RUSSIE

Interview de Serguei Lavrov par Tucker Carlson (décembre 2024)

Source : RzO International - Le 07/12/2024.

par Antipresse

Risque de conflit nucléaire, escalade en Ukraine et en Syrie : L’interview de Serguei Lavrov avec Tucker Carlson (VERSION COMPLÈTE)

Transcription réalisée par RT, traduction française (assistée) et passages surlignés par Slobodan Despot.

Le ministre russe des Affaires étrangères, Serguei Lavrov, s’est entretenu avec le journaliste conservateur américain sur des questions internationales récentes et a expliqué la position de la Russie.

Le ministre russe des Affaires étrangères a accordé cette semaine une interview exclusive au journaliste conservateur américain Tucker Carlson. Les deux hommes ont abordé un large éventail de sujets d’intérêt international, principalement les conflits en Ukraine et au Moyen-Orient, ainsi que l’état des relations entre les États-Unis et la Russie. Voici le texte intégral de l’entretien.

Carlson : Monsieur le ministre Lavrov, je vous remercie de votre présence. Pensez-vous que les États-Unis et la Russie sont actuellement en guerre l’un contre l’autre ?

Lavrov : Je ne le dirais pas. Et de toute façon, ce n’est pas ce que nous voulons. Nous aimerions avoir des relations normales avec tous nos voisins, bien sûr, mais d’une manière générale avec tous les pays, en particulier avec un grand pays comme les États-Unis. Le président Vladimir Poutine a exprimé à plusieurs reprises son respect pour le peuple américain, pour l’histoire américaine, pour les réalisations américaines dans le monde, et nous ne voyons pas pourquoi la Russie et les États-Unis ne pourraient pas coopérer pour le bien de l’univers.

Carlson : Mais les États-Unis financent un conflit dans lequel vous êtes impliqués, bien sûr, et autorisent maintenant des attaques contre la Russie elle-même. Cela ne constitue donc pas une guerre ?

Lavrov : Officiellement, nous ne sommes pas en guerre. Mais ce qui se passe en Ukraine est ce que certains appellent une guerre hybride. Je l’appellerais aussi une guerre hybride, mais il est évident que les Ukrainiens ne pourraient pas faire ce qu’ils font avec des armes modernes à longue portée sans la participation directe de militaires américains. Et c’est dangereux, cela ne fait aucun doute.

Nous ne voulons pas aggraver la situation, mais puisque l’ATACMS et d’autres armes à longue portée sont utilisés contre la Russie continentale, nous envoyons des signaux. Nous espérons que le dernier, il y a deux semaines, le signal avec le nouveau système d’arme appelé Orechnik a été pris au sérieux.

Cependant, nous savons également que certains responsables au Pentagone et dans d’autres lieux, y compris à l’OTAN, ont commencé à dire ces derniers jours que l’OTAN est une alliance défensive, mais qu’il est parfois possible de frapper en premier parce que l’attaque est la meilleure défense. D’autres membres du STRATCOM, dont Thomas Buchanan, représentant du STRATCOM, ont dit quelque chose qui permet l’éventualité d’un échange de frappes nucléaires limitées.

Et ce genre de menaces est vraiment inquiétant. Car s’ils suivent la logique que certains Occidentaux ont adoptée dernièrement, à savoir qu’ils ne croient pas que la Russie a des lignes rouges, qu’elle a annoncé ses lignes rouges, que ces lignes rouges sont déplacées à maintes reprises, ils commettent une erreur très grave. Voilà ce que je voulais dire en réponse à cette question.

Ce n’est pas nous qui avons commencé la guerre. Poutine a dit à plusieurs reprises que c’est nous qui avons commencé l’opération militaire spéciale afin de mettre fin à la guerre que le régime de Kiev menait contre son propre peuple dans certaines parties du Donbass. Et dans sa dernière déclaration, le président Poutine a clairement indiqué que nous sommes prêts à toute éventualité. Mais nous préférons de loin une solution pacifique par le biais de négociations sur la base du respect des intérêts légitimes de la Russie en matière de sécurité, et sur la base du respect des personnes qui vivent en Ukraine, qui vivent toujours en Ukraine, en tant que Russes. Leurs droits humains fondamentaux, leurs droits linguistiques, leurs droits religieux ont été exterminés par une série de lois adoptées par le parlement ukrainien. Cela a commencé bien avant l’opération militaire spéciale. Depuis 2017, des lois ont été adoptées interdisant l’enseignement en russe, interdisant les médias russes opérant en Ukraine, puis interdisant les médias ukrainiens travaillant en langue russe, et la dernière, bien sûr, il y a également eu des mesures pour annuler tout événement culturel en russe. Les livres russes ont été jetés des bibliothèques et exterminés. La dernière en date est la loi interdisant l’Église orthodoxe canonique, l’Église orthodoxe ukrainienne.

Vous savez, il est très intéressant de voir les Occidentaux dire qu’ils veulent que ce conflit soit résolu sur la base de la Charte des Nations unies et le respect de l’intégrité territoriale de l’Ukraine, et que la Russie doit se retirer. Le secrétaire général des Nations unies tient des propos similaires. Récemment, son représentant a répété que le conflit devait être résolu sur la base du droit international, de la Charte des Nations unies et des résolutions de l’Assemblée générale, tout en respectant l’intégrité territoriale de l’Ukraine. C’est un contresens, car si l’on veut respecter la Charte des Nations unies, il faut la respecter dans son intégralité. La Charte des Nations unies stipule notamment que tous les pays doivent respecter l’égalité des États et le droit des peuples à l’autodétermination. Ils ont également mentionné les résolutions de l’Assemblée générale des Nations unies, et il est clair que ce qu’ils veulent dire, c’est la série de résolutions qu’ils ont adoptées après le début de cette opération militaire spéciale qui exigent la condamnation de la Russie, le retrait de la Russie de l’Ukraine, territoire situé dans ses frontières de 1991. Mais il existe d’autres résolutions de l’Assemblée générale des Nations unies qui n’ont pas été votées, mais qui étaient consensuelles, et parmi elles figure une déclaration sur les principes des relations entre les États sur la base de la Charte. Elle stipule clairement, par consensus, que tout le monde doit respecter l’intégrité territoriale des États dont les gouvernements respectent le droit des peuples à l’autodétermination et qui, de ce fait, représentent l’ensemble de la population vivant sur un territoire donné.

Il est absolument inutile de prétendre que les personnes qui ont pris le pouvoir par un coup d’État militaire en février 2014 représentaient les Criméens ou les citoyens de l’est et du sud de l’Ukraine. Il est évident que les Criméens ont rejeté le coup d’État. Ils ont dit : «Laissez-nous tranquilles, nous ne voulons rien avoir à faire avec vous». C’est ce que nous avons fait : Le Donbass et la Crimée ont organisé des référendums et ont rejoint la Russie. Le Donbass a été déclaré «groupe terroriste» par les putschistes arrivés au pouvoir. Ils ont été bombardés, attaqués par l’artillerie. La guerre a commencé, et a été arrêtée en février 2015.

Les accords de Minsk ont été signés. Nous souhaitions sincèrement mettre un terme à ce drame en voyant les accords de Minsk pleinement mis en œuvre. Ils ont été sabotés par le gouvernement mis en place après le coup d’État en Ukraine. On leur demandait d’entamer un dialogue direct avec les personnes qui n’avaient pas accepté le coup d’État. On leur a demandé de promouvoir les relations économiques avec cette partie de l’Ukraine. Et ainsi de suite. Rien de tout cela n’a été fait.

Les gens de Kiev disaient que nous ne leur parlerions jamais directement. Et ce malgré le fait que la demande de leur parler directement ait été approuvée par le Conseil de sécurité [des Nations unies]. Les putschistes disaient qu’ils étaient des terroristes, que nous allions les combattre et qu’ils allaient mourir dans des caves parce que nous étions plus forts.

Si le coup d’État de février 2014 n’avait pas eu lieu et si l’accord conclu la veille entre le président de l’époque et l’opposition avait été mis en œuvre, l’Ukraine serait aujourd’hui restée en un seul morceau, avec la Crimée. C’est tout à fait clair. Ils n’ont pas respecté l’accord. Au lieu de cela, ils ont organisé le coup d’État. L’accord, soit dit en passant, prévoyait la création d’un gouvernement d’unité nationale en février 2014 et l’organisation d’élections anticipées, que le président de l’époque aurait perdues. Tout le monde le savait. Mais ils étaient impatients et ont pris les bâtiments du gouvernement le lendemain matin. Ils se sont rendus sur la place Maidan et ont annoncé qu’ils avaient créé le gouvernement des vainqueurs. Comparez le gouvernement d’unité nationale pour préparer les élections et le gouvernement des vainqueurs.

Comment le peuple qu’ils ont, selon eux, vaincu, peut-il prétendre respecter les autorités de Kiev ? Vous savez, le droit à l’autodétermination est la base juridique internationale du processus de décolonisation qui a eu lieu en Afrique sur la base de ce principe de la Charte, le droit à l’autodétermination. Les peuples des colonies n’ont jamais traité leurs puissances coloniales, leurs maîtres coloniaux, comme quelqu’un qui les représente, comme quelqu’un qu’ils veulent voir dans les structures qui gouvernent ces terres. De même, les habitants de l’est et du sud de l’Ukraine, du Donbass et de la Novorossiya ne considèrent pas le régime de Zelensky comme quelqu’un qui représente leurs intérêts. Comment peuvent-ils le faire alors que leur culture, leur langue, leurs traditions, leur religion, tout cela a été interdit ?

Enfin, si nous parlons de la Charte des Nations unies, des résolutions, du droit international, le tout premier article de la Charte des Nations unies, que l’Occident ne rappelle jamais, jamais, dans le contexte ukrainien, dit : «Respecter les droits de l’homme pour tous, sans distinction de race, de sexe, de langue ou de religion».

Prenez n’importe quel conflit. Les États-Unis, le Royaume-Uni, Bruxelles interviennent en disant : «Oh, les droits de l’homme ont été grossièrement violés. Nous devons rétablir les droits de l’homme dans tel ou tel territoire». En ce qui concerne l’Ukraine, jamais, au grand jamais, ils n’ont prononcé les mots «droits de l’homme», alors que les droits de l’homme de la population russe et russophone sont totalement exterminés par la loi. Alors, quand on dit : «Résolvons le conflit sur la base de la Charte», oui. Mais n’oubliez pas que la Charte ne concerne pas seulement l’intégrité territoriale. Et l’intégrité territoriale ne doit être respectée que si les gouvernements sont légitimes et s’ils respectent les droits de leur propre peuple.

Carlson : Je voudrais revenir sur ce que vous avez dit il y a un instant à propos de l’introduction ou du dévoilement du système d’armes hypersoniques qui, selon vous, était un signal pour l’Occident. Quel signal exactement ? Je pense que de nombreux Américains ne sont même pas au courant de ce qui s’est passé. Quel message envoyez-vous en le montrant au monde ?

Lavrov : Eh bien, le message est que vous, je veux dire les États-Unis, et les alliés des États-Unis qui fournissent également ces armes à longue portée au régime de Kiev, ils doivent comprendre que nous serions prêts à utiliser tous les moyens pour ne pas leur permettre de réussir ce qu’ils appellent la défaite stratégique de la Russie.

Ils se battent pour conserver l’hégémonie sur le monde, sur n’importe quel pays, n’importe quelle région, n’importe quel continent. Nous nous battons pour nos intérêts légitimes en matière de sécurité. Ils disent, par exemple, les frontières de 1991. Lindsey Graham, qui a rendu visite à Vladimir Zelensky il y a quelque temps pour un autre entretien, a déclaré sans ambages, en sa présence, que l’Ukraine était très riche en métaux rares et qu’elle ne pouvait pas laisser cette richesse aux Russes. Nous devons nous en emparer. Nous nous battons.

Ils se battent donc pour un régime qui est prêt à vendre ou à donner à l’Occident toutes les ressources naturelles et humaines. Nous nous battons pour les personnes qui vivent sur ces terres, dont les ancêtres ont développé ces terres, construit des villes et des usines pendant des siècles et des siècles. Nous nous soucions des gens, pas des ressources naturelles que quelqu’un aux États-Unis voudrait conserver et dont les Ukrainiens ne seraient que les serviteurs, assis sur ces ressources naturelles.

Ainsi, le message que nous avons voulu envoyer en testant en action réelle ce système hypersonique est que nous sommes prêts à tout pour défendre nos intérêts légitimes.

Nous détestons même l’idée d’une guerre avec les États-Unis, qui revêtirait un caractère nucléaire. Notre doctrine militaire dit que la chose la plus importante est d’éviter une guerre nucléaire. C’est d’ailleurs nous qui avons lancé le message en janvier 2022, la déclaration commune des dirigeants des cinq membres permanents du Conseil de sécurité disant que nous ferons tout pour éviter une confrontation entre nous, en reconnaissant et en respectant les intérêts et les préoccupations de chacun en matière de sécurité. C’était notre initiative.

Et les intérêts de la Russie en matière de sécurité ont été totalement ignorés lorsqu’ils ont rejeté à peu près au même moment la proposition de conclure un traité sur les garanties de sécurité pour la Russie, pour l’Ukraine dans le contexte de la coexistence et dans un contexte où l’Ukraine ne serait jamais membre de l’OTAN ou d’un autre bloc militaire. Ces intérêts de sécurité de la Russie ont été présentés à l’Occident, à l’OTAN et aux États-Unis en décembre 2021. Nous en avons discuté à plusieurs reprises, notamment lors de ma rencontre avec Antony Blinken à Genève en janvier 2022. Et cela a été rejeté.

Nous souhaitons donc éviter tout malentendu. Et comme les gens, certains à Washington et certains à Londres, à Bruxelles, ne semblent pas très capables de comprendre, nous enverrons des messages supplémentaires s’ils ne tirent pas les conclusions qui s’imposent.

Carlson : Le fait que nous ayons une conversation sur un échange nucléaire potentiel et qu’il soit réel… je ne pensais pas vivre ça un jour. Et cela soulève la question suivante : Quel est le degré de dialogue entre la Russie et les États-Unis ? Y a-t-il eu un dialogue au cours des deux dernières années et demie ? Des conversations sont-elles en cours ?

Lavrov : Il existe plusieurs canaux, mais ils concernent principalement l’échange de personnes qui purgent des peines [de prison] en Russie et aux États-Unis. Il y a eu plusieurs échanges.

Il existe également des canaux qui ne font l’objet d’aucune publicité, mais les Américains y transmettent essentiellement le même message que celui qu’ils diffusent publiquement. Vous devez arrêter, vous devez accepter la voie qui sera basée sur les besoins et la position de l’Ukraine. Ils soutiennent cette «formule de paix» absolument inutile de Vladimir Zelensky, à laquelle s’est ajouté récemment [son] «plan de victoire». Ils ont organisé plusieurs séries de réunions, le format de Copenhague, Bürgenstock. Ils se vantent d’organiser une nouvelle conférence au cours du premier semestre de l’année prochaine et d’y inviter gracieusement la Russie. La Russie recevra alors un ultimatum.

Tout cela est sérieusement répété par divers canaux confidentiels. Maintenant, nous entendons quelque chose de différent, y compris les déclarations de Vladimir Zelensky selon lesquelles nous pouvons nous arrêter maintenant à la ligne d’engagement, à la ligne de contact. Le gouvernement ukrainien sera admis dans l’OTAN, mais les garanties de l’OTAN à ce stade ne couvriraient que le territoire contrôlé par le gouvernement, et le reste ferait l’objet de négociations. Mais le résultat final de ces négociations doit être le retrait total de la Russie du territoire ukrainien. Laisser le peuple russe au régime nazi, qui a exterminé tous les droits des citoyens russes et russophones de leur propre pays.

Carlson : Permettez-moi de revenir sur la question des échanges nucléaires. Il n’existe donc aucun mécanisme permettant aux dirigeants de la Russie et des États-Unis de se parler pour éviter le genre de malentendu qui pourrait tuer des centaines de millions de personnes.

Lavrov : Non. Nous disposons d’un canal qui s’enclenche automatiquement en cas de lancement d’un missile balistique.

En ce qui concerne ce missile balistique hypersonique à moyenne portée Orechnik, 30 minutes à l’avance, le système a envoyé le message aux États-Unis. Ils savaient que c’était le cas et qu’ils ne le prenaient pas pour quelque chose de plus gros et de vraiment dangereux.

Carlson : Je pense que le système est très dangereux.

Lavrov : Il s’agissait d’un lancement test, vous savez.

Carlson : Oui. Oh, vous parlez du test, d’accord. Mais je me demande à quel point vous êtes inquiet, étant donné qu’il ne semble pas y avoir beaucoup de discussions entre les deux pays. Les deux camps parlent d’exterminer les populations de l’autre. Que cela puisse devenir incontrôlable en très peu de temps et que personne ne puisse l’arrêter. Cela semble incroyablement imprudent.

Lavrov : Non, il n’est pas question d’exterminer la population de qui que ce soit. Nous n’avons pas commencé cette guerre. Cela fait des années et des années que nous lançons des avertissements selon lesquels le fait de pousser l’OTAN de plus en plus près de nos frontières va créer un problème.

En 2007, Poutine a commencé à expliquer [cela] aux gens qui semblaient dépassés par la «fin de l’histoire» et par le fait d’être dominant, sans défi, et ainsi de suite.

Et bien sûr, lorsque le coup d’État a eu lieu, les Américains n’ont pas caché qu’ils en étaient à l’origine. Il existe une conversation entre Victoria Nuland et l’ambassadeur américain de l’époque à Kiev, au cours de laquelle ils discutent des personnalités à inclure dans le nouveau gouvernement après le coup d’État. Le chiffre de 5 milliards de dollars dépensés pour l’Ukraine après l’indépendance a été mentionné comme la garantie que tout se passerait comme le souhaitent les Américains.

Nous n’avons donc pas l’intention d’exterminer le peuple ukrainien. Ils sont les frères et sœurs du peuple russe.

Carlson : Combien de personnes sont mortes jusqu’à présent, d’après vous, dans les deux camps ?

Lavrov : Les Ukrainiens ne l’ont pas révélé. Vladimir Zelensky a déclaré qu’il y avait beaucoup moins de 80 000 personnes du côté ukrainien.

Mais il existe un chiffre très fiable. En Palestine, un an après le début de l’opération menée par les Israéliens en réponse à cette attaque terroriste, que nous avons condamnée – et cette opération, bien sûr, a acquis la dimension d’une punition collective, ce qui est également contraire au droit humanitaire international – donc, un an après le début de l’opération en Palestine, le nombre de civils palestiniens tués est estimé à 45 000. C’est presque deux fois plus que le nombre de civils des deux côtés du conflit ukrainien qui sont morts au cours des dix années qui ont suivi le coup d’État. Un an et dix ans. C’est donc une tragédie en Ukraine. C’est un désastre en Palestine, mais nous n’avons jamais eu pour objectif de tuer des gens.

Et le régime ukrainien l’a fait. Le chef du bureau de Vladimir Zelensky a déclaré un jour que nous ferions en sorte que des villes comme Kharkov et Nikolaev oublient ce que signifie le mot «russe». Un autre membre de son cabinet a déclaré que les Ukrainiens devaient exterminer les Russes par la loi ou, si nécessaire, physiquement. L’ancien ambassadeur ukrainien au Kazakhstan, Pyotr Vrublevsky, est devenu célèbre lorsqu’il a donné une interview et qu’en regardant la caméra (enregistrée et diffusée), il a déclaré : «Notre principale tâche est de tuer le plus grand nombre possible de Russes : «Notre tâche principale est de tuer autant de Russes que possible afin que nos enfants aient moins de choses à faire». Des déclarations de ce genre sont omniprésentes dans le vocabulaire du régime.

Carlson : Combien de Russes ont été tués en Russie depuis février 2022 ?

Lavrov : Il ne m’appartient pas de divulguer cette information. Lors d’opérations militaires, il existe des règles particulières. Notre ministère de la défense suit ces règles.

Mais il est très intéressant de noter que lorsque Vladimir Zelensky jouait non pas sur la scène internationale, mais dans son club de comédie, ou quel que soit le nom qu’on lui donne, il défendait carrément la langue russe (il existe des vidéos de cette période). Il disait :

«Qu’est-ce qui ne va pas avec la langue russe ? Je parle russe. Les Russes sont nos voisins. Le russe est l’une de nos langues». Et qu’ils aillent se faire voir, disait-il, ceux qui voulaient s’en prendre à la langue et à la culture russes. Lorsque Vladimir Zelensky est devenu président, il a changé très rapidement.

Avant l’opération militaire, en septembre 2021, il a été interrogé et, à cette époque, il menait la guerre contre le Donbass en violation des accords de Minsk. L’interviewer lui a demandé ce qu’il pensait des gens de l’autre côté de la ligne de contact. Il a répondu de manière très réfléchie : il y a des gens et il y a des espèces. Et si vous, qui vivez en Ukraine, vous sentez associé à la culture russe, je vous conseille, pour le bien de vos enfants et de vos petits-enfants, d’aller en Russie.

Et si ce type veut ramener les Russes et les personnes de culture russe sous son intégrité territoriale, je veux dire que cela montre qu’il n’est pas adéquat.

Carlson : Quelles sont donc les conditions dans lesquelles la Russie cesserait les hostilités ? Que demandez-vous ?

Lavrov : Il y a dix ans, en février 2014, nous demandions simplement que l’accord conclu entre le président et l’opposition en vue de former un gouvernement d’unité nationale et d’organiser des élections anticipées soit mis en œuvre. L’accord a été signé. Et nous demandions la mise en œuvre de cet accord. Ils étaient absolument impatients et agressifs. En effet, si Victoria Nuland et l’ambassadeur des États-Unis se sont mis d’accord sur la composition du gouvernement, pourquoi attendre cinq mois pour organiser des élections anticipées ?

La fois suivante que nous avons été en faveur de quelque chose, c’était lorsque les accords de Minsk ont été signés. J’y étais. Les négociations ont duré 17 heures (la Crimée était déjà perdue à cause du référendum). Et personne, y compris mon collègue John Kerry, qui nous rencontrait, personne en Occident ne s’est inquiété de la question de la Crimée. Tout le monde se concentrait sur le Donbass. Les accords de Minsk prévoyaient l’intégrité territoriale de l’Ukraine, sans la Crimée (cette question n’a même pas été soulevée) et un statut spécial pour une toute petite partie du Donbass, pas pour l’ensemble du Donbass, pas du tout pour la Novorossiya. Une partie du Donbass, en vertu des accords de Minsk, approuvés par le Conseil de sécurité, devrait avoir le droit de parler le russe, d’enseigner le russe, d’étudier en russe, d’avoir des forces de l’ordre locales (comme dans les États américains), d’être consultée lorsque les juges et les procureurs sont nommés par l’autorité centrale, et d’avoir des relations économiques facilitées avec les régions voisines de la Russie. C’est tout. Quelque chose que le président Macron a promis de donner à la Corse et qu’il étudie toujours.

Et ces accords ont été sabotés depuis le début par Pyotr Porochenko, puis par Vladimir Zelensky. Tous deux, soit dit en passant, sont arrivés à la présidence en promettant la paix. Et tous deux ont menti. Ainsi, lorsque les accords de Minsk ont été sabotés au point que nous avons assisté à des tentatives de prise par la force de cette minuscule partie du Donbass, nous avons, comme l’a expliqué le président Poutine, à l’époque, proposé ces accords de sécurité à l’OTAN et aux États-Unis, qui les ont rejetés. Et lorsque le plan B a été lancé par l’Ukraine et ses sponsors, essayant de prendre cette partie du Donbass par la force, c’est alors que nous avons lancé l’opération militaire spéciale.

S’ils avaient mis en œuvre les accords de Minsk, l’Ukraine serait d’un seul tenant, moins la Crimée. Mais même à ce moment-là, lorsque les Ukrainiens, après le début de l’opération, ont proposé de négocier, nous avons accepté, il y a eu plusieurs rounds au Belarus, et un plus tard, ils se sont déplacés à Istanbul. À Istanbul, la délégation ukrainienne a déposé un document sur la table disant : «Voici les principes sur lesquels nous sommes prêts à nous mettre d’accord». Et nous avons accepté ces principes.

Carlson : Les principes de Minsk ?

Lavrov : Non. Les principes d’Istanbul. C’était en avril 2022.

Carlson : C’est vrai.

Lavrov : C’est-à-dire : Pas d’OTAN, mais des garanties de sécurité pour l’Ukraine, fournies collectivement avec la participation de la Russie. Et ces garanties de sécurité ne couvriraient pas la Crimée ni l’est de l’Ukraine. C’était leur proposition. Elle a été paraphée. Et le chef de la délégation ukrainienne à Istanbul, qui est maintenant le président de la faction Vladimir Zelensky au parlement, a récemment (il y a quelques mois) dans une interview, confirmé que c’était le cas. Sur la base de ces principes, nous étions prêts à rédiger un traité.

Mais ce monsieur qui dirigeait la délégation ukrainienne à Istanbul a déclaré que Boris Johnson leur avait rendu visite et leur avait dit de continuer à se battre. Ensuite, il y a eu…

Carlson : Mais Boris Johnson, au nom de…

Lavrov : Il a dit non. Mais le type qui a paraphé le document a dit que c’était Boris Johnson. D’autres disent que c’est le président Poutine qui a fait capoter l’accord à cause du massacre de Boutcha. Mais ils n’ont jamais mentionné d’autres massacres à Boutcha. Moi, je le fais. Et nous aussi.

D’une certaine manière, ils sont sur la défensive. Plusieurs fois au Conseil de sécurité des Nations unies, assis à la table avec Antonio Guterres, j’ai (l’année dernière et cette année) à l’Assemblée générale, soulevé la question de Boutcha et dit, les gars, c’est étrange que vous restiez silencieux au sujet de Boutcha, car vous avez été très loquaces lorsque l’équipe de la BBC s’est retrouvée dans la rue où se trouvaient les corps. J’ai demandé si nous pouvions obtenir les noms des personnes dont les corps ont été diffusés par la BBC. Silence total. Je me suis adressé personnellement à Antonio Guterres en présence des membres du Conseil de sécurité. Il n’a pas répondu. Puis, lors de ma conférence de presse à New York après la fin de l’Assemblée générale en septembre dernier, j’ai demandé à tous les correspondants : les gars, vous êtes des journalistes. Vous n’êtes peut-être pas des journalistes d’investigation, mais les journalistes s’intéressent normalement à la vérité. Et Boutcha qui a été diffusée dans tous les médias pour condamner la Russie, n’intéresse personne – ni les hommes politiques, ni les fonctionnaires de l’ONU. Et maintenant, même les journalistes. Je leur ai demandé, lorsque je leur ai parlé en septembre, s’ils pouvaient, en tant que professionnels, essayer d’obtenir les noms des personnes dont les corps ont été montrés à Boutcha. Aucune réponse.

Tout comme nous n’avons pas de réponse à la question de savoir où se trouvent les résultats de l’analyse médicale d’Alexeï Navalny, décédé récemment, mais qui a été soigné en Allemagne à l’automne 2020. Lorsqu’il s’est senti mal à bord d’un avion survolant la Russie, l’avion a atterri. Il a été soigné par les médecins russes en Sibérie. Puis les Allemands ont voulu l’emmener. Nous avons immédiatement autorisé l’avion à venir. Ils l’ont emmené. En moins de 24 heures, il était en Allemagne. Et les Allemands ont continué à dire que nous l’avions empoisonné. Et maintenant, l’analyse a confirmé qu’il avait été empoisonné. Nous avons demandé que les résultats des tests nous soient communiqués. Ils ont répondu que non, nous les donnons à l’organisation sur les armes chimiques. Nous sommes allés à cette organisation, dont nous sommes membres, et nous avons dit : «Pouvez-vous nous montrer ce document, car il s’agit de notre citoyen, nous sommes accusés de l’avoir empoisonné ?» Ils nous ont répondu : «les Allemands nous ont dit de ne pas vous le donner». Ils n’ont rien trouvé à l’hôpital civil, et l’annonce de son empoisonnement a été faite après qu’il ait été traité à l’hôpital militaire de la Bundeswehr. Il semble donc que ce secret ne tient pas…

Carlson : Comment Navalny est-il mort ?

Lavrov : Il est mort en Russie pendant sa peine. D’après ce qui a été rapporté, il ne se sentait pas bien de temps en temps. C’est une autre raison pour laquelle nous avons continué à demander aux Allemands : Pouvez-vous nous montrer les résultats que vous avez trouvés ? Parce que nous n’avons pas trouvé ce qu’ils ont trouvé. Et ce qu’ils lui ont fait, je ne le sais pas.

Carlson : Ce que les Allemands lui ont fait ?

Lavrov : Oui, parce qu’ils n’expliquent rien à personne, y compris à nous. Ou peut-être qu’ils expliquent aux Américains. C’est peut-être crédible.

Mais ils ne nous ont jamais dit comment ils l’ont traité, ce qu’ils ont trouvé et quelles méthodes ils ont utilisées.

Carlson : Comment pensez-vous qu’il est mort ?

Lavrov : Je ne suis pas médecin. Mais pour que quelqu’un puisse deviner, et même pour que les médecins essaient de deviner, il faut qu’ils aient des informations. Et si la personne a été emmenée en Allemagne pour y être soignée après avoir été empoisonnée, les résultats des tests ne peuvent pas être secrets.

Nous n’avons toujours rien de crédible sur le sort des Skripal – Serguei Skripal et sa fille. Les informations ne nous sont pas fournies. Il est notre citoyen, elle est notre citoyenne. Nous avons tous les droits et les conventions auxquelles le Royaume-Uni est partie pour obtenir des informations.

Carlson : Pourquoi pensez-vous que Boris Johnson, ancien Premier ministre du Royaume-Uni, aurait interrompu le processus de paix à Istanbul ? Au nom de qui a-t-il agi de la sorte ?

Lavrov : Je l’ai rencontré à plusieurs reprises et je ne serais pas surpris qu’il soit motivé par un désir immédiat ou par une stratégie à long terme. Il n’est pas très prévisible.

Carlson : Mais pensez-vous qu’il agissait au nom du gouvernement américain, au nom de l’administration Biden, ou qu’il le faisait de manière indépendante ?

Lavrov : Je n’en sais rien. Et je ne devinerais pas. Le fait que les Américains et les Britanniques soient à la tête de cette «situation» est évident.

Aujourd’hui, il devient également évident que certaines capitales sont fatiguées et que l’on parle de temps à autre du fait que les Américains aimeraient laisser les Européens s’en occuper et se concentrer sur quelque chose de plus important. Je n’en doute pas.

Nous jugerions sur la base d’étapes spécifiques. Il est évident, cependant, que l’administration Biden aimerait laisser un héritage à l’administration Trump aussi mauvais que possible.

Et similaire à ce que Barack Obama a fait à Donald Trump lors de son premier mandat. Puis fin décembre 2016, le président Obama a expulsé des diplomates russes. Tout juste fin décembre. 120 personnes avec des membres de leur famille. Il l’a fait exprès. Il leur a demandé de partir le jour où il n’y avait pas de vol direct entre Washington et Moscou. Ils ont donc dû se rendre à New York en bus avec tous leurs bagages, leurs enfants, etc.

Dans le même temps, le président Obama a annoncé la saisie de pièces de propriété diplomatique de la Russie. Et nous n’avons toujours pas pu venir voir ce qu’il en est de ces biens russes.

Carlson : Quel était le bien ?

Lavrov : Diplomatique. Ils ne nous ont jamais autorisés à venir les voir, en vertu de toutes les conventions. Ils se contentent de dire que ces pièces ne sont pas couvertes par l’immunité diplomatique, ce qui est une décision unilatérale qui n’a jamais été confirmée par un tribunal international.

Carlson : Vous pensez donc que l’administration Biden fait à nouveau quelque chose de similaire à la future administration Trump.

Lavrov : Car cet épisode d’expulsion et de saisie de biens n’a certainement pas créé un terrain prometteur pour le début de nos relations avec l’administration Trump. Je pense donc qu’ils font de même.

Carlson : Mais cette fois-ci, le président Trump a été élu sur la promesse explicite de mettre fin à la guerre en Ukraine. Je veux dire par là qu’il l’a dit lors de ses différentes apparitions. Il semble donc qu’il y ait de l’espoir pour une résolution. Quelles sont les conditions que vous accepteriez ?

Lavrov : J’ai fait allusion à ces termes. Lorsque le président Poutine s’est exprimé au ministère des Affaires étrangères le 14 juin il a réaffirmé que nous étions prêts à négocier sur la base des principes convenus à Istanbul et rejetés par Boris Johnson, selon la déclaration du chef de la délégation ukrainienne.

Le principe clé est le statut hors bloc de l’Ukraine. Et nous serions prêts à faire partie du groupe de pays qui fourniraient des garanties de sécurité collective à l’Ukraine.

Carlson : Mais pas d’OTAN ?

Lavrov : Pas d’OTAN. Pas de bases militaires, pas d’exercices militaires sur le sol ukrainien avec la participation de troupes étrangères. Pas de bases militaires, pas d’exercices militaires sur le sol ukrainien avec la participation de troupes étrangères. Et c’est quelque chose qu’il a réitéré. Mais bien sûr, a-t-il dit, nous étions en avril 2022, un certain temps s’est écoulé et les réalités sur le terrain devront être prises en compte et acceptées.

Les réalités sur le terrain ne sont pas seulement la ligne de contact, mais aussi les changements dans la Constitution russe Après le référendum organisé dans les républiques de Donetsk et de Lougansk ainsi que dans les régions de Kherson et de Zaporojié, la Constitution russe a été modifiée. Ces régions font désormais partie de la Fédération de Russie, conformément à la Constitution. C’est une réalité.

Et bien sûr, nous ne pouvons tolérer un accord qui maintiendrait la législation interdisant la langue russe, les médias russes, la culture russe, l’église orthodoxe ukrainienne, car il s’agit d’une violation des obligations de l’Ukraine en vertu de la Charte des Nations unieset il faut faire quelque chose à ce sujet. Et le fait que l’Occident (depuis que cette offensive législative russophobe a commencé en 2017) ait été totalement silencieux et qu’il le reste jusqu’à présent, nous devrions bien sûr y prêter attention d’une manière très spéciale.

Carlson : La levée des sanctions à l’encontre de la Russie seraient-elles une condition ?

Lavrov : Vous savez, je dirais que de nombreuses personnes en Russie aimeraient en faire une condition. Mais plus nous vivons sous le coup des sanctions, plus nous comprenons qu’il vaut mieux compter sur soi-même et développer des mécanismes, des plateformes de coopération avec des pays «normaux» qui ne nous sont pas hostiles et qui ne mélangent pas les intérêts économiques et les politiques, et surtout la politique. Et nous avons beaucoup appris après le début des sanctions.

Les sanctions ont commencé sous le président Obama. Elles se sont poursuivies de manière très importante sous le premier mandat de Donald Trump. Et ces sanctions sous l’administration Biden sont absolument sans précédent.

Mais ce qui ne vous tue pas vous rend plus fort, vous savez. Ils ne nous tueraient jamais, alors ils nous rendent plus forts.

Carlson : Et de pousser la Russie vers l’Est. Je pense donc que les mêmes décideurs politiques à Washington avaient pour vision, il y a 20 ans, d’intégrer la Russie dans un bloc occidental, en quelque sorte pour l’équilibrer face à la montée de l’Est. Mais il semble que ce ne soit pas le cas. Pensez-vous que cela soit encore possible ?

Lavrov : Je ne pense pas que ce soit le cas. Lorsque le président Poutine s’est récemment exprimé au Club Valdai devant des politologues et des experts, il a déclaré que nous ne reviendrions jamais à la situation du début de l’année 2022. C’est à ce moment-là qu’il s’est rendu compte (pour lui-même, apparemment, non seulement lui, mais aussi lui, qui en a parlé publiquement) que toutes les tentatives d’être sur un pied d’égalité avec l’Occident ont échoué.

Cela a commencé après la disparition de l’Union soviétique. C’était l’euphorie, nous faisions désormais partie du «monde libéral», du monde démocratique, de la «fin de l’histoire». Mais très vite, la plupart des Russes ont compris que, dans les années 1990, nous étions traités – au mieux comme un partenaire junior, peut-être même pas comme un partenaire – mais comme un endroit où l’Occident peut organiser les choses comme il l’entend, conclure des accords avec des oligarques, acheter des ressources et des actifs. Et puis, les Américains ont probablement décidé que la Russie était dans leur poche. Boris Eltsine, Bill Clinton, copains, riant, plaisantant.

Mais même à la fin du mandat de Boris Eltsine, il a commencé à envisager que ce n’était pas ce qu’il voulait pour la Russie. Et je pense que cela a été très évident lorsqu’il a nommé Vladimir Poutine premier ministre, puis l’a quitté plus tôt, et a béni Vladimir Poutine comme son successeur pour les élections qui se préparaient et que Poutine a remportées.

Mais lorsque Vladimir Poutine est devenu président, il s’est montré très ouvert à la coopération avec l’Occident. Il en parle d’ailleurs assez régulièrement lorsqu’il s’entretient avec des journalistes ou lors d’événements internationaux.

J’étais présent lorsqu’il a rencontré George Bush Jr. et Barack Obama. Après la réunion de l’OTAN à Bucarest, qui a été suivie d’une réunion au sommet entre l’OTAN et la Russie en 2008, lorsqu’ils ont annoncé que la Géorgie et l’Ukraine feraient partie de l’OTAN. Et ils ont essayé de nous vendre cela. Nous avons demandé : pourquoi ? Il y a eu un déjeuner et le président Poutine a demandé quelle en était la raison. Bonne question. Et ils ont répondu que ce n’était pas obligatoire. Comment cela se fait-il ?

Pour entamer le processus d’adhésion à l’OTAN, il faut une invitation officielle. Il s’agit d’un slogan : l’Ukraine et la Géorgie feront partie de l’OTAN. Mais ce slogan est devenu une obsession pour certaines personnes à Tbilissi, tout d’abord lorsque Mikhaïl Saakashvili a perdu la raison et a commencé la guerre contre son propre peuple sous la protection de la mission de l’OSCE avec les forces de maintien de la paix russes sur le terrain. Le fait qu’il ait lancé cette guerre a été confirmé par l’enquête de l’Union européenne, qui a conclu qu’il avait donné l’ordre de commencer.

Pour les Ukrainiens, cela a pris un peu plus de temps. Ils cultivaient cet état d’esprit pro-occidental. Au fond, être pro-occidental n’est pas mauvais. Être pro-oriental n’est pas mal non plus. Ce qui est mauvais, c’est que l’on dit aux gens : soit vous êtes avec moi, soit vous êtes mon ennemi.

Que s’est-il passé avant le coup d’État en Ukraine ? En 2013, le président ukrainien Viktor Ianoukovitch a négocié avec l’Union européenne un accord d’association qui annulerait les droits de douane sur la plupart des marchandises ukrainiennes destinées à l’Union européenne et vice-versa. À un moment donné, lorsqu’il a rencontré ses homologues russes, nous lui avons dit que l’Ukraine faisait partie de la zone de libre-échange de la Communauté des États indépendants. Pas de droits de douane pour tout le monde. La Russie a négocié un accord avec l’Organisation mondiale du commerce pendant 17 ans, principalement parce qu’elle a négocié avec l’Union européenne. Et nous avons obtenu une certaine protection pour nombre de nos secteurs, l’agriculture et d’autres. Nous avons expliqué aux Ukrainiens que si leurs échanges avec l’Union européenne étaient réduits à zéro, nous devrions protéger notre frontière douanière avec l’Ukraine. Dans le cas contraire, les produits européens à tarif zéro seraient inondés et nuiraient à nos industries, que nous avons essayé de protéger et pour lesquelles nous avons accepté une certaine protection. Et nous avons suggéré à l’Union européenne : les gars, l’Ukraine est notre voisin commun. Vous voulez améliorer vos échanges avec l’Ukraine. Nous voulons la même chose. L’Ukraine veut avoir des marchés à la fois en Europe et en Russie. Pourquoi ne pas nous asseoir tous les trois et en discuter comme des adultes ? Le chef de la Commission européenne était le Portugais José Manuel Barroso. Il a répondu que ce que nous faisons avec l’Ukraine ne vous regarde pas.

Le président ukrainien Viktor Yanukovych a alors convoqué ses experts. Ils lui ont dit qu’il ne serait pas très bon d’ouvrir la frontière avec l’Union européenne, mais que la frontière douanière avec la Russie serait fermée. Et ils vérifieraient, vous savez, ce qui arrive. De sorte que le marché russe ne soit pas affecté.

Il a donc annoncé en novembre 2013 qu’il ne pouvait pas signer l’accord immédiatement et a demandé à l’Union européenne de le reporter à l’année prochaine. C’est ce qui a déclenché le Maidan, qui a été immédiatement renversé et terminé par le coup d’État.

Ce que je veux dire, c’est que c’est l’un ou l’autre. En fait, le premier coup d’État a eu lieu en 2004, lorsqu’après le second tour des élections, le même Viktor Yanukovych a remporté la présidence. L’Occident a fait pression sur la Cour constitutionnelle de l’Ukraine pour qu’elle décide qu’il devait y avoir un troisième tour. La Constitution ukrainienne stipule qu’il ne peut y avoir que deux tours. Mais la Cour constitutionnelle, sous la pression de l’Occident, a violé la Constitution pour la première fois. Le candidat pro-occidental a été choisi. À l’époque, alors que tout cela se déroulait et bouillonnait, les dirigeants européens déclaraient publiquement que le peuple ukrainien devait décider s’il était avec nous ou avec la Russie.

Carlson : Mais c’est la façon dont les grands pays se comportent. Je veux dire qu’il y a certaines orbites, et maintenant ce sont les BRICS contre l’OTAN, les États-Unis contre la Chine. Vous semblez dire que l’alliance russo-chinoise est permanente.

Lavrov : Nous sommes voisins. Et bien sûr, la géographie est très importante.

Carlson : Mais vous êtes également voisins de l’Europe occidentale. Et vous en faites partie, de fait.

Lavrov : C’est par l’Ukraine que l’Europe de l’Ouest veut arriver à nos frontières.

Des plans ont été discutés presque ouvertement pour installer des bases navales britanniques dans la mer d’Azov. La Crimée était dans le collimateur. On rêvait de créer une base de l’OTAN en Crimée, etc.

Nous avons été très amicaux avec la Finlande, par exemple. Du jour au lendemain, les Finlandais sont revenus aux premières années de préparation de la Seconde Guerre mondiale, lorsqu’ils étaient les meilleurs alliés d’Hitler. Et toute cette neutralité, toute cette amitié, le fait d’aller au sauna ensemble, de jouer au hockey ensemble, tout cela a disparu du jour au lendemain. Alors peut-être que c’était au fond de leur cœur, et que la neutralité leur pesait, et que les subtilités leur pesaient. Je n’en sais rien.

Carlson : Ils sont furieux de la «guerre d’hiver». C’est tout à fait possible.

Pouvez-vous négocier avec Zelensky ? Vous avez souligné qu’il a dépassé son mandat. Il n’est plus le président démocratiquement élu de l’Ukraine. Le considérez-vous donc comme un partenaire approprié pour les négociations ?

Lavrov : Le président Poutine a également abordé cette question à plusieurs reprises. En septembre 2022, au cours de la première année de l’opération militaire spéciale, Vladimir Zelensky, convaincu qu’il dicterait les termes de la situation à l’Occident, a signé un décret interdisant toute négociation avec le gouvernement de Poutine.

Lors des événements publics qui ont suivi cet épisode, on a demandé au président Vladimir Poutine pourquoi la Russie n’était pas prête à négocier. Il a répondu : «Ne mettez pas les choses à l’envers. Nous sommes prêts à négocier, à condition que ce soit sur la base de l’équilibre des intérêts, demain. Mais Vladimir Zelensky a signé ce décret interdisant les négociations. Pour commencer, pourquoi ne pas lui dire de l’annuler publiquement ? Ce serait le signal qu’il veut négocier. Au lieu de cela, Vladimir Zelensky a inventé sa «formule de paix». Dernièrement, elle a été complétée par un «plan de victoire». Ils continuent à dire, nous savons ce qu’ils disent lorsqu’ils rencontrent les ambassadeurs de l’Union européenne et dans d’autres formats, ils disent pas d’accord si l’accord n’est pas à nos conditions.

Je vous ai dit qu’ils préparent actuellement le deuxième sommet sur la base de cette formule de paix et qu’ils n’hésitent pas à dire que nous inviterons la Russie à présenter l’accord que nous avons déjà conclu avec l’Occident.

Lorsque nos collègues occidentaux disent parfois qu’il n’y a rien sur l’Ukraine sans l’Ukraine, cela implique que tout ce qui concerne la Russie n’a rien à voir avec la Russie. Car ils discutent du type de conditions que nous devons accepter.

D’ailleurs, récemment, ils ont déjà violé, tacitement, le concept «rien sur l’Ukraine sans l’Ukraine». Il y a des passes, il y a des messages. Ils connaissent notre position. Nous ne jouons pas un double jeu. Ce que le président Poutine a annoncé est l’objectif de notre opération. C’est juste. C’est tout à fait conforme à la Charte des Nations unies. Tout d’abord, les droits : les droits linguistiques, les droits des minorités, les droits des minorités nationales, les droits religieux, et c’est tout à fait conforme aux principes de l’OSCE.

L’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe est toujours en vie. Plusieurs sommets de cette organisation ont clairement affirmé que la sécurité doit être indivisible, que personne ne doit étendre sa sécurité au détriment de celle des autres et, surtout, qu’aucune organisation de l’espace euro-atlantique ne doit revendiquer une position dominante. L’OSCE l’a confirmé pour la dernière fois en 2010.

L’OTAN faisait exactement le contraire. Notre position est donc légitime. Pas d’OTAN à nos portes parce que l’OSCE a convenu que cela ne devrait pas être le cas si cela nous fait du tort. Et s’il vous plaît, rétablissez les droits des Russes.

Carlson : Selon vous, qui a pris les décisions de politique étrangère aux États-Unis ? C’est une question qui se pose aux États-Unis. Qui prend ces décisions ?

Lavrov : Je ne spéculerais pas là-dessus. Je n’ai pas vu Antony Blinken depuis des années. Quand était-ce la dernière fois ? Il y a deux ans, je crois, au sommet du G20. C’était à Rome ou ailleurs ? En marge. Je représentais le président Poutine. Son assistant est venu me voir pendant une réunion et m’a dit qu’Antony voulait parler juste dix minutes. J’ai quitté la salle. Nous nous sommes serré la main et il a parlé de la nécessité d’une désescalade, etc. J’espère qu’il ne sera pas fâché contre moi parce que je révèle cela. Mais nous nous sommes rencontrés devant de nombreuses personnes présentes dans la salle, et j’ai dit : «Nous ne voulons pas d’escalade. Vous voulez infliger une défaite stratégique à la Russie». Il m’a répondu : «Non. Il ne s’agit pas d’une défaite stratégique globale. Il ne s’agit que de l’Ukraine».

Carlson : Vous ne lui avez pas parlé depuis ?

Lavrov : Non.

Carlson : Avez-vous parlé à des fonctionnaires de l’administration Biden depuis lors ?

Lavrov : Je ne veux pas ruiner leur carrière.

Carlson : Mais avez-vous eu des conversations sérieuses ?

Lavrov : Non, pas du tout. Lorsque je rencontre dans des événements internationaux l’une ou l’autre personne que je connais, un Américain, certains me disent bonjour, certains échangent quelques mots, mais je ne m’impose jamais. Cela devient contagieux lorsque quelqu’un voit un Américain me parler ou un Européen me parler. Les Européens s’enfuient quand ils me voient. Lors du dernier G20, c’était ridicule. Des gens adultes, des gens mûrs. Ils se comportent comme des enfants. C’est tellement puéril. C’est incroyable.

Carlson : Vous avez dit qu’en 2016, en décembre, dans les derniers instants de l’administration Biden, ce dernier a rendu les relations entre les États-Unis et la Russie plus difficiles.

Lavrov : Obama. Biden était vice-président.

Carlson : Exactement. Je suis vraiment désolé.

L’administration Obama a laissé un tas de bombes, en gros, pour la future administration Trump.

Au cours du mois qui a suivi l’élection, toutes sortes de choses se sont produites sur le plan politique dans les États limitrophes de cette région. En Géorgie, au Belarus, en Roumanie et, bien sûr, de façon plus dramatique en Syrie, vous avez des troubles.

Cela semble-t-il faire partie des efforts déployés par les États-Unis pour rendre la résolution plus difficile ?

Lavrov : Il n’y a rien de nouveau, franchement. Parce que les États-Unis, historiquement, en matière de politique étrangère, ont été motivés par le fait de créer des problèmes et de voir ensuite s’ils pouvaient pêcher dans l’eau boueuse.

L’agression irakienne, l’aventure libyenne : Destruction d’États, essentiellement. Fuite de l’Afghanistan. Ils essaient maintenant de revenir par la petite porte, en utilisant les Nations unies pour organiser un «événement» où les États-Unis peuvent être présents, malgré le fait qu’ils ont laissé l’Afghanistan en très mauvais état et qu’ils ont saisi de l’argent et ne veulent pas le rendre.

Je pense que si l’on analyse les étapes de la politique étrangère américaine, les aventures, la plupart d’entre elles sont le bon mot – le modèle. Ils créent des problèmes, puis ils voient comment les utiliser.

Lorsque l’OSCE surveille les élections, lorsqu’elle le faisait en Russie, les rapports étaient toujours très négatifs, et dans d’autres pays également, la Biélorussie, le Kazakhstan. Cette fois-ci, en Géorgie, la mission de surveillance de l’OSCE a présenté un rapport positif. Et ce rapport est ignoré. Ainsi, lorsque vous avez besoin d’approuver les procédures, vous le faites lorsque vous aimez les résultats de l’élection. Si vous n’aimez pas les résultats des élections, vous les ignorez.

C’est comme lorsque les États-Unis et d’autres pays occidentaux ont reconnu la déclaration unilatérale d’indépendance du Kosovo, ils ont dit que c’était l’autodétermination qui était mise en œuvre. Il n’y a pas eu de référendum au Kosovo, mais une déclaration unilatérale d’indépendance. D’ailleurs, après cela, les Serbes ont saisi la Cour internationale de justice, qui a statué (normalement, elle n’est pas très précise dans ses jugements, mais elle a statué) que lorsqu’une partie d’un territoire déclare son indépendance, celle-ci ne doit pas nécessairement être approuvée par les autorités centrales.

Et lorsque, quelques années plus tard, les Criméens ont organisé un référendum à l’invitation de nombreux observateurs internationaux, non pas d’organisations internationales, mais de parlementaires d’Europe, d’Asie et de l’espace post-soviétique, ils ont déclaré : «Non, nous ne pouvons pas accepter cela, car il s’agit d’une violation de l’intégrité territoriale».

Vous savez, vous choisissez. La Charte des Nations Unies n’est pas un menu. Il faut la respecter dans son intégralité.

Carlson : Qui paie les rebelles qui ont pris une partie d’Alep ? Le gouvernement Assad risque-t-il de tomber ? Que se passe-t-il exactement, selon vous, en Syrie ?

Lavrov : Nous avions un accord lorsque la crise a commencé. Nous avons organisé le processus d’Astana (Russie, Turquie et Iran). Nous nous rencontrons régulièrement. Une autre réunion est prévue avant la fin de l’année ou au début de l’année prochaine, pour discuter de la situation sur le terrain.

Les règles du jeu consistent à aider les Syriens à s’entendre et à empêcher les menaces séparatistes de se renforcer. C’est ce que font les Américains dans l’est de la Syrie lorsqu’ils épaulent certains séparatistes kurdes en utilisant les bénéfices des ventes de pétrole et de céréales, les ressources qu’ils occupent.

Ce format d’Astana est une combinaison utile de joueurs, si vous voulez. Nous sommes très inquiets. Et lorsque cela s’est produit, avec Alep et ses environs, j’ai eu une conversation avec le ministre turc des affaires étrangères et avec un collègue iranien. Nous avons convenu d’essayer de nous rencontrer cette semaine. Avec un peu de chance, à Doha, en marge de cette conférence internationale. Nous aimerions discuter de la nécessité de revenir à une mise en œuvre stricte des accords sur la région d’Idlib, car la zone de désescalade d’Idlib est l’endroit d’où les terroristes sont partis pour s’emparer d’Alep. Les accords conclus en 2019 et 2020 ont permis à nos amis turcs de contrôler la situation dans la zone de désescalade d’Idlib et de séparer le Hayat Tahrir al-Sham (ex-Nusra) de l’opposition, qui n’est pas terroriste et qui coopère avec la Turquie.

Un autre accord portait sur l’ouverture de la route M5 reliant Damas à Alep, qui est désormais entièrement occupée par les terroristes. En tant que ministres des affaires étrangères, nous discuterons donc de la situation, si tout va bien, vendredi prochain. Les militaires des trois pays et les responsables de la sécurité sont en contact les uns avec les autres.

Carlson :  Mais les groupes islamistes, les terroristes que vous venez de décrire, qui les soutient ?

Lavrov : Nous disposons d’un certain nombre d’informations. Nous aimerions discuter avec tous nos partenaires dans ce processus de la manière de couper les canaux de financement et d’armement.

Les informations qui circulent et qui sont du domaine public mentionnent entre autres les Américains et les Britanniques. Certains disent qu’Israël a intérêt à ce que la situation s’aggrave. De sorte que Gaza ne soit pas surveillée de très près. C’est un jeu compliqué. De nombreux acteurs sont impliqués. J’espère que le contexte que nous prévoyons pour cette semaine contribuera à stabiliser la situation.

Carlson : Que pensez-vous de Donald Trump ?

Lavrov : Je l’ai rencontré à plusieurs reprises lors de ses rencontres avec le président Poutine et lorsqu’il m’a reçu à deux reprises dans le bureau ovale à l’occasion d’une visite pour des entretiens bilatéraux.

Je pense que c’est une personne très forte. Une personne qui veut des résultats. Qui n’aime pas la procrastination. C’est mon impression. Il est très amical dans les discussions. Mais cela ne veut pas dire qu’il est prorusse comme certains essaient de le présenter. Le montant des sanctions que nous avons reçues sous l’administration Trump était très important.

Nous respectons tout choix fait par les citoyens lorsqu’ils votent. Nous respectons le choix du peuple américain. Comme l’a dit le président Poutine, nous sommes et nous avons toujours été ouverts aux contacts avec l’administration actuelle. Nous espérons que lorsque Donald Trump sera investi, nous nous comprendrons. La balle, comme l’a dit le président Poutine, est de leur côté. Nous n’avons jamais rompu nos contacts, nos liens dans l’économie, le commerce, la sécurité, quoi que ce soit.

Carlson : Ma dernière question est la suivante : Dans quelle mesure craignez-vous sincèrement une escalade du conflit entre la Russie et les États-Unis, sachant ce que vous savez ?

Lavrov : Nous avons commencé par cette question, plus ou moins.

Carlson : Il semble que ce soit la question centrale.

Lavrov : Les Européens murmurent entre eux que ce n’est pas à Vladimir Zelensky de dicter les termes de l’accord – c’est aux États-Unis et à la Russie de le faire.

Je ne pense pas que nous devrions présenter nos relations comme si deux hommes décidaient pour tout le monde. Ce n’est pas du tout notre style.

Nous préférons les manières qui dominent dans les pays du BRICS et dans l’Organisation de coopération de Shanghai où le principe de l’égalité souveraine des États de la Charte des Nations unies est réellement incarné.

Les États-Unis n’ont pas l’habitude de respecter l’égalité souveraine des États. Par exemple lorsque les États-Unis disent qu’ils ne peuvent pas permettre à la Russie de l’emporter sur l’Ukraine parce que cela saperait notre ordre mondial fondé sur des règles. Et l’ordre mondial fondé sur des règles, c’est la domination américaine.

Soit dit en passant, l’OTAN, du moins sous l’administration Biden, lorgne l’ensemble du continent eurasien. Les stratégies indo-pacifiques, la mer de Chine méridionale, la mer de Chine orientale, sont déjà à l’ordre du jour de l’OTAN. L’OTAN y déplace des infrastructures. L’AUKUS, la construction d’un «quatuor» Indo-Pacifique (Japon, Australie, Nouvelle-Zélande, Corée du Sud). Les États-Unis, la Corée du Sud et le Japon construisent une alliance militaire comportant des éléments nucléaires. Jens Stoltenberg, l’ancien secrétaire général de l’OTAN, a déclaré l’année dernière, après le sommet, que la sécurité atlantique était indissociable de la sécurité indopacifique. Lorsqu’on lui a demandé si cela signifiait que vous alliez au-delà de la défense territoriale, il a répondu : «Non, cela ne va pas au-delà de la défense territoriale, mais pour défendre notre territoire, nous devons y être présents». Cet élément de préemption est de plus en plus présent.

Nous ne voulons pas de guerre avec qui que ce soit. Et comme je l’ai dit, cinq États nucléaires ont déclaré au plus haut niveau en janvier 2022 que nous ne voulons pas de confrontation les uns avec les autres et que nous respecterons les intérêts et les préoccupations de chacun en matière de sécurité. Ils ont également déclaré que la guerre nucléaire ne peut jamais être gagnée et que, par conséquent, la guerre nucléaire n’est pas possible.

La même chose a été réitérée au niveau bilatéral entre la Russie et les États-Unis, Poutine-Biden, lorsqu’ils se sont rencontrés en 2021 à Genève en juin. Fondamentalement, ils ont reproduit la déclaration de Reagan-Gorbatchev de 1987 «pas de guerre nucléaire». C’est absolument dans notre intérêt vital, et nous espérons que c’est également dans l’intérêt vital des États-Unis.

Je dis cela parce qu’il y a quelque temps, John Kirby, qui est le coordinateur de la communication de la Maison-Blanche, répondait à des questions sur l’escalade et sur la possibilité d’utiliser des armes nucléaires. Il a répondu : «Oh, non, nous ne voulons pas d’escalade, car s’il y a un élément nucléaire, nos alliés européens en souffriraient». Ainsi, même mentalement, il exclut que les États-Unis puissent souffrir. C’est ce qui rend la situation un peu risquée. Si cette mentalité prévaut, des mesures imprudentes pourraient être prises, ce qui n’est pas bon signe.

Carlson : Ce que vous dites, c’est que les décideurs américains imaginent qu’il pourrait y avoir un échange nucléaire qui n’affecterait pas directement les États-Unis, et vous dites que ce n’est pas vrai.

Lavrov : C’est ce que j’ai dit, oui. Mais les professionnels de la dissuasion, de la politique de dissuasion nucléaire, savent très bien qu’il s’agit d’un jeu très dangereux. Et parler d’échanges limités de frappes nucléaires est une invitation au désastre, ce que nous ne voulons pas.

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source : Antipresse

Réponses du président Poutine aux questions des journalistes à Astana

  1. Après sa visite étatique au Kazakhstan et sa participation au sommet de l’OTSC, V. Poutine a répondu aux questions des journalistes.

V. Poutine : Bonsoir. Je vous écoute.

Q : Vladimir Vladimirovitch, bonjour. Olga Knyazeva, Chaîne Première.

Votre visite étatique au Kazakhstan touche à sa fin. Vous avez été accueilli partout au plus haut niveau. Comment évaluez-vous les perspectives de coopération qui en découlent ?

V. Poutine : Bien. Comme je l’ai déjà dit à plusieurs reprises, le Kazakhstan n’est pas seulement notre allié, mais un partenaire fiable. Il est très important que le Kazakhstan se développe avec succès sous la direction du président Tokaïev Kassym-Jomart Kemelevitch, en affichant une croissance solide, très stable et fiable. La situation sociale et politique du pays est stable, ce qui est très important pour la planification du travail dans la sphère économique, pour les investissements.

Nous avons fait des milliards d’investissements dans l’économie du Kazakhstan, je l’ai déjà mentionné, le chiffre d’affaires commercial est proche à 30 milliards, et il est en constante augmentation. Les domaines de notre coopération se sont formés traditionnellement. Il s’agit de l’espace, de l’énergie et, aujourd’hui, des hautes technologies. Il est désormais possible d’étendre la coopération à des projets énergétiques dans le domaine de l’énergie nucléaire, puisque nous travaillons déjà ensemble. Le Kazakhstan est un des plus grands producteurs d’uranium au monde, et nous sommes présents dans les gisements d’uranium du Kazakhstan. Dans le secteur industriel, nous avons de bonnes perspectives, en particulier dans le domaine de la coopération.

L’un des problèmes était et reste en partie le problème des règlements, mais nous avons déjà basculé plus de 80% de tous les règlements aux monnaies nationales. Cela facilite évidemment notre travail dans le domaine financier.

En outre, nous avons des liens humanitaires, de très bons contacts au niveau universel. Le Kazakhstan est pratiquement un pays russophone, vous l’avez sans doute ressenti vous-même. Et, hélas, il y a toujours beaucoup de gens qui ont leur propre opinion sur ce qu’il faut faire et comment il faut le faire, et qui critiquent les processus en cours, tant dans la société russienne que dans la société kazakhstanaise. Et cette position, cette critique ne correspond pas toujours aux intérêts des États, y compris de l’État russien. Elle n’est pas toujours favorable. À mon avis, nous devrions tout faire pour renforcer nos liens. Mais en aucun cas prendre des mesures qui détruiraient nos relations.

Par exemple, dans le secteur de l’énergie, nous avons des choses traditionnelles ici. Néanmoins, nous pouvons avoir de très grands projets dans le domaine du transfert de nos ressources énergétiques vers des pays tiers à travers le territoire du Kazakhstan. Et une situation traditionnelle s’est formée ici, lorsqu’une région du Kazakhstan manque de gaz naturel, tandis que d’autres territoires en ont en excès. Il est plus avantageux pour nous d’unir nos efforts, de fournir quelque chose au Kazakhstan, de recevoir quelque chose du Kazakhstan, compte tenu de l’étendue du territoire du Kazakhstan lui-même et de nos vastes territoires, que de développer cela directement sur notre propre territoire. Nous sommes donc des partenaires et des alliés naturels.

J’estime que nous avons de très bonnes perspectives d’avenir. Hier, nous avons discuté de ces perspectives de manière informelle avec le président Kassym-Jomart Kemelevitch au cours du dîner durant toute la soirée. Je le répète une fois de plus : Je les considère comme au suprême degré positives.

Q : Bonjour. Chaîne TV «Russie», Alexeï Golovko.

Vous avez déjà parlé de l’uranium. Mais quand même au Kazakhstan, un référendum a eu lieu en octobre dernier, au cours duquel l’écrasante majorité des citoyens s’est prononcée en faveur de la construction d’une centrale nucléaire. Pour autant que nous le sachions, l’entrepreneur n’est pas encore choisi. Avez-vous spécifiquement abordé ce sujet lors de votre entretien avec M. Tokaïev ? Peut-être avez-vous souligné les mérites de Rosatom d’une manière ou d’une autre ? Merci.

V. Poutine : Oui, bien sûr. Nous avons accordé beaucoup d’attention à ce sujet au cours des négociations d’hier, tant au sein du format restreint qu’au sein du format élargi. Si le Kazakhstan met en œuvre ses projets d’énergie nucléaire, il a bien sûr, comme tout client, le droit de choisir les solutions technologiques et les schémas financiers les plus acceptables pour lui-même.

Je pense que ce n’est pas par hasard si la société russienne Rosatom est la plus grande entreprise de ce type dans le monde, y compris en termes de nombre de centrales nucléaires en construction à l’étranger. Et pourquoi ? Parce que, comme je l’ai dit à maintes reprises, nous ne nous contentons pas de construire des centrales. En règle générale, nous créons une industrie dans le pays qui démarre dans ce type d’activité. Nous formons le personnel, nous fournissons les matériaux nécessaires, nous évacuons le combustible usé, etc. et nous encourageons le développement de la science dans le domaine nucléaire.

Et bien sûr, pour le président du Kazakhstan, pour nos collègues et amis kazakhstanais – ce type d’activité n’est pas nouveau pour eux, ils ne partent pas de zéro. Je le répète, nous avons même des entreprises, ils ont des entreprises pour l’extraction de l’uranium, pour travailler dans ce domaine. Ils savent parfaitement ce qu’ils veulent, ce qu’ils sont prêts à payer et ce qu’ils veulent obtenir. C’est pourquoi nous avons une conversation très professionnelle. Si nos partenaires, en l’occurrence en Kazakhstan, ont le besoin et le désir d’appliquer certaines solutions, y compris des solutions technologiques de pays tiers, de faire appel à leurs spécialistes pour travailler ensemble, c’est également possible, et Rosatom a une telle expérience de la coopération avec des partenaires étrangers. Nous en avons également discuté hier.

La décision finale appartient toujours au client. Mais je pense que notre coopération avec le Kazakhstan dans ce domaine est tout à fait possible. Il serait vraiment étrange que le Kazakhstan, qui possède les plus grandes réserves d’uranium au monde, n’utilise pas cette matière première, mais se contente de l’extraire et de l’exporter. C’est ce de quoi partent les dirigeants du Kazakhstan.

Par ailleurs, ce n’est probablement pas par hasard que Rosatom travaille actuellement dans 20 pays, je crois, ou construit 20 installations à l’étranger. Ses technologies modernes sont très performantes et les meilleures au monde en termes de sécurité. L’Agence internationale de l’énergie atomique, l’AIEA, le confirme également.

Je vous en prie.

Q : Nikita Korzoune, Compagnie de télévision NTV.

Vladimir Vladimirovitch, à l’issue du sommet d’aujourd’hui, comment évaluez-vous l’état de l’OTSC ? L’organisation serait-elle vivante ou morte ? Et que pensez-vous personnellement de l’«école buissonnière» de l’Arménie ?

V. Poutine : En ce qui concerne l’OTSC en tant que telle, bien sûr, elle n’est pas seulement vivante, elle est vivante et se développe, et tous les pays qui participent activement à son activité sont intéressés par le maintien de ces contacts, aujourd’hui comme à l’avenir.

La situation dans le monde est compliquée, et pas seulement à cause des événements qui se déroulent sur le théâtre ukrainien. Les choses vont-elles si bien en Asie ? Les événements aux frontières des pays de la Communauté [des États Indépendants] avec l’Afghanistan nous donnent-ils l’occasion de nous calmer et de ne prêter attention à rien ?

Des processus complexes sont en cours en Afghanistan. Nous espérons pouvoir construire des relations avec l’Afghanistan, et nous ne pouvons pas ignorer le fait que la situation se stabilise dans ce pays. Nous avons des relations avec les dirigeants actuels de l’Afghanistan et elles vont se développer. Récemment, le secrétaire du Conseil de sécurité de la Russie [Sergueï] Choïgou s’est rendu en Afghanistan, et il vient de me faire part des résultats. Mais la situation reste quand même complexe et nécessite notre attention particulière, y compris de la part de l’OTSC.

Après tout, l’OTSC ne s’occupe pas seulement de questions militaires, mais aussi de la lutte contre le crime organisé, le trafic de drogue, etc. L’OTSC a donc beaucoup à faire et les États membres y sont intéressés. C’est premièrement.

En ce qui concerne la position de l’Arménie. Chaque pays a le droit de choisir ce qu’il veut faire et comment il veut le faire dans le domaine de la sécurité. Je pense que la situation actuelle entre l’Arménie et l’OTSC est très probablement dictée par des processus politiques internes en Arménie elle-même. Et bien sûr, tout cela est lié aux conséquences de la crise au Karabakh. Mais je tiens à souligner que l’OTSC n’a rien à voir avec cela. Vous comprenez ? Je l’ai déjà dit à maintes reprises. Tout ce qui s’y passait n’avait rien à voir avec l’OTSC, car il n’y a eu d’aucune agression extérieure contre l’Arménie elle-même.

L’OTSC a pour vocation de protéger les pays membres contre une agression extérieure. Les événements liés au Karabakh ont leur propre spécificité. L’Arménie n’a pas reconnu le Karabakh en tant qu’État indépendant et n’incluait certainement pas le Karabakh dans le périmètre de son État. Ainsi, tout ce qui se passait au Karabakh n’avait pas de lien direct avec l’Arménie du point de vue légal. C’est pourquoi il est un peu étrange de prétendre que l’OTSC aurait dû combattre sur le territoire de cette enclave. N’est-ce pas ? Est-ce vrai ? Bien sûr que oui.

Néanmoins, il s’agit d’une question très sensible. Il est toujours facile de porter des jugements de l’extérieur. À l’intérieur, c’est toujours plus compliqué. Je le répète une fois de plus : à mon avis, tout pays membre de l’organisation doit déterminer lui-même ce qui correspond à ses intérêts nationaux. Et nous traiterons cela avec respect. C’est premièrement. Et deuxièmement, l’Arménie n’a pas annoncé son retrait. Du moins, pour le moment. Elle a dit qu’elle prenait une pause, mais en même temps elle soutient tous les documents qui sont adoptés au cours de notre entretien d’aujourd’hui, au cours de la session de négociations d’aujourd’hui, et elle attire notre attention sur ce point. Si c’est ainsi, cela signifie qu’il est possible que l’Arménie reprenne le travail à plein format dans le cadre de cette association. On verra.

Je le répète encore une fois : la décision finale appartient, bien sûr, au pays membre de l’organisation.

Q : Alïona Nefïodova, journal Izvestia.

Vladimir Vladimirovitch, aujourd’hui, lors de la réunion restreinte, vous avez déclaré que Moscou avait réagi à l’utilisation déjà prolongée de missiles américains pour des frappes sur le territoire de la Russie.

V. Poutine : Deux fois déjà après la riposte par l’«Orechnik». Après cela, les ATACMS ont été utilisés deux fois de plus dans l’oblast Kourien. Les dommages sont à vrai dire minimes, mais le fait même qu’ils soient utilisés, bien sûr… Nous ne pouvons pas l’ignorer, d’autant plus qu’il y a des dommages.

Q : Et faisant cela, vous avez souligné que Moscou était prêt à répondre à une nouvelle escalade de la part de l’Occident.

V. Poutine : Pas que souligné. J’ai dit que nous l’avions fait la nuit dernière.

Q : Oui, et dans ce contexte, une question. Quelles mesures la Russie est-elle prête à prendre dans ce contexte ? Et selon vous, y a-t-il des risques, l’utilisation de missiles occidentaux pour frapper le territoire de la Russie se poursuit-elle aujourd’hui ?

V. Poutine : Il faut demander aux Occidentaux qui le font s’ils ont l’intention de continuer à le faire ou non. Les frappes sur le territoire russien présentent-elles des risques – j’en ai parlé à maintes reprises. Bien sûr qu’il y en a. Parce que cela signifie une implication directe des pays occidentaux, leur implication dans un conflit armé. Peut-il être autrement ? Lorsque leurs spécialistes définissent des missions de vol, se transmettent entre eux des informations de renseignement et coordonnent avec eux-mêmes des frappes sur des installations situées sur le territoire de la Fédération russienne. Bien sûr qu’il y en a, de ces risques.

Et j’ai dit que cette nuit, ils ont reçu une réponse. Durant deux jours environ, nos Forces armées portaient le coup de riposte. Et aujourd’hui, il a été très complexe : 90 missiles ont été utilisés dans le coup, aussi que 100 véhicules de frappe sans pilote. Dix-sept installations sur le territoire ukrainien ont été touchées, de différente nature : installations militaires, militaro-industrielles, installations de soutien qui travaillent pour les forces armées et les entreprises industrielles de défense.

Et je tiens à le souligner une fois de plus, je tiens à le répéter maintenant : bien sûr, nous répondrons à de tels actes d’agression contre la Fédération russienne. Comment, quand et avec quelles armes – cela dépendra des cibles que l’État-major général du ministère de la défense choisira, car pour chaque cible son propre instrument adapté à ces fins doit être utilisé, l’une ou l’autre arme.

Eh bien, par exemple, il semblerait inutile d’envoyer un missile hypersonique sur une cible apparemment insignifiante, de faible volume, car cela reviendrait à tirer sa poudre aux moineaux. Mais nous utiliserons les moyens dont nous disposons sur des cibles significatives, y compris – je l’ai dit aussi – nous n’excluons pas l’utilisation de l’«Orechnik» sur des installations militaro-industrielles ou des centres de prise des décisions, y compris à Kiev. Étant donné que les autorités kieviennes poursuivent aujourd’hui, comme je l’ai dit, leurs tentatives de frapper nos installations d’importance vitale, y compris à Saint-Pétersbourg et à Moscou.

Q : Bonsoir ! Pavel Zaroubine, chaîne TV «Russie».

Oui, vous nous avez déjà beaucoup parlé de l’«Orechnik» aujourd’hui, mais voilà que les médias occidentaux affirment qu’il n’y avait pas d’explosifs dans l’ogive de l’«Orechnik». Et si c’est vrai, qu’est-ce que cela signifie ?

Et aussi, pouvez-vous nous donner d’autres détails sur l’«Orechnik» ? Et qu’en est-il avec d’autres développements secrets de ce type, comme vous avez dit, «sur le menu, dont le client serait satisfait» ? Merci.

V. Poutine : Vous voyez, si j’ai dit que nous effectuions des lancements d’essai, cela signifie que ce travail vise, entre autres, à améliorer ces armes. C’est ainsi.

Quant aux capacités de frappe, je l’ai déjà dit aussi. Et si nous utilisons plusieurs de ces systèmes dans une frappe simultanée, si nous utilisons deux, trois, quatre complexes, ce sera d’une force comparable à l’utilisation d’armes nucléaires. Mais ce n’est pas une arme nucléaire, parce qu’elle est : a) très précise ; b) elle n’est pas équipée d’un dispositif explosif nucléaire, elle ne contamine pas l’environnement. Mais la force sera comparable.

Quant à savoir s’il y avait ou non des explosifs. Je le répète encore une fois : c’est pour cela qu’il est testé, pour comprendre ce qu’il faut faire en plus. Et il n’y a pas de grand secret ici, les experts comprendront immédiatement de quoi je parle. Quand je parle d’amélioration, cela veut dire, tout d’abord, jouer entre la portée et l’ogive.

Plus la portée est longue, plus l’ogive est petite ; plus la portée est courte, plus l’ogive est puissante. Parce que ce système soulève une plus grande quantité de poids utile dans ce cas, et c’est tout. Et pour des cibles à différentes distances, il semble que différents types de missiles soient nécessaires, mais, en tout état de cause, différents équipements de ces missiles, attirails de l’ogive de ces missiles. Nous devons travailler sur cela. Ce n’est pas une tâche facile, cela impliquera probablement des travaux de développement supplémentaires, etc.

En ce qui concerne le missile que nous avons utilisé, les éléments appropriés ont été utilisés comme éléments de destruction, et ils sont également des éléments de destruction. Je l’ai déjà dit, il s’agit d’éléments assez puissants qui sont chauffés à la température de 4000 degrés centigrades. Je ne sais pas, vous pouvez chercher sur Internet, mais à la surface du Soleil, je pense que la température est de 5600 à 6000 degrés. Donc c’est comparable à la température à la surface du Soleil.

Un impact cinétique est un impact puissant, c’est comme la chute d’une météorite. L’histoire nous apprend comment et quelles météorites sont tombées et quelles en ont été les conséquences. Cela a suffi pour que des lacs entiers se forment, n’est-ce pas ? À quoi la météorite de la Toungouska a-t-elle amené ? On le sait.

Il en va de même ici. Les dégâts sont très importants : tout ce qui se trouve au centre se transforme en cendres, se décompose en éléments constitutifs, et les installations situées trois ou quatre étages plus bas, voire plus, sont touchées. Et il ne s’agit pas de simples étages, mais de structures fortifiées. La force de l’impact est énorme. On peut en ajouter d’autres, bien sûr, et ce sera encore plus puissant. L’essentiel est que l’échantillon de principe a été créé, qu’il fonctionne, et qu’il fonctionne comme prévu par ses créateurs. C’est une arme précise et très puissante.

Q : D’autres armes de ce type sont-elles en cours de développement ?

V. Poutine : Ne quittez pas ! Nous ne vous avons parlé de l’«Orechnik» qu’après l’avoir testé. Nous avons attendu d’avoir effectué ce test et, en fait, pour être honnête, nous avons vu le résultat. Après cela, nous vous l’avons dit : C’est justement un cas où l’agitation est hors saison.

Oui, s’il vous plaît.

Q : L’Agence TASS, Véronika Romanenkova.

La presse occidentale rapporte déjà que certains hommes politiques et fonctionnaires des États-Unis et d’Europe proposent de restituer les armes nucléaires à Kiev. À votre avis, dans quelle mesure cette évolution est-elle réaliste ? Ou s’agit-il simplement d’une sorte d’escalade, d’une histoire d’épouvante ? Et si une telle chose se produit, si les armes nucléaires sont remises au régime kievien, comment agira la Russie ? Des mesures préventives peuvent-elles être prises ? Et le statut dénucléarisé de l’Ukraine reste-t-il l’une des conditions préalables à un règlement ?

V. Poutine : Que pensez-vous, au niveau du bon sens, si le pays avec lequel nous sommes en fait engagés dans des hostilités devient tout d’un coup une puissance nucléaire, que devons-nous faire ? Dans ce cas, nous prendrons et utiliserons tous – je tiens à le souligner, exactement tous – les moyens de destruction dont dispose la Russie, tout. Nous ne le permettrons pas. C’est premièrement.

Deuxièmement. De telles déclarations ne peuvent être faites que par des irresponsables qui n’endossent aucunes conséquences et ne se sentent pas responsables du sort de leur pays et du monde entier.

Et troisièmement. Si quelqu’un transfère officiellement quelque chose, il s’agira d’une violation de tous les engagements que nous avons pris dans le domaine de la non-prolifération des moyens de destruction massive.

Mais en Ukraine même, nous ne permettrons pas que cela se produise et nous surveillerons chaque étape qui s’y déroule. L’Ukraine était autrefois une république de l’Union soviétique très avancée sur le plan technologique et industriel. Mais tout a été perdu, ou presque, tout ce dont l’Ukraine soviétique pouvait être fière a été perdu. C’est pourquoi aujourd’hui il serait presque impossible de repartir de zéro. Quelque chose de sale, comme on dit, une bombe sale, juste les déchets des centrales nucléaires peuvent être collectés, bien sûr, mais même dans ce cas, la réponse sera absolument adéquate aux menaces pour la Fédération russienne.

Q : Andreï Kolesnikov, journal Kommersant.

Vladimir Vladimirovitch, lorsque vous avez parlé d’éventuelles frappes contre des centres de prise des décisions, vous n’avez pas précisé, de quels centres s’agissait-il, militaires ou politiques C’est la première question.

Et la seconde. En tant que Commandant en chef suprême, pensez-vous que ces frappes sur les centres sont également possibles avec l’«Orechnik», car il semble que rien d’autre ne puisse les atteindre ?

V. Poutine : Vous savez, à l’époque soviétique, il y avait une blague sur les prévisions météo. La prévision est la suivante : «Durant cette journée tout est possible».

Q : Bonjour, Vladimir Vladimirovitch ! Alexandre Younachev, Life.

Le dollar et l’euro battent tous les records à la bourse. Le rouble s’est même affaibli de 80 kopecks même par rapport au tenge depuis hier. La population, du moins une bonne partie de la population, est en proie à la panique.

Pouvez-vous nous dire quelle est l’ampleur réelle de l’inflation ? Le salaire moyen réel, et non nominal, en Russie ? Et quand allons-nous juguler l’inflation, et allons-nous la juguler en fait ?

V. Poutine : Donc vous avez décidé d’allumer la mèche.

Tout d’abord, tout ce que la Banque centrale annonce comme inflation est réel. Il n’y a rien d’inventé. C’est premièrement.

Et deuxièmement, c’est facile à vérifier. L’inflation réelle est facilement vérifiée par des centres indépendants qui évaluent l’état de l’économie russienne et du secteur financier et du crédit. Par conséquent, tout ce que dit la Banque centrale – quel est le taux actuel, 8,5 ? – est vrai. Certains experts estiment qu’avec un taux d’inflation de 8,5, un taux directeur de 21% serait excessif. Ce serait un taux surélevé. Mais si vous parlez de hausse des prix, il nous faut tout de même nous demander si ce taux est surélevé ou non.

Il existe des outils qui permettent de lutter contre l’inflation sans augmenter le taux directeur. Oui, il y en a. Il s’agit de divers instruments de la Banque centrale pour réguler le secteur bancaire, liés aux ressources obligatoires que les banques doivent [créer] chez elles avant d’accorder des prêts. Cela est lié aux décisions, y compris celles du gouvernement, d’augmenter les prêts à la population, les prêts hypothécaires, les prêts à caractère social, etc. Il y a beaucoup d’autres outils. Mais ce sont les spécialistes de la Banque centrale qui, conformément à la loi actuelle de la Fédération russienne, doivent prendre la décision finale. Nous verrons cela dans un avenir proche.

Quant à la fluctuation du taux de change du rouble, elle n’est pas seulement liée aux processus inflationnistes. Elle est également liée aux versements au budget et aux prix du pétrole. Il existe de nombreux facteurs saisonniers. Par conséquent, dans l’ensemble, je pense que la situation est sous contrôle et qu’il n’y a certainement pas lieu de paniquer, comme vous l’avez dit. Oui, les processus dans notre pays et dans les pays voisins ne sont pas simples, mais ils sont sous contrôle.

Je vous en prie.

Q : Bonsoir, Vladimir Vladimirovitch ! Iékaterina Lazareva, agence Ura.ru.

Récemment vous avez eu une conversation téléphonique avec le chancelier allemand Scholz. Vous n’avez pas été en contact depuis près de deux ans. Avez-vous été surpris que Scholz soit le premier dirigeant occidental à prendre contact avec vous ? Quelles impressions avez-vous tirées de cette conversation ? Merci.

V. Poutine : Tout d’abord, nous continuons à avoir des contacts, aussi étrange que cela puisse paraître, avec de nombreux pays avec lesquels nous avons des relations très difficiles. Oui, je n’ai pas eu de contacts directs avec les dirigeants de ces pays. Mais je sais que certains d’entre eux manifestent également le désir de reprendre ces contacts et de discuter des problèmes actuels liés aux événements en Ukraine, tant au niveau bilatéral que dans le contexte paneuropéen.

Oui, en effet, le chancelier de la République fédérale d’Allemagne, M. Scholz, a été le premier à rompre ce silence. Il n’y avait rien d’inattendu pour moi non plus. Depuis un certain temps, nous recevions des signaux concernant le désir du chancelier de s’entretenir au téléphone. Comme vous le savez, nous sommes toujours ouverts à de tels contacts. Nous, et moi en particulier, n’avons jamais refusé, et je ne refuse pas de tels contacts à l’avenir. Si quelqu’un le souhaite, s’il lui plaît, nous sommes ouverts.

Quant à l’entretien avec le chancelier, il a duré assez longtemps, une heure entière, et il a porté principalement, bien sûr, sur les événements en Ukraine. Mais il n’y avait rien d’inhabituel, je pense, ni pour lui ni pour moi. Il a présenté sa position, j’ai présenté la mienne, et nous sommes restés sur nos positions à ce sujet.

Quelques questions ont porté sur les relations bilatérales. Enfin, plus en passant, peut-être. Mais dans l’ensemble, je pense que le dialogue est possible aussi à l’avenir.

Q : Olga Matvéïeva, station de radio Maïak, Vesti.FM.

Une famille nombreuse de Nabérejniïé Tchelny est prête à nommer un enfant en l’honneur du complexe de missiles «Orechnik». Selon le chef de famille Vladimir Soukhov, sa femme est enceinte de quatre mois, ils attendent une petite fille et sont prêts à l’appeler Orechnitsa.

Dites-nous, s’il vous plaît, avez-vous entendu parler de cette nouvelle ? Et si oui, seriez-vous prêt à les rencontrer ? Merci.

V. Poutine : Vous savez, il s’agit de leur affaire familiale personnelle. Qu’ils demandent conseil plutôt à la grand-mère, au grand-père. Ce sera probablement plus correct que de le demander à moi. Je m’occupe de mes affaires. Ils sont sur le point d’un tel événement. Je souhaite à la future maman tous mes vœux de bonheur, aussi que pour toute sa famille.

Quant au choix du prénom de l’enfant, c’est une affaire de famille, je ne me prononcerai même pas. Je leur adresse tous mes vœux de bonheur et de santé.

Q : Bonjour. Chaîne de télévision Zvezda, Konstantine Kokovechnikov.

Dans plusieurs pays voisins de la Russie, des élections à différents niveaux ont eu lieu récemment ou sont sur le point d’avoir lieu dans un avenir proche. On peut mentionner la Géorgie déjà citée, l’Abkhazie, la Roumanie, la Moldavie. Dans le même temps, le processus électoral dans bon nombre de ces pays est souvent accompagné de manifestations de masse. Les politiciens favorables au rapprochement avec l’Occident accusent leurs opposants de vouloir se détourner de la voie démocratique choisie, d’abandonner les valeurs démocratiques, et la Russie est accusée d’interférer dans les élections de ces pays.

Pour votre part, voyez-vous au contraire des signes d’ingérence occidentale dans le processus électoral de ces pays ? Y voyez-vous la menace de nouvelles «révolutions oranges» ? Et comment expliquez-vous à vous-même l’état d’esprit d’une partie apparemment importante de l’électorat de ces pays, qui souhaite rétablir les relations détruites avec la Russie ? Merci.

V. Poutine : Premièrement. Je tiens à vous dire, et vous pouvez être sûrs que c’est la vérité ou très proche de la vérité. Malgré de nombreux contacts avec les pays de l’ex-Union soviétique, y compris, disons, la Géorgie, et il y a probablement une influence mutuelle de la Russie sur la Géorgie et vice versa, mais au niveau officiel, nous n’interférons pas dans les processus politiques internes, nous ne nous y fourrons pas du tout, nous n’y touchons pas, nous n’y touchons tout simplement pas.

Quant à l’ingérence occidentale, je ne peux pas dire cela de nos «collègues» occidentaux entre guillemets. Pourquoi ? Parce que si nous examinons le nombre de participants à diverses organisations non gouvernementales qui sont à la solde de gouvernements étrangers et le nombre de personnes qui se rendent aux rassemblements, en y ajoutant les membres de leur famille, leurs amis et ainsi de suite, nous obtenons une image très réaliste des foules dans la rue et du nombre de personnes qui reçoivent de l’argent de gouvernements étrangers pour des activités politiques dans ces pays. Il suffit de regarder les choses objectivement – il s’agit d’informations semi-ouvertes – pour que tout devienne immédiatement clair. Celui qui paie, commande la musique et la fait jouer sur les places. C’est la raison pour laquelle il y a des interférences.

Lorsque les événements en Géorgie ont commencé, franchement, j’ai été surpris de voir et d’observer tout cela. Je suis surpris. Nous n’avons aucune relation avec eux, avec les dirigeants actuels de la Géorgie, aucune. Mais j’ai été surpris par le courage et le caractère dont ils ont fait preuve pour défendre leur point de vue. Je ne donnerai même pas d’évaluation de ce point de vue maintenant. Dans une large mesure, des processus similaires se déroulent dans les autres pays que vous avez mentionnés. Si cette réponse vous satisfait, je n’ai rien à ajouter. Je n’ai rien à ajouter.

Q : Hassan Nasr, RT en arabe.

Monsieur le président, vous avez déclaré à plusieurs reprises que vous étiez prêt à négocier sur l’Ukraine, et vous avez dit quelles étaient les conditions d’ouverture de ces négociations. Une fois que l’«Orechnik» a montré sa puissance, vos conditions seront-elles modifiées ?

V. Poutine : Vous savez, vous vous êtes peut-être mal exprimé. Je n’ai formulé aucune condition préalable. Je n’ai pas dit que les conditions préalables à l’ouverture des négociations étaient telles ou telles. J’ai simplement parlé de nos conditions de paix.

À mon avis, les conditions de la paix, d’une paix durable et à long terme, pourraient être telles, telles et telles, et elles sont détaillées dans le discours que j’ai prononcé en juin lors d’une réunion avec les dirigeants du ministère des Affaires étrangères de la Fédération russienne. Il n’y a rien de plus à répéter.

Nous avons suffisamment d’armes, même si, bien sûr, je comprends, nous en sommes tous conscients, que l’apparition d’armes telles que l’«Orechnik» renforce la position militaire de la Russie, car il ne s’agit pas d’une arme nucléaire, mais les résultats de son utilisation et sa puissance, en particulier si plusieurs complexes sont utilisés en une seule frappe, je l’ai déjà mentionné, sont les mêmes que l’utilisation d’armes nucléaires. Cela veut dire quelque chose, n’est-ce pas ? En effet.

Mais avec l’apparition de nouveaux systèmes d’armes, notre attitude, notre attitude de principe à l’égard de la résolution de la situation en Ukraine ne change pas. Nous sommes toujours prêts : a) au processus de négociation, et b) bien sûr, dans les conditions que j’ai exposées dans mon discours à la direction du ministère des Affaires étrangères à Moscou en juin de cette année. Rien n’a changé.

Je vous en prie.

Q : Gleb Ivanov, journal Argoumenty i Fakty.

Nous parlons beaucoup ces derniers temps des armes occidentales de haute précision et de l’«Orechnik». Mais un autre type d’arme est devenu très répandu au cours de l’OMS, à savoir les drones. Ces derniers temps les médias occidentaux insistent sur le fait que les forces armées ukrainiennes, FAU, vont recevoir de nouvelles puces qui permettraient aux drones ukrainiens de contourner les moyens russiens de la guerre radioélectronique. Quelle est la gravité de cette menace, cette information est-elle vraie et comment peut-on la combattre ?

Et ma deuxième question. Nous savons que dans les FAU, les pilotes de drones (ceux qui conduisent les drones) ont été relégués dans une branche distincte des forces armées. Devrions-nous faire de même ?

V. Poutine : Premièrement, en ce qui concerne les nouvelles puces et autres équipements pour l’utilisation des drones, c’est possible. Les drones sont désormais utilisés très activement par les deux parties, et notamment par les forces armées ukrainiennes. Nous utilisons tout de même davantage les drones, mais l’autre camp en utilise également beaucoup. Ils ont commencé à utiliser des drones – nous avons commencé à les utiliser en premier, et ensuite ils nous ont imités – vous savez, des drones sur fibre, contrôlés depuis le sol, et ils ne sont pas du tout affectés par les moyens de guerre radio électronique. Il y aura donc de nouvelles puces, c’est possible. Je suis sûr que nous réagirons rapidement. L’échange d’informations et l’enrichissement mutuel, malheureusement, de ces informations, ainsi que l’utilisation instantanée se produisent très vite. Et celui qui réagit le plus vite gagne.

Nos militaires, nos gars ont appris à réagir presque à la vitesse de l’éclair et ceci sur le champ. Beaucoup de gens très bien éduqués se sont retrouvés dans la zone de combat. Je regarde des reportages lorsque je reçois, lis ou écoute des rapports oraux, et franchement, je suis même surpris, je le dis franchement, que des personnes ayant une très bonne éducation, une bonne formation, de bonnes compétences en ingénierie, risquent leur vie dans la zone de combat, et qu’elles accomplissent des miracles sur place. Les drones sont aujourd’hui l’un des facteurs les plus importants de la réussite des opérations de combat.

Mais peuvent-ils [les Occidentaux] fournir [des nouveaux puces] ? Oui, ils le peuvent. J’en ai parlé lors de la réunion restreinte de l’OTSC. Est-ce que cela changera fondamentalement le cours des hostilités sur le champ de bataille ? Non, l’armée russienne progresse de pied ferme tout au long de la ligne de contact. Je pense qu’elle continuera à le faire. Petit à petit, petit à petit, petit à petit, nous occuperons de nouvelles positions, comme nous le faisons actuellement, grâce au courage de nos gars. Je ne me lasse pas de le répéter, mais c’est ainsi. Vos collègues de la zone de combat, les correspondants de guerre en parlent avec beaucoup de conviction. C’est la vérité. Personne n’invente rien.

Q : Au sujet d’une branche distincte des forces armées.

V. Poutine : Oui, je sais que cela a été fait là-bas, mais nous y réfléchissons également. Quant à l’organisation de ce travail, c’est une question distincte. Elle est importante. Je suis d’accord avec vous, elle est importante. Parce que le résultat concret dépend de l’organisation de tel ou tel type d’activité. L’état-major général et le ministère de la Défense y réfléchissent également. Notre ministre de la Défense est un homme moderne, un homme qui connaît bien tous ces domaines, même si sa formation de base était avant tout celle d’un économiste. Néanmoins, il s’est également occupé des drones lorsqu’il était encore premier vice-premier ministre. Il domine donc ce sujet, et ensemble avec les militaires professionnels ils sont en train de réfléchir à cela, à la manière d’organiser ce travail. La question est vraiment importante, j’en conviens.

Q : Agence Interfax. Bonjour.

Question sur l’énergie. Lors de la visite étatique au Kazakhstan, a-t-il été question d’augmenter le pompage de pétrole, notamment kazakhstanais, à travers le territoire de la Russie vers l’Allemagne ? Si oui, en quels volumes ? Naturellement, s’il est possible de le dire.

Le deuxième sujet concerne le pompage du pétrole, mais déjà du pétrole russien, à travers le territoire du Kazakhstan vers la Chine.

Tels sont mes deux sujets.

V. Poutine : Nous avons discuté de tout [cela]. Nous avons discuté de la possibilité d’augmenter le pompage du pétrole kazakhstanais à travers le CPC jusqu’au port de Novorossiïsk et de poursuivre l’expédition du pétrole kazakhstanais vers les marchés mondiaux. Mais il ne s’agit pas seulement du pétrole kazakhstanais, de nombreuses sociétés étrangères y travaillent, on peut donc dire qu’il provient du territoire du Kazakhstan, mais ce produit a un caractère international. C’est premièrement.

Deuxièmement. La question de la vente éventuelle par Rosneft de sa participation dans la raffinerie de Schwedt en Allemagne, afin que le Kazakhstan fournisse lui-même du pétrole à raffiner à cette raffinerie en Allemagne, a été discutée à plusieurs reprises. Vous savez, tout est possible.

La seule chose qui nous semble inacceptable, c’est l’utilisation par le gouvernement de la République fédérale de méthodes illégales à l’encontre de la société russienne Rosneft, qui ressemblent à une nationalisation, à une saisie de nos biens, à un retrait de la gestion, etc. Mais il s’agit aussi d’une question de négociations, et Rosneft est prête à négocier avec les régulateurs allemands et leurs partenaires, ainsi qu’avec tous les autres, y compris ceux du Kazakhstan.

Nous avons également discuté de la possibilité de créer de nouveaux itinéraires pour le pompage de nos produits – pétrole et gaz – vers des pays tiers, principalement vers la République populaire de Chine, y compris à travers le territoire du Kazakhstan. Il s’agit d’itinéraires et de projets très favorables, intéressants et prometteurs. Ils contribueront certainement à la stabilisation de l’économie mondiale, et bien sûr, en premier lieu, de la région Asie-Pacifique, et créeront une opportunité supplémentaire pour nous de travailler sur les marchés.

Q : Iégor Piskounov, chaîne de télévision RT.

Vous venez de mentionner le chancelier Scholz, et moi j’ai une question à propos d’un autre chancelier. La chancelière Merkel a récemment publié ses mémoires. Elle y consacre assez beaucoup de temps à votre relation et raconte qu’en 2007, elle s’est rendue à Sotchi pour vous rendre visite et qu’elle y a rencontré votre chien Connie.

V. Poutine : A-t-elle rencontré le chien ?

Q : Eh bien, ils se sont rencontrés avec votre chien, oui. Et beaucoup d’entre nous se souviennent de ce chien.

V. Poutine : «La police et le chien ont promis de venir…» Ah non. «Le chien et la police ont promis de venir». C’est ça ? D’accord, désolé, je plaisante.

Q : Beaucoup d’entre nous se souviennent de cette chienne. Elle était très amicale, beaucoup de gens la caressaient, elle aimait se promener librement. Et apparemment, cette même chose s’est produite. De manière générale, il s’est avéré qu’Angela Merkel avait peur des chiens et elle a écrit que vous auriez exploité sa peur à dessein. Cela s’est-il produit ? Est-ce vrai ?

Et une digression un peu philosophique. Comment se fait-il qu’à une époque, la chancelière allemande soit venue vous rendre visite et que vous ayez souvent parlé allemand. Et maintenant, nous parlons du fait que nous commençons à déployer ces mêmes «Orechniks» dans cette direction. Merci.

V. Poutine : Premièrement, en ce qui concerne la question «canine». En effet, il y a eu un tel cas. Mme Merkel est venue nous rendre visite et ma chienne, Connie, est sortie. Franchement, je lui ai déjà dit, à Merkel, que je ne savais pas qu’elle avait peur des chiens. Si je l’avais su, je ne l’aurais jamais fait. Au contraire, je voulais créer une atmosphère détendue et agréable. Je suis parti du fait qu’en Europe et en Allemagne, pour autant que je sache, puisque j’y ai quand même vécu pendant près de cinq ans, les animaux de compagnie sont traités de manière très positive. Au contraire, j’ai pensé que ce serait bien pour elle. J’ai appris plus tard qu’elle avait peur des chiens. Cela arrive. Si je me souviens bien, elle m’a dit qu’elle avait été mordue par un chien lorsqu’elle était enfant. Cela arrive, un traumatisme psychologique. Quand je l’ai appris, je me suis excusé auprès d’elle. Je lui ai dit : «Angela, je suis désolé, je n’étais pas au courant». Elle n’a pas lâché l’affaire, elle en a parlé dans son livre. Franchement, je trouve cela étrange, inattendu.

Vous et moi, nous parlons, tout cela va être médiatisé. Donc je me tourne à nouveau vers elle et lui dis : «Angela, je t’en prie, pardonne-moi. Je ne voulais pas te causer de chagrin. Au contraire, je voulais créer une atmosphère favorable à notre conversation. Je présente mes excuses. Si tu reviens un jour – je sais que c’est peu probable aujourd’hui – je ne le ferai en aucun cas».

Et quant aux questions sérieuses, à savoir celles liées à nos relations avec l’Europe et les pays occidentaux en général, vous savez, nous sommes même allés, en fait, je pense, je n’y ai pas participé, mais la génération des dirigeants précédents est allée jusqu’à l’effondrement de l’Union soviétique, entre autres raisons, il me semble, pour que la Russie fasse partie de cet Occident soi-disant – aujourd’hui, nous pouvons le qualifier de la sorte – civilisé, croyant que du moment de tous ces murs de confrontation idéologique tombés, nous ferons partie du monde civilisé.

Rien de tel ne s’est produit. Il s’est avéré qu’en dehors de tout cela, en dehors de tout ce qui est lié à l’idéologie, il y a aussi des questions de nature géopolitique, des intérêts géopolitiques, et on nous a tout de suite montré pratiquement où était notre place – quelque part dans un petit coin. Mais cela ne s’est pas arrêté là. On a commencé à soutenir les forces séparatistes, les forces terroristes dans le Caucase, on a commencé à ébranler la Russie de l’intérieur, vous savez, de toutes leurs forces à vrai dire petiotes. Nous avons fait face à cette situation, nous l’avons traversée. Existe-t-il une seule chose que nous n’avons pas proposé pour établir des relations ? J’en ai déjà parlé à maintes reprises, je ne veux pas perdre de temps à y revenir. C’est fini. Non, c’est non. L’expansion de l’OTAN à l’Est : cinq vagues, ou plutôt six. Toutes nos objections, toutes nos préoccupations ont été ignorées et ils [les Occidentaux] ont simplement suivi leur propre voie. Et c’est tout. C’est ainsi que se sont formées les relations, y compris avec l’Europe.

Oui, je sais, les dirigeants européens me disent : «Mais nous étions contre, – je l’ai déjà dit, je le répète, c’est important. – Mais nous sommes contre l’entrée de l’Ukraine dans l’OTAN. Eh bien, tu sais bien que nous sommes contre et que nous voterons contre». À ma question : «Alors pourquoi avez-vous ouvert la porte de l’OTAN à l’Ukraine à Bucarest en 2008 ?» La réponse est simple : «Eh bien, les Américains ont exercé une forte pression sur nous à l’époque». En voilà bien d’une autre ! Et si demain ils vous pressent à nouveau plus fort ? Serez-vous à nouveau d’accord avec tout et signerez-vous enfin un bout de papier relatif au fait que cette même Ukraine est membre de l’OTAN ?

Et la position des États-Unis n’avait pas changé à ce moment-là. Les États-Unis nous ont dit : «Eh bien, oui, à présent nous ne l’accepterons pas». Savez-vous pourquoi ils disent de ne pas l’accepter «à présent» ? Mais parce que l’Ukraine n’est pas prête, elle doit passer par le chemin de la préparation à l’adhésion. «Pas à présent». Mais lorsqu’elle sera prête, elle sera acceptée. Et ils feront à nouveau pression sur ces Européens. Et ceux-là accepteront à nouveau. Et ce qui se passe actuellement se déroule sous les yeux du monde entier.

J’ai l’impression que l’on a descendu l’Europe en dessous de tout. Elle a cessé d’exister en tant que centre indépendant, centre politique indépendant et souverain de la politique mondiale. Elle marche sous la houlette de l’administration américaine au premier coup de sifflet, même à son propre détriment. Parfois il me semble, que des personnes de très haut niveau, dans cette même République fédérale, qui occupent des postes gouvernementaux élevés, effectuent une sorte de mission pour les services secrets américains, mais ne travaillent pas dans l’intérêt de leur propre peuple, en l’occurrence le peuple allemand. Comment peut-on être d’accord avec tout ce qui se passe là-bas ?

Les porteurs d’énergie, par exemple, sur le marché américain, dans certains États, sont trois à cinq fois moins chers qu’en Europe, en Allemagne. Des entreprises et des industries entières ferment en Allemagne et s’installent aux États-Unis. Et c’est ce qu’ils font, et ils le font délibérément. Les Américains sont des gens pragmatiques ; en fait, ils font peut-être ce qu’il faut dans leur propre intérêt. Mais ces gens-là ? Il semble que si on leur dit : «Nous allons vous pendre», ils n’auront qu’une question à poser : «Devons-nous apporter la corde nous-mêmes ou vous nous la donnerez ?» Vous comprenez ? Voilà, c’est tout.

Le Volkswagen ferme, les usines métallurgiques ferment, les usines chimiques ferment, les usines de verre ferment. Les gens sont jetés à la rue par milliers, maintenant par centaines, ou peut-être par milliers. Et rien du tout, mystère et boule de gomme ! Rien qu’une sorte d’agitation dans le processus politique interne actuel. Et comment parler à de tels partenaires ? Qu’y a-t-il à négocier ?

Ce n’est donc pas notre faute si nos relations avec l’Europe se sont autant détériorées. C’est aussi le résultat de l’état interne de l’establishment européen, de la politique européenne.

Mais j’espère que cela passera un jour et que nos relations avec l’Europe dans son ensemble, avec les différents pays européens se rétabliront. La Russie et nos partenaires européens sont tous intéressés à telle issue. Eux, ils ne sont pas moins intéressés, sinon plus, peut-être même davantage. Je pense que cet intérêt naturel à développer des relations avec la Russie dans l’intérêt – pardonnez-moi cette répétition et cette tautologie – de leurs propres pays et de leurs propres peuples prévaudra. Je l’espère. Nous verrons ce qu’il en sera dans la réalité.

Concluons maintenant définitivement.

Je vous en prie.

Q : Bonjour. RIA Novosti.

Si vous le permettez, je voudrais revenir sur le sujet de l’OTSC.

Conformément au Traité de sécurité collective, en cas d’agression militaire contre l’un des pays participants, les autres membres de l’Organisation doivent, à sa demande, fournir immédiatement l’assistance nécessaire.

La Russie a-t-elle l’intention de demander une telle assistance à l’OTSC en cas de frappes à longue portée effectuées par des armes occidentales sur son territoire ? Peut-être cette question a été discutée ou abordée d’une manière ou d’une autre aujourd’hui ? Et les membres de l’OTSC sont-ils prêts à fournir une telle assistance ?

V. Poutine : Vous savez, en ce qui concerne la disposition selon laquelle tout pays membre de l’OTSC doit fournir une assistance à un autre État victime d’une agression, personne n’a de doutes. En fait, chaque pays est prêt à agir dans le cadre de ses engagements.

Mais regardons de manière réaliste les événements qui se déroulent. À partir du moment où des armes américaines, ces mêmes ATACMS, frappent le territoire russien, que peuvent faire les autres pays de cette organisation pour aider la Fédération russienne ? C’est irréaliste. Mais, très probablement, même dans ces conditions, nous sommes en mesure de leur apporter toute l’aide possible. Nous disposons de ressources suffisantes et de stock de robustesse pour soutenir nos alliés si nécessaire.

Q : Vladimir Koulaguine, Vedomosti.

Dans quelle mesure le niveau actuel d’escalade, qui a débuté avec l’autorisation par l’administration Biden de frapper la Russie par les ATACMS, devrait et pourrait-il affecter la possibilité de tendre la main à la future administration Trump ? Quelle sera l’importance de ce facteur dans l’établissement des relations ? Ou peut-être d’autres signaux [existent] qui rendent les choses difficiles ?

V. Poutine : Nous ne savons pas de quoi M. Trump et M. le président actuel ont parlé lors de leur rencontre. Nous ne le savons pas. Et c’est pourquoi nous ne ferons aucun commentaire à ce sujet, c’est impossible.

Des différentes possibilités existent. Si le président sortant Biden pense qu’en escaladant la situation, en augmentant le degré de confrontation, il crée des conditions pour la future administration, il est facile de sortir de cette situation, parce que le président nouvellement élu dira : «Ce n’est pas moi, ce sont des gens qui n’ont plus de tête. Je n’y suis pour rien. Discutons». Bien sûr, ce n’est qu’une version.

Il est possible que l’administration actuelle veuille créer des difficultés supplémentaires pour l’administration future. C’est également une possibilité. Mais pour autant que je puisse imaginer que le président nouvellement élu est quand même un homme intelligent et assez expérimenté déjà, je pense qu’il trouvera une solution, surtout après avoir passé une épreuve, disons, aussi sérieuse que la lutte pour revenir à la Maison-Blanche.

Vous savez, je pense que ce qui vous a le plus frappé, ce n’est même pas le fait que Trump ait été soumis à des moyens de lutte totalement incivilisés, totalement incivilisés, allant jusqu’à la tentative d’assassinat, et ce à plusieurs reprises – d’ailleurs, à mon avis, il n’est pas en sécurité maintenant non plus. Pourquoi pas ? Il y a eu toutes sortes de cas différents dans l’histoire des États-Unis. Je pense que c’est un homme intelligent et j’espère qu’il est déjà prudent et qu’il comprend tout cela. Mais ce qui m’a le plus frappé, c’est qu’au cours des attaques contre lui, au cours de la lutte contre lui, non seulement il a été soumis lui-même à des procédures humiliantes et déraisonnables, à des poursuites judiciaires et ainsi de suite, mais aussi les membres de sa famille, ses enfants ont été attaqués.

Nos bandits à nous ne se permettent pas des choses pareilles. Lorsque des groupes criminels se battent entre eux, ils ne touchent pas aux femmes ni aux enfants, ils les laissent tranquilles, les hommes, les moujiks se battent entre eux. Tandis que ceux-là les ont touchés, comprenez-vous ? Mais c’est tellement dégoûtant que cela souligne une fois de plus la chute totale du système politique américain actuel.

Néanmoins, le pays est grand, bien sûr. Nous sommes prêts à dialoguer avec les États-Unis, y compris avec la future administration.

C’est tout, merci beaucoup. Bonne journée à vous. Au revoir.

source : Kremlin via Amicale des russophiles francophones

traduit par Valerik Orlov

 

«Deux à quatre jours». Les étapes de la transition de la Russie vers une frappe nucléaire à grande échelle ont été nommées

par Pavel Shishkin

Le docteur en sciences militaires Konstantin Sivkov a commenté les changements intervenus dans la doctrine nucléaire russe, soulignant que ces changements sont une réponse à la spirale d’escalade engagée par l’Occident. Dans le même temps, l’expert a décrit en détail toutes les étapes que la Russie devra franchir avant d’utiliser les armes nucléaires à grande échelle.

«Il s’agit de tout un complexe d’actions séquentielles. Premièrement, une déclaration diplomatique est faite sur l’inadmissibilité de certaines actions.

S’ils n’obtiennent pas de résultat positif, le pays apportera des changements significatifs aux documents fondamentaux, comme l’a fait la Russie», a déclaré Sivkov.

Lorsque l’ennemi poursuit ses actions, l’expert note en outre que, malgré les mesures antérieures, le camp défenseur, en l’occurrence la Russie, commence à prendre des mesures symétriques ou asymétriques. Si ces actions n’arrêtent pas l’ennemi et que ses actions commencent à menacer la stabilité de l’État, y compris le travail des forces de dissuasion stratégique, le pays, cherchant à éviter une nouvelle escalade, prend des mesures décisives. Ces étapes démontrent qu’une étape critique a été franchie. Une telle action pourrait être une déclaration officielle d’un chef d’État, tel que le président, soulignant qu’une nouvelle escalade mettrait en péril le territoire du pays agresseur.

La prochaine étape, selon l’expert, pourrait être une frappe non nucléaire contre le pays agresseur. Si une telle réponse ne fait que provoquer des actions encore plus dures de la part de l’ennemi, l’impact des armes conventionnelles sera alors accru.

«Si cela ne suffit pas, une déclaration officielle indiquant que nous sommes prêts à utiliser des armes nucléaires s’ensuit. Ensuite, si l’ennemi n’a pas repris ses esprits, les forces stratégiques sont transférées dans un état de pleine préparation au combat. Ensuite, si l’escalade ne s’arrête pas, la Russie pourrait lancer une frappe nucléaire démonstrative sur une région où aucun mal ne sera causé à qui que ce soit», explique Sivkov.

Par exemple, continue d’expliquer l’expert, pour faire preuve de détermination, la Russie peut lancer une frappe d’avertissement, par exemple sur le sommet du pôle Nord ou Sud. Si cela ne provoque pas la réaction nécessaire, la prochaine étape pourrait consister à faire exploser une arme nucléaire dans l’espace proche, ce qui entraînerait la destruction d’une partie importante des satellites ennemis. Si elle est ignorée à nouveau, la Russie pourrait lancer des frappes sur des cibles militaires ennemies ayant une présence humaine minimale. Si cela ne conduit pas à une désescalade, des attaques suivront sur plusieurs cibles clés. En dernier recours, si la situation ne change pas, l’ordre d’une frappe nucléaire à grande échelle sur le territoire ennemi peut être donné.

Dans le même temps, Sivkov a expliqué que toutes ces étapes semblent très longues en paroles, mais qu’en réalité, elles peuvent être accomplies en deux à quatre jours. Aujourd’hui, selon le docteur en sciences militaires, la Russie a déjà franchi la deuxième étape pour contenir l’ennemi, puisque toute la diplomatie utilisée auparavant n’a eu aucun impact sur l’Occident, mené par les États-Unis.

source : Voennoedelo

 

Quels changements la Russie apporte-t-elle à sa doctrine nucléaire ?


Source : Le Saker francophoneRussia Today – Le 25 septembre 2024

Le président russe Vladimir Poutine a annoncé une série de mises à jour de la stratégie nationale d’utilisation des armes nucléaires, destinées à faire face à l’évolution de la situation militaire et politique et à l’émergence de nouvelles menaces.

Le sujet a été évoqué lors de la session du Conseil de sécurité russe mercredi, à laquelle ont participé les ministres de la Défense et des Finances et les chefs du SVR, du FSB, de Roscosmos et de Rosatom.

Aujourd’hui, la triade nucléaire reste la garantie la plus importante de la sécurité de notre État et de nos citoyens, un instrument de maintien de la parité stratégique et de l’équilibre des forces dans le monde“, a déclaré Poutine.

 

Attaque par un “État non nucléaire

La première mise à jour proposée de la politique de l’État “élargit la catégorie d’États et d’alliances militaires” auxquels s’applique la dissuasion nucléaire, et “complète la liste des menaces militaires” censées être neutralisées par la dissuasion.

Elle inclurait « l’agression contre la Russie par tout État non nucléaire, mais avec la participation ou le soutien d’un État nucléaire » comme leur « attaque conjointe », franchissant ainsi le seuil nucléaire.

Bien qu’aucun pays ne soit nommé, cela s’appliquerait clairement à l’Ukraine frappant le territoire russe avec des armes fournies par les États-Unis ou ses alliés nucléaires de l’OTAN. Poutine avait déjà déclaré que de telles frappes nécessiteraient la participation active de personnel et de moyens militaires étrangers, les mettant en conflit direct avec la Russie.

Abaisser le seuil nucléaire

Les révisions proposées « énoncent clairement » également les conditions dans lesquelles la Russie peut procéder à l’emploi d’armes atomiques, comme « la réception d’informations fiables sur un lancement massif d’armes d’attaque aérienne et spatiale et leur franchissement de notre frontière d’État ».

Poutine a précisé que cela signifie « des avions stratégiques et tactiques, des missiles de croisière, des drones, des avions hypersoniques et autres ». La mention des drones ici est particulièrement significative, car l’Ukraine a lancé à plusieurs reprises des attaques massives de drones contre des bases stratégiques russes.

Élargissement du parapluie à la Biélorussie

Pour la première fois, la Russie a précisé que sa dissuasion nucléaire pourrait être utilisée en cas d’agression contre la Biélorussie également, en tant que membre de l’État de l’Union. Cela inclut une « menace critique pour notre souveraineté » par l’utilisation d’armes conventionnelles, selon la proposition.

Tout cela a déjà été convenu avec Minsk et le président Alexandre Loukachenko, a déclaré Poutine mercredi.

Quelle était la doctrine précédente ?

Le document adopté en 2020 décrivait quatre situations dans lesquelles Moscou pourrait activer la dissuasion nucléaire. Premièrement, s’il recevait des « informations fiables » sur le lancement de missiles balistiques contre le pays et/ou ses alliés. Deuxièmement, si une arme nucléaire ou un autre type d’ADM était utilisé contre la Russie et/ou ses alliés. Troisièmement, si un ennemi agissait contre des « installations étatiques ou militaires critiques » qui pourraient perturber la réponse des forces nucléaires russes. Et quatrièmement, si la Russie était soumise à une attaque conventionnelle qui « menacerait l’existence même de l’État ».

Pourquoi les changements ont-ils été proposés maintenant ?

Plus tôt cette année, Poutine avait déclaré que certaines mises à jour de la doctrine pourraient être nécessaires, compte tenu des nouvelles menaces émergentes de la part de l’OTAN. Le vice-ministre des Affaires étrangères, Sergueï Ryabkov, a qualifié en juin la doctrine existante de « trop générale » et a déclaré que « l’ignorance » occidentale exige que la Russie dise « plus clairement, plus distinctement, plus définitivement ce qui pourrait arriver » si elle poursuivait ses « actions inacceptables et ses escalades ».

Depuis mai, le gouvernement de Kiev réclame à cor et à cri que les États-Unis et leurs alliés suppriment toutes les restrictions à l’utilisation de leurs armes contre la Russie, ce qui, selon Moscou, représenterait une implication directe de l’Occident dans le conflit.

Poutine a réitéré mercredi que l’utilisation d’armes nucléaires reste une « mesure extrême » pour protéger la souveraineté russe, mais que Moscou doit tenir compte du fait que « la situation militaro-politique moderne évolue de manière dynamique… y compris l’émergence de nouvelles sources de menaces et de risques militaires pour la Russie et nos alliés ».

RT

Traduit par Wayan, relu par Hervé, pour le Saker Francophone.

La Russie prépare un sévère «choc économique» contre l’Occident

Source : RzO International - Le 19/09/2024.

par Olga Samofalova

La guerre voulue par l’occident pour tenter de maintenir sa position hégémonique ne se limite pas aux opérations militaires dans une économie mondialisée elle atteint tous les échanges et a des conséquences tant dans les parts de marché perdus que dans les effets inflationnistes. On le mesure en matière d’énergie mais les implications peuvent atteindre d’autres ressources nécessaires et nul doute que la concertation des BRICS se fera en tenant compte d’un tel contexte alors que les citoyens ne sont pas consultés simplement invités à subir les effets en terme d’emploi, de niveau de vie et de services publics sacrifiés.

Danielle Bleitrach

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Le président Vladimir Poutine a suggéré de réfléchir à «certaines restrictions» sur les livraisons de nickel, d’uranium et de titane à des pays hostiles. Il a toutefois précisé qu’«il ne faut pas le faire à notre propre détriment».

Le porte-parole de la présidence, Dmitri Peskov, a également annoncé une approche prudente quant à l’introduction de sanctions de rétorsion par la Russie. «Le marché est très compétitif et impitoyable. Une fois que vous avez perdu votre position, il vous faut des décennies pour la regagner d’une manière ou d’une autre. Aucune place ne reste vide. Et la place de nos diamants, si nous partons, sera prise par d’autres, et la place de notre pétrole sera prise par un autre pétrole, et ainsi de suite», a-t-il expliqué.

Ce n’est pas un hasard si les restrictions sur l’uranium, le titane et le nickel ont été désignées comme les sanctions de rétorsion de la Russie. Dans ces domaines, la Russie a un poids énorme sur la scène mondiale, et l’essentiel reste la dépendance des pays hostiles à l’égard de nos ressources.

«Environ une centrale nucléaire sur six dans le monde est alimentée par la Russie. En ce qui concerne le nickel, la Russie représente environ 19% des exportations mondiales et environ 9% de sa production. Pour le titane, jusqu’en 2022, environ un quart de l’approvisionnement mondial provenait de la société russe VSMPO-AVISMA. Et la Russie continue de fournir ces ressources à des pays hostiles d’une manière ou d’une autre, bien que dans une moindre mesure», explique Ksenia Bondarenko, experte au Centre pour les études européennes et internationales complexes (CCESI), Faculté d’économie mondiale et de politique mondiale de l’École supérieure d’économie de l’Université nationale de recherche.

Quelles sont les entreprises occidentales qui ont besoin de notre nickel ? Et que se passera-t-il si la Russie elle-même interdit les livraisons de nickel à des pays hostiles, en particulier à l’Union européenne ?

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«Le nickel est traditionnellement exporté vers l’Union européenne et la Chine, où il est utilisé dans la production d’acier inoxydable et de batteries. L’industrie sidérurgique utilise activement le nickel pour créer des alliages d’acier résistant à la corrosion. En outre, le nickel joue un rôle clé dans la production de batteries pour les véhicules électriques et l’électronique. Par exemple, en 2023, la production mondiale de nickel s’élevait à environ 2,7 millions de tonnes, dont une grande partie provenait de la Chine, qui est le plus grand consommateur de ce métal», explique Yaroslav Kabakov, directeur de la stratégie chez Finam Investment Company.

Les États-Unis et le Royaume-Uni ont interdit l’achat de nickel russe au printemps dernier. Cependant, l’Union européenne a jusqu’à présent refusé de telles sanctions.

«La Russie reste parmi les leaders dans l’exploitation du nickel et se classe quatrième dans la production de nickel : le volume de production en Russie en 2022 était de 220 mille tonnes, en 2023 – 218,9 mille tonnes. Les principales destinations des produits russes à base de nickel étaient la Chine et les Pays-Bas, où se trouve l’entrepôt de la Bourse des métaux de Londres (LME). C’est de là que provenaient la plupart des produits russes à base de nickel avant les restrictions d’avril 2024», explique Hasan Ramazanov, expert au Centre Russie-OCDE de l’Académie présidentielle.

Les livraisons de nickel à l’UE se poursuivent, bien qu’elles diminuent principalement en raison de l’augmentation des prix. Au cours du premier semestre 2024, la Finlande et l’Estonie ont acheté le plus de nickel aux pays européens, selon la plateforme de l’ONU Comtrade. La part du nickel russe dans le nickel finlandais était de plus de 88%, soit 336 millions de dollars, tandis que dans les importations estoniennes, elle était de 44%, soit 1,5 million de dollars. La République tchèque, l’Allemagne et la Bulgarie ont également pris une part importante dans les achats de ce métal.

«Pour un certain nombre de pays de l’UE, la Russie reste le principal fournisseur de nickel. Dans le même temps, la Finlande se caractérise par la réexportation de nickel, y compris vers d’autres pays de l’UE. C’est la Finlande qui exporte le plus de nickel de Russie, car les gisements de cuivre et de nickel sont situés près de la frontière entre les deux pays. Les importations totales de nickel et de produits à base de nickel de la Finlande s’élèvent à 1,9 milliard de dollars, tandis que ses exportations s’élèvent à plus d’un milliard de dollars. Curieusement, la Finlande exporte du nickel vers la Chine, mais aussi vers la Norvège, la France, le Japon et le Canada. Là-bas, les entreprises l’utilisent pour l’usage auquel il est destiné : rendre l’acier plus résistant à la corrosion, l’utiliser dans la fabrication d’équipements et d’autres choses», explique Bondarenko.

Si la Russie interdit la fourniture de son nickel à l’UE, cela entraînera certainement une augmentation des prix mondiaux du métal. «Cela pourrait entraîner une hausse significative des prix du nickel, en particulier dans le cas d’un réapprovisionnement en nickel russe par des pays tiers», souligne Ramazanov. De telles sanctions porteraient évidemment un nouveau coup à l’industrie européenne, qui n’a déjà pas réussi à faire face au rejet forcé par l’UE de l’énergie bon marché en provenance de Russie.

Pour Nornickel, la hausse des prix pourrait dans une certaine mesure compenser la réduction des volumes d’exportation. Dans le même temps, la Russie pourra réorienter une partie de ses exportations vers les marchés asiatiques.

Dans l’ensemble, l’interdiction des exportations de nickel pourrait même avoir un effet positif pour la Russie. «Sur le plan intérieur, le nickel peut contribuer au développement des industries russes des batteries et de l’acier inoxydable. Cela réduira la dépendance à l’égard des matériaux et des technologies importés, ce qui stimulera la croissance économique et la création d’emplois», explique Yaroslav Kabakov.

En ce qui concerne le titane, les sociétés aéronautiques occidentales dépendaient fortement du fabricant russe VSMPO-AVISMA avant le début de la SVO. Selon l’entreprise elle-même, elle couvrait 65% des besoins en titane d’Airbus, jusqu’à 35% de ceux de Boeing et 100% de ceux du brésilien Embraer. À cela s’ajoutent 20% des besoins du fabricant britannique de moteurs d’avion Rolls-Royce et 50% des besoins du français Safran.

Bien sûr, en 2022, tous ont annoncé leur intention d’abandonner le titane russe. Mais dans la pratique, cela s’est avéré peu réaliste.

«Si l’américain Boeing a formellement refusé le titane russe, l’européen Airbus n’a pas pu le faire. L’entreprise européenne est tellement dépendante des importations de titane russe que la France bénéficie d’un allègement des sanctions du Canada contre VSMPO-AVISMA, bien que l’approvisionnement ait diminué», note Ksenia Bondarenko.

Les expéditions de titane russe vers l’Union européenne (UE) en 2023 ont diminué de 20% par rapport à 2022 pour atteindre 6410 tonnes (données Eurostat).

«Cependant, les plus grandes entreprises aérospatiales européennes, Airbus, Safran et Rolls-Royce, continuent d’importer du titane russe. Certaines d’entre elles ont même augmenté leurs importations malgré les déclarations publiques sur la réduction des liens», explique Ramazanov.

Par exemple, la France, où se trouve le principal site de production d’Airbus, a augmenté ses expéditions de Russie de 72%, pour atteindre 1 929 tonnes, et l’Estonie de 5%, pour atteindre 369 tonnes.

«Les données douanières russes montrent que les principaux acheteurs sont la France, la Chine et l’Allemagne, mais les États-Unis continuent également d’acheter du titane russe», ajoute Ramazanov.

«Le titane est nécessaire à l’industrie aérospatiale et à la défense, ainsi qu’à la médecine pour la fabrication de prothèses. En raison de sa résistance et de sa légèreté, le titane a trouvé une large application dans la production d’équipements sportifs et d’équipements de haute qualité. En 2022, le marché mondial du titane était estimé à 4,5 milliards de dollars et continue de croître. Les principales exportations de titane sont destinées aux États-Unis, au Japon et aux pays de l’Union européenne», précise Kabakov.

L’interdiction des livraisons de titane russe à l’UE frappera l’industrie aéronautique européenne. Au minimum, elle rendra le métal plus cher et plus difficile à obtenir. Le coût du titane est déjà considérable. Étant donné que les constructeurs aéronautiques occidentaux n’ont aucune interaction avec la Russie, ces contre-sanctions n’affecteront pas beaucoup notre économie.

Et si nous prenons en compte le fait que la Russie a de grands projets de construction de ses propres avions pour remplacer complètement Boeing et Airbus, nous aurons nous-mêmes besoin de titane, et en quantités bien plus importantes qu’aujourd’hui. D’ici 2030, la Russie prévoit de produire plus de 1000 avions nationaux. La consommation intérieure de titane en Russie est déjà en augmentation.

«En Russie, le titane peut contribuer à renforcer l’industrie de la défense et le secteur aérospatial. Il permettra également de développer la production d’équipements médicaux, notamment de prothèses et d’implants, ce qui améliorera la qualité des services médicaux et stimulera la recherche scientifique dans le domaine des biomatériaux», explique Kabakov.

La situation est également intéressante en ce qui concerne l’uranium. En mai 2024, les États-Unis ont imposé une interdiction sur les importations d’uranium faiblement enrichi en provenance de Russie jusqu’en 2040. Mais en fait, les Américains ont fait une exception jusqu’en 2028.

Dans la pratique, les États-Unis ne sont tout simplement pas en mesure de renoncer dès maintenant aux matières premières russes. Selon le ministère américain de l’énergie, Rosatom fournit de l’uranium enrichi, utilisé comme matière première pour le combustible nucléaire, à plus de 90 réacteurs commerciaux aux États-Unis, ce qui en fait le premier fournisseur étranger des États-Unis.

Il fut un temps où les États-Unis, avec l’URSS, figuraient parmi les leaders mondiaux de la production d’uranium. Contrairement à la Russie, qui est devenue un leader mondial de l’industrie nucléaire, les États-Unis ne figurent même plus parmi les 15 plus grands producteurs d’uranium et toute la matière première est importée.

«Lorsque nous parlons de réduction de l’approvisionnement en uranium, nous entendons une réduction des services d’enrichissement. Notre pays représente plus de la moitié de la capacité mondiale d’enrichissement de l’uranium, la Russie étant le principal fournisseur de ces services. Il convient de noter que, selon les prévisions de l’Enrichment Market Outlook, d’ici 2035, la Russie fournira jusqu’à 30% de l’uranium enrichi dans le monde», a déclaré Ramazanov.

«La Russie fait partie des trois principaux importateurs d’uranium sur le marché américain. Les prix du combustible lui-même et de son traitement ont déjà augmenté de plus de 40% depuis le début de l’année en raison des sanctions contre la Russie. Si la Russie impose une interdiction des exportations d’uranium et d’autres métaux de terres rares, cette mesure va tout d’abord secouer les marchés et porter l’inflation à un niveau supérieur», déclare Tatiana Skryl, professeur associé de théorie économique à l’université économique russe Plekhanov. Elle ajoute qu’il ne faut pas oublier les partenaires BRICS de la Russie, qui pourraient soutenir l’initiative russe d’imposer des mesures restrictives sur l’approvisionnement en ressources rares. Dans ce cas, une interdiction conjointe pourrait créer un déficit mondial sur les marchés des terres rares.

source : VZGLYAD via Histoire et Société

Discours de Lavrov : Plus personne ne pourra dire qu’il n’était pas informé

Source : RzO International - Le 18/09/2024.

Dans cette vidéo, nous plongeons dans les critiques de Sergueï Lavrov sur le rôle des États-Unis et de leurs alliés dans la configuration actuelle des affaires internationales. Lavrov dénonce l’usage de la notion d’«ordre basé sur des règles» pour légitimer des démarches unilatérales et met en garde contre les risques liés à l’expansion continue de l’OTAN. Nous explorons ses analyses sur les tensions géopolitiques actuelles et les défis croissants pour la stabilité mondiale.

Vladimir Poutine ne lance pas de menaces en l’air


Par Moon of Alabama – Le 13 septembre 2024

Il y a quelques mois, la fuite d’un coup de fil entre des officiers allemands de haut rang était rendue publique. Ils y discutaient de l’éventuel déploiement d’un missile de croisière allemand Taurus en Ukraine pour l’utiliser contre des cibles russes.

Il apparaissait clairement dans cette fuite que le déploiement, le pointage et le tir d’une telle arme ne peuvent se faire sans la participation du personnel du pays qui a fait don de l’arme. Cela s’applique aux missiles ATAMCS américains, aux missiles SCALP/Storm Shadow français et britanniques, tout comme cela s’appliquerait au missile Taurus allemand :

 

Gerhartz, [commandant de la Luftwaffe], et ses subordonnés ont discuté de l’ampleur de la formation et du soutien que l’Allemagne pourrait être amenée à fournir si des missiles Taurus étaient envoyés en Ukraine, et de la possibilité d’y inclure des informations sur le ciblage et la programmation.

Gerhartz a déclaré : « En ce qui concerne la planification des missions, par exemple, je sais comment les Britanniques procèdent, ils le font entièrement en mode réactif [c’est-à-dire avec le soutien de personnes qui ne sont pas déployées à l’avant]. Ils ont également quelques personnes sur le terrain, c’est ce qu’ils font, pas les Français. Ainsi, ils contrôlent également les Ukrainiens lors du chargement des SCALP, car Storm Shadow et les SCALP sont relativement similaires d’un point de vue purement technique. Ils m’ont déjà dit que, oui, pour l’amour de Dieu, ils regarderaient aussi par-dessus les épaules des Ukrainiens lors du chargement du Taurus. »

Les États-Unis discutent actuellement (archivé) de la possibilité d’autoriser l’Ukraine à utiliser des armes à longue portée contre des cibles en Russie, c’est-à-dire au-delà du territoire ukrainien et anciennement ukrainien.

Il s’agirait d’une transformation qualitative de la guerre en Ukraine en une guerre de l’OTAN contre la Russie.

Le président russe Vladimir Poutine l’a dit clairement et sans équivoque.

Réponse à une question des médias, 12 septembre 2024, Kremlin.ru

Question : Ces derniers jours, nous avons entendu des déclarations à un très haut niveau au Royaume-Uni et aux États-Unis selon lesquelles le régime de Kiev serait autorisé à frapper des cibles à l’intérieur de la Russie à l’aide d’armes occidentales à longue portée. Apparemment, cette décision est soit sur le point d’être prise, soit déjà prise, d’après ce que nous pouvons voir. C’est tout à fait extraordinaire. Pouvez-vous nous dire ce qu’il en est ?

Vladimir Poutine, président de la Russie :

L’armée ukrainienne n’est pas capable d’utiliser les systèmes de pointe de haute précision à longue portée fournis par l’Occident. Elle ne peut pas le faire. Il est impossible d’utiliser ces armes sans disposer de données de renseignement provenant de satellites, dont l’Ukraine ne dispose pas. Cela ne peut se faire qu’en utilisant les satellites de l’Union européenne, ou les satellites américains – en général, les satellites de l’OTAN. Voilà pour le premier point.

Le deuxième point – peut-être le plus important, le point clé même – est que seul le personnel militaire de l’OTAN peut assigner des missions de vol à ces systèmes de missiles. Les militaires ukrainiens ne peuvent pas le faire.

Par conséquent, il ne s’agit pas d’autoriser le régime ukrainien à frapper la Russie avec ces armes ou non. Il s’agit de décider si les pays de l’OTAN s’impliquent directement dans le conflit militaire ou non.

Si cette décision est prise, cela ne signifiera rien d’autre qu’une implication directe – cela signifiera que les pays de l’OTAN, les États-Unis et les pays européens sont parties prenantes à la guerre en Ukraine. Cela signifiera leur implication directe dans le conflit, et cela changera clairement l’essence même, la nature même du conflit de manière spectaculaire.

Cela signifiera que les pays de l’OTAN – les États-Unis et les pays européens – sont en guerre contre la Russie. Si tel est le cas, nous prendrons les décisions qui s’imposent en réponse aux menaces qui pèseront sur nous, en gardant à l’esprit le changement d’essence du conflit.

La Russie dispose de nombreux moyens pour répondre à ces menaces. Elle peut notamment tirer directement sur des cibles en France, au Royaume-Uni et aux États-Unis.

Vladimir Poutine n’est pas connu pour lancer des menaces en l’air.

Moon of Alabama

Traduit par Wayan, relu par Hervé, pour le Saker Francophone.

La Russie élabore une nouvelle version de sa doctrine nucléaire

par Observateur Continental

La Russie envisage de revoir sa doctrine nucléaire en réponse aux actions de l’Occident. Selon les experts, les États-Unis montent actuellement sur ce que l’on appelle l’échelle de l’escalade, non seulement dans le soutien aux forces armées ukrainiennes, mais aussi dans d’autres régions du monde, forçant ainsi Moscou à réagir. Quelles pourraient être les implications pratiques de cette révision, et quels changements les experts anticipent-ils dans la doctrine nucléaire ? 

La Russie poursuit son travail pour modifier la doctrine nucléaire. Dmitri Peskov, porte-parole du président russe, a déclaré que l’actualisation de ce document était nécessaire en raison de l’agenda actuel et de la situation résultant des actions de l’Occident collectif. Il a expliqué qu’il s’agissait du refus de Washington et de Bruxelles de dialoguer avec Moscou. 

Sergueï Riabkov, vice-ministre russe des Affaires étrangères, a également indiqué que les ajustements étaient basés sur l’analyse des conflits récents et des actions occidentales dans le cadre de l’opération militaire spéciale. Les modifications concernent principalement les Fondements de la politique de l’État en matière de dissuasion nucléaire.

En août, le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a rappelé que la doctrine nucléaire russe était en cours de «rectification» et que Washington était bien au courant de cette doctrine. 

En juin déjà, Vladimir Poutine avait évoqué des modifications possibles de la doctrine nucléaire, expliquant que des adversaires potentiels abaissaient le seuil d’utilisation des armes nucléaires. Il avait également mentionné que la Russie continuait de développer sa triade nucléaire en tant que garante de la dissuasion stratégique et de l’équilibre des forces dans le monde. 

L’une des raisons de cette réflexion pourrait être la livraison d’avions F-16 en soutien à l’armée ukrainienne. En mai, le ministère russe des Affaires étrangères avait indiqué que la Russie considérait les F-16 en Ukraine comme des vecteurs potentiels d’armes nucléaires, ces avions étant capables d’embarquer des équipements à double usage. 

Dans la doctrine de 2020, l’article 19 concernant les conditions d’utilisation des armes nucléaires par la Russie ne spécifiait pas la portée des missiles lancés en direction de la Russie ni leur charge utile, mais se limitait à mentionner les missiles balistiques. 

Les experts suggèrent que la révision pourrait inclure la suppression de cette limitation. Il pourrait ainsi être question de tout missile (balistique, de croisière ou hypersonique), de n’importe quelle portée et origine (terrestre, aérienne ou maritime), lancé en direction de la Russie. 

La doctrine nucléaire pourrait donc être révisée pour abaisser le seuil d’utilisation des armes nucléaires, soit pour clarifier les conditions d’utilisation des armes nucléaires tactiques et stratégiques. 

La doctrine actuelle est dissuasive, l’usage des armes nucléaires n’étant envisagé qu’en réponse à une agression. 

Les ajustements à la doctrine pourraient également concerner le nombre autorisé de vecteurs d’armes nucléaires et les méthodes de leur utilisation. La Russie pourrait-elle envisager des essais nucléaires pour montrer à ses adversaires qu’elle ne plaisante pas ? Toutes ces questions, y compris celles liées à l’extension des capacités nucléaires vers l’Arctique ou l’espace, seraient intégrées dans les Fondements, selon les experts. 

Les analystes conviennent également que la Russie et les États-Unis sont actuellement en train de monter sur l’échelle de l’escalade, comprenant 44 niveaux, théorisée en 1965 par l’analyste nucléaire Herman Kahn pour justifier la faisabilité de guerres nucléaires de différentes intensités. «Nous sommes actuellement au niveau 13, où se profile la menace d’utilisation d’armes nucléaires tactiques à échelle limitée. Le niveau 44 représente l’anéantissement total l’un de l’autre», expliquent les experts. 

En outre, la révision de la doctrine est également liée aux nouveaux risques posés par les missiles de portée intermédiaire (FNI). Le traité FNI a pris fin après le retrait des États-Unis, et ces derniers commencent à déployer des missiles à moyenne intermédiaire en Europe, notamment des missiles polyvalents SM-6 et Tomahawk, qui peuvent embarquer des ogives nucléaires. 

La doctrine pourrait également inclure un volet visant à réduire l’écart en matière de défense antimissile ? 

Les États-Unis ont rapproché de la Russie leurs systèmes terrestres et maritimes Aegis Ashore, le déploiement de missiles d’interception d’une portée de 2500 km limitant ainsi considérablement les capacités russes. Il est donc possible que la Russie réinstalle des radars et des intercepteurs en Amérique latine. 

L’escalade entre la Russie et les États-Unis pourrait mener à une répétition de l’opération soviétique Anadyr de 1962, consistant à déployer secrètement des armes nucléaires à Cuba. La question qui se pose est de savoir quel pays jouera le rôle de Cuba. 

Cependant, il reste encore suffisamment de marge de manœuvre entre la Russie et les États-Unis avant d’atteindre le seuil nucléaire, et les deux pays en sont conscients. 

source : Observateur Continental

 

Poutine sur la guerre, le transit du gaz, l’arrestation de Pavel Durov, les BRICS, etc.

par Léo Kersauzie

Le président russe Vladimir Poutine s’est longuement exprimé sur l’ensemble des sujets d’actualité lors de son intervention au Forum économique de l’Est (EEF) qui se tient à Vladivostok.

La protection des régions frontalières de la Russie contre les attaques ukrainiennes est le devoir sacré des forces armées russes, a déclaré Vladimir Poutine. Le président russe a souligné que son pays n’était pas contre le transit de son gaz par l’Ukraine, mais qu’il ne pouvait pas contraindre Kiev à faire quoi que ce soit à cet égard. Poutine a également noté que le problème de Moscou avec le dollar provenait du fait qu’il lui était «refusé» de régler ses factures dans cette monnaie. Sur une note positive, il a attiré l’attention sur la baisse de l’inflation en Russie.

Tour d’horizon des principaux sujets abordés par le président russe au cours de son intervention.

La région de Koursk

En attaquant la région de Koursk et d’autres zones frontalières, l’Ukraine voulait distraire la Russie de son offensive dans le Donbass.

Cette stratégie a échoué : Kiev s’est gravement affaiblie dans d’autres directions, tandis que l’armée russe n’a fait qu’accélérer son offensive. Les pertes des forces armées ukrainiennes sont si importantes que l’armée du pays pourrait bientôt perdre sa capacité de combat : «L’ennemi subit de lourdes pertes, tant en hommes qu’en matériel», a souligné Poutine.

La protection des régions frontalières de la Russie contre les attaques des forces armées ukrainiennes est le «devoir sacré» des forces armées russes. Le nombre de militaires sous contrat a «fortement augmenté» après l’attaque ukrainienne contre la région de Koursk.

L’Ukraine frappe des centrales nucléaires

Les frappes ukrainiennes contre les centrales nucléaires de Zaporojia et de Koursk sont des «attaques terroristes flagrantes», a mis en garde le président russe.

«On ne peut qu’imaginer ce qui se passerait si nous donnions une réponse du type «coup pour coup», ce qui arriverait à cette partie de l’Europe».

Règlement du conflit ukrainien

Pour régler la crise ukrainienne, la Russie recherchera «des garanties qui pourraient fonctionner au moins dans une certaine mesure».

L’Occident et les autorités de Kiev ont abandonné les accords d’Istanbul de 2022 sur le règlement de la situation en Ukraine au profit d’une tentative d’infliger une défaite stratégique à la Russie, ce qui «ne fonctionne pas».

La Russie n’a jamais refusé de négocier sur l’Ukraine, mais elle ne le fera pas sur la base de «quelques demandes éphémères, mais uniquement sur la base des documents qui ont été convenus et effectivement paraphés à Istanbul», a répété Vladimir Poutine.

Moscou et Kiev ont réussi à s’entendre sur le règlement du conflit en mars 2022 à Istanbul. La seule raison pour laquelle les accords n’ont pas été mis en vigueur est que l’Occident a mis un terme au processus.

La Russie défendra toujours ses intérêts et ceux du peuple ukrainien qui adhère à la langue et aux traditions russes.

Le dollar

La Russie ne mène pas une politique de dédollarisation : «Nous n’avons pas refusé de régler nos comptes en dollars. On nous a refusé les règlements, et nous devons simplement chercher d’autres possibilités. C’est tout».

L’économie russe

L’économie russe est déjà la quatrième économie mondiale, tandis que l’écart entre la Chine et les États-Unis se creuse. Elle se développe de manière constante, mais «il faut toujours s’efforcer de franchir de nouvelles étapes», a promis Poutine.

La croissance du PIB de la Russie pour le premier semestre 2024 est de 4,6%, et cette hausse devrait éclipser celle de 2023 d’ici la fin de l’année.

L’inflation dans le pays est désormais en baisse, même si elle a récemment dépassé 9% avec un objectif de 4%.

Les autorités russes sont déjà en train de «refroidir» la situation sur le marché du crédit et dans l’économie dans son ensemble en augmentant le taux directeur et en annulant certains programmes hypothécaires préférentiels.

Les BRICS

Les pays du Sud représentent plus de la moitié du PIB mondial, tandis que les pays BRICS en représentent un tiers. «Les priorités dans l’utilisation de certaines monnaies évoluent également naturellement».

Le cas du PDG de Telegram, Pavel Durov

Les autorités russes n’ont jamais eu de problèmes avec le fondateur de Telegram, Pavel Durov, contrairement à d’autres pays, a simplement commenté Poutine.

Élections américaines

C’est le peuple américain qui déterminera le vainqueur de l’élection présidentielle américaine, la Russie n’a donc pas besoin de parler de qui elle préfère ou ne préfère pas, s’est limité à dire le président russe.

Échange de prisonniers

L’échange de prisonniers entre la Russie et l’Occident qui a eu lieu en août a été «une situation gagnant-gagnant pour toutes les parties impliquées».

La Russie aidera toujours ses citoyens qui ont besoin d’aide, y compris ceux qui vivent à l’étranger, a martelé Poutine.

Transit de gaz

La Russie ne refuse pas de faire transiter son gaz par l’Ukraine : «Nous avons un contrat de transit qui expire le 31 décembre de cette année. Mais si l’Ukraine refuse ce transit, eh bien, nous ne pourrons pas la forcer».

Le refus de l’Allemagne de lancer la dernière partie du gazoduc Nord Stream 2 est «de la schizophrénie et de l’absurdité» : «Pourquoi ne le font-ils pas ? Je ne comprends pas», s’est exclamé le président russe.

L’expansion des livraisons de gaz russe à l’Extrême-Orient et à l’Asie centrale n’est pas liée aux événements en Ukraine : «Les économies de ces pays se développent rapidement, ils ont donc besoin de ressources supplémentaires».

L’Iran demande à la Russie de lui fournir du gaz, ce qui est «un projet tout à fait réalisable».

Le Moyen-Orient

La Russie s’efforce de résoudre les problèmes liés à la libération des otages détenus par le mouvement radical palestinien Hamas dans la bande de Gaza et réalise des progrès sur ce dossier, a confié Poutine.

source : Médias-Presse-Info

 

Rapport de situation sur l’évolution politique en Russie

SOURCE : RZO INTERNATIOANL & STRATPOL - LE 01/09/2024