écrit-il. Selon lui, « les stocks de guerre nécessitent un important engagement financier », qu’il évalue à près de cinq milliards d’euros pour les seuls obus explosifs de 155mm et de 1,9 milliard pour les obus BONUS.
Enfin, l’étude aborde la question du recrutement. Étant donné le renforcement des capacités qu’elle préconise, elle évalue à 3000 le nombre d’artilleurs supplémentaires qu’il faudrait recruter. Actuellement, souligne-t-elle, l’artillerie représente 6% de l’effectif total de l’armée de Terre. Ce chiffre passerait à 9% si les solutions qu’elle propose sont adoptées.
« Avec une montée en puissance à la fois de ses effectifs de l’ordre de 3000 personnels et de l’ensemble de ses matériels et munitions nous aurons un véritable ‘RENOUVEAU’ de l’artillerie Française, capable de tenir sa place dans un ‘combat de haute intensité’.  Ces propositions devraient être prises en compte lors des travaux pour l’élaboration de la LPM rectificative 2019-25 », conclut l’Observatoire de l’artillerie.*

Les F-5 suisses, remis en condition par Tactical Air Support, iront bien à la Navy et l'USMC

par Philippe Chapleau
Les 22 chasseurs F-5 de l'armée de l'Air suisse vont bien rejoindre les États-Unis comme prévu depuis 2019. C'est un nombre inférieur à ce qui était annoncé à l’origine puisque l’état-major suisse en a alloué cinq en tant que "matériel historique", au lieu des deux prévus par la loi. C'est ce qu'indique un rapport du Contrôle fédéral des finances (CDF) cité par la presse suisse en mars dernier.
Je rappelle que fin juin 2021, le gouvernement a décidé d'acquérir 36 F-35A.
Quoi qu'il en soit, les 16 F-5E et les 5 F-5F destinés à l'US Navy et à l'USMC vont être remis en condition par la société Tacair comme l'indique un avis d'attribution américain de vendredi soir.
Ce marché d'une valeur de 265 millions de $ devait être passé en 2021; mais il a pris du retard et n'a été notifié que fin juin 2022. Il prévoit une mise à niveau des avions dans le cadre du programme ARTEMIS (Avionics Reconfiguration and Tactical Enhancement/Modernization for Inventory Standardization). Ces appareils rejoindront la flotte RED AIR américaine

Qui fournira 370 000 gilets pare-balles individuels aux forces de sécurité françaises?

par Philippe Chapleau
Un avis n°22-87546 du 27 juin porte sur l’acquisition de gilets pare-balles individuels (GPBI) pour les besoins de la police nationale, de la gendarmerie nationale, de la gendarmerie maritime, des douanes et droits indirects, de la direction de la Coopération de Sécurité et de Défense, et de l’administration pénitentiaire.
Le GBPI comprend une housse de couleur noire à port dissimulé, destinée au port par dessous ou par dessus les vêtements et deux packs balistiques enveloppants (1 pectoral et 1 dorsal) destinés à l’arrêt à minima des munitions d’arme de poing. Le tout est livré dans un sac de transport.
Les quantités maximales totales sont de 94 308 GPBI féminins (mieux adaptés que les précédents modèles aux poitrines) et de 277 042 GPBI masculins. Voir ci-dessous les quantités spécifiques:
montant max GPB.jpg
Ces GPBI doivent offrir une protection contre:
- les munitions de calibre 9 mm parabellum
- les munitions de calibre 44 Remington Magnum 
- les munitions de calibre 7,62 × 25 Tokarev
- les munitions de calibre 12 balle original Brenneke
- les attaques d’estoc par armes blanches
- les attaques de taille par armes blanches
- les agressions au moyen d’aiguilles hypodermiques.
En 2018, un marché portant sur 307 000 GPBI avait été attribué au Cooneen group, pour un montant de 48,4 millions d'euros.

La Biélorussie affirme avoir abattu des missiles tirés depuis l’Ukraine vers son territoire

Le 25 juin, Kiev a affirmé que des bombardiers stratégiques russes Tu-22M3 avaient lancé des missiles de croisière Kh-22 [ou Kh-32] en direction des régions de Tchernihiv, Kiev et Soumy alors qu’ils volaient dans l’espace aérien de la Biélorussie. Ce qui ne s’était alors jamais produit depuis le début de l’invasion de l’Ukraine par la Russie. En outre, le renseignement ukrainien a également fait état d’une salve d’au moins huit missiles balistiques Iskander tirés par les forces russes depuis le territoire biélorusse.
Le même jour, à Saint-Petersbourg, le président de la Biélorussie, Alexandre Loukatchenko, a eu la confirmation auprès du chef du Kremlin, Vladimir Poutine, que ses troupes seraient prochainement dotées de missiles Iskander-M, soit le même modèles mis en œuvre par les forces russes. Et qu’un programme de modernisation des avions d’attaque Su-25 « Frogfoot » bélorusses allait être lancé.
Quoi qu’il en soit, Kiev a accusé Moscou de chercher à impliquer directement Minsk dans la guerre en utilisant le territoire biélorusse pour lancer des attaques contre l’Ukraine.
Or, si l’on s’en tient aux définitions des Nations unies, en accordant des facilités aux forces russes, notamment lors de la première phase de l’invasion, la Biélorussie peut être considérée comme étant « coupable de complicité d’agression ». Et cela, même si aucun soldat biélorusse n’a mis le pied en Ukraine…
Cela étant, étant donné sa proximité stratégique et militaire avec la Russie, la Biélorussie va-t-elle s’engager directement dans la guerre en Ukraine? Une telle hypothèse a été avancée dès le début de la guerre. En effet, un tel engagement serait envisageable pour couper l’approvisionnement en armes occidentales des forces ukrainiennes. Voire, si la situation se dégrade davantage, pour mener des opérations dans le passage de Suwalki, seul lien entre les pays baltes et le reste des pays de l’Otan. Probablement que l’armée bioélorusse s’y est préparée avec son homologue russe, dans le cadre des exercices Zapad, organisés tous les quatre ans.
En attendant, Minsk n’aurait aucune raison de s’impliquer directement dans la guerre en Ukraine. Sauf à trouver un prétexte, comme le suggèrent les propos tenus par M. Loukachenko, le 2 juillet.
« On nous provoque. Je dois vous dire qu’il y a environ trois jours, peut-être plus, on a essayé depuis l’Ukraine de frapper des cibles militaires en Biélorussie. Dieu soit loué, nos systèmes anti-aériens Pantsir ont intercepté tous les missiles tirés par les forces ukrainiennes », a en effet déclaré le président Biélorusse, lors d’une cérémonie organisé à la veille de la « Fête de l’indépendance », qui commémore la libération de Minsk par l’Armée rouge, en 1944.
À noter que le système anti-aérien Pantsir n’est entré en service que très récemment au sein des forces biélorusses. Une batterie aurait été livrée le 22 juin dernier, en même temps qu’un nouveau lot de lanceurs de missiles pour le système de défense aérienne S-300.

 
« Je vous le répète, comme je l’ai dit il y a plus d’un an, nous n’avons pas l’intention de combattre en Ukraine », a cependant assuré M. Loukachenko. « Nous ne combattrons que dans un seul cas, si vous […] entrez sur notre terre, si vous tuez nos gens, alors nous répondrons », a-t-il ajouté. Une attaque de missiles ou de drones fait-elle partie de ce cas de figure?
En tout cas, le président biélorusse a prévenu. « Si seulement vous osez frapper, comme ils prévoient, Gomel, la raffinerie de Mozyr, l’aéroport de Louninets ou Brest, alors la réponse arrivera instantanément, en seulement une seconde », a-t-il dit. « Il y a moins d’un mois j’ai donné l’ordre à nos forces armées d’avoir dans le viseur, comme on dit maintenant, les centres de décisions dans vos capitales », a-t-il rappelé.
En mai, M. Loukatchenko avait en effet déclaré que les forces biélorusses disposaient de « toutes les armes pour faire des dégâts, en particulier sur les territoires à partir desquels nous serons attaqués ». Et de préciser : « Ce sont les armes qui couvrent tout le territoire de la Pologne jusqu’à la Baltique, et aussi l’Ukraine, au-delà de Kiev. »
Si la Biélorusse n’a pas encore reçu les missiles Iskander-M promis par la Russie, son armée est en revanche équipée du système d’artillerie de 300 mm « Polonez » , dont la portée va de 200 à 300 km ainsi que de missiles Tochka et Scud [ces derniers étant toutefois censés avoir été retirés du service, ndlr].
 

 

Le 06/06/2022.

L’armée de l’Air & de l’Espace a créé un « Topgun » à la française, avec la formation « QWI » pour les pilotes de Rafale

Aux États-Unis, la « Weapons School » de l’US Air Force et le Naval Aviation Warfighting Development Center [NAWDC] de l’US Navy, dont fait partie le programme « Strike Fighter Tactics Instructor », plus connu sous le nom de « TOPGUN », forment des instructeurs spécialistes du combat aérien. Le Royaume-Uni a mis en place, sur la base aérienne de Lossiemouth, une formation similaire pour les pilotes de la Royal Air Force et de la Fleet Air Arm de la Royal Navy, avec la qualification « QWI » [Qualified Weapons Instructor].
Cultivant des liens étroits avec l’US Air Force et la Royal Air Force, comme en témoignent l’exercice Atlantic Trident et, surtout, les opérations qu’elle mène conjointement avec elles, l’armée de l’Air & de l’Espace [AAE] vient à son tour de créer une telle formation. Celle-ci a en effet commencé le 30 mai, sur la base aérienne 118 de Mont-de-Marsan, avec quatre pilotes de Rafale [dont un de la Marine nationale] et un navigateur-officier système d’armes [NOSA].
Cette formation, appelée « QWI Rafale », est dsipensée par la « Weapons School » [ou École d’armes…] et les centres experts de Centre d’expertise aérienne militaire [CEAM] de l’AAE, avec l’objectif de « créer un réseau d’experts tactiques au sein des unités de combat ».
Ainsi, pendant six semaines « intensives », les stagiaires vont enchaîner les cours théoriques, les séances de simulateurs et, évidemment, les vols. Cette formation vise, explique le CEAM, à « parfaire leur connaissance et leur maitrise de leur système d’arme et d’approfondir les tactiques, les techniques et les procédures des engagements dits de ‘haut du spectre' ». À l’issue, ils obtiendront la qualification « QWI », laquelle doit leur donner la « crédibilité et la légitimité nécessaires pour transmettre dans leur unité tout ce qu’ils auront appris ».
Pour rappel, le CEAM/AWC [pour Air Warfare Center / Centre de guerre aérienne] a vu le jour en 2015, avec la fusion du Centre d’expériences aériennes militaires et Centre tactique Air [CENTAC-Air] du Commandement des forces aériennes [CFA]. Ce qui avait été qualifié, à l’époque, de « réforme majeure » par le général Denis Mercier, alors chef d’état-major de l’armée de l’Air, dans la mesure où elle allait réunir, sous un même commandement, « tous les acteurs de l’innovation, qu’ils agissent dans le domaine des équipements, de la doctrine ou de la formation ».

L’Australie accuse la force aérienne chinoise d’avoir mis en danger un avion de patrouille maritime P-8A Poseidon

Quelques jours après que le Canada a accusé la force aérienne chinoise d’avoir harcelé de manière dangereuse l’avion de patrouille maritime CP-140 Aurora qu’il avait engagé au sein de l’UNSC ECC [United Nations Security Council Enforcement Coordination Cell], la structure des Nations unies chargée de documenter les violations des sanctions infligées à la Corée du Nord, l’Australie vient d’en faire autant.
Ainsi, selon le ministre australien de la Défense, Richard Marles, un incident sérieux impliquant un chasseur chinois de type J-16 et un avion de patrouille maritime P-8A Poseidon de la Royal Australian Air Force [RAAF] s’est produit le 26 mai, « dans l’espace aérien international de la région de la mer de Chine méridionale », dont la quasi-totalité est revendiquée par Pékin.
L’interception du P-8A Poseidon par le J-16 a « entraîné une manœuvre dangereuse qui a constitué une menace pour la sécurité » de l’avion et de son équipage », a dénoncé M. Marles, qui vient juste de prendre ses fonctions.
D’après les détails donnés à la presse, le J-16 chinois s’est approché du P-8A Poseidon avant de lancer des fusées éclairantes [destinées à leurrer les missiles à infrarouge]. Puis il lui a coupé la route en larguant des paillettes [chaff], constituées de fibres de verre enrobées d’aluminium pour tromper les radars.
Le chasseur chinois « a lâché un paquet de paillettes contenant de petits morceaux d’aluminium, dont certains ont été ingérés par le moteur de l’avion P-8 », a expliqué M. Marles. « Personne n’a été blessé et l’avion a pu rejoindre sa base. Nous avons exprimé nos préoccupations auprès de Pékin par les voies appropriées », a-t-il précisé.
En outre, le ministre a également fait valoir que l’Australie « agit complètement dans le cadre du droit international pour garantir la liberté de navigation en mer de Chine méridionale, car c’est fondamentalement dans l’intérêt de notre nation ». Visiblement, le nouveau gouvernement australien n’entend pas s’écarter de la ligne tracée par son prédécesseur, alors que les contentieux entre Canberra et Pékin se sont multipliées lors de ces dernières années.
En effet, comme les États-Unis [mais aussi la France et le Royaume-Uni], l’Australie considère que les revendications de Pékin sur la mer de Chine méridionale ne sont pas fondées, comme l’a ailleurs souligné la Cour permanente d’arbitrage en 2016. Or, faisant fi des revendications territoriales des pays riverains, la Chine y a pris possession de nombreux îlots [dont ceux des archipels Spratleys et Paracels] et y déploie des capacités de déni et d’interdiction d’accès [A2/AD], alors qu’une grande partie du commerce entre l’Asie et le reste du monde transite par cette région.
Quoi qu’il en soit, il s’agit du second incident impliquant les forces australiennes et chinoises depuis le début de cette année. En février, le « destroyer » de type 052D « Hefei », accompagné par le escortait le navire d’assaut amphibie de type 071 « Jinggang Shan », avait pointé un laser en direction d’un P-8A Poseidon de la RAAF qui survolait la mer d’Ararufa, bordée par la côte septentrionale de l’Australie et la Nouvelle-Guinée.
« De telles actions ne sont pas conformes aux normes que nous attendons des militaires professionnels », avait réagi Canberra. Mais, en retour, le ministère chinois de la Défense avait accusé l’avion australien de s’être approché d’un peu trop près de ses navires et d’avoir largué des bouées acoustiques, destinées à repérer la présence éventuelle de sous-marins. « Nous demandons instamment à l’Australie de respecter les droits légitimes des navires chinois dans les eaux concernées, conformément au droit international, et de cesser de diffuser de fausses informations sur la Chine », avait ensuite affirmé Pékin.

En Roumanie, les chasseurs alpins ont pris part à l'exercice "SCORPIONS LEGACY 2022"

par Philippe Chapleau
L'exercice "SCORPIONS LEGACY 2022" bat son plein en Roumanie. Ces manœuvres annuelles Scorpions Legacy 2022, dont l’ampleur a été considérablement accrue cette année, se déroulent au centre d’entraînement au combat de Smârdan qui se trouve à 25 km de la frontière ukrainienne et à 10 km de la frontière moldave.
1 800 soldats romains et alliés (US, Portugais, Français, Belges...) y prennent, selon le ministère roumain de la Défense qui précise que 250 véhicules et équipement majeurs sont impliqués.
Vendredi, la presse a pu accéder au camp. D'où ces photos de l'AFP ( Daniel MIHAILESCU) de soldats du bataillon français déployé sur place dans le cadre des mesures de renforcement du dispositif otanien à l'est. Les chasseurs alpins actuellement déployés pour cette mission seront remplacés par des paras du 8e RPIMa.

FN SCAR-H PR – Le nouveau fusil de précision semi-automatique (FPSA) de l’armée française


 
En décembre 2019, la Direction Générale de l’Armement annonce la sélection du nouveau FPSA (Fusil de Précision Semi-Automatique). FN Herstal remporte l’appel d’offre pour remplacer les fusils de précision FR-F2 qui avaient été adoptés dans les années 1980.
Les premiers FPSA ont été livrés en 2020 et l’armée française doit en recevoir un peu plus de 2 600 exemplaires. Ce FPSA s’appuie sur la variante de précision du fusil SCAR-H conçu par FN.
La gamme des SCAR (Special Combat Assault Rifle) est issue d’une demande de l’armée américaine, en 2003, qui souhaitait avoir un fusil d’assaut en 5,56×45 mm (SCAR-L) et en 7,62×51 mm (SCAR-H).

Heckler & Koch MP5 – La référence des pistolets-mitrailleurs modernes


 
En 1949 l’entreprise Heckler & Koch est fondée par des anciens de l’entreprise Mauser : Edmund Heckler, Theodor Koch et Alex Seidel. Un des premiers grands succès de l’entreprise et le fusil d’assaut G3 avec son mécanisme qui s’appuie sur une culasse à ouverture retardée par galets. À la fin des années 1950, HK va adapter ce mécanisme pour une arme aménagée pour le 9×19 mm. Ce premier pistolet-mitrailleur désigné HK54 va être destiné aux forces de l’ordre et à l’armée. En 1966, l’Allemagne va adopter ces armes pour sa police fédérale, ses forces spéciales et les gardes-frontières et l’arme va alors être renommée MP5.
Rapidement le pistolet-mitrailleur allemand va rencontrer un grand succès à l’international. En fonction des clients, HK va apporter quelques modifications à son MP5 : une crosse télescopique, groupes de détente permettant le tir en rafale… Le MP5 est sans doute un des pistolets-mitrailleurs les plus connus et il est encore très apprécié aujourd’hui grâce à sa fiabilité et à sa maniabilité lors du tir.
En effet, son ingénieux mécanisme de retardement par galets lui permet d’avoir un faible recul et d’être facilement maitrisable en automatique.

Le 12/05/2022.

La Biélorussie prévient qu’elle peut infliger des dégâts « inacceptables » à la Pologne et baltes par Laurent Lagneau

Si elle ne participe pas à la guerre en Ukraine, la Biélorussie peut être considérée comme étant la complice de la Russie étant donné qu’elle a accueilli sur son sol les troupes russes qui ont pris le contrôle de la région de Tchernobyl lors de la première phase de l’offensive lancée par Moscou. Restera-t-elle l’arme au pied ou bien est-il envisageable qu’elle puisse prendre part aux opérations menées par son allié? L’hypothèse a été avancée… Et cela pour au moins deux raisons.
La première est que la Biélorussie pourrait couper l’approvisionnement des forces ukrainiennes en armes occidentales depuis la Pologne. La seconde est qu’elle serait susceptible, le cas échéant, de mener des actions dans le passage de Suwalki, afin de couper les pays baltes du reste de l’Otan [et de l’Union européenne]. Cela étant, leur dégré de préparation de ses troupes et les conséquences militaires que cela entraînerait pour elle rendent de tels développements improbables [mais pas impossibles…].
Quoi qu’il en soit, lors d’une réunion dédiée à la politique de défense, ce 10 mai, le président biélorusse, Alexandre Loukachenko, a souligné que l’armement dont disposent les forces armées de son pays « permet de maintenir » leurs « capacités défensives ».
« Cela montre que notre armée sera capable de combattre et d’infliger des dommages inacceptables à l’ennemi. Nous sommes réalistes, nous comprenons que nous ne pourrons pas vaincre l’Otan. Cependant, nous avons toutes les armes pour faire des dégâts, en particulier sur les territoires à partir desquels nous serons attaqués », a fait valoir M. Loukachenko.
« Ce sont les armes qui couvrent tout le territoire de la Pologne jusqu’à la Baltique, et aussi l’Ukraine, au-delà de Kiev. Je ne fais aucune allusion à quoi que ce soit, mais je veux que tout le monde comprenne la portée des armes dont nous disposons », a insisté le président biélorusse.
Selon lui, la Biéolorussie devrait conserver les systèmes de défense aérienne S-400 que la Russie a déployé sur son territoire… Et il a également indiqué qu’il était question d’acquérir les missiles balistiques Iskander qui ont également été acheminés dans son pays par les forces russes. « Ils peuvent être utilisés pour défendre notre espace », a dit M. Loukachenko.
Reste à voir la charge militaire qu’emportent ces missiles Iskander… sachant que ceux ont une capacité nucléaire. Et cela d’autant plus que la Biélorussie a récemment modifié sa Constitution pour autoriser le déploiement d’armes nucléaires sur son sol…
Cela étant, Minsk a une autre ambition : celle de développer sa propre version du missile Iskander… avec l’aide de la Russie. « En ma présence, le président [Poutine] a chargé Dmitri Rogozine [le directeur de Roscosmos, ndlr] de nous fournir immédiatement un soutien afin que nous ne perdions pas de temps à réinventer la roue, afin que nous puissions puiser dans l’expérience des spécialistes russes qui ont fabriqué le missile Iskander », a expliqué M. Loukachenko, en faisant référence à un récent déplacement effectué dans l’Extrême-Orient russe, selon des propos rapportés par l’agence Belta.
Par ailleurs, les forces biélorusses devraient prochainement tester de nouvelles munitions pour leurs systèmes d’artillerie de 300 mm « Polonez » [dont la portée va de 200 à 300 km] ainsi pour leurs batteries de défense aérienne Buk.

Les commandes de 302 Griffon, de 88 Jaguar et de 54 MEPAC ont été notifiées par la Direction générale de l’armement par Laurent Lagneau

Annoncée en février dernier par le Premier ministre, Jean Castex, lors de sa visite des installations industrielles de Nexter à Roanne, la tranche conditionnelle 4 [TC4] du marché EBMR [Engin blindé multi-rôle] du programme SCORPION vient d’être notifiée par la Direction générale de l’armement [DGA] aux industriels concernés.
En effet, l’annonce en a été faite ce 10 mai, via un communiqué publié par le Groupement momentané d’entreprises [GME] réunissant Nexter, Arquus et Thales. Dans le détail, cette nouvelle tranche conditionnelle correspond à la commande de 302 Véhicules blindés multi-rôles [VBMR] Griffon et de 88 Engins blindés de reconnaissance et de combat [EBRC] Jaguar.
Ce marché portera respectivement à 150 et 909 le nombre de Jaguar et de Griffon commandés, ce qui est conforme à l’objectif fixé par la Loi de programmation militaire [LPM] 2019-25.
« Cela représente la moitié du nombre total de Jaguar et de Griffon prévu dans le cadre du programme SCORPION pour le renouvellement du segment médian des blindés de l’armée de Terre », rappelle le GME EBMR.
Cela étant, commander de nouveaux blindés est une chose… Les livrer en est une autre. Et sur ce plan, et comme l’avait expliqué le général Pierre Schill, le chef d’état-major de l’armée de Terre [CEMAT] lors d’une audition parlementaire, il est question de livrer 45% des véhicules commandés d’ici à 2025. « Cette baisse est liée à la prise en compte des impératifs industriels de livraison pour certains segments de ces véhicules et à la possibilité, pour nous primordiale, de financer en contrepartie la pérennisation du char Leclerc, le lancement du programme de l’engin de combat du génie et le lancement du programme VBAE [véhicule d’aide à l’engagement, ndlr] successeur de nos VBL », avait-il avance.
Pour rappel, à l’horizon 2030, l’armée de Terre doit en principe disposer de 1818 Griffon, de 300 Jaguar et de 978 VBMR légers « Serval », dont les quatre premiers exemplaires ont été livrés au Centre d’appui de préparation au combat interarmes – 51e Régiment d’infanterie [CAPCIA-51eRI], la semaine passée.
Par ailleurs, le GME EBMR a également confirmé la commande de 54 Griffon MEPAC [Mortier embarqué pour l’appui au contact], celle-ci lui ayant été notifiée par la DGA quelques jours plus tôt. Les livraisons débuteront, en principe, à partir de 2024.
Ces commandes constituent une « une marque de confiance accordée aux industriels du GME EBMR, qui ont su maîtriser leurs délais depuis le début du programme. Elle [leur] apporte, ainsi qu’à toute la base industrielle technologique de défense terrestre, une vision précise de leur activité industrielle jusqu’en 2025 », ont souligné Nexter, Arquus et Thales dans leur communiqué commun.

Pour l’US Marine Corps, les pertes russes en Ukraine justifient l’abandon de ses chars M1A2 Abrams par Laurent Lagneau 

Dévoilé en mars 2020 et faisant régulièrement l’objet de mises à jour, le plan « Force Design 2030 » vise à restructurer d’une manière radicale l’US Marine Corps, afin de permettre à celui-ci de disposer d’unités plus légères et réactives. L’objectif est de « se concentrer sur la guerre maritime, en refusant l’utilisation des mers aux adversaires et en garantissant la liberté d’action des forces américaines », en particulier en Indo-Pacifique. En clair, il s’agit avant tout de contrer les visées chinoises dans la région.
Aussi, ce plan prévoit une réduction des effectifs de l’USMC [ainsi que, paradoxalement, leur fidélisation, l’idée étant de disposer de combattants expérimentés] et la suppression de capacités « traditionnelles » jugées « trop lourdes », tout en misant sur de nouvelles capacités reposant sur des technologies émergentes.
L’une des mesures emblématiques de ce plan est la dissolution des unités mettant en oeuvre des chars lourds M1A2 Abrams, ceux-ci étant jugés inadaptés pour reprendre de vive force des îles tombées aux mains de l’Armée populaire de libération [APL] chinoise. Un tournant pour l’USMC qui se dota pour la première fois de chars en 1923 [des Renault FT en l’occurrence, ndlr].
Cependant, cette restructuration n’est pas du goût de tout le monde. Et trois anciens officiers de premier plan de l’USMC, dont le général Charles Krulak [qui en fut le commandant entre 1995 et 1999], le général John Sheehan [ex-Commandant suprême allié de l’Atlantique ou SACLANT] et le général Anthony Zinni [ex-chef de l’US CENTCOM], en ont dit tout le mal qu’ils en pensaient dans une tribune publiée par le Washington Post en avril dernier.
« Le plan reflète certaines notions erronées sur l’avenir de la guerre. En termes simples, c’est de la folie de miser sur la technologie qui nous permettrait de mener des batailles à distance. La guerre est inévitablement une sale affaire, et la guerre en Ukraine est un exemple de ce que nous pourrions rencontrer à l’avenir. La technologie n’a pas éliminé le besoin en capacités d’artillerie et de blindés », ont-ils ainsi fait valoir.
Et d’insister : « La guerre est aussi souvent inattendue : Force Design 2030 prépare les Marines à un ensemble restreint de conflits possibles – mais le monde pourrait tout aussi bien nous lancer une balle courbe [une référence à un type de lancer au base ball, ndlr]. Les menaces à la sécurité mondiale sont à la fois variées et étendues, et elles ne se limitent pas à la Chine et à la Russie. La Corée du Nord, l’Iran et des acteurs non étatiques du monde entier ont le potentiel de transformer les tensions et les désaccords en conflits. »
En outre, ces trois généraux ont aussi mis en doute l’affirmation selon laquelle les unités légères de Marines décrites dans le plan puissent rester discrètes alors qu’elles auront à se déplacer, à se réapprovisionner et à communiquer avec le commandement. Cela « ne tient pas compte tenue de la technologie dont dispose la Chine. Dès que les hostilités commenceront, il va de soi que l’ennemi les visera avec une force écrasante », ont-ils estimé.
Enfin, « placer de petits groupes de Marines sur des îles pour attendre que les navires ennemis passent à leur portée n’est pas une innovation. Réduire les capacités de combat importantes qui peuvent être nécessaires dans tous les théâtres pour développer des capacités douteuses sur un théâtre n’est pas une innovation », ont conclu ces trois anciens généraux de l’USMC.
Pour autant, ceux qui ont concocté ce plan de transformation voient dans la guerre ukraine la confirmation de leurs intuitions. Tel est le cas du général Karsten Heckl, le commandant adjoint de l’USMC, qui s’en est récemment expliqué lors d’une intervention devant le le Center for International and Strategic Studies et l’US Naval Institute.
S’agissant des chars Abrams, « je n’en vois tout simplement pas le besoin » [en Indo-Pacifique], a affirmé le général Heckl. « Et quand vous considérez l’environnement opérationnel dans cette région, où voyez-vous que les chars peuvent être utiles? Taïwan? Ok. Où d’autres? », a-t-il ensuite demandé.
« Les chars sont, comme on l’a vu avec l’invasion de l’Ukraine par la Russie, ont d’énormes besoins en carburant. Nous avons appris, il y a longtemps, en Irak et en Afghanistan, que les camions-citernes sont des cibles. Nous devons trouver les moyens de réduire notre dépendance car c’est maintenant une faiblesse. C’est devenu une vulnérabilité importante », a justifié le général Heckl, en faisant allusion aux problèmes rencontrés par les blindés russes face aux forces ukrainiennes.
En effet, des centaines de chars russes, principalement des T-72, ont été détruits ou capturés quand d’autres ont été abandonnés sur le terrain, faute d’essence [et une chaîne logistique défectueuse]. Cela étant, et au-delà de l’efficacité des missiles anti-chars fournis aux Ukrainiens, le T-72 a un point faible : les obus qu’il transporte sont stockés « en collier », au niveau de sa tourelle, là même où la protection est minimale…
Cependant, l’USMC aura toujours besoin de blindés… Et même s’il pourra éventuellement compter sur les Abrams de US Army dans le cadre d’une manoeuvre interarmées, il mise sur le véhicule blindé amphibie ACV-30, lequel doit remplacer les AAV, dont l’emploi a été restreint après un accident qui a coûté la vie à huit des siens ainsi qu’à un membre de l’US Navy, en juillet 2020.
Quoi qu’il en soit, le char de combat a régulièrement été remis en cause depuis son apparition sur le champ de bataille, durant la Première Guerre Mondiale…. Mais ses détracteurs n’ont jamais eu gain de cause jusqu’ici. Cependant, les pertes subies par les forces russes en Ukraine ont rouvert le débat, alors qu’il faudrait sans doute considérer les déficiences de ces dernières… Ainsi que celles des engins qu’elles utilisent… D’ailleurs, les Philippines viennent à nouveau de se doter d’un bataillon de chars – légers – de type Sabrah, conçu par Elbit Systems. 

Augmentation des sorties pour l'Armée de l'air ukrainienne par Gaétan Powis

Malgré des annonces répétées, la Force aérienne russe ne semble toujours pas avoir détruit les capacités aériennes ukrainiennes. Plusieurs vidéos datées des 7 et 8 mai montrent que les pilotes ukrainiens ont effectué plusieurs sorties offensives. Un chasseur en patrouille air-air et même un avion de transport tactique ont aussi été aperçus durant ces deux journées.

Une aviation active...

Depuis le début du conflit, les Ukrainiens ont démontré que leur aviation de combat n'était en aucun cas inactive : les nombreuses vidéos et photos disponibles sur les réseaux sociaux permettent de confirmer que l'Armée de l'Air ukrainienne était active mais surtout en petit groupe, probablement dû à la dispersion de ses unités durant les premiers jours du conflit (afin d'éviter une destruction au sol). Bien évidemment, les Ukrainiens ont tout de même perdu des appareils (pertes aériennes confirmées après 2 mois de guerre). Par ailleurs, le nombre de sorties effectuées par les Russes reste beaucoup plus élevé que le nombre de sorties d'appareils ukrainiens.

... après plus de 70 jours de conflit

Cependant après plus de 70 jours de guerre et malgré une supériorité numérique, les Forces russes n'ont toujours par détruit les appareils de combat ukrainiens. Pire encore, les différentes photos et vidéos présentées ci-dessous montrent que la Force aérienne russe ne semble toujours pas dans la capacité d'interdire les mouvements aériens ukrainiens au dessus des positions russes.
Ainsi, entre les 7 et 8 mai, les Ukrainiens ont mobilisé sur deux fronts plusieurs moyens aériens :
  • Île des Serpents : pour le journée du 7 mai, au moins 3 drones TB-2 et deux avions de combat Su-27 ont opéré sur l'île des Serpents pour son bombardement (article sur ces bombardements) et la destruction de 2 patrouilleurs Raptor (soit 4 détruits au total).
  • Donbass : le 8 mai, 2 hélicoptères de combat Mi-24, 1 bombardier Su-24 et un avion d'attaque Su-25 ont effectué des actions offensives sur cette zone.
Les Ukrainiens effectuent aussi des patrouilles sur leur territoire, avec notamment la présence confirmée d'un chasseur MiG-29 en configuration air-air au dessus d'Odessa. Enfin, l'aviation de transport effectue toujours des sorties, comme le montre la vidéo de l'An-24. Il n'existe pas d'information sur la cargaison de cet avion (transport de blessés ? de matériels ? de personnels ? de munitions ?) ni sa destination.

La Marine belge a tiré pour la première fois un missile Harpoon Block 2

par Marie-Madeleine Courtial
La Défense belge a annoncé que la frégate Léopold Ier avait tiré pour la première fois un missile Harpoon Block 2 contre une cible terrestre. Il a eu lieu lors de l’exercice multinational Mjoelner 2022, qui rassemble des marines danoise, allemande, néerlandaise et norvégienne, dans le Grand Nord au large des côtes norvégiennes. Autre première, ce tir de missile a été effectué avec l’aide de spotters du bataillon d’Artillerie. « Par le passé, nous avons toujours travaillé avec des spotters étrangers, car nous n’avions pas cette possibilité en Belgique. Entre-temps, nous avons formé des personnes à cet effet et, pour la première fois, il s’agit effectivement d’une coopération entièrement belge », a expliqué le lieutenant de vaisseau Clerinx du Maritime Warfare Center de Den Helder.
Comme l’explique la Défense, la Marine belge participe à ces lancements dans un scénario tactique depuis 2016. En 2018, la frégate Louise-Marie a tiré pour la première fois un missile Harpoon. Le commandant de la Composante Marine de l’époque, l’amiral Wim Robberecht aujourd’hui à la tête du SGRS, indiquait qu’un tel tir avait un coût de 750.000 euros mais qu’il était nécessaire pour vérifier que tout fonctionne. Il s’agissait de la première fois avec un missile Harpoon Block 2 depuis sa récente mise à niveau. Avec ce missile, les frégates belges pourront désormais tirer sur une cible située sur la côte à plus de 100 kilomètres de distance. D’ici la fin de l’exercice le 13 mai, la frégate Léopold Ier affinera encore ses défenses antiaériennes en protégeant le navire avec des missiles Seasparrow de l’OTAN selon la Défense.
Les missiles Harpoon de la Marine belge doivent être remplacées à l’horizon 2024 avec les nouvelles frégates ASWF. Ce dossier est mené par la Défense néerlandaise. Selon la ministre Ludivine Dedonder, qui s’exprimait sur le sujet en commission en octobre 2021, le projet de remplacement est en cours et le contrat ne pourra être conclu qu’après le traitement du débriefing à la Seconde Chambre au cours du troisième trimestre de 2022.

Avis de gros temps pour le budget des armées ? par Laurent Lagneau · 11 mai 2022

On ne peut que déplorer l’absence de débat sur la politique de défense lors de la dernière élection présidentielle… alors même que celle-ci vise avant tout à désigner celui qui sera le chef des Armées. Cette absence est d’autant plus regrettable que la situation internationale, avec le retour du « tragique » sur le sol européen, invitait à se pencher sérieusement sur les questions militaires et diplomatiques.
Quoi qu’il en soit, dans un rapport dont elle a dû différer la publication en raison de l’invasion de l’Ukraine par la Russie et la période de réserve qu’elle était tenue d’observer durant la campagne électorale, la Cour des comptes a constaté que les trois premières annuités de la Loi de programmation militaire [LPM] 2019-25, marche-pied vers un modèle d’armée complet et équilibré [« Ambition 2030 », ndlr] ont été respectées. Ce qui est un « progrès notable par rapport aux périodes précédentes », souligne-t-elle.
Toutefois, il reste encore beaucoup à faire pour atteindre les objectifs fixés. « La restauration des capacités des armées n’est pas encore achevée: l’entraînement, les dotations en munitions, la disponibilité et le renouvellement des matériels doivent encore progresser. L’aptitude des armées à conduire dans la durée un combat de haute intensité n’a pas encore été restaurée », relèvent en effet les magistrats de la rue Cambon. Ce qui passe par la nécessité d’atteindre la masse nécessaire ainsi qu’un niveau de préparation suffisant pour participer, même dans le cadre d’une coalition, à une « opération classique de majeure de coercition face à un adversaire étatique ».
Seulement, et alors que la LPM 2019-25 prévoit une hausse annuelle significative du budget des armées [+3 milliards] à partir de 2023, le plus difficile reste à faire. Déjà, 300,3 millons d’euros de crédits de paiement jusqu’alors mis en réserve ont été annulés pour financer le plan de résilience économique et sociale lancé par le gouvernement afin de faire face aux conséquences des sanctions imposées à la Russie. Normalement, cette somme devrait être compensée d’ici la fin de cette année… Mais si elle ne l’est pas, alors cela « constituerait un premier signe des besoins d’arbitrage dus aux contraintes budgétaires dans un contexte où […] la défense n’est pas la seule priorité de l’action gouvernementale », prévient la Cour des comptes.
D’autant plus que celle-ci a émis un avis de gros temps pour les finances publiques… En effet, le déficit budgétaire devra revenir dans les clous [soit à -3% du PIB] d’ici 2027, ce qui supposera un important effort de maîtrise de la dépense publique d’ici-là.
Et cela, alors que la dette a atteint 120% du PIB [et la gestion de la pandémie de covid-19 n’est pas la seule en cause] et que la Banque centrale européenne [BCE] envisage d’augmenter ses taux d’intérêts. Et puis vient s’ajouter l’impact de la guerre en Ukraine, en particulier celui des sanctions économiques décidées contre la Russie. Les tensions sur le marché de l’énergie [gaz et pétrole] – qui, soit dit en passant, feront grimper les coûts de facteur pour les armées – et les difficultés d’approvisionnement ne pourront que peser sur la croissance… et donc sur les rentrées fiscales.
Cependant, étant donné que les risques et menaces indentifiés par la Revue stratégique de 2017 [actualisée en 2021] tendent à se concrétiser et qu’il apparaît nécessaire d’investir dans de nouvelles capacités pour y répondre [comme les grands fonds, l’espace, le cyber, etc], une réduction des dépenses militaires est difficilement envisageable, l’heure n’étant plus aux « dividendes de la paix »…. D’autant plus que, pour la plupart, les pays européens ont annoncé leur intention de revoir à la hausse leur effort de défense, parfois de manière substantielle, comme l’Allemagne, qui va lancer un fonds de 100 milliards d’euros pour « réparer » la Bundeswehr.
« La remontée en puissance de l’outil de défense prévue par la LPM 2019-2025 se heurte à la conjonction de deux évolutions défavorables. D’une part, les finances publiques se sont dégradées sous l’effet de la crise sanitaire, imposant un effort de réduction du déficit public d’ici à 2027 qui peut contrarier la poursuite d’une forte croissance des budgets de défense. D’autre part, l’accélération et la diversification de la montée des menaces mises en évidence par l’Actualisation stratégique de 2021 tendent parallèlement à augmenter les besoins en matière de défense », résume ainsi la Cour des Comptes.
Cela étant, et sous réserve d’un désengagement des armées de certaines missions [comme Sentinelle, par exemple], d’une politique plus volontariste pour mieux tirer parti des financements de l’Union européenne [UE] et de coopérations soutenues avec les partenaires stratégiques de la France, la poursuite des efforts en vue d’atteindre l’objectif fixé par le plan « Ambition 2030 » est le premier scénario décrit par la Cour des comptes dans son rapport. Mais il « constitue un défi majeur dans un contexte de finances publiques affaiblies », prévient-elle. Et il n’exclut pas une réflexion « sur le modèle d’armée » étant donné que les marges de manœuvres sont faibles… En clair, il supposerait de faire des choix… et donc de renoncer à certaines capacités.
Le second scénario avancé dans le document consisterait « à adopter une trajectoire de ressources moins ambitieuse pour la défense tout en conservant la volonté de disposer du spectre complet des capacités militaires », comme cela a été fait entre 2008 et 2015, ce qui a abouti à des forces armées « échantillonaires ». Dans les faits, cela revient à effectuer une « réduction homothétique » des moyens sous la contrainte budgétaire, ce qui se traduit irrémédiablement par des pertes capacitaires subies.
Enfin, la dernière option proposée par la Cour des comptes impliquerait de « choisir les capacités opérationnelles à conserver, voire à développer, et donc de décider celles pour lesquelles l’effort sera réduit ». En clair, il s’agirait de faire comme le Royaume-Uni… alors que le modèle britannique n’est pas forcément transposable en France, d’autant plus qu’il suppose des renoncements qui seraient probablement irréversibles.
Pour passer le cap des années à venir, la Cour des comptes, qui se garde de préciser explicitement le scénario qui a sa préférence, émet trois recommandations. En premier lieu, elle demande au gouvernement de « chiffrer les crédits budgétaires de 2024 et 2025 correspondant aux besoins issus des ambitions de la LPM, en tenant compte du dernier ajustement annuel de la programmation militaire et établir une trajectoire budgétaire jusqu’à l’horizon de stabilisation du déficit public prévu en 2027 ». Ce qui n’a pas été fait à l’occasion de l’ajustement de la LPM, alors que celle-ci aurait dû faire l’objet d’une réactualisation dans le cadre d’un débat au Parlement…
Ensuite, la Cour estime qu’il faut « identifier et exploiter les marges de manœuvre budgétaires qui peuvent exister, notamment dans le domaine de la coopération européenne et s’agissant de la définition du périmètre des missions confiées aux armées ». Enfin, elle plaide pour l’adoption d’un « processus d’actualisation stratégique et de programmation militaire plus réactif, plus transparent et reposant sur une plus grande capacité d’anticipation ».

 

 

Les drones MALE MQ-9 SeaGuardian pourront être mis en oeuvre depuis un porte-aéronefs par Laurent Lagneau

En 2021, la Turquie a annoncé son intention de transformer en porte-drones le TCG Anadolu, qui, jusqu’alors, devait être un navire d’assaut amphibie dérivé de la classe Juan Carlos I, conçue par le constructeur espagnol Navantia. Dans un premier temps, ce bateau mettra en œuvre une version navalisée du Bayraktar TB-2, connue sous le nom de TB-3. Puis il embarquera le drone de combat [UCAV] MIUS, en cours de développement chez Baykar.
Le TB-3 sera évidemment un appareil de type STOL [Short Take-off and Landing aircraft / Avion à décollage et atterrissage court], dont la récupération à bord du TCG Anadolu sera sécurisée, si besoin, par une barrière d’arrêt, c’est à dire un filet de sécurité. Le même principe pourrait être retenu aux États-Unis, voire au Royaume-Uni.
En effet, le 10 mai, le constructeur américain General Atomics a dévoilé un système prêt-à-monter [ou « kit »] permettant de réduire significativement la distance nécessaire à un drone MALE [Moyenne Altitude Longue Endurance] MQ-9B SkyGuardian/SeaGuardian pour décoller et atterrir. Assez, en tout cas, pour envisager de le mettre en œuvre depuis le pont d’un porte-aéronefs… Et cela, sans avoir recours à des catapultes.
« Imaginez que vous retirez le toit rigide de votre Jeep pour le ranger dans votre garage. Vous avez maintenant un véhicule ouvert. S’il pleut, vous remettez le toit rigide. Le principe est le même : vous prenez un MQ-9B standard et vous lui installer le kit STOL et vous le faites voler », a expliqué David Alexander, le Pdg de General Atomics.

 
Ce kit STOL modifie les ailes et la queue du MQ-9B. Selon l’industriel, il s’installe en moins d’un jour. Évidemment, les sous-systèmes de l’appareils [capteurs, armement, etc] restent les mêmes. L’un de ses intérêts est qu’il permet de transformer en drones embarqués les appareils déjà en service.
Selon General Atomics, la mise au point de ce kit a commencé en 2017, dans le cadre de son programme Mojave. Une première capacité a été testé avec un MQ-1C Gray Eagle Extended Range. Et il n’est pas impossible qu’il puisse aussi s’adapter sur un MQ-9A Reaper.
Pour une force navale, mettre en œuvre des MQ-9B SeaGuardian depuis un porte-aéronefs procurerait une plus-value opérationnelle indéniable. Pouvant rester en vol pendant au moins une vingtaine d’heures, cet appareil est en mesure d’assurer des missions de surveillance, de renseignement, de guerre électronique, de lutte anti-surface et de lutte anti-sous-marine grâce à la panoplie de capteurs et d’armement qu’il est en mesure d’emporter [boule optronique MX-20, radar de surveillance maritime SeaVue, bouées acoustiques, nacelle Sage 750 pour identifier et suivre les émissions radars, etc]. En outre, General Atomics a récemment indiqué avoir testé un radar à antenne active [AESA] Seaspray 7500E V2 intégré sur ce type de drone.
L’US Marine Corps [USMC] pourrait évidemment être intéressé par ce MQ-9B STOL étant donné qu’il cherche à se procurer, depuis maintenant plusieurs années, un drone MALE pouvant décoller depuis un navire d’assaut amphibie, dans le cadre du programme MUX [Marine Air Ground Task Force – UAS Expeditionary].
Même chose pour la Royal Navy qui, dans l’attente de disposer de F-35B en nombre suffisants, pourrait en doter ses deux porte-avions. D’autant que les forces britanniques disposeront, à terme, de 16 MQ-9 SkyGuardian [appelés « Protector » outre-Manche].
Un autre avantage de ce MQ-9B STOL est la flexibilité opérationnelle qu’il est suGround Combat Demonstration: Saab lève le voile sur les nouvelles variantes de l’AT4
Yannick Smaldore 11 mai, 2022
Partager

Du 3 au 4 mai, Saab Dynamics et les forces armées suédoises ont organisé l’édition 2022 de la Ground Combat Demonstration. L’occasion de réaliser des tirs en conditions réelles du missile NLAW et du Carl-Gustaf M4 mais aussi, pour la première fois, des nouvelles variantes de l’AT4 CS représentatives de la version F2 attendue en France dans les tous prochains mois.

Pour la première fois depuis 2014, une trentaine de délégations étrangères et quelques journalistes internationaux ont pu assister à des démonstrations tactiques et techniques destinées à présenter l’étendue des capacités offertes par les armes de soutien légères proposées par Saab. Étant donné l’actualité ukrainienne, qui a mis à l’honneur une bonne partie du catalogue de Saab Dynamics, cette édition 2022 a logiquement insisté sur les capacités anti-char et anti-véhicules des différents armements. Plusieurs tirs réels ont ainsi été effectués sur un char T-72 et un transport de troupes BMP. Néanmoins, les capacités anti-infrastructures et anti-infanterie n’ont pas été négligées, la démonstration tactique montrant notamment la complémentarité des différents types de munitions dans un contexte opérationnel complexe.

Au total, plus d’une cinquantaine de tirs se sont succédés sur plusieurs sessions de démonstration, de jour comme de nuit. Un parachutiste, largué à 3000m d’altitude avec son NLAW, a effectué une démonstration de tir de ce missile anti-char à usage unique. Par la suite, le Carl-Gustaf M4 a fait usage de son large panel de munitions (notamment la nouvelle munition programmable HE-448) contre des blindés, différentes infrastructures et même une cible mouvante. Mais pour la délégation française présente sur place, on se doute que l’intérêt se portait avant tout sur les dernières évolutions de l’AT4CS qui faisaient là leur première démonstration publique.
Lors des démonstrations de tirs, la véritable star du show était le Carl-Gustaf M4. Il était présenté pour la première fois avec sa munition programmable HE-448. ©FOB
L’AT4 F2 livré d’ici la fin de l’année

Pour rappel, l’armée de Terre française est le client de lancement de cette troisième génération d’AT4, qui avait remporté en 2014 l’appel d’offre Roquette NG. Contrairement à la version actuellement utilisée par les forces françaises, qui n’a été livrée qu’en version anti-char, cette nouvelle itération de l’AT4CS doit être disponible dans trois variantes distinctes : anti-blindé, anti-structure ou anti-personnel. La portée de 300m des AT4CS actuels a été accrue à 400m grâce au nouveau viseur point rouge intégré. Elle pourra même atteindre 600m avec une grande précision grâce au viseur récupérable Aimpoint FCS51.

À noter toutefois que, à proprement parler, ce ne sont pas les nouveaux AT4 F2 conçus pour les forces françaises qui ont été dévoilés durant la Ground Combat Demonstration. En effet, sauf nouvel écueil, les livraisons des trois variantes françaises ne sont attendues que dans les tous prochains mois. Lors de la Ground Combat Demonstration, ce sont donc des modèles génériques préfigurant la nouvelle génération d’AT4, dont l’AT4 F2 fait partie, qui ont été utilisés. Dépourvus de certains détails propres aux version françaises, ces modèles de démonstration restent cependant très représentatifs de ce que sera l’AT4 F2 une fois qu’il aura été réceptionné et mis en service au sein de l’armée de Terre, dans ces trois versions :

    L’AT4CS ER (Extended Range) est la nouvelle variante anti-blindés, capable de détruire un char de combat (frappe latérale ou par l’arrière) jusqu’à 600m. Sa capacité de pénétration est donnée pour être supérieure à 460mm.

    L’AT4CS AST (Anti Structure Tandem) est optimisée pour l’ouverture de brèches et la destruction de bâtis en combat urbain rapproché, et reste pertinente face à des blindés légers. Un sélecteur permet de régler le délai de détonation de la seconde charge, selon l’effet désiré, entre 3ms ou 27ms environ.

    L’AT4CS HE (High Explosive) est la dernière évolution de la version anti-personnel de l’AT4. Pour des explosions à l’impact, la portée maximale est de 600m. En mode airburst, toutefois, il est possible de cibler des troupes derrière un obstacle ou dans une tranchée jusqu’à 1000m de distance. Ce dernier mode impose toutefois l’utilisation du viseur FCS51.

Résultat d’un tir d’AT4CS AST. Après avoir traversé un mur en béton, la munition a complètement détruit un conteneur. ©FOB

Les différents tirs effectués devant la presse et les délégations ont démontré l’efficacité de ces différents modèles face à leurs cibles principales, mais également leur polyvalence intrinsèque : la version AST reste redoutable en anti-personnel, et l’AST comme la HE conservent une très bonne efficacité contre les véhicules faiblement blindés.
La coopération franco-suédoise dans l’anti-char se poursuit

Lors de son discours de clôture de la première journée de démonstrations au Swedish Army Training Centre de Kvarn, le Major General Karl Engelbrektson, chef d’état-major de la Swedish Army, a insisté sur les efforts collectifs qui doivent être entrepris, tant en Suède qu’en Europe, pour pouvoir faire face au retour des conflits de haute intensité sur le continent européen. En Suède, la remontée en puissance débutée en 2014 va désormais s’accentuer, ce qui va nécessiter une étroite collaboration entre les forces armées, la société civile et les industriels de l’armement. « Désormais, le budget n’est plus le facteur limitant la croissance des forces armées, a confié le Major General Engelbrektson. Les vrais défis sont au niveau des ressources humaines, de l’entraînement et de la logistique, y compris industrielle ».

Pour effectuer une remontée en puissance rapide et fluide, les forces armées suédoises ne peuvent donc pas se permettre de blocages majeurs sur leurs programmes d’armement. Les industriels se doivent donc d’être force de proposition, et la FMV (Defence Materiel Administration, équivalent de la DGA) a pour but de faciliter l’avancée des programmes, y compris en collaboration.

Un état de fait qui devrait profiter indirectement au missile anti-char MMP français, qui devrait servir de base à un futur système franco-suédois de lutte anti-char au-delà de la vue directe (TAVD). Ce point a d’ailleurs été souligné par le chef d’état-major de la Swedish Army : « Nous avons un excellent programme de missile anti-char avec la France, entre Saab et MBDA, entre la FMV et la DGA, entre moi et mon homologue français. Les acquisitions seront conjointes, la doctrine d’emploi de ce système également, […] et l’achat des armes se fera conjointement à l’acquisition de nouveaux systèmes d’entrainement et de simulation. […] Nous progressons très rapidement sur ce programme, et nous avons déjà pris en compte ce nouveau concept dans notre organisation des opérations. »

Pour l’heure, sur ce programme, rien ou presque n’a filtré concernant la répartition exacte des tâches entre industriels français et suédois. Si le MMP est sans conteste une excellente base de travail, la Suède dispose d’une véritable expertise en matière de missiles « top attack », de liaisons de données sécurisées, mais aussi d’écosystèmes de support, d’entraînement et de simulation. À voir comment ces différentes expertises viendront se combiner à celles de MBDA afin de décupler le potentiel du MMP. susceptible de procurer avec sa capacité à atterrir sur des pistes courtes, sommairement aménagées.

Ground Combat Demonstration: Saab lève le voile sur les nouvelles variantes de l’AT4

Du 3 au 4 mai, Saab Dynamics et les forces armées suédoises ont organisé l’édition 2022 de la Ground Combat Demonstration. L’occasion de réaliser des tirs en conditions réelles du missile NLAW et du Carl-Gustaf M4 mais aussi, pour la première fois, des nouvelles variantes de l’AT4 CS représentatives de la version F2 attendue en France dans les tous prochains mois.
Pour la première fois depuis 2014, une trentaine de délégations étrangères et quelques journalistes internationaux ont pu assister à des démonstrations tactiques et techniques destinées à présenter l’étendue des capacités offertes par les armes de soutien légères proposées par Saab. Étant donné l’actualité ukrainienne, qui a mis à l’honneur une bonne partie du catalogue de Saab Dynamics, cette édition 2022 a logiquement insisté sur les capacités anti-char et anti-véhicules des différents armements. Plusieurs tirs réels ont ainsi été effectués sur un char T-72 et un transport de troupes BMP. Néanmoins, les capacités anti-infrastructures et anti-infanterie n’ont pas été négligées, la démonstration tactique montrant notamment la complémentarité des différents types de munitions dans un contexte opérationnel complexe.
Au total, plus d’une cinquantaine de tirs se sont succédés sur plusieurs sessions de démonstration, de jour comme de nuit. Un parachutiste, largué à 3000m d’altitude avec son NLAW, a effectué une démonstration de tir de ce missile anti-char à usage unique. Par la suite, le Carl-Gustaf M4 a fait usage de son large panel de munitions (notamment la nouvelle munition programmable HE-448) contre des blindés, différentes infrastructures et même une cible mouvante. Mais pour la délégation française présente sur place, on se doute que l’intérêt se portait avant tout sur les dernières évolutions de l’AT4CS qui faisaient là leur première démonstration publique.

L’AT4 F2 livré d’ici la fin de l’année

Pour rappel, l’armée de Terre française est le client de lancement de cette troisième génération d’AT4, qui avait remporté en 2014 l’appel d’offre Roquette NG. Contrairement à la version actuellement utilisée par les forces françaises, qui n’a été livrée qu’en version anti-char, cette nouvelle itération de l’AT4CS doit être disponible dans trois variantes distinctes : anti-blindé, anti-structure ou anti-personnel. La portée de 300m des AT4CS actuels a été accrue à 400m grâce au nouveau viseur point rouge intégré. Elle pourra même atteindre 600m avec une grande précision grâce au viseur récupérable Aimpoint FCS51.
À noter toutefois que, à proprement parler, ce ne sont pas les nouveaux AT4 F2 conçus pour les forces françaises qui ont été dévoilés durant la Ground Combat Demonstration. En effet, sauf nouvel écueil, les livraisons des trois variantes françaises ne sont attendues que dans les tous prochains mois. Lors de la Ground Combat Demonstration, ce sont donc des modèles génériques préfigurant la nouvelle génération d’AT4, dont l’AT4 F2 fait partie, qui ont été utilisés. Dépourvus de certains détails propres aux version françaises, ces modèles de démonstration restent cependant très représentatifs de ce que sera l’AT4 F2 une fois qu’il aura été réceptionné et mis en service au sein de l’armée de Terre, dans ces trois versions :
  • L’AT4CS ER (Extended Range) est la nouvelle variante anti-blindés, capable de détruire un char de combat (frappe latérale ou par l’arrière) jusqu’à 600m. Sa capacité de pénétration est donnée pour être supérieure à 460mm.
  • L’AT4CS AST (Anti Structure Tandem) est optimisée pour l’ouverture de brèches et la destruction de bâtis en combat urbain rapproché, et reste pertinente face à des blindés légers. Un sélecteur permet de régler le délai de détonation de la seconde charge, selon l’effet désiré, entre 3ms ou 27ms environ.
  • L’AT4CS HE (High Explosive) est la dernière évolution de la version anti-personnel de l’AT4. Pour des explosions à l’impact, la portée maximale est de 600m. En mode airburst, toutefois, il est possible de cibler des troupes derrière un obstacle ou dans une tranchée jusqu’à 1000m de distance. Ce dernier mode impose toutefois l’utilisation du viseur FCS51.
 
Les différents tirs effectués devant la presse et les délégations ont démontré l’efficacité de ces différents modèles face à leurs cibles principales, mais également leur polyvalence intrinsèque : la version AST reste redoutable en anti-personnel, et l’AST comme la HE conservent une très bonne efficacité contre les véhicules faiblement blindés.

La coopération franco-suédoise dans l’anti-char se poursuit

Lors de son discours de clôture de la première journée de démonstrations au Swedish Army Training Centre de Kvarn, le Major General Karl Engelbrektson, chef d’état-major de la Swedish Army, a insisté sur les efforts collectifs qui doivent être entrepris, tant en Suède qu’en Europe, pour pouvoir faire face au retour des conflits de haute intensité sur le continent européen. En Suède, la remontée en puissance débutée en 2014 va désormais s’accentuer, ce qui va nécessiter une étroite collaboration entre les forces armées, la société civile et les industriels de l’armement. « Désormais, le budget n’est plus le facteur limitant la croissance des forces armées, a confié le Major General Engelbrektson. Les vrais défis sont au niveau des ressources humaines, de l’entraînement et de la logistique, y compris industrielle ».
Pour effectuer une remontée en puissance rapide et fluide, les forces armées suédoises ne peuvent donc pas se permettre de blocages majeurs sur leurs programmes d’armement. Les industriels se doivent donc d’être force de proposition, et la FMV (Defence Materiel Administration, équivalent de la DGA) a pour but de faciliter l’avancée des programmes, y compris en collaboration.
Un état de fait qui devrait profiter indirectement au missile anti-char MMP français, qui devrait servir de base à un futur système franco-suédois de lutte anti-char au-delà de la vue directe (TAVD). Ce point a d’ailleurs été souligné par le chef d’état-major de la Swedish Army : « Nous avons un excellent programme de missile anti-char avec la France, entre Saab et MBDA, entre la FMV et la DGA, entre moi et mon homologue français. Les acquisitions seront conjointes, la doctrine d’emploi de ce système également, […] et l’achat des armes se fera conjointement à l’acquisition de nouveaux systèmes d’entrainement et de simulation. […] Nous progressons très rapidement sur ce programme, et nous avons déjà pris en compte ce nouveau concept dans notre organisation des opérations. »
Pour l’heure, sur ce programme, rien ou presque n’a filtré concernant la répartition exacte des tâches entre industriels français et suédois. Si le MMP est sans conteste une excellente base de travail, la Suède dispose d’une véritable expertise en matière de missiles « top attack », de liaisons de données sécurisées, mais aussi d’écosystèmes de support, d’entraînement et de simulation. À voir comment ces différentes expertises viendront se combiner à celles de MBDA afin de décupler le potentiel du MMP.

RETEX : Commémoration nationale

 
 
 

 

Éric Dénécé, docteur en sciences politiques, ancien officier de renseignement au sein de la Marine nationale, chargé de mission pour soutenir la résistance anticommuniste au Cambodge, chercheur, écrivain, enseignant, fondateur de l’unité d’intelligence économique de Geos, est un excellent connaisseur de la politique américaine et de son soft power. Il est revenu sur les accords du 25 mars 2022 entre Ursula von der Leyen et Joe Biden sur les transferts de données, nous en soulignons quelques points.

Les transferts de données

Le site de l’UE « European Data Protection Supervisor » précise :
« Le transfert des données à caractère personnel hors de l’UE n’est autorisé que sous certaines conditions telles qu’énoncées dans la directive 95/46/CE ainsi que dans le règlement général sur la protection des données qui sera pleinement applicable à partir de mai 2018. Si un pays est considéré par la Commission européenne comme offrant un niveau de protection adéquat , il sera soumis aux mêmes règles qu’un État membre de l’UE, ce qui signifie que le destinataire des données dans cet État ne sera pas tenu de prendre des mesures spécifiques pour permettre le transfert. Le transfert de données vers un pays sans une décision relative à l’adéquation du niveau de protection des données exige des garanties appropriées, telles que des clauses contractuelles types ou des règles d’entreprise contraignantes. Des dérogations à cette règle peuvent être obtenues dans des cas très spécifiques. Le Comité européen de la protection des données, dont le CEPD est membre, fournira à la Commission des avis sur ce sujet ».

Les accords du 25 mars 2022

Ces accords bouleversent le schéma de protection des européens. Un premier accord sur les transferts de données personnelles des citoyens de l’UE vers les États-Unis avait été invalidé par la Cour de justice de l’UE en juillet 2020. La Cour avait estimé que les garanties de sécurité en matière de données n’étaient pas respectées aux États-Unis. La loi américaine sur le Foreign Intelligence Surveillance Act donne aux américains toute liberté pour utiliser les données d’un pays étranger.
À la faveur du conflit russo-ukrainien, c’est cet équilibre qui a été renversé par Ursula von der Leyden en accordant aux américains toute licence pour exploiter les données des européens. Par ce texte, « les Américains peuvent piocher dans les données que nous leur transmettons comme ils le veulent en utilisant l’argument de la sécurité nationale, ce qui ouvre la porte à tous les abus ». Ceci sans réciprocité.
Éric Dénécé ajoute « On sait que toutes les écoutes de la NSA faites depuis 2002 au titre de la lutte contre le terrorisme ont servi à la guerre économique et non pas à la lutte contre les attentats. La récente affaire des sous-marins australiens dont la construction est passée en un tour de main de la France aux États-Unis et au Royaume Uni en est une illustration récente parmi bien d’autres exemples. Seigneur, garde-moi de mes amis, de mes ennemis je m’en charge, disait le roi de Macédoine Antigone II Doson. Une citation qui semble toujours d’actualité.

Accord UE/États-Unis sur les transferts de données, le point de vue d’Éric Dénécé

10 avril 2022

Éric Dénécé, docteur en sciences politiques, ancien officier de renseignement au sein de la Marine nationale, chargé de mission pour soutenir la résistance anticommuniste au Cambodge, chercheur, écrivain, enseignant, fondateur de l’unité d’intelligence économique de Geos, est un excellent connaisseur de la politique américaine et de son soft power. Il est revenu sur les accords du 25 mars 2022 entre Ursula von der Leyen et Joe Biden sur les transferts de données, nous en soulignons quelques points.

Les transferts de données

Le site de l’UE « European Data Protection Supervisor » précise :
« Le transfert des données à caractère personnel hors de l’UE n’est autorisé que sous certaines conditions telles qu’énoncées dans la directive 95/46/CE ainsi que dans le règlement général sur la protection des données qui sera pleinement applicable à partir de mai 2018. Si un pays est considéré par la Commission européenne comme offrant un niveau de protection adéquat , il sera soumis aux mêmes règles qu’un État membre de l’UE, ce qui signifie que le destinataire des données dans cet État ne sera pas tenu de prendre des mesures spécifiques pour permettre le transfert. Le transfert de données vers un pays sans une décision relative à l’adéquation du niveau de protection des données exige des garanties appropriées, telles que des clauses contractuelles types ou des règles d’entreprise contraignantes. Des dérogations à cette règle peuvent être obtenues dans des cas très spécifiques. Le Comité européen de la protection des données, dont le CEPD est membre, fournira à la Commission des avis sur ce sujet ».

Les accords du 25 mars 2022

Ces accords bouleversent le schéma de protection des européens. Un premier accord sur les transferts de données personnelles des citoyens de l’UE vers les États-Unis avait été invalidé par la Cour de justice de l’UE en juillet 2020. La Cour avait estimé que les garanties de sécurité en matière de données n’étaient pas respectées aux États-Unis. La loi américaine sur le Foreign Intelligence Surveillance Act donne aux américains toute liberté pour utiliser les données d’un pays étranger.
À la faveur du conflit russo-ukrainien, c’est cet équilibre qui a été renversé par Ursula von der Leyden en accordant aux américains toute licence pour exploiter les données des européens. Par ce texte, « les Américains peuvent piocher dans les données que nous leur transmettons comme ils le veulent en utilisant l’argument de la sécurité nationale, ce qui ouvre la porte à tous les abus ». Ceci sans réciprocité.
Éric Dénécé ajoute « On sait que toutes les écoutes de la NSA faites depuis 2002 au titre de la lutte contre le terrorisme ont servi à la guerre économique et non pas à la lutte contre les attentats. La récente affaire des sous-marins australiens dont la construction est passée en un tour de main de la France aux États-Unis et au Royaume Uni en est une illustration récente parmi bien d’autres exemples. Seigneur, garde-moi de mes amis, de mes ennemis je m’en charge, disait le roi de Macédoine Antigone II Doson. Une citation qui semble toujours d’actualité.
Commentaires: 0