Voici l’une des présentations les plus pertientes que vous aurez l’occasion de voir au sujet du mythe de la mission Apollo 11 et des coulisses de la
politique étrangère américaine en plein cœur de la guerre froide.
***
Complot et zététique
avec Laurent Guyénot - Le 31/05/2023.
«Il a fait appel à un grand nombre de photographes de renom, il leur a montré ces photos et tous, unanimement et assez rapidement, comprennent que ces
photos-là n’ont pu être faites qu’en studio».
Seuls les héros des mythes et des contes peuvent voyager physiquement dans l’Autre Monde et en revenir
vivants1.
L’Autre Monde est alors représenté comme un pays lointain et inaccessible au commun des mortels. Dans certaines traditions asiatiques, comme dans « Le
Conte de la Princesse Kaguya», la
lune joue ce rôle. Ce n’est pas le cas en Occident. Néanmoins, sur un plan archétypal, un voyage sur la lune est un exploit surnaturel de dimension mythologique. Cela fait des astronautes
Apollo les égaux des anciens demi-dieux, et cette aura a illuminé les États-Unis dans leur ensemble. Telle était l’importance des alunissages : c’était le récit fondateur d’une nouvelle
religion qui élevait les États-Unis au rang de nation messianique propulsant l’humanité vers l’avenir radieux technologique2.
Le discours
du président Nixon, diffusé tandis que le module d’Apollo 11 traçait sa route vers la lune, invitait l’humanité à communier dans ce nouveau culte universel :
« Apollo 11 est en
route vers la lune. Elle transporte trois braves astronautes ; elle porte également les espoirs et les prières de centaines de millions de personnes ici sur terre, pour qui ce premier pas
sur la lune sera un moment de drame transcendant. Jamais l’homme ne s’est embarqué dans une aventure aussi épique. […] Alors que les astronautes vont là où l’homme n’est jamais allé,
alors qu’ils tentent ce que l’homme n’a jamais fait, nous sur terre voudrons, comme un seul peuple, être avec eux en esprit ; partager la gloire et l’émerveillement, et les soutenir avec
des prières pour que tout aille bien. »3
Une fois que Neil Armstrong et Buzz Aldrin eurent posé le pied sur la lune, le même Nixon réalisa « the
most historic telephone callever made from the
White House », récupérant ainsi une partie de leur pouvoir surnaturel de communication avec l’Au-delà.4
Mais qui fait l’ange fait la bête, ou le démon. Comme le fait remarquer le très sceptique chercheur allemand Gerhard Wisnewski dans « One
Small Step ? The Great Moon Hoax and the Race to Dominate Earth From Space », ce glorieux voyage lunaire mondialement télévisé qui auréolait les Américains d’une quasi
divinité, détournait opportunément l’attention de l’enfer qu’ils imposaient à un peuple ici-bas. Apollo 11 atterrissait sur la lune deux mois après les bombardements illégaux au Cambodge
ordonnés par Nixon. Et le programme Apollo cessa peu après que les dernières unités américaines aient quitté le Viêt Nam.
« Alors que les
États-Unis d’Amérique assassinaient des milliers de Vietnamiens, brûlaient un hectare après l’autre de forêts vierges et empoisonnaient la terre avec des pesticides, ils essayaient en
même temps de fasciner – ou plutôt d’hypnotiser – le monde avec une conquête d’un tout autre genre. »5
À vrai dire, en 1972, les gens s’étaient un peu lassés. Malgré l’arrivée de la télévision couleur, l’ajout de quelques gadgets distrayants comme
le moon buggy, un
suspens redoublé par la longueur des missions (72 heures sur la lune pour Apollo 17), et l’introduction de gags comme les sauts
de Kangourou de Eugene Cernan6,
l’enthousiasme du public n’y était plus.
Certains se grattaient même la tête: les astronautes n’avaient-ils rien de mieux à faire sur la lune que de planter le drapeau américain et ramasser des
cailloux (380 kilos, toutes missions Apollo confondues) ? « Never come to the
moon without a hammer », plaisanta Alan Bean d’Apollo 12 devant la caméra.
Pourquoi n’avaient-ils pas apporté plutôt un télescope pour observer les étoiles, par exemple ? Les étoiles, quelles étoiles ?
« I
can’t remember seeing any !» rapporta Michael Collins en conférence de presse le 15 juillet 19697.
Les suivants ont bien pensé à regarder le ciel, mais seulement pour constater que, vu de l’espace, le ciel était totalement noir, « an
immense black velvet sky – totally black », selon les mots d’Edgar Mitchell, le sixième homme sur la lune.8
Tout cela devenait obscur. Il était temps de faire tomber le rideau. Nos glorieux astronautes quittèrent définitivement la lune le 14 décembre 1972, avec la
dernière cargaison de précieux cailloux lunaires (115 kilos). Voici les images authentiques de ce fameux dernier lift-off,
filmées par une caméra commandée à distance depuis Houston (non, personne n’est resté sur la lune). Il faut le croire pour le voir !9
Ci-dessous à droite, le même étage supérieur du module lunaire d’Apollo 17 en papier mâché, avec sa trappe de pressurisation en carton, photographié par
Ronald Evans depuis le module de commande orbitant autour de la lune. À gauche, ce module de commande, photographié depuis le module lunaire (depuis quel hublot ?) avant amarrage des deux
modules.10
Une fois les deux modules amarrés, Harrison Schmitt et Gene Cernan vont transiter dans la capsule conique du module de commande, et ce dernier va se diriger
vers la terre. Arrivée trois jours plus tard dans l’atmosphère terrestre, la capsule se détachera du reste du module et tombera en chute libre, telle un météorite, avant d’être ralentie
par trois parachutes.
Cinquante ans après, on continue de se gratter la tête, et de plus en plus énergiquement. Pourquoi l’exploit n’a-t-il jamais été reproduit ? Imaginez
ce qu’auraient pensé les gens en 1977 si, depuis Charles Lindbergh en 1927, aucun avion n’avait jamais plus traversé l’Atlantique : on aurait beau leur expliquer tous les dix ans que la
météo était défavorable, ils commenceraient à se poser des questions.
En 2004, pour nous faire patienter, Bush Jr. nous avait promis un remake, une nouvelle tentative pour « mettre à
nouveau pied sur la lune » faisant remarquer :
« Au cours des 30
dernières années, aucun être humain n’a mis le pied sur un autre monde, ou ne s’est aventuré plus loin dans l’espace que 386 milles, soit approximativement la distance entre Washington
D.C. et Boston. »11
Rien ne sortit de cette déclaration. Le scepticisme sur les missions Apollo explosa autour du 40ème
anniversaire, lorsque les analyses critiques des films et des photos de la NASA sont se sont répandues sur Youtube : en Grande-Bretagne, les mécréants représentaient
alors un quart de la population12.
Huit ans plus tard, en 2016, on rapportait que plus de la moitié des Britanniques étaient atteints du syndrome de complotisme lunaire13. On
a arrêté les sondages.
Aujourd’hui, le retour sur la lune est toujours au programme, mais repoussé d’année en année. C’est plus compliqué qu’on pensait, nous dit-on. D’abord,
les combinaisons ne sont pas prêtes. C’est important, les combinaisons, surtout sur la lune, où il faut 100°C au soleil et moins 100°C à l’ombre.
Ensuite, la NASA n’a pas pensé à archiver les plans des missions Apollo. Son astronaute vétéran Donald Roy Pettit nous explique : « Le problème est que
nous n’avons plus la technologie pour le faire. Nous l’avions, mais nous avons détruit cette technologie et c’est un processus pénible de la reconstruire. »14
Avec la chute du niveau scolaire, c’est compliqué de trouver des gens qualifiés pour tout refaire à zéro. Comprenez bien : il ne s’agit pas d’aller à
400 kilomètres de la Terre, comme pour la Station Spatiale Internationale, mais à 400 000 kilomètres, mille fois plus loin !
Et il y a les fameuses ceintures de Van Allen. À l’époque, on n’en faisait pas tout un plat. Alan Bean d’Apollo 12 a déclaré bien plus tard : « I’m not sure we went
far enough to encounter the Van Allen Radiation Belts ». Il a fallu que le journaliste lui explique ce qu’étaient ces ceintures de radiation pour qu’il admette les avoir
traversées sans le savoir : « Then we went right
through them. »15
L’ingénieur de la NASA, Kelly Smith, nous explique maintenant, dans un documentaire sur le programme Orion (Orion Trial by
Fire), que les Ceintures Van Allen posent des défis si sérieux que « We must solve these
challenges before we send people through this region of space »16. Et
outre les Ceintures Van Allen, nous explique la NASA dans cette déclaration du 24 juin 2005 :
« L’espace au-delà de
l’orbite terrestre basse est inondé de radiations intenses émises par le Soleil et par des sources galactiques profondes telles que les supernovas. […] Le moyen le plus courant de traiter
les rayonnements consiste simplement à les bloquer physiquement, comme le fait le béton épais qui entoure un réacteur nucléaire. Mais fabriquer des vaisseaux spatiaux en béton n’est pas
une option. »17
Il existe des centaines de documents émanant d’ingénieurs de la NASA expliquant pourquoi les déplacements au-delà de l’orbite terrestre basse restent
impossibles pour les missions habitées. En voici encore un
exemple :
« Le rayonnement
spatial est très différent et plus dangereux que le rayonnement sur Terre. Même si la Station Spatiale Internationale (ISS) est située juste à l’intérieur du champ magnétique protecteur
de la Terre, les astronautes de l’ISS reçoivent dix fois plus de radiations que ce qui se passe naturellement sur Terre. Outre le champ magnétique, il existe des rayons cosmiques
galactiques (GCR), des événements de particules solaires (SPE) et les ceintures de Van Allen, qui contiennent un rayonnement spatial piégé. La NASA est en mesure de protéger l’équipage de
l’ISS en leur conseillant de s’abriter dans une zone contenant du matériel de protection supplémentaire. Cependant, il est beaucoup plus difficile de se protéger des GCR. Ces particules
hautement énergétiques proviennent de toute la galaxie. Elles sont si énergiques qu’elles peuvent détruire les métaux, le plastique, l’eau et les matériaux cellulaires. Et lors des chocs
de ces particules énergétiques, des neutrons, des protons et d’autres particules sont générés dans une cascade de réactions qui se produisent dans les matériaux de protection. Ce
rayonnement secondaire peut parfois créer un environnement de rayonnement pire encore pour l’équipage. »18
Pourtant, l’équipage d’Apollo 11 ne semble pas avoir souffert de ces quelques neutrons, protons et autres rayons cosmiques. On dirait même que ça leur a
fait du bien, à les voir de retour sur terre, après 8 jours dans l’espace.
Il est vrai qu’ils ne faisaient plus la même tête lors de leur conférence de pressele 15 juillet 1969. On s’attendait à plus d’exaltation chez ces héros surhumains qui venaient de réaliser le plus grand exploit de toute l’histoire
de l’humanité.19
Il faut croire qu’ils se la jouaient modestes. Au fond, que la vie d’un astronaute est moins en danger sur la lune que sur terre. L’expérience le
prouve : aucun astronaute n’est mort après avoir quitté la terre, alors que l’équipage d’Apollo 1, Gus Grissom, Ed White et Roger Chaffee, mourut carbonisé dans leur capsule durant
un test au sol, le
27 janvier 1967. Certains disent que Grissom s’est porté la poisse à lui-même en exprimant ses doutes et inquiétudes à droite et à gauche20. Sa
famille croit qu’on l’a éliminé21 :
complotistes ! Est-ce que Johnson aurait fait une chose pareille ?
Grissom parlait trop. Les suivants ont bien compris que c’était mauvais pour la santé. On sent qu’Armstrong pèse chacun de ses mots dans
son interview
de novembre 197022 (voir
l’analyse de Peter
Hyatt).23
Par la suite, Armstrong fut tenu à l’écart des interviews. Il fit une dernière
apparition en 1994, en présence du président Bill Clinton, pour se comparer à un perroquet, « le seul oiseau
qui pouvait parler »mais
« ne
volait pas très bien », et conclure par une remarque énigmatique sur « la couche
protectrice de la vérité »24.
Puis il est retourné dans son isolement légendaire. Hollywoodattendit néanmoins qu’il ait quitté définitivement la terre pour raconter son histoire.25
Tout de même, c’est bien dommage que les astronautes de la NASA soient si taciturnes. On aimerait tellement connaître les détails de leur expérience.
Comment passaient-ils leurs journées dans le minuscule espace de leurs modules ? Que mangeaient-ils ? Comment fonctionnaient les toilettes ? Est-ce que ça sentait
mauvais ? N’avaient-ils pas trop chaud ou trop froid ? Certains, comme ceux d’Apollo 17, sont tout de même restés plus de 12 jours dans l’espace, dont 76 heures sur la lune,
dont 22 heures en sorties extra-véhiculaires hors du module. Ils devraient en avoir des choses à raconter. Et bien non !
Assez plaisanté ! Toute personne raisonnable qui s’est penchée sur le dossier a aujourd’hui compris qu’on nous a fait marcher sur la lune au sens
figuré seulement. Rien ne résiste à l’examen dans cette histoire à dormir debout.
Où sont les preuves ? Car qu’on ne s’y trompe pas : la charge de la preuve revient à la NASA, et non aux sceptiques. Si je vous dis que j’ai
marché sur la lune, vous me demanderez de le prouver, et vous n’accepterez pas pour réponse : « Non, c’est à
vous de prouver que je n’y suis pas allé ». Est-ce que cela fait une différence si je suis la NASA ? Oui, mais seulement parce qu’envisager la possibilité que la NASA ait menti
vous conduira à remettre en question tout ce à quoi les gouvernements et les médias grand public vous ont fait croire, et même une grande partie de l’éducation que vous avez reçue. C’est
un pas de géant, vertigineux, terrifiant, qui sapera d’un coup ce qui vous reste de confiance dans l’information de masse. Les citoyens honnêtes ont tendance à réprimer les preuves de la
malveillance des puissants qui les gouvernent.
Ainsi, les gens choisissent de croire à l’alunissage, sans même demander de preuves, simplement parce que : « Ils ne nous
auraient pas menti pendant plus de 50 ans, n’est-ce pas ? Les médias auraient dénoncé le mensonge il y a longtemps (pensez Watergate) ! Et qu’en est-il des centaines de milliers de
personnes impliquées dans le projet ? Quelqu’un aurait parlé ! » Je m’entends penser moi-même comme ça il y a à peine 10 ans.
Ces objections doivent être prises en compte. Mais avant cela, la chose scientifique à faire est de commencer par poser la question : la NASA peut-elle
prouver qu’elle a envoyé des hommes sur la lune ? Si la réponse est non, la prochaine étape consiste à décider si nous les croyons sur parole ou non. Pour cela, il faut se demander
quelles auraient pu être les raisons d’un mensonge d’une telle ampleur. Ce sera l’objet d’un autre article : nous nous intéresserons au contexte géopolitique des missions Apollo, aux
rôles de Kennedy, de Johnson et de Nixon. Nous parlerons, non pas des modules lunaires bricolés par trois stagiaires, mais des fusées de lancement Saturn V, car c’est évidemment dans
cette technologie-là qu’est allé l’essentiel du budget de la NASA. Spoiler :
Savez-vous quelle est la différence entre une fusée de lancement et un missile balistique intercontinental ?
Alors, la NASA peut-elle fournir des preuves tangibles des alunissages ? Bien sûr ! Il y a toutes ces roches patiemment ramassées par nos astronautes.
Certes, l’une d’elles s’est révélée être du bois
pétrifié26,
mais admettons que ce petit « canular lunaire » avéré ne prouve pas le grand Moon
Hoax.
Ce qu’il faudrait, c’est un examen systématique des centaines d’autres échantillons, dont ceux distribués à travers le monde comme de précieuses reliques de
la nouvelle religion. Malheureusement, la plupart sont perdus, comme le rapportait Associated
Press le 13 septembre 2009 :
« L’administration
Nixon a donné à des pays étrangers près de 270 roches ramassées par des astronautes américains. […] Sur les 135 roches de la mission Apollo 17 données aux nations ou à leurs dirigeants,
seules environ 25 ont été localisées. […] Les chances de retrouver les 134 roches d’Apollo 11 dispersées semblent encore plus minces. Les emplacements de moins d’une douzaine seulement
sont connus. »27
De toute manière, trouver ces roches et les expertiser ne prouverait pas la réalité des missions Apollo. Premièrement, on peut trouver des pierre lunaires
sur terre. Comme expliqué ici,
« des
météorites ont été trouvés en Antarctique qui ont les mêmes caractéristiques que les roches lunaires »28. Comme
par hasard, en 1967, la NASA organisa une expédition en Antarctique, à laquelle participait Wernher Von Braun. Deuxièmement, même en admettant que les roches lunaires aient bien été
prélevées sur la lune, elles ont pu l’être par sonde automatique sans équipage humain, comme l’ont été celles collectées par la Russie
en 1970 et 1972.29
Les meilleurs éléments de preuve restent les films. Ce sont les images retransmises par la NASA qui ont convaincu le monde que l’homme avait marché sur la
lune. Malheureusement, ce sont ces mêmes images qui ont par la suite convaincu les sceptiques de l’imposture.
Le premier problème est la qualité très médiocre des séquences télévisées. Elle est due au processus par lequel elles ont été obtenues :
« Les
équipements de la NASA n’étant pas compatibles avec la technologie télévisuelle de l’époque, les transmissions originales ont dû être affichées sur un moniteur et refilmées par une caméra
pour diffusion télévisées » (comme expliqué dans un rapport du 15 août 2006 de Reuters)30.
Pour être plus précis, selon la NASA, les images transmises depuis la lune étaient en couleur et ont été projetées sur un écran cathodique, puis transformées en un film de 16 mm noir et
blanc (puis couleur à partir d’Apollo 14) par un kinéscope,
c’est-à-dire une caméra focalisée sur l’écran cathodique, ce qui implique une perte de qualité considérable.
Pour toute analyse sérieuse, les chercheurs ont besoin d’avoir accès aux bandes magnétiques originales de la NASA. Des chercheurs universitaires les ont
réclamées pendant des décennies, en vertu du Freedom of
Information Act. En 2006, ils ont reçu une réponse. Grey Hautaluoma, porte-parole de la NASA, a déclaré : « Nous ne les avons pas
vues depuis un bon bout de temps. Cela fait plus d’un an que nous cherchons, et elles n’ont pas été retrouvées ». 700 cartouches de cassettes vidéo magnétiques seraient
manquantes, indique le rapport précité de Reuters,
qui ajoute :
« La NASA a admis en
2006 que personne n’avait trouvé les enregistrements vidéo originaux de l’alunissage du 20 juillet 1969. Depuis lors, Richard Nafzger, ingénieur au Goddard Space Flight Center de la NASA
dans le Maryland, qui a supervisé le traitement télévisuel sur les sites de suivi au sol pendant la mission Apollo 11, les cherche. La bonne nouvelle, c’est qu’il a découvert ce qu’ils
sont devenus. La mauvaise nouvelle, c’est qu’ils faisaient partie d’un lot de 200 000 cassettes qui ont été magnétiquement effacées et réutilisées pour économiser de
l’argent. »31
Toutes les enregistrements vocaux, ainsi que toutes les données sur le fonctionnement du vaisseau spatial sont également perdues. Plus incroyable encore,
les plans originaux des Lunar Excursion Modules, des Lunar Roving Vehicles (moon buggies) et
de l’ensemble des sections des fusées Saturne V ont été détruits.
Restent les photos. À leur crédit, la NASA en a publié des milliers en haute résolution en 2015. On peut les examiner en détail sur apolloarchive.com/apollo-gallery.
La plupart d’entre elles sont remarquables par leur qualité. Sur la lune, les équipages on utilisé un Hasselblad 500C avec quelques modifications, dont le retrait du miroir réfléchissant,
qui ne leur était d’aucune utilité parce que la combinaison des astronautes les empêchait de voir l’appareil fixé sur leur torse. Leur gants pressurisés les empêchait également de
faire le moindre réglage (et le réglage automatique n’existait pas encore). Pourtant, chaque plan pris par Neil Armstrong, sans exception, est parfaitement net, parfaitement cadré et
parfaitement exposé. Il en va de même de la quasi totalité des photos prises lors des missions suivantes. Gerhard Wisnewski souligne à quel point c’est incroyable. Nous devons nous
souvenir que, même dans des conditions normales sur terre, la photographie était un métier très spécialisé à l’époque32.
Admirez le cadrage et la netteté :
Il existe des objections techniques plus graves encore. Le film utilisé, pour Apollo 11 tout au moins, était un film diapositif Kodak Ektachrome standard,
160 ASA. C’est un film étonnamment sensible pour un endroit où la lumière du soleil n’est filtrée par aucune atmosphère, surtout si l’on considère que certaines photos, parfaitement
exposées, ont été prises face au soleil. Se pose aussi la question de la fiabilité de ce matériau dans les conditions lunaires, sous des températures allant de moins 100°C à l’ombre, à
plus 100°C au soleil, l’appareil étant uniquement protégé contre la chaleur par un revêtement réflexif. Sans parler du bombardement constant de radiations : les photographes
professionnels savent que même les faibles radiations des portiques de détection dans les aéroports peuvent endommager leurs films. Est-il raisonnable de croire que les photos argentiques
prises sur Apollo aient pu rester vierges de toute dégradation après 9 ou 12 jours dans l’espace ?
Soyons réalistes : il n’y a aucune preuve que l’une quelconque des photographies d’Apollo fut prise sur la lune, et il y a de très sérieuses raisons de ne
pas le croire. Bon nombre de ces photographies sont « remplies
d’incohérences et d’anomalies », selon les termes du photographe professionnel David Percy, le premier à publier une analyse critique approfondie, dans son livre « Dark
Moon », et dans son documentaire de trois heures « Que
s’est-il passé sur la lune ? »
(2000).33
Ce documentaire contient une interview de Jan Lundberg, ingénieur de projet Hasselblad pour les missions Apollo. Lorsqu’on lui demande d’expliquer certaines
des incohérences concernant les ombres et l’exposition (par exemple, les astronautes entièrement éclairés bien qu’ils soient dans l’ombre du module lunaire, comme dans la photo reproduite
sur la couverture du livre de Wisnewski), il répond : « Je ne peux pas
l’expliquer. Cela m’échappe. »
Notons en passant que cet aveu embarrassé de Lundberg illustre à quel point le cloisonnement a pu rendre possible la mystification. Comme les centaines de
milliers de personnes impliquées dans le projet, il a travaillé sur la base du principe need-to-know, qui
est la clé de toute opération de ce type : chacun ne sait que ce qu’il a besoin de savoir. Lundberg n’avait aucune raison de soupçonner qu’il travaillait pour autre chose que ce
qu’on lui avait dit, du moins jusqu’à ce qu’on lui demande d’expliquer des images impossibles. Seule une poignée de personnes devait connaître le tableau global, et il n’est même pas
certain que le président Nixon était parmi eux. On estime que 20 000 sous-traitants et fournisseurs, travaillant de manière quasi indépendante aux quatre coins des États-Unis, ont
contribué à la construction des engins spatiaux Apollo : aucun de leurs employés n’avait la possibilité, encore moins l’intérêt, de mettre en doute l’utilité de ce qu’il faisait. Par
ailleurs, comme l’illustre Wisnewski avec le programme Corona (un
satellite de recherche américain lancé vers 1959 dans le but secret d’espionner l’Union soviétique), c’est une erreur de supposer que les agences militaires, spatiales ou du renseignement
sont incapables de garder un secret34.
Pour prendre un autre exemple, des centaines de milliers de personnes ont travaillé sur le projet Manhattan, qui est resté complètement caché du public jusqu’à ce que la bombe soit
larguée sur Hiroshima.
Je ne vais pas énumérer et examiner les anomalies des photographies d’Apollo, car elles sont analysées dans le récent film de Mazzucco, « American
Moon », dont la
version française est maintenant en
accès libre35.
Mazzucco a mis à contribution plusieurs photographes de renom international, dont les analyses sont dévastatrices pour la crédibilité des photos lunaires Apollo.
Il existe de nombreux invraisemblances techniques dans les missions Apollo, comme les capacités ridicules des ordinateurs embarqués, ou celles des batteries
installées sur les modules lunaires (documentée
par la NASA)36,
insuffisantes pour la transmission d’un signal vidéo jusqu’à la terre (ce point est bien expliqué dans cette
vidéo du photographe et ingénieur en radiofréquence américain Joe Frantz).37
Mais à mon avis, le meilleur moyen de se faire une idée personnelle, si l’on n’a pas de compétences techniques, est de passer quelques heures sur le site
d’archive de la NASA, apolloarchive.com/apollo_gallery et
d’examiner en détail certaines des photographies des modules lunaires en haute résolution. Un minimum de bon sens suffit pour s’interroger sur le réalisme de ces modules lunaires.
Regardez par exemple les photos suivantes du module Eagle d’Apollo 11 : AS11-40-5862, AS11-40-5922 et AS11-40-5928. Êtes-vous prêt à croire qu’il a pu déposer deux astronautes sur la
lune et les renvoyer en orbite lunaire pour se reconnecter avec le module de commandement orbital ?
Ou bien choisissez le module Antares d’Apollo 14 (AS14-66-9277), ou le module Orion d’Apollo 16 (AS16-113-18332 ou AS16-107-17436) qui portait à son arrivée
le rover replié.
Rappelons que ces fragiles petites structures qui semblent faites de papier alu et de matériaux de récupération grossièrement rivetées et scotchées, étaient
prétendument dotées de puissants moteurs propulseurs pour se poser en douceur sur la lune, puis en décoller à nouveau. Ils devaient aussi être pressurisées hermétiquement dans un
environnement sous vide, à chaque fois que les astronautes y pénétraient après leurs sorties extra-véhiculaires.
Dans les années 1970, les missions Apollo étaient un mensonge trop gros pour échouer. Le gouvernement des États-Unis bénéficiait encore d’un immense capital
de sympathie et de confiance dans le monde, la notion d’État profond était encore largement inconnue, et les gens avaient confiance dans les images télévisées.
Sur la scène internationale, les États-Unis avaient adopté, depuis les années 1950, une stratégie fondée sur la théorie des jeux (Game theory),
mise au point à la RAND Corporation. La théorie des jeux modélise les stratégies de décision entre individus rationnels mus par leur seuls intérêts personnels, dans un contexte
compétitif, à l’exclusion de toute norme éthique. Appliquée à la Guerre froide, elle pose comme principe qu’il ne faut accorder aucune confiance à la parole de l’ennemi, que celui-ci doit
être au contraire supposé prêt à toutes les turpitudes et trahisons, et qu’il doit être battu à son propre jeu : le gagnant sera le meilleur menteur38.
Les USA ont gagné la Guerre froide comme on gagne au poker : par le bluff et le mensonge. Mais ils ont, à long terme, ruiné leur crédibilité. Non seulement sur la scène
internationale, mais, en fin de compte, aux yeux de leur propre peuple : car on ne peut mentir à l’ennemi sans mentir à son peuple.
Il faut replacer les missions Apollo dans ce contexte de la Guerre froide, et c’est ce que je ferai dans un prochain article. Nous verrons que la
« course à la lune » n’était qu’un déguisement de la course à l’armement. Apollo fut un mensonge d’une audace extraordinaire, mais ce fut le mensonge de trop, dont les
États-Unis paieront finalement le prix fort. Après l’aveu de la NASA sur la perte de toutes les archives Apollo, les Russes ont déjà émis des demandes officielles pour une enquête
internationale39.
La pression ne va cesser de monter40.
Les retards indéfinis du projet Artemis vont contribuer à saper la légende Apollo et faire de la NASA la risée du monde. Progressivement, le Moon
Hoax entre dans l’histoire comme la preuve que les États-Unis méritent le nom que leur a donné Poutine :L’Empire du Mensonge.
Comparez cela avec la poussée fournie par les fusées Saturn V pour quitter l’attraction terrestre et demandez-vous si la différence est compatible avec le
rapport de 1 à 6 entre les gravitations terrestres et lunaires. https://www.youtube.com/watch?v=9HQfauGJaTs
« Je n’ai pas compris
comment les États-Unis, à leur niveau de développement technologique dans les années 1960, ont réussi à faire ce qu’ils ne peuvent toujours pas accomplir aujourd’hui », a
déclaré Dmitry Rogozin.
L’ancien directeur général de l’agence spatiale russe Roscosmos a exprimé des doutes quant à l’authenticité de l’alunissage d’Apollo 11 en 1969.
« Il y a une dizaine
d’années, alors que je travaillais pour le gouvernement, j’ai envoyé une demande officielle à Roscosmos pour qu’elle me fournisse des preuves documentaires de la présence des Américains
sur la Lune », a déclaré Dmitry Rogozin dans un communiqué publié sur Telegram, dimanche.
Dmitry Rogozin a déclaré s’être senti « embarrassé » par le retour des cosmonautes soviétiques des expéditions spatiales, à peine capables de se tenir
debout et subissant de longues phases de récupération, alors que les astronautes américains émergeaient de leurs vaisseaux lunaires, selon ses propres termes, « comme des concombres
sortis d’un potager. »
Rogozin a également déclaré qu’il avait continué à chercher des preuves des alunissages américains pendant qu’il travaillait à Roscosmos, mais qu’il n’avait
réussi qu’à susciter les « accusations
furieuses » de certains universitaires, qui prétendaient qu’il avait sapé la « sacro-sainte
coopération de la Russie avec la NASA. »
L’ancien directeur de Roscosmos a également déclaré avoir reçu un appel d’un haut fonctionnaire l’accusant d’avoir « aggravé la situation
internationale » en émettant des doutes sur la mission Apollo 11.
« Je n’ai rien ébranlé
ni aggravé, mais j’ai essayé, car c’est ma nature, d’aller au fond des choses et de faire le point, au moins pour moi-même, sur la situation réelle de la question de l’exploration de la
Lune par nos concurrents. Je n’ai pas compris comment les États-Unis, à leur niveau de développement technologique des années 60 du siècle dernier, ont réussi à faire ce qu’ils ne peuvent
toujours pas accomplir aujourd’hui », a déclaré Rogozin.
Le 20 juillet 1969, le vaisseau spatial Apollo 11 de la NASA s’est posé sur la lune avec à son bord les astronautes Neil Armstrong, Buzz Aldrin et Michael
Collins.
Les trois hommes sont devenus des figures emblématiques dans le monde entier, Armstrong étant le premier humain à avoir posé le pied sur la surface de la
lune.
Dans mon précédent article, « Apollo
et l’Empire du Mensonge », j’ai résumé les arguments les plus irréfutables de la thèse du canular lunaire (moon hoax),
selon laquelle les missions Apollo furent une mise-en-scène. Je n’ai présenté qu’une petite partie du dossier. Même en se limitant à l’analyse des photos prétendument prises sur la lune,
il y a beaucoup plus à dire. Je n’ai pas, par exemple, évoqué l’absence de cratère sous le module lunaire, sur laquelle insista Bill Kaysing, ingénieur chez Rocketdyne et pionnier de
cette enquête avec son livre « We
Never Went to the Moon: America’s Thirty Billion Swindle » (1976). Étant donné que, de l’aveu de Armstrong lui-même, le sol sur lequel s’est posé le module était composé de
« very
fine grain, almost like a powder », l’absence de cratère sous le moteur-fusée du module et l’absence de poussière sur les larges semelles des jambes du module (landing pads)
sont inexplicables (vérifier en zoomant sur cette
image).
Kaysing, soit dit en passant, est l’une des réponses à l’objection la plus courante : « Quelqu’un aurait parlé ! ».
Mais pour expliquer qu’il n’y ait pas eu davantage de whistleblowers comme lui, il faut insister sur le fait que l’immense majorité des ingénieurs de la NASA et de ses sous-traits
travaillaient sur des projets réels (je vais revenir en particulier sur les fusées Saturn V, bien réelles évidemment). Ceux qu’on a fait travailler pour la mise-en-scène étaient très peu
nombreux (et tenu au secret par des contrats extrêmement contraignants). Il suffit d’examiner la finition du module lunaire pour s’en convaincre. Prenons un autre exemple, tiré du
documentaire télévisé en 4 parties « Moon
Machines » produit en 2008 (dont le fil directeur est la série de coups de chances qui a permis la réussite de toutes les missions Apollo). La conception et la construction
du système de guidage du module de commande a été confiée au MIT (très proche de la CIA). On donna cette mission à un jeune ingénieur, Alex Kosmala, qui déclare dans le film (27:30)
:
« Il n’y avait pas de
cahier des charges. Nous l’avons inventé nous-même. Et ça m’a toujours paru incroyable : Pourquoi ai-je été autorisé à programmer quelque chose qui n’avait même pas été spécifié mais
qui serait essentiel pour assurer le succès de l’ensemble du programme Apollo ? Je n’y croyais pas, mais c’était comme ça. On l’a inventé au fur et à mesure ! »
On apprend ensuite que le logiciel chargé de guider le module lunaire jusqu’à la surface de la lune fut « écrit presque au
dernier moment [as an afterthought] par un ingénieur junior » de 22 ans, Don Isles, qui débutait son tout premier job. Ce logiciel, nous dit-on, « était l’un des
programmes les plus compliqués de MIT ait jamais conçus », et il ne fut jamais testé avant de poser Armstrong et Aldrin sur la lune (51:20)1.
Confier toutes ces missions inutiles à des jeunes recrues qui savent à peine ce qu’elles font, telle est l’une des clés de l’étanchéité du secret.
Dans le présent article, je vais, comme annoncé, expliquer les motivations géostratégiques et les coulisses de cette mystification. Mais pour commencer, je
voudrais encore répondre à une objection courante à la thèse de la mise-en-scène : Pourquoi les Russes n’ont-ils pas dénoncé la supercherie ? Il y a plusieurs
raisons possibles. Tout d’abord, à défaut de preuves irréfutables et suffisamment simples pour être présentées par exemple devant l’Assemblée des Nations unies, leur dénonciation risquait
de se retourner contre eux (« mauvais joueurs ! »). De plus, les Russes étaient vulnérables à la même accusation de mensonge, en particulier sur le voyage orbital de Youri
Gagarine en 1961, très probablement factice. Mais surtout, il faut considérer que les Russes avaient plus à gagner en monnayant leur silence : C’est ce qu’on appelle vulgairement le
chantage. Sous la présidence de Nixon, au plus fort de la Guerre froide, les États-Unis apportèrent à l’Union soviétique une aide économique, technologique et industrielle
considérable. La récente
déclaration de Dmitry Rogozin, ancien directeur de l’agence spatiale Roscosmos, nous met sur la voie lorsqu’il dit qu’en exprimant ses doutes sur les missions Apollo, il a été accusé
de saper la « sacro-sainte
coopération de la Russie avec la NASA »2. Cette
coopération date du début des années 60. Elle fut même initiée par Kennedy, comme nous allons le voir. Elle s’intensifia en 1972, lorsque les États-Unis et l’URSS signèrent un
« Accord de coopération dans l’exploration et l’utilisation de l’espace extra-atmosphérique à des fins pacifiques ». La pierre angulaire de cet accord était l’annonce
d’un programme de vol expérimental habité conjoint, nommé Apollo-Soyuz Test Project (ASTP). L’accord fut signé par Richard Nixon et par le président du Conseil des ministres de l’URSS,
A.N. Kossyguine, en présence de Leonid Brejnev. Il faut bien admettre qu’il y avait un niveau profond à la Guerre froide dont nous ignorons les détails. Nous pouvons néanmoins facilement
comprendre que les Soviétiques, s’ils disposaient de preuves que la NASA mentait, avaient mieux à faire qu’abattre leurs cartes publiquement.
Ce n’est qu’une hypothèse. En réalité, nous ne savons pas pourquoi les Russes n’ont rien dit, ni pourquoi ils n’expriment encore aujourd’hui leurs doutes
qu’assez timidement. Nous ne savons pas non plus pourquoi Poutine ne dénonce pas publiquement le mensonge du 11-Septembre. Et pourtant, nous savons que c’est un mensonge, et que les
preuves sont faciles à produire : Cela montre bien que l’objection du silence des Russes, ou des Chinois, n’est pas décisive. Notons toutefois qu’en interne, les Russes ne se
gênent pas : Un
sondage de 2019 montre que seulement 24 pour cent des Russes âgés de 18 ou plus croient que les Américains ont marché sur la lune.3
Comment Johnson nous a fait marcher sur la lune
C’est durant le mandat de Nixon, entre 1969 et 1972, que les Américains sont censés être allés sur la lune pour y planter des drapeaux américains et
ramasser des cailloux. Nixon savait-il que les missions étaient truquées ? Mon hypothèse est qu’il était trop intelligent pour ne pas l’avoir compris, mais qu’il a probablement cru à la
première (Apollo 11), programmée bien avant son entrée à la Maison-Blanche. Il se serait ensuite trouvé dans l’obligation de participer au mensonge. Il y a trouvé son compte : J’ai
évoqué dans mon précédent article tout le prestige qu’il en tira à peu de frais, ainsi que l’utilité de détourner l’attention des Américains et du monde pendant la Guerre du Vietnam.
Nixon, par ailleurs, se faisait peu d’illusion sur l’intérêt de dire la vérité en politique. On lui prête cette remarque : « Americans don’t
believe anything until they see it on television. »
La paternité du projet Apollo, en tout cas, ne revient pas à Nixon. Elle revient, selon la vulgate, à
Kennedy, dont tout le monde connaît le discours du 12 septembre 1962 : « Nous choisissons
d’aller sur la lune, non pas parce que c’est facile, mais parce que c’est difficile » (une phrase qui sonne presque comme un aveu que la vraie raison est cachée). Mais en
réalité, Kennedy n’était pas lui-même à l’origine du projet. Il y a cru et l’a soutenu jusqu’à la fin 1962, mais il était sur le point de tout arrêter en 1963. « Dans les semaines qui
ont précédé son assassinat, John F. Kennedy cherchait à se retirer de la course à la lune», explique Charles
Fishman, auteur d’un article de 2019 intitulé « Si le président
Kennedy n’avait pas été tué, aurions-nous atterri sur la lune le 20 juillet 1969 ? Cela semble peu probable »4.
David Baker écrit dans son livre « The Apollo Missions :
The Incredible Story of the Race to the Moon » (2018) :
« Généralement crédité pour avoir initialisé et jamais démenti l’expansion du programme spatial, Kennedy avait en réalité tenté de revenir sur sa
décision à plusieurs reprises avant son assassinat le 22 novembre 1963. Dès le départ, il n’avait jamais voulu sélectionner l’objectif de la lune, et cherchait une alternative qui serait
une réponse plus durable aux réalisations spatiales soviétiques. […] 18 mois après [son discours sur la lune au Congrès en mai 1961], il cherchait désespérément des moyens de rompre cette
engagement. Son assassinat a empêché cela, et a galvanisé la NASA dans un engagement encore plus profond. »5
La véritable paternité du projet revient à Lyndon Johnson. « Peu de gens
aujourd’hui le savent ou s’en souviennent, déclare Alan
Wasser, mais un seul homme,
Lyndon Baines Johnson, dit LBJ, est le principal responsable de la « course à l’espace » du début à la fin »6. « Apollo
11 n’aurait pas vu le jour sans Lyndon Johnson », confirme Michael
Marks, citant John Logsdon, professeur au Space Policy Institute de l’Université George Washington et auteur de « John
F. Kennedy and the Race to the Moon » (Macmillan, 2010)7.
Il y a un large consensus sur ce point parmi les historiens de la NASA.
« Le 4 octobre 1957,
quelques heures après avoir appris que l’Union soviétique avait mis en orbite le premier satellite, le Spoutnik, Johnson, alors chef de la majorité au Sénat, s’est saisi de la question de
l’exploration spatiale. Avant la fin de la soirée, il travaillait le téléphone et parlait à ses assistants, esquissant des plans pour une enquête sur le programme américain anémique.
George Reedy, un membre du personnel de Johnson, l’informa que la question pourrait « faire sauter les Républicains, unifier le Parti démocrate et vous faire élire président. […] Vous
devriez envisager de vous impliquer profondément dans cette question ». […] Le président Dwight D. Eisenhower avait résisté à l’établissement de ce qu’il appelait, par moquerie, « un
grand département de l’espace », mais Johnson, et les circonstances, sont venus à bout de ses résistances. La NASA a été leur création conjointe. »8
Après avoir remporté l’élection présidentielle en novembre 1960, John Kennedy mit en place des « équipes de transition » de haut niveau pour le conseiller
sur des questions clés. Son équipe sur l’espace était présidée par le professeur du MIT Jerome Wiesner, qui était déjà membre du comité consultatif scientifique d’Eisenhower. Le 10
janvier 1961, Wiesner remit à Kennedy un « rapport
au président élu du comité ad hoc sur l’espace », qui reflétait le scepticisme général de la communauté scientifique quant à la faisabilité des vols spatiaux habités au-delà de
l’orbite terrestre9.
Il mentionnait, parmi les « nouvelles découvertes scientifiques d’une grande importance » récemment obtenues avec des satellites et des sondes spatiales lointaines,
« la
grande ceinture de rayonnement, piégée dans le champ magnétique terrestre ». Par conséquent, écrit-il : « Pour le moment […]
l’exploration spatiale doit se limiter à des véhicules sans pilote ». Wiesner savait que les Ceintures Van Allen étaient impossibles à traverser pour un équipage
humain.
Kennedy nomma Wiesner président de son Comité consultatif scientifique. Wiesner demeura un adversaire farouche du programme Apollo, comme on peut le lire
sur sa page Wikipedia :
« Il
était un critique virulent de l’exploration habitée de l’espace extra-atmosphérique, croyant plutôt aux sondes spatiales automatisées ». Wiesner était également un ardent
défenseur de la coopération internationale plutôt que de la concurrence dans l’exploration spatiale, comme il l’indiquait dans son rapport de janvier 1961 :
« les activités
spatiales, en particulier dans les domaines des communications et de l’exploration de notre système solaire, offrent des possibilités passionnantes de coopération internationale avec
toutes les nations du monde. Les projets spatiaux très ambitieux et à long terme prospéreraient s’ils pouvaient être réalisés dans une atmosphère de coopération en tant que projets de
toute l’humanité plutôt que dans l’atmosphère actuelle de compétition nationale. »
C’était aussi la conviction profonde de Kennedy, comme nous le verrons. Mais lorsque l’astronaute soviétique Youri Gagarine fut proclamé la première
personne dans l’espace le 12 avril 1961, Kennedy se retrouva sous une pression intense. Son vice-président Johnson se porta volontaire pour mener un examen urgent afin d’identifier un
« programme spatial qui
promette des résultats spectaculaires dans lesquels nous pourrions gagner ». Il amena de hauts responsables de la NASA à la Maison-Blanche et, le 28 avril, remit à Kennedy un
mémorandum intitulé « Evaluation
of Space Program ». Le mémo assurait le président de la faisabilité d’un « atterrissage et
d’un retour en toute sécurité d’un homme sur la lune d’ici 1966 ou 1967 », si « un effort
sérieux » était fait. Johnson résuma l’intérêt du projet en ces termes :
« Les autres nations,
indépendamment de leur appréciation de nos valeurs idéalistes, auront tendance à s’aligner sur le pays qu’elles croient être le chef de file mondial — le gagnant à long terme. Les
réalisations spectaculaires dans l’espace sont de plus en plus considérées comme un indicateur majeur du leadership mondial. »10
Kennedy se laissa séduire par la perspective d’un tel exploit durant sa présidence. Le 25 mai 1961, 43 jours après l’exploit de Gagarine, il délivra devant
le Congrès un message sur les « besoins
nationaux urgents »,
demandant 7 à 9 milliards de dollars supplémentaires au cours des cinq prochaines années pour le programme spatial. Kennedy déclarait être parvenu, « avec les conseils du
vice-président, qui est président du Conseil national de l’espace », à la conclusion suivante :
« Je crois que cette
nation devrait s’engager àatteindre l’objectif,
avant la fin de cette décennie, de faire atterrir un homme sur la lune et de le ramener en toute sécurité sur Terre. Aucun projet spatial de cette période ne sera plus impressionnant pour
l’humanité ou plus important pour l’exploration spatiale à longue distance. »11
En tant que président du Conseil national de l’aéronautique et de l’espace, Johnson avait les mains libres pour enrôler ses propres hommes dans la course à
la lune. Il fit nommer James
E. Webb administrateur de la NASA.
Johnson profita aussi du soutien de son ami pétrolier, le sénateur Robert Kerr. Dans ses mémoires, « Wheeling and Dealing
: Confessions of a Capitol Hill Operator », le secrétaire personnel de Johnson, Bobby Baker, rapporte avoir collecté en espèce un demi-million de dollars de pots-de-vin pour
Kerr12.
D’une corruption sans limite, Johnson s’arrangea pour attribuer à ses partenaires d’affaire texans une grande partie des contrats.
Près d’un an et demi après son discours au Congrès, en septembre 1962, Kennedy visita un certain nombre d’installations spatiales à travers le pays.
L’ingénieur en chef de la NASA, Wernher von Braun, a rapporté qu’en regardant la fusée Saturn V en construction au Marshall Space Flight Center de la NASA (Huntsville, Alabama), Kennedy
paraissait dubitatif et, se tournant vers lui, lui dit : « Ne pensez-vous pas
que nous avons eu les yeux plus gros que le ventre ? »13 Néanmoins,
Kennedy prononça le lendemain (12 septembre), son discours « Nous choisissons
d’aller sur la lune » à la Rice University à Houston, Texas, près du site de ce qui allait devenir le Manned Spacecraft Center (rebaptisé Lyndon B. Johnson Space Centre en
1973).
Un mois plus tard, c’était la crise des missiles de Cuba. Elle eut un impact profond sur la conception de Kennedy de la Guerre froide et augmenta ses doutes
sur la pertinence de la course à la lune. Le 21 novembre 1962, il convoqua à la Maison-Blanche neuf hauts responsables de la NASA et membres de l’administration, dont James Webb et Jerome
Wiesner. Il ressort de cette conversation enregistrée (audio ici,
transcription ici,
commentaires utiles sur ce
podcast)
que Webb était loin d’être convaincu que la NASA pourrait envoyer des hommes sur la lune : « Il y a de vraies inconnues quant à savoir si l’homme peut vivre dans des conditions
d’apesanteur, où même si on pourrait faire l’alunissage ». Wiesner a ajouté : « Nous ne savons rien de
la surface de la lune et nous faisons les suppositions les plus folles sur la façon dont nous allons atterrir sur la lune ». Kennedy conclut :
« Tout ce que nous
faisons devrait vraiment être lié à l’objectif d’aller sur la lune avant les Russes. […] Sinon, nous ne devrions pas dépenser autant d’argent, car je ne suis pas très intéressé par
l’espace. […] Je suis prêts à dépenser des sommes raisonnables, mais nous parlons ici de dépenses fantastiques qui ruinent notre budget et [pénalisent] tous ces autres programmes
nationaux ; et la seule justification, à mon avis, pour le faire est parce que nous espérons les battre. »
Comme le dit Lillian Cunningham en commentaire dans le podcast
Moonrise, « La tension entre
Kennedy et Webb n’a cessé de monter au cours de l’année suivante. […] Le Congrès commençait à se lasser de dépenser tout cet argent ; le programme prenait du retard ; et Kennedy
entrait maintenant dans une année électorale avec cet albatros autour du cou »14.
En plus de cela, l’ancien président Eisenhower critiquait publiquement le projet lunaire. Kennedy a néanmoins continué à le soutenir en public, mais avec une inquiétude croissante.
Le 18 septembre 1963, il convoqua Webb à nouveau pour lui faire part de ses doutes sur la possibilité et l’intérêt d’envoyer des hommes sur la lune.
« Je
vais entrer en campagne en défendant ce programme et nous n’avons rien à montrer depuis un an et demi », se plaint Kennedy dans cette conversation
enregistrée. Anticipant que le Congrès réduirait le budget, il demanda à Webb : « Si je suis réélu,
nous n’irons pas sur la lune sous ma présidence, n’est-ce-pas ? » Webb répondit : « Non, on n’y arrivera
pas. Ça prendra plus longtemps que ça. C’est une mission difficile, vraiment difficile ». Un moment plus tard, Kennedy demande à Webb : « Pensez-vous que la
mission humaine sur la lune soit une bonne idée ? » Il se disait préoccupé par le fait que cela coûtait « un sacré paquet
d’argent », et suggérait d’envoyer plutôt des sondes, qui selon lui pourraient enrichir nos connaissances scientifiques à moindre coût. « Mettre un homme sur
la lune ne vaut pas tous ces milliards de dollars », dit-il. Webb insista qu’il était trop tard pour changer de plan15.
Mais Kennedy tira ses propres conclusions de cet ultime entretien.
« Allons-y ensemble ! »
Deux jours après cette conversation, le 20 septembre 1963, Kennedy surprit Webb, la NASA et le monde entier en proposant, dans un discours
prononcé à l’Assemblée générale des Nations unies,
qu’au lieu de chercher à prendre l’Union soviétique de vitesse dans la course à la lune, les États-Unis collaboreraient volontiers avec l’Union soviétique dans l’exploration spatiale
:
« dans un domaine où
les États-Unis et l’Union soviétique ont une capacité particulière – dans le domaine spatial – il y a place pour de nouvelles coopérations. […] J’inclus parmi ces possibilités une
expédition conjointe sur la lune. […] Pourquoi le premier vol de l’homme vers la lune devrait-il être une question de compétition nationale ? […] Nous devrions certainement étudier
si les scientifiques et les astronautes de nos deux pays – et même du monde entier – ne pourraient pas travailler ensemble à la conquête de l’espace, en envoyant un jour de cette décennie
sur la lune, non pas les représentants d’une seule nation, mais des représentants de tous nos pays. »16
Comme le commente Charles Fishman : « Le président qui
avait passé plus de deux ans à expliquer pourquoi la course à la lune était une question de compétence et de prééminence nationales, un combat entre la démocratie et le totalitarisme,
proposait maintenant exactement le contraire »17. Ce
fut par euphémisme que le New York
Times écrivit en première page le lendemain : « Washington
est surpris par la proposition du Président »18.
Dans une interview donné en 1969, Webb interpréta correctement le discours de Kennedy aux Nations unies comme donnant le « sentiment que ce
n’était que le début d’un groupe autour de lui [Kennedy] qui voulait retirer son soutien. »19
En fait, l’attitude de Kennedy était loin d’être nouvelle, et seuls ceux qui n’avaient pas pris au sérieux les discours précédents de Kennedy pouvaient être
surpris. Dans son discours
sur l’état de l’Union du 30 janvier 1961, Kennedy avait déclaré :
« Cette administration
a l’intention d’explorer rapidement tous les domaines possibles de coopération avec l’Union soviétique et d’autres nations “pour invoquer les merveilles de la science au lieu de ses
terreurs”. Plus précisément, j’invite maintenant toutes les nations, y compris l’Union soviétique, à se joindre à nous pour développer un programme de prévision météorologique, dans un
nouveau programme de satellites de communication et en préparation pour sonder les planètes lointaines de Mars et de Vénus, des sondes qui pourraient un jour dévoiler les plus profonds
secrets de l’univers. Aujourd’hui, ce pays est en avance dans la science et la technologie de l’espace, tandis que l’Union soviétique est en avance dans la capacité de mettre de gros
véhicules en orbite. Les deux nations s’aideraient elles-mêmes ainsi que d’autres nations en retirant ces efforts de la concurrence amère et inutile de la guerre froide. »20
Dix jours seulement après son discours au Congrès du 25 mai 1961, lors de son unique rencontre face à face avec le Premier ministre soviétique Nikita
Khrouchtchev à Vienne, Kennedy suggéra que les États-Unis et l’URSS devraient aller ensemble sur l’exploration de la lune. Khrouchtchev répondit favorablement dans un premier temps, mais
se rétracta le lendemain, au motif qu’un accord sur le désarmement devait primer.21
Cependant, un an plus tard, le 20 février 1962, lorsque les États-Unis réussirent l’exploit de faire orbiter John Glenn trois fois autour de la Terre,
Khrouchtchev envoya à la Maison-Blanche un télégramme de félicitations, suggérant :
« si nos pays
unissaient leurs efforts – scientifiques, techniques et matériels – pour maîtriser l’univers, cela serait très bénéfique pour l’avancée de la science et serait joyeusement acclamé par
tous les peuples qui souhaitent que les réalisations scientifiques profitent à l’homme et ne soient pas subordonnées à la “Guerre froide” et à la course aux armements. »
Kennedy informa aussitôt Khrouchtchev qu’il « chargeait les membres
appropriés de ce gouvernement de préparer des propositions concrètes pour des projets immédiats d’action commune dans l’exploration de l’espace », et moins d’un mois plus tard,
il soumit une première
proposition portant sur « un système de satellite météorologique opérationnel ». Dans les mois qui suivirent et jusqu’à la mort de Kennedy, des discussions et des
accords se nouèrent entre la NASA et l’Académie soviétique des sciences.22
Nous voyons que, sur la scène domestique, le président Kennedy parlait de battre les Soviétiques dans la course à la lune, tandis que sur la scène
diplomatique internationale, il essayait de changer de paradigme et de transformer la compétition en coopération. Khrouchtchev était dans la même situation que Kennedy : Il devant
maintenir chez lui une attitude guerrière afin de garder le contrôle de son propre gouvernement, mais faisait savoir à Kennedy qu’il partageait sa vision.
Il y avait néanmoins une différence dans leur approche : Khrouchtchev ne voulait pas entendre parler de la lune. Il en savait suffisamment pour ne pas
entraîner son pays dans une aventure impossible. Il n’a donc jamais répondu favorablement à l’invitation de Kennedy, formulée le 20 septembre 1963 à l’ONU, pour « une expédition
conjointe sur la lune ». Il a même commenté peu après avec ironie, dans le journal gouvernemental Izvestia :
« À l’heure actuelle
nous ne prévoyons pas d’envoyer des cosmonautes sur la lune. J’ai lu un rapport selon lequel les Américains souhaitaient marcher sur la lune avant 1970. Et bien, nous leur souhaitons de
réussir. Et nous verrons comment ils volent jusque là-bas et comment ils vont y atterrir, ou pour être plus correct, “alunir” là-bas. Et le plus important : Comment ils vont décoller
à nouveau et revenir. »23
Loin d’être un revers pour Kennedy, l’indifférence officielle des Soviétiques pour la lune était peut-être exactement ce dont Kennedy avait besoin pour
déclarer que, étant donné que les Russes n’essayaient même pas d’aller sur la lune, il n’y avait pas de « course à la lune » après tout. Il y a une indication très claire que, à partir de
ce moment, Kennedy se préparait à passer à d’autres projets plus raisonnables et plus utiles. Lors de son voyage fatal au Texas, il s’arrêta à San Antonio pour inaugurer un centre
consacré à la recherche en médecine spatiale. Il déclara à cette occasion à quel point il était heureux de voir que les États-Unis rattrapaient les Soviétiques dans l’espace et les
dépasseraient bientôt dans certains domaines importants. Dans le discours qu’il s’apprêtait à prononcer à Dallas avant d’être assassiné, Kennedy aurait déclaré qu’en raison du programme
spatial énergique de son administration, « il n’y a plus de doute sur la force et l’habileté de la science américaine, de l’industrie américaine, de l’éducation et du système
américain de libre entreprise »24. Cela
signifiait implicitement que les États-Unis n’avaient rien à prouver en allant sur la lune.
Concours de fusées
Afin de comprendre le dilemme de Kennedy, la pression qu’il subissait et sa chorégraphie élaborée avec Khrouchtchev, il est essentiel de comprendre que la
lune n’était pas l’enjeu véritable de la course à la lune. Kennedy l’a dit lui-même lors d’une conférence de presse le 31 octobre 1963 : « Selon moi, le
programme spatial que nous avons est essentiel pour la sécurité des États-Unis, parce que, comme je l’ai dit souvent, la question n’est pas d’aller sur la lune. La question est d’avoir la
compétence pour maîtriser cet environnement »25. Kennedy
n’aurait pu se permettre de le dire plus clairement dans un cadre publique, mais le sens était évident : La course à la lune était une couverture civile pour la recherche, le
développement et le déploiement de systèmes de surveillance par satellite, ainsi que de missiles balistiques intercontinentaux capables d’emporter des ogives nucléaires. Le fait que la
NASA employait l’ingénieur expatrié Wernher von Braun – l’un des concepteurs des fusées V-2 d’Hitler – rendait la chose presque transparente.
Il ne fait aucun doute que le soi-disant « programme spatial civil » de la NASA était d’abord et avant tout une couverture pour un
programme militaire. Le NASA
Act signé par Eisenhower en 1958 prévoyait explicitement une collaboration étroite avec le ministère de la Défense. Tout ceux qui ont entendu parler du « complexe
militaro-industriel » savent que c’est Eisenhower qui le premier a employé cette expression lors de son discours d’adieu, pour mettre en garde les Américains contre le
« risque d’une montée
désastreuse du pouvoir entre de mauvaises mains ». Ironiquement, la fondation de la NASA par Eisenhower a été en soi un pas de géant pour le complexe militaro-industriel. En
pratique, le Pentagone participa à toutes les décisions concernant les programmes Mercury, Gemini et Apollo. Erlend Kennan et Edmund Harvey ont documenté ce point dès 1969 dans leur livre
« Mission vers la
lune : un examen critique de la NASA et du programme spatial », et ont conclu :
« Il demeure impératif
que la NASA conserve son statut de hall d’exposition de l’ère spatiale afin de récolter le soutien du public pour tous les projets spatiaux et donner aux efforts spatiaux du ministère de
la Défense une « couverture efficace. »26
Cette couverture ne visait pas à tromper les Soviétiques, mais les Américains. Les dirigeants soviétiques, eux, savaient bien à quoi
servaient les roquettes. Outre le lancement de satellites à des fins d’espionnage, la NASA devait contribuer au développement de fusées transcontinentales capables de porter des têtes
nucléaires. Car après la Seconde Guerre mondiale, l’équation était simple : «Fusée +
bombe atomique = puissance mondiale. »27
C’est pourquoi Kennedy était sous la pression des Cold
Warriors qui dominaient le Pentagone, et ce qu’on nomme le National Security State, dont la CIA était la cheville ouvrière. Wiesner expliqua, en des termes aussi limpides qu’il
lui était permis, le dilemme de Kennedy, dans une interview de 1990 :
« Kennedy était,
et n’était pas, pour l’espace. Il me disait : « Pourquoi ne trouvez-vous pas autre chose que nous puissions faire ? » Nous n’avions rien d’autre. L’espace était la seule chose que
nous pouvions faire pour montrer notre puissance militaire […] Ces fusées étaient un substitut à la puissance militaire. Il n’y avait pas de réelles alternatives. Nous ne pouvions pas
abandonner la course à l’espace, et nous ne pouvions pas nous condamner à être deuxième. Nous devions faire quelque chose, mais la décision était douloureuse pour lui. »
Dès 1967, Wiesner avait confié à l’historien John Logsdon que Kennedy avait désespérément recherché un autre grand projet « qui serait plus utile
– disons par exemple le dessalement de l’océan – ou quelque chose d’aussi dramatique et convaincant que l’espace », mais « il y avait tellement
de connotations militaires […] dans le programme spatial qu’on ne pouvait pas faire un autre choix. »28
Wiesner partageait la difficulté de Kennedy. Sa notice nécrologique sur le site du MIT le décrit comme « une figure clé de
l’administration Kennedy dans la création de l’Agence pour le contrôle des armements et pour le désarmement, dans la conclusion du Traité d’interdiction partielle des essais nucléaires
d’octobre 1963, et dans les efforts fructueux visant à restreindre le déploiement de systèmes de missiles anti-balistiques. »29
Dans « JFK
et l’Indicible », James Douglass a raconté avec talent les efforts déterminés de Kennedy pour mettre fin à la course aux armements et abolir les armes nucléaires. Dans un
discours historique à l’Assemblée générale des Nations unies le 25 septembre 1961, Kennedy déclara « son intention de
défier l’Union soviétique, non pas dans une course aux armements, mais dans une course à la paix – pour avancer ensemble pas à pas, étape par étape, jusqu’à ce qu’un désarmement général
et complet soit réalisé ». Khrouchtchev répondit favorablement à ce discours. Il applaudit également le célèbre « discours de paix » de Kennedy du 10 juin 1963 à
l’Université américaine de Washington, le qualifiant de « plus grand discours
d’un président américain depuis Roosevelt ». Il le fit traduire intégralement dans la Pravda, et le
fit lire à la radio.30
En septembre 1963, Khrouchtchev et Kennedy avaient échangé une vingtaine de lettres dans le cadre d’une correspondance secrète, contournant les canaux
officiels, visant à apaiser les tensions et à vaincre la pression de leurs appareils militaires respectifs. Dans son discours à l’ONU du 20 septembre 1963, cité plus haut, Kennedy liait
sa proposition d’expédition jointe vers la lune à l’objectif de mettre fin à la course aux armements : « L’Union
soviétique et les États-Unis, avec leurs alliés, peuvent conclure d’autres accords – des accords qui découlent de notre intérêt mutuel à éviter une destruction
mutuelle. »
Inviter Khrouchtchev dans le projet lunaire, c’était couper l’herbe sous les pieds des faucons du Pentagone, car cela ne pouvait que signifier la fin de la
compétition pour les fusées balistiques. C’était un coup de maître : Que Khrouchtchev ait répondu favorablement ou qu’il ait proposé un autre domaine de coopération à la place – comme il
le fit -, cela sonnait la fin de la course à la lune comme couverture pour la course aux armements. Compte tenu de la persistance de Kennedy de 1961 à 1963 et de la réponse de plus en
plus ouvertement positive de Khrouchtchev, il y a même une chance que, si Kennedy avait vécu un deuxième mandat, la recherche spatiale aurait servi de cadre et de tremplin pour le
désarmement. C’était en tout cas, très clairement, la vision de Kennedy.
Cette possibilité a été brisée lorsque Johnson prit le contrôle de la Maison-Blanche. Jerome Wiesner fut remplacé par Donald Horning (il retourna au MIT,
dont il devint président en 1971). Huit jours à peine après l’assassinat de Kennedy, Johnson demanda au Congrès davantage d’argent pour la course à la lune de la NASA, ce qui signifiait,
incidemment, plus d’argent pour ses partenaires commerciaux texans31.
Sous Johnson, le Texas est devenu le cœur économique de la NASA, qui contribue encore aujourd’hui à plus de 4,7 milliards de dollars à l’économie de l’État et à 90% de l’économie de la
région, selon des sources
officielles. Nous ne saurons jamais combien de pot-de-vin Johnson a reçu au cours du processus.
Curieusement, James Webb, qui avait supervisé le projet Apollo depuis le début sous l’impulsion de Johnson, ne souhaita pas rester à bord jusqu’à la
réalisation de ce « pas de géant pour
l’humanité » ; il démissionna lorsque Johnson annonça qu’il ne se représenterait pas en 1968. Toute cette histoire ne prouve pas, bien entendu, que Kennedy fut assassiné
pour permettre à la NASA de tromper le monde par les missions Apollo. Il y avait d’autres enjeux autrement plus importants, que je détaille dans mon livre « Qui
a maudit les Kennedy ?»
(KontreKulture, 2021) et dans le film « Israël
et le double assassinat des frères Kennedy ».
Néanmoins, compte tenu de l’implication certaine et centrale de Johnson dans l’assassinat de son président, l’affaire Apollo constitue une pièce non négligeable dans ce dossier.