Manifestement lassé par les charmes de la belle Brigitte, Emmanuel Macron entreprenait aujourd’hui un voyage particulièrement exotique, au coeur du royaume batave. Il a rencontré le Premier
Ministre de cette si étrange contrée, Mark Rutte, considéré comme le leader des pingres, pour y recevoir la correction que la France mérite en tant que leader des poches percées. Dans la
pratique, Macron tente de négocier un accord hollandais au projet élyséo-bruxellois de fonds de subvention européen à l’industrie : un sujet urticant pour ceux qui vivent au-delà de l’Escaut ! Et
une bonne façon de tendre la joue pour recevoir quelques leçons de bonne tenue en matière de finances publiques. Décidément, Macron aime son mal.
Mark Rutte ne devrait pas ménager Emmanuel Macron
Assez curieusement, Mark Rutte n’a pas invité Emmanuel Macron à déjeuner à la Catshuis (la maison du Chat, tout un programme !), sa résidence officielle dans la
banlieue de la triste La Haye. Il lui a préféré un restaurant indonésien de la capitale (la Hollande ne disposant pas d’une cuisine nationale digne de l’espèce humaine, elle se rabat sur celle de
ses anciennes colonies) pour mieux morigéner le chef de l’Etat français.
Subventionner l’industrie, le fol projet macroniste
L’objet principal du rendez-vous est assez connu : il s’agit de négocier un consentement batave au projet, défendu par l’Elysée et par Charles Michel, le Président
du Conseil européen, de créer un fonds européen qui subventionnerait notre industrie verte. Dans l’esprit des Français, il s’agit d’utiliser le prétexte de l’Inflation Reduction Act, qui autorise
les USA à subventionner leur propre industrie, pour s’affranchir des règles européennes interdisant les aides aux entreprises.
Bien entendu, le motif de ne pas se laisser distancer par les Etats-Unis est particulièrement bien trouvé pour justifier un peu plus le champ d’extension de
l’intervention étatique. Ah ! et si l’on revenait au Plan, à la programmation quinquennale, et même au protectionnisme pur et simple, pour éviter aux entreprises françaises de boire le
bouillon…
Encore un peu plus d’argent pour les copains
Le problème est évidemment le soupçon qui pèse sur la France, et singulièrement sur Macron, chantre de la « start up nation » dès qu’il s’agit de
subvention publique aux entreprises. Notre crédibilité sur ce sujet est en effet proche de zéro, et celle de notre Président sous le niveau zéro. N’oublions pas que c’est Macron personnellement
qui a bradé des fleurons de l’industrie française comme Alstom à des concurrents américaines, dans des conditions qui restent à préciser. C’est aussi Macron qui a fait exploser la dette publique
à l’occasion de la crise du COVID, sans être capable de la faire baisser depuis.
Comment imaginer dès lors que la France patiemment désindustrialisée et ruinée par Macron pourrait utiliser les fonds publics européens pour autre chose qu’une
nouvelle opération de copinage destinée à servir les soutiens politiques du Président, comme cela s’est passé avec Mc Kinsey et comme cela se passe avec la presse, largement subventionnée pour
servir docilement la soupe présidentielle ? Si des pisse-copies aux ordres sont capables de s’indigner d’une telle question, nos voisins « pingres » en Europe ont déjà trouvé la
réponse.
Rutte le radin demande des économies à la France
On sait déjà que Rutte le radin, leader des pays pingres où l’on retrouve les Danois, les Suédois et les Autrichiens (de quoi créer un club sauna pour discuter le
bout de gras), a suggéré à Macron de commencer par mieux gérer ses affaires avant de tendre le chapeau pour recueillir l’élémosine, par exemple en réduisant la dépense en matière de retraites
obligatoires. Et toc ! dans les dents…
Dans la pratique, les Pays-Bas ont peu de chance de manifester la moindre miséricorde vis-à-vis de la complainte française, comme le graphique qui suit suffit à le
montrer :
L’évolution de la dette publique batave
Comme on le voit, les Hollandais sont des gens vertueux, qui n’aiment pas vivre au-dessus de leurs moyens. Aux pires moments de l’histoire contemporaine, leur dette
n’a pas atteint les 80% du PIB. Dans les années 2010, quand François Hollande et son secrétaire général de l’Elysée Emmanuel Macron dilapidaient les fonds publics, les Pays-Bas menaient un
colossal effort de rigueur pour réduire la dette de 20 points de PIB. Malgré la crise du COVID, elle est inférieure à 50% du PIB quand la dette française se situe à 115%, dans un mouvement
inéluctable d’expansion constante.
Face à une gestion aussi désastreuse, la France peut difficilement faire croire qu’elle utilisera intelligemment les subventions européennes à l’industrie…
La Hollande, l’autre pays du libre-échange
Autre particularité hollandaise qui rend l’exercice macroniste du jour particulièrement sado-masochiste : l’économie batave s’est, historiquement, construite grâce
aux échanges maritimes internationaux (le port de Rotterdam est le premier port du monde) et a donc un besoin vital de libre-échange pour maintenir son activité. Sans le moindre doute, l’intérêt
de Rutte est plutôt d’importer des marchandises américaines en Europe pour faire tourner le port de Rotterdam, plutôt que de privilégier l’industrialisation de l’Europe qui n’apportera rien au
trafic des ports hollandais.
Les inévitables contreparties au soutien hollandais
Autrement dit, Macron devrait monnayer très cher, auprès des Hollandes, le coût de sa mauvaise gestion des finances publiques françaises, et surtout le coût du
capitalisme de connivence dont il a accéléré la mise en place. Rutte est un habitué : il fait toujours payer au prix fort chacune des concessions qu’il a faites. N’oublions pas que Air France et
KLM obligent les deux Etats à régulièrement négocier la stratégie aérienne commune. Dans cet exercice, les Hollandais ont traditionnellement quelques longueurs d’avance sur les hauts
fonctionnaires français.
Selon toute vraisemblance, la visite de Macron auprès de Rutte devrait lancer un nouveau round d’affaiblissement républicain… puisque Macron espère obtenir une
visite d’Etat, en mars, auprès du couple royal fantoche de Hollande.
Qatargate, le point complet sur ce que vous devez savoir
Source : Le Courreri des Stratèges - Le 16/12/2022.
Vous commencez les valises ce soir avant de rejoindre l'oncle Gontrand qui aime l'Europe et vote Macron, pour une semaine au chalet de Megève ? Vous devez regarder
le match de dimanche avec votre belle-mère qui adore Nathalie Loiseau et vous propose toujours une petite dose de Pfizer entre la bûche et la tisane ? Pour bien
préparer votre argumentaire sur le Qatargate et les méfaits toxiques de l'Union Européenne (vous savez, au moment perfide où vos invités vous glissent les petites
piques pour vous rappeler que le complotisme est une erreur), le Courrier vous propose un dernier briefing 2022 qui vous permettra d'être incollable sur le sujet.
On le redit, d’abord, l’affaire est pour l’instant essentiellement tournée autour de la désormais ex-vice-présidente socialiste
du Parlement européen Eva Kaili, de nationalité grecque, ancienne présentatrice du journal télévisé dans son pays. Vendredi dernier, l’intéressée a fait
l’objet d’une perquisition et d’une interpellation, avec mise en détention provisoire, par la justice belge.
Une affaire belge, et non européenne
C’est la première anomalie du dossier : cette affaire de corruption au plus haut niveau par le Qatar n’est pas lancée par le
Parquet européen, mais par le Parquet bruxellois. Nous l’avons souligné cette semaine, cette situation est non seulement anormale, mais soulève la question de la subordination de l’Union à la
justice du pays qui en abrite les institutions. Imagine-t-on la justice américaine inquiéter des ambassadeurs à l’ONU ?
Toujours est-il que la justice belge, considérant que la procédure contre Eva Kaili était en flagrant délit, a ordonné sa mise
sous écrou, comme quatre autres prévenus dans ce dossier. Eva Kaili est traitée à la belge : elle ne sera présentée au juge que le 22 décembre pour évoquer son
maintien en détention provisoire, en raison d’un mouvement de grève dans la prison, qui a retardé sa comparution devant la Chambre du Conseil ce jeudi…
On peine à le croire… une grève dans une prison belge prive la vice-présidente du parlement européen d’une audience devant le
juge des libertés. Pour ceux qui s’inquiètent du sort de cette prisonnière au visage d’ange, elle aurait été transférée de la lugubre prison de Saint-Gilles, à
Bruxelles, vers la “prison-village” de Haren. C’est moins insupportable, pour la jeune maman d’une petite fille de 22 mois, qui charge désormais son compagnon
en clamant son innocence.
Tout vient d’une “BIM” de l’espionnage belge
Si, si, ça existe ! il y a des services d’espionnage en Belgique, appelés “la Sûreté de l’Etat”, et ce sont eux qui ont
mené une opération spéciale appelée BIM. La presse belge en dit plus ce matin :
On parle d’écoutes téléphoniques, d’opérations d’infiltration. Selon les informations du Soir et du Knack, la Sûreté de
l’État a coopéré dans cette enquête avec cinq autres services de renseignements européens. Lesquels ? Les noms n’ont pas été cités. « Une étape
cruciale de l’enquête de renseignement a été une visite clandestine au domicile bruxellois de l’ancien député européen italien Pier Antonio Panzeri »,
écrit le Soir.
Lors de cette « visite », les agents de la Sûreté de l’État avaient observé « environ 700.000 euros en
liquide ». Ce qui permettait de penser qu’il y avait « suffisamment de preuves d’infractions pénales présumées » à l’encontre de Panzeri.
Après cette découverte, la Sûreté de l’État qui se refuse naturellement à tout commentaire s’est déchargée d’une partie du dossier qui a été déclassifiée
et transférée au parquet fédéral.
Cette remise de témoin a été réalisée le 12 juillet de cette année. C’est à partir de ce moment que l’enquête judiciaire a
pu débuter, avec les résultats que l’on connaît.
Pour ceux qui avaient un doute, certains députés ou anciens députés font donc l’objet d’enquêtes clandestines et sans contrôle
de la justice. Leur domicile est discrètement violé pour vérifier ce qu’il héberge… La classe, la vie démocratique européenne !
En tout cas, cela fait plusieurs mois que les services de police sont au courant de ces versements qui relèvent de la
corruption. Le lancement de l’affaire dix jours avant la finale de la Coupe du Monde est donc tout sauf anodin.
Quels sont les faits au fondement de l’enquête ?
Bref, tout part, on vient de le voir, d’une enquête menée par cinq services d’espionnage dès le printemps 2022 (nous mettons
notre main à couper que, dans la liste des 5, on trouve aussi la CIA et le Mossad, très agacés par l’alliance du Qatar avec l’Iran et la Syrie). Ces services
établissent la preuve matérielle que le Qatar verse de l’argent liquide à des députés européens, et à leur entourage, en échange de décisions ou de mesures
favorables.
Eva Kaili n’a « aucun rapport avec l’argent retrouvé à son domicile (…), elle ne connaissait pas l’existence de cet
argent », a-t-il assuré. Des sacs remplis de billets d’une valeur de 150.000 euros ont été découverts dans son appartement à Bruxelles, selon une
source judiciaire belge.
Le juriste, qui a dit s’être entretenu à plusieurs reprises au téléphone avec sa cliente en détention, a souligné que
« seul son compagnon », avec qui elle vivait, pouvait fournir « des réponses sur l’existence de cet argent ».
Le père de la responsable politique a pour sa part été surpris avec une valise contenant 750.000 € en liquide. Enfin,
600.000 € ont été saisis au domicile de Pier-Antonio Panzeri, un ancien eurodéputé socialiste italien désormais à la tête d’une ONG à
Bruxelles.
Pier-Antonio Panzeri est un ancien député qui a créé une ONG appelée Fight Impunity. Cette ONG est soupçonnée d’avoir servi de relais aux intérêts qataris auprès de l’Union Européenne.
Dans la pratique, cette enquête qui cible le Qatar pour des raisons géopolitiques que nous avons effleurées (le Qatar penche du
mauvais côté de la balance au Moyen-Orient, et les USA entendent bien ramener leurs alliés dans le droit chemin par des sanctions exemplaires contre tous ceux
qui l’ont quitté) est une bombe à retardement, puisque Kaili et Panzeri ne sont probablement les seuls, en Europe, à profiter des bienfaits du Qatar, de son
argent, de ses cadeaux somptueux.
Qui sont les personnalités incriminées à ce stade ?
Pour l’instant, cinq personnes sont dans les filets de la justice belge, et deux autres sont inquiétées :
Eva Kaili, en détention provisoire, ancienne vice-présidente du parlement européen
Francesco Giorgi, le compagnon d’Eva Kaili, et père de leur fille de 22 mois. On sait très peu de choses sur cet homme à
cause de qui (nous allons y venir) l’enquête est désormais élargie au Maroc. Il est toujours en détention provisoire.
Marc Tarabella, eurodéputé socialiste belge. L’intéressé n’est pas en détention, mais il est suspecté d’avoir bénéficié de
pots-de-vin. Il est suspendu provisoirement par le groupe socialiste au parlement.
Nicolo Figa-Talamanca, lobbyiste dont on sait peu de choses à de stade. Il est directeur général de l’ONG No Peace Without
Justice, dédiée aux droits de l’Homme au Moyen-Orient. Il est libéré, mais sous bracelet électronique.
Pier-Antonio Panzeri, ancience eurodéputé, et fondateur de l’ONG Fight Impunity. C’est chez lui que les services secrets ont
vu d’importantes sommes d’argent en liquide, ce qui a lancé l’enquête
Luca Visentini, ancien secrétaire général de la Confédération Européenne des Syndicats (dont Laurent Berger, le patron de la
CFDT, est actuellement président…), et actuel secrétaire général de la Confédération Internationale des Syndicats, qui clame son innocence
Maria Arena, eurodéputée socialiste belge, proche de Tarabella, a vu son bureau perquisitionné par la police belge, pour
d’éventuels liens avec Panzeri
On notera que, parallèlement, Maria Spyraki, euro-députée grecque du parti Nouvelle Démocratie (centre droit), est visée par une
enquête de l’OLAF. A ce titre, le Parquet européen demande la levée de son immunité parlementaire. Cette demande n’est pas, à ce stade, expressément liée à
l’affaire qatarie, mais elle vise aussi Eva Kaili…
Qui sont les prochains sur la liste ?
Pour l’instant, le volet “public” de l’enquête n’en est qu’à ses débuts, et celle-ci promet un beau feuilletonnage à venir.
Francesco Giorgi, le concubin d’Eva Kaili et père de son enfant, semble avoir décidé de passer à table. Son jeune papa a déclaré vouloir revoir sa fille
rapidement… terrible levier d’aveux !
Or, il se trouve que le play-boy milanais, dont on sait très peu de choses, mais qualifié de “plus beau du Parlement européen”,
est considéré comme l’homme de main de Panzeri, l’ancien eurodéputé devenu fondateur d’ONG (dont la mère et la fille, qui vivent en Italie, sont aussi en
détention). C’est Giorgi qui saurait tout ou presque des dessous de cette affaire.
Grâce aux aveux de Giorgi, l’enquête devrait rapidement suivre plusieurs axes.
Sur cet axe, la complaisance de la sous-commission des Droits de l’Homme du Parlement européen vis-à-vis du Qatar devrait
éveiller l’attention. Elle implique au premier chef Maria Arena, eurodéputée belge, présidente de cette sous-commission et proche de Panzeri. L’assistante
parlementaire de Maria Arena est aussi… ancienne salariée de l’ONG bien-nommée de Panzeri Fight on Impunity. Cette circonstance a valu le placement du bureau
de l’eurodéputée sous scellé.
Il y a ensuite l’axe marocain. Panzeri, avec un sens consommé des affaires, semble aussi avoir fait affaire avec les Marocains,
désireux, semble-t-il, de protéger leurs positions au Sahara Occidental face aux ardeurs du parlement européen. Là encore, l’enquête devrait apporter quelques
surprises.
Il y a enfin les simples effets de contamination. Au sein du groupe socialiste au Parlement européen, l’influence du Qatar
risque d’éclabousser quelques personnalités qui aiment jouer les chevaliers blancs.
Pour la gauche, cette affaire est une vraie bombe à retardement ! Le nom de Bernard Cazeneuve apparaît dans l’ONG Fight on
Impunity. Les syndicats ne devraient pas être en reste, avec l’implication possible de Luca Visentini dans le dossier.
Bref, les choux gras ne font que commencer. Pour l’Union Européenne, le ver est dans le fruit, car l’opinion publique devrait se
délecter du spectacle donné par ces socialistes bien-pensants achetés pour nier les morts en cascade d’ouvriers immigrés sur les chantiers
qataris.
Personne ne pose la question du bilan carbone des déplacements présidentiels à travers la planète. Notre président qui passe son temps dans les avions,
sautant sur le premier prétexte - hier c'était pour la demi-finale de la Coupe du monde de football - est en réalité la caricature d'un groupe dirigeant occidental qui préfère l'entre-soi et le
dérivatif des "défis planétaires" à la résolution des problèmes chez soi. Pendant qu'Emmanuel Macron est à Bali, Doha ou Bruxelles, il n'a pas à s'occuper des soucis des Français.
En commençant notre briefing du matin, ne boudons pas notre plaisir: ce fut une belle demi-finale! Les Bleus ont mérité de
défendre leur titre dimanche prochain face à l’Argentine. Le match a été de qualité; l’adversaire marocain valeureux; il s’est même créé des occasions réelles
de marquer un but, en fin de première mi-temps. Lloris, le gardien français, a été impeccable – et opportunément aidé, à quelques minutes de la fin, par
Konate, placé sur le chemin d’un ballon qui allait tout droit vers le but français. Pour gagner en finale, il faudra hausser le jeu d’un niveau. Parions que
cette équipe de France qui gagne en est capable.
Macron: ça plane pour moi!
Il y avait juste un point noir dans ce match. La présence dans les tribunes du Président de la République. D’abord, on redoute que cet homme, qui gâche systématiquement les sujets
auxquels il touche, porte la poisse à l’équipe de France. Monsieur le Président, pour une fois que la France gagne, ne pouvez-vous pas vous tenir en
dehors?
Surtout, on soulignera le caractère intempestif du déplacement présidentiel. Au passage, on n’entend pas beaucoup les obsédés du
dérèglement climatique poser la question d’un déplacement en avion, pour quelques heures, alors que le Président aurait pu marquer son soutien, tout autant, en
regardant le matche à l’Elysée. Il faudrait en fait tenir un compte des déplacements à travers la planète du président français – non seulement pour qu’il
rende compte aux électeurs français de l’efficacité de ces déplacements permanents; mais aussi que nous ayons un “bilan carbone” concernant un président qui
n’arrête pas de faire la leçon aux Français sur leur comportement écologique. Au moment où le gouvernement ne cesse de demander aux Français de consommer
moins, le président français n’a jamais autant voyagé….
Nous soulignions dans notre briefing d’hier, la divergence croissante entre les intérêts français et la politique militaire et diplomatique allemande. Et
nous disions que les gouvernants français – et notre classe politique française en général ne semblent pas prendre la mesure de la gravité de la situation. Eh
bien, nous en avons une illustration: « Le fait de se remplacer mutuellement en cas d’absence est une pratique du
partenariat franco-allemand et témoigne de la proximité et confiance entre les deux pays » expliquait-on à l’Elysée hier. Quelle démonstration,
malheureusement, dun décalage du Président avec les grands enjeux du monde!
Nous expliquions hier le contraste entre un président français qui se laisse enivrer par les apparences d’une visite d’Etat aux
Etats-Unis alors qu’il suffit au chancelier allemand de publier dans Foreign Affairs pour faire passer ses
messages aux Etats-Unis. De même, Emmanuel Macron sera encore dans l’euphorie de la victoire des Bleus et des flatteries afférentes de ses partenaires quand il
les retrouve, ce jeudi matin, à Bruxelles, tandis que la partie allemande sera, elle, en “départ lancé”.
Un Conseil européen qui embrasse toutes les causes sauf celle de l’Europe
On apprend, dans le Playbook de Politico ce matin, que le Conseil européen va parler des moyens de contrer le plan américain de
lutte contre l’inflation et ses subventions aus entreprises américaines. Ah bon? Parce qu’Emmanuel Macron n’a rien obtenu, lors d’une visite américaine qui
devait exprimer une “réponse européenne” au plan américain? Il paraît que le Conseil Européen va aussi servir à “réaffirmer plus que jamais le soutien à
l’Ukraine”! Autant dire que l’on ne fera rien pour les peuples européens – puisque le soutien inconsidéré à l’Ukraine est précisément un facteur très aggravant
de toutes les politiques mises en place par l’Union Européenne.
En réalité, il ne se décidera rien de bond à Bruxelles Avez-vous vu passer le communiqué du G7 daté du 12 décembre? Un G7
actuellement sous présidence allemande! Onze paragraphes sur dix-huit consacrés à l’Ukraine! Le nom de ce pays y revient comme une incantation, à peu près
toutes les deux lignes. On est dans une sorte d’hallucination collective. Les intérêts des sociétés des pays membres du G7? Il n’en esst jamais question! Quand
le texte s’arrête de parler d’Ukraine, il se met à parler de lutte contre le changement climatique.
En réalité, notre Macron qui passe son temps dans les avions n’est qu’une caricature des gouvernants occidentaux qui ont, depuis
longtemps, “décollé” de leurs réalités nationales respectives. On comprend qu’il est plus agréable de se retrouver plusieurs fois par mois dans l’entre-soi des
dirigeants que de devoir affronter la réalité domestique. Pendant qu’Emmanuel Macron voyage, la justice française enquête sur la connivence de ses campagnes présidentielles avec McKinsey. Et puis il y a la réforme des retraites, l’incapacité de l’Education Nationale à chauffer les écoles, l’augmentation de la fréquentation des soupes populaires à travers toute la
France, la multiplication des faillites chez les artisans et commerçants, étouffés par la montée des prix de l’énergie….
Au fait, personne ne lui a posé la question: il y retourne, Macron, au Qatar, dimanche, pour la finale?
Le nouveau discours allemand sur la puissance militaire n’a pas l’air de préoccuper la classe politique française
Le Chancelier Scholz fait l'éloge de la puissance retrouvée de l'Allemagne dans la revue américaine de référence sur les affaires internationales. Avec une remise
en cause définitive des équilibres franco-allemands sur lesquels reposait l'UE. Mais cela n'a pas l'air de troubler la futilité des débats politiques françaises.
Ce matin je voudrais vous parler du changement très rapide de posture de l’Allemagne à la faveur de la guerre en Ukraine. Et du
silence abyssal du gouvernement français – et de notre classe politique en général sur le sujet.
Il fut en temps où tout ce qui se passait en Allemagne était au coeur des préoccupations de notre classe politique. Je ne pense
pas seulement au grand Jaurès montant à la tribune de l’Assemblée, avant 1914, après avoir lu la presse allemande du jour. Ni aux grandes ambitions
franco-allemandes de nos présidents de la Vè République. Naguère, Jean-Luc
Mélenchon s’inquiétait des regains de puissance allemande. Aujourd’hui il semble plus préoccupé par les jeux de pouvoir au sein de la direction de
LFI.
Le Chancelier Scholz porte-parole d’une puissance allemande décomplexée
Prenons le temps de citer la très surprenante contribution du Chancelier Scholz:
“Le nouveau rôle de l’Allemagne exigera une nouvelle culture stratégique, et la stratégie de
sécurité nationale que mon gouvernement adoptera dans quelques mois reflétera ce fait. (…). Aujourd’hui, la question qui se pose est de savoir quelles sont les
menaces auxquelles nous et nos alliés devons faire face en Europe, et plus particulièrement la menace russe. Il s’agit notamment d’attaques potentielles contre
le territoire des alliés, de la cyberguerre et même de l’éventualité d’une attaque nucléaire, dont Poutine a menacé de manière très subtile“.
On n’insistera pas sur le fait que la Russie s’est contentée de rappeler, comme l’auraient fait les Etats-Unis (ou la France?) à
leur place, l’existence de sa dissuasion nucléaire en cas de surenchère des soutiens occidentaux de l’Ukraine.
” (…) Un partenariat transatlantique équilibré et résilient exige également que
l’Allemagne et l’Europe jouent un rôle actif. L’une des premières décisions que mon gouvernement a prises à la suite de l’attaque de la Russie contre l’Ukraine
a été de désigner un fonds spécial d’environ 100 milliards de dollars pour mieux équiper nos forces armées, la Bundeswehr. Nous avons même modifié notre
constitution pour mettre en place ce fonds. Cette décision marque le changement le plus radical dans la politique de sécurité allemande depuis la création de
la Bundeswehr en 1955. Nos soldats recevront le soutien politique, le matériel et les capacités dont ils ont besoin pour défendre notre pays et nos alliés.
L’objectif est une Bundeswehr sur laquelle nous et nos alliés pouvons compter.
Aujourd’hui, une grande majorité d’Allemands conviennent que leur pays a besoin d’une armée
capable et prête à dissuader ses adversaires et à se défendre ainsi que ses alliés. Les Allemands sont aux côtés des Ukrainiens lorsqu’ils défendent leur pays
contre l’agression russe“.
“… L’Allemagne a considérablement accru sa présence sur le flanc oriental de l’OTAN, en
renforçant le groupement tactique de l’OTAN dirigé par l’Allemagne en Lituanie et en désignant une brigade pour assurer la sécurité de ce pays. L’Allemagne
fournit également des troupes au groupement tactique de l’OTAN en Slovaquie, et l’armée de l’air allemande contribue à la surveillance et à la sécurisation de
l’espace aérien en Estonie et en Pologne. Parallèlement, la marine allemande a participé aux activités de dissuasion et de défense de l’OTAN en mer Baltique.
L’Allemagne fournira également une division blindée, ainsi que d’importants moyens aériens et navals (tous en état de haute disponibilité) au Nouveau modèle de
forces de l’OTAN, qui est conçu pour améliorer l’aptitude de l’alliance à réagir rapidement à toute éventualité. Et l’Allemagne continuera de respecter son
engagement à l’égard des accords de partage nucléaire de l’OTAN, notamment en achetant des avions de combat F-35 à double capacité“.
L’Allemagne participant à une éventuelle surenchère nucléaire entre les Occidentaux et la Russie? Ce qui était une hérésie aux
yeux du Général de Gaulle, l’actuelle classe politique française ne semble même pas en voir l’enjeu.
Vers une Allemagne dictant sa volonté au Conseil européen?
Que l’on soit dans la majorité gouvernementale ou – a fortiori – dans l’opposition, on devrait se préoccuper de voir les
conclusions que le Chancelier Scholz tire de la puissance allemande retrouvée. L’Union Européenne devra fonctionner toujours plus, selon le principe de la
majorité – des majorités que l’on comprend, implicitement, groupées autour de l’Allemagne:
“L’Union doit également se débarrasser des tactiques de blocage égoïstes dans ses processus
décisionnels en éliminant la possibilité pour les pays individuels d’opposer leur veto à certaines mesures. À mesure que l’UE s’étend et devient un acteur
géopolitique, la rapidité de la prise de décision sera la clé du succès. C’est pourquoi l’Allemagne a proposé d’étendre progressivement la pratique de la prise
de décision à la majorité à des domaines qui relèvent actuellement de la règle de l’unanimité, comme la politique étrangère et la fiscalité de
l’UE.
L’Europe doit également continuer à assumer une plus grande responsabilité pour sa propre
sécurité et a besoin d’une approche coordonnée et intégrée pour renforcer ses capacités de défense. Par exemple, les armées des États membres de l’UE utilisent
trop de systèmes d’armes différents, ce qui crée des inefficacités pratiques et économiques. Pour résoudre ces problèmes, l’UE doit modifier ses procédures
bureaucratiques internes, ce qui nécessitera des décisions politiques courageuses ; les États membres de l’UE, dont l’Allemagne, devront modifier leurs
politiques et réglementations nationales en matière d’exportation de systèmes militaires fabriqués conjointement“.
C’est la fin programmée de toute industrie française d’armement indépendante et ambitieuse. Le Chancelier Scholz fait d’ailleurs
directement référence à un accord passé sans la France:
“La défense dans les domaines de l’air et de l’espace est un domaine dans lequel l’Europe
doit progresser de toute urgence. C’est pourquoi l’Allemagne va renforcer sa défense aérienne au cours des prochaines années, dans le cadre de l’OTAN, en
acquérant des capacités supplémentaires. J’ai ouvert cette initiative à nos voisins européens, et le résultat est l’initiative European
Sky Shield, à laquelle 14 autres États européens se sont joints en octobre dernier. La défense aérienne commune en Europe sera plus efficace et plus
rentable que si nous faisions tous cavaliers seuls, et elle offre un exemple remarquable de ce que signifie le renforcement du pilier européen au sein de
l’OTAN“.
Le partenariat franco-allemand est une question de politique intérieure
Malheureusement, ne nous attendons pas à ce que le défi lancé par le Chancelier Scholz soit relevé par l’actuelle classe
politique française. Il y a quelques semaines, Emmanuel Macron annulait un dîner franco-allemand. Mais, quelques semaines plus tard, Madame
Borne se rendait à Berlin pour expliquer que l’on avait plus besoin que jamais du franco-allemand.
Tout devrait amener Paris à une pause et une remise en cause de la priorité donnée à la coopération franco-allemande. La sortie
allemande unilatérale de l’industrie nucléaire, la contribution de Berlin à la déstabilisation de l’Ukraine depuis 2014, la politique migratoire imposée à
l’UE, la remise en cause des coopérations étroites avec la France dans le domaine de la défense: tout cela devrait mettre fin au mythe du “couple
franco-allemand”. Mais il faut croire que la classe politique française ne juge pas qu’il soit important de s’emparer des priorités stratégiques pour le pays.
La “transition énergétique”, les politiques migratoires, les choix de politique industrielle auront pourtant de graves conséquence sur l’emploi des Français et
la prospérité du pays.