Nicolas Lebourg et Olivier Schmitt se présentent comme des chercheurs spécialistes des mouvements d’extrême droite.
Ils viennent de sortir un bouquin intitulé : «Paris Moscou. Un
siècle d’extrême droite». Et présenté par leurs copains de la façon suivante : «Nicolas Lebourg et
Olivier Schmitt nous offrent une analyse rigoureuse et documentée».
En fait, il faut être clair, c’est une contribution aux opérations de propagande russophobe visant à faire porter la responsabilité à la Russie de tout ce
qui ne va pas en Occident. Et en particulier en prétendant que si les gens votent mal, c’est-à-dire contre le néolibéralisme factieux, célérusses qui leur demandent.
Le titre déjà est rigolo.
J’ai bien connu les relations Paris /Moscou. Elles ne me semblaient pas particulièrement concerner l’extrême droite. Mais là si l’on comprend bien ils font
partir leur «étude» de 1924, c’est-à-dire la mort de Lénine jusqu’à aujourd’hui. Il y a bien eu des rapports étroits entre l’extrême droite et Moscou en décembre 1941, c’est quand les
armées nazies sont arrivées à 30 bornes de la capitale soviétique. Mais ce n’est pas le propos des auteurs. Eux, ils sont spécialistes des mouvements d’extrême droite donc, armés de leur
morale en béton, ils font la chasse aux méchants. Mais attention les bataillons ouvertement nazis en Ukraine, les équivalents dans les pays baltes, la glorification de la collaboration
avec le nazisme et de la participation à la Shoah, le triomphe fait aux nazis survivants dans les parlements occidentaux, tout cela ne leur arrache pas une remarque. Non, la cible ce sont
ceux qui n’acceptent pas le déferlement de propagande que connaît l’Occident depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine en février 2014. Alors sans état d’âme et avec la bonne
vieille méthode de l’amalgame ils dressent des listes.
Et voilà qu’à ma grande surprise je figure dans l’index et suis mentionné à la page 248. À propos des terribles interventions russes sur les élections
européennes que comment que si les Russes n’étaient pas là, les macronistes de Valérie Hayer auraient dépassé les 80%. Et soucieux de montrer comment la progression du RN c’est Poutine,
ils avancent comme preuve que Stephane Séjourné (le neuneu installé au Quai d’Orsay par Attal) a même parlé de «manipulation» ! Oulala, si Séjourné parle de «manipulation» c’est que c’est
du sérieux. Il est même connu pour ça Séjourné, pour son sérieux. Et son brio aussi. C’est qu’ils sont «rigoureux» nos chercheurs. Ils ont de bonnes références.
Ils poursuivent : il a pour la première fois, publiquement dénoncé les mensonges de trois personnalités d’extrême droite. De qui s’agit-il ? Caroline
Galacteros (ancienne conseillère d’Éric Zemmour), Florian Philippot et Régis de Castelnau (descendant du général Édouard de Castelnau cet ancien avocat communiste évolue depuis plusieurs
années dans les cercles d’extrême droite pro-russe.).
J’en apprends de belles dites donc ! Pas que je descends d’Édouard de Castelnau, ça j’étais au courant, même si on se demande ce que ça fout là. Bon alors
Lebourg et Schmitt reprennent à leur compte l’accusation de Séjourné : je ferais rien qu’à dire des menteries.
On ne saura pas lesquelles, dommage ça m’aurait intéressé.
Ensuite je suis «ancien avocat communiste». On ne sait pas à quoi se rapporte l’adjectif ancien. Ancien avocat ? Ça n’est pas le bon terme : je suis
toujours avocat mais «honoraire». Si c’est à communiste, c’est un mensonge. Je ne suis pas ancien communiste, je suis toujours communiste même si je considère l’actuel PCF comme un
groupuscule social-démocrate. Je n’essaye même pas de cacher mon pro-soviétisme dont mon éventuelle russophilie n’est qu’un accessoire. J’ajouterai que mes constantes prises de position
favorables au peuple palestinien ne me rangent pas non plus spontanément aux côtés des tenants racistes de la guerre des civilisations. D’ailleurs on notera au passage la grande prudence
de nos vaillants chercheurs spécialistes l’extrême droite, quand il s’agit d’aborder la question de celle qui est au pouvoir actuellement en Israël avec les conséquences que l’on sait
pour Gaza. Netanyahou, Smotrich, Ben Gvir, connais pas.
Ceux qui me connaissent, qui me lisent, qui m’écoutent et qui me regardent savent tout ça parfaitement. Je n’en fais pas mystère même si on me reproche
parfois et pas toujours à tort, d’être un vieux stalinien.
J’apprends aussi que j’évoluerais depuis plusieurs années dans les «cercles d’extrême droite pro-russe» ! En voilà une nouvelle qu’elle est intéressante. Je
n’ai jamais rencontré Caroline Galacteros, professionnelle reconnue de la géopolitique que j’ai interviewée une fois à distance, pour ma petite chaîne YouTube. Je ne connais pas Florian
Philippot ni aucune des personnes qui ont eu droit au name dropping de nos rigoureux chercheurs. Depuis sept ans, je vis retiré dans ma grotte provençale, et sur cette période mes
déplacements parisiens se comptent sur les doigts d’une seule main. Cette affirmation est simplement débile. Venant de Stéphane Séjourné c’est normal. Qu’elle soit reprise telle quelle
par nos deux chercheurs «rigoureux», caractérise leur manque de sérieux, ou plutôt dévoile l’objectif de cette publication : apporter sa pierre à des opérations de propagande
atlantistes.
Et ce d’autant que Nicolas Lebourg et moi nous connaissons sur les réseaux depuis déjà un bon moment. Et a priori il sait très bien à quoi s’en
tenir.
Cette petite sortie n’a absolument pas pour but de me justifier. Mais de montrer avec le pointage de cette absence de sérieux, à quoi et à qui nous avons
affaire.
Célérusse, célérusses, célérusses !
Il n’y a pas de sot métier, mais il y en a qui déconsidèrent.
Tout le monde a oublié les rodomontades du kéké de l’Élysée au début de cette année. Comment qu’il était pas trop martial, il voulait déclarer la guerre à
la Russie et envoyer une poignée de bidasses «sur le terrain» en Ukraine ! Les patrons de la «grande muette» s’arrachaient les cheveux en silence, si ce n’est le chef d’état-major qui
nous gratifiait de quelques coups de menton, histoire de faire plaisir au psychopathe qui l’a nommé.
Sur le plan international, et dans le silence des médias français, le pauvre Macron s’est fait déchiqueter. On n’a guère trouvé pour l’approuver que les
Polonais toujours soucieux de donner raison à Marx écrivant Engels : «Dans leur histoire
les Polonais ont toujours fait courageusement des choses stupides», et un pays balte soucieux quant à lui qu’on n’oublie pas sa collaboration avec les nazis pour l’extermination des
juifs. Les autres pays occidentaux ont regardé ailleurs d’un air gêné.
Depuis le 9 juin dernier, s’est ajoutée la séquence politique grotesque, qu’il vient d’infliger au pays avec sa dissolution. Alors maintenant, les choses
sont claires, il est définitivement considéré partout comme un guignol narcissique. On aurait pu espérer sur la question de la guerre en Ukraine il se fasse un peu plus discret. Pensez
donc !
Chassez le naturel, il revient au galop. De loin en loin il continue à en faire des tonnes. Et notre pitre élyséen, histoire de concurrencer Boris Johnson
et d’agrémenter le bordel, vient à nouveau de se déguiser en militaire et de déclarer la guerre à la Russie. Seule avec l’État factieux britannique armé de sa russophobie rabique, la
France a décidé de lever les restrictions pour l’utilisation de missiles à longue portée par Kiev dans la profondeur stratégique.
Ben quoi, c’est normal vous psalmodient les imbéciles de plateau, d’Alla Poedie à Nicolas Tenzer en passant par Xavier Tytelman (au secours !). Les
Ukrainiens sont attaqués, il faut qu’ils puissent riposter et frapper Moscou et Saint-Pétersbourg. Avec des missiles dont les Russes ne sauront pas s’ils sont porteurs d’armes nucléaires,
lorsqu’ils apparaîtront sur leurs radars.
Le problème c’est que ces armes sont occidentales, et ne peuvent être utilisées qu’avec l’assistance des moyens de l’OTAN. Ce qui veut dire que la
profondeur stratégique de l’Ukraine, elle se trouve en Pologne, en Allemagne, en Italie… et en France.
Donc si Zelensky bombarde la Russie dans la profondeur de la Russie avec des armes occidentales guidées par les systèmes de l’OTAN, la riposte russe
concernera évidemment ces pays. Les Russes ont rappelé cette évidence.
Bien évidemment, selon sa bonne habitude Macron déclare la guerre à une puissance nucléaire sans en toucher un mot au Parlement.
Comme «manquement» justifiant l’application de l’article 68 de la Constitution et sa destitution, il pèserait d’un autre poids que le refus de nommer
Castets à Matignon.
LFI a donc mis sa terrible menace à exécution et lancé la procédure de destitution d’Emmanuel Macron en application de l’article 68 de la Constitution.
Deux petits préalables avant de jeter un coup d’œil sur le fond de cette question.
Tout d’abord l’article 68 qui permet de destituer le président de la République est le fruit d’une modification récente pour atténuer la totale immunité
accordée au chef de l’exécutif par le texte initial. Le premier alinéa de l’article présente cette possibilité de façon très restrictive : « Le Président de la République ne peut
être destitué qu’en cas de manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat. La destitution est prononcée par le Parlement constitué en Haute-Cour. »
L’utilisation de la formule « ne peut être destitué qu’en cas de manquement… » démontre que le manquement invoqué doit être particulièrement sérieux. La destitution du chef
de l’exécutif est prononcée par le pouvoir législatif réuni en congrès à une majorité de 66 % des parlementaires. Cet article n’a évidemment jamais été utilisé et auparavant, seule une piètre
tentative à vocation médiatique avait été lancée contre François Hollande sans que personne n’y prête d’ailleurs attention.
Une gauche minoritaire
En second lieu, pour apprécier la valeur politique de la démarche des amis de Jean-Luc Mélenchon, il faut évaluer la pertinence juridique et institutionnelle du
reproche. Si l’on comprend bien, Macron est accusé de ne pas respecter la Constitution et de piétiner la tradition républicaine en ne nommant pas Lucie Castets premier ministre, alors que
l’Assemblée nationale élue le 7 juillet dernier est installée et que le gouvernement Attal est démissionnaire. La présentation qui est faite du « manquement incompatible
» interprète l’article 8 de la Constitution comme donnant au président de la République ce que l’on appelle une compétence liée. Il serait tenu de nommer
premier ministre la personnalité qui lui serait présentée par l’alliance électorale répartie en cinq groupes parlementaires disposant du plus grand nombre de députés. La Constitution ne dit
rien de tel, le Président dispose du pouvoir souverain de nommer le premier ministre qu’il veut. À charge pour celui-ci de composer son gouvernement et d’obtenir sous une forme ou sous une
autre la confiance de l’Assemblée nationale. Ce à quoi les dirigeants composant les partis membres de l’alliance électorale NFP répondent mécaniquement par l’incantation : « la gauche a gagné
les législatives ». Cela n’est pas sérieux.
Les élections européennes du 9 juin dernier qui ont quand même constitué un sondage en grand et en vrai ont accordé aux organisations qui vont constituer
ensuite l’alliance électorale NFP un total cumulé de 33 %. Le 30 juin au premier tour des législatives il sera ramené à 27 %, c’est-à-dire un des plus bas étiages de la gauche depuis
1958.
On connaît la suite, avec la nième application de la stratégie du castor mise en place entre les deux tours, avec une nouvelle alliance électorale à la clé
entre le NFP et Ensemble, le parti macroniste. Désistements réciproques aboutissant à la réélection de Gérald Darmanin et d’Élisabeth borne avec les voix LFI, celles de Mathilde Panot et
Sébastien Delogu par les électeurs de Macron. Jusqu’à François Hollande par ceux de Philippe Poutou…
Réussite de l’opération avec la progression du RN stoppée et l’arrivée à l’Assemblée de la majorité constituée par « l’arc républicain », le bloc bricolé entre
les deux tours. C’est la raison pour laquelle, toutes les gesticulations de la « gauche » depuis le 7 juillet, toutes ces mises en cause d’Emmanuel Macron n’ont pour seule motivation que
d’effacer les traces de ce nouveau sauvetage du système. Qu’elle avait participé à mettre en place en 2017 en l’envoyant à l’Élysée et en l’y maintenant depuis.
Histoire de donner le change, le parti socialiste a trouvé dans les cartons de Pierre Moscovici et d’Anne Hidalgo une candidate improbable, sorte de Macron en
jupon. Arrogance, suffisance, narcissisme, démagogie, gauchisme culturel, Lucie Castets incarne de façon caricaturale la haute fonction publique socialiste qui a tout trahi avant d’organiser
l’arrivée de Macron au pouvoir.
En multipliant les provocations, Jean-Luc Mélenchon soucieux de son image usurpée d’opposant irréductible, a veillé soigneusement à empêcher son arrivée à
Matignon. Au grand dam de ses amis socialistes qui piaffent à l’idée de réintégrer les palais de la république.
Et c’est bien le refus d’Emmanuel Macron de marcher dans cette combine qui permet d’alimenter cette colère surjouée et de se lancer dans une procédure de
destitution dont les initiateurs, savent très bien qu’elle n’ira nulle part. Cette destitution n’est absolument pas leur objectif.
Destituer Macron : Les vrais motifs
Ces choses-là étant dites, force est cependant de constater qu’une procédure permettant de destituer Macron serait à la fois légitime et justifiée. Car si
l’article 8 de la Constitution lui donne la compétence de nommer le Premier ministre, et qu’il n’est pas tenu par une tradition républicaine inventée d’obéir aux ordres que lui lancent les
gens du NFP, il doit le nommer. C’est une proposition qu’il fait à l’Assemblée nationale, à charge pour celle-ci d’utiliser ses propres compétences pour l’accepter
ou le refuser. Et cette compétence qu’elle exerce en continu, participe du contrôle dont elle dispose dans une démocratie parlementaire. En refusant d’utiliser la sienne jusqu’à présent,
Emmanuel Macron ne remplit pas ses obligations qui sont de veiller, aux termes de l’article 5, au respect de la Constitution.
En effet, depuis le 16 juillet et la démission de Gabriel Attal, la France n’a plus de gouvernement légitime. L’article 20 de la Constitution nous dit :
« Le gouvernement détermine et conduit la politique de la Nation. Il dispose de l’administration et de la force armée. Il est responsable devant le Parlement dans les conditions et
suivant les procédures prévues aux articles 49 et 50. » Pour que sa légitimité institutionnelle à remplir sa mission soit incontestable, le gouvernement doit se présenter
devant l’Assemblée nationale. Or, la bande des anciens ministres à qui Macron a demandé d’expédier les affaires courantes, ne dispose absolument pas du statut institutionnel lui
permettant de remplir la mission prévue à l’article 20. Armée de son insondable stupidité, Amélie Oudéa-Castera l’ancienne ministre des sports (et de l’éducation nationale aussi) a
tranquillement et fermement craché le morceau et revendiqué le fait de piétiner les règles fondamentales de la démocratie républicaine. Interrogée à propos de sa « mission lors du déroulement
des jeux paralympiques elle a tranquillement répondu en souriant : « Je ne ressens pas un statut démissionnaire. On est à fond, un gouvernement mobilisé. Je suis totalement
engagée. »
Elle n’est plus ministre. Elle n’a plus aucun droit de gouverner, juste de coller les timbres sur les enveloppes. Elle viole la Constitution et n’essaye même
pas de donner le change.
Et c’est là qu’on apprend que le Secrétariat Général du Gouvernement a produit à l’usage des ministres une note absolument sidérante. De laquelle il
résulte que le gouvernement démissionnaire peut prendre deux types de décisions : les décisions ordinaires, et les décisions urgentes.
Il ne peut pas prendre de décision politique, mais on voit bien que plus la situation dure, plus les décisions politiques deviennent des décisions urgentes.
C’est la raison pour laquelle, aucun des ministres démissionnaires ne se gêne. Ils occupent tous les médias, parcourent les plateaux, donnent interviews sur interviews. Madame Belloubet
organise des réunions de rentrée scolaire, Monsieur Séjourné fait des voyages, porte la parole diplomatique de la France, Madame Oudéa-Castera « mobilisée » ne se « ressent pas démissionnaire
». La note ajoute benoîtement que le «gouvernement démissionnaire» ne peut pas être renversé puisqu’il est déjà démissionnaire… Tant qu’à se moquer du monde, pourquoi ne pas continuer.
Usurpation en bande organisée
Le résultat est que la France est désormais gouvernée par une bande en dehors des règles constitutionnelles françaises qui sont celles d’une république
parlementaire. Une bande organisée de délinquants qui plus est, puisque l’article 433-12 du Code pénal prévoit que : « Est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros
d’amende le fait, par toute personne agissant sans titre, de s’immiscer dans l’exercice d’une fonction publique en accomplissant l’un des actes réservés au titulaire de cette
fonction ».
Cette situation invraisemblable à laquelle Emmanuel Macron s’accroche sous de mauvais prétextes justifierait à elle seule de mener à son terme la procédure de
l’article 68. Il y aurait bien sûr d’autres raisons qui permettraient de charger la barque, les nombreuses affaires de corruption, la soumission à des intérêts étrangers comme dans l’affaire
Durov par exemple, les rodomontades bellicistes oubliées du printemps, mais le refus de nommer un premier ministre quel qu’il soit, même Lucie Castets si ça lui chante,
est une violation de ses obligations de veiller au respect de la Constitution.
Alors pour faire durer et essayer de pérenniser cette situation, qui l'arrange et qui lui permet de continuer à gouverner, il prétend qu’il anticipe et veut
éviter de nommer un premier ministre qui n’aurait pas la confiance des députés. Non seulement il se fout du monde, mais il empiète sur les responsabilités du pouvoir législatif.
Débarrasser la France, d’un irresponsable de ce calibre est désormais une urgence.
Décidément, à quoi pensait Pavel Durov en débarquant à Paris ?
Les conditions de l’arrestation de Pavel Durov sont assez troublantes en ce qu’elles posent la question de savoir pourquoi et comment l’oligarque russe est allé
se jeter dans la gueule du loup. Il n’y a finalement que deux hypothèses qui permettraient de répondre à cette question.
Tout d’abord celle d’une inconséquence assez incroyable de quelqu’un s’imaginant qu’il bénéficierait d’une totale sécurité au pays de Macron, pourtant connu
comme un des plus serviles larbins de l’Empire. Pavel Durov serait-il à ce point idiot ? Ensuite il est possible qu’il ait été victime d’une opération des services occidentaux qui ont
tranquillement bénéficié de toutes les informations nécessaires pour que les pandores soient présents à l’aéroport du Bourget avant même l’atterrissage, pour coffrer l’imprudent.
Ce qui est clair en revanche c’est que l’opération part de plus loin et qu’elle a mobilisé différents services de l’État français, probablement à la
demande de ses maîtres américains.
S’il en était besoin, les deux communiqués publiés le 26 août en apportent une confirmation claire. Il s’agit d’abord de celui du parquet de Paris définissant
dans quel cadre judiciaire s’était déroulé arrestation de Pavel Durov et les suites de la procédure. Ensuite celui, particulièrement lamentable, contenu dans le tweet publié sous la signature
d’Emmanuel Macron sur le réseau X. Sous la signature de Madame Laure Beccuau, le parquet de Paris, autorité de poursuite détaille la collection d’épées de Damoclès qui pèse sur le jeune
milliardaire.
On peut d’ores et déjà faire les commentaires suivants :
• Le parquet nous apprend que c’est le 8 juillet, c’est-à-dire très récemment et en pleine
période estivale, qu’une information judiciaire a été ouverte, c’est-à-dire que désormais les « investigations » sont conduites par des magistrats instructeurs qui sont des juges du siège.
(Qui sont en théorie impartiaux, mais bien sûr c’est en théorie, défense de rire…)
• les juges d’instruction ne conduisent pas les investigations directement, ils ont confié ça
à la police. Les interrogatoires sont donc conduits par des fonctionnaires de police.
• La liste considérable des chefs de poursuite sur lesquels porte l’instruction est absolument
considérable. Il ne manque rien ! Pour l’instant la procédure se déroule contre « personnes non dénommées », ce qui veut dire que pour l’instant personne n’est mis en examen. Cette situation
est très intéressante pour trois raisons :
• D’abord les incriminations citées et retenues par la procédure couvrent toutes les activités
d’une application de messagerie telle que Télégram. Mais également bien sûr WhatsApp, Signal, MSN, Google, Méta etc. etc. On voit bien que l’objectif est donc la CRIMINALISATION de toute
activité de messagerie au bon vouloir du pouvoir d’État. Le fait que personne ne soit en l’état personnellement poursuivi, montre bien l’on a lancé un filet très large pour envoyer un message
clair. La tranquillité sera garantie à ceux se soumettront au pouvoir d’État.
• Ensuite ce qui est poursuivi, c’est la « complicité ». On comprend que c’est une «
complicité par fourniture des moyens » de la messagerie. Les personnes impliquées dans la procédure française sont moins les auteurs directs des infractions (trafiquants, escrocs, pédophiles,
etc.) que les propriétaires du réseau, accusés de l’avoir mis à la disposition des criminels. Il faut savoir qu’en droit français la « complicité » c’est encourir au complice les mêmes peines
que celles des auteurs principaux. La ficelle est vraiment grossière.
• Enfin, on a rajouté à quasiment chacun des chefs de poursuite la qualification de « bande
organisée ». C’est une astuce procédurale fournie aux magistrats et aux policiers par le code, qui permet de faire passer la durée de la garde à vue de 24 heures (renouvelable une fois) à 96
heures ! C’est-à-dire 4 jours et 4 nuits où Pavel Durov sera à la merci des flics, éventuellement assisté pendant les interrogatoires par un avocat qui n’aura pas eu accès au dossier…
• Bon courage à lui pour affronter le petit séjour lui a fait préparer Emmanuel Macron. À
l’échéance de celui-ci, il sera présenté aux juges d’instruction qui pourront le mettre en examen, le parquet pouvant réclamer alors sa mise en détention au juge des libertés.
La simple litanie des chefs de poursuite égrainée dans le communiqué du parquet établit qu’il s’agit bien d’une offensive
lancée contre la liberté d’expression qui devrait régner sur les réseaux. Probablement concernant Télégram, demandée par les Américains et exécutée par Emmanuel Macron
marchant sur les traces serviles de son prédécesseur François Hollande dans l’affaire Evo morales.
Cette présentation est en fait confortée par le risible communiqué publié par le Président de la république sur X.
D’abord le texte est écrit avec les pieds, ce qui semble quand même témoigner d’une certaine fébrilité. « L’arrestation
du président de Telegram sur le territoire français a eu lieu dans le cadre d’une enquête judiciaire en cours. Ce n’est en rien une décision politique. Il revient aux juges de
statuer.» Eh bien non, Monsieur le Président, il ne s’agit pas d’une arrestation mais d’une interpellation, ce n’est pas une enquête judiciaire, c’est une Instruction
c’est-à-dire une information judiciaire. La moindre des choses pour la présidence de la république serait de faire preuve de sérieux en utilisant les bons mots. Ce qui éviterait l’éclat de
rire du lecteur qui ponctue fatalement la formule : « Ce n’est en rien une décision politique ». Quant à la phrase finale aussi bâclée
et imprécise que les précédentes : «Il revient au juge de statuer », on va répondre, mais statuer sur quoi ?
Il est difficile d’appréhender les tenants et aboutissants de toute cette affaire, pour l’instant obscure. De savoir quels sont les objectifs des différents
acteurs et les stratégies envisagées. Mais à l’évidence, c’est bien la guerre menée contre les réseaux sociaux devenus une agora mondiale qui s’oppose aux puissances étatiques et qu’elles
essaient de contrôler. On peut imaginer que le patron de Télégram est désormais un otage dans cette guerre. L’enjeu étant probablement pour lui de rentrer dans le rang ou de le payer de sa
liberté.
Décidément à quoi pensait Pavel Durov en débarquant à Paris ? Il n’avait jamais entendu parler de Julian Assange ?
Pavel Dourov – sorti de garde à vue et présenté à un ce juge ce 28 août 2024 – a un frère, Nikolaï, qui est l’informaticien de génie qui a construit l’infrastructure du réseau. Il se pourrait
donc qu’Emmanuel Macron ait en partie manqué son coup. Et ceci d’autant plus que l’on apprend qu’un mandat d’arrêt aurait été émis contre les deux frères dès le mois de mars 2024. Ayant arrêté
l’un des deux frères, la police française a donc éventé son plan en ce qui concerne l’autre. Plus on apprend de détails sur l’opération et plus l’on perçoit son côté mal ficelé.
On entend beaucoup de rumeurs et d’informations non vérifiées sur l’affaire. Néanmoins, il est intéressant de noter quelques points inconnus jusqu’ici.
Emmanuel Macron se préoccupe de l’arrestation des frères Dourov depuis mars 2024
Il semble que les autorités françaises aient une fois de plus menti. La police aurait émis, selon Politico, des
mandats d’arrêt contre Pavel Dourov et son frère Nikolaï dès le mois de mars:
Les autorités françaises ont émis des mandats d’arrêt contre le PDG de Telegram, Pavel Durov, et son frère cofondateur, Nikolai, en mars, selon un document administratif français vu en
exclusivité par POLITICO.
Le document indique que l’enquête d’infiltration française sur Telegram est plus large et a commencé des mois plus tôt que ce que l’on pensait jusqu’à présent. (…)
Pavel Durov a été arrêté samedi soir par la police française à l’aéroport du Bourget, à Paris, après que les autorités frontalières eurent prévenu les autorités judiciaires qu’il arrivait
d’Azerbaïdjan à bord de son jet privé.
(…)
Les mandats d’arrêt ont été émis après que la plateforme de messagerie ait donné « aucune réponse » à une demande judiciaire antérieure visant à identifier un utilisateur de Telegram,
selon le document, qui a été communiqué à POLITICO par une personne directement impliquée dans l’affaire.
Le document souligne également « la coopération quasi inexistante de Telegram » avec les autorités françaises et européennes dans d’autres affaires.
Des mandats d’arrêt ont été émis le 25 mars à l’encontre de Pavel et de son frère Nikolai, cofondateur de la plateforme, pour « complicité de détention, de distribution, d’offre ou de
mise à disposition d’images pornographiques de mineurs, en bande organisée ». Les médias français avaient précédemment indiqué que l’enquête avait été ouverte en juillet.
Emmanuel Macron n’a pas arrêté le bon Dourov
Un mandat d’arrêt contre les deux frères peut se comprendre par le fait que seul Nikolaï, vraisemblablement, maîtrise l’accès à l’encryptage des données. Comme
l’explique Pepe Escobar sur Zero Hedge:
Nikolai Durov, le frère ultra-discret de Pavels, est le principal architecte de Telegram : maître en mathématiques, deux doctorats, médailles d’or à l’Olympiade internationale de
mathématiques. Les Français préféreraient conclure un accord – d’où l’interrogatoire prolongé : mais cela impliquerait de briser Pavel afin qu’il influence Nikolaï pour qu’il leur remette
les fameuses clés.
En l’occurrence, le coup est raté, dans la mesure où Nikolaï Dourov fera en sorte de ne pas être à portée de main des autorités françaises ou detout autre gouvernement prêt à l’extrader
éventuellement vers la France.
Les effets dévastateurs de la mauvaise foi française
C’est le genre d’information qui fait très mal. Pavel Dourov aurait, selon le Canard Enchaîné, eu rendez-vous à dîner avec Emmanuel Macron. L’Elysée dément. Si cela est vrai – Dourov n’avait
pas intérêt à inventer cela pendant sa garde à vue – qui aura encore confiance dans la parole de Macron.
On peut même aller plus loin : Même si l’histoire n’était pas corroborée, on va la croire dans le reste du monde. L’effet est dévastateur pour Emmanuel
Macron en particulier, et pour la diplomatie de la France en général. Ce pays est gouverné par des menteurs et des parjures….Surtout n’acceptez rien de leur part: ils ont donné la
citoyenneté française à Dourov et ils l’arrêtent trois ans plus tard.
Tout cela conduit à braquer le projecteur sur le pire visage que notre pays offre au monde aujourd’hui. Encore un point de vue incisif d’Escobar:
Comme on pouvait s’y attendre, l’interrogatoire de Durov se déroule sans aucune transparence. La France est une société atrocement secrète, encline au silence absolu sur les questions
sérieuses, à une lenteur éprouvante, ponctuée de rares déclarations formelles. Tout est affaire de procédure – et la bureaucratie est abrutissante.
Pourtant, la bureaucratie française a peut-être donné un indice précieux sur ce qui la dérange vraiment. Elle ne peut tout simplement pas accepter que quiconque utilise – ou fournisse –
les moyens de « brouiller les pistes » en termes de transactions financières, de contournement de la censure et de la surveillance.
Cela pourrait donc aller bien au-delà de l’obsession d’obtenir tout ou partie des clés de chiffrement de Telegram. L’appareil bureaucratique français veut faire feu de tout bois pour
supprimer toute possibilité de contournement – tout en conservant le pouvoir de punir qui que ce soit.
L’impact de l’arrestation de Pavel Dourov, avec son mélange d’arbitraire et de barbouzerie est terrible pour notre pays.
Une revue australienne liée aux “Five Eyes” explique les raisons profondes de l’arrestation de Dourov
L’ASPI, le groupe de réflexion australien lié aux “Five Eyes” (les services de renseignement de l’Australie, du Canada, de la Nouvelle-Zélande, du Royaume-Uni et des USA) tiendra bientôt
son sommet annuel consacré aux
cybertechnologies, aux menaces hybrides, à la désinformation, à l’ingérence électorale, à l’intelligence artificielle, etc. connu sous le nom de « Sidney Dialogue » Or l’un des articles publiés
dans la perspective du sommet est consacré à Telegram. Il éclaire singulièrement les raisons profondes de l’arrestation de Pavel Dourov. Il se concentre sur les risques posés par Telegram en tant
qu’« outil pour les menaces hybrides » et appelle à une réglementation plus stricte. L’ASPI révèle le motif de l’arrestation de Pavel Dourov que la police de Macron a camouflé sous de faux
prétextes. Nous en donnons quelques extraits.
L’article consacré à Telegram par
un chercheur du think tank ASPI qui se dissimule derrière un pseudonyme (Fitriani) relativise les raisons officielles données par la police française pour faire arrêter Pavel Dourov:
Derrière les raisons alléguées par la police de Macron
Autrefois célébré comme l’outil ultime de communication libre grâce à son cryptage et à ses pratiques de modération laxistes, Telegram est aujourd’hui accusé par les autorités françaises
de faciliter les activités criminelles et d’être éventuellement exploité pour des menaces hybrides, en particulier par des acteurs étatiques russes. Les menaces hybrides associent la
force militaire à des tactiques non militaires, notamment les cyberattaques et la désinformation.
Pour contrer ces menaces, les décideurs politiques du monde entier doivent donner la priorité à la réglementation, à la responsabilisation des plateformes et à la promotion de plateformes
alternatives moins susceptibles d’être utilisées à mauvais escient, tout en protégeant la liberté d’expression. Il s’agit d’un exercice d’équilibre délicat.
Telegram instrument du soft power russe
Au moins, l’obsession russe est clairement avouée:
Le rôle de Telegram dans de telles opérations hybrides, en particulier dans le contexte des activités soutenues par l’État russe, est devenu de plus en plus évident. La plateforme a été
utilisée non seulement pour des communications privées légitimes, mais aussi comme outil de diffusion de désinformation, de propagande et
de contenus extrémistes.
Cette situation est particulièrement préoccupante dans les zones de conflit telles que l’Ukraine, où Telegram compte 7 millions d’utilisateurs, dont des représentants du gouvernement et
des leaders d’opinion.
Bien que M. Durov affirme que sa plateforme n’est pas soutenue par le Kremlin, les liens financiers de Telegram avec des oligarques russes et des entités contrôlées par l’État suggèrent
le contraire. Les investissements de personnalités telles que Roman Abramovich et Sergey Solonin, tous deux liés au gouvernement russe, suscitent de vives
inquiétudes quant à la susceptibilité de la plateforme à l’influence de l’État.
Cet enchevêtrement financier est alarmant compte tenu de la portée étendue de Telegram en Europe de l’Est, en Asie centrale et au Moyen-Orient, régions qui font l’objet d’opérations
hybrides de la part de la Russie.
Un échantillon de pur complotisme occidental
L’auteur donne à fond dans la paranoïa antirusse :
La tentative du gouvernement russe de bloquer Telegram en 2018 et la prétendue délocalisation de l’application à Dubaï pourraient avoir été
une façade stratégique, donnant une couverture aux chaînes Telegram qui
promeuvent des récits pro-russes, notamment en glorifiant les séparatistes, en justifiant l’invasion de l’Ukraine et en diffusant de la propagande extrémiste – dont certaines auraient
alimenté les récentes émeutesanti-immigration au
Royaume-Uni.
Cette manœuvre a permis de préserver l’illusion de l’indépendance de Telegram tout en le rendant accessible au Kremlin, ce qui s’inscrit dans la stratégie hybride de la Russie. Il s’agit
d’une tactique tout à fait compréhensible : utiliser la désinformation pour affaiblir des adversaires, soit comme alternative, soit comme complément à une confrontation militaire, est une
approche rentable.
Macron n’est qu’un pion dans la “guerre hybride” que la sphère anglophone mène contre la Russie
Si vous aviez encore un doute quant à l’autonomie de Macron, cet article vous dégrisera. On comprend que l’arrestation de Paris prend sa place dans un programme
piloté par la communauté anglo-saxonne mondiale et qui relève de la guerre hybride:
Alors que les plateformes de messagerie jouent un rôle de plus en plus central dans les communications et les conflits, les leçons tirées de l’essor de Telegram et de ses liens avec les
intérêts russes soulignent l’importance de la transparence, de la réglementation et de la promotion de plateformes sûres et responsables.
Des réglementations plus strictes peuvent être mises en œuvre pour les plateformes numériques afin de garantir la transparence de leur politique de régulation du contenu, de leur
propriété, de leur régime juridique et du stockage de leurs données. Le monde peut s’inspirer, entre autres, de la loi allemande sur l’application des réseaux (NetzDG), qui oblige les
plateformes de médias sociaux à retirer rapidement les contenus illégaux sous peine d’amendes importantes.
La loi sur les services numériques (DSA) de l’Union européenne oblige les grandes plateformes en ligne à évaluer et à atténuer les risques liés à la diffusion de contenus illégaux, à la
désinformation et à d’autres activités préjudiciables. De même, la section 230 de la loi américaine sur la décence des communications (Communications Decency Act) a été établie pour tenir
les plateformes responsables du contenu qu’elles hébergent tout en préservant la liberté d’expression. En Australie, la réglementation comprend la loi sur la sécurité en ligne de 2021 et
le forum des régulateurs des plateformes numériques.
Alors que la communauté internationale a sans doute été trop lente à responsabiliser les plateformes de messagerie et de médias sociaux, ces mesures prises par les gouvernements reflètent
une évolution positive vers une meilleure surveillance. L’épisode Telegram rappelle l’importance pour les démocraties de se prémunir contre les multiples menaces hybrides et de mettre en
œuvre des mesures adaptées à leurs préoccupations particulières en matière de sécurité.
On se croirait dans l’ancien monde communiste : Ne parlez plus d’arrestation de Pavel Dourov mais “d’évolution positive vers une meilleure surveillance” de
l’opinion publique !
Il faut toujours voir les films d’Ettore Scola, c’est la garantie d’un voyage au pays de l’intelligence politique. Il y a bien sûr mon préféré : « Nous nous
sommes tant aimés » mais, va savoir pourquoi, la séquence que nous venons de vivre m’a renvoyé à un autre chef-d’œuvre : « Une journée particulière ». Qui
raconte l’histoire de la rencontre improbable entre une mère de famille et un dandy homosexuel, seuls sous le regard de la concierge, dans un immeuble déserté de ses occupants partis assister
à la réception d’Hitler par Mussolini à Rome le 7 mai 1938. La solitude des deux protagonistes s’oppose ainsi à la foule qui assiste à l’événement, dont le Duce a voulu qu’il exprime le
triomphe du fascisme italien.
Un triomphe personnel pour Macron
Le triste état de la société française, le fonctionnement de son État et de son économie pouvait faire naître les plus grandes craintes quant à notre capacité à
organiser et à maîtriser un événement tel que les Jeux Olympiques. La semaine d’émeutes à la suite de l’affaire de Nanterre, la catastrophe de l’organisation de la finale de la ligue des
champions à Saint-Denis, la gestion erratique de Paris par l’équipe Hidalgo pouvait nourrir des réserves sérieuses. Et de Marine Le Pen à Alain Bauer, les Cassandre ne manquaient pas qui
prévoyaient le pire.
Il ne s’est pas produit. L’événement s’est déroulé sans véritable anicroche, et le système Macron en tête l’a transformé en un triomphe personnel pour le
président.
Il est évidemment plus facile de raconter l’histoire quand on connaît la fin, mais ce que raconte ce « succès » dit finalement des choses assez terribles sur la
société française.
Rappelons que le Président de la République avait subi une défaite politique considérable le 9 juin dernier à l’occasion des élections européennes. Son coup de
poker de la dissolution de l’Assemblée nationale fut gagnant. Grâce au ralliement massif d’une petite bourgeoisie urbaine, partis politiques et électeurs compris, toujours décidée à venir au
secours du capital oligarchique quand le besoin s’en fait sentir. Apportant massivement ses suffrages à ceux qu’elle prétendait la veille encore comme ses pires ennemis. Les 34 % qui avaient
soutenu le programme du RN au premier tour étaient grosjean comme devant, l’alliance électorale de « gauche » bricolée, du haut de ses 27 % se prétendait majoritaire (!). Emmanuel Macron
était tranquille, fort des 100 députés supplémentaires que le NFP venait de lui fournir, il bénéficiait du confort politique pour parader pendant « sa « parenthèse enchantée ». Deux élections
inutiles et sans aucune conséquence politique véritable, allaient permettre de déployer la parade, et de démontrer que tout était sous contrôle.
La sécurité qui suscitait tant d’inquiétudes fut assurée tranquillement. À partir de la mi-juillet Paris vidée d’une partie de ses habitants, SDF et migrants en
tête fut transformée en ville fantôme. 45 000 policiers mobilisés, soit un tous les 10 mètres, impossibilité de circuler sans QR code et sans affronter des barrières métalliques transformant
la ville en zoo. Au lendemain de la cérémonie de clôture, les forces de police se sont retirées, envoyant ainsi le message selon lequel elles sont exclusivement au service du pouvoir.
L’insécurité, c’est pour les pauvres dans leurs quartiers.
Fête et liesse obligatoires
Il y eut ensuite la cérémonie d’ouverture, de façon très prévisible à base de provocations, toujours les mêmes, d’idéologie obligatoire et de soumission à la
culture américaine. Suivie d’une pulsion médiatique parfaitement totalitaire. Tous les médias du système parlant JO matin, midi et soir, plus aucun autre sujet ayant droit de cité. Inutile de
donner ici des exemples, l’ensemble s’est complètement avili dans le chauvinisme et l’auto-glorification pour le formidable succès national et international que venait de remporter le couple
Macron/Hidalgo.
Alors que le fonctionnement normal des institutions était suspendu sine die par un Macron qui maintenait en fonction un gouvernement démissionnaire, les
épreuves sportives se déroulaient en l’absence du pays récoltant habituellement le plus de médailles, et avec la participation des athlètes d’un autre pourtant accusé de génocide par les
juridictions internationales.
L’auteur de ces lignes a toujours été passionné par le sport et avait toujours suivi l’actualité en particulier celle des JO. Il n’a jamais assisté à
l’expression d’un tel niveau de chauvinisme furieux destiné moins à exalter des victoires, qu’à démontrer la magnificence de la France de Macron. Concernant les épreuves, elles laissent comme
d’habitude l’impression d’une construction artificielle où la performance a beaucoup moins d’importance que le pouvoir de l’argent sur ce qui est d’abord et avant tout désormais, une foire
commerciale géante. Dans un très beau livre intitulé « Forcenés » Philippe Bordas a dressé l’acte de décès du cyclisme de compétition. En le paraphrasant on peut dresser celui de l’olympisme
: « l’olympisme n’a duré qu’un siècle. Ce qui s’appelle encore l’olympisme et se donne en spectacle n’est que farce, artefact à la mesure d’un monde faussé par la pollution, la
génétique et le bio-pouvoir. »
Les difficultés réelles, les échecs et les inconséquences ont été passées sous silence. Au point qu’on a trouvé des « témoins » ayant participé aux épreuves
pour prétendre que l’eau de la Seine était si pure que l’on pouvait la boire ! Les quelques polémiques qui ont pu passer la barrière du déferlement de propagande ont été vite réglées.
S’étonner de la victoire d’une boxeuse d’allure terriblement androgyne dans les catégories féminines vous valait immédiatement anathème : « obsession sexiste d’un néonazi ».
Pendant ce temps-là, dans le total silence des médias français, le massacre s’est poursuivi en Palestine. À peine si l’on a entendu dire que les parlementaires
israéliens revendiquaient officiellement le droit de torturer les prisonniers palestiniens en les sodomisant, ou que des ministres souhaitaient faire mourir 2 millions d’habitants de Gaza en
les affamant. Et gare à ceux qui s’étonnaient de la présence des athlètes israéliens pourtant tous soldats d’un pays menant une guerre coloniale. De vils antisémites que ceux-là.
Le pire, fut de voir pendant et après la « quinzaine particulière », tout le monde s’aligner, tout le monde se mettre au garde-à-vous, tout le monde le monde en
rajouter. Chez les politiques, il n’a manqué personne. On voyait Laurent Wauquiez, le normalien major de l’ENA venir chipoter à Marine Le Pen une réflexion vieille d’un an sur le problème
sécuritaire. On entendait Mélenchon pourtant habituellement imperméable à la geste sportive jouer les aficionados. Et tous les autres, alignés et amnésiques, de s’esbaudir sur cette « France
enfin retrouvée ». Comme celle, Blacks Blancs beurs de la victoire de 1998 du monde ? Le naufrage médiatique, à base de chauvinisme, d’incompétence et surtout de bêtise fut total. Jusqu’à la
presse de « gauche » qui se sentit obligée d’en faire des tonnes.
La France périphérique et les quartiers immigrés de banlieue étaient absents des gradins, où dominaient les couches moyennes. Pendant ce temps-là
toujours, les prolos anglais qui se révoltent contre le « petit-remplacement » dont ils sont l’objet et sont immédiatement soumis à une répression féroce, pire que celle des gilets jaunes en
France, de la part d’un système policier et judiciaire entièrement dévoué à l’oligarchie britannique. Et bien sûr sous les acclamations des petits-bourgeois français ne voyant aucun
inconvénient à une alliance avec la grande bourgeoisie anglo-saxonne.
Le fascisme ici et maintenant
Alors, comme le couple improbable du film « Une journée particulière », qui ne participe pas à la liesse organisée par Mussolini, les parisiens qui ont fui pour
échapper à cette « fête obligatoire », ou les provinciaux qui ont préféré s’en désintéresser, ont eu eux aussi un certain sentiment de solitude. Accentué par une propagande martelant sans fin
qu’ils n’étaient que « des grincheux et des pisse-froids » jusqu’à Tony Estanguet martelant : « On se voyait comme un peuple d’irréductibles râleurs, on s’est réveillé dans un pays
de supporters déchaînés qui ne veut plus arrêter de chanter. On voulait de la ferveur, on a eu de la passion, on voulait rêver, on a eu Léon Marchand ».
Dans le film de Scola, c’est la radio retransmettant l’événement installée par la concierge de l’immeuble qui renvoie à l’événement fasciste. Chez nous ce sont
les médias dans leur ensemble qui ont joué ce rôle, nous renvoyant inlassablement à l’événement-Macron. Et par quelque bout qu’on le prenne, il se réduira toujours à ça.
Macron nous annonça d’ailleurs finalement lui-même : « la vraie vie c’est ce que nous avons vécu ces dernières semaines »
Le fascisme, celui dont les castors nous rebattent les oreilles à chaque fois qu’il faut venir au secours de Macron et pérenniser le néolibéralisme
oligarchique, ce ne sont pas des prolos xénophobes, des paysans excédés, des nostalgiques de la Vendée militaire, des imbéciles qui se déguisent, non.
Le fascisme, celui d’aujourd’hui, celui de l’Occident néolibéral, c’est son « rêve d’une société purifiée, hygiénique, célébrant sa dépolitisation dans
les liesses obligatoires de liturgies inclusives, rétives à toute différence qui n’ait préalablement obtenu un certificat de conformité de la part de ses autorités morales et
vétérinaires. »
Nous l’avons ici et maintenant, il est sous nos yeux.
Jeux Olympiques, la parenthèse enchantée en mode «Zone d’intérêt»
La presse système oligarchique est ravie. Télés, radios, journaux, réseaux en font des tonnes pour assurer à Macron le confort de sa «parenthèse
enchantée». Comme d’habitude, il est partout. Tripotant l’un, bécotant l’autre, imperméable au très pénible malaise qu’il provoque à chaque fois, il passe sans arrêt d’un site des JO
à l’autre pour se mettre en scène. Et gare à celui qui se retient de participer à cette communion surjouée. Se réjouir des succès de Marchand ou de Riner n’est pas suffisant, il faut
basculer dans l’adulation de cette France et de son chef, sinon vous êtes un mauvais français.
Et pendant ce temps, depuis maintenant 10 mois, dans un petit pays se poursuit le massacre d’un peuple. Que la justice internationale condamne tous les
jours, quand elle ne le qualifie pas de génocide. On y tue les enfants, cible les journalistes et les médecins, bombarde les écoles et les hôpitaux, affame la population, et la prive
d’eau courante. Avec le soutien des ministres et des députés de ce pays, on revendique de torturer et violer les prisonniers ! Tout en continuant une entreprise d’épuration ethnique
de longue date, pour voler la terre des habitants, en les humiliant quand on ne les tue pas.
Cela se passe en même temps que les JO. Sous les yeux du monde entier dont la partie occidentale apporte son aide au massacre ou regarde
ailleurs. Et qui finalement, passée en mode «Zone
d’intérêt», s’occupe d’autre chose.
PS : «La
Zone d’intérêt» est un film allemand récipiendaire de récompenses internationales, qui raconte l’histoire de la vie paisible de la famille de Rudolf Hoess le directeur du
camp d’Auschwitz, dans une maison jouxtant les installations du camp d’extermination en fonctionnement.
Jonathan Cook est un journaliste
britannique primé. Il a vécu à Nazareth, en Israël, pendant 20 ans. Il est revenu au Royaume-Uni en 2021. Il est l’auteur de trois livres sur le conflit israélo-palestinien.
Il a publié cet article le 26 juillet dans la revue Middle East Eye.
Tout empire s’effondre. Son effondrement devient inévitable dès que ses dirigeants perdent toute idée de l’absurdité et de l’horreur qu’ils
infligent.
Il n’y a qu’un seul pays au monde, en ce moment même, au milieu du massacre israélien à Gaza, où le Premier ministre Benjamin Netanyahu est assuré de recevoir
des dizaines d’ovations debout de la part de la grande majorité de ses représentants élus.
Ce pays n’est pas Israël, où il est depuis de nombreuses années une figure extrêmement controversée. Il s’agit des États-Unis.
Mercredi, Netanyahou a été tapé dans le dos, salué, applaudi et acclamé alors qu’il avançait lentement – salué à chaque pas comme un héros conquérant – vers le
podium du Congrès américain.
C’est ce même Netanyahou qui a supervisé au cours des dix derniers mois le massacre de quelque 40 000
Palestiniens, dont la moitié sont des femmes et
des enfants. Plus de 21 000 autres enfants sont portés
disparus, la plupart probablement morts sous les décombres.
C’est le même Netanyahou qui a rasé une bande de territoire – abritant à l’origine 2,3 millions de Palestiniens – dont la reconstruction devrait
prendre 80 ans , pour un coût d’au moins
50 milliards de dollars.
C’est le même Netanyahou qui a détruit tous les hôpitaux et
toutes les universités de Gaza et qui a bombardé presque toutes les écoles qui servaient d’abris aux familles rendues sans abri par d’autres bombes israéliennes.
C’est le même Netanyahou dont l’arrestation est demandée par le procureur général de la Cour pénale internationale pour
crimes contre l’humanité, accusé d’avoir utilisé la famine comme arme de guerre en imposant un blocus de l’aide qui a provoqué une famine à Gaza.
C’est le même Netanyahou dont le gouvernement a été reconnu coupable la
semaine dernière par la Cour internationale de justice (CIJ) d’avoir intensifié le régime d’apartheid d’Israël sur le peuple palestinien dans un acte d’agression à long terme.
C’est le même Netanyahou dont le gouvernement est jugé pour avoir commis ce que la CIJ, la plus haute instance judiciaire du monde, a qualifié de « génocide
plausible ».
Et pourtant, il n’y avait qu’une seule manifestante visible dans la salle du Congrès. Rashida Tlaib, la seule législatrice américaine d’origine palestinienne,
était assise en silence, tenant un petit panneau noir. D’un côté, il était écrit : « Criminel de guerre » et de l’autre : « Coupable de génocide ».
Une personne parmi des centaines essayant silencieusement de faire remarquer que l’empereur était nu.
Protégé de l’horreur
En effet, l’image était frappante.
Cela ressemblait moins à la visite d’un dirigeant étranger qu’à un général décoré accueilli au Sénat dans la Rome antique, ou à un vice-roi britannique aux
cheveux gris venu d’ Inde accueilli au parlement de la
mère patrie, après avoir brutalement soumis les « barbares » aux confins de l’empire.
C’était une scène familière des livres d’histoire : la brutalité impériale et la sauvagerie coloniale, transformées par le siège de l’imperium en bravoure,
honneur, civilisation. Et cela nous paraît tout aussi absurde et odieux que lorsque nous nous remémorons ce qui s’est passé il y a 200 ou 2 000 ans.
Cela nous rappelle que, malgré nos prétentions égoïstes de progrès et d’humanitarisme, notre monde n’est pas très différent de ce qu’il est depuis des milliers
d’années.
C’était un rappel que les élites au pouvoir aiment célébrer la démonstration de leur pouvoir, à l’abri à la fois des horreurs auxquelles sont confrontés ceux
qui sont écrasés par leur puissance et des clameurs de protestation de ceux qui sont horrifiés par l’infliction de tant de souffrances.
Cela nous rappelle qu’il ne s’agit pas d’une « guerre » entre Israël et le Hamas – et encore moins, comme Netanyahou voudrait nous le faire croire, d’une
bataille pour la civilisation entre le monde judéo-chrétien et le monde islamique.
Il s’agit d’une guerre impériale américaine – qui s’inscrit dans le cadre de sa campagne militaire pour une « domination mondiale à large spectre » – menée par
l’État client le plus favorisé de Washington.
Le génocide est un génocide entièrement américain, armé par Washington, payé par Washington, couvert diplomatiquement par Washington et – comme le soulignent
les scènes au Congrès – acclamé par Washington.
Ou comme l’a déclaré Netanyahou dans un
moment de franchise involontaire au Congrès : « Nos ennemis sont vos ennemis, notre combat est votre combat et notre victoire sera votre victoire. »
Israël est le plus grand avant-poste militaire de Washington dans la région riche en pétrole du Moyen-Orient. L’armée israélienne est le principal bataillon du
Pentagone dans cette région stratégiquement importante. Et Netanyahou est le commandant en chef de cet avant-poste.
Ce qui est vital pour les élites de Washington, c’est que l’avant-poste soit soutenu à tout prix ; qu’il ne tombe pas aux mains des « barbares ».
Déversement de mensonges
Il y a eu un autre petit moment de vérité involontaire au milieu du flot de mensonges de Netanyahou. Le Premier ministre israélien a déclaré que ce qui se
passait à Gaza était « un affrontement entre la barbarie et la civilisation ». Il n’avait pas tort.
D’un côté, il y a la barbarie du génocide israélo-américain actuel contre le peuple de Gaza, une escalade dramatique du siège israélien de l’enclave qui a duré
17 ans et des décennies de régime belliqueux sous un système israélien d’apartheid avant cela.
Et de l’autre côté, il y a une poignée de personnes en difficulté qui tentent désespérément de sauvegarder les valeurs de « civilisation » professées par
l’Occident, le droit international humanitaire, la protection des faibles et des vulnérables, les droits des enfants.
Le Congrès américain a montré de manière décisive où il se situait : avec la barbarie.
Netanyahou est devenu le dirigeant étranger le plus célébré de l’histoire des États-Unis, invité à s’exprimer devant le Congrès à quatre reprises , surpassant
même le dirigeant britannique en temps de guerre, Winston Churchill.
Il est une créature de Washington. Sa sauvagerie, sa monstruosité sont entièrement américaines. Comme il l’a imploré auprès de ses
supérieurs américains : « Donnez-nous les outils plus vite et nous finirons le travail plus vite. »
Finissons le travail du génocide.
Dissidence performative
Certains démocrates ont préféré rester à l’écart, notamment Nancy Pelosi , l’une des
personnalités influentes du parti . Elle a préféré rencontrer les familles des otages israéliens détenus à Gaza – et non pas, bien entendu, les familles palestiniennes dont les proches à Gaza
ont été massacrés par Israël.
La vice-présidente Kamala Harris a expliqué son absence par un conflit d’horaire. Elle a rencontré le Premier ministre israélien, tout comme le président Joe
Biden, jeudi .
Elle a ensuite affirmé avoir fait pression sur
Netanyahou au sujet de la situation humanitaire « désastreuse » à Gaza, mais a également souligné qu’Israël « avait le droit de se défendre » – un droit qu’Israël n’a précisément pas, comme
l’ a souligné la CIJ la semaine
dernière, car Israël est celui qui viole en permanence les droits des Palestiniens par son occupation prolongée, son régime d’apartheid et son nettoyage ethnique.
Mais la dissidence de Pelosi – et de Harris, si c’est bien de cela qu’il s’agit – n’était que pure performance. Certes, ils n’éprouvent aucun amour personnel
pour Netanyahou, qui s’est si étroitement allié, lui et son gouvernement, à la droite républicaine américaine et à l’ancien président Donald Trump.
Mais Netanyahou ne sert que d’alibi. Nancy Pelosi et Harris sont toutes deux de ferventes partisanes d’Israël – un État qui, selon le jugement rendu la semaine
dernière par la CIJ, a instauré il y a plusieurs décennies un régime d’apartheid dans les territoires palestiniens, en utilisant une occupation illégale comme
couverture pour procéder à un nettoyage ethnique de la population.
Leur programme politique n’a pas pour objectif de mettre un terme à l’anéantissement du peuple de Gaza. Il s’agit plutôt d’une soupape de sécurité pour le
mécontentement populaire des électeurs démocrates traditionnels choqués par les scènes de Gaza.
Il s’agit de les tromper en leur faisant croire qu’il y a derrière des portes closes une sorte de lutte politique autour de la gestion par Israël de la question
palestinienne. Ce vote démocrate mènera un jour – un jour très lointain – à une « paix » indéfinie, à une fameuse « solution à deux États » où les enfants palestiniens ne continueront pas à
mourir au nom de la sécurité des milices de colons illégaux d’Israël.
La politique américaine envers Israël n’a pas changé de manière significative depuis des décennies, que le président soit rouge ou bleu, que Trump soit à la
Maison Blanche ou Barack Obama.
Et si Harris devient président – ce qui est un grand « si », il faut l’admettre – les armes et l’argent américains continueront d’affluer vers Israël, tandis
qu’Israël décidera si l’aide américaine à Gaza sera un jour autorisée.
Pourquoi ? Parce qu’Israël est la clé de voûte du projet impérial américain de domination mondiale à grande échelle. Parce que pour que Washington change de cap
sur Israël, il lui faudrait aussi accomplir d’autres actes impensables.
Il lui faudrait commencer à démanteler ses 800 bases militaires à travers la
planète, tout comme la CIJ a demandé à Israël la semaine dernière de démanteler ses dizaines de colonies illégales sur le
territoire palestinien.
Les États-Unis devraient convenir d’une architecture de sécurité mondiale partagée avec la Chine et la Russie, plutôt que de chercher à intimider et à soumettre
ces grandes puissances par des guerres par procuration sanglantes, comme celle en Ukraine.
L’automne à venir
N’oubliez pas que Nancy Pelosi a accusé les étudiants qui protestaient contre le génocide israélien à Gaza, en les accusant d’être
liés à la Russie. Elle a exhorté le FBI à enquêter sur eux pour avoir fait pression sur l’administration Biden afin qu’elle soutienne un cessez-le-feu.
Dans son discours au Congrès, Netanyahou a également diabolisé les manifestants – dans son cas, en les accusant d’être des « idiots utiles » du principal ennemi
d’Israël, l’Iran.
Aucun des deux ne peut se permettre de reconnaître que des millions de citoyens ordinaires à travers les États-Unis pensent qu’il est mal de bombarder et
d’affamer des enfants – et d’utiliser une guerre avec un objectif irréalisable comme couverture.
Le Hamas ne peut pas être « éliminé » par
la vague de violence effroyable que commet actuellement Israël, pour une raison très évidente : le groupe est le produit, le symptôme de précédentes vagues de violence effroyable
d’Israël.
Comme l’ont reconnu les experts occidentaux de la lutte contre le terrorisme, la politique génocidaire d’Israël à Gaza renforce le Hamas, au lieu de
l’affaiblir. Les jeunes hommes et les garçons qui ont perdu leur famille sous les bombes israéliennes sont les nouvelles recrues les plus
ferventes du Hamas .
C’est pourquoi Netanyahou a insisté sur le fait que l’offensive militaire israélienne – le génocide – à Gaza ne pouvait pas prendre fin de sitôt. Il a exigé des
armes et de l’argent pour maintenir ses soldats dans l’enclave indéfiniment, dans une opération qu’il a qualifiée de « démilitarisation et déradicalisation ».
Décrypté, cela signifie un spectacle d’horreur continu pour les Palestiniens là-bas, car ils sont obligés de continuer à vivre et à mourir avec le blocus de
l’aide israélienne, la famine, les bombes et des « zones de mort » non
signalées.
Cela signifie également un risque indéfini de voir la guerre d’Israël contre Gaza se transformer en une guerre régionale, et potentiellement mondiale, alors que
les déclencheurs d’une escalade continuent de se multiplier.
Le Congrès américain est cependant trop aveuglé par la défense de son petit État fortifié au Moyen-Orient pour réfléchir à de telles complexités. Ses membres
hurlaient « USA ! » à leur satrape d’Israël, tout comme les sénateurs romains hurlaient autrefois « Gloire ! » à des généraux dont ils pensaient que les victoires se prolongeraient à
jamais.
Les dirigeants de l’Empire romain n’ont pas plus anticipé la chute à venir que leurs homologues modernes à Washington. Mais tout empire tombe.
Et son effondrement devient inévitable une fois que ses dirigeants perdent toute idée de l’absurdité et de l’horreur qu’ils infligent.
Je n’ai pas regardé la « cérémonie » d’ouverture de la foire olympique. Faut quand même pas déconner.
Assister à un spectacle dispendieux scénarisé par Patrick Boucheron et Thomas Jolly, pour permettre au psychopathe de l’Élysée de se mettre en scène, désolé il
y a des limites au masochisme. On savait parfaitement qu’on allait y retrouver cette culture extraordinairement «basse, vulgaire, clinquante comme des verroteries
d’explorateurs» qu’un Occident globalisé ayant arraché ses racines, essaye d’imposer au monde.
Manifestement, ça n’a pas raté. Boucheron et Jolly nous ont offert de façon très prévisible ce qu’il fallait de modernité jobarde et conformiste assortie
de quelques provocations woke en direction du public américain pour lui dire : « comme le dit JD Vance, nous sommes des « clients serviles », mais regardez, nous sommes capables
d’être aussi cons que vous. » Jusqu’au passage de la péniche des États-Unis saluée d’incroyables spasmes d’adoration soumise, par les commentateurs télévisés.
Mais on a quand même eu une jolie bouffée de joie mauvaise. Avec le « blasphème » de la reproduction woke de la cène chrétienne. C’était passablement dégoûtant,
mais c’est tellement bien fait pour les cathos. Qui opposent à toutes ces dérives un pieux silence complaisant et lâche. Et qui encore une fois vont ravaler leur humiliation sans rien
dire.
Je ne vais pas non plus m’intéresser à la partie sportive et pourtant j’ai toujours adoré le sport en général et l’olympisme en particulier. Mais en
paraphrasant Philippe Bordas je dirais que « l’olympisme n’a duré qu’un siècle. Ce qui s’appelle encore l’olympisme et se donne en spectacle n’est que farce, artefact à la mesure
d’un monde faussé par l’argent, la génétique et le bio-pouvoir. »
La dernière fois que j’ai regardé une cérémonie d’ouverture c’était celle des jeux de Pékin en 2008. Le message envoyé au monde était limpide. C’était celui de
Fernand Braudel dans son « Histoire des civilisations » :
« Imaginez une civilisation continue à l’autre bout du monde, inchangée depuis des millénaires, gouvernée par des dynasties impériales plus grandes que
celles de Rome, ignorant la philosophie grecque, l’alphabet, la démocratie, le christianisme, l’individualisme, la féodalité, la Renaissance ou les Lumières, dont le peuple surpasse le nôtre
en intelligence et dont les institutions surpassent les nôtres en efficacité. Imaginez-le prospérer aujourd’hui, nous dépassant dans tous les domaines d’activité ».
Et pendant ce temps, entre deux bredouillis de Biden, notre empereur à nous qu’on a, nous réélisons Macron et contemplons ravis le spectacle de notre sortie
accélérée de l’Histoire.
Dans un défilé de bateaux-mouches, nous n’avons rien d’autre à raconter au Monde que notre soumission.