SYNTHÈSE : Extrait du rapport du Haut comité d’évaluation de la condition militaire pour l’année 2017 (paru fin 2018.)

Posté le jeudi 27 décembre 2018
SYNTHÈSE : Extrait du rapport du Haut comité d’évaluation de la condition militaire pour l’année 2017 (paru fin 2018.)

 Les années 2015 et 2016, marquées par les attentats terroristes de masse perpétrés sur le territoire français, ont été des années de rupture par rapport aux années précédentes : la hausse des moyens humains et budgétaires des forces armées a succédé à des années de baisse. L’année 2017 s’inscrit dans cette dynamique d’augmentation des moyens consacrés par l’État aux forces armées. 
Les effectifs militaires du ministère des armées et de la direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN) ont augmenté de près de 3 800 ETPT par rapport à 2016 pour atteindre 305 126 ETPT, l’effort étant plus important dans la gendarmerie (+ 2,6 %) que dans les armées (+ 0,6 %). Sur le périmètre des armées, la loi de programmation militaire (LPM) 2019-2025, promulguée le 13 juillet 2018, prévoit de conforter cette hausse des effectifs (+ 6 000 ETPT), 75 % des augmentations étant toutefois planifiées à partir de 2023. 

 En 2017, les forces armées ont connu d’importants flux d’entrées (32 424 militaires recrutés en 2017, volume légèrement en retrait par rapport à 2016, mais supérieur à celui observé entre 2007 et 2015), et font face à des flux de sorties au plus haut depuis 2012 (21 606 militaires ont quitté le service actif en 2017, soit 1 200 de plus qu’en 2016), les départs étant d’un volume plus important qu’escompté, en particulier parmi les sous-officiers formés et les militaires du rang en période probatoire. Des baisses de sélectivité au recrutement sont toutefois ponctuellement observées dans certaines catégories ou spécialités. Elles révèlent des problèmes, certes d’attractivité, mais surtout de fidélisation. L’importance des flux d’entrées et de sorties, elle-même rendue possible par la part élevée des contractuels dans les forces armées (52,7 % des militaires servent sous contrat et ils sont 65,7 % hors gendarmerie), permet au total d’obtenir, conformément à l’impératif de jeunesse des forces armées, un âge moyen de 33,1 ans dans les armées et de 36,6 ans dans la gendarmerie tandis qu’il s’élève à 43,7 ans dans la fonction publique de l’État en 2016. 

 2° L’activité opérationnelle sur les théâtres extérieurs et sur le territoire national est restée à un haut niveau en 2017 : 
7 700 militaires des armées ont été déployés, en moyenne et par mois, en opérations extérieures. Cet effectif est important même s’il se situe dans la moyenne basse des huit dernières années ; 
- le volume moyen déployé en opérations intérieures est de 10 000 militaires, soit près de quatre fois le volume déployé avant 2015 ; 
- près de 51 000 militaires des armées ont passé plus de 100 jours en dehors de leur garnison d’affectation tandis que les gendarmes mobiles ont été absents de leur domicile, en moyenne, 176 jours dans l’année ; 
- enfin, le nombre moyen de jours d’activité des réservistes opérationnels a augmenté pour atteindre, en moyenne, 34 jours d’activité annuelle, 49 jours pour les seuls sous-officiers de réserve de l’armée de Terre. Ce taux d’activité est le plus élevé depuis 2012.

 Comme en 2016, le commandement a veillé à ce que l’intensité de l’activité ne pèse pas de façon excessive sur les temps de récupération, même si certaines formations rattachées semblent être exposées à des tensions particulières, comme le service des essences des armées où les militaires n’ont pris en moyenne que 36 jours de permissions sur les 45 auxquels ils ont droit.

 Le Haut Comité relève que plusieurs mesures adoptées ou mises en œuvre en 2017 ont conforté la condition militaire : 
- la valeur du point d'indice a augmenté, pour l’ensemble des agents publics, de 0,6 % à compter du 1er février 2017, après une hausse similaire le 1er juillet 2016 ;
- les premières mesures de la transposition du protocole « parcours professionnels, carrières et rémunérations », dit « PPCR » et visant notamment à « une restructuration des grilles de rémunération des fonctionnaires, afin de mieux reconnaître leurs qualifications et de leur garantir des carrières plus valorisantes », prévues en 2017, ont été mises en œuvre en 2017, notamment celles relatives au transfert primes-points. Si elles n’ont pas eu d’incidence directe sur le montant net de la rémunération, elles ne seront pas sans effet sur le montant des pensions militaires de retraite ;  
- dans la continuité du plan d’amélioration de la condition du personnel de 2016, la ministre des armées a lancé un ambitieux plan d’accompagnement des familles et d’amélioration des conditions de vie des militaires le 31 octobre 2017. Ce « plan famille » doté de près de 530 M€ jusqu’en 2025 est une réponse concrète aux fragilités identifiées par le Haut Comité en prenant en compte leurs caractères multidimensionnels. Le Haut Comité avait fortement insisté en 2016 sur l’importance que revêtait à ses yeux l’accompagnement des familles en soulignant que « l’impact profond de la suractivité sur la vie familiale, la difficulté de programmer les permissions et les difficultés induites sur la garde et l’éducation des enfants constituent assurément un facteur majeur sinon le facteur majeur de fragilisation de notre système militaire ». Les mesures définies dans le « plan famille » sont de nature à améliorer significativement certains aspects des conditions de vie des militaires, comme l’accentuation des efforts en matière d’accueil de jeunes enfants, l’augmentation du parc de logement « défense » ou le développement d’une offre gratuite d’accès Wi-Fi à l’Internet dans toutes les implantations du ministère des armées. Le succès du « plan famille » dépendra de la qualité du suivi de son déploiement, de sa mise en œuvre effective dans les délais escomptés mais également de la qualité de l’information délivrée aux bénéficiaires comme de la bonne articulation entre les échelons centraux et les acteurs locaux. 


 Dans cette revue annuelle, le Haut Comité rend compte des évolutions des trois indicateurs principaux de suivi des rémunérations : la rémunération moyenne des personnes en place (RMPP), le salaire moyen par tête (SMPT) et l’indice de traitement brut – grille indiciaire  (ITB-GI) ont évolué positivement. Pour la première fois, l’ITB-GI a été calculé sur la population militaire des armées et celle de la gendarmerie.  Le Haut Comité souligne que ces indicateurs permettront l’évaluation, dans la durée, des évolutions catégorielles et constitueront un outil utile à l’orientation de la politique des rémunérations. Pour éviter toute lecture biaisée, le Haut Comité insiste sur la nécessité d’analyser l’évolution de ces indicateurs selon une approche pluriannuelle.

 

 Il convient cependant de souligner la persistance de plusieurs facteurs de fragilité : 
- les dysfonctionnements du calculateur LOUVOIS sont certes maîtrisés mais la défiance des militaires des armées vis-à-vis des processus de la solde persiste. Les avancées du développement de l’outil Source Solde, appelé à remplacer progressivement LOUVOIS à partir de 2019, ne doivent pas occulter le fait que LOUVOIS continuera à être utilisé au moins jusqu’en 2021; 
- comme pour l’ensemble de la fonction publique, les effets de la transposition aux militaires du protocole PPCR ont été décalés d’un an pour les mesures applicables à partir du 1er janvier 2018. Ce décalage a été mal compris par certains militaires qui y ont vu, à tort, une nouvelle entorse à la garantie, posée par le législateur à l’article L4123-1 du code de la défense, de transposition aux militaires, avec effet simultané, des mesures de portée générale affectant la rémunération des fonctionnaires civils de l'État. Le Haut Comité souligne l’importance d’anticiper et d’accompagner les mesures de transposition pour ne pas affaiblir la confiance que les militaires doivent avoir dans l’administration militaire et les textes qui les régissent ;
 - le taux de mobilité géographique a baissé de 0,5 point pour s’établir à 11,7 % en 2017 mais les durées moyennes de préavis avant mutation ne se sont pas améliorées, ce qui a notamment conduit le ministère des armées à fixer des objectifs ambitieux d’augmentation de ces délais dans le « plan famille » dont les premiers résultats positifs doivent pouvoir être constatés dès 2018 ; 
- la question de l’habillement, qui pourrait paraître accessoire, continue à peser sur la vie quotidienne des militaires, la fragilité des processus conduisant à des ruptures                                                              d’approvisionnement y compris pour des effets de service courant ou des tenues de cérémonie ; 
- l’année 2017 a été celle de la mise en œuvre effective des mesures décidées en 2015 et 2016 en matière de dialogue interne.  Installé le 5 janvier 2017, le conseil supérieur de la fonction militaire (CSFM) rénové est désormais composé de 42 membres qui se consacrent à temps plein à la concertation pour une durée de deux ans, prolongeable une fois.  Parallèlement, 12 associations professionnelles nationales de militaires (APNM) ont vu leur capacité juridique reconnue. Si, à la fin du premier semestre 2018, 4 d’entre elles étaient reconnues représentatives d’au moins une force armée ou formation rattachée, aucune n’a encore atteint les seuils de représentativité exigés pour siéger au CSFM. L’affirmation d’APNM représentatives accédant au CSFM est un enjeu important. Le Haut Comité souligne que l’émergence des APNM doit se faire dans le respect d’un droit d’association professionnelle adapté à l’état militaire et doit proscrire toute intervention de ces associations en dehors du champ que le législateur leur a assigné ; 
- le taux de féminisation a continué de progresser pour atteindre 16,3 % des effectifs. Ce taux global masque des situations contrastées selon la force armée (le service de santé des armées est féminisé à 59,7 %), la catégorie de grade (les femmes représentent 8,9 % des militaires du rang de l’armée de Terre) ou la spécialité. En revanche, le taux de féminisation des militaires du rang s’érode encore pour s’établir à 12,7 % en 2017 ; 
- enfin, l’agence de reconversion de la défense (ARD) a poursuivi son indispensable action au profit des militaires et des conjoints mais elle se heurte à la difficile captation de ceux qui quittent le service actif : bien que les départs aient atteint un haut niveau en 2017, le nombre de militaires ayant eu recours aux prestations de l’ARD a encore baissé pour la troisième année consécutive. L’ARD a toutefois contribué à l’amélioration du taux d’accès à l’emploi (60 % un an après le départ) et à la diminution significative du nombre d’anciens militaires indemnisés au titre du chômage (- 7 %).

 Les évolutions de l’année 2017 rappellent que les singularités de l’état militaire forgent une structure des ressources humaines particulière, reposant sur des forces jeunes, des flux spécifiques et des dispositifs de formation et de reconversion adaptés. Le Haut Comité souligne la nécessité de cette prise en compte pour garantir des forces armées efficaces et disponibles prêtes à « assurer par la force des armes la défense de la patrie et des intérêts supérieurs de la Nation ». Les travaux sur la politique de rémunération des militaires et les réflexions sur l’évolution du régime des pensions militaires de retraite doivent impérativement en tenir compte.

 La présente revue statistique constitue la seconde partie du 12e  rapport annuel du Haut Comité dont la partie thématique a abordé, en juin 2018, « la vie des militaires et de leur famille selon le lieu d’affectation ». Le 13e rapport annuel devrait aborder le thème de la protection santé, du soutien et de l’accompagnement des malades et des blessés.

 

 

Source : https://www.asafrance.fr/item/synthese.html

 

Pour lire le rapport dans son intégralité, cliquez sur le PDF ci-dessous. 

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