Mali et RCA : deux échecs du mythe du « vivre ensemble »

par Bernard Lugan - le 30/11/2016.



Au Mali comme en RCA, des conflits récurrents et résurgents opposent des populations que tout sépare. Au nom du mythe universaliste du « vivre ensemble », la seule solution proposée par la France est électorale.

Or, l’ethno-mathématique confirmant à chaque fois la domination démographique, donc démocratique, des plus nombreux, les ressentiments des peuples minoritaires en sont aggravés. Voilà pourquoi nos interventions militaires successives, pourtant couronnées de succès, sont suivies d’autant d’échecs politiques. 

 

Un minimum de culture ethno-historique permet pourtant de bien poser le problème :

1) Dans le Sahel, et notamment au Mali, toutes les populations nomades nordistes, qu’il s’agisse des Touareg, des Maures, des Arabes et des Peul, furent esclavagistes. Durant des siècles, elles puisèrent dans le « vivier humain » sudiste du Bilad al Sudan, le « pays des Noirs », notamment chez les Bambara, les Soninké et les Malinké. Ces derniers n’ont pas oublié leurs souffrances passées dont ils furent délivrés par la colonisation. 

L’indépendance leur fournit ensuite les moyens d’une vengeance historique. Devenus les maîtres d’un Etat rassemblant artificiellement nomades et sédentaires, razzieurs et razziés, esclavagistes et victimes, ils s’en prirent aux Touareg, lesquels, en réaction, se soulevèrent à maintes reprises. Sur ce terreau propice prospérèrent ensuite les trafiquants de toutes sortes, puis les islamistes. 

 

2) Avant la colonisation, l’actuelle RCA, le Bilad el Kouti ou Dar Kouti, littéralement la « terre des esclaves », fut ravagée par les esclavagistes musulmans venus du Soudan et du Tchad. Comme au Mali, les populations sudistes conservent la mémoire de ces chasses à l’homme dont elles furent, elles aussi, libérées par la colonisation française. Pour elles, l’offensive que la Seleka lança en 2013 était donc une moderne razzia renouant avec les raids musulmans d’avant la période coloniale. 

 

Aujourd’hui, dans les deux pays, la situation est sans issue. Elle l’est parce que, au lieu de réfléchir à des solutions fondées sur le réel, donc sur la prise en compte du déterminant ethnique, la France, aveuglée par son idéologie universaliste n’a, comme les médecins de Molière, qu’un seul remède à proposer, le « clystère » électoral dont, quasiment partout en Afrique, l’on a pu constater l’inutilité et même la nocivité.

 

Une telle cécité, un tel aveuglement a une explication : les élites dirigeantes françaises sont formatées par l’africanisme devenu une discipline universitaire militante recrutant par endogamie doctrinale. Hier, il fut sous le contrôle de l’école marxiste qui bannissait le fait ethnique car il était jugé trop étranger à la conception matérialiste de l’histoire. Aujourd’hui, l’évidence ethnique est refusée car elle apporte un cruel démenti au diktat universaliste des adversaires de tout enracinement.

 

Il est donc urgent que soient fondées des universités « hors contrat » libérées de la doxa et dans lesquelles l’approche des Afriques pourra enfin se faire à travers le seul réel.

 


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