LA GUERRE EN UKRAINE (I)

Que faire de l’Ukraine et de ce « monstre » qu’est l’OTAN ?

par Daniel Larison - Le 14/04/2023.

L’alliance continue de se déchirer sur l’adhésion future de Kiev, ignorant la dynamique qui nous a conduits là où nous sommes.

Les alliés européens font de nouveau pression pour que l’OTAN crée une « feuille de route » pour l’adhésion de l’Ukraine à l’alliance.

Selon le Financial Times, la Pologne et les États baltes font pression sur l’Alliance pour qu’elle prenne des mesures afin de rapprocher l’Ukraine de la future adhésion promise en 2008 lors du sommet de Bucarest. La nouvelle quelque peu surprenante de ce rapport est que l’administration Biden s’est jointe à l’Allemagne et à la Hongrie pour s’opposer à ces efforts « visant à offrir à Kiev des liens plus étroits avec l’OTAN et des déclarations claires de soutien à sa future adhésion ».

Les États-Unis ont été l’un des États les plus favorables à l’adhésion future de l’Ukraine à l’OTAN, de sorte que la réticence de l’administration sur cette question est un changement notable et bienvenu. Étant donné que ce sont les États-Unis, sous George W. Bush, qui ont demandé des plans d’action pour l’adhésion (MAP) pour la Géorgie et l’Ukraine en 2008, il est significatif que les États-Unis fassent partie de ceux qui préfèrent maintenir le statu quo pour l’instant.

Les alliés d’Europe de l’Est font pression depuis des mois pour que l’alliance progresse sur la demande d’adhésion de l’Ukraine. Une délégation de législateurs polonais et lituaniens s’est rendue à Washington au début de l’année pour demander à l’administration Biden d’agir en faveur de l’adhésion de l’Ukraine à l’alliance avant l’élection présidentielle américaine de l’année prochaine. La Pologne et les États baltes ont également cherché à utiliser le sommet de l’OTAN qui se tiendra en juillet à Vilnius pour promouvoir l’adhésion de l’Ukraine.

Selon le rapport du FT, ces gouvernements trouvent d’autres États alliés favorables à leurs arguments, mais les États-Unis « repoussent » les efforts visant à ouvrir une « voie politique » pour des liens plus étroits entre l’OTAN et l’Ukraine.

Il est important de comprendre que la position de l’administration Biden dans ce débat au sein de l’Alliance ne reflète pas un changement majeur dans sa vision de l’adhésion éventuelle de l’Ukraine. Elle montre que l’administration souhaite que l’alliance reste concentrée sur la nécessité immédiate de fournir une assistance militaire à l’Ukraine. Pour l’équipe Biden, discuter d’une voie d’adhésion future à l’alliance alors que la guerre fait toujours rage reviendrait à mettre la charrue avant les bœufs.

L’administration semble comprendre que le fait d’aborder une question aussi litigieuse lors du sommet créerait des dissensions au sein de l’alliance sur une question qui ne sera pas résolue dans un avenir proche. Politico Europe a rapport la récente réunion de la Commission OTAN-Ukraine, où les divisions entre les alliés de l’OTAN ont déjà été mises à nu : « La Hongrie, qui a longtemps empêché l’organe de se réunir, a assisté à contrecœur à la session, mais a juré de continuer à s’opposer à l’intégration de l’Ukraine ». Exposer ces divisions lors du sommet de l’OTAN ne serait guère propice à rallier davantage de soutien à l’Ukraine.

Nous devrions nous rappeler que les déclarations malavisées lors des sommets de l’OTAN sont l’un des éléments qui ont conduit à la situation actuelle. Il y a quinze ans, lors du sommet de Bucarest, l’alliance avait annoncé : « Nous sommes convenus aujourd’hui que ces pays [l’Ukraine et la Géorgie] deviendront membres de l’OTAN ». L’engagement de l’alliance à Bucarest était une grave erreur qui aurait dû être corrigée il y a de nombreuses années. La promesse d’intégrer l’Ukraine dans l’alliance à l’avenir a créé une situation dangereuse dans laquelle l’Ukraine était exposée à une hostilité accrue de la part de la Russie sans aucune garantie réelle de protection.

En tant que compromis entre les États-Unis et les alliés européens opposés à l’adhésion de l’Ukraine, il a produit le pire des deux mondes. Il aurait été préférable pour toutes les parties concernées que l’alliance ne dise rien. Quinze ans plus tard, l’Ukraine cherche toujours à entrer par la porte dite ouverte. L’alliance devrait être franche avec l’Ukraine et admettre qu’elle ne peut pas entrer.

L’adhésion de l’Ukraine à l’alliance n’a jamais eu de sens pour l’OTAN ou pour les États-Unis, et c’est l’une des raisons pour lesquelles elle a été reportée si longtemps. S’il est préférable de reporter la décision plutôt que de se précipiter dans un nouveau cycle d’expansion malavisée de l’alliance, il est également injuste de continuer à faire miroiter à l’Ukraine le faux espoir d’une adhésion. Entretenir l’illusion que l’adhésion à l’alliance est une perspective réaliste ne rend service à personne.

Le débat sur l’adhésion future de l’Ukraine est le symptôme d’une alliance trop vaste aux intérêts trop divergents. Si les voisins immédiats de l’Ukraine peuvent penser qu’il est urgent d’intégrer l’Ukraine dans l’alliance, la plupart des autres membres ne ressentent pas cette urgence et ne voient que les inconvénients de l’ajout d’un nouvel engagement en matière de sécurité. Une nouvelle expansion ne ferait que renforcer les forces qui tirent l’alliance dans des directions opposées.

L’historien Michael Kimmage a un jour qualifié l’OTAN de « monstre lâche et encombrant » en raison de ses nombreux membres et de ses intérêts divergents. Depuis lors, l’OTAN est devenue encore plus lâche, et un nouveau cycle d’expansion est déjà en cours. Ajouter l’Ukraine à tout cela serait un pont trop loin, et qui plus est, presque tous les membres de l’alliance doivent le savoir à présent.

Les États-Unis ont déjà plus que suffisamment d’engagements en matière de sécurité en Europe, et ils ne devraient pas envisager d’en ajouter d’autres. La recommandation formulée par M. Kimmage au début de l’année 2022 est toujours d’actualité : « L’OTAN doit changer de cap en refusant publiquement et explicitement d’ajouter de nouveaux États membres ». Nous ne saurons jamais quelle différence, le cas échéant, un tel engagement aurait pu faire si l’OTAN avait agi de la sorte des années plus tôt, mais c’est la bonne chose à faire pour l’Alliance aujourd’hui, dans son propre intérêt.

Personne ne doit s’attendre à ce que le sommet de Vilnius procède à l’une de ces révisions majeures, mais nous pouvons au moins espérer que les dirigeants alliés ne commettront plus d’erreurs imprévues, comme l’ont fait leurs prédécesseurs il y a quinze ans.

Des responsables de l’OTAN ont évoqué la possibilité d’utiliser la déclaration de Bucarest comme base d’une nouvelle déclaration sur les relations de l’Ukraine avec l’OTAN, mais cela reviendrait à aggraver l’erreur initiale commise à l’époque. L’alliance ne doit pas répéter des promesses qu’elle ne va pas honorer, et elle ne doit pas en faire de nouvelles qu’elle ne peut pas soutenir. Par-dessus tout, l’alliance doit éviter de dire quoi que ce soit qui brouille la frontière entre les membres de l’alliance et les partenaires non alliés. Si l’OTAN a appris quelque chose de ses erreurs passées, elle devrait choisir de ne rien dire sur ce sujet plutôt que de faire des déclarations qu’elle regrettera.

Notre politique étrangère souffre de la réticence de nos dirigeants à fixer des limites. Le soutien à l’expansion continue de l’OTAN est un excellent exemple du refus de limiter les nouvelles obligations que notre gouvernement est prêt à assumer. Les États-Unis étant déjà surchargés par de trop nombreux engagements dans le monde, la nécessité de fixer des limites et de fermer la porte à de nouvelles obligations est évidente.

Fermer la porte à une nouvelle expansion de l’OTAN constituerait une étape importante vers une politique étrangère moins ambitieuse et clairement axée sur les intérêts vitaux des États-Unis.

source : Responsible Statecraft via Arrêt sur info 

États-Unis : Un membre d’une base militaire à l’origine de la fuite de documents confidentiels US

par Al Manar - Le 24/04/2023.

La fuite de documents américains classifiés est l’œuvre d’un jeune homme ayant travaillé sur une base militaire et partagé ses informations sur un groupe privé en ligne, selon le journal Washington Post.

Le quotidien américain affirme dans un article publié mercredi avoir interrogé sous le sceau de l’anonymat deux membres du réseau social Discord où ont été publiées des centaines de pages de documents confidentiels, dont certains top secret ou concernant la guerre en Ukraine ou encore des alliés des États-Unis, dont Israël.

La fuite, qui fait l’objet d’une enquête criminelle de la part du département américain de la Justice, provient d’un homme ayant comme pseudonyme « OG ». Il a régulièrement publié pendant des mois des centaines de pages recopiées sur des documents dans la base militaire où il travaille, avance le journal, qui ajoute que la personne interrogée a refusé de préciser de quelle base il s’agissait.

Elle a affirmé que « OG » passait « une partie de sa journée à l’intérieur d’une installation sécurisée qui interdisait les téléphones portables et autres appareils électroniques », et qu’il « travaillait d’arrache-pied pendant des heures à rédiger des documents classifiés à partager avec ses camarades sur le serveur Discord », écrit le journal, cité par l’AFP.

Il a plus tard pris des photos de documents et les a transmises à son groupe. « Lorsqu’il s’est avéré trop fastidieux de reproduire des centaines de documents classifiés à la main, il a commencé à publier des centaines de photos des documents eux-mêmes », poursuit le quotidien.

« OG » a demandé aux autres membres du groupe de ne pas diffuser les documents, et qu’il n’avait pas l’intention d’être un lanceur d’alerte, assure le média en citant l’une de ses sources. Certaines informations étaient tellement sensibles qu’elles étaient marquées « NOFORN », c’est-à-dire à ne pas divulguer auprès d’étrangers, avance le Washington Post.

Selon un membre du groupe cité par le quotidien, « OG » « semblait penser que son savoir d’initié offriraient aux autres une protection contre le monde troublé qui les entoure ».

« OG » portait « un regard sombre sur le gouvernement », selon le média, qui écrit : « Le jeune membre du groupe a déclaré que (OG) parlait des Etats-Unis, et en particulier des forces de l’ordre et de la communauté du renseignement, comme d’une force sinistre qui cherchait à supprimer ses citoyens et à les maintenir dans l’ignorance. Il pestait contre « l’excès de pouvoir du gouvernement » ».

Le groupe d’environ 24 personnes, des hommes et des garçons pour la plupart, s’est formé autour de leur « amour mutuel des armes à feu, du matériel militaire et de Dieu », constituant un « club par cooptation en 2020 sur Discord », selon le média.

Risque « très grave »

Les documents mis en ligne révèlent les inquiétudes des services de renseignement américains quant à la viabilité d’une contre-offensive ukrainienne contre les forces russes, en raison de problèmes de formation et de ravitaillement.

Un document examiné par l’AFP fait état des préoccupations des États-Unis à propos de la capacité de l’Ukraine à continuer à se défendre contre les frappes russes.

Des dizaines de photos de ces documents ont été relayées sur Twitter, Telegram ou Discord ces derniers jours, certains ayant sans doute circulé sur internet depuis des semaines, sinon des mois, avant d’attirer l’attention de la presse.

Les autorités américaines n’ont toutefois pas publiquement confirmé l’authenticité de ces documents publiés en ligne, et elle n’a pas encore été vérifiée de manière indépendante. Le Pentagone a néanmoins affirmé que cette affaire posait un risque « très grave » pour la sécurité nationale des États-Unis.

Outre le sujet ukrainien, certains documents semblent par ailleurs indiquer une collecte de renseignements opérée par les États-Unis et ciblant certains de leurs alliés, comme Israël et la Corée du Sud. Washington tente depuis de les rassurer.

De nombreux documents ne sont plus disponibles là où ils avaient été publiés, et selon la presse, les autorités les auraient fait supprimer. Les retombées de cette fuite apparente pourraient être importantes, mettant potentiellement en danger les sources de renseignement des États-Unis, tout en donnant à leurs ennemis des informations précieuses.

source : Al Manar

Le doute augmente au sujet des « fuites » du Pentagone.


Par Moon of Alabama – Le 13 avril 2023

Lorsque les médias ont révélé la première série de « fuites » des briefings du Pentagone, ils ont également publié des photos des originaux.

Puis est venue une deuxième série qui, comme par hasard, visait davantage à dénoncer la Russie qu’à parler des documents eux-mêmes. Elles ont été qualifiées de nouvelles fuites provenant d’une source inconnue jusqu’alors. Parmi ces articles, on peut citer :

 

Aucune négociation de paix entre la Russie et l’Ukraine n’est prévue cette année, selon une fuite américaine – Washington Post – 12 avril 2023

La guerre entre l’Ukraine et la Russie devrait s’étendre jusqu’en 2024, sans qu’aucune des deux parties ne remporte la victoire tout en refusant de négocier la fin du conflit, selon une évaluation de la Defense Intelligence Agency qui fait partie des documents hautement sensibles du gouvernement américain divulgués en ligne et obtenus par le Washington Post.

« Les négociations pour mettre fin au conflit sont peu probables en 2023 dans tous les scénarios envisagés« , indique le document, qui n’a pas été divulgué auparavant.

En cas d’impasse, l’Ukraine procédera à la « mobilisation totale » de sa population éligible restante, prédit le document, ce qui enverra davantage de jeunes hommes sur les lignes de front.

 

Fuite de renseignements américains : Des agents russes ont revendiqué de nouveaux liens avec les Émirats arabes unis – Associated Press – 12 avril 2023

Des espions américains ont surpris des agents de renseignement russes en train de se vanter d’avoir convaincu les Émirats arabes unis, riches en pétrole, de « travailler ensemble contre les agences de renseignement des États-Unis et du Royaume-Uni« , selon un document américain prétendument mis en ligne dans le cadre d’une importante faille dans les services de renseignement américains.

Le document consulté par AP comprend un article citant une recherche du 9 mars avec le titre : « Russie/EAU : Intelligence Relationship Deepening » (Russie/Émirats arabes unis : approfondissement des relations entre services de renseignement). Les responsables américains ont refusé de confirmer l’authenticité du document, ce que AP n’a pas pu faire de manière indépendante. Toutefois, il ressemble à d’autres documents publiés dans le cadre de la récente fuite.

Les diapositives que j’ai vues jusqu’à présent datent de la fin février et des premiers jours de mars. Des documents datés du 9 mars sont nouveau.

De nouvelles fuites montrent de graves disputes entre les dirigeants russes – New York Times– 12 avril 2023

Les documents supplémentaires, qui ne figuraient pas dans un ensemble de 53 pages qui a été porté à l’attention du grand public en ligne la semaine dernière, dépeignent une image du gouvernement russe se querellant sur le nombre de morts et de blessés dans la guerre en Ukraine, l’agence de renseignement intérieure accusant l’armée d’occulter l’ampleur des pertes que la Russie a subies.

Le nouveau lot, qui contient 27 pages, renforce la profondeur avec laquelle les agences d’espionnage américaines ont pénétré presque tous les aspects de l’appareil de renseignement et de la structure de commandement militaire russe.

L’article est signé par Aric Toler, de Bellingcat. Il n’y a pas d’explication sur la provenance des « documents supplémentaires » ni sur la manière dont ils ont été trouvés.

Les États-Unis pensent que le secrétaire général de l’ONU est trop conciliant avec Moscou, selon des fichiers divulgués – BBC – 13 avril 2023

Les États-Unis estiment que le secrétaire général de l’ONU est trop enclin à satisfaire les intérêts de la Russie, selon de nouvelles révélations contenues dans des documents classifiés divulgués en ligne.

….

C’est la dernière révélation d’une fuite de documents secrets, que les responsables américains s’efforcent d’élucider.

Je m’interroge également sur le traitement sélectif d’une deuxième série de documents par les médias grand public.

J’ai l’impression que quelqu’un alimente au coup par coup les différents médias en « renseignements » supplémentaires. Chacun d’entre eux publie une histoire différente. S’il s’agit d’une réserve commune, comment se fait-il que ces médias semblent avoir coordonné qui prend quelle fuite ?

Aucune photo des documents n’est apparue dans cette deuxième série de « fuites ».

Le Washington Post affirme aujourd’hui détenir de nombreuses informations sur la personne qui a fait fuiter la première série de documents du Pentagone :

L’homme à l’origine de la fuite massive de secrets du gouvernement américain qui a révélé l’espionnage des alliés, les sombres perspectives de la guerre entre l’Ukraine et la Russie et mis le feu aux poudres diplomatiques à la Maison Blanche est un jeune et charismatique amateur d’armes à feu qui a partagé des documents hautement confidentiels avec un groupe de connaissances éloignées à la recherche de camaraderie dans l’isolement de la pandémie.

Unis par leur amour mutuel des armes à feu, du matériel militaire et de Dieu, ces quelque deux douzaines de personnes – pour la plupart des hommes et des garçons – ont créé en 2020 un club sur Discord, une plateforme en ligne très prisée des joueurs, sur invitation uniquement. Mais ils n’ont guère prêté attention l’année dernière lorsque celui que certains appellent « OG » a posté un message truffé d’acronymes et de jargon étranges. Les mots n’étaient pas familiers et peu de gens ont lu la longue note, a expliqué l’un des membres. Mais ils vénéraient OG, le chef aîné de leur petite tribu, qui prétendait connaître des secrets que le gouvernement cachait aux gens ordinaires.

Le jeune membre a lu attentivement le message d’OG et les centaines d’autres qui, selon lui, ont suivi régulièrement pendant des mois.

Je suis sceptique quant à cette histoire trop bien ficelée. Cet « amour mutuel des armes, du matériel militaire et de Dieu » est-il bien réel ?

L’histoire n’explique pas vraiment comment les « reporters« , Shane Harris, scribe du Post spécialisé dans le renseignement et la sécurité nationale, et Samuel Oakford, de Bellingcat, ont trouvé la personne, ni pourquoi elle était prête à tout dévoiler :

Ce récit de la manière dont des documents de renseignement détaillés destinés à un cercle exclusif de chefs militaires et de décideurs gouvernementaux sont entrés puis sortis de la communauté fermée d’OG est basé en partie sur plusieurs entretiens prolongés avec le membre du groupe Discord, qui a parlé au Washington Post sous couvert de l’anonymat. Il a moins de 18 ans et était un jeune adolescent lorsqu’il a rencontré OG. Le Washington Post a obtenu le consentement de la mère du membre pour lui parler et enregistrer ses propos sur vidéo. Il a demandé à ce que sa voix ne soit pas masquée.

Son récit a été corroboré par un second membre qui a lu un grand nombre des documents classifiés partagés par OG et qui a également parlé sous couvert d’anonymat. Les deux membres ont déclaré connaître le vrai nom d’OG ainsi que l’État dans lequel il vit et travaille, mais ils ont refusé de partager ces informations pendant que le FBI recherche la source des fuites.

On n’utilise pas son vrai nom lorsqu’on s’inscrit sur un serveur de discussion de joueurs ou sur des sites similaires. Par conséquent, même si le Post disposait du « nom » en ligne de ce membre, il n’y aurait généralement aucun moyen de le trouver.

Le jeune joueur a-t-il contacté le Post ? Mais pourquoi parlerait-il de ce problème ?

Et pourquoi le Post publierait-il autant de détails sur cette personne ? Il est évident que cela permettra au FBI de l’identifier facilement.

Le Post affirme également que le lot de fuites est beaucoup plus important que ce que l’on savait jusqu’à présent :

Le Post a également examiné environ 300 photos de documents classifiés, dont la plupart n’ont pas été rendus publics, certains des documents textuels qu’OG aurait rédigés, un enregistrement audio d’un homme que les deux membres du groupe ont identifié comme étant OG et qui s’adresse à ses compagnons, ainsi que des enregistrements de discussions et des photographies montrant qu’OG communique avec eux sur le serveur Discord.

Mais le Post ne dit pas d’où proviennent ces plus de 300 documents, ni sur quoi ils portent. Ne sont-ils pas plus importants ?

Nous avons des photos de la première réserve de dossiers. Les diapositives des briefings me semblent réelles. Le langage utilisé est celui du Pentagone. Les abréviations utilisées sont typiques. Mais certaines des informations qu’elles contiennent, comme le nombre de victimes, sont douteuses. Les chefs d’état-major s’informent-ils vraiment auprès du ministère ukrainien de la défense, dont on sait que les chiffres ne sont que fantaisies ? Le Pentagone et/ou la CIA ont certainement leurs propres estimations des pertes. Pourquoi ne pas les communiquer ?

Nous n’avons vu aucune photo des diapositives sur lesquelles sont basés les articles supplémentaires. Pourquoi n’ont-elles pas été publiées ?

Une explication plausible est que la première publication était une vraie fuite, mais que quelqu’un envoie maintenant de nouvelles « fuites » à des médias spécialisés, qui ne sont qu’à moitié vraies ou de la pure propagande.

En outre, l’article du Washington Post sur « OG » n’est pas seulement étrange, il est aussi suspect.

Chez Naked Capitalism, Lambert Strether et Yves Smith ont également des doutes à ce sujet :

Yves et moi avons discuté de cet article ; il nous semble remarquablement « brillant » ; peut-être écrit, d’après des indices dans le ton et la structure, par une entité autre que le « reporter » dont le nom a été donné. Le personnage central de ce récit excessivement précis, « OG« , l’auteur de la fuite, est prétendument un chrétien, un amateur d’armes à feu, et quelque chose qui ressemble au chef d’un groupe d’adolescents mécontents sur le serveur Discord où les documents ont été trouvés ; son motif pour y placer les documents semble avoir été de consolider son autorité et son ascendant moral sur son groupe. Pendant ce temps, « OG » semble presque parfaitement calculé pour s’intégrer parfaitement dans le cliché « traître fasciste » dans la tête des libéraux. Je me demande si nous le trouverons un jour. On peut s’attendre à ce que l’intrigue « La chasse à OG » se poursuive pendant de nombreuses semaines, bon travail. […] En ce qui concerne le cui bono, Yves souligne que les prochaines étapes évidentes sont l’adoption du pernicieux Restrict Act et l’exercice de l’autorité contre une autre plateforme, Discord.

Ou bien tout ceci n’est-il qu’une diversion par rapport à la perte de Bakhmut par l’Ukraine ?

Ou bien tout cela a-t-il été divulgué comme un avertissement à la Maison Blanche par quelqu’un de haut placé dans l’État sécuritaire ?

Le dernier article de Seymour Hersh sur la corruption de Zelensky pourrait nous donner un indice. Un résumé de l’article payant de Hersh est disponible ci-dessous :

Entre-temps, Hersh, citant un responsable des services de renseignement, a déclaré que le sabotage des oléoducs Nord Stream et l’absence de planification stratégique concernant l’Ukraine avaient provoqué un fossé croissant entre la Maison Blanche et la communauté des services de renseignement des États-Unis.

« Il y a une rupture totale entre la direction de la Maison Blanche et la communauté du renseignement« , a déclaré le responsable du renseignement cité par Hersh.

Cette rupture présumée remonte à l’opération secrète de l’automne dernier visant à faire exploser les oléoducs russes Nord Stream, opération qui aurait été ordonnée par le président Joe Biden.

« La destruction des oléoducs Nord Stream n’a jamais été discutée, ni même connue à l’avance, par la communauté« , a déclaré le fonctionnaire.

Un autre point qui divise l’administration Biden et la communauté du renseignement est le manque de planification concernant l’Ukraine. Le fonctionnaire a souligné la décision de Biden de déployer deux brigades à quelques kilomètres de la frontière ukrainienne en réponse à l’opération militaire spéciale de la Russie.

S’il y a des tensions entre les militaires ou les services de renseignement et la Maison Blanche, cette histoire de « fuite » pourrait bien avoir été mise en place pour limiter les possibilités de la Maison Blanche.

Mise à jour (17:30 UTC)

Le New York Times a trouvé l’auteur de la fuite et a publié son nom et sa localisation.

Le chef d’un groupe en ligne où des documents secrets ont été divulgués est un garde national de l’armée de l’air

Selon des entretiens et des documents examinés par le New York Times, le chef d’un petit groupe de discussion sur les jeux en ligne où une foule de documents secrets des services de renseignement américains ont été divulgués au cours des derniers mois est un membre de 21 ans de l’unité de renseignement de la Garde nationale aérienne du Massachusetts.

Le garde national, qui s’appelle Jack Teixeira, supervisait un groupe privé en ligne appelé Thug Shaker Central, où environ 20 à 30 personnes, pour la plupart des jeunes hommes et des adolescents, se réunissaient autour d’une passion commune pour les armes à feu, les mèmes racistes en ligne et les jeux vidéo.

L’auteur principal est Erin Toller, de Bellingcat, et un autre est Christiaan Triebert, anciennement de Bellingcat. C’est Christiaan Triebert qui a tweeté l’article du NYT :

Christiaan Triebert @trbrtc – 16:02 UTC – 13 avril 2023

Nous avons identifié le leader du groupe Discord où des documents américains top secrets ont été divulgués. Il s’agit d’un membre de la Garde nationale aérienne du Massachusetts, âgé de 21 ans, et plus précisément de son service de renseignement. Lien cadeau, pas de paywall :

Voici ce que nous savons sur le leader du groupe en ligne où des documents secrets ont été divulgués.

L’un des auteurs cités dans l’article du Washington Post ci-dessus est Samuel Oakford, également ancien rédacteur de Bellingcat.

Nous savons que Bellingcat est un organe du service de renseignement extérieur britannique MI6. Cela semble donc très louche :

chinahand @chinahand – 17:11 UTC – 13 Avril 2023

Si bellingcat a identifié la source de la fuite, demandez-vous si cela a donné une excuse afin que la NSA puisse continuer à maintenir « nous ne surveillons pas les citoyens américains sans mandat« . il y a toute une équipe des 5 eyes construite afin d’esquiver les restrictions nationales sur la surveillance, je pense.

Pour ma part, je trouve extrêmement préoccupant que le Washington Post et le New York Times aient travaillé plus intensément à l’identification de la source des fuites qu’à l’étude des documents qui ont fait l’objet de fuites. Depuis quand leur travail consiste-t-il à trouver les personnes qui mettent en danger l’État de sécurité nationale ?

/Fin de la mise à jour

Moon of Alabama

Traduit par Wayan, relu par Hervé, pour le Saker Francophone.

Analyse informée de l’affaire des fuites et de leur contenu.

par Big Serge - Le 13/04/2023.

Note de l’auteur : J’avais l’intention de publier un article sur l’art opérationnel soviétique cette semaine, mais l’émergence des fuites a détourné mon attention et a conduit à cet article à la place. Nous reviendrons bientôt sur l’histoire militaire.

Un autre hiver s’est terminé et le printemps est à nouveau apparu sur la guerre en Ukraine. Au milieu du dégel et de la boue qui l’accompagne, les forces russes – y compris l’indominable Groupe Wagner – ont poussé le groupe ukrainien à Bakhmut au bord du gouffre, les AFU « accrochant » maintenant leur dernier pied défensif dans la ville.

Bakhmut est devenue la plus grande bataille du XXIe siècle et entre maintenant dans sa phase culminante.

Néanmoins, les développements sur le champ de bataille ont été quelque peu éclipsés par la fuite apparente de documents classifiés du renseignement militaire américain qui offrent une vue d’ensemble sur le fonctionnement interne de la guerre du Pentagone.

Je ne suis pas tout à fait clair sur les politiques de contenu de Substack en ce qui concerne ces documents. Il est certainement trop tard pour que le gouvernement américain contienne la fuite, car les images ont à ce stade été partagées, capturées et téléchargées d’innombrables fois, mais cela n’empêche pas une tentative de limiter sa circulation via une campagne whack-a-mole de suppression de contenu.

En tout cas, ne désirant ni violer la loi américaine ni enfreindre les règles de contenu de Substack, la prudence me dicte de ne pas intégrer les images directement dans ce post, mais elles ne sont pas difficiles à trouver – la chaîne Telegram « Rus Fleet » les a en ce moment, par exemple. Utilisez votre propre discrétion.

Bien que je ne publierai pas les documents divulgués ici ou sur Twitter, j’aimerais en parler. S’ils sont effectivement authentiques (et il semble qu’ils le soient), ils offrent un aperçu important de la génération de forces et de la puissance de combat en Ukraine – et peut-être plus important encore, du cadre de renseignement dans lequel le Pentagone travaille.

Aucun des éléments présentés ne donne une image particulièrement rose de l’AFU ou de ses bienfaiteurs sur la côte atlantique.

Un bref historique des fuites

Passons brièvement en revue les documents divulgués en tant que tels avant de réfléchir à leur contenu. Ils prennent la forme de photographies de morceaux de papier physiques provenant d’un briefing des services de renseignement américains. Cela implique que la nature particulière de la violation est une fuite (personnel ayant un accès légitime aux documents les diffusant illégalement au public) plutôt qu’un piratage (quelqu’un obtenant un accès illégitime par intrusion d’une forme ou d’une autre).

Les pages ont des plis visibles sur eux, et un magazine de chasse peut être vu sur une table en arrière-plan. De nombreuses pages sont marquées pour être partagées avec les alliés de l’OTAN, mais certaines ne stipulent que les yeux des États-Unis.

L’impression générale est qu’un Américain a plié les documents d’information, les a mis dans sa poche (l’armée américaine est une institution diversifiée et inclusive, et le fuyard pourrait avoir n’importe quel sexe, tous ou aucun sexe), a ramené les pages à la maison et les a photographiées. Ce n’était presque certainement pas un atout russe – si les documents avaient été acquis par les services de renseignement russes, ils l’auraient gardé en interne.

Maintenant, la question évidente est de savoir si les documents sont réels. Il y a probablement au moins une base rationnelle pour suspecter une opération de désinformation. Toutes les armées s’engagent dans une gamme de renseignements entremêlés (voir ce que fait l’ennemi), de contre-espionnage (cacher ce que vous faites) et de désinformation (mentir sur ce que vous faites). Peut-être, pourrait-on penser, ces documents n’ont pas du tout été divulgués, mais ont été plantés de manière indélébile sur Internet pour induire en erreur.

À l’origine, j’étais plutôt sceptique quant à l’authenticité des documents, mais j’en suis venu à la conclusion qu’ils sont authentiques (évaluons à 90% la probabilité d’authenticité et à 10% la probabilité de falsification ou de désinformation).

Mes raisons sont essentiellement les suivantes :

La chronologie des événements suggère une fuite authentique. Alors que les documents n’ont commencé à circuler largement que la semaine dernière environ, ils ont en fait été publiés pour la première fois sur Internet (pour autant que je sache) le 1er mars – mais personne ne l’a remarqué, apparemment.

Les documents n’ont pas attiré l’attention de masse jusqu’à ce qu’une chaîne telegram pro-russe les trouve et les republie après avoir mal photoshopé les estimations des pertes pour montrer des pertes russes beaucoup plus faibles.

Ironiquement, ce sont ces modifications falsifiées qui ont suscité un intérêt massif pour les documents. Pour moi, cela suggère que les documents ne font pas partie d’une sorte de campagne de désinformation du Pentagone, car ils sont essentiellement restés inactifs dans les coins reculés d’un serveur Discord Minecraft pendant un mois entier. Si les services de renseignement américains voulaient faire circuler de faux documents, on soupçonne qu’ils les auraient effectivement diffusés, plutôt que de les déposer dans un coin obscur de l’espace de l’information et de les laisser languir.

Les documents ont une parfaite cohérence interne. La fuite complète comprend des dizaines et des dizaines de pages qui sont totalement cohérentes au niveau des dates de livraison, des listes d’inventaire et de l’identification des unités arcanes. Cela va même au-delà de l’utilisation parfaite des acronymes et de la symbiologie militaire. La création de ces documents serait une entreprise colossale et nécessiterait à la fois une expertise précise en la matière et une quantité gigantesque de références croisées pour éviter les contradictions-à moins, bien sûr, que les documents soient authentiques, auquel cas le matériel serait cohérent parce qu’il est réel.

Les documents contiennent relativement peu de renseignements exploitables. Ils ne contiennent aucun détail de planification des prochaines opérations offensives de l’Ukraine et seulement des contours flous des dispositions des forces ukrainiennes. Une ruse destinée à tromper les Russes devrait contenir des renseignements hautement exploitables (mais faux).

Enfin, le gouvernement et les médias procèdent comme si les documents et la faille de sécurité associée étaient réels, et ils tentent à la fois de limiter la propagation des documents en ligne et de retrouver la source de la fuite.

Tout cela me suggère que ces documents offrent un véritable aperçu de la gestion de la guerre par le Pentagone. Nous pouvons conserver une certaine mesure de prudence et de doute, mais partons de la présomption de leur authenticité et réfléchissons à ce que nous pouvons en apprendre.

Situation de Forces Ukrainiennes

L’implication la plus significative des documents est simple: la puissance de combat de l’Ukraine est considérablement dégradée et, en particulier, ses unités mécanisées et ses forces d’artillerie sont en très mauvais état.

Le matériel pertinent ici en particulier est une page intitulée « US Allied & Partner UAF Combat Power Build », qui détaille la génération de forces, l’entraînement et les tranches d’équipement qui créeront le package mécanisé que l’Ukraine utilisera dans son offensive de printemps. Le plan prévoit une force de douze brigades nominales, dont neuf seront équipées par l’OTAN et trois générées en interne par les Ukrainiens. La fuite ne donne pas un aperçu des trois brigades ukrainiennes, mais le complément prévu des neuf brigades de l’OTAN est méticuleusement répertorié).

Au total, la construction de la puissance de combat nécessite que ces brigades déploient un total de 253 chars, 381 Véhicules de combat d’Infanterie, 480 Véhicules blindés de transport de troupes et 147 pièces d’artillerie. Cela implique qu’il ne s’agira de brigades que de nom et qu’elles seront en fait beaucoup moins étoffées. La répartition de ces systèmes entre neuf brigades donnera une force moyenne de seulement 28 chars par brigade, ainsi que quelque 95 IFV/APC et 16 tubes d’artillerie. Comparez cela à une équipe de combat de Brigade blindée de l’Armée américaine, qui disposerait de près de 90 chars et de près de 200 IFV/APC. Une brigade américaine Stryker (une formation plus légère et rapidement déployable) compterait environ 300 Strykers – la 82e Brigade ukrainienne ne devrait en recevoir que 90.

En termes de puissance de combat, par conséquent, ces nouvelles brigades vont être en sous-effectif. Leur force de chars, loin d’être au niveau de la brigade complète, s’élève à moins d’un bataillon blindé américain.

Un autre aspect clé du document de constitution de la force est constitué par les calendriers d’entraînement. Ce document date du début du mois de mars, date à laquelle cinq des neuf brigades étaient répertoriées à « Formation terminée à 0% ». Une seule des brigades était à plus de la moitié de sa formation, évaluée à 60% terminée. Malgré cela, six sur neuf devaient être prêts d’ici la fin mars et les restes d’ici la fin avril. Ceci ne peut être réalisé qu’avec des temps de formation considérablement tronqués, et ceux-ci sont détaillés dans le document. L’entraînement des chars Léopard, par exemple, ne dure que six semaines. Juste pour le contexte, les tanks américains peuvent être formés en 22 semaines d’entraînement pour les Abrams.

Le tableau d’ensemble est donc plutôt inquiétant pour l’Ukraine.

Les documents divulgués ne nous donnent pas un aperçu des trois brigades que l’Ukraine devrait générer avec ses ressources indigènes, mais les neuf brigades formées et équipées de l’OTAN devraient être considérablement sous-équipées et dotées de personnel qui suivent un cours de formation extrêmement accéléré. Ces brigades devront presque certainement être déployées en groupements pour être capables des tâches de combat requises.

Une note accessoire mais importante à ce stade est le fait que, du mieux que nous pouvons en juger par ces documents, le parc de chars d’avant-guerre en Ukraine a presque complètement disparu.

L’Ukraine est entrée en guerre avec environ 800 chevaux de bataille T-64, mais la puissance de combat de l’OTAN n’en note que 43 actuellement disponibles. Il y en a d’autres, bien sûr, qui sont actuellement exploités par des unités ukrainiennes de première ligne, mais le plan de construction indique que l’Ukraine n’en a pratiquement aucune en réserve pour équiper ce plan d’attaque vital, dont dépendront tous leurs espoirs.

Pendant ce temps, un élément distinct de la fuite brosse un tableau tout aussi sombre des incendies à distance en Ukraine.

Sur une page marquée « NOFORN » – ce qui signifie qu’aucun Ressortissant étranger, même les alliés, n’est censé le voir, se trouve un tableau logistique montrant les livraisons et les dépenses d’obus de 155 mm.

Ce morceau est plutôt choquant.

Nous savons depuis un certain temps que l’Ukraine est confrontée à une pénurie critique d’obus, mais les documents divulgués révèlent à quel point ce problème est aigu. Le taux d’utilisation de l’Ukraine est très faible en ce moment – le rapport affirme que seuls 1104 obus ont été dépensés au cours des 24 heures précédentes – comparez cela aux quelque 20 000 obus que l’armée russe tire quotidiennement. Encore plus alarmant pour l’Ukraine est la note selon laquelle ils n’ont que 9788 obus sous la main.

Même avec un faible taux de combustion qui laisse les AFU massivement sous-armés, ils en ont assez pour soutenir le combat pendant un peu plus d’une semaine, et ils comptent sur un filet de livraisons des États-Unis pour maintenir ces stocks stables. Le rapport fait état d’une cargaison de 1840 obus partant dans les prochaines 24 heures. Des lots de cette taille sont évidemment insuffisants pour que l’Ukraine puisse constituer ses stocks et ne peuvent servir qu’à soutenir et à reconstituer les dépenses quotidiennes. Il n’y a aucune possibilité que l’Amérique augmente rapidement la taille de ces livraisons, car seulement 14 000 obus sont produits par mois. Les responsables américains espèrent que ce nombre atteindra 20 000 cette année, mais cela reste inférieur au taux de combustion actuel de l’Ukraine.

L’implication est assez simple.

L’Ukraine est rationnée en obus qui la laisse incapable d’offrir plus que des tirs symboliques, et elle devra probablement vivre avec cette ration d’obus pendant toute la durée de la guerre.

L’image globale de la puissance de combat ukrainienne est atroce.

Leur efficacité globale au combat est confrontée à un plafond difficile en raison de pénuries systémiques d’obus, et le package mécanisé prévu pour l’offensive de printemps sera beaucoup moins puissant qu’annoncé. Ces neuf brigades créées par l’OTAN auront l’équivalent en puissance de frappe (si nous sommes généreux) peut-être de quatre véritables brigades à effectif complet, augmentées de trois brigades ukrainiennes générées en interne de qualité douteuse. Les espoirs de l’Ukraine pour un assaut glorieux sur le pont terrestre russe vers la Crimée reposeront au maximum sur 400 chars et peut-être 30 000 hommes.

Si cette force se mettait en place contre les forces russes bien préparées dans le sud, une question importante se poserait. Si c’était la meilleure force que l’OTAN pouvait générer pour l’Ukraine, à quoi ressemblerait la deuxième équipe ? Y aura-t-il même une autre force ? Cet ensemble mécanisé sous-armé et sous-entraîné pourrait être le dernier lancer de dès un peu sérieux de l’Ukraine.

Le Cadre Analytique Américain

Bien que les documents divulgués ne brossent certainement pas un tableau encourageant de la génération de forces en Ukraine, ils offrent également un aperçu tout aussi choquant de l’état du renseignement militaire américain.

Une des choses qui saute immédiatement aux yeux quand on regarde les rapports opérationnels (les pages montrant des cartes détaillées de la situation) est que le Pentagone a apparemment beaucoup plus d’informations sur les dispositions russes que sur les unités ukrainiennes. Les unités russes sont fortement comptabilisées – leurs emplacements sont précisément marqués, les désignations des unités sont identifiées, il existe des évaluations quant aux unités russes capables de combattre ou non, et il existe des estimations très spécifiques de la force de première ligne russe (C’est-à-dire 23 250 hommes sur l’axe Zaporizhzhia et 15 650 hommes sur l’axe Kherson).

En revanche, les unités ukrainiennes ne reçoivent pas de désignation de capacité de combat, leurs emplacements sont plus généralement indiqués, et il existe d’énormes portées sur les effectifs évalués (10 000 à 20 000 hommes sur l’axe de Donetsk – une énorme marge d’erreur!) Ceci, incidemment, est une autre raison pour laquelle je pense que les documents sont authentiques. Si l’intention était de diffuser de la désinformation pour confondre ou tromper les Russes, on s’attendrait à des renseignements exploitables (mais faux) sur les déploiements ukrainiens – pourtant, cela n’existe pas ici. Les forces et les dispositions ukrainiennes sont présentées de manière vague et peu concluante, de sorte que la seule chose que l’armée russe pourrait extrapoler à partir de ce rapport est que les Américains ne savent pas vraiment ce qui se passe avec les forces ukrainiennes.

En effet, c’est la conclusion incontournable.

Le Pentagone ne semble pas avoir une forte idée de la force, de l’emplacement ou des activités des unités ukrainiennes. Ils listent également leur KIA (leurs morts) ukrainienne évaluée à seulement 16k-17.5 k. C’est un nombre absurdement bas – où auraient-ils pu l’obtenir ? En fait, il s’agit d’un copier-coller direct du nombre de victimes rapporté publiquement par le ministère ukrainien de la Défense.

Le fait que le Pentagone ne semble pas disposer de renseignements générés indépendamment sur l’armée ukrainienne est choquant. Ils semblent s’appuyer sur les chiffres de la propagande ukrainienne et les données de déploiement accessibles au public,comme la carte de déploiement open source.

Le fait, bien sûr, est que le Pentagone, avec ses ressources presque illimitées, ne semble pas avoir de perspicacité ou de flux de renseignement uniques à cet égard. Ils regardent vaguement la carte et marmonnent « il y a probablement une brigade ou deux dans cette région, peut-être 8000 hommes. Ou 4000. On ne sait pas vraiment ». En fait, toutes leurs évaluations de la force de l’axe pour l’Ukraine ont une marge d’erreur de 100% (c’est-à-dire que la limite supérieure de la plage est le double de la limite inférieure).

On ne peut que conclure que la queue remue le chien.

Les Ukrainiens sont capables d’extraire du matériel, de la formation et de l’argent de l’Occident, mais il y a peu de responsabilité ou de flux d’informations honnêtes en retour.

Il y avait des indices de cela plus tôt dans la guerre – que l’Ukraine est une sorte de boîte noire qui aspire des ressources mais ne communique pas honnêtement en retour; les responsables américains se sont plaints (et les dirigeants ukrainiens ont confirmé) que Kiev ne dit tout simplement pas grand-chose à DC. Apparemment, cela reste un problème bien plus d’un an après le début du conflit. Une note de bas de page particulièrement alarmante dans les documents divulgués indique :

« Nous avons une faible confiance dans les taux d’attrition et les inventaires russes (RUS) et ukrainiens (UKR) en raison des lacunes en matière d’informations, des efforts OPSEC et IO et des biais potentiels dans le partage d’informations UKR ».

Un autre problème est l’estimation du Pentagone des pertes de véhicules russes. Il semble qu’ici aussi, ils copient-collent des estimations externes. Dans ce cas, ils semblent utiliser les pertes de véhicules « documentées » du projet Oryx. Oryx est interesting intéressant. En théorie, ils compilent visuellement les pertes d’équipement documentées, ce qui semble très scientifique et difficile à contester. De plus, la masse d’images qu’ils ont accumulées est en quelque sorte un moyen de dissuasion pour la vérification – personne ne veut vraiment trier des milliers d’images et garder le score.

Cependant, Oryx a été audité et jugé insuffisant. Il existe une variété de problèmes qui les amènent à surestimer les pertes russes, dans certains cas de manière drastique. Celles-ci incluent le double comptage (plusieurs photos du même véhicule), l’identification erronée des véhicules ukrainiens comme des pertes russes, le comptage comme des véhicules perdus qui n’ont aucun dommage apparent, l’acceptation d’images qui ont manifestement été retouchées, etc. Dans un cas particulièrement flagrant, une photo d’un obusier ukrainien Msta a été photoshoppée par son équipage et a été marquée comme une pièce d’artillerie russe détruite.

Le problème est essentiellement qu’Oryx recueille des données passivement, en demandant aux gens sur les réseaux sociaux de leur envoyer des photos, qu’ils regardent ensuite et marquent comme des pertes vérifiées. Les médias sociaux, cependant, ont un parti pris pro-ukrainien qui conduit à un flot de véhicules russes prétendument détruits qui arrivent, et Oryx semble avoir un filtre faible qui vérifie sans critique presque toutes ces affirmations. En conséquence, les pertes russes sont considérablement surestimées et les pertes ukrainiennes sont sous-estimées.

Laissez Oryx exécuter leur petit projet de comptage, aucun mal n’est fait, n’est – ce pas ? Les documents divulgués par le Pentagone font état de 6000 pertes de véhicules évaluées au 1er mars, ce qui correspond aux affirmations d’Oryx (maintenant jusqu’à 6486 véhicules détruits au 10 avril). Il s’agit d’un point de données solide confirmant les soupçons selon lesquels le département américain de la Défense sous-traite de plus en plus de renseignements à OSINT (Open Source Intelligence). Il est assez clair à ce stade qu’il y a une amplification incestueuse entre l’OSINT et la défense et l’establishment politique américains. Quand Oryx compte les travaux de piratage absurdes de Photoshop comme du matériel russe détruit, cela devient un point de données significatif alimentant les évaluations du champ de bataille du Pentagone.

Il semblerait que, tout comme dans le cas de la génération et des pertes de forces ukrainiennes, le Pentagone n’ait tout simplement aucune sorte de vision solide ou significative de lui-même. Il semblerait qu’il n’y ait pas de flux de renseignement indépendants à l’œuvre ici – seulement une régurgitation insensée de chiffres de propagande du Ministère ukrainien de la défense et de projets open source douteux comme Oryx. L’armée américaine semble de plus en plus être un simulacre évidé de ses gloires passées, en décomposition derrière une façade de machines brillantes et de budgets gonflés – un programme d’emplois technobureaucratiques d’un billion de dollars roulant sur les vapeurs patriotiques résiduelles des garçons américains de l’État rouge.

Il est évident depuis longtemps que le régime de Kiev n’a pas de véritable plan, pas de chemin ferme vers la victoire, et seulement une relation ténue et hostile avec la réalité. Beaucoup plus terrifiant est l’idée que le Pentagone soit à peu près dans la même situation .

La défense aérienne au bord du gouffre

Une dernière révélation majeure de la fuite est l’état très dégradé de la défense aérienne ukrainienne. Très simplement, l’Ukraine est rapidement à court de munitions, en particulier pour ses systèmes critiques S-300 et BUK, et elle ne peut supporter que deux ou trois autres vagues avant de se briser complètement.

Les systèmes de défense aérienne peuvent être compliqués à aborder pour les personnes qui ne connaissent pas la nomenclature.

En effet, il existe un grand nombre de systèmes différents requis pour une défense aérienne moderne, qui doivent être « superposés » avec différents systèmes qui interceptent des cibles à différentes altitudes, phases de vol et trajectoires.

La conversation peut rapidement devenir encore plus confuse car les systèmes de lancement ont à la fois une désignation russe et une désignation OTAN, et leurs munitions ont encore des désignations différentes – juste par exemple, le système de défense aérienne que les Russes appellent le S-300 est désigné SA-10 par l’OTAN, et il tire une variété de missiles intercepteurs différents qui ont leurs propres noms, comme le 9M83. Multipliez cela par les nombreux types de systèmes de défense aérienne actuellement utilisés en Ukraine, et vous pouvez voir comment cela peut facilement se décomposer en un bourbier d’acronymes et de numéros de série.

Dans tous les cas, l’élément clé à comprendre sur les systèmes de défense aérienne est l’aspect de la superposition – si un nœud de la couche tombe en panne, non seulement l’un perd la couverture complète du spectre, mais le taux de combustion sur les systèmes restants augmente car ils supportent maintenant une charge excessive. L’Ukraine est maintenant presque complètement à court d’intercepteurs pour les systèmes S-300 et BUK, qui constituent la quasi-totalité de sa défense à moyenne et longue portée. Au rythme actuel de combustion, ils devraient s’épuiser d’ici la première semaine de mai et il faut faire des choix difficiles sur où et quoi défendre. Il n’y a aucune perspective d’acquérir plus d’intercepteurs pour ces systèmes car ils sont fabriqués en Russie.

Pour renforcer ces capacités, l’OTAN a dépêché ses propres systèmes en Ukraine et dispensé une formation accélérée. Ce qui est remarquable, cependant, c’est que l’OTAN choisit d’envoyer de nouveaux systèmes à l’Ukraine. L’Allemagne, par exemple, a envoyé à l’Ukraine quatre nouveaux systèmes IRIS-T en octobre. C’était une arme de pointe lors de sa première sortie d’usine. L’inconvénient, bien sûr, est que parce qu’il est nouveau, il n’y a pas de stocks importants de munitions provenant des cycles de production passés auxquels faire appel – par conséquent, les documents du Pentagone divulgués affirment que l’Ukraine n’a déjà plus d’intercepteurs IRIS-T.

La fuite a en outre révélé que l’Ukraine sera équipée de deux nouveaux systèmes de l’OTAN – le Patriot PAC-3 de fabrication américaine et l’Aster 30-SAMP/T qui est une création conjointe italo-française.

Voilà le problème. Le département américain de la Défense n’achète que 230 intercepteurs PAC-3 par an, et le nouveau calendrier d’approvisionnement ne prevoit pas d’augmente ce nombre. Le système Aster vient tout juste d’être mis en service, et l’Italie et la France ont signé un contrat pour la livraison de 700 missiles dans les années à venir.

Ce que tout cela signifie est assez simple: le plan du Pentagone visant à renforcer la défense aérienne ukrainienne obligera l’OTAN à puiser dans ses propres stocks très bientôt, et nous verrons la situation de l’artillerie se répéter tout comme avec les intercepteurs de défense aérienne. Il n’y a tout simplement pas de surplus ou de production à grande échelle à exploiter pour approvisionner l’Ukraine; ils ne peuvent être soutenus qu’en rongeant directement les propres stocks de l’OTAN. Tout cela se produit en même temps que l’armée de l’air russe devient de plus en plus affirmée, utilisant de nouveaux kits de conversion de bombes planantes pour livrer des bombes FAB colossales à des distances de sécurité.

Conclusion : Endormi au volant

À première vue, la pire chose à propos de cette fuite remarquable est le fait qu’elle s’est produite. Il s’agit d’une violation déconcertante et embarrassante ; un citoyen américain semble être simplement sorti avec des documents hautement classifiés, qui ont ensuite été autorisés à s’insérer dans un serveur Discord Minecraft pendant un mois sans que personne ne soit plus sage. Il faut se demander comment, et peut-être encore plus important pourquoi quelqu’un ferait cela.

Pourtant, la fuite en tant qu’acte de subterfuge ou de trahison est moins importante que ce que montrent les documents. Ils montrent un manque flagrant de vigilance ou de planification à long terme de la part du Pentagone. Les dirigeants américains doivent apparemment composer avec l’Ukraine comme avec un trou noir qui aspire de l’argent et des munitions et ne donne rien en retour ; il n’y a pas de forte impression de force, de pertes ou de planification de la ligne de front ukrainienne, et le Pentagone semble manquer de toute sorte de flux de renseignement indépendants.

Pendant ce temps, la situation matérielle en Ukraine se dégrade rapidement.

Leur « bras d’artillerie fonctionne à la vapeur », avec une minuscule ration d’obus et aucun stock de réserve à proprement parler, alimenté par un filet de livraisons des États-Unis.

La défense aérienne est également usée, et le plan de réparation de ce parapluie crucial menace de devenir rapidement vampirique et de vider les stocks d’intercepteurs de l’OTAN.

Toute la logique stratégique de l’Ukraine s’est inversée. Plutôt que de devenir un moyen bon marché de drainer l’armée russe, l’OTAN se retrouve à puiser dans ses propres stocks pour soutenir l’État ukrainien en hémorragie, sans fin claire en vue. Le mandataire est devenu un parasite.

Il ne semble pas y avoir de plan à long terme pour soutenir la guerre en Ukraine. Les plans d’approvisionnement du Pentagone n’indiquent aucune intention réelle d’accélérer la production de systèmes clés. Pour l’exercice 2024, ils ont commandé un modeste 5016 GMLR – les missiles lancés par le célèbre système HIMARS. L’Ukraine a déjà utilisé près de 10 000 GMLR, ce qui en fait un autre système dans lequel les dépenses ukrainiennes dépassent largement l’offre.

Pour sauver la situation, Kiev doit placer ses espoirs sur un jet de dés désespéré avec un ensemble d’attaques mécanisées composé de brigades à mi-effectifs brandissant un inventaire disparate de différents véhicules et systèmes.

Ce monstre d’armées de Frankenstein – cousu avec une multitude de chars, IFV, APC et systèmes d’artillerie différents provenant de tous les coins de l’alliance de l’OTAN, sera probablement utilisé pour tenter de briser les lignes russes lourdement fortifiées et solidement habitées dans le sud, où il y sera pulvérisé.

source : Big Serge Thought via Bruno Bertez

 

Lire aussi : Fuite des informations américaines : Une campagne de désinformation de Washington contre Moscou ?

Jour 413 – L’armée ukrainienne est à bout – Arrêtez le massacre !

Source : Le Courrier des Stratèges - Par Edouard Husson - Le 12/04/2023.

Guerre d’Ukraine – jour 413 – L’armée ukrainienne est à bout – arrêtez le massacre!

Big Serge – l’un des analystes les plus perspicaces de la chose militaire qu’ait révélés la guerre d’Ukraine – propose une lecture originale des « Pentagon leaks ». Il y déchiffre l’agonie de l’armée ukrainienne. Mais aussi, ce qui surprendra plus, un Pentagone qui ne maîtrise plus sa créature kiévienne. Il faut dire qu’on ne maîtrise pas un « trou noir ». Evidemment, si les gouvernements européens faisaient preuve d’une autonomie de jugement et d’action, ils devraient se précipiter à Kiev pour dire: « arrêtez le massacre »! Epargnez plus de vies inutilement sacrifiées de soldats ukrainiens, comme à Bakhmout! Sans doute les événements vont-ils trop vite pour nos dirigeants. On lira comment Bhadrakumar dépeint la déroute diplomatique, accompagnée de gesticulations, des Etats-Unis en Asie occidentale. Et le diplomate indien pose la question très juste de savoir si les Etats-Unis, en pleine déconfiture, ne seront pas tentés par la fuite en avant, en Ukraine comme dans le Golfe Persique. Ce ne sera sans doute pas le cas car, ne nous lassons pas de le répéter, l’avance de la Russie, de la Chine (et sans doute de l’Iran) en matière d’armes hypersoniques, promet une défaite sévère aux USA s’ils s’avisaient de déclencher un conflit plus large que la bataille d’Ukraine.

Big Serge a lu les « fuites » du Pentagone….

nous donnons ici des extraits de la dernière livraison du blog de Big Serge:

« Un autre hiver s’est achevé, et le printemps a de nouveau fait son apparition dans la guerre en Ukraine. Au milieu du dégel et de la boue qui l’accompagne, les forces russes – y compris l’indominable groupe Wagner – ont poussé le groupement ukrainien de Bakhmut au bord du gouffre, l’armée ulrainienne s’accrochant maintenant à son dernier point d’appui défensif dans la ville. Bakhmut est devenue la plus grande bataille du 21e siècle et entre maintenant dans sa phase culminante.

Néanmoins, l’évolution du champ de bataille a été quelque peu perturbée par la fuite apparente de documents confidentiels du renseignement militaire américain, qui donnent une vue d’ensemble des rouages de la guerre menée par le Pentagone« .

Un bref historique des fuites
Avant de nous pencher sur le contenu des documents qui ont fait l’objet d’une fuite, nous allons nous livrer à une brève présentation de ces documents. Ils se présentent sous la forme de photographies de morceaux de papier provenant d’une réunion d’information des services de renseignement américains. Cela implique que la nature particulière de la violation est une fuite (le personnel ayant un accès légitime aux documents les diffuse illégalement au public) plutôt qu’un piratage (quelqu’un obtenant un accès illégitime par une intrusion d’une forme ou d’une autre). Les pages présentent des plis visibles et un magazine de chasse est visible sur une table à l’arrière-plan. De nombreuses pages sont destinées à être partagées avec les alliés de l’OTAN, mais d’autres sont réservées à l’usage exclusif des États-Unis.

L’impression générale est qu’un Américain a plié les documents d’information, les a mis dans sa/leur/xer/xem/plur poche (l’armée américaine est une institution diversifiée et inclusive, et l’auteur de la fuite peut être de n’importe quel sexe, de tous les sexes ou d’aucun sexe), a ramené les pages chez lui et les a photographiées. Il est presque certain qu’il ne s’agissait pas d’un agent russe – si les documents avaient été acquis par les services de renseignement russes, ils l’auraient gardé en interne. (…)

La chronologie des événements suggère une fuite authentique. Si les documents n’ont commencé à circuler largement qu’au cours de la semaine dernière, ils ont en fait été publiés pour la première fois sur l’internet (pour autant que je puisse en juger) le 1er mars – mais personne ne l’a remarqué, apparemment. Les documents n’ont attiré l’attention du grand public que lorsqu’une chaîne de télégrammes pro-russe les a trouvés et les a rediffusés après avoir fait un mauvais montage photo des estimations de pertes pour montrer que les pertes russes étaient bien moindres. Ironiquement, ce sont ces modifications falsifiées qui ont suscité un intérêt massif pour les documents. Pour moi, cela suggère que les documents ne font pas partie d’une sorte de campagne de désinformation du Pentagone, parce qu’ils sont restés inactifs dans les coins reculés d’un serveur Minecraft Discord pendant un mois entier. Si les services de renseignement américains voulaient faire circuler de faux documents, on peut penser qu’ils les auraient réellement fait circuler, au lieu de les déposer dans un coin obscur de l’espace d’information et de les laisser dépérir.

Les documents ont une cohérence interne parfaite. La fuite complète comprend des dizaines et des dizaines de pages qui sont totalement cohérentes jusqu’au niveau des dates de livraison, des listes d’inventaire et de l’identification obscure des unités. Cela va même au-delà de l’utilisation parfaite des acronymes et de la symbiologie militaire. La création de ces documents serait une entreprise colossale et nécessiterait à la fois une expertise précise en la matière et un nombre considérable de références croisées pour éviter les contradictions – à moins, bien sûr, que les documents ne soient authentiques, auquel cas le matériel serait cohérent parce qu’il est réel.

Les documents sont relativement pauvres en renseignements exploitables. Ils ne contiennent aucun détail sur la planification des prochaines opérations offensives de l’Ukraine et ne donnent que des indications vagues sur la disposition des forces ukrainiennes. Une ruse destinée à tromper les Russes devrait contenir des renseignements hautement exploitables (mais faux).

…et il en tire la conclusion que la force de combat de l’Ukraine est profondément affaiblie…


L’implication la plus importante des documents est simple : La puissance de combat de l’Ukraine est considérablement dégradée et, en particulier, ses unités mécanisées et ses forces d’artillerie sont en très mauvais état. (C’est moi qui souligne E.H.)

Le document le plus important est une page intitulée « US Allied & Partner UAF Combat Power Build », qui détaille la constitution de la force, l’entraînement et les tranches d’équipement qui créeront l’ensemble mécanisé que l’Ukraine utilisera lors de son offensive de printemps. Le plan prévoit une force de douze brigades nominales, dont neuf seront équipées par l’OTAN et trois générées en interne par les Ukrainiens. La fuite ne donne pas d’informations sur les trois brigades ukrainiennes, mais l’effectif prévu des neuf brigades de l’OTAN est minutieusement répertorié.)

Au total, la constitution de la puissance de combat prévoit que ces brigades déploient 253 chars, 381 véhicules de combat d’infanterie, 480 véhicules blindés de transport de troupes et 147 pièces d’artillerie. Cela implique que ces brigades n’auront de brigades que le nom, et qu’elles seront en fait très insuffisamment armées. En répartissant ces systèmes sur neuf brigades, on obtient un effectif moyen de seulement 28 chars par brigade, ainsi que quelque 95 VFI/APC et 16 tubes d’artillerie. Ce chiffre est à comparer à celui d’une équipe de combat de brigade blindée de l’armée américaine, qui disposerait de près de 90 chars et de près de 200 VFI/APC. Une brigade Stryker américaine (une formation plus légère et rapidement déployable) disposerait d’environ 300 Strykers – la 82e brigade ukrainienne n’en recevrait que 90.

En termes de puissance de combat, ces nouvelles brigades seront donc largement sous-dimensionnées. La puissance de leurs chars, loin d’atteindre le niveau d’une brigade complète, est inférieure à celle d’un bataillon blindé américain.

Les programmes d’entraînement constituent un autre aspect essentiel du document relatif à la constitution de la force. Ce document date du début du mois de mars, date à laquelle cinq des neuf brigades étaient répertoriées à « Entraînement 0% Complet ». Seule une des brigades était plus qu’à moitié entraînée, avec un taux d’entraînement de 60 %. Malgré cela, six des neuf brigades devaient être prêtes pour la fin mars et les autres pour la fin avril. Cet objectif ne peut être atteint qu’en raccourcissant considérablement les délais d’entraînement, qui sont détaillés dans le document. L’entraînement des chars Léopard, par exemple, n’est prévu que pour six semaines. À titre de comparaison, les tankistes américains peuvent suivre une formation de 22 semaines pour l’Abrams.

Le tableau d’ensemble est donc plutôt inquiétant pour l’Ukraine. Les documents ayant fait l’objet d’une fuite ne nous donnent pas d’informations sur les trois brigades que l’Ukraine est censée mettre sur pied avec ses propres ressources, mais les neuf brigades formées et équipées par l’OTAN sont censées présenter des effectifs nettement insuffisants et être composées de personnel bénéficiant d’un cours de formation extrêmement accéléré. Ces brigades devront très certainement être déployées en groupements pour être en mesure d’accomplir les tâches de combat requises.

Une remarque accessoire mais importante à ce stade est le fait que, pour autant que nous puissions en juger d’après ces documents, le parc de chars d’avant-guerre de l’Ukraine a presque entièrement disparu. L’Ukraine est entrée en guerre avec environ 800 T-64, son cheval de bataille, mais la constitution de la puissance de combat de l’OTAN indique qu’elle n’en possède plus que 43. Il y en a bien sûr d’autres qui sont actuellement utilisés par les unités ukrainiennes de première ligne, mais le plan de construction indique que l’Ukraine n’en a pratiquement aucun en réserve pour équiper ce paquet d’attaque vital, sur lequel reposent tous ses espoirs.

Dans le même temps, un autre élément de la fuite brosse un tableau tout aussi sombre des tirs à distance de l’Ukraine. Sur une page portant la mention « NOFORN » – ce qui signifie que les ressortissants étrangers, même les alliés, ne sont pas censés la voir – se trouve un tableau logistique indiquant les livraisons et les dépenses d’obus de 155 mm. Cette partie est plutôt choquante.

Nous savons depuis un certain temps que l’Ukraine est confrontée à une grave pénurie d’obus, mais les documents divulgués révèlent à quel point ce problème est aigu. Le taux d’utilisation de l’Ukraine est actuellement très faible – le rapport indique que seuls 1 104 obus ont été utilisés au cours des dernières 24 heures – à comparer aux quelque 20 000 obus tirés quotidiennement par l’armée russe. Plus alarmant encore pour l’Ukraine, le rapport indique qu’elle ne dispose que de 9 788 obus.

Même avec un faible taux d’utilisation qui laisse l’armée ukrainienne massivement dépassée, elle dispose d’une quantité suffisante pour soutenir le combat pendant un peu plus d’une semaine, et elle compte sur un filet de livraisons en provenance des États-Unis pour maintenir ces stocks stables. Le rapport fait état d’une cargaison de 1 840 obus partant dans les prochaines 24 heures. Des lots de cette taille sont manifestement insuffisants pour permettre à l’Ukraine de constituer ses stocks et ne peuvent servir qu’à soutenir et à réapprovisionner les dépenses quotidiennes. Il n’est pas possible que l’Amérique augmente rapidement le volume de ces livraisons, car seuls 14 000 obus sont produits par mois. Les responsables américains espèrent porter ce chiffre à 20 000 cette année, mais cela reste inférieur au taux de combustion actuel de l’Ukraine.

La conséquence est assez simple. L’Ukraine dispose d’une ration d’obus qui la rend incapable d’offrir plus qu’un feu symbolique, et elle devra probablement vivre avec cette ration d’obus pendant toute la durée de la guerre.

Le tableau général de la puissance de combat ukrainienne est atroce. Leur efficacité globale au combat est confrontée à un plafond difficile à atteindre en raison des pénuries systémiques d’obus, et le paquet mécanisé prévu pour l’offensive de printemps sera bien moins puissant qu’annoncé. Ces neuf brigades créées par l’OTAN auront une puissance de frappe équivalente (si l’on est généreux) à peut-être quatre véritables brigades à pleine puissance, auxquelles s’ajouteront trois brigades ukrainiennes générées en interne et de qualité douteuse. Les espoirs de l’Ukraine de lancer un assaut glorieux sur le pont terrestre russe menant à la Crimée reposeront, au maximum, sur 400 chars et peut-être 30 000 hommes.

Si cette force devait se fracasser contre les forces russes bien préparées dans le sud, une question importante se poserait. S’il s’agit de la meilleure force que l’OTAN puisse générer pour l’Ukraine, à quoi ressemblera la deuxième équipe ? Y aura-t-il même une autre force ? Cet ensemble mécanisé, qui manque d’effectifs et d’entraînement, pourrait bien être le dernier coup sérieux de l’Ukraine.

…et que le Pentagone ne dispose d’aucun moyen de contrôle réel de l’armée kiévienne!

Le cadre analytique américain
Si les documents divulgués ne donnent certainement pas une image encourageante de la constitution des forces ukrainiennes, ils offrent également un aperçu tout aussi choquant de l’état des services de renseignement militaire américains.

L’une des choses qui sautent immédiatement aux yeux lorsqu’on examine les rapports opérationnels (les pages présentant des cartes détaillées de la situation) est que le Pentagone dispose apparemment de beaucoup plus d’informations sur les dispositions russes que sur les unités ukrainiennes. Les unités russes sont très bien représentées – leur emplacement est indiqué avec précision, les désignations des unités sont identifiées, on évalue quelles unités russes sont aptes au combat ou non, et il y a des estimations très précises des effectifs de la ligne de front russe (23 250 hommes sur l’axe de Zaporizhzhia et 15 650 hommes sur l’axe de Kherson, par exemple).

En revanche, les unités ukrainiennes ne sont pas désignées par leur capacité de combat, leur emplacement est indiqué de manière plus générale et les effectifs estimés varient considérablement (de 10 000 à 20 000 hommes sur l’axe de Donetsk – une marge d’erreur énorme ! Si l’intention était de désinformer pour embrouiller ou tromper les Russes, on s’attendrait à des renseignements exploitables (mais faux) sur les déploiements ukrainiens – or, il n’y a rien de tel ici. Les forces et les dispositions ukrainiennes sont présentées de manière vague et non concluante, de sorte que la seule chose que l’armée russe pourrait extrapoler à partir de ce rapport est que les Américains ne savent pas vraiment ce qui se passe avec les forces ukrainiennes.

C’est d’ailleurs la conclusion qui s’impose. Le Pentagone ne semble pas avoir une idée précise des effectifs, de la localisation ou des activités des unités ukrainiennes. Il évalue également le nombre de victimes ukrainiennes à seulement 16 à 17,5 mille. Ce chiffre est absurdement bas – où a-t-il pu être obtenu ? En fait, il s’agit d’un copier-coller direct du nombre de victimes rapporté publiquement par le ministère ukrainien de la défense.

Il est choquant de constater que le Pentagone ne semble pas disposer d’informations indépendantes sur l’armée ukrainienne. Il semble s’appuyer sur les chiffres de la propagande ukrainienne et sur les données de déploiement accessibles au public, telles que la carte de déploiement à source ouverte. Pour mémoire, il ne s’agit pas d’une critique du site Deployment Map – j’utilise fréquemment cette ressource et je la trouve très utile. Le fait est que le Pentagone, avec ses ressources quasi illimitées, ne semble pas disposer d’une vision unique ou d’un flux de renseignements propres à cet égard. Ils font un vague geste vers la carte et marmonnent « il y a probablement une ou deux brigades dans cette zone, peut-être 8 000 hommes. Ou 4 000. Nous ne savons pas vraiment. » En fait, toutes leurs évaluations de la force de l’axe pour l’Ukraine ont une marge d’erreur de 100 % (c’est-à-dire que la limite supérieure de la fourchette est le double de la limite inférieure).

On ne peut qu’en conclure que c’est la queue qui remue le chien. Les Ukrainiens sont en mesure de soutirer du matériel, de l’entraînement et de l’argent à l’Occident, mais il n’y a guère de responsabilité ou de flux d’informations honnêtes en retour. Les responsables américains se sont plaints (et les dirigeants ukrainiens l’ont confirmé) que Kiev ne disait pas grand-chose à la DC. Apparemment, ce problème persiste plus d’un an après le début du conflit. Une note de bas de page particulièrement alarmante dans les documents divulgués indique ce qui suit :

« Nous avons peu confiance dans les taux d’attrition et les inventaires russes (RUS) et ukrainiens (UKR) en raison des lacunes en matière d’information (…) et de la partialité potentielle dans le partage d’informations par l’UKR ».

« L’armée américaine est un simulacre évidé de ses gloires passées » (Big Serge)

Il semblerait que, comme dans le cas de la génération de forces et des pertes ukrainiennes, le Pentagone ne dispose tout simplement pas d’une sorte d’information solide ou significative. Il semblerait qu’il n’y ait pas de flux de renseignements indépendants à l’œuvre ici – seulement une régurgitation aveugle des chiffres de la propagande du ministère de la Défense ukrainien et des projets douteux de sources ouvertes tels qu’Oryx. L’armée américaine semble de plus en plus être un simulacre évidé de ses gloires passées, se décomposant derrière une façade de machines brillantes et de budgets gonflés – un programme d’emplois technobureaucratiques de mille milliards de dollars qui se nourrit des vapeurs patriotiques résiduelles des garçons américains qui votent républicain.

Il est évident depuis longtemps que le régime de Kiev n’a pas de véritable plan, pas de chemin ferme vers la victoire, et qu’il n’entretient qu’une relation ténue et inamicale avec la réalité. Il est encore plus terrifiant de penser que le Pentagone est dans la même situation.

Au lieu de devenir un moyen bon marché de drainer l’armée russe, l’OTAN se retrouve à puiser dans ses propres stocks pour soutenir l’État ukrainien en pleine hémorragie, sans qu’aucune finalité claire ne soit en vue. Le mandataire est devenu un parasite.

Il ne semble pas y avoir de plan à long terme pour soutenir la guerre en Ukraine. Les plans d’approvisionnement du Pentagone n’indiquent aucune intention réelle d’augmenter la production de systèmes clés. Pour l’année fiscale 2024, il a commandé un modeste 5 016 GMLRS – les missiles lancés par le célèbre système HIMARS. L’Ukraine a déjà tiré près de 10 000 GMLRS, ce qui en fait un autre système pour lequel les dépenses ukrainiennes dépassent largement l’offre.

Pour sauver la situation, Kiev doit placer ses espoirs dans un coup de dés désespéré avec un ensemble d’attaques mécanisées composé de brigades en demi-teinte maniant un inventaire disparate de différents véhicules et systèmes. Ce monstre de Frankenstein d’armées – cousu ensemble avec une multitude de chars, de VCI, de TTB et de systèmes d’artillerie provenant de tous les coins de l’alliance de l’OTAN – devra probablement percer les lignes russes lourdement fortifiées et dotées d’un personnel solide dans le sud, où il sera pulvérisé et ne deviendra qu’un paillis de plus pour la steppe pontique

M.K.Bhadrakumar décrit la crispation des Etats-Unis en Asie occidentale


La semaine dernière, trois événements inquiétants liés aux États-Unis sont venus contrarier l’apaisement général des tensions dans la région de l’Asie occidentale :

Tout d’abord, l’appel téléphonique du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu au président des Émirats arabes unis Mohamed ben Zayed al-Nahyan (MBZ), en vue d’une rencontre destinée à redonner vie aux accords d’Abraham ;

Deuxièmement, un voyage discret en Arabie saoudite du directeur de la CIA William Burns pour rencontrer le prince héritier Mohammed ben Salman (MBS), alors que la diplomatie chinoise s’accélère en Asie occidentale ;

Troisièmement, l’arrivée du sous-marin d’attaque à propulsion nucléaire USS Florida dans les eaux du golfe Persique.

Le fil conducteur ici est l’ascension de l’Iran dans la géopolitique de l’Asie occidentale, à la suite de son accord historique avec l’Arabie saoudite, avec la médiation de la Chine et le soutien robuste de la Russie.

Ces trois événements ont eu lieu dans le contexte immédiat d’une rencontre inédite entre le ministre saoudien des affaires étrangères Faisal bin Farhan Al-Saud et son homologue iranien Hossein Amir Abdollahian, jeudi à Pékin.

Par une étrange coïncidence, l’USS Florida a également transité par le canal de Suez jeudi pour une mission de soutien à la cinquième flotte américaine basée à Bahreïn, dont la zone d’opération comprend le golfe Persique, la mer Rouge et une partie de l’océan Indien.

Détente entre l’Arabie saoudite et l’Iran

Au cours des semaines qui ont suivi l’accord du 10 mars entre l’Arabie saoudite et l’Iran sur le rétablissement des relations diplomatiques, des hauts fonctionnaires.....

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Jour 408 -Les dirigeants occidentaux entre bataille immobile et pensée figée.

Source : Le Courrier des Stratèges - Par Edouard Husson - Le 07/04/2023.

Guerre d’Ukraine: jour 408 -Les dirigeants occidentaux entre bataille immobile et pensée figée

Nous sommes face à un paradoxe: la lenteur de la bataille devrait laisser aux dirigeants français et européens le temps de réfléchir. Pourtant, le voyage d’Emmanuel Macron et Ursula von der Leyen en Chine se solde par un échec piteux du point de vue des grandioses objectifs diplomatiques affichés: il s’agissait de rien moins que d’amener Xi Jinping à Canossa après son voyage à Moscou. Mais pourquoi nous préoccuper de l’aveuglement volontaire ou consenti de nos dirigeants? Goûtons une conversation avec Alexandre N et un point de vue de Bhadrakumar sur l’entrée de la Finlande dans l’OTAN.

Les frustrations des chroniqueurs de la bataille d’Ukraine – l’exemple de southfront.org

Plus les semaines passent, plus les chroniqueurs de la bataille semblent désespérer de la lenteur des opérations, leur côté presque statique.

Ainsi nos amis de southfront.org, que nous avons fréquemment cités, étaient-ils contents, le 5 avril, de pouvoir annoncer du mouvement:

La situation dans la zone de conflit en Ukraine a connu plusieurs changements significatifs au cours du 4 avril. La plupart des opérations de combat actives ont eu lieu à Bakhmut. Dans la soirée du 4 avril, les combattants du PMC Wagner avaient nettoyé l’ensemble du territoire de la zone industrielle de l’usine AZOM.

En réalité, ce qu’ils décrivent, c’est une avancée lente des Russes, qui veulent perdre le minimum de troupes face à des Ukrainiens retranchés dans les immeubles d’habitations qu’ils ont fortifiés. Et donc, ce qui est décrit, c’est une lente bataille de rues. Avec des conquêtes, site par site:

Au total, les installations industrielles suivantes de la ville sont sous le contrôle de Wagner

L’usine de céramique de construction Bakhmut ;
Une usine de meubles ;
L’usine Bakhmut « Stroydetal » ;
ALC « SINIAT » ;
Mine de plâtre ALC « SINIAT » ;
Usine de vin de champagne d’Artyomovsk (PJSC Artweineri) ;
« Tsvetmet » ;
Magasin « STA » ;
Usine « Vostokmash ;
Usine de structures métalliques de Makiivka ;
Usine électrotechnique de Bakhmutsk ;
Usine Prommash ;
Atelier de presse et de meulage ;
Usine de construction de machines d’Artemivsk « Vistek » ;
Usine de boulangerie d’Artemivsk ;
Usine expérimentale d’ingénierie des équipements miniers et technologiques pour l’industrie du sel (dans le nord).
Le PMC Wagner contrôle deux gares ferroviaires – Stupki et Bakhmut-1, ainsi que le dépôt de trolleybus
.

Les combattants de la CMP de Wagner contrôlent entièrement le quartier central, y compris les bâtiments administratifs, sur lesquels les drapeaux de la Russie et des CMP ont déjà été placés. En outre, les combattants se sont retranchés le long de la rue Sibirtsev et se sont approchés du stade Metallurg. Les combats se poursuivent dans la rue Zelenaya, dans la rue Boris Gorbatov et près de l’école numéro 11. Au sud, les combats avancent également en direction du stade Avangard.

Les formations armées ukrainiennes occupent actuellement la partie ouest de la ville. Les principales lignes et positions défensives sont situées dans les zones résidentielles. Selon les experts militaires, si le rythme de progression se maintient dans un avenir proche, l’Armée ukrainienne sera repoussée derrière la ligne de chemin de fer.

A côté de la bataille d’Artiomovsk, il y a la bataille de Donetsk:

Les forces armées russes et ukrainiennes sont également engagées dans des combats acharnés près de Donetsk. Selon des rapports émanant des deux parties, les forces russes tentent des opérations offensives près d’Avdeevka. Les forces armées ukrainiennes occupent des lignes défensives et ne permettent pas aux soldats russes d’obtenir des succès en travaillant sur les positions avec de l’artillerie. Les combats se poursuivent près de Marinka, Severnoye et Pervomayskoye. Cependant, aucun des deux camps n’avance.

Il n’y a pas non plus de changement dans la direction de Zaporizhzhya. Des duels d’artillerie ont lieu entre les deux camps. Les parties sont engagées dans une reconnaissance mutuelle de la bataille. Par ailleurs, un dépôt de munitions a explosé à Orekhovo.

Les militaires russes ont identifié et frappé des installations ennemies dans les environs de Kherson et de Berislav. L’armée ukrainienne a frappé plusieurs localités sur la rive gauche du Dniepr : des bâtiments résidentiels à Novaya Kakhovka, Sofiyivka et Hornostayivka ont été endommagés.

Les forces russes ont frappé des installations de l’armée ukrainienne dans l’ouest d’Odessa. L’unité militaire 2138 a vraisemblablement été touchée et un important incendie s’est déclaré sur le site d’arrivée.

En réalité, comme l’explique Alexandre N, dans un entretien que nous retranscrivons un peu plus loin, les forces russes visaient sans doute à Odessa un entrepôt de drones.

Comme la btaille semble se dérouler au ralenti, southfront.org alimente, depuis plusieurs semaines, le discours sur la future offensive ukrainienne:

En fait, les actions de l’armée ukrainienne ressemblent maintenant à des tentatives pour cacher la direction réelle de la contre-attaque. À tout le moins, le scénario d’intensification de la défense de Bakhmut dissimule les véritables intentions de Kiev.

Il existe déjà des preuves du rassemblement d’importants groupes de troupes dans la direction de Zaporizhzhya. En particulier, on estime que 20 000 soldats ont déjà été concentrés dans le district d’Orekhovo. Cependant, les objectifs de la contre-attaque ne sont pas encore clairs. L’objectif principal de l’armée ukrainienne reste peut-être le pont de Crimée. Cependant, l’accès à ce pont peut se faire à la fois par les fortifications de Melitopol et de Berdyansk, et par le territoire de la RPD dans la direction d’Ugledar, où le groupement local est techniquement, physiquement et moralement épuisé après l’échec de l’offensive.

Les tribulations d’un Macron en Chine

Est-il besoin d’ajouter un commentaire à ces deux photos? Emmanuel Macron était parti – accompagné d’Ursula von der Leyen – pour amener Xi Jinping à Canossa après son voyage de Moscou! Voilà le résultat protocolaire:

les communicants du Président français s’en sortent en invoquant la disposition chinoise à agir de concert avec la france pour la paix en Ukraine. En réalité, le président français s’est piégé lui-même: s’il applique à l’OTAN et à l’Ukraine les critères établis par la Chine pour un plan de paix, il sera rapidement en porte-à-faux vis-à-vis de ses alliés:

« Le président chinois Xi Jinping a déclaré jeudi à Beijing que la Chine était prête à lancer un appel conjoint avec la France pour un règlement politique de la crise ukrainienne.

M. Xi a déclaré à la presse, à l’issue de ses entretiens avec le président français Emmanuel Macron, que la Chine s’engageait à faciliter les pourparlers de paix et le règlement politique de la crise ukrainienne, et qu’elle était prête à lancer un appel conjoint avec la France à la communauté internationale :

Rester rationnelle, faire preuve de retenue et éviter de prendre des mesures susceptibles d’aggraver la crise, voire de la rendre incontrôlable ;

Respecter strictement le droit international humanitaire, éviter d’attaquer les civils ou les installations civiles, et protéger les femmes, les enfants et les autres victimes du conflit ;

Honorer sincèrement l’engagement solennel de ne pas utiliser d’armes nucléaires et de ne pas mener de guerres nucléaires, s’opposer à l’utilisation d’armes biologiques en toutes circonstances et s’opposer aux attaques armées contre des centrales nucléaires ou d’autres installations nucléaires civiles ;

Reprendre les pourparlers de paix dès que possible, respecter les objectifs et les principes de la Charte des Nations unies, tenir compte des préoccupations légitimes de toutes les parties en matière de sécurité, rechercher un règlement politique et favoriser une architecture de sécurité européenne équilibrée, efficace et durable ;

Aborder conjointement les retombées de la crise ukrainienne dans les domaines de l’alimentation, de l’énergie, de la finance, des transports et autres, et réduire l’impact négatif de la crise ukrainienne sur le monde, en particulier sur les pays en développement.« 

La Russie fait du temps un allié – conversation avec Alexandre N

J’ai échangé sur la bataille d’Ukraine avec Alexandre N, que les lecteurs du Courrier des Stratèges commencent à bien connaître.

Q. Comment voyez-vous évoluer la guerre?

R. Bakhmout c’est fini.. Discrètement a été donné l’ordre de décrocher. C’est bien entendu une défaite majeure pour le régime de Zelensky.. Mais pour faire diversion dans les médias a été organisé l’attentat contre le bloger russe Vladen Tatarsky dans un café de Saint Pétersbourg. Impuissants, les Ukrainiens font dans le terrorisme. Mais vous avez remarqué que l’essentiel se passe ailleurs: un agent de la CIA sous couverture de journaliste, Evan Gerskovitch, s’est fait harponner par les services russes. Une excellent prise si on en croit le fait que Blinken lui-même a appelé Lavrov pour tenter de négocier la libération du « journaliste de Wall Street Journal ». Comme d’habitude, tout est dans ce que l’on ne dit pas : pourquoi Blinken intervient ou comment un simple journaliste américain peut aller si loin dans le dispositif russe ? je pense que vous commencez à avoir les réflexes pour décrypter la guerre.

Pouvons-nous revenir sur l’affaire du QG OTANo-ukrainien détruit par un ou plusieurs missiles hypersoniques?

C’est un événement de grande importance. On commence ici et là par admettre que c’est bien un état-major avec des officiers de l’OTAN qui a été pulvérisé par les Kinjal. Il comportait quelques 300 personnes, et c’est presque l’équivalent de l’état-major des armée, ce qui donne une idée. Impossible alors de le reconstituer, même en plusieurs mois, car ce n’est pas une simple affaire de nombre mais bien de compétences combinées. Attaquer à la tête, là est la vraie guerre.

Frapper à la tête, c’est la base de la stratégie, non?

Quand j’ai commencé ma carrière militaire, face aux « Rouges », nous étions sur cette ligne là : ne pas casser le char juste devant nous mais trouver le chef pour le pulvériser. Il faut une heure pour remplacer un char et 3000 obus pour le détruire statistiquement, un jour pour remplacer ses camions de ravitaillement détruits avec seulement 300 obus mais plus long à détecter, et seulement 30 coups pour détruire le chef, plus difficile à détecter mais qu’il faut 20 ans pour remplacer. Voilà le rapport qualité/prix tactique ramené au combat élémentaire. Détection = renseignement : vous avez là la recette des combats en Ukraine que les Américains appelle ISR (intel, surveillance, reconnaissance ). La réalité est que, depuis les débuts de cette guerre, malgré le soutien américain, les Russes surclassent leurs adversaires dans ce domaine. L’artillerie, et donc les feux dans la profondeurs y compris aériens, a vocation première de réduire sur les arrières les capacités adverses qui parviennent au contact, d’où l’ISR.

En fait, si je vous suis, les Russes gagnent la bataille mais les commentateurs occidentaux ne le voient pas car ils ne comprennent plus la stratégie.

Pourquoi les Russes entreprendraient-ils une offensive de grande envergure? L’arme hypersonique leur donne une supériorité stratégique absolue….

On dit beaucoup de bêtises sur la montée aux extrêmes, jusqu’à la guerre nucléaire.

Oui, il faudra que revenions sur ce sujet. Contentons-nous de constater aujourd’hui que les Américains sont largués dans la course à l’arme hypersonique: le Pentagone vient d’arrêter le programme dans le domaine avec Lockheed Martin. Les Russes ont introduit, à l’autre extrême du spectre, une utilisation révolutionnaire des drones. Et ils ont une totale supériorité en munitions et dans les batailles d’artillerie. Je pense donc que les Russes n’ont nullement l’intention de bouger mais de détruire toutes les concentrations qu’ils trouvent, surtout logistiques. D’où leur dernière frappe à Odessa sur une usine de drones apparemment.

Les Russes font traditionnellement du temps un allié. les Américains semblent le considérer comme un ennemi…

Si on élève le point de vue, en effet,, manifestement les élections américaines ne feront pas bon ménage avec la guerre en Ukraine, surtout si on veut emprisonner Trump. La question devient donc : que peuvent faire les Américains entre maintenant et le mois de juillet pour l’éviter ? Et là j’ai un doute sur leur capacité, désormais, à donner à l’Ukraine les moyens d’inverser la situation sur le champ de bataille.

Les Américains commencent à laisser courir les chiffres des pertes russes et ukrainiennes

Le New York Times est choqué! Il y a apparemment des fuites du côté du Pentagone. On voit circuler sur twitter ou sur Telegram des informations sur la fameuse et très annoncée offensive ukrainienne de printemps.

En réalité, si vous cliquez sur le lien de l’article vous n’apprendrez rien. Mais il y a un passage cocasse: « Par exemple, l’une des planches du document qui a fuité parle de 16 000 à 17 500 soldats russes tués tandis que l’Ukraine a 71 500 morts. Le Pentagone et d’autres analystes ont estimé que la Russie avait subi des pertes beaucoup plus importantes, avec près de 200 000 tués et blessés, tandis que l’Ukraine avait plus de 100 000 blessés et tués« .

On apprend donc deux choses: premièrement, les Américains sont en train de lâcher des chiffres plus proches de la réalité, parce qu’ils ne croient plus à la victoire de l’Ukraine. Plus pentagoniste que le Pentagone, le New York Times – « journal de référence » ajoutz-vous aussitôt avec un peu d’émotion dans la voix – maintient les vieux chiffres à côté des nouveaux. Il faudra leur faire un cours d’histoire de l’URSS: la Pravda était beaucoup plus rapide pour adopter la nouvelle ligne du Parti.

M.K. Bhadrakumar commente l’entrée de la Finlande dans l’OTAN

Le drapeau national de la Finlande a été hissé pour la première fois au siège de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN) à Bruxelles mardi, à l’occasion du 74e anniversaire de l’alliance occidentale. Pour la Finlande, cela signifie un abandon historique de sa politique de neutralité.

Personne ne peut dire, même de manière propagandiste, que la Finlande est confrontée à une menace de sécurité de la part de la Russie. Il s’agit d’un acte de malignité sans motif à l’égard de la Russie de la part de l’OTAN, qui, bien entendu, porte invariablement l’imprimatur des États-Unis, tout en étant présenté au public mondial comme un choix souverain de la Finlande dans le contexte de l’intervention de la Russie en Ukraine.

Au fond, cela ne peut être considéré que comme une nouvelle manœuvre des États-Unis, après le sabotage des gazoducs Nord Stream en septembre dernier, dans l’intention délibérée de compliquer les relations de la Russie avec l’Europe et de les rendre inextricables dans un avenir prévisible.

D’un autre côté, il suffit de dire que cela rendra le paysage sécuritaire de l’Europe encore plus précaire et la rendra encore plus dépendante des États-Unis en tant que fournisseur de sécurité. On s’attend généralement à ce que l’adhésion de la Suède à l’OTAN suive, peut-être à temps pour le sommet de l’alliance qui se tiendra à Vilnius en juillet.

En effet, les États-Unis ont fait en sorte que la question centrale à l’origine de l’impasse entre la Russie et l’Occident – à savoir l’expansion de l’OTAN jusqu’aux frontières de la Russie – soit un fait accompli, quel que soit l’échec de la guerre par procuration qu’ils mènent en Ukraine contre la Russie.

Réagissant à cette évolution, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a averti mardi que l’adhésion de la Finlande à l’OTAN obligerait la Russie à « prendre des contre-mesures pour assurer sa propre sécurité tactique et stratégique », car l’alignement militaire d’Helsinki constitue une « escalade de la situation » et un « empiètement sur la sécurité de la Russie ».

Le 4 avril, le ministère russe des Affaires étrangères a déclaré que Moscou « sera contraint de prendre des mesures de rétorsion de nature militaro-technique et autre afin de mettre un terme aux menaces qui pèsent sur notre sécurité nationale ».

L’adhésion de la Finlande à l’OTAN étendrait la ligne de front de l’OTAN avec la Russie de 1 300 kilomètres (longueur de la frontière que la Finlande partage avec la Russie), ce qui accentuerait la pression sur les régions du nord-ouest de la Russie. Ne soyez pas surpris si les missiles de l’OTAN sont déployés en Finlande à un moment donné, ne laissant à la Russie d’autre choix que de déployer ses armes nucléaires à proximité de la région baltique et de la Scandinavie.

En d’autres termes, la confrontation militaire entre l’OTAN et la Russie devrait encore se détériorer et la possibilité d’un conflit nucléaire est en train de s’accroître. Il est difficile d’imaginer que la Russie ne parvienne pas à préserver sa capacité de seconde frappe à tout prix ou à empêcher les États-Unis d’acquérir une supériorité nucléaire, et qu’elle maintienne l’équilibre stratégique mondial.

L’accent sera mis sur l’amélioration des capacités nucléaires défensives plutôt que sur les forces conventionnelles, ce qui obligera la Russie à démontrer sa puissance nucléaire. La Russie a déjà renforcé sa dissuasion en déployant des armes nucléaires tactiques au Belarus en réponse à la décision irresponsable du Royaume-Uni de fournir des munitions à l’uranium appauvri à l’Ukraine. Il est pratiquement certain que la Russie doublera également la mise dans le conflit ukrainien.

Entre-temps, les États-Unis ont depuis longtemps déployé des armes nucléaires tactiques dans des pays européens, notamment en Belgique, en Allemagne, en Italie, aux Pays-Bas et en Turquie, ce qui signifie que les États-Unis ont depuis longtemps déployé leurs armes nucléaires tactiques aux portes de la Russie, ce qui constitue une menace importante pour la sécurité nationale de la Russie. Le déploiement de la Russie au Belarus vise à dissuader les provocations potentielles des États-Unis, en anticipant ce qui est sur le point de se produire.

La situation géographique du Belarus est telle que si des armes nucléaires tactiques russes y sont déployées, cela aura un effet dissuasif stratégique considérable sur plusieurs pays de l’OTAN tels que la Pologne, l’Allemagne, les États baltes et même les pays nordiques. Un cercle vicieux est en train de se mettre en place, entraînant une escalade de la course aux armements nucléaires et, en fin de compte, une situation apocalyptique que personne ne souhaite voir se produire.

Le tableau d’ensemble est le suivant : sachant parfaitement que la situation pourrait devenir extrêmement dangereuse, les États-Unis exercent néanmoins sans relâche une pression sur la Russie dans le but de perpétuer leur système hégémonique. La stratégie de Ronald Reagan, qui consistait à utiliser des moyens de pression extrêmes pour affaiblir l’ex-Union soviétique et finalement l’entraîner dans sa chute, est une fois de plus à l’œuvre.

Dans l’immédiat, tout cela aurait des conséquences négatives sur le conflit en Ukraine. Il est évident que Washington ne cherche plus la paix en Ukraine. Dans le calcul stratégique de l’administration Biden, si la Russie gagne en Ukraine, cela signifie que l’OTAN perd, ce qui nuirait définitivement au leadership transatlantique et à l’hégémonie mondiale des États-Unis – ce qui est tout simplement impensable pour l’establishment de Washington.

Il ne fait aucun doute que la démarche des États-Unis et de l’OTAN visant à persuader la Finlande (et la Suède) de devenir membres de l’OTAN a également une dimension géoéconomique. Le secrétaire général de l’Alliance, Jens Stoltenberg, a récemment déclaré que « si la Finlande et la Suède rejoignent l’Alliance, l’OTAN aura davantage de possibilités de contrôler la situation dans le Grand Nord ». Il a expliqué que « ces deux pays disposent de forces armées modernes capables d’opérer avec précision dans les conditions difficiles du Grand Nord ».

Les États-Unis espèrent que l' »expertise » que la Suède et la Finlande peuvent apporter à l’alliance pour opérer dans les conditions arctiques et subarctiques est inestimable et pourrait changer la donne dans le cadre d’une lutte acharnée pour le contrôle des vastes ressources minérales qui se trouvent dans le Grand Nord, où la Russie a jusqu’à présent pris une longueur d’avance.

Alors que la glace polaire fond à une vitesse sans précédent dans l’Arctique, les plus grands acteurs mondiaux considèrent la région comme un nouveau « no man’s land » à saisir. Certains rapports récents ont fait état d’un projet d’intégration des forces aériennes de quatre pays nordiques – le Danemark, la Norvège, la Finlande et la Suède – entrepris avec une orientation anti-russe non dissimulée

Sur le plan militaire, la Russie est contrainte de supporter le lourd fardeau financier d’une évaluation à 360 degrés de son programme de sécurité nationale. La Russie ne dispose d’aucun système d’alliance pour compléter ses ressources militaires. Dans une annonce importante faite en février, le Kremlin a supprimé de sa politique arctique toute mention du Conseil de l’Arctique, soulignant la nécessité de donner la priorité aux intérêts russes dans l’Arctique et de s’efforcer d’obtenir une plus grande autonomie pour ses projets industriels dans l’Arctique.

La politique arctique révisée appelle au « développement des relations avec les États étrangers sur une base bilatérale, en tenant compte des intérêts nationaux de la Fédération de Russie dans l’Arctique ». Cette décision intervient quelques jours après qu’un fonctionnaire du département d’État américain a déclaré que la coopération avec la Russie dans l’Arctique était désormais irtuellement impossible« .

Comment les États-Unis ont préparé l’armée ukrainienne à la guerre avec la Russie ?

Source : RzO International.
par Olivier Renault - Le 04/04/2023.

Le colonel Andrew Clark, chef de l’Organisation de gestion de la formation en assistance à la sécurité (SATMO) du Pentagone, a expliqué au magazine américain Defence News comment son service avait préparé l’armée ukrainienne à la guerre contre la Russie.

SATMO, dit Clarke, forme régulièrement des alliés et des partenaires sur de nouvelles capacités. Les équipes SATMO sont financées par le pays hôte et gérées par le département d’État des États-Unis. Soit dit en passant, c’est SATMO qui préparait l’armée géorgienne pour l’attaque de 2008 contre l’Ossétie du Sud.

Defense News révèle que les conseillers et instructeurs du SATMO travaillent activement en Ukraine depuis 2016 pour amener l’armée ukrainienne aux normes de l’OTAN. Un centre de formation spécial a été créé dans l’ouest de l’Ukraine. Des conseillers américains ont formé des officiers d’état-major ukrainiens à s’éloigner des « concepts soviétiques » dans le domaine de la science militaire. Les instructeurs SATMO ont été introduits à l’Université ukrainienne de la défense nationale. Au même moment, des spécialistes des forces d’opérations spéciales américaines préparaient Kiev à mener une guérilla au cas où « les forces armées ukrainiennes tomberaient sous l’assaut de la Russie ». 

L’ancien conseiller principal du Pentagone avoue que les accords de Minsk n’ont jamais été respectés par les États-Unis. Comme le dit le colonel à la retraite de l’armée américaine, Douglas McGregor, ancien conseiller principal du ministère de la Défense, au média écrit en russe mais basé en Belgique, EUROMORE, les États-Unis ont passé huit ans à créer l’armée ukrainienne « spécialement pour attaquer la Russie… c’est pourquoi les Russes ont attaqué… ». Il a, également, fait savoir que « nous voulions placer des missiles dans l’est de l’Ukraine avec lesquels nous pourrions menacer la Russie » et que « l’est de l’Ukraine devait être neutralisé, et les Russes sont intervenus ». 

Douglas McGregor ajoute : « C’est vraiment le quartier général de l’OTAN qui dirige le spectacle, c’est-à-dire des gens de France, du Royaume-Uni, des États-Unis, d’autres des pays ; ils planifient et formulent systématiquement des propositions pour ce qui devrait se passer ensuite ». Chose intéressante, Douglas McGregor déclare que le président russe, Vladimir Poutine, « s’est vraiment attaché à l’espoir à la mi-avril de voir naître une solution négociée à ce conflit », « lorsqu’il était clair que nous, à Londres, ne laisserions pas Volodymyr Zelensky et Kiev faire un quelconque compromis, accepter la neutralité ». En outre, l’ancien conseiller principal du ministère de la Défense des États-Unis, martèle que la Russie a « fait preuve d’une grande retenue dans l’utilisation de sa puissance militaire » car « c’est un autre pays slave, un autre pays slave orthodoxe », et, « ils ne sont pas vus à tuer un grand nombre de personnes ». Mieux encore, il annonce que Moscou s’efforce « simplement de garantir aux Russes en Ukraine des droits égaux à ceux des autres citoyens ukrainiens » et que « c’était le sens des accords de Minsk, qui n’ont jamais été respectés ». 

Déjà avant le conflit. Dans le même temps, la formation de l’armée ukrainienne était directement réalisée par le Pentagone. En plus des Américains, elle est réalisée par des instructeurs de Pologne et du Royaume-Uni. Et, environ 300 combattants de la 173e brigade aéroportée des États-Unis étaient parmi les premiers à arriver au centre d’entraînement de Yavoriv dans la région de Lviv pour former les soldats de trois bataillons de la Garde nationale. Des soldats du Danemark, de Lituanie et de Lettonie sont venus en Ukraine pour des missions de durées diverses. Les instructeurs ont préparé des groupes de sabotage, des sapeurs, et ils ont formé des tireurs d’élite. Et, une attention particulière a été accordée à la technique pour camoufler des engins explosifs en articles ménagers.  

France Info rappelle que la base de Yavoriv, « grande comme quatre fois Paris, dispose d’infrastructures pour entraîner près de 2000 soldats », et qu’« à 20 km de la Pologne, l’Ukraine et l’OTAN y organisaient », déjà, « des exercices conjoints avant le conflit ». 

Selon Scott Ritter, ancien officier du renseignement du Corps des Marines des États-Unis, des instructeurs militaires américains et britanniques entraînent le régiment Azov depuis 2015. 

En 2018, le journaliste américain Max Blumenthal a publié une étude sur les contacts de militants du régiment Azov avec des militaires américains. En novembre 2017, des inspecteurs militaires américains se sont rendus à Azov pour discuter de «l’approfondissement de la coopération ». Le combattant Azov cité par Max Blumenthal a déclaré aux journalistes américains que des instructeurs et des volontaires des États-Unis travaillaient en étroite collaboration avec son bataillon. 

D’autres pays de l’OTAN ont, également, participé activement à la préparation des bataillons nationaux. Comme l’ont découvert les journalistes de Radio Canada, le Canada a dépensé près d’un milliard de dollars pour former les militants d’Azov.

Le haut représentant de l’UE pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Josep Borrell, a inauguré la mission européenne de formation des soldats ukrainiens sur la base polonaise de Brzeg et a déclaré que le soutien à l’Ukraine continuerait de se développer. Pour l’ensemble de 2023, leur nombre pourrait dépasser 30 000 soldats. Des groupes militaires ukrainiens suivent actuellement une formation accélérée aux États-Unis, au Royaume-Uni et en Pologne.

La Bundeswehr a précisé que «depuis novembre 2022, des troupes ukrainiennes sont entraînées en Europe par la Mission européenne d’assistance militaire à l’Ukraine (EUMAM UA Mission d’assistance militaire de l’Union européenne à l’Ukraine).

Selon Declassified UK, des instructeurs militaires britanniques et américains ont récemment commencé à enseigner aux soldats ukrainiens comment manipuler les projectiles à l’uranium appauvri. Le ministère britannique de la Défense a montré une vidéo où des journalistes ont vu des obus avec une couleur orange et noire caractéristique (il s’agit de munitions à l’uranium appauvri). Le média anglophone avertit : « La présence d’un soldat américain à la séance d’entraînement pourrait encore aggraver les tensions, après que la Maison-Blanche a nié avoir envoyé ses propres stocks d’uranium appauvri en Ukraine » ; « L’uranium appauvri (UA) est une munition standard pour les chars que le Royaume-Uni donne à l’Ukraine, malgré les inquiétudes de longue date concernant ses impacts sur la santé et l’environnement » ; « Il a été accusé d’avoir causé le cancer et des malformations congénitales en Irak ».

Selon Declassified UK, Doug Weir de l’Observatoire des conflits et de l’environnement a déclaré : « Lorsque les munitions à l’UA touchent des cibles dures telles que des chars ou des véhicules blindés, elles se fragmentent et brûlent, générant des particules d’UA [particules microscopiques] chimiquement toxiques et radioactives qui présentent un risque d’inhalation pour les personnes ».

Olivier Renault

source : Observateur Continental

La défaite de l’OTAN est inévitable

par Pars Today - Le 28/03/2023.

Le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, a affirmé que l’Occident devrait se préparer à un conflit continu en Ukraine et que les pays membres de l’alliance devront consacrer une partie de leur PIB à leurs dépenses de défense et à l’aide en armements à fournir à Kiev. Or, les Européens et les Américains ne peuvent pas se permettre que la guerre par procuration de l’OTAN contre la Russie en Ukraine ne dure trop longtemps.

« Si l’Occident veut une guerre prolongée et il semble qu’il le veuille, c’est parce qu’il a peur de la défaite qui semble inévitable en ce moment, la défaite de l’OTAN dans sa guerre par procuration contre l’Ukraine ! », a déclaré à Sputnik le professeur Stevan Gajiс, un chercheur associé à l’Institut d’études européennes de Belgrade.

« Ils devront investir davantage dans leur industrie, ce qui est maintenant une tâche particulièrement difficile puisque de nombreux pays occidentaux se sont désindustrialisés, puisqu’ils ont envoyé leurs industries à l’étranger, notamment en Chine et dans d’autres pays asiatiques. Je pense que les stocks qui existent sont les premiers à partir. Donc ils seront de plus en plus vides », a-t-il poursuivi.

Le 21 mars, Stoltenberg a dévoilé son rapport annuel pour 2022 lors d’une conférence de presse à Bruxelles. Le chef de l’OTAN a affirmé que l’alliance « est plus unifiée qu’elle ne l’a été depuis au moins la fin de la guerre froide » et qu’elle est prête à continuer à soutenir Kiev dans son conflit avec la Russie.

Stoltenberg a déclaré que si le président russe Vladimir Poutine voulait « moins d’OTAN », il aura bientôt « plus d’OTAN » à sa porte étant donné l’adhésion prochaine de la Finlande et de la Suède au bloc. À en juger par les propos du secrétaire général de l’OTAN, l’alliance s’était depuis longtemps préparée à un conflit avec la Russie :

« L’OTAN a mis en place le plus grand renforcement de notre défense collective depuis une génération », a déclaré Stoltenberg. « Ainsi, lorsque les chars russes sont entrés en Ukraine, nous étions prêts. En quelques heures, nous avons activé nos plans de défense de la Baltique à la mer Noire. »

Il a salué l’importante assistance militaire du collectif occidental à Kiev et a révélé que l’alliance est « en train de convenir de nouvelles capacités pour la production de munitions décisives au combat et de s’engager aussi avec les industriels pour augmenter la production et soutenir encore plus  l’Ukraine » dans son conflit avec la Russie.

Stoltenberg a noté que de nombreux alliés de l’OTAN se sont engagés à augmenter leurs dépenses de défense dans le cadre de l’opération spéciale russe en Ukraine : « Maintenant, ces promesses doivent se transformer en argent réel, en contrats et en équipements concrets, car les dépenses de défense sous-tendent tout ce que nous faisons », a-t-il expliqué.

Plus tôt, l’UE avait conclu un accord pour envoyer à l’Ukraine un million de cartouches dans les 12 prochains mois. Le nouveau plan consistera donc dans le don de munitions de ses propres stocks par l’UE à Kiev et d’achat aussi de nouveaux obus pour l’Ukraine.

Ni les États-Unis ni l’UE ne peuvent reconstituer rapidement des munitions en baisse.

La réalité n’est pas aussi rose que celle décrite par le chef de l’OTAN, note le professeur Gajiс.

« Je pense que nous pouvons déjà voir que l’OTAN et les États-Unis essaient de trouver des armes partout où ils [le peuvent] », a noté le chercheur serbe. 

Olaf Scholz s’est rendu en Amérique latine pour mener de telles affaires, mais avec peu ou pas de succès. Ils essaient de faire la même chose en Afrique et dans toute l’Asie. Jusqu’à présent, il semble qu’ils n’aient réussi qu’avec des obus du Pakistan et uniquement en raison de troubles internes dans ce pays, qui ont été causés à bien des égards par les États-Unis. Je pense tout de même que la Corée du Sud et le Japon pourraient aussi être intéressés à fournir des armes à l’OTAN.

Selon Gajiс, le complexe militaro-industriel américain n’est pas encore pleinement opérationnel.

« L’UE dit qu’elle achètera des obus, mais d’où ? » demande Matthew Gordon-Banks, ancien député conservateur britannique et chercheur principal à la « UK Defence Academy » qui a ajouté : « Les provisions n’existent pas pour pouvoir acheter. »

Les médias occidentaux ont averti à plusieurs reprises que l’Ukraine brûlait ses munitions plus rapidement que les États-Unis et l’OTAN ne pouvaient en reproduire. Selon la presse américaine, pour continuer à fournir des munitions au régime de Kiev et reconstituer ses propres stocks, le Pentagone envisage d’augmenter substantiellement la production des munitions et de mettre des pans de l’industrie de défense américaine « sur le pied de guerre » alors qu’il n’est techniquement pas en guerre. En particulier, l’armée américaine prévoit une augmentation de 500% de la production d’obus d’artillerie, de 15 000 par mois à 70 000, comme l’a déclaré le chef des acquisitions de l’armée Doug Bush aux médias américains le mois dernier.

« Il faudra dix ans aux États-Unis pour remplacer les stocks dépensés au niveau de production actuelle », a souligné l’ancien législateur britannique.

La situation devient de plus en plus désespérée pour Kiev alors que les forces russes poursuivent leur offensive et encerclent Bakhmout, également connu sous le nom d’Artemovsk, selon Gordon-Banks.

« L’Ukraine manque de main-d’œuvre, de munitions et surtout d’obus d’artillerie », a-t-il dit.

« L’idée que l’UE, l’Amérique ou n’importe qui d’autre puisse remplacer ces lacunes avant une offensive russe majeure lorsque les conditions météorologiques et terrestres s’améliorent est un non-sens. Plus les Américains insistent, plus des Ukrainiens meurent dans ce conflit ».

« Généralement, les États-Unis sont dans une mauvaise situation en ce qui concerne leur domination mondiale, l’évaporation du pétrodollar et d’autres changements tectoniques importants, ceux qui ont été annoncés par le président Xi à la fin de sa visite en Russie », a déclaré Gajiс, faisant référence à la dernière rencontre entre le président Xi Jinping et le président russe Vladimir Poutine. « À long terme, le seul véritable bénéficiaire aux États-Unis sera le complexe militaro-industriel. Peut-être que tout cela est une mauvaise nouvelle pour Wall Street, mais ça ne l’est certainement pas pour le complexe militaro-industriel qui aura lui des transactions lucratives. »

L’économie américaine est toujours submergée par l’inflation alors qu’une crise bancaire à part entière pourrait également bientôt se dérouler dans le pays, comme le préviennent les observateurs internationaux. Le pays est confronté à une crise économique à multiples facettes, tandis que l’Europe, qui souffre déjà d’une inflation plus élevée, se prépare à un débordement du gâchis bancaire américain dans les économies de l’UE.

Des manifestations contre la chute du niveau de vie et contre de nouvelles dépenses pour la guerre par procuration occidentale en Ukraine ont eu lieu sur tout le continent européen au cours des derniers mois.

Les peuples européens en ont assez de la baisse du niveau de vie et du manque d’énergie bon marché tandis que leurs dirigeants soutiennent Kiev dans le conflit en cours, selon Gordon-Banks.

En fait, l’UE continue de soutenir la région de Kiev parce que les politiciens européens ont leur « peau politique » en jeu dans la guerre par procuration de l’Occident contre la Russie en Ukraine, a déclaré Gajiс. Si Kiev perd, ce que l’universitaire serbe pense être inévitable, c’est le fait que ces responsables européens deviendront alors des « perdants politiques ».

« Par conséquent, ils pousseront l’agenda jusqu’au bout. C’est pourquoi ils y voient un intérêt personnel. Bien qu’objectivement parlant, cela va complètement à l’encontre des intérêts de leur propre pays ! », a conclu Gajiс

source : Pars Today

Comprendre le déroulement de l’opération spéciale menée par la Russie en Ukraine

par Valentin Vasilescu - Le 27/03/2023.

Il y a beaucoup de questions sur l’opération spéciale en Ukraine auxquelles la Russie donne des réponses évasives. Par exemple, comment les Ukrainiens ont-ils pu les surprendre dans la région de Kharkov avec la contre-offensive des « camionnettes » en septembre ? Ou pourquoi le général Sergueï Sourovikine, partisan de l’action indirecte qui prive les forces ennemies des ressources nécessaires fournies par l’OTAN pour poursuivre la guerre, a-t-il été écarté du commandement ? Surtout après que celui-ci ait réussi à stabiliser les fronts et commencé les attaques quotidiennes aux missiles sur les infrastructures critiques, les dépôts de matériel de combat de l’OTAN, les trains transportant le matériel et les gares de déchargement des garnisons ?

La réponse à ces questions est que tout cela n’avait rien à voir avec les vrais objectifs de l’opération spéciale.

Nous pouvons voir quels sont les objectifs de l’opération spéciale en examinant la densité des pertes enregistrées selon les types d’armes ukrainiennes sur lesquelles les Russes se sont concentrés au cours des 4 à 5 derniers mois.

Nous constatons que les radars de contre-batterie ont été la priorité, suivis des pièces d’artillerie et des MLRS, des véhicules de combat d’infanterie et des véhicules blindés de combat, des radars et des systèmes de missiles AA, qui sont presque tous produits par l’OTAN.

Récemment, les défenses AA russes se sont concentrées sur l’abattage de la GLSDB (Ground-Launched Small Diameter Bomb) américaine, lancée à partir du HIMRS, qui combine une bombe guidée GBU-39 de petit diamètre avec des ailes propulsées par le moteur du missile M26.

Nous avons vu comment, au-dessus de la mer Noire, les avions de combat russes testent des méthodes peu orthodoxes pour neutraliser les équipements sensibles de reconnaissance des avions sans pilote américains, qui fournissent directement des renseignements à l’armée ukrainienne.

Dans le même temps, les défenses antiaériennes russes ne se préoccupent guère d’abattre les vieux drones soviétiques Tu-141 Strizh lancés par l’Ukraine qui s’écrasent au hasard sur le territoire russe. Au contraire, les armes russes sont testées quotidiennement sur diverses cibles, certaines nouvelles comme les drones kamikazes Lancet et d’autres résultant de la modernisation d’armes existantes. C’est le cas des bombes d’aviation FAB-100, 250, 500,1500 qui ont été équipées d’un kit de vol plané et d’un GPS, ce qui augmente leur précision et leur portée à 40 km. Ou encore l’installation de vieux chars T-62M modernisés dans divers postes de tir disposés de manière judicieuse, au lieu de pièces d’artillerie tractées, qui n’offrent aucune protection aux militaires.

Contrairement à Sourovikine, le général Gerasimov n’a pas bougé le petit doigt pour empêcher l’afflux d’équipements de combat de l’OTAN depuis les frontières de l’Ukraine jusqu’à la ligne de front. Des chars Leopard 2, des véhicules de combat Bradley, des missiles HIMARS et Harpoon sillonnent le territoire ukrainien comme à la parade.

N’importe quel attardé mental, exception faite des généraux qui passent en boucle sur les plateaux de télévision, peut comprendre que l’objectif de l’opération spéciale russe n’est pas d’occuper l’Ukraine, mais de tester les armes de l’OTAN, utilisées par les Ukrainiens. Lorsque l’OTAN remettra aux Ukrainiens ne serait-ce qu’un petit nombre d’avions F-16, F-15, Eurofighter Typhoon, Gripen, Rafale ou Mirage, Gherasimov sera aux anges, car les Russes seront en mesure de trouver l’antidote pour eux aussi. Une fois que la Russie aura adapté sa technique de combat aux vulnérabilités des armes de l’OTAN, Gherasimov recevra le feu vert pour occuper l’Ukraine en un mois.

Le 17 décembre 2021, le ministère russe des Affaires étrangères a envoyé aux États-Unis et à l’OTAN le projet d’un traité visant à assurer des garanties de sécurité à la Russie, c’est-à-dire un retour de l’Europe centrale à la situation d’avant le sommet de Madrid de 1997, en retirant les bases et les troupes étrangères de tous les anciens pays socialistes.

Les États-Unis et l’OTAN ont rejeté la proposition de la Russie.

Ainsi, pour ceux qui ont un minimum de neurones pour comprendre, l’opération spéciale n’est qu’une étape intermédiaire, menée sur le champ de manœuvres ukrainien, sur du matériel client, pour repousser l’invasion imminente de la Russie par l’OTAN.

Pour qu’il n’y ait aucun doute sur le fait que la Russie vise à atteindre l’objectif qu’elle avait proposé aux États-Unis et à l’OTAN, elle a pris la décision de déployer des armes nucléaires tactiques en Biélorussie.

Cela permet de comprendre pourquoi l’empereur Xi Jinping s’est rendu à Moscou. Les États-Unis n’acceptent pas de devenir la deuxième économie mondiale et ont planifié une guerre avec la Chine à travers Taïwan, comme ils le font avec la Russie à travers l’Ukraine. La dernière guerre de la Chine a été contre le Vietnam en 1979, les deux armées utilisant des armes soviétiques ou des clones de celles-ci. Entre-temps, la Chine a développé des armes similaires aux armes occidentales qui n’ont pas été testées dans un conflit réel. Si Taïwan avait été armée par la Russie, la Chine aurait offert ses nouvelles armes à l’Ukraine pour qu’elle les teste. Puisque Taïwan est armée par les États-Unis, tirez vos propres conclusions.

Valentin Vasilescu

traduction Avic – Réseau International

Quelle Ukraine soutenons-nous ?

par Patrick Pasin - Le 27/03/2023.

Le slogan « Soutien à l’Ukraine » continue de fleurir. Ceux qui le promeuvent savent-ils que les Ukrainiens étaient le peuple le plus martyrisé d’Europe AVANT la guerre ? À cause de celui-là même que les Occidentaux chérissent… le président Zelensky. En synthèse, voici ce que nous cachent nos médias et qui devrait nous faire réfléchir à notre soutien sincère et amical au peuple ukrainien.

Le pays sans bébés

En 2021, le nombre de décès excède celui des naissances de 442 2791, un chiffre ahurissant pour environ 41 millions d’habitants : il signifie que plus de 1% de la population a littéralement disparu cette année-là, sans même parler des effets de l’émigration.

En janvier 2022, le dernier mois avant l’Opération spéciale, la situation empire encore : sont comptabilisés environ 57 000 décès, mais seulement 18 000 naissances, soit un multiple de plus de trois.

Même si l’écart était moindre les années précédentes, il se situait toujours avec un excédent négatif à six chiffres depuis la révolution du Maïdan de 2014 et avant. À ce rythme, le peuple ukrainien aura disparu d’ici une à deux générations, d’autant plus qu’une grande partie des réfugiés et des émigrés ne reviendra pas, quelle que soit la forme que revêtira l’Ukraine à la fin de la guerre.

Il faut désormais y ajouter le désastre en cours, où plus de 200 000 hommes fauchés dans la force de l’âge ne feront plus d’enfants. Et la boucherie continue : ce sont maintenant des adolescents qui sont envoyés sur le front. Qui peut imaginer les conséquences à moyen et long terme quant à l’existence même du peuple ukrainien ?

Le pays des laboratoires de guerre US

D’après les données de l’OMS et des autorités locales, dont l’Ordre des médecins, les taux d’infection par VIH/sida, tuberculose, hépatite B et C… restent parmi les plus élevés d’Europe et du monde. La tuberculose s’y est même propagée sous une forme unique, très résistante aux médicaments.

Le pays est également affecté par de violentes épidémies de rougeole, malgré un fort taux de vaccination, mais aussi de grippe porcine, de botulisme, de leptospirose, de diphtérie, etc., que l’on ne trouve nulle part ailleurs dans de telles proportions.

Les tests médicaux effectués par les Russes sur les milliers de prisonniers de guerre ukrainiens montrent qu’un tiers d’entre eux ont été infectés par l’hépatite A, plus de 4% présentent un syndrome rénal et 20% ont la fièvre du Nil occidental. La conclusion est qu’ils furent soumis à des années d’expériences biologiques par les Américains. De la propagande russe ?

Non, puisque le Département de la Défense des États-Unis reconnaît le 9 juin 2022 avoir établi des « collaborations » avec 46 laboratoires ukrainiens, évidemment à des fins… pacifiques. En réalité, le Pentagone ne « collaborait » pas mais opérait directement des laboratoires de guerre biologique en Ukraine depuis 2014, en contravention de la Convention sur les armes biologiques de 1972. C’est documenté depuis le Maïdan de 2014, dont, par exemple, un rapport d’un ancien agent du SBU, les services de renseignement ukrainiens, qui révèle que « la mort des sujets de l’essai a été autorisée dans le cadre de son déroulement ». En l’occurrence, les « sujets de l’essai » sont des Ukrainiens, pas des rats de laboratoire.

On découvre aussi que ces recherches extrêmement dangereuses visaient à améliorer les propriétés pathogènes de la peste, de l’anthrax, de la tularémie, du choléra et d’autres maladies mortelles. Parmi les priorités identifiées figure aussi l’étude des pathogènes bactériens et viraux pouvant être transmis des chauves-souris à l’homme, tels que les pathogènes de la peste, de la leptospirose, de la brucellose, ainsi que des coronavirus… Des coronavirus de chauve-souris ? Cela ne nous rappelle rien ? Ajoutons qu’un programme militaire intitulé « Covid-19 » fut financé en novembre 2019, soit trois mois avant que l’OMS donne ce nom à une pandémie mondiale qui n’a pas fini de faire parler d’elle. Simple coïncidence ?

Quoi qu’il en soit, il ne fait aucun doute que la population civile et les soldats ukrainiens servent de cobayes depuis des années aux militaires américains, avec la complicité de Kiev. De plus, ces armes biologiques nous menacent directement, car qui peut garantir que ces virus mortels s’arrêteront à nos frontières ? Que font la Commission européenne et nos gouvernements pour nous protéger de cette menace ?

Le pays des néonazis

L’agence Reuters évalue à plus de 100 000 ce que certains appellent les « nationalistes intégraux » ou néonazis. Qu’ils se regroupent sous les noms d’Azov, Aïdar, C14, etc., ils empoisonnent la vie des Ukrainiens depuis 2014, et pas seulement des minorités russophones, magyares, juives, roms, LGBT… Ils ont notamment participé aux plus de 14 000 tués du Donbass, situation qui revêt les caractéristiques du génocide au sens de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide du 9 décembre 1948. Des témoignages révèlent, d’ailleurs, que ces bataillons de la mort percevaient jusqu’à 10 000 $ pour le meurtre ou la capture de tout séparatiste. Un bon business dans un pays dont on ne cesse de nous vendre les valeurs… démocratiques et progressistes.

Ils n’hésitent pas non plus à entrer armés dans les tribunaux pour menacer les juges, dans les administrations pour contraindre les maires et les gouverneurs. Ils obligent même certaines municipalités à les payer comme miliciens pour assurer la… sécurité des citoyens. Puisque l’Ukraine est aussi le pays sans justice, comme nous le verrons ci-dessous, ils ont tous les droits, dont le meurtre, le viol, la torture, le braquage, le racket, etc. Bien sûr, avec la complicité de la police.

Et lorsque le bataillon Aïdar est dissous par les autorités en 2016, ses membres bloquent une artère de Kiev et tentent de prendre d’assaut le ministère de l’Intérieur. Après un tel acte, on imagine que les peines de prison furent sévères… Que nenni ! L’ordre de dissolution est annulé et ils sont intégrés aux forces armées ukrainiennes, comme les autres bataillons néonazis après les accords de Minsk, puis envoyés commettre leurs crimes dans le Donbass.

De ce fait, ils deviennent nos alliés, puisque l’Occident s’est allié à l’Ukraine à la vie à la mort (surtout celle des Ukrainiens, en tout cas pour commencer…).

Le pays de la corruption

Ce point nécessiterait un chapitre entier tant la corruption est endémique en Ukraine. Ainsi, dès 2015, CNN relate qu’elle coûte de l’ordre de 10 milliards $ au budget de l’État. Aucune institution internationale n’est dupe de cette réalité. Par exemple, la Cour des comptes européenne constate dans un rapport de 2016 n’avoir aucune connaissance de l’emploi des derniers 11 milliards € envoyés à l’Ukraine. En revanche, on y lit que « les risques posés par les anciens et les nouveaux oligarques demeurent élevés ». Comment mieux avouer la corruption sans employer le mot ?

Néanmoins, les milliards continuent d’affluer, que ce soit de l’Union européenne, des États-Unis, du FMI, etc. Étrange, non ?

Pour ne pas tarir le flux de ces fonds d’une générosité sans borne, la question de la corruption est définitivement réglée par la Cour constitutionnelle de l’Ukraine (CCU) avec sa décision spectaculaire du 27 octobre 2020 : elle décharge le gouvernement, les hauts fonctionnaires et les juges de toute responsabilité pour fausse déclaration de patrimoine.

En conséquence, un juge qui aurait seulement déclaré la propriété d’un modeste logement à Kiev est désormais protégé par la loi s’il est découvert qu’il possède aussi une somptueuse villa sur la côte d’Azur. Au moins, les décisions de justice seront plus vite rendues : elles dépendront seulement de l’épaisseur des enveloppes versées. Il en est de même pour les politiciens et les fonctionnaires. Le pays de la corruption est aussi devenu le pays sans justice.

Depuis, bien évidemment, les milliards continuent d’affluer vers l’Ukraine. En réalité, sommes-nous certains que les dirigeants ukrainiens sont les seuls à en « croquer » ? Rien de ces sommes faramineuses ne serait donc partagé à l’abri des regards avec la partie occidentale qui les envoie à fonds perdus dans ce tonneau des Danaïdes qu’est devenu le Zelenskyland ?

Quoi qu’il en soit, il est sûr que ces dizaines de milliards, auxquels nous contribuons, n’ont pas bénéficié au peuple ukrainien ni à la paix.

Le pays sans droit du travail

Lorsque la guerre éclate, très vite sont interdits les partis d’opposition et les médias qui ne sont pas dans la ligne officielle. Sans doute une démonstration de valeurs démocratiques pour plaire à la Commission européenne… Tout aussi inquiétant, les autorités décident par la loi 5371, ratifiée le 17 août 2022 par le président Zelensky, de supprimer le code du travail dans les entreprises de moins de 250 personnes, c’est-à-dire pour plus des deux tiers de la population. Désormais, il n’existe plus que des contrats « librement » négociés avec l’employeur, qui peut imposer, par exemple, des semaines à 50 ou 60 heures et au-delà. Les salariés ne bénéficient plus de protection légale, et les syndicats n’ont aucun moyen d’action. L’Ukraine est devenue tout à fait légalement le paradis des patrons voyous.

Certes, un travailleur peut refuser un tel contrat, mais est-il sûr de trouver un autre emploi qui ne lui imposera pas les mêmes contraintes, puisque toutes les entreprises, à part les multinationales, bénéficient de ce régime d’exception ?

Signalons qu’a été ajouté à la dernière minute le fait que cette loi restera en vigueur tant que durera la loi martiale. Qui peut garantir qu’elle ne le sera plus ensuite, ne serait-ce que pour « fluidifier » le marché du travail ? Qui peut même garantir qu’avec la crise qui s’annonce dans l’Union européenne, le même type de loi ne viendra pas s’imposer, évidemment pour le bien des salariés ?

Le pays de la traite des êtres humains

Ce qui précède y conduit de manière soft, mais il y a pire encore : de nombreux rapports prouvent que l’Ukraine est le pays des enfants à vendre, mais pas seulement. Par exemple, le Trafficking in Persons Report de 2021 publié par le Département d’État US, donc peu suspect d’être partial envers l’Ukraine, rapporte ceci :

« PROFIL DE LA TRAITE : Comme cela a été signalé au cours des cinq dernières années, les trafiquants d’êtres humains exploitent des victimes nationales et étrangères en Ukraine, et les trafiquants exploitent des victimes ukrainiennes à l’étranger. Les victimes ukrainiennes sont exploitées dans le cadre du trafic sexuel et du travail forcé en Ukraine, ainsi qu’en Russie, en Pologne, en Allemagne et dans d’autres régions d’Europe, en Chine, au Kazakhstan et au Moyen-Orient. Les victimes ukrainiennes sont de plus en plus exploitées dans les États membres de l’Union européenne ».2

On se demande bien ce que fait la Commission européenne, si prompte à se glorifier de ses valeurs droits-de-l’hommistes, pour lutter contre ce fléau… Le rapport se poursuit ainsi :

« Les quelque 104 000 enfants placés dans des orphelinats d’État sont particulièrement exposés au risque de traite. Les responsables de plusieurs institutions d’accueil et d’orphelinats publics auraient été complices ou délibérément négligents dans le trafic sexuel et le travail des filles et des garçons dont ils avaient la charge. »

Même si le mot ne figure pas en toutes lettres, c’est bien de pédocriminalité dont il s’agit. « Un enfant sur dix victimes de traite dans le monde vient d’Ukraine ». Dans ce film diffusé sur Arte, nous apprenons aussi qu’une « quarantaine d’adolescents ont été vendus à des hommes politiques locaux à des fins sexuelles »3. La presse et le grand public sont tenus à l’écart du procès ». Naturellement, il n’en est rien ressorti et qui peut croire que, depuis, la vertu s’est abattue sur les élites de l’Ukraine ?

Pourtant, qui a entendu Ursula von der Leyen, Charles Michel, Josep Borrell, Emmanuel Macron, Olaf Scholz, Boris Johnson… dénoncer ces violations des droits de l’homme inadmissibles ?

Alors, qui veut encore soutenir le pays de rêve du président Zelensky et de l’OTAN que nous vantent jour et nuit les médias de l’Occident ? Leur Ukraine mérite-t-elle notre soutien, et même nos sacrifices ?

Pour aider le peuple ukrainien et éviter la catastrophe qui produit déjà ses effets sur notre société, il n’y a qu’une option : la paix. Il est donc urgent d’arrêter d’envoyer des armes et de l’argent pour la guerre : elle doit s’arrêter faute d’armes et pas faute de combattants. De plus, nous courrons le risque de nous y retrouver nous aussi si nous n’arrêtons pas la folie de nos dirigeants.

source : Stratpol

  1. Soit 714 263 décès contre 271 964 naissances. Source : Service national des statistiques d’Ukraine. Toutes les données et citations dans cet article proviennent de sources officielles et sont référencées dans « Guerre en Ukraine, la responsabilité criminelle de l’Occident », Patrick Pasin, Talma Studios, 2023.
  2. Souligné par l’auteur.
  3. « Trafic d’enfants au cœur de l’Europe », documentaire réalisé par Sylvia Nagel et Sonya Winterberg, 2019.

Négocier avant qu'au dégel, la Russie ne remporte une victoire décisive.

Source : B. Bertez - Le 16/03/2023.

 

La crise du pouvoir américain a commencé. 

L’économie américaine bascule et les marchés financiers occidentaux paniquent  . 

Mis en péril par la hausse des taux d’intérêt, les titres adossés à des créances hypothécaires et les bons du Trésor américain perdent de leur valeur. Les « vibes » proverbiales du marché – sentiments, émotions, croyances et penchants psychologiques – suggèrent qu’un virage sombre est en cours au sein de l’économie américaine.

La puissance nationale américaine se mesure autant par la capacité militaire américaine que par le potentiel et les performances économiques. La prise de conscience croissante que la capacité militaro-industrielle américaine et européenne ne peut pas répondre aux demandes ukrainiennes de munitions et d’équipements est un signal de mauvais augure alors que dans la guerre par procuration, Washington veut faire croire que son substitut ukrainien est en train de gagner.

Les opérations russes d’économie de la force dans le sud de l’Ukraine semblent avoir réussi à écraser les forces ukrainiennes attaquantes avec un minimum de dépenses en vies et en ressources russes. Alors que la mise en œuvre par la Russie de la guerre d’usure a brillamment fonctionné, la Russie a mobilisé ses réserves d’hommes et d’équipements pour déployer une force de plusieurs magnitudes plus importante et nettement plus meurtrière qu’il y a un an.

L’énorme arsenal russe de systèmes d’artillerie, y compris des roquettes, des missiles et des drones reliés à des plates-formes de surveillance aérienne, a transformé les soldats ukrainiens sur la bordure nord du Donbass en cibles pop-up. Le nombre de soldats ukrainiens morts est inconnu, mais une estimation récente parie qu’entre 150 000 et 200 000 Ukrainiens ont été tués au combat depuis le début de la guerre, tandis qu’une autre estime à environ 250 000.

Compte tenu de la faiblesse flagrante des forces de défense terrestres, aériennes et aériennes des membres de l’OTAN, une guerre non désirée avec la Russie pourrait facilement amener des centaines de milliers de soldats russes à la frontière polonaise , la frontière orientale de l’OTAN. Ce n’est pas un résultat que Washington a promis à ses alliés européens, mais c’est maintenant une possibilité réelle.

Contrairement à l’élaboration et à l’exécution de la politique étrangère timide et idéologique de l’Union soviétique, la Russie contemporaine a habilement cultivé le soutien à sa cause en Amérique latine, en Afrique, au Moyen-Orient et en Asie du Sud. Le fait que les sanctions économiques de l’Occident aient endommagé les économies américaine et européenne tout en faisant du rouble russe l’une des devises les plus fortes du système international n’a guère amélioré la position mondiale de Washington.

La politique de Biden consistant à pousser de force l’OTAN aux frontières de la Russie a forgé une forte communauté d’intérêts sécuritaires et commerciaux entre Moscou et Pékin qui attire des partenaires stratégiques en Asie du Sud comme l’Inde et des partenaires comme le Brésil en Amérique latine. Les implications économiques mondiales pour l’ émergence de l’axe russo-chinois et leur révolution industrielle prévue pour quelque 3,9 milliards de personnes dans l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS) sont profondes.

 

En somme, la stratégie militaire de Washington pour affaiblir, isoler ou même détruire la Russie est un échec colossal et cet échec met la guerre par procuration de Washington avec la Russie sur une voie vraiment dangereuse. 

Continuer, face à la chute de l’Ukraine , implique d’ignorer trois menaces métastasantes :

1. Une inflation constamment élevée et des taux d’intérêt en hausse qui signalent une faiblesse économique. (La première faillite bancaire américaine depuis 2020 rappelle la fragilité financière des États-Unis.)

2. La menace pour la stabilité et la prospérité des sociétés européennes déjà sous le choc de plusieurs vagues de réfugiés/migrants indésirables . 

3. La menace d’une guerre européenne plus large .

Au sein des administrations présidentielles, il y a toujours des factions concurrentes qui poussent le président à adopter une ligne de conduite particulière. Les observateurs extérieurs savent rarement avec certitude quelle faction exerce le plus d’influence, mais il y a des personnalités dans l’administration Biden qui cherchent à sortir de l’implication en Ukraine. Même le secrétaire d’État Antony Blinken, fervent partisan de la guerre par procuration avec Moscou, reconnaît que la demande du président ukrainien Volodymyr Zelensky que l’Occident l’aide à reprendre la Crimée est une ligne rouge pour Poutine qui pourrait conduire à une escalade dramatique depuis Moscou.

Revenir sur les demandes malignes et stupides de l’administration Biden pour un retrait humiliant de la Russie de l’est de l’Ukraine avant que les pourparlers de paix ne puissent se tenir est une étape que Washington refuse de prendre. Pourtant, il faut le prendre. 

Plus les taux d’intérêt augmentent et plus Washington dépense sur son territoire et à l’étranger pour poursuivre la guerre en Ukraine, et plus la société américaine se rapproche de l’agitation politique et sociale interne. Ce sont des conditions dangereuses pour toute république.

De tout le naufrage et la confusion des deux dernières années, émerge une vérité indéniable. La plupart des Américains ont raison d’être méfiants et mécontents de leur gouvernement. Le président Biden apparaît comme une découpe en carton, un remplaçant pour les fanatiques idéologiques de son administration, des gens qui voient le pouvoir exécutif comme le moyen de faire taire l’opposition politique et de conserver le contrôle permanent du gouvernement fédéral.

Les Américains ne sont pas dupes. Ils savent que les membres du Congrès échangent de manière flagrante des actions sur la base d’informations privilégiées, créant des conflits d’intérêts qui conduiraient la plupart des citoyens en prison. Ils savent aussi que depuis 1965, Washington les a conduits à une série d’interventions militaires ratées qui ont gravement affaibli la puissance politique, économique et militaire américaine .

Beaucoup trop d’Américains pensent qu’ils n’ont pas eu de véritable leadership national depuis le 21 janvier 2021. Il est grand temps que l’administration Biden trouve une bretelle de sortie pour sortir Washington, DC, de sa guerre ukrainienne par procuration contre la Russie. 

Ça ne sera pas facile. L’internationalisme libéral ou, sous sa forme moderne, le « mondialisme moralisateur », rend ardue la diplomatie prudente, mais c’est le moment. 

En Europe de l’Est, les pluies printanières placent les forces terrestres russes et ukrainiennes face à une mer de boue qui gêne fortement les déplacements. Mais le haut commandement russe se prépare à faire en sorte que lorsque le sol s’assèchera et que les forces terrestres russes attaqueront, les opérations puissent aboutir à une décision radicale , et indiquent clairement que Washington et ses partisans n’ont aucune chance de sauver le régime mourant de Kiev. 

Dès lors, les négociations seront extrêmement difficiles, voire impossibles.

A PROPOS DE L’AUTEUR

DOUGLAS MACGREGOR

Douglas Macgregor, colonel (retraité) est un chercheur principal de  The American Conservative , l’ancien conseiller du secrétaire à la Défense dans l’administration Trump, un ancien combattant décoré et l’auteur de cinq livres.

Nouveau rapport de Bakhmut : Nombreuses pertes – Moral bas – Tactiques russes.

Source : The Saker francophone 


Par Moon of Alabama – Le 15 mars 2023

La semaine dernière, j’ai expliqué pourquoi Bakhmut est en train de tomber. L’article comprenait de longs extraits d’un article publié par le Kyiv Independent. Le journaliste s’était entretenu avec des soldats qui se trouvaient sur le front de Bakhmut. Leur description de la situation était dévastatrice.

Aujourd’hui, un autre journaliste du Kyiv Independent publie un rapport quelque peu similaire :

Bataille de Bakhmut : les soldats ukrainiens craignent que les Russes commencent à « goûter à la victoire »

 

Je vous conseille de lire ce rapport par vous-même, car je ne vais pas en parler en détail. J’en citerai toutefois quelques passages, car ils confirment complètement mon autre article récent sur le nombre réel de victimes parmi les soldats ukrainiens à Bakhmut.

Si l’on fait abstraction de la propagande et du sentiment général, voici ce qu’il en est :

Quelques jours avant de retourner se battre dans la bataille de Bakhmut, un soldat ukrainien, Volodymyr, 54 ans, a déclaré qu’il se sentait mal préparé.

« Lorsqu’ils nous conduisent à Bakhmut, je sais déjà que je vais être envoyé à la mort« , a déclaré Volodymyr au Kyiv Independent lors de son bref séjour à Kramatorsk, une ville de l’oblast de Donetsk située à quelque 25 kilomètres à l’ouest de la ligne de front.

« Les Russes continuent de nous tirer dessus, mais nous n’avons pas d’artillerie, donc nous n’avons rien pour les attaquer en retour« , a déclaré Volodymyr. « Je ne sais pas si j’en reviendrai ou pas. Nous nous y faisons simplement tuer. »

Les fantassins ukrainiens interrogés par le Kyiv Independent ont décrit les combats à Bakhmut comme un défi de survie désespéré face aux stocks « infinis » de munitions d’artillerie et de main-d’œuvre de la Russie. Avec seulement leurs mitrailleuses et leurs fusils, ils disent faire face aux attaques incessantes des mortiers et de l’artillerie russes jusqu’à ce que leur cachette soit finalement détruite.

Valeriy, un fantassin ukrainien, explique que la plupart de ses camarades tombés au combat ont été mortellement blessés par des fragments de projectiles.

« Il est dommage que 90 % de nos pertes soient dues à l’artillerie – ou aux chars et à l’aviation« , a déclaré Valeriy au Kyiv Independent quelques heures après avoir quitté le front de Bakhmut. « Et beaucoup moins (de pertes) dans les batailles de tirs« .

Valeriy a estimé que « seuls quelques-uns » des 27 membres initiaux de son peloton ont quitté le front de Bakhmut avec lui, bien qu’il ait expliqué que la plupart d’entre eux ont été blessés et non tués.

« Les Russes ont tellement d’armes, et ils sont si nombreux, » explique Valeriy. « Ils nous tirent dessus en permanence. Parfois, on entend un tir toutes les secondes. »

L’artillerie est, comme prévu, la plus meurtrière à Bakhmut. Bien qu’il y ait également de nombreux blessés, les chances qu’ils survivent sont faibles. Les blessures d’artillerie sont notoirement sales et lentes à guérir. Des ordres ukrainiens auraient été donnés pour que les hommes légèrement blessés soient simplement rafistolés et immédiatement renvoyés au front. Le fait de travailler dans des tranchées de combat boueuses, où les conditions sanitaires sont notoirement mauvaises, garantit que les blessures pansées s’infecteront par la suite.

L’avantage de l’artillerie russe serait de 10 contre 1. L’artillerie est à l’origine de taux de pertes élevés. Toute affirmation selon laquelle le taux de pertes russes est supérieur à celui du côté ukrainien va à l’encontre de la conclusion logique que l’on peut tirer de ces faits.

Retour à la ligne de front :

Vladyslav, fantassin de la 58e brigade indépendante d’infanterie motorisée, explique que de nombreux soldats de sa section ont refusé de se rendre à Bakhmut à mesure que les Russes se rapprochaient.

Plusieurs soldats d’autres brigades ont également déclaré avoir rencontré de nombreux « réfractaires » qui ont tout fait pour ne pas être renvoyés à Bakhmut.

Lors de la dernière rotation, fin février, Vladyslav a déclaré que seuls huit des 25 soldats de sa section se sont rendus à Bakhmut – les autres ont dit qu’ils ne pouvaient pas y aller à cause d’une fièvre soudaine ou de douleurs corporelles.

Les huit hommes se sont ensuite dirigés vers une position située à un carrefour près de la rivière Bakhmutka, où s’alignaient des maisons détruites. Dès son arrivée, la section est soumise à un feu nourri de mortiers russes.

Deux soldats ont été tués et deux ont été gravement blessés : l’un a perdu son bras et l’autre a été touché à l’estomac par un projectile, raconte Vladyslav. Les autres, dont Vladyslav lui-même, ont subi une grave commotion cérébrale.

Ils ont tous été évacués de Bakhmut le jour-même et ont perdu leur position.

Ce court engagement, avec 50 % de pertes et de graves commotions pour les autres, rend plausibles les rapports faisant état d’une durée de survie de seulement 4 heures à Bakhmut.

La description suivante du style de combat russe à Bakhmut est intéressante. La tactique est conçue pour faire le moins de victimes possible. Cela contredit également les allégations d’attaques par « vagues humaines«  :

Le fantassin Vladyslav a déclaré que les Russes apparaissaient généralement en groupe d’environ cinq personnes la nuit, mais qu’ils semblaient « effrayés » à l’idée de lancer des attaques à courte distance.

Au lieu de cela, les Russes utilisaient une puissance de feu massive pour détruire les maisons – où les Ukrainiens se cachaient pour surveiller les forces d’invasion – au point qu’ils étaient obligés d’abandonner la position pour en chercher une autre mieux protégée, selon Vladyslav.

« Ils se battent (maintenant) intelligemment, eux aussi« , ajoute Vladyslav.

Un autre soldat confirme cette situation :

Maksym, 33 ans, fantassin de la 5e brigade d’assaut séparée, a déclaré que les Russes avaient également établi une tactique dans la zone sud, près de Bakhmut.

Ce fantassin de Kiev a été déployé sur le front d’Ivanivske, à la périphérie sud-ouest de Bakhmut, tout au long du mois de février 2023, où des combats acharnés faisaient rage autour d’un village stratégique situé sur l’une des principales voies d’accès à la ville.

S’appuyant fortement sur des drones, les Russes localisent les positions ukrainiennes dans la zone. Ils tirent ensuite plusieurs salves de mortier et d’artillerie, suivies d’assauts d’infanterie, pour tenter d’encercler les soldats ukrainiens, selon M. Maksym.

Si les drones ne parviennent pas à détecter les positions ukrainiennes, les Russes envoient quelques soldats tirer des coups de feu jusqu’à ce qu’ils entendent des tirs de riposte, selon Maksym.

Aussi brutale soit-elle, la tactique russe a lentement fonctionné et a fait reculer l’unité de Maksym de 1,5 kilomètre au total tout au long du mois de février.

Il s’agit d’un lent travail de grignotage : reconnaissance-artillerie, reconnaissance-artillerie, reconnaissance-artillerie, reconnaissance-artillerie, bombardement de la position. Bien menée, elle entraîne de lourdes pertes du côté des défenseurs et de faibles pertes du côté des attaquants.

Faute d’autres moyens, l’armée ukrainienne continuera d’appliquer sa coûteuse tactique de défense de position :

Le village d’Ivanivske, qui se trouve sur la route de Kostyantynivka et à seulement huit kilomètres de Bakhmut, fait partie des localités que les forces ukrainiennes sont en train de fortifier.

Un commandant de compagnie adjoint de la 80e brigade, connue sous l’indicatif Troisième, a déclaré au Kyiv Independent que des tranchées étaient creusées le long de la route reliant Ivanivske à Kostyantynivka afin d’empêcher une percée russe à Ivanivske. La « pause opérationnelle » dans les combats dans les zones plus éloignées de Bakhmut a été utile pour construire des fortifications.

« Si les Russes s’emparent de Bakhmut, ils avanceront plus au sud, vers Ivanivske, puis vers Chasiv Yar, et plus à l’ouest« , a déclaré Third, 45 ans, qui sert depuis 2014. « Nous nous y préparons. »

« Pour l’instant, il y a assez (de défense)« , a-t-il dit à propos de la défense du reste de la région contre les Russes si Bakhmout tombe. « Mais c’est pour l’instant, et je ne sais pas ce que l’ennemi fera ensuite« .

Personne ne le sait et c’est bien là le problème.

Moon of Alabama

Traduit par Wayan, relu par Hervé, pour le Saker Francophone.

 

 

Ukraine : Les médias commencent à reconnaître la réalité

par Moon of Alabama - Le 16/03/2023.

La vérité sur l’état réel de l’armée ukrainienne commence enfin à apparaitre dans les grands médias. La situation est aussi grave que nous l’avons décrite à maintes reprises, même si elle n’a pas encore été entièrement révélée.

Comme l’indique le Washington Post : « L’Ukraine manque de troupes qualifiées et de munitions alors que les pertes et le pessimisme augmentent ».

Je laisserai de côté les éléments de propagande pour me concentrer sur les faits. Les citations sont longues mais nécessaires pour saisir la profondeur de l’horrible situation.

Le premier paragraphe :

« La qualité de la force militaire ukrainienne, autrefois considérée comme un avantage substantiel par rapport à la Russie, a été dégradée par une année de pertes qui a éloigné du champ de bataille bon nombre des combattants les plus expérimentés, ce qui a conduit certains responsables ukrainiens à s’interroger sur l’état de préparation de Kiev pour l’offensive de printemps tant attendue. »

Cette offensive de printemps a autant de chances de se produire que la campagne de secours annoncée pour débloquer Bakhmout. Cette dernière s’est enlisée dans la boue, ce qui ne fera qu’empirer au cours des prochaines semaines.

La campagne de printemps sera composée de jeunes recrues a qui on demandera d’utiliser un mélange sauvage d’armes qu’elles ne connaissent pas. À moins d’une surprise occidentale, je ne vois pas comment elle pourrait submerger des lignes de défense russes bien préparées.

Revenons à l’article :

« L’afflux de recrues inexpérimentées, amenées pour combler les pertes, a modifié le profil des forces ukrainiennes, qui souffrent également d’une pénurie de munitions, y compris d’obus d’artillerie et de bombes de mortier, selon le personnel militaire sur le terrain.

« La chose la plus précieuse en temps de guerre est l’expérience du combat », a déclaré un commandant de bataillon de la 46e brigade d’assaut aérien, qui n’est identifié que par son indicatif d’appel, Kupol, conformément au protocole militaire ukrainien. « Un soldat qui a survécu à six mois de combat et un soldat qui sort du champ de tir sont deux soldats différents. C’est le jour et la nuit ». « Et il n’y a que quelques soldats qui ont une expérience du combat », a ajouté Kupol. « Malheureusement, ils sont tous déjà morts ou blessés ».

Ces sombres évaluations ont répandu un pessimisme palpable, bien que le plus souvent inavoué, des lignes de front aux couloirs du pouvoir à Kiev, la capitale. »

Les pertes ukrainiennes, estimées plus proches des 200 000 que de 100 000 morts et encore plus de blessés, sont particulièrement ressenties au niveau du commandement inférieur. On ne peut pas kidnapper un vendeur ou un enseignant dans la rue et lui confier un poste de commandement subalterne.

« Kupol a déclaré qu’il s’exprimait dans l’espoir d’obtenir de Washington une meilleure formation pour les forces ukrainiennes et qu’il espérait que les troupes ukrainiennes retenues en vue d’une prochaine contre-offensive auraient plus de succès que les soldats inexpérimentés qui se trouvent actuellement sur le front sous son commandement.

« On croit toujours au miracle », a-t-il déclaré. « Soit ce sera un massacre et des cadavres, soit ce sera une contre-offensive professionnelle. Il y a deux options. Mais il y aura une contre-offensive dans les deux cas ». »

Il faudra en effet un miracle pour que la contre-offensive soit autre chose qu’un massacre.

« Un haut fonctionnaire ukrainien, qui s’est exprimé sous le couvert de l’anonymat par souci de franchise, a qualifié de « symbolique » le nombre de chars promis par l’Occident. D’autres ont exprimé en privé leur pessimisme quant à la possibilité que les fournitures promises parviennent à temps sur le champ de bataille.

« Si vous avez plus de ressources, vous attaquez plus activement », a déclaré le haut fonctionnaire. « Si vous avez moins de ressources, vous vous défendez davantage. Nous allons nous défendre. C’est pourquoi, si vous me demandez mon avis personnel, je ne crois pas à une grande contre-offensive de notre part. J’aimerais bien y croire, mais je regarde les ressources et je me demande : « Avec quoi ? ». Peut-être aurons-nous des avancées localisées ». « Nous n’avons ni les hommes ni les armes », a ajouté le haut fonctionnaire. « Et vous connaissez le ratio : Lorsque vous êtes à l’offensive, vous perdez deux ou trois fois plus de personnes. Nous ne pouvons pas nous permettre de perdre autant de personnes ». »

Les États-Unis ne vont pas se demander si « l’Ukraine peut se permettre ces pertes ». Ils vont pousser à une attaque de grande envergure qui aura peu de chance d’aller au-delà de sa phase de préparation.

« Kupol, qui a accepté d’être pris en photo et a déclaré qu’il comprenait qu’il pourrait subir des représailles personnelles s’il donnait une évaluation franche, a décrit ce que c’était que d’aller au combat avec des soldats nouvellement recrutés qui n’avaient jamais lancé de grenade, qui abandonnaient facilement leurs positions sous le feu et qui manquaient d’assurance dans le maniement des armes à feu.

Son unité s’est retirée de Soledar, dans l’est de l’Ukraine, au cours de l’hiver, après avoir été encerclée par les forces russes qui se sont ensuite emparées de la ville. Kupol se souvient que des centaines de soldats ukrainiens des unités combattant aux côtés de son bataillon ont simplement abandonné leurs positions, alors même que les combattants du groupe mercenaire russe Wagner continuaient à avancer.

Après un an de guerre, le lieutenant-colonel Kupol a déclaré que son bataillon était méconnaissable. Sur environ 500 soldats, une centaine ont été tués au combat et 400 autres blessés, ce qui a entraîné un renouvellement complet des effectifs. Le lieutenant-colonel Kupol a indiqué qu’il était le seul professionnel militaire du bataillon et il a décrit la difficulté de diriger une unité composée uniquement de soldats inexpérimentés.

« Je reçois 100 nouveaux soldats », explique-t-il. « Ils ne me laissent pas le temps de les préparer. Ils me disent : « Emmenez-les au combat ». Ils laissent tout tomber et courent. C’est tout. Vous comprenez pourquoi ? Parce que le soldat ne tire pas. Je lui demande pourquoi et il me répond : « J’ai peur du bruit du coup de feu ». Et pour une raison ou une autre, il n’a jamais lancé de grenade. … Nous avons besoin d’instructeurs de l’OTAN dans tous nos centres de formation, et nos instructeurs doivent être envoyés là-bas, dans les tranchées. Parce qu’ils ont échoué dans leur tâche ».

Il a décrit de graves pénuries de munitions, y compris un manque de bombes de mortier simples et de grenades pour les MK 19 fabriquées aux États-Unis. (…)

« Vous êtes sur la ligne de front » dit Kupol. « Ils viennent vers vous et il n’y a rien pour tirer. »

Kupol a déclaré que Kiev devait se concentrer sur une meilleure préparation systématique des nouvelles troupes. « C’est comme si tout ce que nous faisions était de donner des interviews et de dire aux gens que nous avons déjà gagné, qu’il suffit de se retirer un peu plus, dans deux semaines, et que nous gagnerons », a-t-il déclaré. »

Oui, Kiev, aidé par les médias « occidentaux », parle d’une victoire qui n’arrivera probablement jamais. Sur le terrain, le point de vue est tout autre :

« Dmytro, un soldat ukrainien que The Post n’identifie que par son prénom pour des raisons de sécurité, a décrit bon nombre des mêmes conditions. Certains des soldats les moins expérimentés qui servent à son poste au sein de la 36e brigade de marine dans la région de Donetsk « ont peur de quitter les tranchées », a-t-il déclaré. Les bombardements sont parfois si intenses qu’un soldat est pris d’une crise de panique, puis « d’autres l’attrapent ».

La première fois qu’il a vu ses compagnons d’armes très secoués, Dmytro a essayé de leur faire comprendre la réalité des risques. La fois suivante, dit-il, ils « ont simplement quitté la position en courant ». « Je ne les blâme pas », dit-il. « Ils étaient tellement désorientés ». »

Oui, le choc de l’obus est réel. Être sous le feu de l’artillerie est terrifiant. Surtout quand on est un novice, assis dans un fossé sans armure et sans aucun moyen d’y répondre.

La suprématie de l’artillerie russe explique pourquoi les pertes ukrainiennes sont un multiple de celles du côté russe. Mais même si des fantassins sont disponibles et bien entraînés, rien ne peut compenser la perte de la colonne vertébrale d’une armée :

« L’Ukraine a perdu un grand nombre de ses officiers subalternes qui avaient reçu une formation américaine au cours des neuf dernières années, érodant ainsi un corps de dirigeants qui a contribué à distinguer les Ukrainiens de leurs ennemis russes au début de l’invasion, a déclaré le responsable ukrainien. Aujourd’hui, ces forces doivent être remplacées. « Beaucoup d’entre eux ont été tués », a déclaré le fonctionnaire. »

Remplacées par quoi ? Il faut des années pour former un sergent-chef ou un capitaine. Ces postes requièrent une expérience sur le terrain. Aucune formation civile ne peut remplacer cette expérience. Des cours de trois semaines, dispensés par des officiers « occidentaux » sans expérience réelle de la guerre, ne pourront pas compenser cela :

« Même avec de nouveaux équipements et une nouvelle formation, les responsables militaires américains considèrent que les forces ukrainiennes sont insuffisantes pour attaquer tout le long du front géant, où la Russie a érigé d’importantes défenses, de sorte que les troupes sont entraînées à rechercher les points faibles qui leur permettront de percer avec des chars et des véhicules blindés. »

Il n’y aura pas de points faibles. Ou peut-être y en aura-t-il, laissés intentionnellement ouverts par les Russes, pour attirer la « contre-attaque » ukrainienne et la prendre au piège dans un grand chaudron.

C’est fini pour l’Ukraine. Les forces russes enveloppent les unités ukrainiennes dans plusieurs petits chaudrons. Bakhmout n’est que l’un d’entre eux. Au sud de celle-ci se trouve l’agglomération de New York qui en deviendra un autre. Avdiivka, plus au sud, est également en grande difficulté et pourrait même être la première des trois villes à tomber.

Même le New York Times commence à s’en rendre compte :

« De Kupiansk au nord à Avdiivka au sud, en passant par Bakhmout, Lyman et des dizaines de villes entre les deux, les forces russes attaquent sur un arc de 160 miles dans l’est de l’Ukraine, dans une lutte de plus en plus intense pour obtenir un avantage tactique avant les éventuelles offensives de printemps. De violents combats ont été signalés lundi dans et autour d’Avdiivka, une ville qui a été sur les lignes de front pendant la majeure partie de l’année dernière et qui, ces derniers jours, est redevenue un point focal des combats. (…)

À Bakhmout, où la société militaire privée Wagner a pris le contrôle de la partie orientale de la ville, des combats brutaux se déroulent dans les rues, sur les vestiges détruits des bâtiments et dans les profondeurs des mines, selon des blogueurs militaires russes. (…)

À Kupiansk et dans les villages environnants, la Russie a intensifié les bombardements et les assauts au sol, et l’Ukraine a ordonné aux civils de quitter les lieux. Les bombardements russes se sont également intensifiés à Lyman et dans d’autres villes. Selon l’armée ukrainienne, les forces russes tentent plus de 100 fois par jour de percer leurs lignes.

Avec peu de personnes et de bâtiments intacts, les endroits les plus disputés n’ont plus grand-chose à offrir, si ce n’est le contrôle des routes et des voies ferrées que le Kremlin considère comme important pour son objectif de s’emparer de l’ensemble de la région orientale connue sous le nom de « Donbass ». Les assauts peuvent également permettre de mieux se positionner pour l’attaque suivante, d’obtenir des renseignements sur les positions de l’autre camp et d’avoir une valeur de propagande. »

Le NYT ne le mentionne pas, mais le plus important est que les forces russes, dans toutes ces attaques, sont en train de détruire l’armée ukrainienne.

Dans quelques semaines, après l’effondrement de ces trois chaudrons, l’armée ukrainienne sera en fuite. Ce sera alors l’été et la boue aura séché. Les forces russes deviendront alors plus mobiles, ce qui pourrait même leur permettre d’effectuer des mouvements plus importants.

Le seul moyen pour l’armée ukrainienne de contrer ces mouvements sera d’utiliser les forces qu’elle prépare actuellement pour une « contre-offensive » comme formations de défense. Mais même cela ne lui donnera qu’environ trois mois de plus avant l’inévitable effondrement.

source : Moon of Alabama

traduit par Wayan, relu par Hervé, pour Le Saker Francophone

Guerre d’Ukraine J-378/J-385 :

La frappe hypersonique russe qui a terrifié l’OTAN

Source : Le Courrier des Stratèges - par Edouard Husson - Le 15/03/2023.

Guerre d’Ukraine J-378/J-385 : la frappe hypersonique russe qui a terrifié l’OTAN

La frappe hypersonique russe de la nuit du 8 au 9 mars, qui a visé un centre de commandement ukrainien – où il y avait sans doute des officiers occidentaux – a été perçue dans toute son ampleur par les Ukrainiens et l’OTAN. Un an après les premières utilisations de missiles hypersoniques par l’armée russe, l’alliance occidentale sortirait-elle du déni de réalité? Pas encore si l’on en croit la croyance partagée dans un plan de contre-offensive ukrainienne au printemps, qui est développé hors de toute réalité de terrain et de prise en compte de la guerre jusqu’à maintenant. Au moment où une crise bancaire pointe le bout du nez, la situation actuelle a toutes les apparences d’un décrochage de l’Occident. Les déclarations grandiloquentes ne pourront pas compenser l’épuisement en effectifs de l’armée ukrainienne. Et la réconciliation entre Arabie Saoudite et Iran sous médiation chinoise, devenue officielle le 10 mars 2023, sonne le glas de la puissance américaine dans le monde.

Cette frappe hypersonique russe qui a terrifié les Etats-majors occidentaux

 

 

C’est un épisode passé largement inaperçu dans les médias. Sauf sur le fait que Vladimir Zelenski a concédé que les frappes russes de précision de la nuit du 8 au 9 mars avaient été particulièrement éprouvantes pour les infrastructures du pays.

En réalité, la raison pour laquelle Zelenski et le chef d’Etat-major ukrainien Zaloujni ont eu du mal à cacher leur désarroi tient à l’utilisation des fameux missiles « dagues » hypersoniques, les Khinzal: selon une déclaration ukrainienne ultérieure, il y aurait eu six missiles hypersoniques tirés sur des objectifs.

Surtout, malgré le secret auquel sont tenues les sources militaires, on a appris immédiatement de source ukrainienne qu’une des frappes hypersoniques a touché un centre de commandement ukrainien. Le Ministère de Défense de Russie a confirmé la cible. La rumeur insistante sur les réseaux sociaux ukrainiens parle d’officiers occidentaux touchés par la frappe.

Ce qui est intéressant, ce sont les déclarations, du côté ukrainien, insistant sur une « première ». Alors que, dans le Courrier des Stratèges, nous avons attiré votre attention sur l’utilisation d’armes hypersoniques par la Russie dès le mois de mars 2022.

Nous vous avons indiqué qu’il s’agissait d’une technologie décisive, possédée par la Russie, et dans une moindre mesure par la Chine, mais non maîtrisée encore par les Etats-Unis. C’est cette maîtrise qui explique, dans une large mesure, la montée en puissance très progressive de la Russie dans l’intensité de la bataille. Le commandement militaire russe considère qu’il a son temps et qu’il possède, pour plusieurs années, une supériorité stratégique absolue sur les Etats-Unis. Et la possibilité d’un anéantissement de l’advrsaire sans radioactivité – puisque les armes hypersoniques sont déjà redoutablement destructrices avec des charges conventionnelles.

Ce qui est nouveau, c’est la fin du déni de réalité du côté ukrainien et occidental. Avec cette déclaration surprenante sur le fait que les Russes sont donc bien capables de fabriquer les missiles hypersoniques en série ! Mais qui en doutait, sinon ceux qui ne voulaient pas voir ?

L’OTAN frappé à la tête?

En réalité, le coup semble avoir touché aussi des officiers de l’OTAN se trouvant clandestinement en Ukraine. Selon le média grec Pronews:

Un missile supersonique russe Kinzhal, dont la vitesse d’impact sur la cible était de 12 Mach (douze fois la vitesse du son), a réussi à toucher le centre de commandement, de contrôle et de communication commun à l’Ukraine et à l’OTAN, installé à une profondeur de 130 mètres !

Le quartier général souterrain (construit à 400 pieds sous terre) était occupé par un certain nombre de responsables de l’OTAN et aurait abrité plus de 300 personnes.

Les Russes parlent de récupérer 40 morts dans les décombres du quartier général souterrain, mais la plupart d’entre eux ne seront jamais retrouvés car ils ont été ensevelis sous les décombres.

On ne sait pas combien d’Occidentaux et d’Ukrainiens ont été tués dans l’attaque, mais c’est la première fois que l’Occident compte autant de morts, y compris des officiers et des sous-officiers.

La plupart d’entre eux sont britanniques et polonais, mais il y a aussi des Américains et des membres de sociétés privées qui s’occupent de communications et de transmission de données.

Dans les jours et les semaines à venir, l’évolution des opérations montrera dans quelle mesure elle affectera la conduite des opérations ukrainiennes et occidentales et la tentative d’arrêter l’attaque russe finale sur Bakhmout/Artiomovsk

Cependant, il s’agit de la première attaque massive contre le personnel de l’OTAN et on ne sait pas comment les capitales occidentales vont réagir, mais si elles le font, ce sera comme si elles admettaient la participation active de leur personnel à la guerre contre la Russie ! »

En réalité, ce n’est pas la première fois que des effectifs occidentaux sont touchés par une arme hypersonique. Il y a un an (le 19 mars 2022), la Russie avait envoyé une arme hypersonique sur un casernement de volontaires étrangers. Apparemment, le déni de réalité a mis un an – et une autre frappe dévastatrice – à se dissiper.

Il y a un an déjà….

Le Ministère russe de la défense expliquait aux Occidentaux, mais apparemment sans être pris au sérieux, ce que pouvait faire l’arme hypersonique russe. Voilà ce que notre chronique de la Guerre d’Ukraine avait cité : au 26è jour de guerre :

+ Le Ministre russe de la Défense a confirmé l’utilisation, pour la première fois sur un champ de bataille, de l’arme hypersonique:  « Le ministère russe de la Défense a analysé les résultats de la destruction des actifs de l’infrastructure militaire de l’Ukraine par les complexes de missiles d’aviation Kinzhal avec des missiles aérobalistiques hypersoniques. Des entrepôts souterrains protégés d’armes d’aviation ukrainiennes et d’unités de combat pour les systèmes de missiles Tochka-U situés à Delyatin, dans la région d’Ivano-Frankovsk, ainsi que de grands dépôts de carburant à Konstantinovka, dans la région de Nikolaev, ont été détruits. Le Ministre a déclaré:  « Je voudrais attirer votre attention sur le fait que l’utilisation d’un missile aérobalistique hypersonique du complexe Kinzhal a été effectuée à partir d’une portée de plus de 1 000 kilomètres. Le temps de vol du missile hypersonique a été inférieur à 10 minutes. Du fait de la vitesse hypersonique et de l’énergie cinétique ultra-haute, l’ogive du complexe de missiles Kinzhal a détruit un arsenal souterrain protégé situé dans une zone montagneuse, construit à l’époque soviétique pour stocker des munitions et des missiles spéciaux. La destruction d’un grand dépôt de carburant à Konstantinovka par le missile hypersonique Kinzhal est due à son invisibilité et à son invulnérabilité à tous les moyens de défense aérienne et antimissile de l’ennemi. L’utilisation au combat du système de missiles d’aviation Kynzhal a confirmé son efficacité à détruire des moyens spéciaux ennemis hautement protégés. Les frappes sur l’infrastructure militaire de l’Ukraine par ce système de missiles se poursuivront dans le cadre de l’opération militaire spéciale. Je tiens à souligner que le système Kinzhal est utilisé avec une tête conventionnelle. Bien que les experts soient bien conscients des capacités de cette arme, non seulement en termes de portée, mais aussi en termes de type de charge«

 

Le plan de la future offensive ukrainienne…date de plus d’un an!

 

 

L’auteur de ce tweet, Marc Legrand, qui a écrit sur le renseignement et la défense, m’a envoyé pour avis le plan d’offensive de printemps de l’armée ukrainienne tel qu’il l’a reconstitué. Je me permets de critiquer ici son approche, non pour le plaisir de démolir sa construction mais parce qu’elle me semble désincarnée. En témoignent ces cartes purement administratives, sans indications sur le relief ni sur les positions actuelles de l’armée russe.

Il y a premièrement une question logique. Comment une armée qui est autant en difficultés que l’armée ukrainienne, pourrait-elle lancer une triple contre-offensive? Que veut dire, pour l’OTAN, « jouer son va-tout’? S’engager directement sur le terrain ?

« Franchissement du Dniepr à Kherson, et en deux points situés entre l’Ingoulets et le réservoir de Kakhovka… Débarquement amphibie dans le golfe de Karkinit, au sud, avec soutien de l’artillerie (HIMARS) et drones pour y fixer l’armée russe. (2/6) »

Alors que l’armée russe a solidement établi ses lignes de défense sur la rive gauche du Dniepr, combien l’armée ukrainienne est-elle en mesure d’aligner d’hommes pour la déloger ?

L’auteur est-il impressionné par le retrait de Kherson? Mais ce sont les Russes qui se sont retirés !  Non l’armée ukrainienne qui les a délogés ! Autre question : les HIMARS se sont-ils illustrés jusqu’à maintenant ailleurs que dans le bombardement des zones civiles, par exemple à Donetsk? Enfin, les six derniers mois n’ont-ils pas prouvé une supériorité des drones russes sur les drones ukrainiens ?

« Attaque en trois points à l’est du réservoir de Kakhovka, dans le but d’atteindre Melitopol, Berdiansk et, plus tard, Marioupol… Tirs massifs de l’artillerie (HIMARS) depuis Nikopol, selon un axe nord-sud, pour soulager le « groupe Kherson« . (3/6) »

On voudrait savoir comment les Ukrainiens vont inverser un an de guerre : Les Russes ont avancé rapidement au sud, à la fin de l’hiver dernier. Et comment l’auteur pense-t-il que l’armée kiévienne va refaire la bataille de Marioupol, pour en inverser le résultat ? Au passage, il ne demande jamais ce que pensent les populations de la région, par exemple les habitants d’une Marioupol en reconstruction rapide ?

« Contre-offensive en direction du sud-ouest de Donetsk, de Gorlovka (Horlivka) et Bakhmout (Artiomovsk), afin de fixer l’armée russe et faciliter, plus tard, la prise de Marioupol… Il s’agit ici du corps d’armée le plus fourni du dispositif. (4/6)

N’est-il pas surréaliste de parler d’une contre-offensive en direction de Bakhmout/Artiomovsk, au moment où les Ukrainiens sont en train de perdre la ville ? D’autre part, on soulignera le paradoxe consistant à parler d’offensives ukrainiennes alors que l’armée russe déloge progressivement les troupes ukrainiennes de positions défensives (tranchées, immeubles bunkerisés). L’auteur veut-il dire que maintenant que les Russes ont dégagé le terrain, les Ukrainiens vont pouvoir reprendre une guerre de mouvement ? Mais avec quelles troupes ? Quel équipement ? Quelles munitions ? Actuellement le ration de tirs Ukraine/Russie est de 1/8. Comment va-t-il s’inverser en un rapport même seulement de 3 ou 4/1, qui serait nécssaire pour pouvoir avancer avec un peu de succès ?

« Il est assez probable que les trois contre-offensives simultanées de l’armée ukrainienne surviennent alors que l’armée russe lance une offensive dans l’oblast de Kharkov, au nord du Donets… Ce qui disperserait les forces de cette dernière. (5/6) »

L’armée ukrainienne a un ratio de pertes de 8/1 (l’inverse du ration de munitions d’artillerie!). Elle serait capable de lancer trois offensives en même temps ? Et, par ailleurs, les Russes devraient dégarnir leurs lignes pour attaquer au Nord ? On peut même imaginer un message de Choïgou à Reznikov : Cher collègue, je vous en prie, je vous ai dégagé le terrain !

« Accompagnée d’attentats terroristes à Minsk, Moscou et en Transnistrie, l’opération TRIDENT permettrait à Kiev et l’OTAN de reprendre tout le sud du pays, menaçant la Crimée et le sud-ouest russe… Le but étant de forcer l’ennemi à négocier. (6/6) »

On passera sur l’encouragement au terrorisme. Et sur l’oubli du fait que le terrorisme est l’arme des faibles. Mais l’auteur n’a-t-il pas vu l’ampleur de la riposte, des 8-9 mars, en réponse à quelques incursions ukrainiennes en territoire russe ? La vitesse à laquelle Marc Legrand fait manoeuvrer l’armée ukrainienne et cette OTAN un peu fantômatique qu’il évoque, est digne de Picrochole, personnage de Rabelais; ou d’un jeu vidéo, comme on voudra. Mais est-ce bien sérieux ?

En réalité, j’épingle cette présentation des choses parce que je l’ai entendue aussi à très haut niveau, dans un cénacle, l’été dernier, où il y avait des ministres européens. J’y ai entendu parler, pendant deux jours, de la future victoire ukrainienne sans un seul mot sur les opérations au sol, la réalité militaire…..

Surtout, Marc Legrand devrait se souvenir de ce que cette idée de triple offensive – comme l’a montré Jacques Baud – remonte à l’hiver 2021-2022 : Une grande offensive ukrainienne se préparait, qui devait à la fois reconquérir le Donbass et poser les conditions d’une reconquête de la Crimée. Moscou a pris la menace suffisamment au sérieux pour intervenir militairement à titre préventif et (1) briser les troupes ukrainiennes et leurs matériels se trouvant dans le nord, la région de Kiev et en Galicie; (2) conquérir le sud pour protéger la Crimée (3) amorcer le démantèlement des lignes de défense ukrainienne, qui continue encore.

La guerre se déroule sur un terrain, avec des obstacles physiques, des installations défensives, des matériels, des effectifs. ce n’est pas le monde d’une sorte de « bataille pure et parfaite désincarnée ». Nous payons l’effondrement de la culture générale. Le problème vient de ce que l’absence de culture stratégique et militaire concerne jusqu’au sommet des Etats européens.

M.K. Bhadrakumar analyse la médiation chinoise entre l’Arabie Saoudite et l’Iran : Une très lourde défaite géostratégique américaine

 

« L’accord annoncé vendredi à Pékin concernant la normalisation des relations diplomatiques entre l’Arabie saoudite et l’Iran et la réouverture de leurs ambassades est un événement historique. Il va bien au-delà de la question des relations entre l’Arabie saoudite et l’Iran. La médiation de la Chine signifie que nous assistons à un profond déplacement des plaques tectoniques dans la géopolitique du 21e siècle.

Les Etats-Unis exclus de l’accord

La déclaration conjointe publiée vendredi à Pékin commence par indiquer que l’accord entre l’Arabie saoudite et l’Iran a été conclu « en réponse à la noble initiative du président Xi Jinping ». L’Arabie saoudite et l’Iran ont exprimé leur « appréciation et leur gratitude » à Xi Jinping et au gouvernement chinois « pour avoir accueilli et parrainé les pourparlers, ainsi que pour les efforts qu’ils ont déployés en vue de leur réussite ».

Le communiqué conjoint mentionne également l’Irak et Oman pour encourager le dialogue saoudo-iranien en 2021-2022. Mais le fait marquant est que les États-Unis, qui sont traditionnellement la puissance dominante dans la politique de l’Asie de l’Ouest depuis près de huit décennies, ne figurent nulle part dans le communiqué. (C’est nous qui soulignons, CdS) (…)

Mais M. Biden doit en assumer la responsabilité. Cet échec cataclysmique est largement imputable à sa ferveur à imposer ses dogmes néoconservateurs en complément de la puissance militaire américaine et à l’insistance fréquente de M. Biden lui-même sur le fait que le sort de l’humanité dépend de l’issue d’une lutte cosmique entre la démocratie et l’autocratie.

La Chine a montré que l’hyperbole de M. Biden est illusoire et qu’elle se heurte aux réalités. Si la rhétorique moralisatrice et irréfléchie de M. Biden a aliéné l’Arabie saoudite, ses tentatives pour supprimer l’Iran se sont heurtées à la résistance obstinée de Téhéran. En fin de compte, M. Biden a littéralement poussé Riyad et Téhéran à rechercher des forces compensatrices qui les aideraient à repousser son attitude oppressive et dominatrice.

Un moment Suez

L’exclusion humiliante des États-Unis du centre de la scène politique de l’Asie occidentale constitue un « moment Suez » pour la superpuissance, comparable à la crise vécue par le Royaume-Uni en 1956, qui a obligé les Britanniques à comprendre que leur projet impérial était dans l’impasse et que l’ancienne façon de faire – mettre au pas les nations plus faibles en tant qu’obligations ostensibles du leadership mondial – ne fonctionnerait plus et ne mènerait qu’à un bilan désastreux.

Ce qui est stupéfiant ici, c’est la puissance cérébrale, les ressources intellectuelles et le « soft power » que la Chine a mis en jeu pour surpasser les États-Unis. Les États-Unis disposent d’au moins 30 bases militaires en Asie occidentale – cinq rien qu’en Arabie saoudite – mais ils ont perdu leur rôle de leader. À bien y réfléchir, l’Arabie saoudite, l’Iran et la Chine ont fait leur annonce historique le jour même où Xi Jinping a été élu pour un troisième mandat présidentiel.

Ce que nous voyons, c’est une nouvelle Chine, sous la direction de Xi Jinping, qui trotte sur le haut plateau. Pourtant, elle adopte une attitude effacée et ne s’attribue aucun titre de gloire. Il n’y a aucun signe du « syndrome de l’empire du Milieu », contre lequel les propagandistes américains avaient mis en garde.

Quand un diplomate indien fait l’éloge de la Chine!

Au contraire, pour le public mondial – en particulier des pays comme l’Inde ou le Viêt Nam, la Turquie, le Brésil ou l’Afrique du Sud – la Chine a présenté un exemple salutaire de la manière dont un monde multipolaire démocratisé peut fonctionner à l’avenir – comment il est possible d’ancrer la diplomatie des grandes puissances sur une politique consensuelle et conciliante, sur le commerce et l’interdépendance et d’aboutir à un résultat « gagnant-gagnant ».

Un autre message important est implicite : La Chine en tant que facteur d’équilibre et de stabilité au niveau mondial. L’Asie-Pacifique et l’Asie occidentale ne sont pas les seules à nous observer. Le public comprend également l’Afrique et l’Amérique latine – en fait, l’ensemble du monde non occidental qui forme la grande majorité de la communauté mondiale et qui est connu sous le nom de « Global South ».

Ce que la pandémie et la crise ukrainienne ont fait remonter à la surface, c’est la réalité géopolitique latente qui s’est accumulée au fil des décennies, à savoir que le Sud mondial rejette les politiques de néo-mercantilisme menées par l’Occident sous le couvert de l' »internationalisme libéral ». (C’est nous qui soulignons, CdS!)

L’Occident poursuit un ordre international hiérarchique. Le chef de la politique étrangère de l’Union européenne, Josep Borrell, l’a récemment déclaré à l’improviste, avec des accents racistes, en déclarant publiquement que « l’Europe est un jardin, le reste du monde est une jungle ». Le reste du monde est une jungle, et la jungle pourrait envahir le jardin ».

Demain, la Chine pourrait tout aussi bien contester l’hégémonie américaine sur l’hémisphère occidental. Le récent document du ministère chinois des affaires étrangères intitulé « L’hégémonie américaine et ses dangers » nous indique que Pékin ne sera plus sur la défensive.

Rôle discret de la Russie?

Entre-temps, un réalignement des forces sur la scène mondiale est en cours, avec la Chine et la Russie d’un côté et les États-Unis de l’autre. Le fait que, la veille même de l’annonce historique faite à Pékin vendredi, le ministre saoudien des affaires étrangères, le prince Faisal bin Farhan Al Saud, ait atterri soudainement à Moscou pour une « visite de travail » et se soit entretenu avec le ministre des affaires étrangères, Sergueï Lavrov, visiblement ravi, n’est-il pas un message important ?

Bien entendu, nous ne saurons jamais quel rôle Moscou aurait joué en coulisses, en coordination avec Pékin, pour jeter des ponts entre Riyad et Téhéran. Tout ce que nous savons, c’est que la Russie et la Chine coordonnent activement leurs actions en matière de politique étrangère. Il est intéressant de noter que le 6 mars, le président Poutine a eu une conversation téléphonique avec le président iranien Ebrahim Raisi. (…)

Une mauvaise nouvelle pour Israël?

Il est concevable que Riyad n’ait plus rien à voir avec les complots diaboliques ourdis à Washington et à Tel-Aviv pour créer une alliance anti-iranienne en Asie occidentale. Il n’est pas non plus envisageable que l’Arabie saoudite participe à une attaque israélo-américaine contre l’Iran.

Cette situation isole gravement Israël dans la région et rend les États-Unis impuissants. Sur le fond, cela réduit à néant les efforts fébriles déployés dernièrement par l’administration Biden pour cajoler Riyad afin qu’il rejoigne les accords d’Abraham.

Toutefois, il est significatif qu’un commentaire du Global Times ait noté avec une certaine audace que l’accord saoudo-iranien « constitue un exemple positif pour d’autres points chauds de la région, tels que l’apaisement et le règlement du conflit israélo-palestinien ». À l’avenir, la Chine pourrait jouer un rôle important dans la construction d’un pont entre les pays pour résoudre les problèmes épineux de longue date au Moyen-Orient, comme elle l’a fait cette fois-ci ».

En effet, le communiqué conjoint publié à Pékin indique que « les trois pays [l’Arabie saoudite, l’Iran et la Chine] ont exprimé leur volonté de déployer tous les efforts possibles pour renforcer la paix et la sécurité régionales et internationales ». La Chine peut-elle sortir un lapin de son chapeau ? L’avenir nous le dira.

Pour l’heure, le rapprochement saoudo-iranien aura certainement des retombées positives sur les efforts déployés en vue d’un règlement négocié au Yémen et en Syrie, ainsi que sur la situation politique au Liban.

Les sanctions contre l’Iran sont devenues inefficaces

Le communiqué conjoint souligne que l’Arabie saoudite et l’Iran ont l’intention de relancer l’accord général de coopération de 1998 dans les domaines de l’économie, du commerce, de l’investissement, de la technologie, de la science, de la culture, des sports et de la jeunesse. Dans l’ensemble, la stratégie de pression maximale de l’administration Biden à l’égard de l’Iran s’est effondrée et les sanctions occidentales contre l’Iran sont devenues inefficaces. Les options politiques des États-Unis à l’égard de l’Iran se sont réduites. L’Iran gagne en profondeur stratégique pour négocier avec les États-Unis.

Le tranchant des sanctions américaines réside dans les restrictions imposées au commerce du pétrole iranien et à l’accès aux banques occidentales. Il est tout à fait concevable qu’un retour de bâton soit sur le point de se produire alors que la Russie, l’Iran et l’Arabie saoudite – trois des principaux pays producteurs de pétrole et de gaz – commencent à accélérer leur recherche de mécanismes de paiement contournant le dollar américain.

Quand l’Iran et l’Arabie Saoudite adhèreront aux BRICS…

La Chine discute déjà d’un tel arrangement avec l’Arabie saoudite et l’Iran. Les transactions commerciales et économiques entre la Chine et la Russie tentent d’éviter le dollar américain pour les paiements. Il est bien entendu que toute érosion significative du statut du dollar en tant que « monnaie mondiale » ne sonnera pas seulement le glas de l’économie américaine, mais affaiblira également la capacité des États-Unis à mener des « guerres éternelles » à l’étranger et à imposer leur hégémonie mondiale.

En définitive, la réconciliation entre l’Arabie saoudite et l’Iran est également un précurseur de leur intronisation en tant que membres des BRICS dans un avenir proche. Il est certain qu’il existe déjà une entente entre la Russie et la Chine à ce sujet. L’adhésion de l’Arabie saoudite et de l’Iran aux BRICS réinitialisera radicalement la dynamique du pouvoir dans le système international.

 

Lire aussi : Le Moyen-Orient s’affranchit de l’Occident

 

La Russie a finalement abattu l’un de ces drones américains embêtants et extrêmement coûteux qui bourdonnaient en Crimée dans la mer Noire

Amusant et instructif, je n’ai pas le temps de traduire mais vous comprenez néanmoins ; bourré d’informations intéressantes.

par Simplicius - Le 15/03/2023.

La Russie a finalement abattu l’un de ces drones américains embêtants et extrêmement coûteux qui bourdonnaient en Crimée dans la mer Noire.

Un intercepteur aérien russe Su-27 a harcelé un MQ-9 Predator américain, déversant du carburant dessus avant de percuter son hélice, le faisant tomber dans la mer Noire.

Ceci est fait exprès bien sûr afin de garder une possibilité de déni diplomatique plausible. 

Cela permet à la Russie de maintenir une posture non agressive avec l’excuse que « nous n’avons techniquement pas abattu le drone avec des missiles/canons », et cela ressemble plus à un « choc accidentel » qu’à un abattage délibéré.

Les États-Unis feignent bien sûr l’indignation, qualifiant l’attaque de « non professionnelle ».

« Plusieurs fois avant la collision, les Su-27 ont déversé du carburant et ont volé devant le MQ-9 d’une manière imprudente, peu respectueuse de l’environnement et non professionnelle », s’est plaint l’armée américaine, accusant les Russes de « manque de compétence ».

Faut-il nous rappeler, comme je l’ai écrit dans cet article : « Le visage changeant de la guerre – L’avenir du SMO russe » que le pilote russe Piotr Nesterov a en fait été le pionnier de la technique de « l’éperonnage aérien » ?

« Le premier éperonnage aérien a été effectué par Pyotr Nesterov en 1914 pendant la Première Guerre mondiale. Au début de la Seconde Guerre mondiale, la tactique était employée par les pilotes soviétiques, qui l’appelaient taran, le mot russe pour « bélier ». »

Les États-Unis affirment désormais qu’ils « continueront à piloter » leurs missions de drones totalement légales et non agressives en mer Noire. Vous savez, tout le « Rules Based Order » jing-a-ling.

Au cours des années 80, la mer Noire était en fait un foyer d’activités de pilonnage naval russe, car les navires américains étaient régulièrement éperonnés par des marins cavaliers soviétiques.

Et ailleurs, des pilotes russes avaient également été les pionniers de techniques aériennes telles que le déversement de kérosène sur des pilotes américains. Dans cet article, on peut rencontrer le « hooligan de l’air » Vasya Tsymbal « qui était célèbre pour de telles tactiques :

Une fois dans le nord, Vasily Tsymbal n’a pas changé ses habitudes. En septembre 1987, cependant, comme toujours, il y a eu des troubles près de la péninsule de Kola – les membres américains et norvégiens de l’OTAN ont volé assez souvent, pénétrant dans l’espace aérien soviétique plusieurs fois par jour, et les porte-avions ont labouré la mer de Barents, d’où ces avions ont décollé. Lorsque Vasya a couru vers son fidèle Su-27 pour la septième fois en une journée, mettant un casque en mouvement… Probablement, il voulait vraiment utiliser le feu pour tuer et des missiles à ogive nucléaire, bien sûr.

Mais aucun ordre correspondant n’a été donné, et Tsymbal n’a eu que son bon vieux truc. Après avoir persuadé son camarade, il a organisé avec lui une pluie de kérosène puant pour les Américains. Curieusement, cela a beaucoup aidé – les Yankees ont commencé à apparaître beaucoup moins dans la région. Et il n’y a eu aucune conséquence pour Vasily.

En fin de compte, il s’agit d’une importante étape d’escalade de la « ligne rouge » du commandement russe. Ils montrent les limites de leur patience aux États-Unis. Cependant, le MQ-9 qui a été abattu n’est pas la principale menace de loin – le RQ-4 Global Hawk, beaucoup plus puissant, qui fait également le tour dans cette zone, dispose d’instruments beaucoup plus puissants pour scanner et fournir des données cibles sur la Crimée et la région périphérique. Cependant, le MQ-9 possède une suite radar AN / APY-8 Lynx II SAR qui peut faire des choses similaires mais avec une portée beaucoup plus courte en raison du fait qu’il n’a que 1/3 du plafond de vol (25 000 pieds) du RQ- 4 (65k+), qui permet au RQ-4 de balayer une distance beaucoup plus grande avec des capteurs SAR et électro-optiques plus puissants.

 

***

Revenons maintenant à la programmation régulière avec quelques nouvelles mises à jour :

Premièrement, il y a la gestion interne de la récente et importante frappe de missiles de la Russie il y a quelques jours. Bien que ce soit la semaine dernière, de nouveaux détails émergent encore qui ont brossé un tableau assez intéressant. Nous avons parlé la dernière fois de la façon dont la Russie utilise un nombre croissant de nouveaux types de munitions avancées et guidées. Mais maintenant, nous avons une pléthore de preuves pour cela, ainsi que d’autres informations intéressantes.

Il existe maintenant cinq nouveaux types confirmés de « bombes planées » que la Russie semble utiliser régulièrement en Ukraine.

1. Il y a l’Upab-1500B-E ou K029BE comme désignation de glisse, abandonnée de Su-30/34/35

Sur la gauche, vous pouvez voir la bombe en configuration normale rangée avec ses panneaux ailés rétractés. Sur la droite, c’est quand il tombe et que les « ailes » se déploient. Cette bombe, premièrement, pèse 1500 kg, avec une ogive pénétrant dans le béton de plus de 1000 kg. Il n’est donc pas surprenant que ce soit la région d’Avdeevka où il a été repéré, car c’est là que l’AFU a ses fortifications les plus renforcées, et où la Russie a poussé intensément ces dernières semaines ou deux, comme indiqué dans le dernier rapport.

« Si les troupes ukrainiennes ne reçoivent pas l’ordre de quitter Artemivsk dans un avenir proche, nous couperons la route de Chasov Yar, de sorte que la ville sera dans la position de Marioupol. Des informations sont déjà arrivées selon lesquelles nos forces aéroportées ont utilisé des bombes planantes guidées d’une capacité d’une tonne et demie – UPAB-1500B », a déclaré l’expert. Selon Yuri Knutov, l’utilisation de telles munitions rendra toute résistance inutile. »

Une chose importante doit être abordée : l’AFU a industrialisé une méthode ingénieuse de production très rapide de fortifications renforcées préfabriquées. Ici, un compte d’analyste russe décrit le problème (traduction automatique) :

Ces structures prêtes à l’emploi sont assemblées pour un équipement de fortification rapide sur le terrain. Creusez une fosse, mettez un abri prêt avec un manipulateur, remplissez-le de terre, à un mètre et demi d’en haut. Et 6 combattants sont dans des conditions assez sûres même sous des tirs de 152 mm, qui ne peuvent être touchés qu’avec beaucoup de chance, un peu à côté du coup, et sans problème pour la garnison.

Environ 130 d’entre eux ont déjà été expédiés.

Autant que je sache, de notre côté, on fabrique davantage de structures en bois et en terre, parfois en béton. À cet égard, au cours des 8 années de l’ATO, les Forces armées ukrainiennes ont acquis une bonne expérience en matière de fortification et, surtout, très rapidement créées. À bien des égards, la cabane de chaque forestier devient donc un lieu de batailles acharnées.

C’est un exemple de photo d’un, mais apparemment l’AFU utilise aussi souvent de vieilles voitures de train/métro désaffectées. Ils creusent un trou et y mettent tout le wagon de métro, créant instantanément une pirogue métallique fortifiée qu’ils peuvent maintenant renforcer davantage si nécessaire, comme du béton coulé, etc.

Ainsi, on peut voir le besoin de telles bombes anti-bunker. Et une ogive de 1000 kg est assez puissante pour détruire de telles fortifications souvent sans même avoir à les « percer » complètement.

2. La prochaine bombe qui a été manifestement utilisée est une nouvelle bombe planée Grom-2 (Lightning) (autre désignation : Kh-36/9-A-7759)

Vous pouvez voir les images d’une récupération partielle de la bombe ici : Vidéo

Il s’agit d’une munition d’environ 500 kg destinée aux Su-34 et Mig-35, avec une portée de 50 à 65 km. Il peut même être utilisé pour toucher des cibles derrière le porte-avions :

3. La prochaine bombe est Kab-1500LG (Laser Guided). Bien que celle-ci ne soit pas une bombe planante, elle est néanmoins guidée par laser avec une grande précision. Maintenant que l’AD de l’AFU a été dégradé au point que les Su-34 se sentent parfois confiants pour les laisser tomber à mi-distance, il aurait été au moins utilisé.

Cette bombe a déjà fait ses preuves avec une grande précision en Syrie comme on peut le voir ici :

 

L’image du bas date d’il y a quelque temps, montrant quand il a été testé pour la première fois sous les Su-34. Les images ci-dessus montrent la bombe récupérée il y a quelques jours. Il y a maintenant des rapports selon lesquels au moins 3-4 d’entre eux ont été récupérés, ce qui conduit aux théories de la production de masse. Le seul problème est que certaines d’entre elles ont été récupérées dans des chantiers à l’ouest de Donetsk, ce qui semble signifier que les bombes ont échoué et sont tombées, vraisemblablement lancées par des Su-34 au-dessus de Donetsk pour frapper la région de Marinka/Avdeevka.

Si vous extrapolez – la bombe est tombée dans l’ouest de Donetsk, ce qui signifie qu’elle aurait dû être lancée quelque part plus à l’est de Donetsk, ce qui lui a donné le temps de glisser pour la première fois ou de mal fonctionner/larguer – de l’est de la ville de Donetsk aux positions de l’AFU à Marinka/Avdeevka est d’environ 20 à 30 km, ce qui serait conforme aux capacités potentielles.

Mais que quelques-uns d’entre eux soient tombés du ciel ou non, plusieurs analystes russes de haut niveau considèrent cela comme une évolution très positive – et je suis d’accord. La raison en est que la Russie possède des milliers/dizaines de milliers de ces anciennes bombes soviétiques Fab-500, donc si elle peut créer un système de type JDAM pour les équiper d’ailes et de guidage, elle pourrait avoir un gigantesque inventaire prédéfini de munitions guidées à lober. à volonté avec des coûts très minimes car ces bombes ne valent presque rien à ce stade.

« C’est une nouvelle vraiment très importante, que nous attendons personnellement depuis très longtemps. L’effet de l’utilisation de bombes de haute précision bon marché est déjà tangible dans la direction d’Avdiivka, où elles sont utilisées. » (Intel Slava)

Donc, même si quelques-uns d’entre eux sont tombés, nous ne savons pas combien sont utilisés. Disons qu’ils en ont lancé 50 à 100 jusqu’à présent et que 3 ou 4 ont mal fonctionné – gros problème, cela en vaut toujours la peine. Et en plus de cela, ils peuvent encore expérimenter et peaufiner la conception.

Bien sûr, il y a toujours la bombe planée guidée RBK-500U Drel (« Drill ») que la Russie possède, mais il n’y a pas encore eu de rapports sur son utilisation, bien que nous puissions le voir bientôt car les livraisons devaient commencer en 2022 au forces armées. Cette bombe est la plus avancée du tout et serait parfaite contre la soi-disant offensive blindée de l’Ukraine, car elle est armée de 15-20 sous-munitions à capteur SPBE-K qui surgissent au-dessus de la zone donnée, puis s’auto-ciblent sur tous les ennemis. blindage présent (via radar infrarouge et millimétrique). Une seule bombe peut détruire plus d’une douzaine de chars ennemis s’ils sont regroupés à proximité.

L’autre nouvelle intéressante en matière de missiles/fusées est que la Russie aurait tiré plus de 6 missiles hypersoniques Kinzhal ou plus lors de ses frappes historiques la semaine dernière. Voici une vidéo du porte-parole de l’AFU Yuriy Ignat attestant de ce fait.

Peu de temps après, cependant, des rapports très intéressants ont commencé à apparaître :

Bien sûr, tout cela n’est pas corroboré, mais si vous assemblez les éléments connus et confirmés, cela brosse un tableau intrigant :

• Nous savons que Kinzhal dans le passé n’a été que rarement utilisé contre des cibles (souterraines) très sensibles et fortement renforcées. Voici un article de Reuters du début de la guerre qui rapporte la première utilisation du missile par la Russie contre un dépôt d’armes souterrain. Voici l’une des séquences diffusées à l’époque:
Quoi qu’il en soit, frappez le bâtiment à une vitesse incroyable.

• Nous avons la confirmation complète d’un porte-parole de l’AFU qu’une demi-douzaine de Kinzhals ont en fait été utilisés. Donc, en rassemblant les pièces, nous pouvons en déduire que c’était probablement contre quelque chose de sensible, l’histoire du centre de commandement de l’OTAN commence à avoir au moins une certaine plausibilité.

De plus, une vidéo bizarre a été publiée prétendant montrer un Kinzhal en vol.

 

 

Mais ce qui est le plus intéressant, c’est que cela semble correspondre de très près à une vidéo qui est également apparue l’année dernière précisément après la première utilisation présumée de Kinzhal :

 

 

 

Russes avec attitude@RWApodcast « Kinzhal » est un système de missile hypersonique de pointe et la frappe contre un grand dépôt de munitions souterrain dans l’oblast d’Ivano-Frankivsk semble être sa première utilisation sur le champ de bataille. Kinzhal a une portée opérationnelle allant jusqu’à 3 000 km et peut atteindre des vitesses allant jusqu’à Mach 12.

Donc, soit quelqu’un perpétue un canular vidéo élaboré, soit nous assistons à l’utilisation du même système d’armes.

Mais il y a quelques problèmes. Premièrement, le Kinzhal (« Dagger »), dont beaucoup pensent qu’il est basé sur l’Iskander-M russe (principalement une version modifiée et larguée de celui-ci), serait essentiellement un missile balistique largué, avec une trajectoire balistique associée, qui généralement va comme suit :

Donc, vous ne verriez probablement pas le missile se diriger dans une trajectoire de vol aussi horizontale à basse altitude.

Deuxièmement, et surtout, il n’y a probablement rien sur Terre qui puisse atteindre des vitesses hypersoniques au niveau de la mer ou à proximité de la manière dont ces vidéos semblent le montrer, car l’air est trop dense et provoquerait la fusion / l’effondrement complet de l’objet. Ils n’atteignent l’hypersonique qu’au stade de « combustion », qui dans le cas du Kinzhal est supérieur à 60-80k pieds, où l’atmosphère est très mince.

L’un des seuls regards que nous ayons sur le fonctionnement de l’hypersonique est le vieux missile anti-balistique américain « Sprint » des années 60. Des images le montrent en train de chauffer avec le fameux bouclier à plasma associé à une vitesse hypersonique, qu’il atteint (Mach 10) en 5 secondes.

source : Simplicius the Thinker via Bruno Bertez

"L'Ukraine est la chair à canon de l'Occident"

Le 24 février 2022, Vladimir Poutine décidait d’envahir l’Ukraine. A-t-il participé à créer la nation ukrainienne?

Ses buts de guerre, la denazification et la démilitarisation, étaient-ils tous réellement infondés ? En quoi la Grande guerre patriotique est-elle constitutive de l’identité russe et ukrainienne ? Livre noir a posé ces questions à Laurent Henninger, historien militaire. Il est notamment l’auteur de « Comprendre la guerre ».

 

Source : Le Livre noir.

Pourquoi les Russes laissent entrouvert le chaudron de Bakhmout

Source : Le Courrier des Stratèges - par Edouard Husson - Le 10/03/2023.

Pourquoi les Russes laissent entrouvert le chaudron de Bakhmout – par Alexandre N

Tétanisés par la perspective d’une défaite de l’Ukraine, les Américains ne veulent pas lâcher le morceau. Une véritable fuite en avant caractérise la stratégie américano-ukrainienne. Voilà pourquoi l’armée russe n’est pas pressée. Plus la guerre dure, plus elle use l’adversaire et détruit le matériel occidental.

 

Verdammt ! Malédiction! : la grande offensive russe, cet événement majeur de l’hiver attendu par tout ce qui compte en Occident, n’a finalement pas eu lieu! Depuis, certains l’appellent ironiquement l’offensive Schrödinger (du nom du célèbre physicien qui a expliqué qu’à l’état quantique une réalité peut être dans divers états en même temps) … Privé de son fantasme, l’Occident se rassure alors en l’interprétant comme l’incapacité russe aux opérations de grande envergure, « Toria »Nuland, dite Mme « F**ck » the UE » allant jusqu’à prétendre que l’offensive en question aurait vraiment eu lieu, mais avec si peu de moyens qu’on ne l’a même pas vue ! 

Même sans grande offensive russe l’armée ukrainienne recule

Mais en même temps ( quelle belle expression ), même sans offensive d’hiver russe l’armée ukrainienne n’en recule pas moins lentement mais sûrement. Le désappointement tourne alors au psychodrame,  se focalisant en particulier sur le fait d’évacuer ou d’abandonner Artiomovks ( ou Bakhmout, c’est selon c’est pareil ). Moyennant quoi, ceci permet de décortiquer le processus  décisionnel « ukrainien », ce qui reste le meilleur moyen de le vaincre !

Tout d’abord, il faut se poser la question de savoir qui commande vraiment dans cette guerre du coté occidental ? Le Pentagone bien sûr, malgré sa guéguerre systémique avec la CIA et le Département d’État ( ie Nuland ), tout simplement parce qu’il en détient les cartes maîtresses comme l’appui renseignement électronique, vital aux forces  ukrainiennes pour savoir où sont les Russes. 

Pour rappel également, Bakhmout est la clé effective de la troisième – et avant dernière – des lignes du dispositif défensif  ukrainien péniblement édifié depuis huit ans, en s’appuyant d’ailleurs sur les vieilles tranchées allemandes de 1944 face à l’Opération Bagration !

Le Pentagone est donc supposé compétent pour prendre la décision sur Bakhmout. Toutefois, il   n’est fondamentalement qu’une bureaucratie boursouflée et outrageusement mangeuse de la moitié du budget mondial de la défense en même temps qu’il est une formidable machine à perdre militairement les guerres, depuis 1950 au moins et au prix d’indescriptibles destructions. Encore dernièrement, le commandement de la 1° armée woke du monde s’est déclaré  effrayé en découvrant la présence de sous-marins russes sur sa façade atlantique. On comprend donc que s’il doit vraiment trancher, il ne le fera que dans le sens du vent, c’est à dire celui des fous aussi bellicistes (parce) que corrompus de Washington.

Qui commande l’armée ukrainienne ?

La branche ukrainienne de ce commandement est bicéphale.

Il y a tout  d’abord le patron de l’armée, Zaloujni, un véritable professionnel apparemment, et qui par conséquent ne peut qu’être  économe de la vie de ses soldats en matière de sacrifice inutile. Toutefois, il œuvre dans des conditions troubles et malsaines entre sa dépendance aux Etats-Unis et un président de pacotille et qui n’est de fait que leur marionnette. Faut-il alors donner foi à ce « bruit de ch… » qui veut que les US maintiendraient Zaloujni comme joker le jour où ils décideront de lâcher Zelenski ?

Il y a ensuite le président lui-même,Zelenski, une créature d’un oligarque ukrainien bien connu, Igor Kolomoïski. En son temps homme de spectacle provocateur, Zelenski est le moins prédestiné à remplir sa fonction de chef de guerre  – ceux qui le prennent pour un Churchill feraient mieux de faire des films pour salle vides – , sauf pour faire  des tournées médiatiques mondiales tapageuses pour lever des fonds et des armes. 

Élu sur l’argument de la paix, il a depuis tourné casaque mais peut-être pas de son propre chef, pour devenir plutôt le belliciste en chef. Cette ambivalence révélatrice se retrouve dans le cas de Bakhmout où un jour il déclare qu’il faut évacuer cette ville « sans intérêt stratégique », et le  lendemain exige qu’on la tienne. Peut-être l’individu a-t-il aussi lassé les Américains depuis qu’il leur a réclamé leurs fils et leurs filles pour aller ce battre en Ukraine.

À la base homme de spectacle provocateur et par conséquent manipulateur et habitué à vivre dans une réalité parallèle, il ne peut que pleinement se retrouver dans cette réalité de substitution américaine, faite de pensée magique et d’arrogance suprématiste. Il se retrouve en même temps le responsable politique le plus exposé dans cette guerre qui tourne mal, ce qui nécessairement l’amène à se poser la question de sa survie. Si on combine ça avec sa méconnaissance militaire, la seule stratégie qui lui est accessible, comme pour Biden, est celle de Gribouille, qui consiste à se jeter dans l’étang pour échapper à l’orage. Il ne peut donc qu’en surajouter dans le bellicisme, espérant certainement en retirer au final une image d’invincibilité. N’oublions jamais à cet égard que la poudre blanche n’est pas très loin …  

La lenteur de l’opération russe est calculée

Tout cela, les Russes l’intègrent dans leur propre stratégie simplement parce que c’est le jeu normal, alors que pour sa part le Pentagone ne sait pas décider en situation trop risquée comme on l’a vu dans l’humiliante évacuation de Kaboul, de Saïgon et d’ailleurs. Tout cela finira donc avec des  hélicoptères évacuateurs US au dessus de Kiev, c’est inéluctable.

En attendant, la lenteur de l’opération russe n’est que calculée de même qu’imposée par des restructurations elles  même issues des leçons apprises. Ce que semble cependant indiquer  Bakhmout de leur point de vue est l’abandon – au moins temporaire – de la  tactique du « kessel » ( chaudron ») si durement apprise des Allemands en son temps. Ce qui ne peut que signifier une meilleure adaptation, au titre des leçons apprises toujours, de leur tactiques aux buts immédiats de leur stratégie. L’autre explication de cette lenteur apparente – car pourquoi la guerre serait-elle par nature rapide ?- est que l’Ukraine ne constitue pas l’objet de leur effet final recherché, mais seulement un point de passage qu’on leur a imposé?

Au vu de la réaction occidentale en général, un mélange d’hystérie et d’irrationalité, ils estiment désormais plus utile, dès qu’ils parviennent à créer un piège à rat comme à Bakhmout,  non pas de le résorber par des combats longs et coûteux, mais au contraire d’y maintenir une vraie porte de sortie, qui est aussi un faux espoir, où viennent alors s’accumuler pour y être plus rapidement détruites toutes les ressources critiques occidentales. On note ainsi la présence de Léopards dans les environs de Bakhmout . C’est bien plus efficace mais là encore ce ne peut être que lent.  

Se préparer à une offensive américaine de printemps

Un autre élément de l’équation est ce que rapporte en particulier Big Serge ( un analyste qui n’a rien à voir avec nos galonnés de plateau )  : « Sans aucun doute, le groupe, qui est actuellement en cours de formation et de coordination de combat dans les zones arrière de l’Ukraine et sur les terrains d’entraînement des pays occidentaux, va être puissant. Cela représente au moins un tiers de l’ensemble du groupement terrestre dont disposent les Forces armées ukrainiennes – soit  de 140 à 160 000 personnes, 400 chars,  350 canons, 100 MLRS, etc … pourvus a priori des munitions,  pièces de rechange, carburant et lubrifiants en quantité suffisante ». Ce dont il parle est bien la perspective d’une offensive à l’américaine en cours préparation, pour le printemps peut-être. Forcément, les Russes s’y préparent aussi, et entre autres par l’attrition systématique de l’armée ukrainienne pour lui ôter toute capacité de reprendre l’initiative opérationnelle, ainsi qu’en  « façonnant » le terrain en vue de leurs prochaines...

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Fin de partie pour l’Ukraine : Amérique contre Amérique


Bill Burns s’est déplacé (en secret) à la mi-janvier pour rencontrer Zelensky. Était-ce pour préparer Zelensky à un changement de position de la part des Américains ?


Par Alastair Crooke – Le 13 février 2023 – Source Strategic Culture

L’hystérie suscitée par le ballon chinois survolant les États-Unis – poussée à son paroxysme, par l’envoi d’un avion Raptor (F-22) pour le faire « éclater » , puis par la célébration de cet « éclatement » comme la toute première « destruction air-air » d’un Raptor, est peut-être une source de raillerie discrète dans le monde entier, mais, paradoxalement, cet événement apparemment insignifiant peut contrarier le calendrier de guerre des États-Unis en Ukraine.

En effet, c’est le calendrier politique américain qui pourrait bien déterminer la suite des événements en Ukraine – du côté occidental.

 

Apparemment, rien d’important ne s’est produit – c’était un instant de frénésie d’espionnage, laissant la « tâche difficile » de Biden inchangée : il doit convaincre l’électeur américain, confronté à l’effondrement de son niveau de vie, qu’il a mal interprété les « runes » ; qu’au lieu d’être sombre, l’économie, contrairement à son expérience vécue, « fonctionne bien pour lui » .

Biden doit opérer cette magie alors que les sondages indiquent que seuls 16 % des Américains se sentent mieux depuis le début de son mandat et que 75 % des Démocrates et des électeurs de tendance Démocrate souhaitent qu’il ne se présente pas en 2024. Il est significatif que ce message provienne aujourd’hui des médias de tendance Démocrate, suggérant que l’idée de le remplacer circule déjà.

Pour l’instant, les alliés de Biden au sein de l’establishment du parti (le DNC) continuent à soutenir sa candidature en reportant les primaires initiales (dans lesquelles on pourrait s’attendre à ce que Biden soit battu) pour une élection primaire ultérieure en Caroline du Sud, où les électeurs noirs et latinos refléteraient les données démographiques qui permettraient à Biden (éventuellement) de briller. Cela pourrait marcher, mais pas forcément.

Pour faire simple, c’est avec un parti très sceptique que Biden devra changer la perception qu’ont les Américains de l’économie à un moment où de nombreux indicateurs signalent une nouvelle détérioration. Il s’agira d’une « lourde tâche » . L’équipe économique insistera certainement : « Restons concentrés sur les réalisations économiques ! Nous ne voulons pas être distraits par les débâcles de la politique étrangère ; nous ne voulons pas que les débats télévisés soient centrés sur les ballons ou sur les chars Abrams : « C’est de l’économie, idiot ! » .

Le « ballon chinois » a été brisé, certes, mais l’espoir de l’équipe Biden de négocier un accord limité avec un président Xi grincheux, afin d’éviter que les tensions avec la Chine ne deviennent un élément perturbateur dans les débats des primaires, a également été brisé. L’incident du ballon a obligé les États-Unis à annuler le rendez-vous de Blinken avec Xi (même si une telle rencontre avec le chef d’État aurait été un événement rare).

La puissante faction des « faucons de la Chine » aux États-Unis était aux anges. Par inadvertance et en un instant, le « meurtre » du ballon chinois a élevé la Chine au rang de « menace principale ». C’était l’occasion pour ces faucons de faire « pivoter » la politique étrangère de l’Ukraine et de la Russie pour se concentrer pleinement sur la Chine.

Ils font valoir que l’Ukraine « mangeait » une trop grande partie des stocks d’armes américains. Cela laisse l’Amérique vulnérable ; déjà, il faudra des années aux États-Unis pour compenser cette perte d’équipement en rétablissant les lignes d’approvisionnement en armes. Et il n’y a « pas de temps à perdre » . La « barrière de dissuasion » militaire autour de la Chine doit être mise en place au plus vite.

Naturellement, le cercle étroit de néoconservateurs entourant Biden – dont certains ont investi dans le projet « Détruire la Russie » pendant des décennies – n’est pas prêt à « lâcher » le projet ukrainien pour la Chine.

Pourtant, la « bulle » narrative de l’Ukraine a été percée et perd de l’hélium depuis un certain temps. Le Beltway – et même le récit des médias – a fait une pirouette, passant de « la Russie est perdante » à « la défaite ukrainienne est inévitable » . En effet, Kiev est vaincu et ne tient qu’à un fil.

Olexii Arestovich, conseiller principal de Zelensky et ancien « spin doctor » du bureau présidentiel, s’exprimant fin janvier de cette année, a été franc dans son évaluation :

Si tout le monde pense que nous sommes assurés de gagner la guerre, cette perspective est très peu probable. Depuis le 14 janvier, il n’en est plus ainsi. Que croyez-vous ? Le président polonais, M. Duda, a dit que non seulement les mois à venir seraient décisifs mais également que l’on ne sait pas si l’Ukraine va survivre…

 

La guerre pourrait ne pas se terminer comme l’espèrent les Ukrainiens, et par conséquent, l’Ukraine pourrait ne pas récupérer tous ses territoires, et l’Occident est prêt à suivre un tel scénario … Qu’arrivera-t-il à la société qui a placé ses attentes trop haut, mais qui obtiendra un Minsk-3 sous conditions ? Ce recul des attentes non satisfaites nous frappera si fort, moralement et pour tout le reste, que nous serons tout simplement abasourdis.

 

L’issue de cette guerre n’est peut-être pas du tout ce qu’elle nous semblait il y a trois mois, après le succès de l’opération de Kherson. Et ce, non pas parce que les Américains sournois ne donnent pas d’armes ou de délai, mais parce que le succès nécessite 400 000 soldats parfaitement entraînés et équipés d’armes de l’OTAN pour broyer tout cela et libérer les territoires. Les avons-nous ? Non. Les aurons-nous l’année prochaine ? Non. Il n’y aura pas assez de structures d’entraînement…

 

En tant que société, nous ne sommes pas prêts pour un tel résultat. J’ai jugé bon de dire que c’est ce qu’attend la partie russe. Mais le plus désagréable, c’est qu’à l’Ouest, ils pensent de la même manière, et nous sommes totalement dépendants d’eux. Que devrait faire l’Occident ? Le scénario de deux Corées. Créer une Corée du Sud avec des garanties », a déclaré M. Arestovich, ajoutant qu’avec cette option, l’Ukraine pouvait obtenir de nombreux bonus.

En clair, si Biden veut éviter une répétition de l’humiliante débâcle afghane, l’Amérique doit de toute urgence passer à autre chose avant que le calendrier présidentiel de 2024 ne démarre cet été – l’Ukraine/Russie aspirant tout l’oxygène des débats économiques à venir.

Mais ce n’est pas ce qui se passe. Victoria Nuland – qui a été « capo » à Kiev pendant une décennie – supervise une purge : les personnes peu fiables sont « sorties » , et on fait « rentrer » les faucons ukrainiens radicaux pro-américains. Il s’agit d’une refonte de la mafia de Kiev qui laisse Zelensky sans amis et entièrement dépendant de Washington. Il semble que les États-Unis se préparent à tenter une double opération en Ukraine.

L’article détaillé de Seymour Hersh sur la toile de fond du sabotage du gazoduc Nordstream par les États-Unis, sur lequel Hersh a travaillé pendant de nombreux mois (bien que ses affirmations aient été démenties par la Maison Blanche), nous apprend quelque chose de très significatif.

Tous les néoconservateurs anti-russes habituels (Nuland, Sullivan et Blinken) ont participé au sabotage du Nordstream, mais l’impulsion est venue de Biden. Il l’a mené. Et pour être clair, Biden est tout aussi investi émotionnellement en Ukraine que ses coéquipiers ; il est probable qu’il ne puisse pas non plus « lâcher prise » en Ukraine.

MAIS doubler la mise maintenant, en Ukraine, ne fonctionnera pas pour Biden. Ce serait très imprudent (même si le complot Nordstream n’était rien moins qu’imprudent).

Le fait de redoubler d’efforts n’apportera pas la « victoire » espérée, car sa logique est fondée sur une analyse erronée flagrante.

Olexii Arestovich, l’ancien « spin doctor » et conseiller de Zelensky, a décrit les circonstances de la première entrée de l’OMS russe en Ukraine : Elle était conçue comme une mission sans effusion de sang et aurait dû se dérouler sans pertes, dit-il. « Ils ont essayé de mener une guerre intelligente… Une opération spéciale aussi élégante, aussi belle, aussi rapide que l’éclair, où des gens polis, sans causer le moindre dommage ni à un chaton ni à un enfant, élimineraient les quelques personnes qui résisteraient. Ils ne voulaient tuer personne : il suffisait de signer la renonciation » .

Le problème ici est que ce qui s’est produit est une erreur de calcul politique de la part de Moscou et non un échec militaire. L’objectif initial de l’OMS n’a pas fonctionné. Aucune négociation n’a eu lieu. Pourtant, deux conséquences majeures en ont découlé : les contrôleurs de l’OTAN se sont jetés sur cette erreur d’interprétation pour mettre en avant leur idée préconçue selon laquelle la Russie était militairement faible, arriérée et chancelante. Cette interprétation erronée sous-tendait la façon dont l’OTAN pensait que la Russie allait poursuivre la guerre.

Elle était totalement erronée. La Russie est forte et domine sur le plan militaire.

Toutefois, sur la base de cette présomption de faiblesse, l’OTAN a modifié ses plans, passant d’une guérilla insurrectionnelle à une guerre conventionnelle le long des « lignes de défense Zelensky » , ouvrant ainsi la voie à la domination de l’artillerie russe pour épuiser les forces ukrainiennes jusqu’à l’entropie. C’est une erreur qui ne peut être rectifiée. Et essayer de le faire pourrait conduire à la troisième guerre mondiale.

Le char Abrams M1 ne sauvera pas Biden de la débâcle à l’approche des débats électoraux américains :

Il a été conçu pour le genre de combat char contre char qui n’ont plus lieu depuis la Seconde Guerre mondiale. C’est énorme, cher, bourré d’électronique. Et alimenté par un moteur à réaction reconverti. Il tombe rapidement en panne et a besoin de sa propre armée de mécaniciens, il tombe rapidement en panne d’essence et, avec ses presque 70 tonnes, il est trop lourd pour traverser la plupart des ponts et a besoin d’un équipement spécialisé pour traverser les ponts. Et il s’enfonce dans la boue. Les Saoudiens ont utilisé des chars Abrams au Yémen – et en ont perdu 20 face aux Houthis, pourtant pas la force militaire la plus sophistiquée.

Alors, comment tout cela se passe-t-il ? Eh bien, le combat est lancé à Washington. Les faucons de la Chine vont essayer de ramener toute l’attention des États-Unis sur la Chine. Les néo-conservateurs de Biden pourraient tenter une tactique d’escalade en Ukraine qui rendrait la guerre avec la Russie impossible à arrêter.

Cependant, la réalité est que le « ballon » de l’Ukraine est crevé. Les milieux militaires et civils de Washington le savent. L’« éléphant dans la pièce » de l’inévitable succès russe est reconnu (bien qu’avec la contrainte d’éviter de paraître « défaitiste » qui persiste dans certains milieux). Ils savent aussi que le « ballon » de l’OTAN (en tant que « force formidable ») a éclaté. Ils savent que le ballon de la capacité industrielle occidentale à fabriquer des armes en quantité suffisante et sur une longue durée a également éclaté.

Les conséquences sont le risque d’une grave atteinte à la réputation des États-Unis, à mesure que la guerre se prolonge. Ces milieux ne veulent pas de cela. Peut-être concluront-ils que Biden n’est pas l’homme capable de sortir les États-Unis de cette impasse, qu’il fait partie du problème et non de la solution. Si tel est le cas, il devra partir à temps pour permettre aux Démocrates de trouver qui ils veulent pour les conduire à l’élection présidentielle de 2024 (ce qui n’est pas une mince affaire).

Ils peuvent également sentir que les lignes de la campagne de 2024 se dessinent déjà pour le parti Républicain qui a sa propre lecture de la débâcle ukrainienne – « Sortons de l’Ukraine pour affronter la Chine » (avec un soutien bipartisan total). Cela signifie tout d’abord que le soutien financier des États-Unis à l’Ukraine – comme Bill Burns (chef de la CIA) l’aurait dit à Zelensky lors de sa dernière visite – va probablement s’amenuiser cet été. Et deuxièmement, cela laisse entendre que tout soutien bipartisan en faveur d’un armement supplémentaire de Kiev pourrait prendre fin au moment où la saison des primaires battra son plein.

Bill Burns a voyagé (en secret) à la mi-janvier pour rencontrer Zelensky. S’agissait-il de préparer Zelensky à un changement de position de la part des Américains ? Burns, le discret négociateur américain de longue date, n’est pas partie prenante du programme de Nuland. Début février, il a déclaré à l’université de Georgetown que « la Chine reste le plus grand défi géopolitique auquel les États-Unis seront confrontés dans les décennies à venir, et la plus grande priorité pour la CIA » . Ce cadrage, « n’était pas un bug, mais la substance » de son discours.

Nuland est peut-être en train de placer des faucons alignés sur les États-Unis autour de Zelensky afin de poursuivre la guerre, mais il existe d’autres intérêts plus larges au sein de Washington. Les milieux financiers s’inquiètent d’un effondrement du marché qui pourrait entraîner une hémorragie du dollar. Ils craignent également que la guerre en Ukraine ne contribue à affaiblir sérieusement la position de l’Amérique dans le monde. Et l’on craint qu’une Team Biden imprudente ne perde le contrôle et n’entraîne les États-Unis dans une guerre plus large contre la Russie.

En tout état de cause, le temps presse. Le calendrier électoral se profile. Biden sera-t-il le candidat Démocrate ? La question de savoir s’il sera ou non candidat en 2024 doit être résolue avant les primaires anticipées afin de permettre à tout successeur de faire ses preuves en temps utile.

Alastair Crooke

Traduit par Zineb, relu par Wayan, pour le Saker Francophone

Guerre d’Ukraine – J-377 –

Au fait, où est passée la « grande offensive russe »?

Source : Le Courrier des Strartèges - Par Edourd Husson - Le 07/03/2023.

La grande offensive russe annoncée par….les Occidentaux n’a pas eu lieu. Cela n’empêche pas l’armée russe d’avancer, à Bakhmout ou ailleurs. En réalité, il faut comprendre le moment dans lequel on se trouve: L’obstination occidentale à prolonger le conflit transforme celui-ci en une bataille de grande envergure. Découvrez pourquoi les Occidentaux et les Russes sont confrontés au même défi : Faire une guerre d’envergure après trente ans de paix relative. Et les Russes sont en avance en matière d’adaptation.

Soldats ukrainiens faits prisonniers à Bakhmout/Artiomovsk

Alors que nous entamons la chronique de la deuxième année de guerre, je me permettrai aujourd’hui d’être bref sur le détail des opérations militaires. Si vous êtes devenus comme moi un lecteur assidu du fil twitter @JacquesFrre2 « vous suivez au jour le jour la manière dont l’étau se resserre sur Bakhmout/Artiomovsk:

 

 

 

 

On pourra utilement utilement regarder la progression de la bataille depuis neuf mois:

 

 

On en parle peu mais la bataille de Marinka, aussi, fait rage:

 

 

Pourquoi la « grande offensive russe » n’a pas eu lieu – pour l’instant

Je voudrais recommander ici à nos lecteurs la lecture de la dernière analyse approfondie de Big Serge : malgré les apparences, je ne cite qu’une petite partie du texte. Big Serge, que nous avons déjà cité plusieurs fois, explique que l’armée russe fait face à des problèmes d’organisation, plus précisément d’articulation entre armée de métier et armée de conscrits. Cet article devrait être lu et médité par l’Etat-major français, où l’on parle avec condescendance de l’armée russe; alors que cette dernière est en train de résoudre le défi de la reconstruction d’une armée pour une bataille de haute intensité au sol – après trente ans de paix. Les armées de l’OTAN – y compris l’armée américaine – sont très en retard de ce point de vue. Elles ne savent qu’utiliser les Ukrainiens comme une armée de supplétifs.

Où en est l’armée russe?

À l’heure actuelle, la Russie a l’initiative sur l’ensemble du front. Les réserves de l’Ukraine sont actuellement dans un état précaire (en particulier compte tenu de leur mandat politiquement imposé d’essayer d’accumuler une force pour une offensive contre le pont terrestre vers la Crimée), et la Russie mène des combats de haute intensité dans des secteurs importants en ce moment même.

Je dirais que ces opérations servent trois objectifs différents à la fois. Tout d’abord, il s’agit d’opérations de formation précieuses qui ont des implications importantes pour le lancement d’opérations futures. Deuxièmement, elles fonctionnent essentiellement comme des attaques de destruction en ce sens qu’elles maintiennent le taux de combustion au front à un niveau élevé et qu’elles dégradent la capacité de l’Ukraine à former des réserves. En guise de métaphore, des rumeurs circulent déjà selon lesquelles certains des nouveaux chars Leopard ukrainiens seront envoyés au combat autour de Bakhmut au lieu d’être gardés en réserve en vue d’une future offensive. Que la rumeur concernant les Leopard soit vraie ou non, en termes d’effectifs, l’Ukraine continue à envoyer des unités à Bakhmut, ce qui constitue un gaspillage inadmissible d’hommes. Enfin, tous les combats à l’est se déroulent sous un parapluie où les lignes de ravitaillement et l’ISR de la Russie sont robustes, ce qui crée des conditions dans lesquelles l’Ukraine continue d’opérer avec des ratios de pertes abyssaux.

La synthèse de tous ces points est que la Russie mène actuellement l’attrition de l’armée ukrainienne et prive l’Ukraine de toute chance de reprendre l’initiative opérationnelle, tout en poursuivant d’importants objectifs de mise en forme. Je pense que cela se produit dans un contexte de désordre organisationnel et de restructuration modérés, mais pas catastrophiques, au sein des forces armées russes, qui retardent leur préparation au lancement d’une offensive de grande envergure. En d’autres termes, le rythme actuel des opérations russes soutient l’attrition globale des effectifs ukrainiens et implique qu’il n’est pas nécessaire de précipiter une opération ambitieuse tant que les problèmes organisationnels n’ont pas été réglés.

Pour les jeunes hommes, la fascination pour la guerre passe par des phases distinctes. La plupart du temps, elle commence par l’équipement et les vues générales des batailles. La taille des canons des chars de combat de la Seconde Guerre mondiale, par exemple, est probablement un fait connu de manière disproportionnée par les garçons de 8 à 16 ans. Ils veulent surtout connaître les grandes batailles, les grands mouvements et les gros canons.

Avec le temps, cependant, la conclusion inéluctable s’impose que les armées ont une ossature intensément bureaucratique et que des facteurs apparemment banals comme la composition des unités, la logistique de la zone arrière et les organigrammes ont des implications considérables sur le champ de bataille. C’est là que les redoutables tableaux d’ordre de bataille et diagrammes d’unités entrent en jeu, et vous devez inévitablement commencer à mémoriser la signification de la myriade de petits symboles. On finit par se rendre compte que la construction des unités et d’autres facteurs organisationnels sont, dans la limite du raisonnable, bien plus importants que les détails de l’équipement et de l’armement, que l’on aurait dû se pencher sur les aspects bureaucratiques pendant tout ce temps et que (tragiquement) la taille du canon du char Sherman Firefly n’a pas été un facteur particulièrement décisif dans l’histoire du monde.

La Russie fait face à des problèmes d’articulation entre armée de métier et armée de conscrits

La Russie s’efforce actuellement de résoudre les problèmes organisationnels engendrés par le modèle unique de service mixte du pays (qui mélange des soldats sous contrat et des conscrits), et en particulier le fastidieux groupe tactique de bataillon (GTB).

J’ai longuement parlé du groupe tactique de bataillon dans un article précédent, mais récapitulons brièvement. L’armée russe utilise un modèle mixte de soldats professionnels sous contrat et de conscrits, et ces deux types de personnel présentent une différence juridique importante. Les conscrits ne peuvent être déployés au combat en dehors de la Russie sans une déclaration de guerre. Cela signifie qu’une unité russe donnée (prenons une brigade comme exemple standard) a un effectif complet (« papier ») composé de personnel mixte, et un noyau de soldats contractuels qui peut être déployé à l’étranger. La question qui se pose aux dirigeants russes est donc de savoir comment concevoir ces unités pour qu’elles puissent combattre sans leurs conscrits. La réponse à ce problème a été le groupe tactique de bataillon, qui est une formation dérivée (si l’on peut dire) de la brigade. La conception de ces unités a bien sûr d’autres considérations, mais la préoccupation fondamentale à l’origine de la création du BTG était la nécessité de créer une force capable de se battre sans ses conscrits.

Le BTG, comme on l’a noté, est doté d’une forte puissance de feu, avec un solide complément organique de tubes d’artillerie et de véhicules blindés, mais il est exceptionnellement léger en termes d’infanterie. Cela a des implications pour les opérations offensives et défensives, comme nous l’avons vu très clairement au cours des neuf premiers mois de la guerre en Ukraine.

Sur le plan défensif, le BTG (pauvre en infanterie) doit se battre derrière un mince écran et infliger des défaites à l’ennemi grâce à ses tirs à distance. Ce n’est pas une unité qui peut se battre avec acharnement pour tenir des positions avancées ; elle est conçue pour réduire l’attaquant en bouillie. Plus généralement, les BTG sont des unités fragiles, ce qui signifie que des pertes relativement faibles en infanterie ou en chars les rendent inaptes à poursuivre le combat. Cela fait de l’unité une sorte de canon de verre – capable de déployer une énorme puissance de feu, mais pas de soutenir des opérations après des pertes modérées. En tant qu’unité fondamentalement « réduite », elle s’efforce de maintenir et de recouvrer sa capacité de combat sans se tourner vers l’arrière pour recevoir des remplacements ou cannibaliser d’autres unités.

D’une certaine manière, c’est ce à quoi l’on pouvait s’attendre compte tenu des contraintes du modèle de conscription sous contrat, qui, de par sa nature même, obligeait les Russes à concevoir une filiale dépouillée et à faible effectif par rapport à leurs brigades à effectif complet. C’est pourquoi la Russie souffrait d’une pénurie générale de main-d’œuvre qui a commencé à compromettre son efficacité opérationnelle globale au cours de l’été 2022, lorsque la mobilisation ukrainienne et l’aide occidentale se sont traduites par un énorme avantage numérique pour l’UA. À son apogée, la première phase de la guerre n’a probablement pas vu plus de 80 000 combattants russes réguliers en Ukraine, et même si la DNR, la LNR et Wagner fournissaient une infanterie tampon, la force russe totale était en infériorité numérique d’au moins 3 à 1. Le BTG pouvait encore infliger d’énormes dégâts, mais la constitution de la force en Ukraine était tout simplement insuffisante pour l’étendue du théâtre, ce qui entraînait la destruction d’une grande partie du front à Kharkov. D’où la mobilisation.

Le groupe tactique du bataillon s’est avéré être une unité puissante mais fragile
C’est ici que les signes de problèmes organisationnels commencent à apparaître. Le moment était venu, avec la mobilisation donnant enfin à la Russie la main-d’œuvre déployable dont elle avait besoin, de s’éloigner des BTG pauvres en infanterie et de commencer à mener des opérations avec de grandes unités, mais il est clair que le processus organisationnel pour incorporer le personnel mobilisé dans l’armée et assembler de grandes unités (brigades et plus) n’a pas été efficace. Les mobilisés semblent avoir été initialement utilisés de diverses manières. Certains ont été envoyés dans des unités existantes dans la zone d’opérations en tant que remplaçants, d’autres ont été placés dans de nouvelles unités composées uniquement de personnel mobilisé. Il en résulte un ensemble d’unités hétéroclites qui n’ont pas encore été organisées en grandes unités pour des opérations offensives.

Il fallait probablement s’attendre à un certain chaos, étant donné que personne en vie n’a l’expérience de la mobilisation générale pour une guerre continentale, et que l’ensemble du processus pour la Russie est un peu obscur en raison des nombreuses catégories différentes de personnel et de l’obstacle juridique à l’utilisation des conscrits. D’une manière générale, cependant, il semble clair que le processus de pivotement de l’armée expéditionnaire BTG dépouillée vers des formations parentales plus importantes a été inefficace, et la Russie est toujours en train de former de grandes unités. En outre, un certain retard subsiste dans la livraison de véhicules de combat d’infanterie modernisés (notamment des BMP) aux unités de fusiliers motorisés en cours de formation.

Dans ce contexte, le ministre russe de la Défense, Sergei Shoygu, a annoncé un nouveau programme de réorganisation militaire. L’élément le plus important de la liste des changements est sans doute la décision de commencer à convertir les brigades existantes en divisions. Cela peut sembler une vanité bureaucratique, mais ce n’est pas le cas. Voyons cela de plus près.

À la fin de la guerre froide, l’Union soviétique disposait de l’armée la plus grande et la plus puissante du monde, capable d’aligner des millions d’hommes, armés jusqu’aux dents et disposant d’un stock inégalé d’équipements lourds de toutes sortes. Le fait que ce puissant appareil militaire n’ait pratiquement pas connu de mutineries ou d’effondrements à la fin et qu’il n’ait pourtant pas été déployé pour préserver le système communiste est l’une des grandes curiosités de l’histoire moderne, mais c’est une histoire pour une autre fois.

Quoi qu’il en soit, au lendemain de l’effondrement de l’Union soviétique, la Russie a hérité de l’essentiel de l’héritage militaire soviétique, mais dans un contexte de crise économique et de détresse sociale générale, elle ne pouvait guère se permettre de maintenir cette force massive en activité (et elle n’avait pas non plus les hommes nécessaires, ayant perdu l’accès à une grande partie du réservoir de main-d’œuvre soviétique). Moscou a donc converti une grande partie de l’armée soviétique en ce que l’on appelle des « formations de cadres » – essentiellement, une division particulière était réduite à un personnel squelettique (quelques centaines de personnes seulement, essentiellement des officiers et des sous-officiers) qui constituait le noyau autour duquel la division était ramenée à une force de combat. Ainsi, ces énormes divisions soviétiques pourraient être réduites à des entrepôts remplis d’équipements et à un petit groupe de cadres, mettant plus ou moins la division en hibernation pour une utilisation future.

En 2008, la Russie a entrepris une restructuration militaire majeure sous la direction de l’ancien ministre de la défense Anatoly Serdyukov. Les réformes de 2008 constituaient une tentative tardive d’abandon de l’armée soviétique. Les éléments de la réorganisation comprenaient l’élimination des divisions de cadres et la conversion de toutes les divisions existantes en brigades. La Russie s’éloignait ainsi de la structure divisionnaire soviétique pour adopter un modèle de brigade plus occidental.

L’élimination des formations de cadres et la transformation des divisions en brigades ont eu pour double effet d’alléger un corps d’officiers pléthorique et de créer une force plus rationnelle. Si quelques divisions ont été conservées, elles constituent l’exception plutôt que la règle. En général, une brigade russe représente environ 40 à 50 % de la taille d’une division de type équivalent – par exemple, une division de fusiliers motorisés peut compter 8 500 hommes, mais une brigade de fusiliers motorisés peut compter environ 3 500 à 4 000 hommes.

Le passage de la Russie de la division à la brigade a été bénéfique en temps de paix – il a permis de réduire le coût d’un corps d’officiers pléthorique et de soutenir le régime d’austérité de la Russie. Toutefois, les armées sont en fin de compte construites pour la guerre.

Les dirigeants russes ont clairement conclu que l’armée dépouillée et à faible effectif n’est pas adaptée à une guerre de haute intensité. Cela correspond à la leçon générale apprise par toutes les parties concernées : la guerre reste une entreprise industrielle et le succès exige une masse – de grandes unités tirant beaucoup d’obus. Ainsi, l’admission par l’OTAN que les dépenses en munitions dépassent largement leur capacité de production et la décision de la Russie d’étendre son armée sont les deux faces d’une même médaille.

L’annonce par Shoigu du retour à l’organisations en divisions:
Cela nous ramène à l’annonce de Shoigu selon laquelle les brigades existantes seront reconverties en divisions, ce qui revient à annuler un élément clé des réformes de 2008. L’expérience de la Russie en Ukraine a montré que les unités réduites ne sont tout simplement pas assez robustes (en particulier en termes d’effectifs) pour se maintenir de manière adéquate au combat.

L’image qui se dégage est celle d’une armée russe qui tente de gérer trois transitions différentes à la fois. À savoir : (1) l’accueil d’un grand nombre de personnes mobilisées qui doivent être organisées en grandes unités capables de mener des opérations offensives, (2) une expansion globale et une réorganisation de l’armée en une structure divisionnaire, et (3) une expansion massive de la production d’armements, le complexe militaro-industriel russe se rééquipant pour produire un mélange de systèmes basé sur l’expérience du combat en Ukraine.

Il semble que le verdict le plus probable soit qu’à ce stade, ces défis organisationnels ne soient pas entièrement résolus, limitant l’activité russe immédiate à des opérations de façonnage et au maintien de fosses de la mort attritionnelles (comme Bakhmut) sous la protection du parapluie ISR et des incendies de la Russie dans l’est. Cela se poursuivra jusqu’à ce que les unités régulières de fusiliers motorisés et de chars soient prêtes pour les opérations d’attaque.

C’est pourquoi, à l’heure actuelle, la plupart des tâches offensives de la Russie sont assurées par des unités situées aux deux extrémités de l’échelle, c’est-à-dire des unités d’élite comme les VDV (aéroportés) et les Marines, ou des unités irrégulières comme Wagner et la DNR/LNR. L’échelon intermédiaire de l’échelle – les unités régulières de fusiliers motorisés – est surtout visible en train de tenir des positions défensives.

Cela ne veut pas dire que la mobilisation n’a pas déjà eu un effet majeur sur le champ de bataille. Les conditions qui ont permis l’offensive ukrainienne dans l’oblast de Kharkov à l’automne dernier ont été rectifiées. Il n’y a plus de sections de front clairsemées et les positions de la Russie sont maintenant correctement occupées. À ce jour, l’Ukraine n’a toujours pas réussi à percer une position russe solidement tenue, et la mobilisation a permis à la Russie d’occuper enfin correctement l’énorme front. Elle n’a toutefois pas entraîné d’augmentation visible de la production de forces offensives, et il semblerait que cela soit dû en grande partie au chaos organisationnel associé à la reconversion des BTG en brigades et divisions.

Du point de vue russe, c’est la mauvaise nouvelle. La bonne nouvelle, c’est que même si une grande partie de l’armée mobilisée est encore dans un état de flux organisationnel, la force de combat russe est plus que suffisante pour soutenir le combat sur les axes existants, en perturbant les tentatives de l’Ukraine d’accumuler des réserves et de poursuivre d’importants objectifs de mise en forme.

M.K.Bhadrakumar a lu Big Serge…et il en tire des conclusions géopolitiques

Grâce à Internet, une internationale des esprits libres s’est créé. De fait, Bhadrakumar, Big Serge, Alexander Mercouris, Scott Ritter, Emmanuel Todd Xavier Moreau, Pepe Escobar, Lucas Leiloz, Michael Hudson etc…font, individuellement et ensemble – car ils se lisent – émerger une analyse alternative de la guerre d’Ukraine, loin du tintamarre occidental.

Le point le plus récent de M.K. Bhadrakumar sur les eaux dangereuses dans lesquelles nous sommes entrés:

Les militaires s’attendaient à une offensive russe massive en Ukraine après la mobilisation, entre janvier et février, lorsque dans les steppes glacées et balayées par les vents du Donbass, les températures ont chuté à moins 30°C, le sol s’est durci et il a été possible de déplacer de l’artillerie lourde. Mais cela ne s’est pas concrétisé.

L’OTAN est sur le point de franchir une « ligne rouge » russe, poussant la guerre vers une confrontation aux risques incalculables.

Au lieu de cela, de nombreux combats intenses ont eu lieu sur le front du Donbass et les forces russes ont remporté une série de succès dans ce qui semblait être des batailles de position, mais qui ont permis de prendre l’initiative militaire sur l’ensemble du front, forçant les réservistes ukrainiens à se retrouver dans une situation périlleuse aujourd’hui.

La tactique russe a consisté à maintenir un taux de combustion élevé sur le front et à réduire la capacité de l’Ukraine à former des réserves, tandis que des lignes de défense bien fortifiées s’étendant sur plus de 800 km privaient Kiev de toute chance de reprendre l’initiative opérationnelle. Sans surprise, les Russes ne sont pas d’humeur à se lancer dans des opérations ambitieuses. En outre, ils s’emploient à régler les problèmes d’organisation sur le long terme. Une restructuration des forces armées russes est en cours, qui implique de passer des formations dites de groupe tactique de bataillon d’une armée expéditionnaire lourde en puissance de feu mais exceptionnellement légère en infanterie, à un retour à la structure de division de l’armée soviétique, qui, avec une expansion massive de la production d’armements et un rééquipement du complexe militaro-industriel, répondrait aux exigences d’une guerre continentale, si le besoin s’en faisait sentir.

Entre-temps, les opérations dans le Donbass ont atteint un point de basculement. Avec la chute imminente de Bakhmut, le pivot de la ligne de défense ukrainienne dans le Donbass, la voie s’ouvre pour l’assaut russe sur Slavyansk et Kramatorsk, les deux dernières villes sous le contrôle de Kiev. On peut également s’attendre à des combats intenses dans les semaines à venir dans le secteur d’Ugledar, dans le sud-ouest du Donbass, qui surplombe la grande ligne ferroviaire reliant Donetsk au port de Mariupol sur la mer d’Azov et le pont terrestre vers la Crimée, et menace potentiellement l’ensemble de la logistique russe dans le sud.

Par conséquent, le contrôle du « bourrelet » d’Ouglar est une priorité pour l’Ukraine et la Russie. Là encore, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a récemment souligné qu’il s’agissait d’une obligation constitutionnelle de libérer entièrement l’oblast de Zaporizhzhia (dont les deux tiers sont sous contrôle russe) et Kherson (qui a changé de mains lors de la contre-offensive ukrainienne de novembre).

Bien entendu, si les États-Unis élargissent considérablement la portée de la guerre par procuration en fournissant à l’Ukraine des armes à longue portée, les opérations russes s’étendront inévitablement à toute la région située à l’est du fleuve Dniepr et créeront une zone tampon pour la sécurité des territoires russes. Fondamentalement, la Russie conserve la domination de l’escalade.

Bien entendu, la trajectoire des opérations russes dans la période à venir dépendra également de facteurs politiques émergents. Il est peu probable que l’offensive de printemps commence avant la visite du président chinois Xi Jinping à Moscou ce mois-ci. Une coopération et une coordination plus étroites entre la Chine et la Russie en ces temps de guerre et de sanctions occidentales apparaissent progressivement comme étant dans leur intérêt stratégique commun.

Tout dépendra de l’émergence d’un nouvel équilibre dans le conflit d’ici l’été, reconnu par toutes les parties. À l’heure actuelle, cependant, un ordre de sécurité pacifique et consensuel en Europe semble très éloigné. Alors que la Russie a déjà absorbé les sanctions occidentales et démontré sa détermination à aller jusqu’au bout, les États-Unis et leurs alliés européens sont incapables d’influencer le cours du conflit. Ce à quoi nous assistons – chars Challenger des Britanniques, négociations pour l’envoi de batteries Patriot, chars M1 Abrams, F16 des Etats-Unis, etc… – est une fausse escalade, car ces systèmes d’armes n’arriveront probablement jamais.

Il ne fait aucun doute que la situation stratégique, industrielle, économique, politique et militaire de l’Europe se détériore considérablement en raison des répercussions des sanctions contre la Russie. Les coûts de production élevés ont forcé la fermeture d’industries européennes, entraînant des licenciements. L’opinion publique allemande est de plus en plus sceptique quant à l’approche occidentale de la guerre. La récente découverte que l’administration Biden était responsable du sabotage du Nord Stream exacerbe ces sentiments. Il reste à voir comment tout cela se déroulera au cours des mois difficiles à venir, alors qu’une récession profonde s’installe et que l’orgueil diplomatique des États-Unis est mis en évidence.

La Russie n’écoutera plus les offres de négociation douteuses de l’Occident, qui.....

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Poutine au front contre "l'Occident sataniste"

Emmanuel Leroy, analyste politique, fait de fréquents séjours à Moscou et dans le Donbass, il nous livre un état des rapports de force et la compréhension de ce qui se passe sur la ligne de front. Nous sommes en présence à la fois d’une guerre traditionnelle de position avec ses tranchées et les tirs d’artillerie et d'une guerre post-moderne avec les drones notamment. Dans cette guerre, les erreurs stratégiques ne se comptent plus, celle de Moscou et sa colonne de blindés attaquant par le Nord pour faire pression sur Kiev, fut un échec. De même, Kiev est désormais en position délicate avec des chars livrés parcimonieusement par ses alliés et des munitions qui font défaut, sans compter le nombre des hommes dont l’abondance se fait rare. En témoigne la reprise en cours de Bakhmut par les Russes et Wagner et l’impossibilité pour l’armée ukrainienne de traverser le Dniepr après la reprise de Kherson. En attendant, une reprise de la guerre de mouvement, l’Amérique pousse ses intérêts économiques au prix de la vassalisation de l’Europe et d’une hostilité profonde à la Russie, véritable cible de l’Etat profond, et de l’autre, la Chine intervient désormais en faveur de la Russie en vue d’une hypothétique médiation mais aussi pour s’assurer de la fourniture continue de matières premières. Mais en définitive, il s’agit bien d’une guerre anti-occidentale, tant sur le plan géopolitique que celui des supposées valeurs de ce même Occident dans lesquelles de moins en moins de pays se reconnaissent désormais.

L’Ukraine, va-t-elle encore perdre des régions ?

par Karine Bechet-Golovko - Le07/03/2023.

Le problème du gouvernement à Kiev aujourd’hui est de devoir tenir les régions de l’Est par la force et la terreur. Des bruits commencent à courir selon lesquels, des régions pourraient ce printemps rejoindre la Russie – par la volonté de leurs habitants. Mais pour cela, il leur faudra bien la protection physique directe de la Russie.

L’on entend souvent parler, certes pas dans les médias atlantistes, des répressions conduites par les autorités ukrainiennes contre les populations locales dans les régions de l’Est. Ces populations sont considérées, en fait, par les autorités locales comme l’ennemi. Ce qui est surprenant, c’est la surprise qui continue à filtrer chez ces gens, quand ouvertement les civils refusent d’être « évacués » vers l’arrière de l’Ukraine, comme c’est le cas à Artemovsk, et partent avec l’armée russe. Pour preuve, cette vidéo d’un soldat ukrainien, qui n’en revient pas …

Se conduire comme une force d’occupation et non pas comme un pouvoir légitime agissant dans l’intérêt des habitants provoque inévitablement une crise sociale, qui est pour l’instant étouffée par l’état de guerre en Ukraine et la pression exercée sur les habitants.

Le gouverneur par interim de la région de Zaporojie, Evgueny Balitsky, vient de déclarer, que ce printemps, de nouveaux territoires pourraient encore rejoindre la Russie :

« Littéralement au printemps, il y aura une crise, c’est ma prévision. Eh bien, après cela, les régions commenceront à faire leur choix : les régions de Nikolaev, d’Odessa et de Zaporojie elles-mêmes commenceront à passer pacifiquement de notre côté, du côté du bien ».

Rappelons, que la région de Zaporojie est entrée juridiquement dans la Fédération de Russie, mais tout le territoire n’est pas administré par la Russie, notamment le centre régional, la ville de Zaporojie. Selon le gouverneur :

« Les autorités de la région de Zaporojie « ont des liens avec Dnepropetrovsk, avec Zaporojie, avec Kharkov ». De nombreuses sources rapportent, que dans les régions contrôlées par l’Ukraine, le degré de découragement augmente. Les habitants comprennent que la guerre est inutile et que le régime doit être changé ».

La radicalisation de la situation et le temps jouent contre le régime atlantico-ukrainien, les gens étant fatigués d’une guerre fratricide commanditée par l’OTAN. Sans pour autant sous-évaluer l’énorme travail de propagande, qui a été très professionnellement fait ces dernières années afin d’éloigner ces populations du Monde russe, le mécontentement social monte, le lien historique, millénaire, avec la Russie est ravivé par le conflit. L’espoir renaît, surtout dans le chaos de cette Ukraine post-Maïdan, globalisée.

Mais soyons également réaliste, tant que la Russie n’aura pas pris pied physiquement et étatiquement dans ces territoires, les gens ne pourront pas d’eux-mêmes relever la tête, éviter les répressions de masse et renverser le régime en place par la seule force de leur volonté pour organiser un référendum et entrer pacifiquement en Russie. Même s’ils en ont la volonté, ils ne pourront pas le faire sans la protection physique de la Russie, qui doit déjà terminer de reprendre le contrôle de son territoire national, notamment en ce qui concerne justement cette région de Zaporojie, sans attendre un coup de baguette magique, qui résoudrait le problème tout seul.

Karine Bechet-Golovko

source : Russie Politics

Mac Gregor : Les perspectives ukrainiennes

Après Bakhmout, le pire reste peut-être à venir,

Source : Le Courrier des Stratèges - Par Philippe Migault - Le 06/03/2023.

Après Bakhmout, le pire reste peut-être à venir, par Philippe Migault

La chute imminente de Bakhmout n’est que le prologue d’une campagne 2023 dramatique, mais pas nécessairement décisive pour les Russes et les Ukrainiens. Si le Kremlin conserve l’initiative, il devra choisir entre plusieurs options plus ou moins risquées. Petite tentative de prospective opérationnelle.


On entend beaucoup de sottises à propos de Bakhmout qui serait, prétendument, un nouveau Verdun. Bien sûr certains éléments peuvent évoquer le choc de 1916 : L’acharnement mis par les deux parties à jeter sans cesse de nouvelles unités d’infanterie dans la fournaise, le discours ukrainien affirmant que cette résistance vise à saigner l’armée russe pour la vaincre, la longueur de la bataille enfin. Mais la comparaison s’arrête là. D’une part parce que cette bataille est essentiellement urbaine, alors que Français et Allemands se sont affrontés dans les forêts des coteaux de la Meuse. D’autre part parce que, fort heureusement, le chiffre des pertes n’est pas comparable. Enfin parce que si les Allemands avaient vaincu à Verdun, la France aurait sans doute été proche de la défaite. Ce ne sera pas le cas de l’Ukraine après Bakhmout.

La tactique du chaudron n’a jamais été payante

On le sait, un pays dos au mur exhorte ses soldats à combattre sans souci de recul. « Plus un pas en arrière », ordonnait Staline en 1941, imité par Hitler quelques mois plus tard. Le pari est toujours le même :

Soit il s’agit de bloquer l’ennemi définitivement, sur place, de le laisser s’user jusqu’à ce qu’il abandonne faute de moyens, ou en raison d’une crise morale parmi ses troupes. Il perd de la sorte l’initiative, la laissant au défenseur. Les Russes sont montés à l’assaut de la ligne de défense Bakhmout-Soledar-Seversk en juillet dernier. Soledar est tombé, la chute de Bakhmout devrait prochainement survenir. Ils ne se sont pas découragés, ont toujours une puissance de feu supérieure et leur stratégie d’attrition paie. S’il s’agissait initialement de l’option ukrainienne, c’est un échec.

Soit il s’agit de mener résolument un combat défensif jusqu’au bout, jusqu’au sacrifice d’une partie de ses forces, afin d’user l’adversaire et de gagner du temps. De la sorte, lorsque l’ennemi l’aura emporté, il repartira affaibli avant de se heurter à de nouvelles positions défensives que la résistance aura permis d’organiser. Bloqué, il s’exposera éventuellement à une contre-attaque de troupes fraiches qui, elles aussi, auront pu se préparer grâce au sacrifice de leurs camarades. C’est le discours actuel ukrainien, calqué sur celui de Staline en 1941, d’Hitler à partir de 1943. Sauf que si les deux dictateurs ont pu temporairement retarder l’adversaire en immobilisant une part considérable de ses troupes, ils ont dû consentir des pertes énormes. La résistance acharnée de l’armée soviétique en Ukraine et en Russie entre juin et décembre 1941 a sans doute permis à l’URSS de briser l’élan initial de la Wehrmacht. Mais au fil des encerclements successifs qu’elle a subis, elle a perdu cinq millions d’hommes, tués, prisonniers, blessés  ou disparus. La résistance acharnée de Stalingrad, puis des chaudrons de Tcherkassy ou de la poche de Falaise, afin de se plier aux ordres fanatiques d’Hitler, n’a conduit qu’à la perte de centaines de milliers de morts et de prisonniers, d’un irremplaçable matériel lourd et n’a nullement permis à l’Allemagne de redresser la barre. Staline avait lui les moyens de remplacer les hommes et les matériels,  il a gagné. Macabre arithmétique.

Mais cela les Ukrainiens, qui ne comptent pas leurs hommes, et sont vus par les Occidentaux comme de la chair à canon, estimant « qu’il y a de la marge», ne peuvent se le permettre indéfiniment.

En premier lieu parce que la démographie joue en faveur des Russes.

En second lieu parce que du point de vue matériel, les promesses d’aide occidentale tardent non seulement à se concrétiser, mais ne suffiront sans doute pas dans le temps long.

Enfin parce que d’un point de vue politique, il n’est pas certain que Zelensky puisse le supporter alors que sa population et sa jeunesse ne sont pas à l’abri d’une grave crise morale après un an de tueries. La tactique du chaudron n’a jamais été payante, sauf pour les Etats totalitaires qui peuvent se permettre de gaspiller hommes et matériel sans compter. A force de consentir des pertes, l’Ukraine, de l’aveu même du Wall Street Journal, risque de ne plus avoir les ressources qui lui permettraient de lancer la grande offensive printanière tant annoncée. Ainsi les précieuses unités d’élite ukrainiennes qui seraient intervenues ces derniers jours suivant plusieurs sources, afin de contenir la poussée russe autour de Bakhmout et ainsi permettre à la garnison - entre 4 et 12 000 hommes suivant les estimations - d’évacuer éventuellement ce qui reste de l’agglomération, subissent nécessairement une usure sensible de leurs capacités. 

Sauf défaillance ukrainienne majeure, la bataille d’attrition sera encore longue

Mais si Dieu est traditionnellement du côté des gros bataillons, cela ne veut pas dire pour autant que la Russie va rapidement l’emporter après Bakhmout. Celle-ci tombée, la majeure partie de l’oblast de Donetsk, mais aussi une fraction importante de celui de Zaporojie, officiellement annexée par Moscou, resteront aux mains des Ukrainiens. Et la route sera longue et sans doute sanglante, avant que les Russes parviennent aux frontières des oblasts en question, à quelques dizaines de kilomètres seulement.

Avant d’aborder la ligne de défense s’appuyant sur l’agglomération de Slaviansk-Kramatorsk, à 25 kilomètres des lisières occidentales de Bakhmout, il faudra d’abord que les troupes russes reprennent Siversk, qu’ils ont perdu l’été dernier et qu’ils ne peuvent laisser sur leurs arrières, ainsi sans doute que Lyman, plus au nord, et les villes s’échelonnant le long de la route N20 reliant le sud de Kramatorsk aux zones de combat du sud-est, par où peuvent circuler des renforts. A moins que les Ukrainiens décident de livrer un combat décisif dans Slaviansk et Kramatorsk en repliant vers elles des moyens supplémentaires actuellement en ligne, cela devrait prendre des semaines. Des semaines avant d’arriver sur une ligne de fortifications située en plein milieu urbain et que les Ukrainiens ont eu tout le temps de préparer.

Reliées par des quartiers de banlieue, Slaviansk et Kramatorsk ne forment dans les faits qu’un seul ensemble urbain, en forme de 8, s’étirant sur une vingtaine de kilomètres du nord-est au sud-ouest et atteignant une largeur variant entre 15 et 18 kilomètres aux points les plus larges. Bref une agglomération énorme par la taille sinon par la population, qui doit pour les deux villes légèrement dépasser un total de 160 000 habitants.  Ravitaillées depuis l’ouest, le nord et le sud par de nombreux axes routiers et ferroviaires, elles peuvent se soutenir mutuellement par des tirs d’artillerie efficaces, les plans de feu ayant théoriquement eu tout le temps d’être parfaitement préparés. Un ultime bastion avant la frontière nord-ouest de l’oblast de Donetsk, 20 kilomètres plus loin, qu’il sera très difficile de prendre. 

Une grande offensive russe ? Pour quoi faire dans l’immédiat ?

Pour les Russes et les Ukrainiens, le pire est donc sans doute encore à venir. A moins qu’un des protagonistes ne marque un point décisif par une offensive majeure. C’est ce que ne cessent d’annoncer les Ukrainiens. Mais nous l’avons dit, ils sont obligés de puiser dès à présent dans leurs moyens humains et matériels. Les conditions nécessaires au succès d’une attaque ne sont pas garanties.

Côté russe, on n’a cessé également de promettre un grand coup, censé permettre d’en finir une fois pour toutes et de régler l’affaire rapidement. Sauf que l’on ne voit rien venir pour l’instant. La fameuse offensive anniversaire du 24 février n’a jamais eu lieu, les nombreux moyens aériens concentrés à proximité des frontières de l’Ukraine n’ont pas donné… Et il n’est pas certain qu’ils soient engagés. Car parmi les rares matériels performants livrés aux Ukrainiens figurent les défenses sol-air. Or les avions, les hélicoptères de combat et leurs pilotes coûtent cher. Pourquoi jouer cet atout et consentir des pertes, alors que pour l’heure les Russes progressent au sol, pour le prix infiniment moins élevé des gens de sac et de corde de Wagner ? 

De plus ces moyens seront précieux si les Ukrainiens déclenchent effectivement leur offensive. Dans ce cadre un engagement massif d’appuis aériens, combiné aux feux de l’artillerie et des blindés, permettrait, mené intelligemment, de briser les reins de l’assaillant. Les Russes attendent peut-être que Zelensky et ses conseillers jouent cette carte, afin de prendre leur revanche après l’humiliation de l’offensive ukrainienne victorieuse de l’été dernier vers Izioum. Ce serait l’occasion de saigner davantage encore l’Ukraine. Bref, une grande offensive russe ? Pour quoi faire dans l’immédiat ?.......

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Il y a un an, l’Ukraine s’apprêtait à attaquer la Crimée

Source : Le Courrier des Stratèges - Edouard Husson - Le 04/03/2023.

Comment la Russie a déjoué les sanctions pétrolières occidentales, par Poliexpert

l y a un an, la Russie attaquait l’Ukraine, ouvrant le premier conflit majeur de l’ère post-soviétique sur le continent. Edouard Husson nous dresse un tableau panoramique de cet événement qui structure chaque jour notre actualité. Il analyse également, avec son brillant esprit de synthèse, les pistes de sortie qui se dégagent aujourd’hui.

Dans les éléments de bilan, on retiendra tout particulièrement la mise en jeu de l’imperium américain et l’émergence de la Chine comme un potentiel intermédiaire entre la Russie et les USA.

Il est encore trop tôt pour tout comprendre des événements sous-jacents à l’oeuvre, mais il est très plausible que le découplage entre les USA et le reste du monde soit accéléré à l’issue de ce conflit.

L'armée Russe contrôle la situation

Le conflit ukrainien en regard de la responsabilité des gouvernants

...par Thierry Meyssan - Le 28/02/2023.

 

L’Alliance atlantique magnifie l’Ukraine à l’occasion du premier anniversaire de l’intervention militaire russe sur son territoire. Sous nos yeux, nous la voyons recourir à la plus trompeuse des propagandes, maniant avec habileté l’omission et parfois le mensonge. Contrairement à ce qu’elle prétend, jamais cette guerre n’a été illégale, même si aujourd’hui elle ne semble plus nécessaire et devrait être interrompue. Cependant, les causes de la guerre demeurent et le Kremlin anticipe une seconde manche, non pas pour annexer l’Ukraine ou la Moldavie, mais pour sauver la Transnistrie.

Source : RzO Voltaire.

Avant de venir à Kiev, le président Joe Biden a demandé à la Russie l’assurance qu’elle ne bombarderait pas son train spécial.

Le premier anniversaire de l’affrontement militaire Est-Ouest en Ukraine a été l’occasion pour les Occidentaux de convaincre leur population qu’ils étaient « du bon côté de l’Histoire » et que leur victoire était « inévitable ».

Rien de cela n’est surprenant. Il est normal que les gouvernements communiquent sur leurs activités. Sauf qu’ici les informations sont des mensonges par omission et les commentaires sont de la propagande. On assiste à un tel renversement de la réalité que l’on peut se demander si, en définitive, les vaincus de la Seconde Guerre mondiale ne sont pas parvenus aujourd’hui au pouvoir à Kiev.

« LA GUERRE ILLÉGALE, INJUSTIFIABLE ET NON-PROVOQUÉE DE LA RUSSIE »

 

Toutes les intervention occidentales assènent que nous condamnons la « guerre illégale, injustifiable et non-provoquée de la Russie » [1]. C’est factuellement faux.

Laissons de côté la qualification d’« injustifiable ». Elle renvoie à un positionnement moral indécent. Aucune guerre n’est juste. Toute guerre est le constat, non pas d’une faute, mais d’un échec. Examinons le qualificatif de « non-provoquée ».

Selon la diplomatie russe, le problème a commencé avec l’opération états-uno-canadienne de 2014 et le renversement du président ukrainien démocratiquement élu, Viktor Ianoukovytch, en violation de la souveraineté ukrainienne et donc de la Charte des Nations unies. Il n’est pas possible de nier que Washington a joué un rôle déterminant dans cette prétendue « révolution de la dignité » : la secrétaire d’État adjointe pour l’Europe et l’Eurasie de l’époque, Victoria Nuland, s’est affichée à la tête des putschistes.
Selon la diplomatie chinoise, qui vient de publier deux documents à ce sujet, il ne faut pas s’arrêter à cette opération, mais remonter à la « révolution orange » de 2004, également organisée par les États-Unis, pour constater la première violation de la souveraineté ukrainienne et de la Charte des Nations unies. À l’évidence, si la Russie ne la mentionne pas, c’est qu’elle y a aussi joué un rôle, ce qu’elle n’a pas fait en 2014.

Le public occidental est tellement choqué de l’aisance avec laquelle les États-Unis manipulent des foules et renversent des gouvernements qu’il n’a plus conscience de la gravité de ces faits. Depuis le renversement de Mohammad Mossadegh, en Iran en 1953, à celui de Serge Sarkissian, en Arménie en 2018, il s’est habitué aux changements forcés de régime. Que les dirigeants déchus aient été bons ou mauvais ne doit pas entrer en ligne de compte. Ce qui est insupportable et inadmissible, c’est qu’un État étranger ait organisé leur renversement en maquillant son action derrière quelques opposants nationaux. Ce sont des actes de guerre, sans intervention militaire.

Les faits sont têtus. La guerre en Ukraine a été provoquée par les violations de la souveraineté ukrainienne de 2004 et de 2014. Ces violations ont été suivies d’une guerre civile de huit ans.

La guerre n’est pas non plus illégale en Droit international. La Charte des Nations unies n’interdit pas le recours à la guerre. Le Conseil de Sécurité a même la possibilité d’en déclarer (articles 39 à 51). Cette fois la particularité est qu’elle oppose des membres permanents du Conseil.

La Russie a cosigné les Accords de Minsk pour mettre fin à la guerre civile. Cependant n’étant pas née de la dernière pluie, elle a compris dès le départ que les Occidentaux ne voulaient pas la paix, mais la guerre. Aussi a-t-elle fait avaliser les Accords de Minsk par la résolution 2202 du Conseil de Sécurité, cinq jours après leur conclusion, puis a contraint l’oligarque russe Konstantin Malofeïev a retirer ses hommes du Donbass ukrainien. Elle a fait joindre en annexe à la résolution, une déclaration des présidents de la France, de l’Ukraine et de la Russie, ainsi que de la chancelière allemande se portant garants de l’application de ces textes. Ces quatre signataires engageaient leur pays.

• Le président ukrainien Petro Porochenko a déclaré dans les jours suivants qu’il n’était pas question de céder quoi que ce soit, mais au contraire de punir les habitants du Donbass.
• L’ancienne chancelière Angela Merkel a déclaré à Die Zeit [2] qu’elle voulait uniquement gagner du temps afin que l’Otan puisse armer les autorités de Kiev. Elle a précisé son propos à son insu dans une discussion avec un provocateur qu’elle croyait être l’ancien président Porochenko.
• L’ancien président François Hollande a confirmé à Kyiv Independent les propos de Madame Merkel [3].
• Restait la Russie qui a mis en œuvre une opération militaire spéciale, le 24 février 2022, en vertu de sa « responsabilité de protéger ». Dire que son intervention est illégale, c’est dire par exemple que celle de la France durant le génocide au Rwanda était aussi illégale et que l’on aurait dû laisser le massacre continuer.

Les e-mails du conseiller spécial du président russe Vladimir Poutine, Vladislav Sourkov, qui viennent d’être révélés par la partie ukrainienne, ne font que confirmer ce processus. Durant les années qui ont suivi, la Russie a aidé les Républiques ukrainiennes du Donbass à se préparer intellectuellement à l’indépendance. Cette ingérence était illégale. Elle répondait à l’ingérence, également illégale, des États-Unis qui armaient non pas l’Ukraine, mais les « nationalistes intégraux » ukrainiens. La guerre avait déjà commencé, mais conduite par des Ukrainiens exclusivement. Elle fit 20 000 morts en 8 ans. Les Occidentaux et la Russie n’intervenaient qu’indirectement.

Il faut bien comprendre qu’en feignant de négocier la paix, Angela Merkel et François Hollande ont commis le pire des crimes. En effet, selon le Tribunal de Nuremberg, les « crimes contre la paix » sont plus grave encore que ceux « contre l’Humanité ». Ils ne sont pas la cause de tel ou tel massacre, mais de la guerre elle-même. C’est pourquoi le président de la Douma, Viatcheslav Volodine, a demandé la convocation d’un nouveau tribunal de Nuremberg afin de juger Angela Merkel et François Hollande [4]. Cet appel, qui nous montre le gouffre qui sépare les deux perceptions du conflit, n’a pas été relayé par la presse occidentale.

L’ordonnance de la Cour internationale de Justice du 16 mars 2022 a posé, à titre conservatoire, que « La Fédération de Russie doit suspendre immédiatement les opérations militaires qu’elle a commencées le 24 février 2022 sur le territoire de l’Ukraine » (réf : A/77/4, paragraphes 189 à 197). Moscou n’a pas obéi, considérant que la Cour avait été questionnée sur l’exigence d’un génocide perpétré par Kiev contre sa propre population et non pas sur l’opération militaire visant à protéger la population ukrainienne.
De son côté, l’Assemblée générale des Nations unies a adopté plusieurs résolutions, dont la dernière est la A/ES-11/L.7, du 23 février 2023. Le texte « Exige de nouveau que la Fédération de Russie retire immédiatement, complètement et sans condition toutes ses forces militaires du territoire ukrainien à l’intérieur des frontières internationalement reconnues du pays, et appelle à une cessation des hostilités »
Aucun de ces deux textes ne déclare l’intervention russe « illégale ». Ils ordonnent ou exigent que l’armée russe se retire. 141 États sur 193 considèrent que la Russie doit cesser son intervention. Certains d’entre eux pensent qu’elle est illégale, mais la plupart qu’elle « n’est plus nécessaire » et fait souffrir inutilement. Ce n’est pas du tout pareil.

Les États ont un point de vue différent de celui des juristes. Le Droit international ne peut que sanctionner ce qui existe. Les États doivent protéger leurs ressortissants des conflits en préparation, avant qu’il ne soit trop tard pour y répondre. C’est pourquoi le Kremlin n’a pas obtempéré à l’Assemblée générale des Nations unies. Il ne s’est pas retiré du champ de bataille. En effet, il a observé durant huit ans l’Otan armer l’Ukraine et préparer cette guerre. Il sait donc que le Pentagone prépare une seconde manche en Transnistrie [5] et doit protéger sa population de cette seconde opération. De même qu’il a choisi la date de son intervention en Ukraine à partir d’informations indiquant une attaque imminente de Kiev au Donbass, qui n’ont été confirmées qu’ultérieurement [6], de même il décide aujourd’hui de libérer toute la Novorossia, Odessa incluse. C’est juridiquement inacceptable tant que la preuve des manigances occidentales ne sera pas apportée, mais c’est déjà nécessaire d’un point de vue de sa responsabilité.

Manifestement, ces deux manières de penser n’ont pas échappé aux observateurs. Le fait de juger que l’intervention russe n’est plus nécessaire doit être distingué de celui de soutenir l’Occident. C’est pourquoi, ils ne sont que 39 États sur 191 à participer aux sanctions occidentales et à envoyer des armes en Ukraine.

L’UKRAINE EST UNE « DÉMOCRATIE »

 

Le second message des dirigeants occidentaux, c’est que l’Ukraine serait une « démocratie ». Outre que ce mot n’a plus aucun sens à un moment où les classes moyennes disparaissent et où les écarts de revenus sont devenus plus importants qu’à aucun autre moment de l’Histoire humaine, s’éloignant de l’idéal égalitaire, l’Ukraine est tout sauf une « démocratie ».

Sa constitution est la seule raciste au monde. Elle pose, en son article 16 que « Préserver le patrimoine génétique du peuple ukrainien relève de la responsabilité de l’État » ; un passage rédigé par Slava Stetsko, la veuve du Premier ministre nazi ukrainien.

C’est là le sujet qui fâche. Au moins depuis 1994, les « nationalistes intégraux » (à ne pas confondre avec les « nationalistes » tout court), c’est-à-dire les personnes se réclamant de l’idéologie de Dmytro Dontsov et de l’action de Stepan Bandera, exercent de hautes fonctions dans l’État ukrainien [7]. De fait, cette idéologie s’est radicalisée avec le temps. Elle n’avait pas le même sens durant la Première Guerre mondiale et durant la Seconde. Il n’en reste pas moins que Dmytro Dontsov fut, à partir de 1942, un des concepteurs de « la solution finale des questions juives et tsiganes ». Il fut administrateur de l’organe du III° Reich chargé d’assassiner des millions de personnes en raison de leur origine ethnique, l’Institut Reinhard Heydrich de Prague. Stepan Bandera, quant à lui, fut le chef militaire des nazis ukrainiens. Il commanda de nombreux pogroms et massacres de masse. Contrairement à ce que prétendent ses successeurs actuels, il ne fut jamais interné dans un camp de « concentration », mais assigné à résidence dans la banlieue de Berlin, au siège de l’administration concentrationnaire. Il termina d’ailleurs la guerre en dirigeant les troupes ukrainiennes sous les ordres directs du führer Adolf Hitler.

Un an après le début de l’intervention militaire russe, des symboles nationalistes intégraux ou nazis sont visibles partout en Ukraine. Le journaliste de Forward, Lev Golinkin, qui a débuté un inventaire de tous les monuments en mémoire des criminels nazis, partout dans le monde, a dressé une liste stupéfiante des monuments de ce type en Ukraine [8]. Selon lui, ils sont presque tous postérieurs au coup d’État de 2014. Il faut donc admettre que les autorités issues de ce coup d’État se réclament bien du « nationalisme intégral », pas du « nationalisme » tout court. Et pour ceux qui doutent que le président juif Zelensky célèbre les nazis, il y a deux semaines, il a décerné le « titre d’honneur Edelweiss » à la 10° brigade d’assaut de montagne séparée en référence à la 1° division de montagne nazie qui « libéra » (sic) Kiev, Stalino, les passages du Dniepr et Kharkov [9].

Rares sont les personnalités occidentales qui ont acquiescé aux propos à ce sujet du président Vladimir Poutine et à ceux de son ministre des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov [10]. Cependant le Premier ministre israélien, Naftali Bennett, et son ministre de la Défense, le général Benny Gantz, ont plusieurs fois déclaré que l’Ukraine devait se soumettre aux injonctions de Moscou au moins sur ce point : Kiev doit détruire tous les symboles nazis qu’il exhibe. C’est parce que Kiev s’y refuse qu’Israël ne lui livre pas d’armes : aucune arme israélienne sera remise aux successeurs des massacreurs de juifs. Cette position peut évidemment évoluer avec le gouvernement de coalition de Benjamin Netanyahu ; lui-même héritier des « sionistes révisionnistes » de Vladimir Jabotinsky qui firent alliance avec les « nationalistes intégraux » contre les Soviétiques.

La politique actuelle du gouvernement de Volodymyr Zelensky est incompréhensible. D’un côté, les institutions démocratiques fonctionnent, de l’autre non seulement partout on célèbre les nationalistes intégraux, mais on a interdit les partis politiques d’opposition et l’Église orthodoxe relevant du Patriarcat de Moscou ; on a détruit des millions de livres parce qu’ils avaient été écrits ou imprimés en Russie ; on a déclaré 6 millions d’Ukrainiens « collaborateurs de l’envahisseur russe » et l’on y assassine les personnalités qui les soutiennent.

 

"L'impact global de la guerre en Ukraine"

Le 02/03/2023. Par Caroline Galactéros au colloque organisé par l'Académie de Géopolitique de Paris.

Un an du conflit russo-ukrainien (1)

Un an du conflit russo-ukrainien (2)

Un an du conflit russo-ukrainien (3)

Poutine vs Occident : Un an après : La dure réalité

Documentaire sur le Groupe « Wagner »

par RT France - Le 26/02/2023.

Contrat avec la patrie.

« Le groupe Wagner rassemble des professionnels convaincus, des hommes fortement motivés, pour qui ce travail est la priorité de leur vie. Ici sont rassemblés des patriotes, des vrais. »

source : RT France

Guerre en Ukraine. Un an de fake news du camp du bien

Source : Le Courrier des Stratèges - Philippe Migault - Le 24/02/2023.

Guerre en Ukraine. Un an de fake news du camp du bien, par Philippe Migault

Dans une guerre ultra médiatisée, il faut ridiculiser la propagande adverse en présentant la sienne comme de l’information. A ce jeu, Ukrainiens et Occidentaux incarnent deux écoles. Les premiers, comme les Russes, pratiquent le bon gros bobard soviétique, les seconds, le mensonge par précipitation ou omission.


On peut débattre éternellement autour du progrès, ou non, de l’homme. Il est certain, en revanche, que la presse et les « intellectuels », eux, n’apprennent guère de leurs erreurs. Trente ans après la première guerre du Golfe, un quart de siècle après les frappes de l’OTAN sur la Serbie et le Kosovo, qui donnèrent lieu aux plus gros concours de mensonges vis-à-vis des opinions publiques occidentales, la guerre russo-ukrainienne donne lieu aux mêmes canards journalistiques et aux mêmes prises de position teintées de mauvaise foi et d’incompétence.

Dès les premiers jours, les sachants de l’intelligentsia occidentale pérorent. Daniel Cohn-Bendit, fort de sa connaissance de l’ex-bloc communiste et de sa longue expérience sous les drapeaux, démystifie la puissance de l’armée russe. Celle-ci, assure-t-il, a perdu deux avions de transport Ilyouchine-76, bourrés de parachutistes, dans sa tentative de s’emparer de l’aéroport de Kiev. Des carcasses fumantes, des dizaines de corps calcinés…On attend évidemment les images démontrant le sanglant échec des vilains russes. Mais rien. Interrogé, Dany cite sa source. C’est une référence : il s’agit de Romain Goupil, autre soixante-huitard attardé, possédant les mêmes capacités d’analyste militaire conquises sur les barricades germano-pratines. Bref, l’homme qu’a vu l’homme qu’a vu l’ours. Evidemment Goupil avoue benoîtement qu’il n’a pas plus vérifié cette histoire qu’il n’avait vérifié s’il y avait des armes de destruction massive en Irak, quand il appelait à son invasion en 2003, mais qu’importe, c’est pour la bonne cause ! On part sur des bases élevées.

Les Ukrainiens bien sûr dégainent eux aussi, avec une finesse digne des Cosaques dont ils se prétendent les héritiers, exaltant leurs héros.

Sommés de se rendre par le croiseur russe Moskva, 11 000 tonnes d’acier bardé de dizaines de missiles et canons en tout genre, les treize gardes-frontière ukrainiens occupant l’île aux serpents, îlot prétendument stratégique, répondent au « navire de guerre russe d’aller se faire foutre. » Ils connaissent le martyr sous les coups des méchants moskals dans la foulée. Volodymir Zelensky annonce la nouvelle, louant le courage de ces héros de l’Ukraine. Mais on apprend quelques jours après que ceux-ci ont été faits prisonniers, que, dixit les autorités ukrainiennes, « tout va bien pour eux » et qu’ils ne semblent donc pas dans un train pour la Sibérie. Ouf. Tout va pour le mieux.

D’autant que l’Ukraine ne manque pas de héros de substitution : « Le fantôme de Kiev », roi des cieux au-dessus de la capitale ukrainienne, joue les Maverick face aux aviateurs russes. Dès le premier jour de combat, seul dans son Mig-29, il descend six avions. Slava Ukraïni ! A star is born ! Petro Porochenko, l’ancien Président ukrainien, relaie l’information et exalte l’as national. Et celui-ci ne s’arrête pas là. Il abat plus de 49 appareils russes jusqu’à ce qu’il trouve sa mort héroïque le 29 avril 2022 sur le front…de l’information. L’armée ukrainienne reconnaît ce jour-là que le chevalier blanc n’a jamais existé, qu’il a été mis en scène par ses soins et l’appui enthousiaste des réseaux sociaux pour soutenir le moral des civils. Pas grave estime France 24, il illustre « l’efficacité et les objectifs de la propagande ukrainienne ». Comme l’aurait dit Sibeth Ndiaye, il faut assumer de mentir pour protéger la cause. Pas de quoi fouetter un chat. A condition bien sûr de ne pas s’enferrer dans son mensonge quand on est démasqué par ses propres alliés…

D’où pourraient bien venir des missiles russes puisque ceux-ci n’en possèdent plus… ?


C’est ce qui est arrivé à Volodymir Zelensky à deux reprises. Le 15 novembre 2022, une explosion tue deux personnes en Pologne. Le Président ukrainien assure aussitôt qu’il s’agit d’un missile russe, qu’une nation membre de l’OTAN vient de se voir brutalement agressée et qu’il faut que l’Alliance Atlantique en tire les conséquences… Le 10 février dernier, rebelote. Zelensky affirme que deux missiles russes ont violé l’espace aérien roumain avant de frapper l’Ukraine. Sauf que dans les deux cas ses alliés ne mordent pas au bobard. Ce sont eux qui détiennent tous les moyens de renseignement satellitaires, radars et électroniques dont dépend l’armée ukrainienne. Celle-ci ne peut donc pas les intoxiquer sur la provenance des missiles qui s’entrecroisent sur le champ de bataille. Et l’OTAN, les Roumains ou les Polonais, malgré les roulements de mécaniques de ces derniers, n’entendent aucunement donner le moindre prétexte à qui que ce soit pour les entraîner dans une guerre qu’ils veulent bien livrer, mais sur le territoire ukrainien uniquement, et au prix de pertes exclusivement ukrainiennes. Du reste d’où pourraient bien venir des missiles russes puisque ceux-ci n’en possèdent plus…Si ?

Mais non voyons.

Dès la mi-mars 2022, un expert de référence des médias occidentaux assure que la moitié du stock de missiles russes a déjà été consommé et que les frappes ne pourront continuer plus que quelques semaines.

En juin Air & Cosmos qui se veut un magazine de référence titre que les Russes vont manquer de missiles de précision. « Même les drones commencent à manquer », affirme l’Express, citant un chercheur de la Fondation pour la Recherche Stratégique, le think-tank officieux du ministère français de la Défense.

Le 2 juillet, citant une source infaillible, les services de renseignement britanniques, notre confrère belge Le Soir évoque un possible manque d’armes modernes pour les forces russes.

En novembre les stocks de missiles russes sont au plus bas, affirme TF1, citant… les services secrets de Sa Majesté.

Heureusement le 10 janvier 2023, cette fois, çà y est. « La Russie aurait presque épuisé son stock de missiles » selon des sources ukrainiennes relayées par un média suisse. Puisqu’on se tue à vous dire depuis mars dernier que l’industrie de défense russe n’est plus en mesure de produire des missiles modernes grâce aux sanctions occidentales ! Bon, bon…

 Mais alors, d’où viennent les missiles Kalibr et les engins hypersoniques Zircon qui se baladent au large de nos côtes sur une frégate russe d’après le JDD ? D’où viennent les armes utilisées pour l’attaque « massive » sur l’Ukraine du 26 janvier et du 10 février dernier ? Seriez-vous incapables d’accorder vos violons, Messieurs ?

Cachez ces nazis que je ne saurais voir !


Question rhétorique bien sûr. Quand il le faut, l’ensemble des médias occidentaux et des bienpensants libéraux-libertaires savent parfaitement s’accorder pour mentir. Oh, pas franchement, non. En planquant la poussière sous le tapis. Un exemple ? Le nazisme en Ukraine. Il est documenté de longue date. Mais qu’importe, on s’acharne à le nier : on ne peut décemment élire Macron pour faire barrage à l’extrême-droite d’une part, et soutenir de l’autre un pays dont les combattants les plus résolus feraient passer le service d’ordre du RN pour une bande de gentils hippies. Vous voulez vérifier ? Rien de plus simple.

Allez sur Google, volet images. Dans la barre recherche, tapez Marioupol reddition prisonniers. C’est rappelons-le bataillon Azov, unité de jeunes gens au coupe de cheveux impeccable, aimant les retraites aux flambeaux, les défilés bien encadrés et les oriflammes aux emblèmes ésotériques, bref plus ou moins des scouts, qui s’est rendu le dernier lors de la chute d’Azovstal, l’ultime bastion tenu par les Ukrainiens à Marioupol. Regardez votre écran. Que voyez-vous ? Les photos illustrant les articles de presse des grands médias présentent des hommes fatigués, sales, en treillis, mal rasés avec des pansements. Bref des combattants harassés, qui, faits prisonniers, sont emmenés dans des bus vers un sort incertain. L’Obs’ évoque les survivants de Marioupol avec la photo émouvante d’un enfant et, sans doute, de sa mère. Seul le site A Gauche se démarque un peu, avec l’image d’un homme dont la manche de T-shirt relevée laisse apparaître un tatouage pas très parlant, le portrait d’un homme sans caractéristiques particulières. On vous a dit qu’Azov était constitué de nazis, mais rien. D’ailleurs certains journalistes français s’échinent à relativiser cette vision. « Ce sont des soldats ukrainiens qui sont restés jusqu’au bout et qui sont des patriotes avant d’être des nationalistes, des ultra-nationalistes », estime un éditorialiste de politique internationale de BFMTV. Pas des nazis, donc, des ultra-nationalistes. Pas des racistes non plus, sans doute, simplement des ethno-différencialistes. D’ailleurs BFMTV accuse les Russes de vouloir tout simplement chipoter sur des détails, notamment des tatouages un peu limites, ou des sigles d’uniforme étranges, pour décrédibiliser les braves du régiment Azov.

Vous êtes du genre entêté. Tapez pour vous faire une idée Marioupol reddition prisonniers nazis tatouagesFrance 24 dévoile une infox présentant un néo-nazi biélorusse, couvert de tatouages éloquents, pris en photo en 2005 et présenté comme un des combattants d’Azov, à qui, décidément, on cherche à nuire. Les autres grands médias ne présentent aucun cliché parlant. Une capture d’écrans Youtube vous incite à passer aux vidéos.

Et là, vous tombez sur ce que les télévisions françaises, sans doute pour ne pas porter atteinte à la dignité des prisonniers, n’ont pas montré : Priés de se déshabiller devant les caméras russes pendant leur premier interrogatoire, les héros d’Azov arborent en effet une multitude de tatouages. Des sigles SS, la Totenkopf qui ornait la casquette des gardiens de camp, des croix gammées, parmi de multiples runes nordiques la Wolfsangel, emblème de la division SS Das Reich, le Soleil noir cher aux esprits brumeux de la SS versés dans l’ésotérisme nordique au nom duquel ils estimaient incarner la race supérieure… Evidemment il s’agit d’images russes. Elles ne comptent pas. D’ailleurs pour les journalistes français, les choses sont simples : Si Zemmour est un fasciste, Zelensky ne peut être complice de nazis, puisqu’il est juif ! Cachez ces nazis que je ne saurais voir !

Et nous pourrions multiplier les exemples de ces incohérences et de cette mauvaise foi pendant des lignes encore.

Les avions russes, de fabrication occidentale sont cloués au sol faute de pièces détachées, assurent les médias occidentaux. Mais selon eux ce sont les mêmes appareils qui transportent hors de Russie les centaines de milliers d’hommes fuyant la mobilisation, captures d’écrans Flightradar à l’appui …

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Un an d'opération "spéciale" : Quel bilan ? Le 24/02/2023

Après un an de guerre : La nation ukrainienne n’existe plus

Source : Le Courrier des Stratèges - Edouard Husson - Le 24/02/2023.

Après un an de guerre: la nation ukrainienne n’existe plus

Nos dirigeants, nos experts, nos médias s’enthousiasment tous, depuis un an, pour la défense de « l’Ukraine ». Un pays où ils n’ont jamais mis les pieds, dont ils seraient bien incapables de décrire l’histoire et dont ils ignorent, au-delà de quelques cris superficiels, les profondes blessures. Nos élites qui se disaient post-nationales jusqu’à la guerre d’Ukraine, se sont mises à exalter la « nation ukrainienne ». Oubliant que la plus sûre façon que cet Etat récent, fragile, artificiel, devienne le berceau d’une nation, était de le laisser vivre dans la neutralité, en paix, sans l’obligation de choisir entre l’Occident et la Russie.

Immeubles reconstruits à Marioupol, septembre 2022

 

Cet article est écrit en hommage à tous les Ukrainiens, quelle que soit leur langue, leur ascendance, leur religion, et le côté de la ligne de front où ils se sont trouvés depuis 2014. Beaucoup trop sont morts et tous ont subi les conséquences de l’acharnement occidental à vouloir faire basculer le pays « vers l’Ouest », au lieu de laisser exister, neutre et pacifique, en attendant d’être prospère, une nation qui n’existe plus. Je pense plus particulièrement à tous les Ukrainiens, de toutes conditions sociales, rencontrés lors de mes séjours en Ukraine, dans le cadre des enquêtes sur la Shoah par balles avec le Père Patrick Desbois.

 

Il se trouve que je connais l’Ukraine. J’y ai effectué plusieurs séjours il y a une quinzaine d’années, dans le cadre de l’enquête sur la « Shoah par balles » menée par le Père Patrick Desbois. L’équipe d’enquêteurs que j’accompagnais comme conseiller historique allait en priorité dans des villages, de gros bourgs, de petites villes, là où les personnes avaient peu bougé depuis la Seconde Guerre mondiale et pouvaient donc raconter les atrocités commises par les nazis – SS, police allemande, collaborateurs ukrainiens – dont elles avaient été les témoins.

Depuis le 24 février 2022, je suis ému, quotidiennement, à chaque fois que j’entends mentionner des noms de lieux que je connais. Ce sont des bourgs où je dois être l’un des rares Français à être allé; des villes, plus connues que j’ai visitées ou traversées, des régions dont j’ai fini par connaître la géographie de manière détaillée, à force de les avoir parcourues. A force d’avoir reconstitué sur leur carte la géographie macabre des horreurs commises par le Reich hitlérien et la Wehrmacht.

A force, aussi d’avoir lu et relu, exploré dans beaucoup de recoins l’histoire d’une terre déchirée comme peu d’autres par le XXè siècle.Pogroms au début du XXè siècle, batailles de la Première Guerre mondiale et de la guerre civile qui suivit l’effondrement de l’Empire des tsars et l’installation du léninisme au pouvoir à Moscou; famines nées de la désorganisation soviétique puis de son terrorisme totalitaire; atrocités nazies et banderistes; féroce conflit entre le NKVD et les nationalistes d’Ukraine de l’Ouest entre 1945 et 1949 (ces derniers étant déjà soutenus par la CIA naissante).

L’héritage soviétique

L’Ukraine telle qu’elle a proclamé son indépendance en 1991, n’aurait jamais existé sans la volonté des dirigeants soviétiques. Quels qu’aient été les essais de créer un Etat indépendant en 1917-1920, c’est la poigne de fer du communisme léniniste puis stalinien qui a fait tenir ensemble ce pays à l’histoire éclatée: qu’y a-t-il de commun entre la Galicie austro-hongroise et la Crimée développée par le duc de Richelieu au début du XIXè siècle? Entre Kharkov la Russe et l’Ukraine subcarpathique magyarophone?

Quand j’ai découvert le pays, au lendemain de la « révolution orange », j’étais frappé par ces statues de Lénine soigneusement repeintes, que l’on trouvait dans la moindre petite ville dès que l’on était sorti de Galicie. Effectivement, sans Lénine et Staline, pas d’Ukraine. Or ces deux hommes ont aussi été des bourreaux de la population ukrainienne. Mais c’est aussi l’URSS qui a créé un sentiment d’appartenance commune. L’Ukraine et l’URSS: voilà bien l’un des rares cas où notre président devait dire « en même temps ». Car l’immense majorité des Ukrainiens ont haï tout ou partie du communisme mais parlaient, vingt ans après sa chute, de l’URSS avec nostalgie, y compris à l’ouest.

Je me souviens de cette Ukrainienne octogénaire de la région d’Odessa, dont la retraite était de 300 dollars par mois et qui, après une longue interview sur la Seconde Guerre mondiale, nous parlait – en russe – de « la catastrophe »; il m’a fallu quelques minutes pour comprendre qu’elle désignait ainsi la perestroïka. Les gens avaient le sentiment d’avoir tout perdu, après 1986.

L’Ukraine, cette nation que les Etats-Unis et l’Allemagne n’ont pas voulu laisser exister

Si les Occidentaux croient qu’ils ont rendu heureuse l’Ukraine après la proclamation de son indépendance, en 1991, ils se trompent. Hors Donbass et Crimée, on estime que le pays a perdu 15 millions d’habitants entre 1990 et 2020. Il y a la part de l’émigration mais aussi de la chute des naissances, très marquée à partir de 2005. En 2015, l’Ukraine avait 400 000 naissances environ, contre 800 000 par an dans les années 1980. La situation démographique est si critique que le pays n’a pas entrepris de recensement depuis 2001!

En arrivant en Ukraine au milieu des années 2000, j’avais en tête que l’Union Européenne – traduisez la Grande-Bretagne et l’Allemagne à l’époque – voulait absolument faire entrer l’Ukraine dans l’UE. J’avais dû me maîtriser lorsque, rencontrant, en compagnie de Jean-Pierre Chevènement, l’ancien président de la République Fédérale d’Allemagne, Richard von Weizsäcker, j’avais entendu ce dernier parler de la « stupidité » de Jacques Chirac qui n’était pas un enthousiaste de la « révolution orange ». Weizsäcker – fils d’un aristocrate conservateur compagnon de route du nazisme – faisait partie de ces réseaux allemands – essentiellement des fondations – qui avaient aidé les Américains dans une première tentative de faire basculer l’Ukraine. Et voilà comment il osait parler du président de la République Française, – peu importe son nom.

Il ne m’a pas fallu 24h, lors de mon premier séjour en Ukraine, en 2005, pour comprendre que le pays ne pourrait pas entrer dans l’UE avant des décennies. Il suffisait de regarder le niveau de vie du pays; avec bien évidemment une fine couche de gens très riches, les seuls que fréquentaient nos gouvernants. Les personnels politiques occidentaux ne savaient pas de quoi ils parlaient. Même sans entrer dans l’euro, le pays ne pouvait pas tenir le choc d’une intégration. Je me rappelle la découverte d’Odessa, en 2006, avec des kilomètres de camions qui faisaient la queue pour charger ou décharger dans un port qui commerçait essentiellement avec la Turquie et la Russie.

Lorsque le président Ianoukovitch expliquait à l’Union Européenne, en 2012-2013, qu’on ne pouvait pas lui demander de choisir entre la Russie et l’UE, qu’il avait besoin des deux, il laissait parler son bon sens. On ne pouvait pas couper du jour au lendemain l’Ukraine de ses approvisionnements et de ses débouchés russes sans plonger une population déjà pauvre dans encore plus de misère.

Mais Barack Obama et Angela Merkel en avaient décidé autrement. L’Ukraine devait entrer dans l’alliance occidentale, « quoi qu’il en coûte ». Alors, après 2013, la société ukrainienne a basculé vers plus d’émigration, plus de pauvreté. Le taux de prostitution de femmes à la recherche d’un revenu complémentaire, déjà élevé, a encore augmenté. Quant aux jeunes hommes ukrainiens ils sont allés plus fréquemment vers les bataillons néo-nazis, ces unités sur lesquelles l’OTAN ferme les yeux parce que les Américains les financent. (On lira les remarquables études réalisées sur ces bataillons par le journaliste français Laurent Brayard).

L’Ukraine aurait pu exister à condition qu’on la laissât être neutre

Maïdan a été d’abord une série de manifestations de représentants des classes moyennes désireux d’entrer dans l’UE; puis, très vite, un mouvement manipulé par les services occidentaux; enfin, le déclencheur d’une atroce guerre entre « Ukrainiens », la guerre du Donbass.

Il y a quinze ans, j’entendais les Ukrainiens du Donbass expliquer qu’ils se sentaient « Ukrainiens » mais que les Russes étaient leurs frères et qu’il ne fallait en aucun cas les forcer à choisir entre Occident et Russie. Aujourd’hui, les mêmes ne veulent plus entendre parler de l’Ukraine. Ils ont brièvement espéré en Zelenski – le premier président, depuis la fin des années 2000, à être élu par l’ensemble de l’Ukraine, en 2019. Il promettait la paix.

Le reniement de ses promesses a été le coup de grâce pour cette construction politique éventuellement viable qu’était l’Ukraine. Notre Occident qui n’a que « vivre ensemble » et « inclusivité » à la bouche, a curieusement oublié combien l’Ukraine aurait eu besoin de paix pour faire effectivement coexister et se respecter des héritiers de l’Empire russe et ceux de l’Empire austro-hongrois. Des catholiques uniates, des Orthodoxes de langue ukrainienne et des Orthodoxes de langue russe. Des nostalgiques de l’URSS et des nostalgiques du nationalisme ukrainien. Sans oublier des Polonais et des Hongrois.

Aujourd’hui, c’est avec des canons Caesar que l’armée ukrainienne bombarde quotidiennement ses anciens « compatriotes » du Donbass. Quelle trahison de notre devise républicaine! en particulier de son troisième terme, la « fraternité ». A chaque fois qu’Emmanuel Macron nous déverse une logorrhée sur la guerre et la paix en Ukraine, je vois défiler tous ces visages rencontrés en Ukraine, hommes et femmes, jeunes et vieux, Galiciens et Novorussiens, Kiéviens et montagnards des Carpathes….

Gloire à l’Ukraine, vraiment?

Nos dirigeants, nos élus, ont mis un drapeau ukrainien au fronton de nos monuments publics et de nos mairies. Je suppose que beaucoup sont sincères. Ils imaginent que l’Ukraine s’est définitivement découverte, comme nation, dans la guerre. De bobos progressistes exaltant la « démocratie ukrainienne » à des identitaires fascinés par la « slavité » des Ukrainiens, que n’avons-nous dû subir comme inepties, depuis un an!

Désolé, mais l’Ukraine n’est pas une démocratie. Elle aurait sans doute pu éviter une grande partie de la corruption qui l’accable si les Occidentaux n’avaient pas interféré. Et puis, pour faire une démocratie, il faut des classes moyennes en croissance. Or ce sont les classes moyennes qui émigrent – vers la Russie ou vers l’Ouest. Ceux que vous avez vu partir, depuis le début de la guerre, disposaient d’une voiture ou avaient de quoi se payer un billet de train.

Si les circonstances n’étaient pas aussi tragiques, on rigolerait franchement de cette droite française qui fait du copié-collé de la propagande fortement imprégnée de néo-nazisme, des Ukrainiens. Je me rappelle cet article du Figaro qui expliquait sérieusement qu’un bataillon composé de recrues asiatiques (qui n’avait en fait jamais été envoyé en Ukraine par l’armée russe) était à l’origine du massacre de Boutcha.

Non, experts de plateaux, gouvernants soumis à Washington, journalistes paresseux, électeurs d’Emmanuel Macron, vous vous trompez – la plupart du temps, je suppose, par ignorance. L’Ukraine ne sortira pas renforcée, mais pulvérisée, de la guerre. Chaque obus envoyé par un canon Caesar sur Donetsk est un clou planté dans le cercueil d’une nation à l’enterrement de laquelle vous dansez; pauvres inconscients!

Une Ukraine devenant majoritairement favorable à la Russie?

L’Ukraine était un Etat hébergeant une société post-soviétique hétérogène mais qui aurait pu devenir une nation, dans la paix, dans la coexistence entre la Russie et le reste de l’Europe. Aujourd’hui, non seulement cette nation est impossible à réconcilier….sauf à basculer majoritairement du côté russe!

C’est en effet l’évolution qui est sous vos yeux et que vous ne voyez pas. La société ukrainienne du centre et de l’ouest a commencé, depuis un an, à sentir la poigne de fer du SBU, ce bout de KGB qui n’a jamais été réformé. Et le régime de terreur des bataillons néo-nazis, qui traquent, avec le SBU, les « espions russes » et touts les réfractaires au service armé.

Des chiffres vraisemblables des pertes ukrainiennes et russes comparées sont parus. Ils sont confirmés par les experts militaires sérieux. 150 000 soldats ukrainiens sont tombés dans cette guerre! 230 000 ont été mis hors de combat. Puisque nos gouvernants n’ont que le mot « responsabilité » à la bouche, ce serait bien qu’ils s’interrogent sur la leur dans ce qui arrive à un pays qui a déjà tant souffert au XXè siècle: 3 millions de victimes de la famine stalinienne; 7 millions de victimes de la Seconde Guerre mondiale (dont 2 millions de soldats de l’Armée Rouge et tombés pour libérer l’Europe du nazisme).

Ce que j’observe depuis le printemps dernier, à force de comparer les sources, c’est un basculement de la société ukrainienne, une adhésion de sentiment ou de raison à l’idée que ce serait mieux d’être sous un gouvernement russe que sous un gouvernement ukrainien. Evidemment il restera, en particulier en Galicie, un pourcentage incompressible d’irréductibles. Et Vladimir Poutine connaît trop l’histoire pour envisager d’absorber toute l’Ukraine. Mais imaginons que la Russie s’arrête, à la fin de la guerre, le long d’une ligne allant de Kharkov à Odessa, que se passera-t-il plus à l’ouest? Il n’est pas impossible qu’un mouvement d’émigration ait lieu vers la Russie (qui est déjà aujourd’hui le pays qui a accueilli le plus de réfugiés du conflit!.

Avant de parler des Ukrainiens et de prendre des décisions politiques irréversibles, à Washington, Londres, Bruxelles, Varsovie, Berlin ou Paris, il aurait fallu les connaître!

Un an après, quel bilan tirer de la guerre en Ukraine ? par E. Denécé & B. Wicht - Le 23/02/23

Jacques Baud : « Le renseignement est un outil de propagande sur l’Ukraine »

Le 24/02/2023.
Le Renseignement est utilisé pour valider un narratif, pas pour informer objectivenet;
Le decalage avec la realité est colossal.

Une génération de dirigeants a l’impression d’avoir la science infuse exemple : « Macron je sais ».

Seuls quelques militaires donnent des évaluations qui semblent crédibles et ont des analyses factuelles. Eux savent ce qu’est la guerre.

La question qui se pose maintenant c’est quel est l’objectif, on ne sait pas ce que l’on cherche à atteindre !

L’idée de base de pousser la Russie « dans le fossé » ( la stratégie exposée par la Rand) a échoué et on n’a pas d’objectif de rechange.

Les Occidentaux espéraient un effondrement rapide de la Russie en quelques semaines.

Baud ne croit pas à la tentative de prendre Kiev, jamais il n’y a eu cette idée chez les Russes. Les forces déployées autour de Kiev etaient de moitié inférieures à celles qui étaient autour de Marioupol. Marioupol était un objectif important pour la dénazification. Les russes ont atatqué l’Ukraine avec de forces qui étaient le tiers des effectifs ukros. Ils ont donc façonné le champ de bataille et en particulier ils ont fixé les troupes de l’ouest afin de fixer les troupes de l’Ouest. Les russes n’ont jamais essayé d’attaquer Kiev, ils ont entouré.la ville pour fixer les troupes.

Baud sur l’OTAN a été conçue en 49 de façon a pouvoir mettre certains pays sous la protection nucléaire des USA, donc on se met sous la protection nucléaire des USA. Le chef d’orchestre de l’OTAN ce sont les USA qui s’appuient sur la nouvelle Europe, les pays Baltes, la Pologne etc

Les occidentaux se sont piégés eux même en fermant la porte du dialogue.

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Ancien colonel des services de renseignement suisse, ancien chef de doctrine des opérations de paix des Nations unies, négociateur en Russie après la chute de l’URSS et en Ukraine après l’Euromaïdan (2013), Jacques Baud, auteur de « Poutine, maître du jeu ? » et « Opération Z » (Max Milo), nous livre son analyse sur le conflit russo-ukrainien, et en particulier ses causes et le traitement que lui accordent les Occidentaux.

Guerre en Ukraine : Sommes-nous bien informés ? Avec M. Onfray, S. Simon et C. Galacteros

Les limites de la guerre

par Dmitry Orlov - Le 22/02/2023.

Une guerre chaude fait rage au cœur du sous-continent européen qui, si vous consultez une carte géographique, s’étend du pittoresque Cabo da Roca au Portugal (entrée gratuite) à la majestueuse chaîne de montagnes de l’Oural, à l’extrémité orientale de la Russie européenne. Le site actuel se trouve dans les provinces russes récemment (re)acquises de Lugansk, Donetsk, Zaporozhye et Kherson. Avec d’autres provinces, comme Odessa, Kharkov et Kiev, ces provinces étaient des terres russes jusqu’à ce que Vladimir Lénine juge bon de les regrouper dans une République socialiste soviétique d’Ukraine concoctée à la hâte. Mais cette entité chimérique a disparu depuis plus de 30 ans maintenant et ce qui l’a remplacée s’est avéré non viable et se trouve actuellement à un stade avancé de décomposition politique. C’est la proverbiale valise sans poignée : impossible de la soulever, mais trop précieuse pour la laisser derrière soi ; d’où le conflit actuel, qui consiste à l’ouvrir et à ramasser le butin qu’elle contient.

Il s’agit d’une vraie guerre, avec des chars, des véhicules blindés de transport de troupes, toutes sortes d’artillerie, des roquettes, des tranchées, de l’infanterie, etc. Comme la plupart des guerres, celle-ci est basée sur des malentendus. Les États-Unis et leurs amis de l’OTAN refusent de comprendre que la Russie veut récupérer son propre territoire et continuent de penser que cette demande est en quelque sorte négociable. Ils pensent également qu’il est possible de vaincre la Russie simplement en fournissant aux infortunées forces ukrainiennes du matériel de guerre obsolète et des renseignements, en imposant des sanctions économiques à la Russie, en tentant de l’isoler politiquement et en prenant diverses autres mesures que les Russes ont à peine remarquées. Les Russes attendent que tout le monde revienne à la raison et leur donne ce qu’ils veulent, tout en réduisant les troupes ukrainiennes en bouillie par milliers.

Les Américains semblent plutôt bien revenir à la raison : Moins d’un an après le début du conflit, nombre d’entre eux déclarent déjà que la poursuite du soutien aux Ukrainiens est une mauvaise idée. Mais personne ne sait ce que fera leur empereur Dementius Optimus Maximus, destructeur des gazoducs Nord Stream. Son objectif déclaré était d’affaiblir la Russie, mais puisque la Russie n’a fait que se renforcer entre-temps, il pourrait peut-être essayer de la renforcer à la place. (Vous savez, si vous ne pouvez pas décoincer une chose en la poussant, essayez de la tirer.) Les Allemands, quant à eux, hésitent. Leur ministre des affaires étrangères, Annalena, douée pour la gymnastique, a récemment annoncé que l’Europe était en guerre contre la Russie, puis s’est empressée de corriger le tir : L’Europe n’est pas (nein ! nicht !) en guerre contre la Russie. D’un autre côté (main numéro trois), le premier ministre polonais Tadeusz Morawiecki a depuis déclaré que vaincre la Russie est la raison d’être de la Pologne. La Russie et l’Allemagne se sont alors redressées et se sont regardées en face. Vous voyez, la Pologne est l’un de ces pays qui ne cesse d’apparaître et de disparaître.

Elle apparaît lorsque ses voisins traversent une période de faiblesse ou se sentent magnanimes, et elle disparaît lorsqu’en l’espace de quelques décennies, elle devient sauvagement nationaliste et que ses voisins décident qu’ils en ont assez. Mais au moins, la Pologne est une nation historique dont l’existence est attestée dans les annales de l’histoire européenne, contrairement à l’Ukraine, que l’édition 1911 de l’Encyclopaedia Britannica définissait comme suit :

UKRAINE (« frontière »), ancien nom donné à un district de la Russie européenne, comprenant aujourd’hui les gouvernements de Kharkov, Kiev, Podolie et Poltava. La partie à l’est du Dniepr est devenue russe en 1686 et la partie à l’ouest de ce fleuve en 1793.

Que cela serve d’avertissement à Morawiecki et à ses semblables ; quant aux autres, s’ils retrouvent la raison, ils voudront probablement négocier avec la Russie. Les questions qui se posent alors sont les suivantes : Qu’y a-t-il à négocier ? et avec qui ? Essayons de répondre à ces divers points.

En ce qui concerne les objets de négociation, il y a les nouvelles régions russes de Donetsk, Lugansk, Zaporozhye et Kherson et la région russe relativement nouvelle de Crimée. Ces dernières ne peuvent pas faire l’objet de négociations car leur adhésion à la Fédération de Russie a déjà été ratifiée et leur aliénation serait inconstitutionnelle. Il y a ensuite les terres russes qui doivent encore être libérées : Nikolaev, Odessa, Kharkov, Sumy, Kiev et quelques autres. Ici, beaucoup de choses dépendent du fait que la Russie les veuille réellement ou non : Nikolaev et Odessa – probablement ; le reste – peut-être.

Mais n’oublions pas les demandes de sécurité formulées par la Russie il y a un peu plus d’un an : Le retour de l’OTAN à ses frontières de 1997, le retrait de toutes les armes offensives et des troupes étrangères de l’OTAN, et la neutralité pour tous les pays situés au milieu.

Ces demandes peuvent être satisfaites de la manière la plus simple, en donnant à la Russie ce qu’elle veut et, en fait, ce qu’on lui avait promis lorsqu’elle a accepté la réunification de l’Allemagne, ou de la manière la plus dure, à la suite d’une impasse nucléaire tendue, qui pourrait entraîner d’importants dommages collatéraux. Si l’on garde à l’esprit qu’à l’heure actuelle, la Russie dispose d’une maîtrise totale de l’escalade, il serait plus sage de choisir la solution de facilité et de réduire l’OTAN. Au moins, cela permettrait de conserver le noyau de l’organisation intact.

Et puis, il y a la question de savoir avec qui il faut négocier. Après le fiasco de huit ans des accords de Minsk, selon lesquels l’Ukraine serait désormais fédéralisée et Donetsk et Lougansk bénéficieraient d’une autonomie, et après que les garants européens ont avoué que tout cela n’était qu’un simulacre et une tactique de retardement dans le but de donner à l’Ukraine une chance de se réarmer et de se recycler, les garants des accords de Minsk, la France et l’Allemagne, ne sont évidemment pas dignes de confiance. Et après les récentes révélations, grâce au journaliste d’investigation chevronné Seymour Hersh, selon lesquelles l’explosion des pipelines Nord Stream – un acte de terrorisme international – a été réalisée sur les ordres directs de l’empereur américain Dementius Optimus Maximus, il est évident que l’on ne peut pas non plus faire confiance aux États-Unis. Avec qui la Russie peut-elle donc négocier ? Le clown drogué et vêtu de kaki qui se cache dans son bunker à Kiev ? Ce serait pure folie.

Le seul choix possible est donc de rester en retrait et de laisser la bagarre ukrainienne se poursuivre jusqu’à ce que le camp ukrainien soit mis à terre. Ce qui suivra pourra être appelé des négociations, par politesse, mais ce qui risque de se passer essentiellement, c’est que la Russie précisera – sans le demander, sans l’exiger – la nouvelle configuration des choses en Europe de l’Est. Et cela, j’ose le dire, serait en fait un résultat positif. Oui, les guerres sont des choses désagréables ; des soldats meurent, des mères pleurent. Des bâtiments historiques sont endommagés et détruits. Mais elles sont parfois inévitables – à cause de la nature humaine. C’est mon opinion réfléchie et je suis prêt à la défendre. Certains d’entre vous objecteront peut-être : « Mais les guerres sont si… violentes ! », et la violence est, bien sûr, abjecte. Et, en général, je suis d’accord. Cependant… (ce qui suit est un peu de philosophie, que vous pouvez sauter si vous n’aimez pas la philosophie).

Il y a ceux qui prônent la non-violence la plus stricte. Il y a aussi ceux qui considèrent une telle approche comme une absurdité totale ; certains la trouvent même si irritante qu’elle leur donne envie de frapper les maudits pacifistes à mort, mais ils sont obligés de se retenir, ce qui leur cause un grand stress. Or, le stress est une cause majeure de problèmes de santé, tant psychologiques que physiologiques. Si l’on met de côté la question philosophique de savoir si le fait de provoquer quelqu’un à commettre des actes de violence, que ce soit par des moyens violents ou non, est en soi un acte de violence, la non-violence la plus stricte est-elle même théoriquement possible ?

Se débarrasser de toute violence ne permet en aucun cas de se débarrasser du problème de l’agression ; cela ne fait que le rendre souterrain et le transformer en agression passive. À son tour, l’agression passive donne aux gens l’envie de frapper l’agresseur à mort et, s’ils sont obligés de se retenir, ils subissent un stress important qui, à son tour, entraîne des problèmes de santé, tant psychologiques que physiologiques. Ces problèmes n’ont qu’une seule solution facile : mettre la main sur la personne agressive passive, ce qui est non seulement efficace mais aussi profondément satisfaisant. La boucle est ainsi bouclée. Et alors que le caractère de nombreuses personnes désagréables est amélioré par le fait qu’elles sont de temps en temps giflées ou ramassées et jetées dans les buissons lorsqu’elles le méritent amplement, personne n’est jamais amélioré en étant soumis à une agression passive.

C’est une loi de la nature que toute créature, humaine ou autre, si vous prenez soin d’elle et ne lui demandez rien ou presque en retour, deviendra, en temps voulu, insolente et impudente, commencera à se sentir en droit de faire des demandes toujours plus grandes et déraisonnables. Toutes les formes polies de dissuasion s’avéreront inutiles ; toute tentative de priver ladite créature de ces avantages, de l’enfermer ou de restreindre ses mouvements, ou de l’influencer par d’autres moyens non violents, sera reçue non pas comme une punition, mais comme une injustice. Vos cris ou vos gestes seront tout simplement ignorés et la situation ne fera qu’empirer avec le temps. La solution, cependant, est simple : il suffit de gifler la bête, de la fouetter, de la prendre par la peau du cou et de la secouer vigoureusement, puis de l’ignorer pendant un certain temps. Le résultat est généralement un ajustement comportemental très efficace : ce qui était quelques instants auparavant un chien hargneux exigeant ce qui lui revient de droit est maintenant un chiot pleurnichard qui réclame une friandise.

Si vous pensez que l’action disciplinaire est propre aux humains, à leurs pupilles et à leurs animaux de compagnie, ce n’est pas le cas : elle est également pratiquée par les chênes à l’égard des écureuils. Les écureuils aiment les glands et les enterrent, puis les déterrent plus tard et les mangent. Ce faisant, ils oublient où ils ont enterré une bonne partie des glands, ce qui leur permet de germer en jeunes pousses, dont certaines deviennent ensuite des arbres adultes qui produisent des glands. C’est une bonne affaire pour les arbres comme pour les écureuils. Cependant, avec le temps, les écureuils optimisent leur fonctionnement en développant une meilleure mémoire : au lieu d’enterrer beaucoup plus de glands qu’ils n’en déterrent et n’en mangent, ils en enterrent juste assez et en trouvent et en mangent la plupart, franchissant ainsi la fine frontière entre symbiose et parasitisme. Et puis tous les arbres conspirent (conceptuellement parlant ; le mécanisme exact de cette conspiration reste un mystère) et, pendant toute une saison, ne produisent pas de glands. Étant des arbres, les chênes sont obligés de recourir à des moyens passifs agressifs, mais ils le font à grande échelle. Les écureuils efficaces meurent de faim (ou ont simplement faim et ne produisent pas de progéniture) tandis que les écureuils inefficaces doivent simplement réfléchir et creuser un peu plus, et un plus grand nombre d’entre eux survivent. L’efficacité est punie, l’inefficacité récompensée, et la symbiose est restaurée.

Ce qui vaut pour les gens, leurs animaux domestiques, les chênes et les écureuils vaut également pour les nations, qu’elles soient grandes ou moins grandes. Et c’est pourquoi, de temps en temps, nous devons avoir des guerres.

Dmitry Orlov

source : Club Orlov

Traduit par Hervé, relu par Wayan, pour Le Saker Francophone

La défaite de l’Ukraine ne signifie pas la fin de la guerre.

par Thierry Meyssan - Le 22/02/2023.

On raisonne à tort en pensant que la défaite du président Zelensky à Donetsk et à Lougansk, à Kherson et Zaporijjia, puisse marquer la fin des combats. Face à la résistance que Moscou a rencontrée pour faire appliquer la résolution 2202 du Conseil de Sécurité, le président Poutine a déclaré qu’il lui restait à libérer Odessa et à joindre la Transnistrie. C’est précisément ce que cherche le Pentagone depuis 2019. D’ores et déjà, il prépare une seconde manche en Moldavie. Non pas qu’il veuille défendre les Ukrainiens, puis les Moldaves, mais parce qu’il entend dépouiller ses propres alliés.

Les chiffres du Mossad, selon Hürseda Haber
© Voltaire, actualité internationale – N°27 – 10 février 2023

Les chiffres de l’Alliance atlantique, relayés par les agences de presse occidentales, permettent de penser que le peuple ukrainien est uni et résiste grâce aux armes occidentales. Cependant, ceux du Mossad, diffusés par le site turc Hürseda Haber attestent qu’ils sont sans rapport avec la réalité.

Ce phénomène n’est pas nouveau. Pour avoir édité durant la guerre du Kosovo un bulletin quotidien relayant les dépêches des agences de presse occidentales croisées avec celles des agences de presse des Balkans, je n’en suis pas surpris. L’OTAN a une longue expérience du mensonge à ses concitoyens. Il ne s’agit pas ici d’exagérations, mais bien de mensonges éhontés. Les lecteurs plus âgés se souviennent qu’ils ont conquis le cœur de tous les Occidentaux, y compris de ceux qui les ont imaginés. À la fin de ce conflit, l’Alliance accepta généreusement de laisser les restes de l’armée serbe (on disait « yougoslave » à l’époque) se replier sous la protection de l’armée russe. C’est alors qu’à la stupéfaction de tous, on vit quantité de chars et d’avions sortir intacts de leurs abris souterrains.

Il n’est certes pas possible, durant une guerre, de savoir les choses avec précision sur un champ de bataille. Les armées elles-mêmes comptent leurs pertes, mais ignorent si les hommes manquants sont morts ou blessés, prisonniers ou en fuite. Les officiers doivent toujours décider dans le flou de la guerre, sans jamais disposer de statistiques précises comme il en existe en temps de paix.

Quoi qu’il en soit, tandis que les gouvernements savent tous que la Russie a gagné et qu’elle continuera à libérer la Novorossia jusqu’à la Transnistrie, certains font semblant de croire qu’elle va envahir la Moldavie comme elle l’a fait en Ukraine. Peu importe qu’à la dissolution de l’URSS, la Transnistrie se soit proclamée indépendante comme la Crimée. L’essentiel est de continuer à présenter la Russie comme une tyrannie conquérante qui dévaste tout sur son passage.

La Transnistrie, c’est cette vallée en rouge, entre la Moldavie et l’Ukraine.

Aussi faut-il rappeler que, lorsque la Moldavie s’est proclamée indépendante, elle a reconnu nulles et non avenues les conséquences du Pacte germano-soviétique de 1939, notamment le rattachement de la Transnistrie à son entité politique1. Pourtant peu de temps après, elle l’a revendiquée comme son propre territoire. En juin 1992, le colonel Howard J.T. Steers, officier du Renseignement militaire US et conseiller de l’Alliance atlantique, coordonna une opération militaire pour conquérir la Transnistrie. Pour cela, il ne se contenta pas de la petite armée moldave, il mobilisa l’armée roumaine et de nombreux prisonniers de droit commun roumains.

La Transnistrie était une petite vallée bénéficiant d’un micro-climat qui en avait fait une base secrète du complexe militaro-industriel soviétique. Elle était donc peuplée à la fois de ses habitants originels, mais aussi de nombreuses familles de scientifiques soviétiques. Elle était protégée par une petite base, celle de la 14e armée soviétique. Le président russe, Boris Eltsine, refusa de défendre la Transnistrie comme il refusa l’adhésion de la Crimée à la Fédération de Russie. La 14e armée, désormais russe, plus d’1 millier d’hommes, reçut l’ordre de ne pas intervenir. Mais des milliers de femmes transnistriennes assiégèrent la base militaire. Les soldats russes ne tirèrent pas contre elles, mais désobéirent aux ordres du président Eltsine et les laissèrent entrer. Elles s’emparèrent de 1000 kalachnikov, d’1,5 millions de cartouches et de 1300 grenades. C’est ce peuple en arme qui repoussa l’armée roumaine encadrée par le colonel Steers.

Cette défaite de l’Alliance atlantique n’a jamais été racontée en Europe. Il faut avoir été sur place pour la connaître2. Elle a si fortement frappé ceux qui l’ont vécue que certains ont changé de camp. Ce fut notamment le cas du chef de poste de la CIA, Harold James Nicholson, qui, dans les mois suivants, se mit au service du KGB russe, dont il devint un des plus importants informateurs.

La Transnistrie se dit aujourd’hui la seule héritière de l’Union soviétique dont elle conserve les meilleures pratiques, sans ses aspects autoritaires et bureaucratiques.

Lorsque la Rand Corporation a planifié l’actuelle guerre en Ukraine, elle a briefé les Représentants au Congrès. C’était le 5 septembre 2019. Elle s’est appuyée sur deux rapports3. Elle y explique que l’objectif de l’opération doit être de provoquer la Russie pour qu’elle se déploie au delà de ses frontières, alors qu’elle ne peut déjà pas les défendre. Il faut donc la contraindre à entrer en Ukraine, puis en Transnistrie.

Il faut comprendre ce que fait le Pentagone, non pas en regard de la situation imaginée par les agences de presse occidentales, mais des plans de la Rand Corporation, en l’occurrence une manche supplémentaire autour, non plus de la Novorossia, mais de la Transnistrie.

L’Union européenne organise depuis plusieurs années le blocus de la Transnistrie en s’appuyant sur l’Ukraine et la Moldavie, deux États qui n’ont pas adhéré à l’UE.

Le ministre de la Défense US, le général Lloyd Austin, continue à pressurer ses alliés pour qu’ils cèdent leurs armes et leurs munitions, jusqu’à ce qu’ils soient exsangues (et donc encore plus demandeurs de sa protection). Simultanément, il vient de les contraindre à accepter de modifier le fonctionnement de l’OTAN. Celle-ci peut désormais se transformer en une « coalition de volontaires » pour des opérations hors article 5 (c’est-à-dire ne répondant pas à une agression contre un de ses membres). Cela n’a rien de nouveau. C’était déjà le cas avec l’opération contre la Libye. À l’époque, les membres de l’Alliance qui s’opposaient à cette guerre avaient été tenus à l’écart, tandis que d’autres comme le Qatar, y avaient été associés. Cette fois, l’OTAN agira sans avoir à violer ses propres statuts. Dans la pratique, cela veut dire que le Conseil atlantique a perdu tout pouvoir. Un Allié ne peut plus s’opposer à une entrée en guerre de l’OTAN, puisque les USA utiliseront quand-même les moyens de l’OTAN avec une coalition de volontaires.

La défaite de l’Ukraine, qui a déjà perdu le Donbass et quatre oblasts, ne signifie donc pas la fin de la guerre. Alors que le Kremlin a déjà expliqué qu’il lui restait à libérer Odessa et à effectuer ainsi le lien avec la Transnistrie, l’OTAN peaufine son discours. Il s’agit de créer la confusion entre la Transnistrie (dite « République moldave du Dniestr ») et la Moldavie. Puis de faire accroire que l’Ours russe a envahi cette dernière.

Thierry Meyssan

source : Réseau Voltaire

 

  1. « Declaratia de independenta a Republicii Moldova », Romania libera, 28 août 1991, p.8.
  2. « En 1992, les États-Unis tentèrent d’écraser militairement la Transnistrie », par Thierry Meyssan, Réseau Voltaire, 17 juillet 2007.
  3. Overextending and Unbalancing Russia, James Dobbins, Raphael S. Cohen, Nathan Chandler, Bryan Frederick, Edward Geist, Paul DeLuca, Forrest E. Morgan, Howard J. Shatz, Brent Williams, Rand Corporation, April 2019. Voir aussi les détails du plan dans Extending Russia : Competing from Advantageous Ground, Raphael S. Cohen, Nathan Chandler, Bryan Frederick, Edward Geist, Paul DeLuca, Forrest E. Morgan, Howard J. Shatz & Brent Williams, Rand Corporation, May 25, 2019.

Si Kiev frappe la Crimée, toute l’Ukraine sera en feu

 

par Peter Yermelin - Le 18/02/2023.

Igor Girenko, le secrétaire de presse de l’ambassade de Russie aux États-Unis, a répondu aux remarques de la secrétaire d’État adjointe américaine Victoria Nuland concernant le soutien de Washington aux frappes de Kiev sur des cibles en Crimée.

Selon Girenko, la déclaration de Nuland est venue confirmer l’implication directe de Washington dans le conflit en Ukraine, rapporte RIA Novosti.

« Les remarques d’un haut fonctionnaire du Département d’État, le 16 février, sur le soutien apporté aux forces armées ukrainiennes pour mener des frappes sur la Crimée viennent confirmer clairement la position de la Russie sur l’implication directe des États-Unis dans le conflit », a déclaré Igor Girenko.

Pousser l’Ukraine à attaquer la Crimée est comparable à pousser à une « attaque sur Moscou ou Vladivostok », a déclaré le responsable russe. Selon lui, la position de Washington est une manifestation non déguisée de l’attitude belliqueuse des Etats-Unis à l’égard de la Russie.

M. Girenko a émis l’espoir que la communauté internationale prête attention à celui qui semble être le principal instigateur de la crise en Ukraine.

Le 17 février, Victoria Nuland, lors d’un événement en ligne au Carnegie Center, a déclaré que les bases militaires russes en Crimée étaient des cibles légitimes pour l’Ukraine.

« Ce sont des cibles légitimes. L’Ukraine les frappe et nous la soutenons », a-t-elle déclaré à propos des installations militaires russes en Crimée, a déclaré Victoria Nuland.

Selon elle, il existe des installations militaires massives en Crimée, que la Russie a transformées en points logistiques importants.

La Russie utilisera tous les types d’armes. Aucune restriction

Dmitri Medvedev, vice-président du Conseil de sécurité de la Russie, a déclaré en réponse à ces menaces que la Russie, en cas d’attaques de Kiev sur ses territoires, serait prête à utiliser tous les types d’armes.

« Nous ne nous imposons aucune restriction. En fonction de la nature des menaces, nous sommes prêts à utiliser tous les types d’armes. Conformément à nos documents doctrinaux, notamment les Principes fondamentaux de la dissuasion nucléaire. Je peux vous l’assurer : La réponse sera rapide, dure et convaincante », a déclaré Dmitri Medvedev.

Medvedev a également menacé l’Ukraine de représailles au lieu de négociations si Kiev osait frapper la Crimée.

« Toute l’Ukraine qui reste sous le contrôle de Kiev sera en feu », a-t-il averti.

Maria Zakharova, porte-parole officielle du ministère russe des Affaires étrangères, dans un commentaire aux remarques de Nuland sur la Crimée, a conseillé à Washington de se pencher plutôt sur le problème des ovnis et des ballons blancs.

source : France Pravda

La pénurie de munitions qui devait frapper les Russes menace en fait l’Ukraine

Source : Le Courrier des Stratèges - Par Philippe Migault - Le 14/02/2023.

La pénurie de munitions qui devait frapper les Russes menace en fait l’Ukraine, par Philippe Migault

« Les Russes n’auront bientôt plus de missiles. » Cette sentence, ânonnée depuis des mois par les experts cathodiques et les journalistes n’a cessé d’être démentie à chaque nouvelle frappe russe. Déjouant tous leurs pronostics, c’est aujourd’hui l’Occident qui risque d’être en rupture de stock…


Trépignant derrière son pupitre, Jens Stoltenberg, le Secrétaire général de l’OTAN a tout de l’enfant frustré dans ses désirs. Alors que « l’Alliance militaire la plus puissante de l’histoire » raille depuis des mois les insuffisances du complexe militaro-industriel russe, « très impacté par les sanctions » et au bord de la rupture, c’est elle qui, en définitive, pourrait ne plus être en mesure de fournir suffisamment de munitions à son proxy ukrainien. Face à l’avancée lente mais constante des troupes russes, les Ukrainiens sont contraints de soutenir une cadence de tir infernale s’ils veulent contenir l’adversaire, 5 à 10 000 obus par jour selon les estimations. Or, de l’aveu même de Jens Stoltenberg«la guerre en Ukraine consomme une énorme quantité de munitions et épuise les stocks alliés. Le rythme actuel d’utilisation de munitions par l’Ukraine est beaucoup plus élevé que notre rythme actuel de production. »Une crise se profile donc, alors que les Russes n’ont pas encore engagé le gros de leurs moyens et qu’ils tirent en ce moment vingt-mille obus quotidiennement, soit bien moins que les 50 000 qu’ils ont atteint ponctuellement.

Puissance industrielle : Avantage, Russie

Sur LCI, qui nous annoncé à moult reprises la déconfiture programmée de l’armée russe, faute notamment de munitions, l’alarmisme est de rigueur. Pour une fois les chiffres sont exacts : Les journalistes ne relaient pas des estimations fantaisistes sur une armée russe, dont ils ignorent tout, ils transmettent les données que leur ont donné les armées occidentales (qu’ils ne connaissent guère plus). Les Européens produisent 20 000 obus par mois. Les Américains autant. Ignorance ou autocensure pour ne pas désespérer le bourgeois ? Personne sur le plateau n’ose mettre ces statistiques en perspective avec les estimations occidentales de la production russe, 3,4 millions d’obus par an, 280 000 par mois. Désarroi. « On ne peut pas remettre des lignes de production en place, comme cela, du jour au lendemain », s’inquiète une journaliste.

Eh oui. Les technos chantres de l’ultralibéralisme financier, qui se réjouissaient d’une industrie sans usines, paient aujourd’hui les frais de leur avidité et de leur déconnexion vis-à-vis des réalités de la puissance. Il ne fallait pas délocaliser. Le COVID l’a démontré, face à une crise majeure, une économie est solide lorsqu’elle peut se reposer sur un bon paquet de cols bleus, ses cols blancs étant renvoyés à leur utilité première, la fonction support qui ne produit rien d’autre que du jus de crâne. Les Echos ont publié récemment une carte montrant l’évolution de la part de l’industrie dans le PIB en Europe entre 2000 et 2021. La France est passée de 14 à 9%, l’Allemagne de 21 à 19, l’UE de 18 à 15. En 2021, la part de l’industrie dans le PIB russe a été estimée à 33,16% par Statista.

La brocante occidentale devrait se poursuivre

Alors, sur le plateau, on se rassure comme on peut. Les Américains doivent tripler leur production à court terme dit l’un, ajoutant que nous pourrions acheter des obus chez les Pakistanais… On devrait passer de deux canons Caesar par mois à six sur les chaînes de production de Nexter souligne l’autre. Nexter, d’ailleurs, devrait accroître sa production d’obus grâce à une coopération avec l’Australie en matière de poudre. Haut les cœurs. Et puis, et puis, il reste toujours des vieux stocks…

Et c’est vrai. Un obus, ce n’est pas un missile. Les composants électroniques ne vieillissent pas, la pyrotechnie de la tête de guerre non plus. Livrons nos vieilleries. Sauf qu’il en va des obus comme des chars. Si la quantité y sera, la qualité n’y sera plus. Un Léopard-1 ne vaut pas un Léopard-2. Un vieux pélot de 155, au coefficient d’erreur probable (CEP) de 150 mètres et à la portée réduite d’une vingtaine de kilomètres, ne vaut pas un obus guidé Excalibur ou Bonus frappant à plus de 40 kilomètres avec un CEP de 4 mètres. Nous continuerons à livrer, mais faute de portée et de précision, il faudra beaucoup, beaucoup plus d’obus, pour continuer à infliger les mêmes dégâts aux Russes, tout en exposant davantage les artilleurs aux tirs de contre-batterie…

Bref, la brocante occidentale devrait se poursuivre. Avec des airs d’acharnement thérapeutique.

 

 

On a été piégés par un char ukrainien et exfiltrés par un commando russe

 

Alors que Régis Le Sommier, son fixeur et son cameraman étaient en première ligne au Nord de Bakhmout, un char ukrainien aidé d’un drone les a repéré. Leur équipe a été séparée. L’un réfugié dans deux bunkers successifs, les autres tapis dans un fossé sous une grange pendant que les tirs s’abattaient.

Séquence unique en pleine guerre en Ukraine qui nous permet de mieux appréhender ce que vivent les soldats sur le front.

L’Ukraine n’aura pas d’avions de l’OTAN de sitôt

 

par Valentin Vasilescu - Le 10/02/2023.

 

Les pilotes ukrainiens ne pourront pas participer à des actions de combat avec des avions de l’OTAN avant deux ans, quelles que soient les exigences de Zelinsky pour que l’Occident compresse le temps de préparation des pilotes ukrainiens sur ces avions. La situation serait meilleure si l’Ukraine avait encore des pilotes de première et de deuxième classe sur ses avions de chasse. Ils doivent posséder les compétences de base pour le vol simple de jour et de nuit dans des conditions météorologiques normales et difficiles. Ils doivent également posséder les compétences de base pour effectuer des tirs sur cible aérienne et terrestre ainsi que des bombardements.  Voyons un peu quels sont les pilotes dont dispose encore l’armée de l’air ukrainienne.

Il y a deux semaines, le commandant de la 299ème brigade d’aviation tactique de l’armée de l’air ukrainienne sur la base aérienne de Nikolaev, le major Daniil Murashko, a perdu la vie lors d’une mission de combat avec un avion d’attaque Su-25. A en juger par la photo publiée, le pilote n’a pas plus de 30 ans et porte l’insigne de pilote de classe 3. Ce niveau de formation permet au pilote certifié d’effectuer des missions d’attaque au sol de jour dans des conditions météorologiques normales et difficiles. Le commandant de la brigade aérienne n’exécute une mission de combat que si aucun autre pilote subordonné n’est certifié pour exécuter cette mission (classe de pilote 3) et/ou si la mission est d’une complexité dépassant le niveau de formation des subordonnés.

Nous pouvons tirer plusieurs conclusions.

1.     Le manuel pratique d’entraînement au vol de l’avion Su-25 prévoit quelque 100 heures de vol pour les diplômés des écoles d’aviation militaire dans le cadre du programme de formation des pilotes de jour dans des conditions normales. Et 100 autres heures pour apprendre à voler dans des conditions météorologiques difficiles, ainsi que des exercices de combat. Après avoir effectué des tirs et des bombardements sur une cible au sol, le pilote accède au niveau de 3ème classe et peut effectuer des missions de combat. Environ 5-6 ans après avoir été diplômé de l’école d’officiers d’aviation, le pilote Daniil Murashko avait le niveau 3ème classe. Cela signifie une moyenne de 35 à 40 heures de vol par an, par rapport aux pilotes russes (140 heures/an) et à ceux des forces aériennes relevant de l’OTAN (150 à 180 heures/an).

2.     Si, il y a deux semaines, Daniil Murashko, pilote de 3e classe, était le plus ancien pilote de la 299ème brigade d’aviation tactique, cela signifie que tous les autres pilotes de 1ère et 2ème classe (environ 15 pilotes) ont été abattus et sont morts ou ont été gravement blessés. Par conséquent, les quelque 10 pilotes restants font partie des classes 2021,2020,2019,2018 de l’école d’officiers de l’aviation militaire et sont non classés, c’est-à-dire qu’ils ont volé moins de 35 heures/an. La plupart d’entre eux ne sont pas sortis sans double commande sur des avions Su-25 et pendant 2022, avec la survenue de la guerre, ils n’ont pas volé, car leurs instructeurs exécutaient des missions de combat avec des avions Su-25. La situation est la même pour les pilotes de Su-27, Su-24 et MiG-29. Ces pilotes ont donc acquis les compétences de base au cours des quatre années d’école militaire (30 à 40 heures par an sur des avions L-39) et possèdent les aptitudes médicales nécessaires pour commencer à piloter des avions de combat, y compris ceux de l’OTAN, mais dans le même format de formation que ceux de la promotion 2023 des écoles d’aviation militaire des États de l’OTAN et sur le même type d’avion qu’ils utiliseraient au combat en Ukraine.

3. Il y a aussi des pilotes militaires de 1ère et 2ème classe à l’aviation de transport (AN-24/26, 30, IL-76) ou des hélicoptères. Mais leur sélection a été faite en 2ème année de l’école militaire. Ceux qui étaient médicalement aptes pour le MiG-29, Su-27, Su-24, Su-25 ont volé sur le jet L-39 jusqu’à l’obtention du diplôme, tandis que les autres ont piloté l’avion à hélice ou l’hélicoptère. Par conséquent, les pilotes de transport et d’hélicoptères n’ont pas les aptitudes médicales, ni les compétences de base pour commencer à piloter des avions de chasse, et encore moins directement ceux de l’OTAN.

4. Compte tenu de la situation présentée ci-dessus, les pilotes ukrainiens doivent nécessairement suivre un programme de mise à niveau de leurs compétences de vol, en raison de l’interruption importante accumulée. Ce programme de 50-60 heures de vol doit être effectué sur un avion école subsonique similaire au L-39 et dure au moins 6 mois. Ce n’est qu’ensuite que les pilotes commencent à apprendre la théorie du vol sur des avions de chasse et font au moins 30 heures de simulateur de vol. Ensuite, ils entrent dans la routine du Manuel d’entraînement pratique du vol sur Mirage 2000, F-16 ou autre avion, comme sur le Su-25, soit environ 100 heures de vol pour le programme de formation des pilotes de jour dans des conditions normales. Et 100 heures supplémentaires pour apprendre à voler dans des conditions météorologiques difficiles, ainsi que pour passer par des exercices de combat afin d’être confirmé en service de combat. Le programme théorique, les heures de simulateur et les 200 heures de vol sur Mirage, F-16 ou autre avion, durent 1 an et 6 mois. Ce n’est donc qu’après 2 ans que les pilotes ukrainiens pourront effectuer des missions de combat de jour.

5.     Le porte-parole de l’armée de l’air ukrainienne, Yuri Ignat, affirme que l’Ukraine a besoin de 180 avions de chasse. Si Washington le veut, ils le trouveront. Le problème est que les Ukrainiens n’ont plus que 60 à 70 pilotes non classifiés dans les unités de MiG-29, Su-24, Su-25 et Su-27, qui peuvent passer aux avions de l’OTAN.

6.     La seule option possible dans les délais les plus brefs est l’envoi en Ukraine d’avions de l’OTAN avec des pilotes occidentaux formés sur ces types d’appareils. Cela endommagera définitivement les relations avec la Russie et il pourrait y avoir des surprises..

Valentin Vasilescu

traduction Avic – Réseau International

La coalition des chars de l’OTAN constitue une escalade, mais il ne faut pas exagérer son importance.

Source : The Saker francophone.


Par Andrew Korybko − Le 26 janvier 2023andrew-korybko

Les deux camps devraient s’abstenir de lancer des diatribes qualifiant cette décision de capitale, ou de pétard mouillée : elle n’est ni l’un ni l’autre. Il s’agit véritablement d’une escalade, mais qui n’amènera pas non plus à une victoire « inévitable » de Kiev. Comme l’a récemment affirmé Mikhail Khodaryonok, un expert militaire russe, « le champ de bataille est la seule épreuve de vérité », et chacun va bientôt constater en temps réel comment les événements s’y déroulent.

Une réponse tangible au « Nouveau narratif »

Les pays de l’OTAN ont fini par se mettre d’accord pour constituer une coalition visant à livrer des chars modernes à l’Ukraine, après avoir quelque peu débattu entre eux sur ce développement ; cela constitue la dernière escalade en date de leur guerre par procuration contre la Russie. Les capacités militaires de Kiev finiront par être renforcées jusqu’à un stade où l’Ukraine pourrait disposer d’une meilleure chance de briser la Ligne de Contrôle (LDC) qui est restée gelée en grande partie durant les 6 derniers mois, à quelques exceptions près, à savoir les régions de Kharkov et de Kherson.

L’agenda de cette décision est important : il apporte du crédit à des observations « politiquement incorrectes » sur la véritable dynamique militaro-stratégique de ce conflit que les médias dominants d’Occident — États-Unis en tête, avaient jusqu’ici dissimulée. Avant la mi-janvier, le « récit officiel » annonçait une victoire supposément « inévitable » de Kiev, mais les dirigeants étasunienspolonais, et même quelques uns dans le cercle du pouvoir ukrainien se sont coordonnés pour finalement basculer sur un récit sérieusement préoccupé sur les chances d’une possible défaite de Kiev.

Des instructions passées en arrière-plan

Ce basculement du récit s’est produit au cœur d’une dynamique de déstabilisation de plus en plus forte en Ukraine, caractérisée par les luttes intestines féroces des services de sécurité, que même le média d’État étasunien « Radio Free Europe/Radio Liberty » a reconnu de manière tacite, en donnant la parole au chef du renseignement militaire qui s’en plaignait. Cette intrigue a à son tour catalysé la purge profonde produite par Zelensky parmi les dirigeants militaires, régionaux et de sécurité en début de semaine, au cours d’une opération qui semble avoir consolidé ses pouvoirs, du moins pour le moment.

Les pays de l’OTAN se sont donc sentis suffisamment à l’aise pour constituer la coalition sus-mentionnée, après en avoir débattu au cours du mois écoulé, à présent qu’au sein du régime ukrainien, les opportunistes et les pacifistes ont moins de chances de gêner leurs projets. À ce sujet, il n’est pas facile d’établir le niveau de sincérité du débat mené par l’Allemagne, et la mesure dans laquelle ce débat a pu relever de l’opération de gestion des perceptions gérée par l’État, pour faire bouger les opinions publiques sur ce sujet.

De nouveaux objectifs logistiques et politiques

En tous cas, le résultat est le même : l’OTAN escalade sa guerre par procuration menée par l’Ukraine contre la Russie, au moyen d’une coalition de chars qui pourrait fort bien évoluer rapidement pour envoyer d’autres armements modernes à Kiev, comme des avions de combat et des missiles à longue portée. La raison de cette prédiction est que l’« enlisement » s’est clairement fait sentir, et l’alliance anti-russe se trouve désormais menée à garantir un prétendu « retour sur investissement » sur le terrain, après avoir déjà donné à Kiev plus de 100 milliards de dollars.

La nouvelle coalition assemblée par l’OTAN produit également d’importants objectifs logistiques et politiques, en plus des objectifs militaires évidents. Sur le plan logistique, elle contribue à soulager la pression que l’on connaît sur leurs complexes militaro-industriels en modifiant la nature des armes envoyées à Kiev, au lieu de prendre un risque d’épuiser ses stocks existants, déjà très faibles après ce qui a déjà été envoyé. Sur le plan politique, ce soi-disant « partage de la charge » renforce l’hégémonie des États-Unis récemment réaffirmée sur l’Europe.

Minimiser ce développement

Pour comprendre pourquoi le sens de cette escalade ne doit pas être exagéré, les observateurs devraient commencer par se souvenir que cela se produit précisément au moment où Kiev se fait peu à peu repousser hors du Donbass, après la libération de Soledar par la Russie. Sur le terrain, la dynamique militaro-stratégique a finalement commencé à bouger après l’impasse qui avait en grande partie marqué les 6 mois passés, et ce en faveur de la Russie. C’est de là que vient l’urgence avec laquelle l’OTAN assemble sa coalition de chars.

Pour dire vrai, cela aurait en théorie pu se produire dès le lancement de l’opération spéciale lancée par la Russie, mais le Milliard Doré occidental, États-Unis en tête, était à la fois impréparé à la réaction cinétique de Moscou suite au franchissement des lignes rouges en Ukraine, et continuait de penser pouvoir affaiblir le Kremlin pour pas cher. C’est la raison pour laquelle il s’est contenté de n’envoyer que des équipements obsolètes sorti de ses réserves au cours de l’année passée, au lieu de donner la priorité à l’envoi d’armements modernes comme les chars qui sont sur le point d’être envoyés.

La raison pour laquelle l’OTAN envoie désormais des équipements bien plus chers et bien plus modernes est que la Russie a détruit toutes les armes obsolètes qui avaient déjà été envoyées sur place. Cette observation confirme la puissance de feu russe, car les Russes ont pu procéder à cette destruction en moins de douze mois, tout en maintenant jusqu’à présent le gel de la ligne de contrôle. Puisque politiquement, un cessez-le-feu est hors de question pour cette alliance anti-russe, elle a donc décidé de pratiquer l’escalade.

Le nouveau modèle de guerre par procuration de l’OTAN

L’OTAN ne peut en aucun cas reconnaître les gains pratiqués sur le terrain par la Russie, sur les régions qui constituaient jadis l’Est et le Sud de l’Ukraine, car cela montrerait que la Grande Puissance eurasiatique a pu réussir à survivre à la guerre par procuration sans précédent lancée contre elle. Les conséquences politiques d’une telle reconnaissance exposerait les limites militaires de ce bloc de la Nouvelle Guerre Froide, ce qui réduirait ses chances de pouvoir exporter son nouveau modèle de guerre par procuration ailleurs dans le monde à l’avenir.

Le modèle susdit, créé par l’OTAN au fil des évolutions du conflit présent, est neuf au vu de la manière dont il escompte escalader les dilemmes de sécurité régionaux pour finalement faire pencher la balance en faveur de l’OTAN. Pour résumer ce point, les capacités militaires d’un État plus petit sont rapidement augmentées, avec le soutien du bloc, pour le placer en position de pratiquer un chantage contre son voisin plus fort que lui, après quoi ce dernier est contraint, ou bien de capituler, ou bien de mener une action cinétique au travers de la frontière pour neutraliser la menace.

La première décision déboucherait inévitablement par des contraintes exercées par l’OTAN sur le grand voisin susnommé pour l’amener à accepter une suite sans fin de concessions unilatérales visant en fin de compte à neutraliser son autonomie stratégique, et ainsi le transformer en État vassal. La seconde, déclencherait immédiatement un prompt soutien de l’OTAN à son mandataire, comme cela se produit en Ukraine, pour perpétrer une guerre par procuration sans fin visant à user les capacités militaires du grand voisin, tout en fabricant des prétextes à lui infliger des sanctions.

Le coup puissant porté par la Russie aux projets du mandataire de l’OTAN

La Russie est la cible actuelle du nouveau modèle de guerre par procuration de l’OTAN, mais il faut s’attendre à voir la Chine et l’Iran désignées comme prochaines cibles une fois ce modèle perfectionné (ou du moins ajusté) par la course du conflit en Ukraine, sauf si ces pays capitulent avant cela. Cela étant dit, si ce modèle se trouve discrédité en Ukraine, du fait que la Russie prouverait que le mandataire de l’OTAN ne peut pas défendre le territoire avec le soutien de l’organisation militaire, d’autres acteurs régionaux pourraient refuser de reproduire le rôle de mandataire tenu par Kiev.

Après tout, ils constateraient qu’un tel positionnement les exposerait à perdre beaucoup en prenant part aux complots de guerre fomentés par ce bloc, en lieu et place des gains immenses « inévitables » promis par l’OTAN jusqu’au moment où les membres étasuniens et polonais de l’alliance militaire ont fini par retourner le « récit officiel » de cette guerre par procuration. En outre, d’autres mandataires potentiels voient d’ores et déjà que la Russie a détruit les stocks d’armes obsolètes de l’OTAN précédemment envoyés en Ukraine, ce qui indique que l’alliance en a désormais moins en réserve pour d’autres mandataires.

En l’état, le nouveau modèle de guerre par procuration de l’OTAN a déjà reçu un coup retentissant, la Russie ayant épuisé ses stocks d’armes obsolètes et l’alliance a désormais beaucoup moins à proposer à d’autres pays dans un avenir proche, jusqu’à ce que son complexe militaro-industriel emplisse de nouveau les stocks, ce qui devrait prendre au moins quelques années. Il n’est donc pas acquis que l’envoi par l’alliance d’armes plus modernes produira des différences significatives sur le terrain, la Russie pouvant fort bien les détruire également.

Aperçu précis de la situation de la part de Mikhail Khodaryonok

Il est judicieux à ce stade de faire référence au point de situation qu’a produit récemment Mikhail Khodaryonok dans sa dernière analyse pour Russia Today. Cet expert militaire a affirmé que le nombre probable de chars qui vont être envoyés en Ukraine ne suffira pas à changer sérieusement la dynamique suivant la Ligne de Contrôle, tout en admettant que « Le champ de bataille est le seul test de vérité concernant les avantages et les inconvénients de tout type d’arme ou d’équipement militaire. »

Il a raison sur les deux registres, mais l’analyse stratégique élargie produite au sein de la présente analyse apporte du poids à la conclusion de Khodaryonok, à savoir qu’il ne faut pas exagérer la portée de cette dernière escalade : La Russie a prouvé jusqu’ici qu’elle était en mesure de gérer ce type de développement. Bien sûr, l’introduction d’armes plus modernes dans cette guerre par procuration constitue un nouveau facteur qu’il convient de prendre au sérieux, mais celui-ci aurait été plus significatif s’il s’était produit il y a un an, par rapport à aujourd’hui.

La dernière chance de Kiev

L’agenda de ce développement suggère qu’il s’agit d’un dernier recours désespéré, pour assurer au moins que la Ligne de Contrôle restera gelée alors que la dynamique militaro-stratégique s’est enfin mise à bouger en faveur de la Russie, qui réalise des progrès tangibles dans le Donbass après la libération de Soledar. L’OTAN espère que l’envoi de ces chars changera la donne et permettra à Kiev de renverser cette tendance et de reprendre une partie des territoires revendiqués par elle, mais un tel résultat n’est pas du tout garanti, comme nous l’avons vu.

Si l’envoi de chars plus modernes ne suffit pas à atteindre les objectifs ultimes de l’OTAN et à au moins geler la Ligne de Contrôle, on ne peut pas exclure que l’alliance enverra bientôt des avions de combats plus modernes et des missiles à longue portée, dans sa panique de préserver sa réputation, qui risque d’être dévastée par les succès de la Russie. Les perceptions mondiales vis-à-vis de l’alliance dirigée par les États-Unis s’effondreraient si Moscou poursuivait une progression tangible sur le terrain malgré l’envoi de ces chars modernes en Ukraine.

Conclusion

Le scénario du pire serait que l’OTAN pourrait intervenir formellement dans le conflit (que cela soit de manière multi-latérale, ou seulement en passant par la Pologne) afin d’établir une ligne rouge nette dans le sable quelque part parmi ce qui reste de l’Ukraine, si ses chars, avions et missiles de longue portée plus récents ne suffisent pas à bloquer le rouleau compresseur russe. Il est trop tôt pour prédire de manière fiable l’occurrence de tels événements, mais il est également trop tôt pour les écarter, surtout lorsque l’on examine les calculs militaires, politiques, de soft power et en matière de stratégie.

Comme l’affirme le titre de la présente analyse, la coalition anti-russes de chars constitue bien une escalade, mais il convient de ne pas exagérer sa portée. Les deux camps devraient s’abstenir de lancer des diatribes qualifiant cette décision de capitale, ou de pétard mouillée : elle n’est ni l’un ni l’autre. Il s’agit véritablement d’une escalade, mais qui n’amènera pas non plus à une victoire « inévitable » de Kiev. Comme l’a affirmé Khodaryonok, « le champ de bataille est la seule épreuve de vérité », et chacun va bientôt constater en temps réel comment les événements se déroulent.

Andrew Korybko est un analyste politique étasunien, établi à Moscou, spécialisé dans les relations entre la stratégie étasunienne en Afrique et en Eurasie, les nouvelles Routes de la soie chinoises, et la Guerre hybride.

Traduit par José Martí, relu par Wayan, pour le Saker Francophone

Le New York Times sur l’Ukraine.

Reportage réel, propagande pour l’équilibre, avertissement de mauvais augure.

Source : The Saker francophone -  Par Moon of Alabama – Le 7 février 2023

 

Le New York Times se met dans une situation délicate avec ses reportages actuels sur la guerre en Ukraine.

Les mois derniers, l’Ukraine gagnait la guerre, du moins dans les médias « occidentaux« . Mais cette semaine, l’homme du NYT sur le terrain rapporte le contraire :

En sous effectif et épuisés, les Ukrainiens se préparent à l’assaut russe dans l’Est

 

Les troupes ukrainiennes épuisées se plaignent d’être déjà dépassées en nombre et en armement, avant même que la Russie n’ait engagé le gros de ses quelque 200 000 soldats nouvellement mobilisés. Et les médecins des hôpitaux parlent de pertes en augmentation alors qu’ils s’efforcent de soigner les combattants souffrant de blessures horribles.

Les premières étapes de l’offensive russe ont déjà commencé. Les troupes ukrainiennes affirment que Bakhmut, une ville de l’est de l’Ukraine que les forces russes tentent de saisir depuis l’été, devrait bientôt tomber. Ailleurs, les forces russes avancent par petits groupes et sondent les lignes de front à la recherche des faiblesses ukrainiennes.

Ces efforts mettent à rude épreuve l’armée ukrainienne, qui est épuisée par près de 12 mois de combats intenses.

Les pertes au sein des forces ukrainiennes ont été sévères. Les troupes d’un contingent de volontaires appelé le Sich des Carpates, positionné près de Nevske, ont déclaré qu’une trentaine de combattants de leur groupe étaient morts au cours des dernières semaines, et les soldats ont dit, en partie seulement pour plaisanter, qu’à peu près tout le monde avait une commotion cérébrale.

 » C’est l’hiver et les positions sont ouvertes ; il n’y a nulle part où se cacher « , a déclaré un soldat de l’unité portant le signe d’appel Rusin.

Dans un hôpital de la ligne de front du Donbass, la morgue était remplie de corps de soldats ukrainiens dans des sacs en plastique blancs. Dans un autre hôpital, les couloirs étaient encombrés de civières avec des soldats blessés recouverts de couvertures thermiques en feuille d’or, et un flux constant d’ambulances arrive du front presque toute la journée.

« Nous ne pouvons pas laisser cet article défaitiste se suffire à lui-même », a dû penser le rédacteur en chef, qui s’est tourné vers les idiots des services de renseignements militaires britanniques pour obtenir un certain « équilibre » :

Les forces de Moscou n’avancent que de quelques centaines de mètres par semaine, selon les renseignements britanniques

Alors que la Russie réalise des avancées lentes et sanglantes au cours d’une nouvelle poussée pour s’emparer d’une plus grande partie de l’est de l’Ukraine, elle déverse toujours plus de conscrits et de matériel militaire dans la bataille, selon des responsables ukrainiens, même s’il est loin d’être clair que Moscou puisse mobiliser suffisamment de forces pour soutenir une offensive prolongée.

L’agence de renseignement de la défense britannique a déclaré mardi que la Russie tentait de lancer des « opérations offensives majeures » depuis le début du mois dernier, dans le but de capturer le reste de la région de Donetsk, qui comprend Bakhmut. Mais elle n’a « réussi à gagner que quelques centaines de mètres de territoire par semaine« , en raison d’un manque de munitions et d’unités de manœuvre, a indiqué l’agence dans son dernier bilan quotidien de la guerre.

« Il reste peu probable que la Russie puisse constituer les forces nécessaires pour influer de manière substantielle sur l’issue de la guerre dans les semaines à venir« , conclut l’agence.

On peut se demander à quelle « issue de la guerre » ces gens rêvent.

Les rapports en provenance du terrain ne laissent aucun doute sur qui gagne. Même les pages d’opinion du NYT le reconnaissent maintenant :

Le problème est que l’Ukraine est en train de perdre la guerre. Non pas, pour autant que l’on puisse en juger, parce que ses soldats se battent mal ou que son peuple a perdu courage, mais parce que la guerre s’est transformée en une bataille d’usure du style de la Première Guerre mondiale, avec des tranchées soigneusement creusées et des fronts relativement stables.

De telles guerres ont tendance à être gagnées – comme ce fut le cas lors de la Première Guerre mondiale – par le camp qui dispose des ressources démographiques et industrielles pour tenir le plus longtemps. La Russie a plus de trois fois la population de l’Ukraine, une économie intacte et une technologie militaire supérieure. En même temps, la Russie a ses propres problèmes ; jusqu’à récemment, une pénurie de soldats et la vulnérabilité de ses dépôts d’armes aux frappes de missiles ont ralenti sa progression vers l’ouest. Les deux parties ont des incitations à venir à la table des négociations.

La dernière phrase est fausse. La Russie n’a aucun intérêt à négocier maintenant. Elle ne manque plus de soldats et ses entrepôts de munitions ont été dispersés et camouflés pour les protéger des attaques ukrainiennes avec les HIMARS. La Russie continue à broyer l’armée ukrainienne et est prête à attaquer davantage.

Mais l’article fait ensuite une remarque correcte. Les États-Unis ne permettraient aucune négociation :

L’administration Biden a d’autres plans. Elle parie qu’en fournissant des chars, elle peut améliorer les chances de l’Ukraine de gagner la guerre. Dans un sens, l’idée est d’accélérer l’histoire, des batailles de position de la Première Guerre mondiale aux batailles de mouvement de la Deuxième Guerre mondiale. C’est une stratégie plausible : Il y a 80 ans, les chars d’Hitler et de Staline ont révolutionné la guerre, non loin du territoire sur lequel on se bat aujourd’hui.

Mais la stratégie Biden a un mauvais nom : l’escalade.

Avec qui la Russie est-elle en guerre – l’Ukraine ou les États-Unis ? La Russie a déclenché la guerre entre la Russie et l’Ukraine. Mais qui a commencé la guerre entre la Russie et les États-Unis ?

De nombreux Américains ne peuvent s’empêcher de décrire M. Poutine comme un « barbare » et son invasion de l’Ukraine comme une « guerre d’agression« . Pour leur part, les Russes affirment qu’il s’agit d’une guerre dans laquelle la Russie se bat pour sa survie et contre les États-Unis dans un ordre mondial injuste dans lequel les États-Unis jouissent de privilèges non mérités.

N’oublions pas que, quelles que soient les valeurs que chaque camp peut y apporter, cette guerre n’est pas au fond un conflit de valeurs. Il s’agit d’une guerre interétatique classique pour le territoire et le pouvoir, qui se déroule à la frontière entre des empires. Dans cette confrontation, M. Poutine et sa Russie ont moins de possibilités de faire marche arrière que les responsables politiques américains ne semblent le réaliser, et plus d’incitations à suivre les États-Unis jusqu’au bout de l’escalade.

C’est effectivement le cas. La Russie ne veut pas d’escalade. Mais si les États-Unis s’engagent dans une escalade, la Russie le fera aussi.

Moon of Alabama

Traduit par Wayan, relu par Hervé, pour le Saker Francophone

 

"Frappez comme la foudre" : La "maskirovka", art de la guerre russe

Source : Le Cri des peuiples - par William Schryver

Bataille de Koursk 1943

 « Que vos plans soient sombres et impénétrables comme la nuit, et quand vous vous lancez, frappez comme la foudre. » 

Sun Tzu, L’art de la guerre.

Source : imetatronink.substack.com, le 14 septembre 2022

Traduction : lecridespeuples.fr

Note : la situation sur le terrain a évolué depuis septembre, mais les fondamentaux présentés dans cet article restent valables. Personne ne connaît les objectifs stratégiques de la Russie en Ukraine, la date et le lieu de la « grande offensive » à venir, ni même ses prochains mouvements tactiques, tout cela ne faisant que l’objet de spéculations : ce « brouillard de guerre » délibérément maintenu est une marque de fabrique de la Russie.

Il y a soixante-dix-neuf ans, ce qui fut sans doute la plus grande bataille de la Seconde Guerre mondiale s’est déroulée à peu près dans la même région où des batailles se déroulent à nouveau aujourd’hui.

Sur un large front situé dans l’est de l’Ukraine et le sud-ouest de la Russie, s’étendant de Briansk au nord à Izyum au sud, les forces allemandes et soviétiques se sont affrontées au cours de l’été 1943, avec un renflement important des lignes dans la région de Koursk. C’est ce renflement qui a été ciblé par les commandants allemands pour être enveloppé et détruit.

La campagne a commencé la première semaine de juillet par une contre-offensive allemande massive, qui s’est poursuivie pendant plusieurs semaines. Plusieurs centaines de milliers de soldats et des milliers de chars et de véhicules blindés y ont pris part, avec des manœuvres et contre-manœuvres massives dans un paysage étendu de forêts, de champs et de collines.

Beaucoup de choses ont été et pourraient être écrites sur la conduite de cette bataille, mais cet essai se concentrera sur un aspect sans précédent de la campagne : il s’agit de la première bataille dans laquelle les concepts soviétiques de maskirovka ont été agressivement incorporés à chaque étape de la planification et de l’exécution de leurs opérations.

Maskirovka est un mot russe qui signifie littéralement « masquage » ou » déguisement », mais dans le contexte de la doctrine militaire russe, il englobe un large éventail d’actions destinées à tromper l’ennemi sur ses forces, ses faiblesses, la disposition de ses forces et ses intentions.

Dans sa plus simple expression, elle fait écho au célèbre dicton de L’art de la guerre de Sun Tzu :

« Toute guerre est basée sur la tromperie. Ainsi, lorsque nous sommes en mesure d’attaquer, nous devons en paraître incapables ; lorsque nous utilisons nos forces, nous devons paraître inactifs ; lorsque nous sommes proches, nous devons faire croire à l’ennemi que nous sommes loin ; lorsque nous sommes loin, nous devons lui faire croire que nous sommes proches. »

Au cours de l’été 1943, l’armée soviétique était la force la plus puissante par rapport à la Wehrmacht. Pour cette raison, Staline presse ses généraux de passer à l’offensive. Mais les commandants soviétiques, conscients des préparatifs allemands pour une vaste contre-offensive, s’opposent à cette stratégie. Le 8 avril 1943, le commandant général Georgy Zhukov écrivit à Staline :

« Je considère qu’il n’est pas opportun pour nos troupes de lancer une offensive préventive dans un avenir proche. Il serait préférable pour nous d’user l’ennemi sur nos défenses, de neutraliser ses chars, de faire venir des réserves fraîches et d’achever son principal groupement par une offensive générale. »

Glantz, David M., La tromperie militaire soviétique pendant la Seconde Guerre mondiale, p. 148.

Les principaux commandants soviétiques se précipitent à Moscou pour plaider leur cause auprès de Staline lors d’une réunion le 12 avril. Le général Shtemenko, 1er adjoint du département des opérations, a écrit plus tard :

« En fin de compte, il a été décidé de concentrer nos forces principales dans la région de Koursk, de saigner les forces ennemies ici dans une opération défensive, puis de passer à l’offensive et de parvenir à leur destruction complète. »

Ibid, p. 148.

L’astuce allait consister à rassembler et à dissimuler les forces de la contre-attaque envisagée dans le cadre des préparatifs défensifs de l’ensemble du front — pour donner aux Allemands l’impression qu’ils avaient été considérablement affaiblis et qu’ils adoptaient donc une position purement défensive jusqu’à ce que leur potentiel offensif puisse être reconstitué.

N’oubliez pas que, jusqu’à ce stade de la guerre, les Soviétiques n’avaient jamais entrepris d’offensive d’été et que, par conséquent, leur passage apparent à la défensive à l’été 1943 était tout à fait conforme aux pratiques antérieures.

Leur emploi de la maskirovka serait de la plus haute importance dans leurs préparatifs.

« … les états-majors préparaient des plans détaillés de maskirovka qui comprenaient la dissimulation des préparatifs, la création de fausses concentrations de troupes, la simulation de faux réseaux radio et de faux centres de communication, la construction de fausses installations aériennes et de faux avions, et la diffusion de fausses rumeurs le long du front et dans la zone arrière ennemie. Ces plans mettaient l’accent sur les mouvements secrets des réserves, les préparatifs cachés des contre-attaques et des contre-frappes, et les emplacements dissimulés des postes de commandement et des sites de communication.

Pour tromper l’importante reconnaissance aérienne allemande, les commandants de l’armée ont établi 15 faux terrains d’aviation, avec des maquettes d’avions, de pistes, de tours de contrôle et d’abris pour avions, et ont installé de nombreuses maquettes de chars pour simuler des zones de rassemblement de blindés. Les avions allemands ont répondu en bombardant neuf fois ces faux terrains d’aviation. »

Ibid, p. 152.

Le lieutenant général I.S. Konev a décrit la situation :

« L’ennemi pensait que nous nous préparions uniquement à une bataille défensive. Possédant un nombre énorme de chars et de canons d’un nouveau type, les Allemands espéraient qu’il était impossible de les arrêter.

Ainsi, comme l’ennemi se préparait, nous nous préparions. L’essentiel n’était pas de dissimuler le fait de nos préparatifs, mais plutôt la force et les moyens, le concept de la bataille, le moment de notre contre-offensive et la nature de notre défense. C’était très probablement la seule occasion sans précédent dans l’histoire militaire, où le côté fort, ayant les capacités pour une action offensive, est passé à la défense. »

Ibid, p. 154, c’est nous qui soulignons.

Avancée des chars et des troupes allemandes près de Koursk, 1943

Outre le masquage des préparatifs et des concentrations de forces, une fois la bataille commencée, les Soviétiques employèrent d’importants mouvements offensifs dans d’autres zones du front pour détourner les forces allemandes de la cible principale de la grande contre-offensive soviétique :

« L’absence de tout détachement conséquent de ces forces de panzers conditionnerait pratiquement le succès soviétique. La solution soviétique consistait à attirer ces unités vers d’autres secteurs du front. L’expérience a montré que les simulations ou les simples feintes ne pouvaient pas servir cet objectif. Ce qu’il fallait, c’était des préparatifs d’offensive à grande échelle, si nécessaire au vu et au su des services de renseignements allemands, et des offensives suffisamment puissantes et crédibles pour attirer et immobiliser les réserves opérationnelles allemandes jusqu’à ce que les dommages nécessaires soient causés dans le secteur stratégique clé… »

Ibid, p. 174.

Et quel était ce « secteur stratégique clé » ? Eh bien, dans un exemple de rime historique, la grande bataille blindée qui s’est déroulée dans les environs de Koursk s’est développée comme une diversion par rapport à l’objectif soviétique principal : vaincre et déplacer le principal centre de pouvoir allemand dans et autour de Kharkov.

« La surprise était essentielle pour que les forces soviétiques puissent remporter la victoire autour de Belgorod et Kharkov, et la surprise devait être un produit de la maskirovka. Les Soviétiques ont appliqué la maskirovka sous toutes ses formes pour tromper les Allemands sur le moment, la force, la forme et l’emplacement de la principale contre-attaque soviétique. »

Ibid, p. 174.

Chars et troupes soviétiques à Koursk, 1943

Une description complète de la maskirovka élaborée utilisée lors de la bataille de Koursk dépasse le cadre de cet article. Je voulais simplement présenter et développer certains de ses aspects fondamentaux afin de suggérer des parallèles possibles entre ce qui a été fait à l’époque et ce qui se passe actuellement en Ukraine.

Les partisans de l’Ukraine se sont réjouis et les partisans de la Russie se sont lamentés sur le fait que les forces russes avaient été « surprises » et « humiliées » par la récente contre-offensive ukrainienne près de Kharkov.

Permettez-moi donc d’être parfaitement clair : l’idée que le haut commandement russe n’a rien vu venir est, à mon avis, tout à fait absurde.

Ils ont observé ses préparatifs pendant de nombreuses semaines. Ils savaient qu’une grande partie du matériel fourni par l’OTAN et expédié en Ukraine depuis le printemps n’était pas encore utilisé au combat, mais avait été détourné et accumulé pour fournir l’ossature de la puissance de feu d’une éventuelle contre-attaque.

Ils savaient également qu’un nombre important de soldats professionnels ukrainiens avait été retiré des lignes de front pour former le noyau de cette attaque, et qu’ils étaient complétés par une infusion significative de « volontaires étrangers ».

Ils savaient que la crème des milliers de nouveaux conscrits ukrainiens avait été envoyée en Pologne et en Grande-Bretagne pour une formation rapide selon les normes de l’OTAN.

Ils savaient que les commandants de l’OTAN avaient effectivement pris le commandement opérationnel de cette force et qu’ils décidaient du moment et de l’endroit où elle serait déployée.

Et ils ont dû en déduire, puisque cette force n’était pas présente dans la région de Kherson pour la contre-attaque limitée qui s’y est déroulée au début du mois d’août, que les opérations dans le sud étaient très probablement une diversion par rapport à l’objectif principal, qui se situait dans la région de Kharkov.

En effet, à mesure que la véritable nature des événements des deux dernières semaines devient plus claire, je suis maintenant persuadé que les Russes ont agi délibérément pour attirer les commandants de l’OTAN de cette force ukrainienne reconstituée en leur offrant quelques fruits à portée de main pour qu’ils puissent saigner leur armée non testée.

Plus important encore, du point de vue russe, le fait de proposer aux commandants de l’OTAN une tentation à laquelle ils ne pourraient pas résister attirerait cette nouvelle armée sur le champ de bataille ouvert où elle pourrait être isolée et finalement détruite.

C’est pourquoi les Russes ont commencé, il y a plusieurs semaines, à retirer toutes leurs forces, à l’exception d’une force symbolique, de la zone contenant les villes de Balakliya, Kupyansk et Izyum, offrant ainsi aux commandants de cette force formée, équipée et dirigée par l’OTAN une occasion irrésistible de démontrer, comme ils l’imaginent, la supériorité de la guerre interarmes occidentale.

L’attaque qui a suivi a remporté un succès apparemment extraordinaire contre la poignée relative de milices du Donbass et de troupes de Rosgvardia restées pour défendre Balakliya et Kupyansk. Les Ukrainiens et leurs troupes de choc composées de « volontaires étrangers » ont progressé sans rencontrer d’opposition et ont occupé une partie assez importante du territoire qui s’étend jusqu’à la rivière Oskol.

Relativement peu de combats soldat contre soldat ont eu lieu. En fait, les rapports ukrainiens ont euphoriquement vanté le fait que l’avance ukrainienne ne pouvait même pas suivre la vitesse de la retraite russe !

La « victoire glorieuse » de cette quasi-armée de l’OTAN a, du moins pour l’instant, lancé le récit médiatique occidental dans un spasme de triomphalisme sans précédent.

Des rapports délirants faisant état de centaines de chars abandonnés, de milliers de victimes et de dizaines de milliers de soldats russes capturés circulent largement, et sont volontiers crus par ceux dont les préjugés rendent ces fausses nouvelles agréables.

Les marionnettes des groupes de réflexion occidentaux et les généraux à la retraite passent d’un studio d’information à l’autre en débitant des absurdités fantastiques sur la libération du Donbass, puis de la Crimée, suivie du renversement de Poutine et de sa traduction devant un tribunal de La Haye.

Et comme si cela ne suffisait pas, beaucoup ont même commencé à discuter ouvertement de l’éternel rêve occidental de démanteler complètement la Russie, de la découper en une douzaine ou plus de petites républiques qui s’aligneront ensuite docilement sur le reste de « l’ordre mondial fondé sur des règles ».

Tout cela est d’une insanité à couper le souffle.

Peu de gens semblent être conscients que l’armée triomphante qui s’est avancée dans le vide de pouvoir que les Russes ont créé pour eux a été continuellement ravagée par des tirs d’artillerie à longue portée et des frappes aériennes, qui ont déjà infligé près de 20% de pertes à cette force relativement exposée.

Peu de gens semblent se rendre compte que le rythme de l’avance initialement rapide s’est maintenant effectivement arrêté, coincé entre la rivière Oskol à l’est et le Seversky-Donets au sud, et qu’il s’est avéré incapable d’obtenir un succès appréciable contre les concentrations de forces russes qu’il rencontre maintenant de l’autre côté de ces rivières.

Et personne ne semble poser la question la plus pertinente : Quel sera le prochain mouvement des Russes ?

Il semble y avoir une idée répandue selon laquelle cette apparente « victoire » sur le champ de bataille a été si humiliante que les Russes ont été ruinés, psychologiquement brisés, qu’ils ne sont plus capables de mener des opérations, qu’ils ne sont plus qu’une foule battue et tremblante d’ « orcs » effrayés attendant nerveusement le prochain train qui les ramènera d’où ils viennent.

Ceux qui applaudissent le défilé de la victoire dans les rues de Kiev, Londres et Washington semblent avoir oublié que l’ « opération militaire spéciale » de la Russie n’a utilisé jusqu’à présent qu’une fraction mineure de sa capacité militaire et que l’objectif de la Russie, depuis le début, n’a pas été de conquérir un territoire, en soi, mais de détruire complètement les capacités militaires ukrainiennes.

Je crois que les partisans de l’Ukraine se livrent à une orgie d’exultation prématurée.

Je suis persuadé que les événements des dernières semaines ont été largement orchestrés en fonction des objectifs ultimes de la Russie.

Je suis convaincu que les Russes restent maîtres dans l’art de la maskirovka et que les maîtres actuels de l’empire à Washington, Londres et Bruxelles, tout comme leurs prédécesseurs, sous-estiment considérablement la perspicacité stratégique, les capacités opérationnelles et l’implacable résilience de la Russie.

Même si les commandants de l’OTAN à Kiev font tinter des flûtes à champagne remplies à ras bord de Dom Pérignon volé et se félicitent mutuellement d’un plan brillamment conçu et exécuté par des experts, je suis convaincu que l’autre chaussure finira par tomber — et quand elle tombera, je m’attends à ce qu’elle tombe comme la foudre.

 

Voir notre dossier sur la situation en Ukraine.

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Scholz et le conflit en Ukraine : De l’hypocrisie à la cobelligérance

 

par Karine Bechet-Golovko - Le 07/02/2023.

Les pays de l’Axe atlantiste fournissent des armes de plus en plus puissantes à l’Ukraine, renforçant logiquement les risques d’une fuite en avant du conflit et d’une confrontation directe avec la Russie. Dans le rôle du pompier-pyromane, le Chancelier allemand Scholz vient de déclarer, que les armes occidentales ne serviront pas à frapper le territoire russe. Ah, et à quoi servent-elles jusqu’à présent ? Le problème est que la conception du « territoire russe » diffère sérieusement entre les pays atlantistes et le droit russe en vigueur. Donc, si l’on arrête l’hypocrisie, les armes occidentales frappent bien le sol russe, ce qui met nos pays en situation de cobelligérance, par la responsabilité de ces élites européennes totalement asservies. 

La Grande-Bretagne, l’Allemagne et les États-Unis vont fournir des chars modernes à l’Ukraine, sans oublier les roquettes américaines d’une portée de 150 km. Afin de se rassurer et de rassurer le bon peuple, qui commence à s’inquiéter un peu – soutenir l’Ukraine dans son fauteuil, c’est bien, mais pas s’il faut prendre des risques personnels quand même – Scholz affirme qu’un accord a été formellement trouvé avec l’Ukraine, qui n’utilisera pas les armes atlantistes contre le sol russe.

Bref, ils fournissent des armes, qui ne doivent pas servir ?

D’une manière générale, l’on peut se demander où elles tirent, ces armes occidentales, depuis le début du conflit ? … Les régions de Donetsk et de Lougansk sont sous le feu, je ne parle même pas des tirs sur les régions de Koursk ou Belgorod, ou des aéroports militaires russes touchés en profondeur, ni des violents combats dans les régions de Kherson ou de Zaporojie. Donc, les armes atlantistes sont bien utilisées sur le sol russe. Car même si l’Occident ne reconnaît pas l’appartenance de ces territoires à la Russie, du point de vue du droit russe, ces territoires font partie de la Fédération de Russie. Et tant que le monde global n’a pas définitivement pris le pouvoir, la détermination du territoire national ne dépend pas de la bonne volonté internationale, mais de la volonté des habitants et des procédures légales nationales.

Donc, les pays de l’Axe atlantistes sont déjà en situation de cobelligérance. Simplement, pour l’instant, la Russie n’en tire pas les conséquences logiques, pour éviter une confrontation directe. Pour l’instant.

Maintenant, revenons sur l’autre aspect des déclarations de Scholz, à savoir cet accord soit disant passé avec Zelensky. Deux remarques. 

Il semblerait que l’Ukraine, hors Zelensly, ne soit pas au courant, car au moment même des déclarations bisounours allemandes, au Parlement ukrainien, des voix se font de plus en plus forte pour critiquer cette limitation et appellent à toucher le centre de commandement à Moscou.

Par ailleurs, il semblerait que le Pentagone se moque éperdument des accords farfelus passés entre ses marionnettes. Les roquettes à longue portée, selon le Pentagone, donnent plus de possibilités à l’Ukraine pour reprendre ses territoires. Il laisse à leur appréciation la question des tirs sur la Crimée. En Russie, la réponse a été claire : si la Crimée est touchée, la réponse sera fulgurante. Par ailleurs, si une de ces roquettes américaines arrive en Crimée, cela sera considéré comme une déclaration de guerre des États-Unis contre la Russie.

Pendant ce temps-là, nos tristes marionnettes européennes continuent à entraîner nos pays dans un conflit mondial conventionnel, pour sauver les intérêts atlantistes dans le monde. Quel est le rapport avec les intérêts des pays d’Europe ? Aucun. Mais qui cela intéresse-t-il, à part les populations, qui en paient le prix … comme toujours.

PS : Il n’est pas toujours nécessaire de faire un grand pas en avant, lorsque le pays est au bord du gouffre…

Karine Bechet-Golovko

source : Russie Politics

Guerre d’Ukraine – Jour 345

Le ratio des morts au combat Russie/Ukraine estimé à 1/8

Source : Le Courrier des Stratèges - par Edouard Husson - Le 06/02/2023.

 

Une offensive russe majeure – finale? – est annoncée pour la deuxième quinzaine de février. Dans les coulisses – loin des médias qui servent à donner le change – elle terrifie les Etats-majors de l’OTAN. Sur le terrain, en effet l’armée russe, « grignote » lentement mais sûrement le terrain. Le terrain perdu à Liman cet automne est en passe d’être reconquis. La chute de Bakhmout Artiomovsk est une question de jours. Les forteresses de la région de Donetsk sont progressivement démantelées. Plus au sud, les Ukrainiens ne sont pas allés au-delà de quelques opérations de reconnaissances pour tenter de franchir le Dniepr dans la région de Kherson. Autant dire que l’armée russe entamerait une offensive en position de force. Pour autant, la gouvernance occidentale, sans pilote du fait des capacités physiques réduites de Joe Biden, n’est pas prête à entamer des négociations. On fait le constat d’une guerre perdue par l’Ukraine mais on n’est pas capable d’entamer une négociation.

 

 

 

La Bataille d’Ukraine

Point au 6 février 2023

Lu sur southfront.org : « Sur les fronts du Donbass, l’encerclement des garnisons ukrainiennes de Bakhmout (Artiomovsk) et d’Ougledar se poursuit. (…)Le 3 février, les responsables de la RPD ont confirmé que l’artillerie russe contrôlait totalement les routes menant à Bakhmout. Les troupes russes sont sur le point de prendre la ville dans un encerclement opérationnel. Les troupes russes continuent d’enfoncer les lignes défensives ukrainiennes près de Krasnoye et Stupochki, situées à la périphérie sud-ouest de la ville. La poursuite de leur progression permettra d’établir un contrôle total sur la route de Chasov Yar et de menacer de destruction l’ensemble de la garnison ukrainienne de Bakhmut.

Les médias occidentaux reconnaissent le caractère inévitable de la défaite des militaires ukrainiens dans la ville. De hauts responsables militaires américains déclarent que l’Ukraine devra très probablement retirer de la ville ses militaires afin de refaire ses forces pour la phase active des hostilités au printemps. Washington conseille aux forces ukrainiennes de gagner du temps jusqu’à ce qu’elles reçoivent davantage d’armes occidentales.Cependant, le commandement de l’armée ukrainienne ne semble pas disposé à sauver la vie de ses combattants et continue d’envoyer des réserves dans la ville, qui risque d’être bientôt encerclée.

En fait, Bakhmout est un important centre de transport pour l’approvisionnement du groupe de troupes ukrainiennes dans le Donbass. La perte de la ville entraînera la destruction de la ligne de défense stratégique ukrainienne Seversk-Soledar-Bakhmout. Les Russes s’approchent déjà de Seversk par le sud, l’est et le nord. Le 2 février, le service de presse du PMC Wagner a annoncé qu’il contrôlait le village de Nikolaevka. La veille, le village de Sacco et Vanzetti est passé sous contrôle russe. Après la bataille de Bakhmout, la ville de Seversk sera encerclée par les forces russes libérées.

Le commandement ukrainien sera contraint de se replier sur une nouvelle ligne de défense, qui se situe le long de la ligne Slavyansk-Kramatorsk-Konstantinovka, située à plus de 30 kilomètres à l’ouest. La situation sur le front d’Ougledar reste également tendue. De lourdes batailles de position et des duels d’artillerie se poursuivent. Le 3 février, les responsables de la République Populaire de Donetsk ont déclaré que la ville d’Ugledar avait été prise en demi-cercle par l’est et le sud-est.

À en juger par les directions de l’avancée russe dans le Donbass, ils encerclent l’armée ukrainienne à un niveau stratégique. En avançant du nord et du sud, les Russes tentent de prendre en tenaille l’ensemble du groupement ukrainien dans le Donbass et de le détruire ».

A Washington on doute:

Lucas Leiroz explique sur infobrics;

« Apparemment, même les responsables américains ne croient pas au projet de Kiev de s’emparer de la Crimée russe. Selon un rapport récent d’un grand média occidental, de hauts responsables américains doutent que le régime de Kiev parvienne à rétablir les frontières ukrainiennes d’avant 2014. En fait, l’affaire révèle comment il devient de plus en plus difficile de dissimuler la réalité indiscutable que la Russie est en train de gagner le conflit.

L’information a été donnée à Politico par des sources à l’intérieur du scénario politique américain. D’après ce qui a été rapporté, les législateurs de la commission des services armés de la Chambre des représentants des États-Unis auraient entendu l’avis de certains responsables du ministère de la défense américain lors d’une récente réunion conjointe. Il n’existe pas de liste publique des noms des membres du Pentagone qui auraient participé à cette réunion. Cependant, il a été informé que parmi eux se trouvaient Laura Cooper, secrétaire adjointe à la défense pour la Russie, l’Ukraine et l’Eurasie, et le lieutenant-général Douglas Sims, directeur des opérations pour les chefs d’état-major interarmées. Cela montre la pertinence de l’événement, compte tenu des hautes fonctions des participants.

Quatre personnes qui étaient présentes à la réunion ont raconté les détails de l’événement à Politico. Comme prévu, les sources sont restées anonymes. Selon elles, les responsables du Pentagone ont déclaré que l’Ukraine n’est pas capable d’expulser les troupes russes de toutes les régions déjà intégrées à la Fédération. Les consultants ont insisté sur le fait que tout retrait russe de Crimée est improbable, compte tenu du scénario militaire actuel du conflit qui, au moins à court/moyen terme, pourrait ne pas évoluer en faveur des Ukrainiens. Les consultants ont également déclaré qu’ils pensaient que si les forces ukrainiennes lançaient une opération pour reprendre la Crimée, le risque de défaite serait élevé et le succès ne serait pas garanti« .

Unn journal turc titre sur les pertes russes et ukrainiennes, à partir de chiffres livrés par le Mossad.

Des chiffres plausibles des pertes et destructions matérielles chez les deux belligérants

Le média turc Hürseda Haber, citant des estimations des services de renseignement israéliens, a publié des chiffres sur les pertes des deux côtés lors du conflit ukrainien :

Armée ukrainienne, sur un total de 734 000 soldats engagés :
– 157 000 morts
– 234 000 blessés
– 17 230 prisonniers
– 212 hélicoptères
– 302 avions
– 6 320 chars et véhicules blindés
– 7 360 pièces d’artillerie
– 497 systèmes de defenses anti-aérienne

Armée russe, sur un total de 418 000 soldats engagés :
– 18 480 morts
– 44 500 blessés
– 323 prisonniers
– 56 hélicoptères
– 23 avions
– 889 chars et véhicules blindés
– 427 pièces d’artillerie
– 12 systèmes de defenses anti-aérienne

Ces chiffres sont non seulement intéressants et plausibles pour qui a suivi le conflit quotidiennement à partir d’un éventail large de sources russes et ukrainiennes.

Mais il est significatif qu’ils soient publiés au moment où l’Ukraine fait pression sur l’Etat d’Israël pour que le gouvernement Netanyahou sorte de sa neutralité de fait dans le conflit. Les dirigeants israéliens n’ont pas l’intention de se laisser mettre sous pression par les Ukrainiens ni par les Américains.

Dans le même esprit, des informations sont sorties sur la médiation israélienne du mois de mars dernier. Selon l’ancien Premier ministre Bennett, la Russie aurait été prête, fin mars, à accepter que l’Etat ukrainien garde une armée et l’Ukraine renonçait à faire partie de l’OTAN. Sans préjuger de la chance que la médiation israélienne aurait eu d’aboutir, on remarquera que tous les canaux de négociation (processus d’Istanbul, médiation, moins connue, demandée par les Ukrainiens à l’ancien Chancelier Schröder) ont été brutalment fermés, du côté ukrainien, sous pression américaine, fin mars 2022.

Les historiens jugeront les conséquences de la politique occidentale : Un reportage effectué à Bakhmout arrive à la conclusion que les actuelles recrues ukrainiennes, insuffisamment entraînées, ont en moyenne 4 heures devant elles avant d'être blessées ou tuées. Cela n’empêche pas le gouvernement ukrainien de chercher frénétiquement à enrôler, jusque parmi les Ukrainiens partis à l’étranger.

Vers une offensive russe dans la seconde moitié de février ?

 

Une offensive militaire majeure est attendue en février par de nombreux observateurs. Lucas Leiroz fait une synthèse brillante, dans infobrics:

« Une nouvelle vague d’activité est attendue pour l’opération militaire spéciale russe au cours du mois de février. Les récents changements dans le commandement de l’opération semblent avoir été soigneusement planifiés afin d’élever le combat à un nouveau niveau et plusieurs des objectifs stratégiques de Moscou pourraient bientôt être atteints, changeant radicalement le cours du conflit.

Selon les informations fournies par les militaires russes, une offensive majeure est en préparation pour la période comprise entre février et début mars. Les informateurs affirment que les objectifs seront les suivants :

- Atteindre les frontières des régions récemment réintégrées dans la Fédération de Russie, pacifier les nouveaux oblasts ;
- Capturer Nikolaev, Odessa, ainsi que toute la côte de la mer Noire, atteindre la Transnistrie ;
s’emparer de Kiev, forçant une capitulation politique du régime [de Kiev] jusqu’au début du mois de mars.


Le territoire du Belarus deviendra le principal tremplin de la grève à venir. Les militaires russes mobilisés sont formés dans des camps d’entraînement en Biélorussie, où sont concentrés des équipements militaires lourds et des avions de combat. Une importante force de bombardement est prête à intervenir. En outre, les forces russes en Biélorussie ont recueilli des informations stratégiques sur l’emplacement des unités ukrainiennes, principalement sur la défense aérienne de Kiev, rassemblant ainsi des données de renseignement qui seront utilisées pour planifier les attaques.

Parallèlement à la Biélorussie, Zaporozhye et Lugansk sont également des zones clés pour la stratégie russe. On s’attend à ce que des attaques massives proviennent de ces régions pendant l’offensive, détruisant les unités ennemies en un court laps de temps, ce qui permettra une avancée rapide de la Russie sur le champ de bataille, atteignant les zones énumérées dans les objectifs susmentionnés.

Les sources rapportent également que pour que l’offensive soit un succès, les forces russes s’attacheront à bloquer toutes les lignes d’approvisionnement de l’ennemi. La principale voie d’arrivée des fournitures en Ukraine est la frontière avec la Pologne, où transitent les munitions et les équipements militaires de l’OTAN.

En fait, les conditions du champ de bataille semblent favorables à la réalisation de ces objectifs. Les forces ukrainiennes sont actuellement épuisées et faibles. En revanche, les soldats russes mobilisés sont tout à fait prêts à s’engager dans des combats de haute intensité. En outre, les positions d’artillerie russes en Biélorussie et dans les territoires libérés bénéficient d’un emplacement privilégié, ce qui augmente considérablement les chances de victoire lors de l’offensive à venir.

Valery Gerasimov, chef d’état-major général des forces armées russes, a été promu au poste de commandant des forces conjointes de la Fédération de Russie dans la zone d’opérations militaires spéciales. L’arrivée au pouvoir de Gerasimov semble marquer le passage à la phase finale de l’opération militaire spéciale.

Son prédécesseur, le général Sourovikine, a joué un rôle important lorsqu’il était aux commandes. Vétéran de la Tchétchénie et de la Syrie et doté d’une grande expérience dans le domaine du contre-terrorisme, Sourovikine a été nommé à ce poste à un moment où les actions terroristes ukrainiennes étaient en hausse. Il a atteint l’objectif de neutraliser le potentiel offensif de l’ennemi par ses actions énergiques sur les infrastructures critiques ukrainiennes, tout en sauvant des milliers de vies russes grâce à sa politique consistant à éviter la guerre de tranchées et à privilégier les bombardements à longue distance. Aujourd’hui, cependant, l’opération militaire spéciale a besoin d’une nouvelle direction.

Et c’est la principale raison de la nomination de Valery Gerasimov. En tant que chef d’état-major général des forces armées russes, il est sans aucun doute l’officier russe le plus prestigieux et donc l’homme idéal pour diriger les mouvements les plus décisifs de l’opération. L’objectif n’est plus de briser le potentiel offensif de l’ennemi, mais de contraindre le régime néonazi de Kiev à capituler par une offensive de grande envergure.

Evidemment, on est toujours dubitatif face à de telles affirmations. Pourquoi l’Etat-major russe annoncerait-il son plan à l’avance.? Mais les objectifs annoncés correspondent à la carte que l’on a vu se dessiner dans les interventions des dirigeants russes depuis presque un an. Et la possibilité d’une telle offensive explique aussi la fébrilité à Washington.

Soutien de la Chine à la Russie : https://c4ads.org/reports/trade-secrets/

Bhadrakumar analyse le grand basculement géopolitique

M.K. Bhadrakumar, ancien directeur du Ministère indien des Affaires étrangères

Les Etats-Unis voient progressivement l’Asie centrale et l’Asie du Sud leur échapper

(Encore une magistrale leçon de Bhadrakumar sur la reconfiguration de l’Asie Centrale par la diplomatie énergétique russe)

La crise énergétique aiguë du Pakistan est la toile de fond immédiate dans laquelle il faut comprendre les entretiens que le ministre des affaires étrangères Bilawal Zardari va avoir avec le ministre russe des affaires étrangères Sergey Lavrov à Moscou aujourd’hui [l’article est publié le 30 janvier]. Mais Lavrov est un « homme de la Renaissance » dans le monde de la diplomatie internationale et il ne manquera pas de synchroniser sa montre avec celle de Zardari. Pour les deux pays, les choses ont changé, les vieux amis s’en vont et la vie ne s’arrête pour personne.

Le communiqué de presse du ministère russe des affaires étrangères sur la visite de M. Zardari indique en quelques mots : « Les ministres des affaires étrangères discuteront de l’état des relations bilatérales et des questions régionales et internationales. Une attention particulière sera accordée au développement des relations commerciales et économiques. »La porte-parole du MAE, Maria Zakharova, a ensuite révélé que les entreprises russes et pakistanaises « travaillent activement à la résolution des problèmes restants » concernant la fourniture de ressources énergétiques russes au Pakistan. Elle a indiqué que le système de paiement posait problème, la Russie souhaitant un arrangement dans les monnaies nationales « ou dans les monnaies de pays tiers qui sont protégés des risques de sanctions. »

De plus, la coopération énergétique, de par sa nature même, implique des investissements substantiels à long terme et il n’en demeure pas moins que, comme l’a dit Mme Zakharova, « la monnaie américaine est une bulle de savon, de l’argent non garanti qui est imprimé malgré l’énorme dette publique de l’Amérique. »Fait important, Mme Zakharova a souligné que les deux pays ont également décidé de « discuter d’un plan global de coopération énergétique, qui prévoit la construction d’infrastructures et la fourniture de vecteurs énergétiques » dans un cadre susceptible de « garantir le développement durable » de l’industrie gazière pakistanaise. Un gazoduc russe vers le Pakistan est en cours de réalisation.

La visite de M. Zardari à Moscou intervient trois semaines après qu’un accord tripartite de coopération gazière entre la Russie, le Kazakhstan et l’Ouzbékistan ait fait les gros titres de l’actualité. La fin des liens énergétiques que la Russie entretenait depuis des décennies avec l’Europe, y compris l’approvisionnement en gaz par gazoducs, motive la recherche par Moscou de nouveaux marchés, les marchés asiatiques étant une priorité. Ainsi, à la fin de l’année dernière, Moscou a proposé une union gazière avec le Kazakhstan et l’Ouzbékistan afin d’aider les deux États d’Asie centrale qui sont confrontés à des pénuries de gaz. Au début du mois, le Kazakhstan et l’Ouzbékistan ont signé deux accords distincts avec le géant russe Gazprom, cimentant ainsi ce nouveau partenariat. Une nouvelle perspective s’ouvre à la Russie, qui pourra utiliser les gazoducs existants dans ces deux pays pour exporter immédiatement du gaz vers leur marché intérieur.

Bien que dans un format bilatéral, cet arrangement positionne également le Kazakhstan et l’Ouzbékistan comme des pays de transit potentiels permettant l’approvisionnement en gaz russe du marché régional et mondial, en particulier la Chine, les pays d’Asie du Sud et la région de l’ANASE. (La Russie a proposé un arrangement similaire à Ankara pour acheminer son gaz vers le marché européen via une plate-forme énergétique en Turquie).Tous les projets énergétiques sont « géopolitiques », comme le montre la récente destruction des pipelines russes Nord Stream, orchestrée par les États-Unis. Mais celui-ci est « gagnant-gagnant » à la fois pour la Russie et pour les deux États d’Asie centrale, car les revenus que le Kazakhstan et l’Ouzbékistan tireront des droits de transit seront très importants et à long terme, tandis que la Russie aura accès à de nouveaux marchés.

Entrez en Afghanistan. Les 11 et 12 janvier, l’envoyé présidentiel russe pour l’Afghanistan, Zamir Kabulov, s’est rendu à Kaboul et a tenu des consultations approfondies avec les dirigeants talibans, conformément à « l’engagement inébranlable de Moscou à développer un dialogue global avec Kaboul ». Le communiqué de presse du ministère russe des Affaires étrangères indique que l’accent a été mis sur « une coopération mutuellement bénéfique dans des secteurs tels que l’énergie, l’agriculture, les transports, les infrastructures, l’industrie, l’exploitation minière, en particulier l’organisation de livraisons commerciales régulières de carburant et de produits agricoles russes aux entreprises afghanes ».Le communiqué de presse précise que « lorsque la situation en Afghanistan se stabilisera, les opérateurs économiques nationaux pourront participer à la construction et à l’exploitation du gazoduc Turkménistan-Afghanistan-Pakistan-Inde, ainsi qu’à la restauration de grands projets d’infrastructure construits sur le territoire afghan pendant l’ère soviétique.« 

Plus important encore, le MAE ajoute que « Au cours des consultations, une attention considérable a été accordée aux perspectives de reconnaissance politique et diplomatique de l’actuel gouvernement afghan par la communauté internationale, y compris par la Fédération de Russie. » Il conclut que « Les dirigeants afghans apprécient hautement les efforts déployés par la Fédération de Russie pour aider le peuple afghan à construire un État pacifique, indépendant et économiquement autosuffisant. »Il est intéressant de noter que, lors d’une interview télévisée peu après son retour à Moscou, M. Kabulov a ouvertement affirmé que l’ISIL en Afghanistan n’est rien d’autre qu’un projet anglo-américain dont l’objectif est de provoquer l’instabilité dans la région. En effet, le contexte régional est en train de changer radicalement. La Russie est devenue intensément consciente du poids de l’histoire et réalise qu’il est impératif de renforcer son rôle de leader en tant que fournisseur de sécurité pour la région d’Asie centrale. La menace occidentale qui pèse sur l’Asie centrale et le Caucase du Nord persiste.

La Russie espère prendre la tête d’un effort régional visant à stabiliser la situation en Afghanistan et à contrer les groupes extrémistes, qui servent d’outil géopolitique à Washington. La Russie (et la Chine) traite de plus en plus avec les dirigeants talibans comme le gouvernement établi de l’Afghanistan. Fondamentalement, le terrorisme est une préoccupation majeure pour la Russie (et la Chine).Moscou estime que les Talibans ont la volonté politique d’agir de manière optimale contre l’ISIS, mais qu’ils manquent de ressources financières. Il ne fait aucun doute que l’Afghanistan figurera dans les entretiens de M. Lavrov avec M. Zardari. Le conseiller indien pour la sécurité nationale, Ajit Doval, se rendra également à Moscou prochainement pour des consultations sur l’Afghanistan.

C’est le moment idéal pour l’Inde d’améliorer ses relations avec le Pakistan. Fortuitement, les événements liés à l’OCS amèneront les dirigeants pakistanais en Inde. Le Premier ministre Modi a annoncé que la présidence indienne du G20 « sera fondée sur le thème « Vasudhaiva Kutumbakam » ou « Une Terre, une Famille, un Avenir ». Il est concevable que l’Inde invite le Pakistan au sommet du G20 à Delhi en septembre en tant qu’invité spécial. D’un point de vue pragmatique, le projet de gazoduc TAPI s’accorde avec l’union gazière tripartite que la Russie est en train de mettre en place avec le Kazakhstan et l’Ouzbékistan. Le quotidien russe Nezavisimaya Gazeta a récemment écrit que Moscou a bon espoir d’étendre le réseau gazier d’Asie centrale à la région d’Asie du Sud et à la région de l’ANASE à moyen terme.

Andrei Grozin, chef du département de l’Asie centrale et du Kazakhstan à l’Institut des pays de la CEI et chercheur principal à l’Institut des études orientales de l’Académie russe des sciences, a déclaré au quotidien russe que « c’est déjà une nouvelle politique d’État de la Russie, et il est évident que ni Astana ni Tachkent ne pourront refuser de participer à ce projet ». Les experts s’accordent à dire que d’ici le milieu du siècle, l’Asie du Sud-Est deviendra la principale région consommatrice d’énergie. Aussi fantastique que puisse paraître aujourd’hui l’expansion du réseau de gazoducs vers l’Afghanistan, le Pakistan, l’Inde et la Chine, elle deviendra bientôt une réalité. Il est donc nécessaire de promouvoir dès aujourd’hui nos matières premières sur les marchés du Sud. »

Bien sûr, un tel méga-projet soulèvera des hoquets à Washington. Il n’est pas surprenant que la sous-secrétaire d’État américaine Victoria Nuland (qui a été l’intermédiaire du changement de régime de 2014 à Kiev et se réjouit ouvertement du sabotage et de la destruction du gazoduc russe Nord Stream) arrive à Delhi cette semaine.Washington est contrarié par le fait que la pression exercée par les sanctions occidentales sur les exportations de pétrole russe a conduit à un renforcement significatif des liens énergétiques de l’Inde avec la Russie. Non seulement le brut russe est vendu à l’Inde deux fois moins cher que les analogues mondiaux, mais la production russe de produits pétroliers est en fait transférée en Inde.

Après l’entrée en vigueur de l’embargo européen sur les produits pétroliers russes, le 5 février, l’Inde est appelée à devenir le principal fournisseur de pétrole russe raffiné à l’Europe, avec un chiffre d’affaires potentiel à l’exportation de plusieurs dizaines de milliards de dollars. (Voir La Russie confie à l’Inde l’approvisionnement de l’Europe en produits pétroliers, Nezavisimaya Gazeta, 16 janvier 2023) Les exportations de carburant diesel en provenance de l’Inde sont déjà en augmentation.

Techniquement, cela ne viole pas les sanctions de l’UE contre la Russie. Mais cela contrarie l’administration Biden, qui avait prévu qu’il serait possible de stimuler les exportations américaines pour remplacer les produits pétroliers russes sur le lucratif marché européen.

Les États-Unis seront mal à l’aise face à une « union gazière » entre la Russie, le Pakistan et l’Inde. Mais l’Inde a un intérêt vital à préserver sa sécurité énergétique. L’hégémonie occidentale dans l’ordre mondial est en train de prendre fin. L' »union gazière » de la Russie en Asie centrale indique que le moment est venu pour les États régionaux d’Asie du Sud de répondre par une unité de but.

L’Occident en passe de reconnaître sa défaite en Ukraine.

Source : Le Courrier des Stratèges - par Edouard Husson - Le 05/02/2023.

 

L’Occident en passe de reconnaître sa défaite en Ukraine

 

Le changement de ton, en quelques jours est frappant: à Paris, Bruxelles ou Washington, les dirigeants occidentaux et leurs porte-voix sont en passe de concéder l’échec militaire de leur stratégie anti-russe. On en est encore à dire prudemment qu’il apparaît très difficile, voire impossible, que l’Ukraine « reprenne la Crimée ». En réalité, la chute de Bakhmout/Artiomovsk semble maintenant une question de semaines, peut-être de jours, et avec elle, la chute du Donbass ukrainien semble possible. Plus profondément, la dynamique globale de l’affrontement entre l’Occident et la Russie se développe selon des axes que le Courrier a progressivement identifiés depuis un an: capacité de l’armée russe à tenir en échec une armée équipée et entraînée par l’OTAN ; résistance inattendue de la Russie aux sanctions occidentales et effet boomerang de ces dernières non seulement en Europe mais aux Etats-Unis; basculement géopolitique, la majorité des pays du monde ne souhaitant pas accompagner l’Occident dans les sanctions. Nos pronostics sur l’Ukraine devraient se vérifier. Nous maintenons par ailleurs nos pronostics sur la réforme des retraites : renoncement in fine du gouvernement après avoir lâché de nombreuses concessions qui, elles, resteront… Un désastre pour les entreprises et les finances publiques !

Le commandant en chef des forces armées ukrainiennes, Valeriy Zaluzhny, rend hommage aux victimes d’un accident d’hélicoptère mortel lors d’une cérémonie d’adieu à Kiev, Ukraine, samedi 21 janvier 2023. Le ministre de l’Intérieur Denys Monastyrsky, son adjoint Yevhen Yenin, le secrétaire d’État Yurii Lubkovych, un fonctionnaire de la police nationale et les trois membres de l’équipage ont été tués dans un accident d’hélicoptère mercredi 18 janvier dans la banlieue de Kiev, à Brovary.. (AP Photo/Efrem Lukatsky)

 

Aux Etats-Unis et dans l’Union Européenne, le discours officiel commence à évoquer une défaite de l’Ukraine. Le ton des médias subventionnés est en train de changer rapidement. De rapides incursions dans les gros titres, ce dimanche 5 février 2023, suffisent pour s’en rendre compte.

L’Express nous fait part des doutes de Vladimir Zelenski sur la situation militaire, au moment où le bataillon Wagner est à six rues du centre de Bakhmout/ArtiomovskLe Point a publié en fin de semaine une tribune de Gérard Araud (cet ancien ambassadeur de France à Washington qui s’était fait connaître en critiquant sur son compte twitter, le 8 novembre 2016, l’élection de Donald Trump), qui appelle au réalisme diplomatique: il faudra bien négocier avec Poutine, explique cet atlantiste forcené. Le Figaro, habitué à faire, la plupart du temps, un copier-coller des communiqués ukrainiens, est bien obligé, vu la teneur actuelle de ces derniers, de parler de l’âpreté des combats et du « sanglant grignotage » des Russes.

La ligne officielle est sans aucun doute en train de changer.

Les points de vue qui comptent: Washington et Bruxelles

Les humeurs des médias français ou du parisianisme ne suffiraient pas à prouver un basculement. Beaucoup plus important, le journal Die Welt, respecté quotidien conservateur allemand, publie un article dans lequel on peut lire:

« Aussi amère soit cette vérité, la victoire de l’Ukraine devient chaque jour plus improbable. L’armée de Kiev manque d’hommes et de matériel, l’ennemi s’adapte mieux et dispose d’un énorme approvisionnement. Il n’est donc pas étonnant que les diplomates occidentaux parlent désormais de plus en plus souvent de cessez-le-feu. Il est presque exclu que l’Ukraine sorte victorieuse de cette guerre. Selon la définition du président ukrainien Volodymyr Selenskyj, une victoire signifie la reconquête de tous les territoires occupés, donc également de la Crimée. Mais cela est impossible du point de vue actuel et dans les circonstances actuelles – par lesquelles on entend avant tout le manque de soutien de l’Occident. La Russie occupe actuellement environ 18 pour cent du territoire ukrainien. Ce chiffre devrait plutôt augmenter que diminuer à l’avenir. Malheureusement« .

On appréciera la manière dont un des quotidiens de références de la République Fédérale d’Allemagne a abandonné toute neutralité. Mais le plus frappant est ailleurs: ce n’est pas le correspondant Berlin de ce journal de Hambourg qui prend la plume. C’est le correspondant à Bruxelles. Bruxelles veut dire « Union Européenne » et « OTAN ». Les Allemands qui travaillent dans les deux organisations ont fait pression sur le gouvernement d’Olaf Scholz, depuis février dernier, pour qu’il engage beaucoup plus son pays aux côtés de l’Ukraine. La décision d’envoyer des chars Leopard aurait-elle été une « victoire à la Pyrrhus »?

A Washington , où tout se décidera finalement, Politico a obtenu des informations d’insider: suite à une réunion confidentielle tenue jeudi 2 février 2023: »Il est peu probable que les forces ukrainiennes soient en mesure de reprendre la Crimée aux troupes russes dans un avenir proche, ont déclaré quatre hauts responsables du ministère de la défense aux législateurs de la commission de la Défense de la Chambre des représentants lors d’un briefing confidentiel. Parmi les quatre, il y avait Laura Cooper, secrétaire adjointe à la défense pour la Russie, l’Ukraine et l’Eurasie, et le général Douglas Sims, directeur des opérations de l’état-major interarmées« .

L’Occident évoque une défaite qu’il ne pourra bientôt plus dissimuler

Comme nous vous l’appelons régulièrement rappelé dans les analyses du Courrier des Stratèges, la réalité militaire est souvent insaisissable. Il y a cependant un moment où la situation prend une tournure définie: au Pentagone et au Quartier Général de l’OTAN, on est bien obligé de reconnaître que les déclarations de Kiev sur la reconquête de la Crimée relèvent de l’illusion. Et que l’armée russe a beaucoup plus de potentiel de mobilisation, de matériel et de munitions que ce que l’on avait estimé au début de la guerre. Une défaite ukrainienne est donc envisagée de plus en plus ouvertement.

Cela ne veut pas dire que la guerre soit finie, loin de là. Il existe toujours un parti de la guerre puissant à Washington et à Bruxelles. Et puis, même en tenant compte de la réalité du terrain, il n’est pas certain que la Russie voudra négocier avant d’avoir occupé militairement la zone de sécurité territoriale qu’elle juge nécessaire pour tenir l’OTAN à distance de ses frontières, quel que soit le gouvernement de Kiev. Il est probable qu’à Moscou on ne veuille pas lâcher une occasion d’affaiblir durablement l’Occident.

Les péripéties seront encore nombreuses, sans que nul ne puisse pronostiquer le terme temporel du conflit. En revanche, il apparaît que l’Occident belliqueux a d’ores et déjà échoué à tenir plusieurs de ses objectifs. Le Courrier vous a aidé à identifier, depuis un an, les lignes de force de l’évolution inattendue du conflit. L’armée russe a tenu le choc de l’affrontement avec une armée aux indéniables qualités combattantes, entraînée et armée par l’OTAN ; les sanctions occidentales n’ont pas fait s’effondrer l’économie russe ; et elles ont eu un effet boomerang inattendu, non seulement sur l’Union Européenne mais jusqu’aux Etats-Unis. On assiste à un grand basculement géopolitique, dans la mesure où la Chine et l’Inde ont affirmé une ligne pacifique mais de facto pro-russe. Les communiqués triomphalistes de Washington après la destruction par l’US Air Force d’un ballon dirigeable chinois volant au-dessus du territoire américain et soupçonné d’espionnage en disent long sur la frustration américaine !

Nos pronostics sur la crise des retraites

Des indices concordants laissent à penser que le Courrier a vu juste l’an dernier....Lire la suite en vous abonnant au Courrier des Stratèges.

 

 

Dormez tranquilles : La Russie n’attaquera jamais l’OTAN, affirme Kiev

Source : Le Courrier des Stratèges - par Philippe Migault - Le 03/02/2023.

Dormez tranquilles : la Russie n’attaquera jamais l’OTAN, affirme Kiev – par Philippe Migault

La communication n’est pas une discipline qui s’improvise. En affirmant que la Russie n’attaquerait jamais l’OTAN compte tenu de la supériorité de l’armement occidental, Oleksiy Reznikov, ministre de la défense ukrainien, va à l’encontre du story-telling décliné par la Pologne, les Etats Baltes et les néoconservateurs, affirmant qu’il fallait vaincre la Russie en Ukraine, faute de quoi ce serait ensuite notre tour.

Oleksiy Reznikov, ministre de la défense ukrainien

Il en va d’une alliance militaire comme d’une équipe gouvernementale. Il faut un patron qui communique et que les autres résistent à la tentation de fanfaronner et de tirer la couverture à eux. Faute de quoi, immanquablement, la cacophonie s’installe, la communication se brouille, et des faits qu’on préférait passer sous silence sont rendus publics. Invité sur les ondes de BFM-TV[1], Oleksiy Reznikov, ministre de la défense ukrainien, n’a pas su se taire hier, comme si son avis de proxy pesait réellement au sein de la coalition anti-russe.

Affirmant que la Russie devrait lancer une grande offensive le 24 février prochain, pour l’anniversaire de son invasion de l’Ukraine, M. Reznikov, a estimé qu’il n’y avait aucun risque que cette offensive ne s’élargisse aux Etats membres de l’OTAN. « Je pense que c’est exclu et je vais vous dire pourquoi. Poutine voit comment les armes de l’Otan sont efficaces, et ça en nombre limité, et comment il perd sur le terrain (…) Poutine sait très bien que s’il rentre réellement en conflit avec les pays de l’Alliance, il perd à 100%. Il présente sa guerre en Ukraine comme une guerre contre l’Occident et il explique qu’il ne peut pas gagner car contre eux il y a l’Otan. Mais en réalité il n’affronte que l’armée ukrainienne », a-t-il assuré.

Contrairement aux dires d’Oleg Reznikov, il est bien évident que la Russie n’affronte pas que l’armée ukrainienne. Elle combat des Ukrainiens d’un courage et d’une ténacité admirables, mais qui n’auraient pu tenir le choc s’ils n’avaient pas à leurs côtés les services de renseignement occidentaux, les conseillers militaires de l’OTAN, des milliers de mercenaires ou volontaires bien formés, et n’avaient pas, enfin, bénéficié de livraisons d’armes plus performantes que les leurs. Au demeurant, Le Monde, lui-même en convient[2], l’Ukraine devra capituler si nous ne procédons pas à de nouvelles livraisons d’armes massives.

Entre la Russie et l’OTAN, il n’y a même pas de match

En revanche, M. Reznikov a entièrement raison quand il affirme que la Russie et Vladimir Poutine sont tout à fait conscients qu’hormis sur le plan nucléaire, où ils font jeu égal, ils n’ont pas la moindre chance de succès dans le cadre d’un affrontement majeur, mais conventionnel avec l’OTAN.

Certes, ce n’est pas nécessairement une question de supériorité qualitative des Occidentaux. Si cela est vrai sur certains systèmes, les armements russes font fréquemment jeu égal, voire, quelquefois, mieux.

Mais il est certain que la Russie par contre que la Russie est surclassée par l’Alliance Atlantique d’un point de vue quantitatif, et ce sur presque tous les plans, comme en atteste le tableau ci-dessous. Entre la Russie et l’OTAN, il n’y a même pas de match. Ce serait le pot de terre contre le pot de fer et le Kremlin n’aurait d’autre ressource, pour ne pas être écrasé, que de monter aux extrêmes et à l’arme atomique.

  OTAN (Europe) OTAN (avec USA & Canada) OTAN + Suède, Finlande & Ukraine RUSSIE
Soldats (armée de terre, marines et parachutistes) 1 048 875 1 739 025 1 908 225 370 000
Chars de combat 6 503 (+105) 9 094 (+3 805) 10 172 (+ 5 037) 3 330 (+10 200)
Artillerie de campagne (105 à 130 mm) Artillerie lourde (152 à 240 mm) 1 306 4 271 (+38) 2 584 6 330 (+ 538) 3 221 7 179 (+ 538) 245 (+ 10 800) 2 216 (+ 6 565)
Lance-roquette multiples 885 1 485 1 839 876 (+ 3 220)
Hélicoptères de combat 445 1 300 1 335 394
Aviateurs 312 375 655 775 706 525 165 000
Avions de combat (toutes armées) 2 263 5 128 5 447 1 317
AWACS 36 148 150 9
Ravitailleurs en vol (jets) 50 533 533 15
Marins 235 450 590 250 606 750 160 000
Porte-avions/porte-aéronefs 6 17 17 1
Grands navires de projection de force 21 53 53 19
Croiseurs 24 24 4
Escorteurs 218 319 319 39
SNLE 8 22 22 11
SNA 16 70 70 38
SS 54 54 59 21
         
Source : « La Russie, l’ennemi Potemkine ? », Philippe Migault, à paraître. Chiffres The Military Balance 2021

Rétropédalage tardif

Pourtant ces données, bien connu de tous les spécialistes un tant soit peu sérieux, ne sont jamais mises en avant par nos experts cathodiques ni par les journalistes spécialisés. Il ne faut surtout pas aller à l’encontre du pitch otanien prétendant que l’Ukraine n’est que la première de la liste et que Baltes, Polonais, Moldaves seront les suivants…

Et paradoxalement personne, sur ces mêmes plateaux, ne relève le paradoxe qu’il y a à railler les défaites du Kremlin face à une armée ukrainienne de seconde zone, tout en brandissant l’épouvantail du rouleau-compresseur russe, digne héritier de celui du bolchevique au couteau entre les dents.

Sans doute conscient d’avoir été très contre-productif sur ce point, Oleg Reznikov a bien essayé de rétropédaler. Evoquant les conclusions du sommet de l’OTAN de juin 2022, il a rappelé qu’à cette occasion l’Ukraine et ses alliés ont « clairement défini les menaces, et pour dix ans la Russie est définie comme principale ennemie, comme menace pour l’Otan.» Eh oui, puisque l’OTAN l’a dit, c’est que c’est vrai. « Si jamais l’Ukraine tombe, qui sont les prochains ? Les pays baltes, Lettonie, Lituanie et Estonie, qui sont des pays de l’Otan, alors il va falloir répondre. Les Russes ne vont pas s’arrêter d’eux-mêmes, il faut les arrêter en Ukraine pour ne pas verser le sang des autres nations », a-t-il ajouté, afin de ne pas omettre la petite touche de pathos alarmiste de rigueur. Un peu tard.

Oui, en matière de communication, il en va des alliances militaires comme des gouvernements. Comme le soupirait Foch, « depuis que je sais ce qu’est une coalition, j’ai beaucoup moins d’admiration pour Napoléon. »


[1] https://www.bfmtv.com/international/europe/ukraine/poutine-ne-s-attaquera-jamais-a-l-otan-le-ministre-de-la-defense-ukrainien-ne-croit-pas-a-une-extension-du-conflit_AV-202302020078.html

[2] https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/01/25/guerre-en-ukraine-la-seule-alternative-credible-au-maintien-de-l-aide-occidentale-est-en-l-etat-une-reddition-de-kiev_6159180_3232.html

L’énumération de tous ces matériels ne vaut que par ce que valent les hommes qui les mettent en oeuvre et les quantités de munitions dont ils disposent.

Hors les sotcks de l’OTAN sont vides et les usines ne seront pas prètes à relancer une production de masse avant de longs mois….Ne pas oublier que cette guerre ne sert que les intérêts américains.

Qui, parmi les trente pays de l’OTAN, est prêt à envoyer ses soldats mourir pour l’Ukraine ???

Rappelez-vous les buts de guerre de l’Amérique : Détruire la Russie politique, économique et militaire…et réaliser ce qui a été manqué en 1991 : S’accaparer ses richesses en matières premières…!

Guerre d’Ukraine – Jour 338

L’Occident commence à douter

Source : Le Courrier des Stratèges - par Edouard Husson - Le 30/01/2023.

 

Alors que les troupes russes ne cessent de grignoter du terrain et que l’on murmure que l’offensive russe de grande ampleur est pour bientôt, la situation géopolitique globale se dégrade pour les pays occidentaux, qui commencent à douter de la victoire de l’Ukraine, plus ou moins ouvertement. Nous donnons quatre exemples: la démonstration de force de « l’Amiral Gorchkov » au large des côtes américaines; le désarroi des dirigeants de Washington; la remise en place des Allemands par Vladimir Poutine après la décision d’envoyer des chars là où la Wehrmacht massacrait indistinctement Ukrainiens et Russes il y a 80 ans. Le risque que comporterait une guerre entre Israël et l’Iran.

Ispahan – Iran

Depuis quelques jours, l’alliance occidentale a perdu de sa superbe. Les hourras qui accompagnent les promesses d’envois de blindés ne doivent pas nous tromper.. Il s’agit d’une de ces surenchères qui caractérisent désormais la « culture de mort » (selon l’expression inquiète du pape Jean-Paul II, il y a trente ans, quand il constatait que l’Occident n’avait pas compris les facteurs profonds de la chute du communisme) qui règne de Washington à Kiev. Mais derrière la « danse macabre », on sent la panique se répandre.

A l’OTAN on sait ce que signifie le trajet de l’Amiral Gorchkov

La frégate « Amiral Gorchkov » a fait un crochet au large des côtes américaines

Selon itamilradar.com: « L’Amiral Gorchkov a quitté son port d’affectation, dans la région de Mourmansk, le 4 janvier pour une longue croisière qui le conduira dans l’océan Indien, via la Méditerranée (où il pourrait rester jusqu’à un an), le navire sera armé de nouveaux missiles de croisière hypersoniques Zircon.

La destination finale de la frégate est la Méditerranée, mais elle ne l’atteindra pas avant la fin du mois de mars car elle est attendue en Afrique du Sud dans la seconde moitié du mois de février, où elle participera à un exercice avec des unités navales sud-africaines et chinoises.

Toutefois, l’attention portée à la frégate est due au fait que, l’autre jour, elle a dévié de sa route vers le sud, se dirigeant vers l’ouest en direction des îles Bermudes et de la côte américaine.

Quelque part dans l’Atlantique Nord, le navire a simulé le lancement de missiles hypersoniques. Il n’est pas facile de comprendre où se trouve actuellement le navire car il y a beaucoup de confusion sur le web et nous ne nous aventurerons pas dans des hypothèses non étayées par des faits concrets.

Ce que nous savons, c’est que le pétrolier Kama, avec lequel l’Amiral Gorchkov navigue depuis son départ de Mourmansk, fait maintenant lui aussi route vers le sud-ouest et se trouve approximativement au milieu de l’Atlantique, naviguant dans la direction SSO« .

Il s’agit d’une démonstration de force. Mais le côté ostentatoire du crochet pour passer au large des côtes américaines ne doit pas nous faire illusion. La frégate russe transporte des missiles hypersoniques et entend signifier aux Américains que l’avance russe est telle dans le domaine de l’hypervélocité qu’un conflit serait suicidaire pour les USA. Même pas besoin de prévoir des frappes nucléaires: avec l’hypervélocité, les Russes ont mis en place une capacité de destruction totale des centres de commandement américain sans les inconvénients de la radioactivité.

Selon l’exxpress, média en ligne autrichien,

« Le capitaine de la frégate, Igor Krokhmal, a déclaré : « Personne ne verra le lancement ou le vol du missile. Ils ne verront que si le missile atteint sa cible. Une cible de surface, une cible côtière. Je ne pense pas qu’il y ait quoi que ce soit qui puisse s’opposer à cela dans les années à venir« .

La frégate ultramoderne doit participer le mois prochain à des exercices communs avec les marines chinoise et sud-africaine près des ports de Durban et de Richards Bay en Afrique du Sud. »

Non seulement, comme le souligne Scott Ritter, il suffirait de 16 Zircon pour paralyser le commandement américain. Mais les BRICS s’affichent désormais comme une alliance à vocation militaire autant que monétaire et commerciale.

Le doute s’insinue au plus au niveau à Washington

L’attaque de blindés commandée par le lieutenant Douglas Macgregor en 1991 en Irak.

Nous avons fait état, la semaine dernière, de la tentative de Blinken, le secrétaire d’Etat américain, de rouvrir la porte des négociations avec la Russie. Le doute s’insinue au plus haut niveau à Washington. Et nul ne l’a mieux résumé que Douglas Macgregor, cette fin de semaine, dans The American Conservative. C’est nous qui soulignons:

« Jusqu’à ce qu’on y décide de confronter Moscou à une menace militaire existentielle en Ukraine, Washington a limité l’utilisation de la puissance militaire américaine à des conflits que les Américains pouvaient se permettre de perdre, des guerres avec des adversaires faibles dans le monde en développement, de Saigon à Bagdad, qui ne présentaient pas de menace existentielle pour les forces américaines ou le territoire américain. Cette fois-ci, une guerre par procuration avec la Russie est différente.

Contrairement aux espoirs et aux attentes initiales du Beltway, la Russie ne s’est pas effondrée sur le plan interne et n’a pas cédé aux demandes collectives de l’Occident en faveur d’un changement de régime à Moscou. Washington a sous-estimé la cohésion sociétale de la Russie, son potentiel militaire latent et son immunité relative aux sanctions économiques occidentales« .

Douglas Macgregor est un insider par bien des aspects: héros de la première guerre d’Irak où il mena une spectaculaire offensive d’une cinquantaine de blindés sans essuyer une perte; planificateur, aux côtés du Général Clark, de l’opération du Kosovo; ancien conseiller du secrétaire à la défense sous Donald Trump. Macgregor est aussi un empêcheur de tourner en rond: auteur en particulier d’une proposition de réorganisation de l’armée américaine qui a plus inspiré l’armée israélienne que le Pentagone. Ses propos ont du poids:

« En conséquence, la guerre par procuration de Washington contre la Russie est en train d’échouer. Le secrétaire américain à la Défense, Lloyd Austin, s’est montré inhabituellement franc au sujet de la situation en Ukraine lorsqu’il a déclaré aux alliés en Allemagne, à la base aérienne de Ramstein, le 20 janvier :  » Nous avons une fenêtre d’opportunité ici, entre maintenant et le printemps « , admettant :  » Ce n’est pas une longue période. « 

Alexei Arestovich, conseiller du président Zelensky récemment licencié et « Spinmeister » officieux, a été plus direct. Il a exprimé ses propres doutes quant à la capacité de l’Ukraine à gagner sa guerre contre la Russie et il se demande maintenant si l’Ukraine survivra même à la guerre. Les pertes ukrainiennes – au moins 150 000 morts, dont 35 000 disparus au combat et présumés morts – ont fatalement affaibli les forces ukrainiennes, ce qui a donné lieu à une position défensive ukrainienne fragile qui risque de se briser sous le poids écrasant de l’attaque des forces russes au cours des prochaines semaines.

Les pertes matérielles de l’Ukraine sont tout aussi graves. Elles comprennent des milliers de chars et de véhicules blindés de combat d’infanterie, des systèmes d’artillerie, des plates-formes de défense aérienne et des armes de tous calibres. Ces totaux incluent l’équivalent de sept années de production de missiles Javelin. Dans un contexte où les systèmes d’artillerie russes peuvent tirer près de 60 000 cartouches de tous types – roquettes, missiles, drones et munitions à coque dure – par jour, les forces ukrainiennes ont du mal à répondre à ces salves russes avec 6 000 cartouches par jour. De nouvelles plateformes et de nouveaux ensembles de munitions pour l’Ukraine peuvent enrichir la communauté de Washington, mais elles ne peuvent pas changer ces conditions ».

Dans ces conditions, MacGregor essaie d’anticiper sur la réaction des « maîtres du monde autoproclamés »:

« Comme on pouvait s’y attendre, la frustration de Washington face à l’incapacité collective de l’Occident à endiguer la marée de la défaite ukrainienne est croissante. En fait, la frustration cède rapidement la place au désespoir.

Michael Rubin, ancien membre de l’équipe Bush et fervent partisan des conflits permanents de l’Amérique au Moyen-Orient et en Afghanistan, a exprimé sa frustration dans un article de la revue « 1945 » affirmant que « si le monde permet à la Russie de rester un État unitaire, et s’il permet au poutinisme de survivre à Poutine, alors l’Ukraine devrait être autorisée à maintenir sa propre dissuasion nucléaire, qu’elle rejoigne ou non l’OTAN ». À première vue, la suggestion est imprudente, mais la déclaration reflète fidèlement l’anxiété des cercles de Washington selon laquelle la défaite ukrainienne est inévitable.

Les membres de l’OTAN n’ont jamais été fortement unis derrière la croisade de Washington pour affaiblir fatalement la Russie. Les gouvernements hongrois et croate ne font que reconnaître l’opposition de l’opinion publique européenne à la guerre avec la Russie et le manque de soutien au désir de Washington de retarder la défaite prévisible de l’Ukraine.

Bien que sympathisant avec le peuple ukrainien, Berlin n’était pas favorable à une guerre totale avec la Russie au nom de l’Ukraine. Aujourd’hui, les Allemands sont également mal à l’aise face à l’état catastrophique des forces armées allemandes.

Le général de l’armée de l’air allemande à la retraite (équivalent de quatre étoiles) Harald Kujat, ancien président du Comité militaire de l’OTAN, a sévèrement critiqué Berlin pour avoir permis à Washington d’entraîner l’Allemagne dans un conflit avec la Russie, notant que plusieurs décennies de dirigeants politiques allemands ont activement désarmé l’Allemagne, privant ainsi Berlin de toute autorité ou crédibilité en Europe. Bien qu’ils soient activement étouffés par le gouvernement et les médias allemands, ses commentaires ont une forte résonance auprès de l’électorat allemand.

Le fait est que, dans ses efforts pour s’assurer la victoire dans sa guerre par procuration avec la Russie, Washington ignore la réalité historique. À partir du 13e siècle, l’Ukraine était une région dominée par des puissances nationales plus grandes et plus puissantes, qu’elles soient lituanienne, polonaise, suédoise, autrichienne ou russe.

Au lendemain de la Première Guerre mondiale, les projets polonais avortés d’un État ukrainien indépendant ont été conçus pour affaiblir la Russie bolchévique. Aujourd’hui, la Russie n’est pas communiste, et Moscou ne cherche pas à détruire l’État polonais comme l’ont fait Trotsky, Lénine, Staline et leurs partisans en 1920.

Où va donc Washington avec sa guerre par procuration contre la Russie ? La question mérite une réponse.

(…) Pendant la Seconde Guerre mondiale, Washington a eu de la chance avec le timing et les alliés. Cette fois-ci, c’est différent. Washington et ses alliés de l’OTAN prônent une guerre totale contre la Russie, la dévastation et l’éclatement de la Fédération de Russie, ainsi que la destruction de millions de vies en Russie et en Ukraine.

Washington est dans l’émotivité. Washington ne pense pas, et on y est aussi ouvertement hostile à l’empirisme et à la vérité. Ni nous ni nos alliés ne sommes prêts à mener une guerre totale avec la Russie, à l’échelle régionale ou mondiale. Cependant, si une guerre éclate entre la Russie et les États-Unis, les Américains ne devraient pas être surpris. L’administration Biden et ses partisans bipartisans à Washington font tout ce qu’ils peuvent pour que cela arrive.« 

Moscou hausse le ton face à Berlin

Vkadimir Poutine a déploré le manque de souveraineté de l’Allemagne lors d’un échange avec des étudiants le 24 janvier 2023

A peine 80 ans se sont écoulés depuis que l’Armée Rouge a détruit le régime nazi, qui incarnait l’anti-civilisation, puisque le premier objectif d’Hitler et de ses sbires était d’abolir le commandement « Tu ne tueras pas ». D’abolir le Décalogue – les Dix commandements de la Bible, sur lesquels s’est construite la culture européenne. C’est pour cela qu’Hitler a voulu exterminer les Juifs – en tant que peuple du Décalogue; et il prévoyait de s’en prendre aux chrétiens après la guerre.

C’est pourquoi on ne peut qu’être stupéfait de voir tant de membres du gouvernement allemand, tant de députés, pousser la cause d’un soutien militaire à l’Ukraine. Quelle insoutenable légèreté de l’être allemand! Ne venez plus nous vanter la solidité, le goût du profond qui caractériserait la culture allemande. Annalena Baerbock se comporte comme une écervelée quand elle déclare « nous sommes en guerre avec la Russie »; et Olaf Scholz est bien peu courageux quand en Allemagne on commence à parler ouvertement de l’origine OTANienne du sabotage de Nordstream 2.

Mercredi 24 janvier, le lendemain de la déclaration de Madame Baerbock, Vladimir Poutine a souligné que l’Allemagne n’était pas un pays véritablement souverain vu qu’après 1990, elle avait conservé des bases militaires américaines sur son territoire:

« [ En ce qui concerne] le plus grand pays d’Europe, un géant économique, la République fédérale d’Allemagne, l’Union soviétique a légalement officialisé la fin de l’occupation.

Après tout, après la Seconde Guerre mondiale, l’Allemagne était, comme vous le savez, divisée en quatre zones d’occupation : américaine, britannique, française et soviétique. L’Union soviétique a donc légalement mis fin à l’occupation, mais pas les États-Unis. À proprement parler – techniquement, légalement – il y a des troupes d’occupation américaines en République fédérale d’Allemagne. En fait, elles le sont : elles sont nombreuses.

Même les politiciens allemands disent que l’Allemagne n’est plus un État souverain au sens plein du terme depuis la Seconde Guerre mondiale. Ce n’est pas moi qui le dis, ce sont des personnalités éminentes et, surtout, non pas des pro-russes, mais des pro-allemands qui le disent. Ils l’ont dit ouvertement. En d’autres termes, il existe des racines très profondes et des raisons sérieuses pour tout ce qui se passe actuellement. Bien sûr, je ne doute pas que le jour viendra où l’Europe retrouvera sa souveraineté, d’une manière ou d’une autre. Mais à en juger par toutes les apparences, cela prendra encore un certain temps« 

Mesurons bien les implications de ce que dit Vladimir Poutine: ni l’Allemagne, ni l’Italie, ni même la France n’agissent souverainement: elles sont sous la coupe de l’OTAN. Elles ne pourront redevenir des interlocuteurs ayant du poids aux yeux de la Russie que lorsqu’elles se seront libérées de l’emprise de Washington.

 

Un risque d’extension du conflit par une guerre entre l’Iran et l’Israël?

Depuis hier dimanche, tous ceux qui analysent soigneusement le conflit se demandent dans quelle mesure les frappes américaines et israéliennes sur une usine où les Iraniens fabriquent, selon toute vraisemblance, leurs premiers missiles hypersoniques pourrait avoir des répercussions sur la guerre d’Ukraine.

Tout d’abord, les faits. Il y a bien eu une attaque de drones sur des bâtiments du Ministère de la Défense à Ispahan. On suppose que les Américains et les Israéliens visaient un espace de recherche et d’expérimentation sur les missiles hypersoniques puisque l’Iran commence à maîtriser cette technologie. On a parlé d’attaques ailleurs, d’incendies. Mais il n’est pas possible ce lundi 30 janvier de savoir ce qui relève d’éventuels attentats, d’un accident industriel, des séquelles d’un tremblement de terre.

Chancelleries, médias, experts restent sereins. Pour autant on soulignera la différence de comportement du gouvernement israélien depuis le retour de Netanyahou au poste de Premier ministre. Tel-Aviv a pris acte de l’échec d’un nouvel accord sur le nucléaire iranien. Mais Israël a le sentiment que les USA sont – par choix ou par nécessité – de moins en moins impliqués au Moyen-Orient. Il s’agit de les « mouiller » à nouveau dans la défense d’Israël.

Pour autant, Netanyahou veut encore moins que ses prédécesseurs être obligé de choisir dans la guerre en Ukraine et Russie. Israël se comporte de manière assez similaire à la Turquie. En vendant des armes à l’Ukraine mais sans prendre partie dans le conflit et en se posant, si possible, en médiatrice. Netanyahou avait compris plus vite que d’autres l’importance stratégique de la Russie pour Israël: non seulement parce qu’il y a plus d’un millions de Juifs russophones en Israël. Mais aussi parce que Moscou est désormais garante de tours les équilibres dans la région: les Russes ont préservé le régime d’Assad de l’effondrement; ils investissent massivement en Iran; et comme je l’ai entendu dire en 2018 à un diplomate israélien, « Nous ne pouvons pas nous priver de parler avec les Russes puisqu’ils parlent à tout le monde.

Le basculement dans une vraie guerre entre Israël et Iran serait bien entendu éminemment dangereux. Israël a la bombe nucléaire et l’Iran peut compter sur du matériel russe, dont la guerre d’Ukraine montre qu’il est plus performant que ce qui vient de l’industrie militaire occidentale. Surtout, l’Iran semble suivre la stratégie russe consistant à maîtriser à la fois des armes peu sophistiquées mais destructrices, comme les drones, et l’hypervélocité.

Pour autant, les Américains ont-ils intérêt à ouvrir un troisième front, après celui, bien réel, de l’Ukraine et celui, en puissance,, de Taïwan? Et Netanyahou peut-il prendre le risque de mécontenter les Russes en laissant les Américains déstabiliser l’Iran? .

Chars, dollar et pensée magique …

Source : Le Courrier des Stratèges - Par Alexandre N - Le 26/01/2023.

Chars, dollar et pensée magique … par Alexandre N

« Les chars, je connais. J’ai servi et j’ai surtout beaucoup appris à les détruire. Au final c’est facile, presque un sport vu ce qu’on envoie en Ukraine. Les Russes vont littéralement faire du tir au pigeon d’autant que ces chars n’auront même pas de couverture aérienne, du quasi suicide » – C’est ainsi que notre ami Alexandre N a commencé sa réponse à nos questions. Lisez jusqu’au bout, ça décoiffe.  


Passons d’abord sur le ridicule profond de faire croire que 30 M1 Abrams et une poignée de Leo II pourrait être – une fois encore – la clé de la victoire. Mais force est de constater que c’est le pari toujours gagné par la propagande occidentale de faire prendre de vessies pour des lanternes aux Occidentaux qui n’exercent plus leur libre jugement.

Pourquoi les Américains doivent faire durer la guerre

Revenons au schéma de fonctionnement de ce conflit :

– Coté américain, on doit faire durer le conflit, car tout aveu d’échec est désormais strictement impossible dans la mesure où il n’annoncerait que … la fin programmée du dollar. Ce qui est actuellement en train de changer est que de plus en plus d’Américains en prennent conscience – à la différence de bien des Européens. .

Donc les Américains doivent désormais admettre que leur extrême arrogance les a fourvoyés jusqu’à croire qu’ils pourraient battre la Russie. Tout le problème pour les plus lucides d’entre eux est maintenant de trouver une porte de sortie acceptable à cette guerre. Mais que signifie alors acceptable ? On sait seulement aujourd’hui que le spectre de l’acceptable se situe forcément entre les deux extrêmes que sont le suicide nucléaire américain et la sécession du pays, agrémentée d’une guerre civile larvée.

En attendant de trouver cette solution, les dirigeants américains doivent faire durer la guerre et conséquemment plus que jamais faire croire qu’ils sont toujours en train de la gagner.

Faire durer la guerre : on l’a vu précédemment, pour les US ce n’est qu’une question de guerre par procuration et/ou d’alimentation continue en armement, les deux sur fond de l’épuisement de la population ukrainienne.

Le mental russe se durcit

Toutefois, les Américains ont cependant de la chance dans cette manœuvre puisque les Russes poursuivent apparemment le même objectif, raccourcir la guerre n’aboutissant de leur point de vue qu’à laisser à l’Occident la possibilité de la recommencer dans quelques années. Ce qui permet de déceler une telle tendance est bien le fait que s’opère actuellement – enfin! – une vraie purge de la 6° colonne occidentaliste. En clair, le mental russe se durcit.

Comment les Russes s’y prennent-ils pour faire durer et épuiser ? V. Orlov l’explique parfaitement bien,  mais encore faut-il pour comprendre avoir une vraie culture ainsi qu’une véritable expérience militaire.

 « Il existe un système russe ironiquement appelé Pénicilline (sa désignation technique est 1B75). Il a été assemblé et testé pour la première fois il y a quelques années, mais ce n’est que maintenant qu’il a été produit en nombre suffisant pour saturer toute la ligne de front russe dans l’ancienne Ukraine, produisant de bons résultats. Il s’agit d’un système optique, acoustique et sismique combiné, qui identifie les emplacements de tous les tirs d’artillerie et de missiles dans un rayon de 25km, en 5 secondes, et transmet automatiquement leurs informations de la cible et la trajectoire des projectiles aux systèmes d’artillerie et de défense aérienne russes, dans un rayon de 40km. C’est un système passif : il écoute simplement et ne peut pas être identifié pour le ciblage. Il est facile à cacher : il est monté sur un camion Kamaz-6350 8×8 et peut être caché dans n’importe quel ravin ou parcelle de bois. Il peut fonctionner sans surveillance pendant de longues périodes. Les Ukrainiens ont également reçu quelques systèmes de ciblage, mais ce sont tous des systèmes actifs, qui font briller un faisceau radar sur tout ce qu’ils suivent, informant ainsi les systèmes radar passifs russes de leurs emplacements exacts ; ils ne survivent donc pas longtemps. Chaque fois que les Ukrainiens lancent un missile (à l’exception de petites choses comme des mortiers), les Russes connaissent immédiatement à la fois le site de lancement et la trajectoire. Le missile est alors précisément ciblé et détruit par la défense aérienne russe, tandis que le lanceur est précisément ciblé et détruit à l’aide d’artillerie avant qu’il n’ait une chance de se déplacer. Cela désavantage encore plus les Ukrainiens, déjà désavantagés en nombre de pièces d’artillerie et affamés de munitions. Une fois l’artillerie et les systèmes de roquettes ukrainiens désactivés, les Russes prennent leur temps pour faire sauter les tranchées et les bunkers ukrainiens. Une fois qu’ils sont raisonnablement convaincus qu’il ne reste plus de combattants côté ukrainien, ils déplacent leur infanterie et nettoient. Et puis le front avance de quelques kilomètres vers l’ouest. Cet équilibre des forces se traduit par des pertes ukrainiennes de plusieurs centaines à quelques milliers par jour, tandis que les victimes du côté russe se font de plus en plus rares, grâce à la méticulosité sans hâte avec laquelle les Russes accomplissent ce qui est devenu une corvée routinière et répétitive.

Pour mémoire, la Russie fabrique actuellement plus de missiles de défense aérienne que le reste du monde réuni. Merci pour elle, elle a ce qu’il faut.

Il va donc de soi que les Russes n’ont pas besoin de faire beaucoup plus que ce qu’ils font actuellement : faire exploser tout ce que les Ukrainiens parviennent à amener au front et tuer tout ce qui bouge du côté ukrainien ; déplacer le front vers l’ouest de quelques kilomètres par jour; et perfectionner leurs armes et leurs stratégies en vue de tout conflit futur. Depuis le début de la phase chaude du conflit il y a 11 mois, les Russes ont détruit les forces armées ukrainiennes, non pas une, mais deux fois : une fois avec son ancien contingent et ses armes de l’ère soviétique, et une fois avec un contingent constitué à la hâte et des armes de l’ère soviétique données de tout l’ancien bloc de l’Est, et il est maintenant occupé à détruire les forces armées ukrainiennes 3.0, armées d’armes de l’OTAN et de nombreux mercenaires polonais, roumains, américains et divers autres. Le résultat final de cela,  … »

Pourquoi « les chars » ne sont pas « l’arme du miracle »

Donc les Russes se chargent de faire durer la guerre pendant que les Américains se chargent d’entretenir la propagande. Faute de proxy pour alimenter la guerre, ils doivent se résoudre à racler les fond des arsenaux et à transformer la raclure qu’ils y trouvent en wunderwaffe, une fois de plus.

Aujourd’hui, on en est aux chars, autrement dit de l’obsolète, mais telle n’est pas la question.  Voyons donc de quoi il s’agit.

Rappelons d’abord qu’un armement n’est qu’un tas de matières inertes, qui ne vaut que par le talent de ceux qui le servent et l’emploient. Nonobstant cette remarque, on ne saurait occulter quelques vérités tactiques qui si rattachent. Ainsi : 

– s’agissant de l’US M1 Abrams : on note d’abord le nombre ridicule d’engins prévus (30 ) alors que 1000 conviendraient mieux au problème posé. Le M1 est de surcroît ancien et obsolète, en tout cas totalement vulnérable face aux chars comme aux anti-char russes, sans parler de l’artillerie à tir direct. Son concept de turbine à gaz en fait une cible tout particulièrement « lumineuse » sur le champ de bataille. Bien entendu, les Russes joueront avec le M1 Abrams, d’autant qu’il présente tout un tas d’autres désagrément qui expliquent largement pourquoi le Pentagone s’oppose en fait à son déploiement. La propagande aura du mal à censurer le ridicule qui va s’y attacher.

– le Léopard II allemand est un peu plus sérieux, mais également douteux lui aussi quand à sa capacité à résister aux conditions de l’Ukraine. On prête beaucoup trop aux Allemands en matière de chars alors que le PZH 2000 s’est en fait ridiculisé en Ukraine. Si le châssis du Leo II peut paraître a priori apte à ce combat, sa conduite de tir en revanche ne l’est absolument pas, ce qui est gênant.

Mais le pire est l’informatique embarquée de ces engins et qui va en définir toute la vulnérabilité. « Char immobile = char mort » est la règle du combat de chars. Conséquemment, la guerre électronique russe va les immobiliser pour les livrer aux projectiles quels qu’ils soient.

– On parle aussi du Challenger II anglais, mais on s’abstiendra d’en donner un quelconque jugement tant il est mauvais. Un seul conseil : prévoir les body bags !

Cependant, le vrai problème tactique n’est même pas là. Le char en lui-même n’existe pas. N’existe que le système de chars et par conséquent le problème n’est pas de casser du char, mais de « péter le système ». Et ça c’est tactiquement facile puisqu’il suffit de détecter puis de détruire sa tête. Il faut 20 ans pour la reconstruire alors qu’il ne faut que 24 heures pour remplacer un char.

On le voit, les stratégies réciproques qui semblent s’affronter en Ukraine ne répondent en rien à un système physique de deux forces antagonistes de même direction et de sens opposés.

Les généraux de plateau et la pensée magique

Plus que jamais cette guerre vue de l’extérieur est celle de l’aveugle contre le paralytique dans un buisson d’ortie. 

Le Russe attend, tapi au fond d’une nasse que l’ Américain a lui-même construit, pendant que ce même Américain n’a de cesse de remplir cette nasse avec tout et n’importe quoi pour en absorber les capacités destructrices.

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Une victoire russe en Ukraine ne mettra pas fin à la guerre

par Mike Whitney - Le 26/01/2023.

Derrière l’appel désespéré de Washington à fournir des chars et d’autres armes mortelles à l’Ukraine, se profile la perspective lancinante que l’offensive hivernale de la Russie pourrait avoir déjà commencé dans le sud, où de violents combats ont éclaté le long de la ligne de contact dans la région de Zaporijia. Si les informations en provenance du front restent sommaires, certains analystes pensent que la Russie envisage d’envoyer ses troupes et ses unités blindées vers le nord afin de bloquer les lignes d’approvisionnement vitales et de piéger les forces ukrainiennes à l’est. Un blitz russe vers le nord serait probablement synchronisé avec le mouvement d’un deuxième grand groupe poussant vers le sud le long de la rivière Oskil. Ces deux poussées en forme de poignard seraient accompagnées de multiples frappes de missiles visant les ponts stratégiques et les lignes de chemin de fer traversant le Dniepr. Si les Russes parvenaient à mener à bien une telle opération, le gros de l’armée ukrainienne serait effectivement encerclé à l’est, tandis que Moscou aurait repris le contrôle de la plupart de ses territoires traditionnels. L’offensive ne mettrait peut-être pas fin à la guerre, mais elle mettrait fin à l’existence de l’Ukraine en tant qu’État viable et contigu. Ceci est un extrait d’un article paru sur Al Jazeera :

« Les forces de Moscou poussent vers deux villes de la région de Zaporijia, dans le sud de l’Ukraine, où les combats se sont intensifiés cette semaine après plusieurs mois de stagnation du front… Vladimir Rogov, un responsable installé par les Russes dans la région, a déclaré que les actions offensives étaient concentrées autour de deux villes : Orikhiv, à environ 50 km (30 miles) au sud de Zaporijia, la capitale régionale contrôlée par les Ukrainiens, et Hulyaipole, plus à l’est. (…)

L’armée russe a ensuite affirmé, pour la deuxième journée consécutive, avoir pris des « lignes et positions plus avantageuses » après des « opérations offensives » dans la région de Zaporijia. (…) Dans son rapport quotidien de dimanche, l’armée ukrainienne a déclaré que « plus de 15 localités ont été touchées par des tirs d’artillerie » à Zaporijia. (…) Il a également déclaré cette semaine que les combats ont « fortement augmenté » dans la région du sud »1.

Normalement, je ne m’attarderais pas sur un sujet pour lequel il y a si peu de preuves et tant de spéculations. Mais les gens suivent de très près les événements en Ukraine parce qu’ils veulent savoir ce que Poutine prévoit de faire avec les 550 000 soldats qui sont actuellement dispersés sur le théâtre des opérations ou rassemblés le long du périmètre en Biélorussie. L’hypothèse est que Poutine va utiliser ces forces dans une offensive hivernale qui pourrait avoir un impact considérable sur le cours de la guerre. Je suis d’accord avec cette hypothèse, mais je ne suis pas entièrement convaincu que les combats dans le sud prouvent que l’offensive a déjà commencé. Malgré cela, le buzz sur les chaînes Telegram et Twitter est difficile à ignorer et pourrait indiquer que mon scepticisme est injustifié. Par exemple, voici quelques extraits de sites indépendants qui suggèrent que l’offensive est déjà en cours :

« L’armée russe continue à avancer activement dans la direction de Zaporijia, le front a été poussé à une profondeur de 7 km. En ce moment notre avance dans trois directions sur la section Orekhov. A l’ouest, il y a des combats pour Novoandreyevka et Shcherbaki, à l’est pour Belogorye et Malaya Tokmachka, au sud-est il y a des combats pour Novodanilovka, qui est seulement à 6,5 km de Orekhov. Une percée défensive ici permettra aux forces armées de la FR de développer une offensive dans plusieurs directions à la fois, coupant littéralement le groupement des FAU en deux parties ». (Telegram)

Ou ceci :

« Mise à jour de Zaporijia

L’armée russe poursuit son offensive sur le front de Zaporijia

Les troupes des districts militaires Sud et Est mènent une offensive sur un large front – jusqu’à 60 km (dans les districts Vasilyevsky et Pologovsky).

L’avancée des troupes est ralentie en raison de nombreux champs de mines. »

Ou ceci :

« L’offensive se déroule comme prévu : Combats rapprochés dans plusieurs zones. Les positions fortifiées et les régions de l’ennemi sont activement traitées avec des bombes, des mines et des obus d’obusier ; ensuite seulement viennent les véhicules blindés avec l’infanterie.

Selon l’état-major général des forces armées ukrainiennes dans la direction de Zaporijia, les forces armées de la FR frappent les forces armées ukrainiennes avec tous types d’armes dans les zones de plus de 25 localités, dont Olgovskoe, Gulyaipole, Volshebnoe, Novodanilovka, Kamenskoe et Plavni de la région de Zaporijia, Vremovka et Novopol ».

Ce n’est qu’un petit échantillon des messages qui inondent divers sites depuis quelques jours. Un grand nombre de commentaires proviennent de personnes qui semblent avoir une connaissance directe des événements sur le champ de bataille. Je ne peux pas parler de leur exactitude, mais le volume des rapports (et leur intensité) suggère que quelque chose d’inhabituel est en train de se produire.

Il y a aussi un nouveau post sur Moon of Alabama dans lequel Bernard affirme sans équivoque que l’offensive est déjà en cours. Voici ce qu’il dit :

« L’offensive russe tant attendue en Ukraine a commencé. (…)

D’autres et moi-même avons suggéré depuis un certain temps que les forces russes utiliseront la région sud de Zaporijia pour une grande poussée à l’arrière des forces ukrainiennes autour de Bakhmout. (…)

Les mouvements russes contre les troisième et quatrième lignes de défense ukrainiennes seront probablement soutenus par un mouvement venant du sud qui libérera le reste des oblasts de Zaporijia et de Donetsk. (…)

Il n’y a pas de brigade d’artillerie ukrainienne dans ce secteur. Il n’y a donc aucune capacité de contre-artillerie disponible. (…) L’objectif de la poussée russe dans le sud ne sera pas de prendre des villes comme Zaporijia. L’objectif est d’amener les principales voies de transport, les chemins de fer et les routes, de l’ouest de l’Ukraine au front de l’est de l’Ukraine sous le feu de l’artillerie russe. Cela empêchera non seulement le réapprovisionnement des troupes ukrainiennes sur le front oriental, mais aussi leur sortie de la ligne de front. Une poussée de 100 kilomètres vers le nord y parviendrait en grande partie. Une poussée complémentaire du nord vers le sud, qui pourrait ou non arriver, fermerait définitivement le chaudron »2.

Bien que je ne sois toujours pas sûr que l’offensive ait réellement commencé, je suis entièrement d’accord avec MoA pour dire que le plan de la Russie sera une variation de la stratégie qu’il présente dans son article. En fait, une stratégie similaire a été exposée par l’historien militaire Big Serge dans un récent billet de Substack intitulé « Guerre russo-ukrainienne : la pompe à sang mondiale ». Les deux analystes semblent avoir tiré des conclusions similaires quant à ce à quoi nous devons nous attendre dans les semaines à venir. Voici un extrait de l’article :

« Pour le moment, la majorité de la puissance de combat russe n’est pas engagée, et les sources occidentales et ukrainiennes sont (tardivement) de plus en plus alarmées par la perspective d’une offensive russe dans les semaines à venir. Actuellement, l’ensemble de la position ukrainienne à l’est est vulnérable car il s’agit, en fait, d’un énorme saillant, vulnérable à une attaque provenant de trois directions.

Deux objectifs de profondeur opérationnelle en particulier ont le potentiel de briser la logistique et le soutien ukrainiens. Il s’agit, respectivement, d’Izioum au nord et de Pavlograd au sud. Une poussée russe le long de la rive ouest de la rivière Oskil vers Izioum menacerait simultanément de couper et de détruire le groupement ukrainien sur l’axe de Svatove (S sur la carte) et de couper l’autoroute M03 vitale pour Kharkov. Atteindre Pavlograd, d’autre part, isolerait complètement les forces ukrainiennes autour de Donetsk et couperait une grande partie du transit ukrainien à travers le Dniepr.

Izioum et Pavlograd se trouvent toutes deux à environ 110km des lignes de départ d’une éventuelle offensive russe, et offrent donc une combinaison très tentante : elles sont à la fois importantes sur le plan opérationnel et relativement faciles à atteindre. Depuis hier, nous avons commencé à voir des avancées russes sur l’axe de Zaporijia. Bien qu’il s’agisse, pour l’instant, principalement de reconnaissances en force poussant dans la « zone grise » (ce front interstitiel ambigu), le ministère russe de la Défense a fait état de plusieurs prises de colonies, ce qui pourrait présager une véritable offensive dans cette direction. L’indice clé serait un assaut russe sur Orikhiv, qui est une grande ville avec une véritable garnison ukrainienne. Une attaque russe ici indiquerait que quelque chose de plus qu’une attaque de sondage est en cours.

Il est parfois difficile de faire la différence entre ce que nous prévoyons et ce que nous voulons. C’est certainement ce que je choisirais si j’étais en charge de la planification russe – une poussée vers le sud le long de la rive ouest de la rivière Oskil sur l’axe Koupiansk-Izioum, et une attaque simultanée vers le nord au-delà de Zaporijia vers Pavlograd. Dans ce cas, je pense qu’il est préférable de simplement protéger Zaporijia à court terme plutôt que de s’enliser dans une bataille urbaine.

Nous ne savons pas si la Russie tentera réellement de le faire. La sécurité opérationnelle russe est bien meilleure que celle de l’Ukraine ou de ses forces supplétives (Wagner et la Milita de la RPL/RPD), de sorte que nous en savons beaucoup moins sur les déploiements de la Russie que sur ceux de l’Ukraine. Quoi qu’il en soit, nous savons que la Russie jouit d’une forte prépondérance de la puissance de combat à l’heure actuelle, et qu’il existe des cibles opérationnelles juteuses à portée de main »3.

Sans surprise, des combats ont éclaté autour d’Orikhiv, ce qui, selon Big Serge, « indiquerait que quelque chose de plus qu’une attaque de sondage est en cours ». En d’autres termes, il pourrait s’agir, en fait, de la phase d’ouverture de l’offensive d’hiver. Et, si c’est le cas, nous devons supposer qu’il y aura un changement par rapport aux « batailles d’usure positionnelles » que nous avons vues jusqu’à présent. L’offensive russe ne sera pas confrontée à des lignes défensives de tranchées lourdement fortifiées qui nécessitent des semaines d’assouplissement avec de l’artillerie à longue portée jusqu’à ce que les unités blindées puissent être envoyées pour des opérations de nettoyage. Les mouvements de la Grande Flèche que Serge anticipe suggèrent que nous pourrions voir des gains territoriaux significatifs dans des zones peu défendues. Cela signifie que les choses vont probablement évoluer beaucoup plus rapidement qu’au cours des 11 derniers mois. Cela signifie également que les forces ukrainiennes dans le Donbass seront effectivement coupées de Kiev et devront se débrouiller seules. Naturellement, les pertes sont appelées à être importantes.

Selon les médias, le directeur de la CIA, William Burns, s’est secrètement rendu à Kiev la semaine dernière pour avertir Zelensky de l’offensive russe imminente. Burns a probablement présenté un scénario très similaire à la stratégie exposée par MoA et Big Serge. Mais quoi que Burns ait pu dire à Zelensky, cela n’a eu aucun effet sur le président ukrainien. Zelensky a continué à envoyer des troupes sur les lignes de front (Bakhmout) malgré le caractère désespéré de la situation et malgré le fait que les positions défensives ukrainiennes s’effondrent de jour en jour. Il ne fait plus aucun doute que les forces russes éradiqueront les poches de résistance à l’est ou que les restes malmenés de l’armée ukrainienne seront contraints de battre en retraite. Ce n’est qu’une question de temps.

Nous ne disons pas que tout va être « tranquille » pour les Russes à partir de maintenant. Non, il y aura de nombreux obstacles sur la route. Mais étant donné la supériorité de la Russie en termes d’effectifs, de puissance de feu et de base industrielle, nous pensons que la Russie gagnera sans aucun doute cette première phase de la guerre. Le problème est que – même si l’armée russe nettoie tout le territoire à l’est du fleuve Dniepr et l’annexe à la Fédération de Russie – cela ne signifie pas que les combats vont s’arrêter. Ils ne s’arrêteront pas. Les forces soutenues par les États-Unis continueront à lancer des attaques depuis l’autre côté du fleuve, elles déploieront des commandos pour frapper derrière les lignes russes, elles formeront des paramilitaires pour déclencher une insurrection, et elles tireront des missiles sur la Crimée, la Russie et, peut-être, sur Moscou même.

Poutine est-il prêt pour cela ?

Washington ne va pas jeter l’éponge parce que la Russie a gagné le premier round d’un combat de 10 rounds. Les États-Unis sont toujours pleinement engagés dans leur plan visant à « affaiblir » la Russie afin de devenir l’acteur dominant du marché le plus prometteur du monde, l’Asie centrale. À cet égard, les combats en Ukraine n’ont en rien entamé la détermination de Washington. En fait, nous pensons que le conflit alimente la russophobie généralisée et les appels incessants à la vengeance. Comment expliquer autrement l’escalade persistante qui n’a pas encore suscité la moindre protestation publique ? Et n’oubliez pas que les États-Unis ont déjà fait sauter Nord Stream 2, poussé l’Europe dans une grave dépression, saboté les lignes d’approvisionnement mondiales dans un avenir prévisible, fait dérailler le projet de « mondialisation » vieux de 40 ans et fait tout ce qui était en leur pouvoir pour pousser la Chine à une guerre armée. Ce que ces incidents montrent, c’est l’importance que les États-Unis attachent à leur rôle privilégié dans l’ordre mondial et les risques qu’ils sont prêts à prendre pour préserver ce rôle. En bref, les États-Unis sont prêts à faire « tout ce qu’il faut » pour conserver leur main de fer sur le pouvoir.

Si j’étais Poutine, je me préparerais à une lutte longue et sanglante. Car c’est ce qui l’attend.

source : The Unz Review

traduction Réseau International

  1. « La Russie avance vers deux villes de la région ukrainienne de Zaporijia », Al Jazeera
  2. « Ukraine – L’armée russe active le front sud », Moon of Alabama
  3. « Guerre russo-ukrainienne : la pompe à sang mondiale », Big Serge, Substack

Ukraine : Des livraisons de chars occidentaux ne seraient pas décisives

Source : Le Courrier des Stratèges - Par Philippe Migault - Le 25/01/2023.

Ukraine : Des livraisons de chars occidentaux ne seraient pas décisives – par Philippe Migault

Les livraisons de chars occidentaux à l’Ukraine sont-ils le secret de la future offensive victorieuse de l’Ukraine comme le pensent nos médias? Expert des questions militaires, co-fondateur de l’Institut Brennus, Philippe Migault propose de regarder les choses un peu plus froidement: pourquoi les Ukrainiens ont-ils soudain besoin de ces blindés alors qu’on nous expliquait qu’ils en avaient pris plusieurs centaines à la Russie? Et si on partait de considérations plus raisonnables sur le rapport de forces entre les deux belligérants?


La polémique portant sur la fourniture de chars occidentaux à l’Ukraine est révélatrice à plus d’un titre.

Elle met en exergue en premier lieu un apparent suivisme français vis-à-vis de Washington. Emmanuel Macron a été le premier dirigeant occidental à décider l’envoi de blindés « lourds » à Kiev, des AMX-10RC. Il n’exclut pas par ailleurs d’envoyer également des chars Leclerc«pourvu que cela ne soit pas escalatoire », réserve sur laquelle nous reviendrons.

A contrario, la répugnance de l’Allemagne à fournir des Léopard-2, et à autoriser le réexport vers l’Ukraine de ces blindés en dit long sur le caractère résolu d’un pays qui, parce qu’il peut investir 100 milliards d’euros dans sa défense, prétend devenir « le pilier de la défense conventionnelle en Europe» et dicter en conséquence ses volontés à ses alliés en termes militaro-industriels. Enfin elle démontre le manque de professionnalisme des médias occidentaux vis-à-vis de cette guerre. Aucun d’entre eux ne s’interroge sérieusement quant à ce besoin ukrainien en chars lourds et sur ce qu’il révèle. Or il ne peut répondre qu’à deux options :

Soit l’Ukraine espère percer les lignes russes avec ces blindés plus performants,

Soit elle ne dispose plus des capacités lui permettant de soutenir durablement ce conflit et a urgemment besoin de solides renforts..

 

Au mépris de la neutralité journalistique

Le premier scénario est bien entendu largement évoqué au sein de rédactions qui ont pris fait et cause pour l’Ukraine, au mépris de toute neutralité journalistique. Pour elles, si nous donnons des chars aux Ukrainiens c’est pour écraser la Russie« D’après le New York Times, l’administration Biden aux États-Unis devient « plus chaude envers l’idée que l’Ukraine attaque la Crimée », un territoire que la Russie avait annexé en 2014 et que Washington considérait jusque-là comme une ligne rouge à ne pas dépasser. Même le président français Emmanuel Macron, qui avait appelé dans le passé à ne pas « humilier » la Russie, parle désormais ouvertement d’une victoire de l’Ukraine et lui a promis des chars de combat légers AMX-10 RC, qui commenceront à arriver le mois prochain », s’enthousiasme TF1. Dans ce cas, il sera difficile à la France de livrer des Leclerc à Kiev. La participation de ceux-ci à une offensive majeure contre l’armée russe serait, pour le moins, « escalatoire », a fortiori si la Crimée est l’objectif. A moins de se montrer parfaitement incohérent, le Président de la République vient donc, une fois encore, de faire une promesse assortie d’une telle réserve qu’il n’est pas possible de la tenir.

Mais il n’est pas exclu non plus qu’Emmanuel Macron ne se montre très habile si c’est la seconde option, celle d’une défaite de l’Ukraine faute de renforts, qui corresponde aux faits. La France, depuis des mois, est accusée de soutenir une position modérée vis-à-vis de la Russie. Peut-être est-ce, tout simplement, qu’elle a compris que les Ukrainiens ne pouvaient pas vaincre les Russes. Dans ce cadre, la livraison de quelques dizaines d’AMX-10RC, qui devaient justement partir à la casse, permet à Paris de faire un geste, sans s’engager plus avant par le don de chars lourds, qui serait cautère sur jambe de bois. 

Les comptes fantastiques des experts

Il est de bon ton de souligner les pertes russes. Si l’on s’en réfère aux chiffres donnés par l’Amiral Bléjean, directeur de l’Etat-major de l’UE,  Moscou a perdu plus de 60% de son stock total de chars de combat, soit 6 000 blindés, depuis le début des hostilités.  « Kiev, «emporté par son élan», «compte gagner la guerre, en reprenant la Crimée comme les Oblasts de Louhansk et Donetsk». «À moins d’une surprise en matière de négociation, une offensive sanglante surviendra au printemps», affirme-t-il. Alors ? Pourquoi cet empressement de Volodymir Zelenski à réclamer urgemment 300 nouveaux chars, atout qui, selon de nombreux spécialistes, ne permettrait pas une victoire décisive ? Parce que le rapport de forces réel est infiniment moins favorable à l’Ukraine qu’on ne le dit.

Avec plus de 100 000 morts et blessés, les Ukrainiens ont subi une saignée proportionnellement plus lourde que celle consentie par la Russie, compte tenu du différentiel démographique entre les deux pays. Et du point de vue matériel le bilan est tout aussi éloquent.

Kiev disposait d’à peu près 850 chars de combat opérationnels lors du déclenchement de l’offensive russe. Elle en a perdu plus de la moitié, 449, si l’on s’en réfère à la source préférée des médias occidentaux, Oryx. Heureusement, peut-on lire, les Ukrainiens ont capturé plus de 543 chars russes depuis le début des combats dont 400 au moins en parfait état de marche. Avec le millier de chars d’assaut que les Ukrainiens avaient en réserve au début des hostilités, ils devraient donc disposer de quelques 1 800 chars. Sauf que ce n’est pas le cas. D’une part parce que le nombre de chars ukrainiens en ligne n’est sans doute pas de 1 800. Hors d’âge, ils ont un taux de maintien en condition opérationnelle faible et le chiffre des pertes subies est vraisemblablement plus important qu’annoncé.

En face la Russie n’a non seulement pas perdu 60% de ses chars, mais semble capable d’en engager rapidement 3 000 de plus. De surcroît elle est parvenue malgré les sanctions occidentales à accroître sa production de chars d’assaut, qui s’établit entre 450 et 500 unités par an, alors qu’il ne sort plus aucun char des usines ukrainiennes et que les chaînes de production occidentales ne sont pas en mesure de rivaliser à court terme.  Certes ces chars russes sont désormais privés de certains composants occidentaux qui leur apportaient une valeur ajoutée. Mais la masse finit quasi-systématiquement par l’emporter dans une guerre de haute intensité. Comme le rappelle le chef d’Etat-major des armées américain, Mark Miley, « il sera très difficile d’expulser les forces russes » d’Ukraine en 2023

L’urgence n’est peut-être pas de livrer des Leclerc, mais plutôt de songer sérieusement à négocier.

 

Léopard-2 allemands en Ukraine : La charge de la brigade légère ?

Source : Le Courrier des Stratèges - Par Philippe Migault - Le 25/01/2023.

Léopard-2 allemands en Ukraine : la charge de la brigade légère ? par Philippe Migault

 

La livraison de 14 chars allemands à l’Ukraine est annoncée comme un tournant majeur par la presse internationale, qui y voit le prélude à un envoi de chars lourds américains et de nombreux autres moyens blindés qui devraient permettre à Kiev de reprendre l’initiative. D’un point de vue stratégique, cependant, un tel scénario est loin d’être acquis.


Nous y voilà. Sonnez buccins et trompettes, la cavalerie arrive, l’Occident envoie ses chars en Ukraine. C’est à peu près le ton triomphaliste des médias occidentaux et des réseaux sociaux leur servant de caisse de résonance aujourd’hui. Y a-t-il, pourtant, de quoi s’exalter ? D’un point de vue politique et symbolique, peut-être.

Symboliquement, parce qu’en annonçant l’envoi de 14 Léopard-2 en Ukraine, l’Allemagne donne le feu vert pour l’envoi de dizaines d’autres blindés de ce type, actuellement en service dans de nombreuses armées en Europe. L’Ukraine reçoit un signal fort : « Vous n’êtes pas seuls. »

Politiquement, parce qu’Olaf Scholz, vient de briser un tabou absolu, a fortiori pour un chancelier social-démocrate, celui d’une intervention armée, fût-elle indirecte, en Europe orientale, contre les Russes. Une zone riche de souvenirs douloureux et honteux pour les Allemands, qui y ont perpétré leurs pires atrocités et subi leurs plus lourdes défaites.

De ces deux points de vue, nous assistons effectivement à une mutation. Sauf qu’« envoyer un signal fort », c’est bon pour les communicants, mais cela ne parle guère aux militaires et que, d’un point de vue militaire, il n’y a pas précisément pas de quoi s’emballer.

Certainement pas le tournant annoncé dans le conflit

Comme nous le soulignions hier, même si l’Ukraine venait à rentrer en possession des 300 chars modernes qu’elle réclame afin de percer les lignes russes, cela ne garantirait pas nécessairement un tournant dans le conflit.

En premier lieu parce que, comme précédemment souligné, la Russie est sans doute en capacité de mobiliser rapidement 3 000 chars supplémentaires, sur les 8 à 9 000 dont elle dispose en réserve. Aussi performants que les chars occidentaux puissent être, ils ne pourront pas surmonter leur infériorité numérique par leur stricte supériorité technologique. Certes les blindés dont il est question, Léopard-2 allemand et, peut-être, à plus long terme, M-1 Abrams américains, ont été spécifiquement conçus pour s’opposer à la déferlante des dizaines de milliers de chars soviétiques. Mais ils n’étaient pas conçus pour vaincre ce rouleau compresseur seuls. Dans le cadre d’Air Land Battle, la doctrine de combat américaine -et, par extension de l’OTAN, des années 80- ils étaient assurés de combattre dans un cadre interarmes et interarmées, avec le soutien des aviations de combat occidentales, des centaines d’hélicoptères antichars dont l’Alliance Atlantique s’était dotée, avec un appui d’artillerie conséquent et un puissant accompagnement d’infanterie mécanisée, le tout sur un théâtre d’opérations, l’Europe occidentale, dotée de très denses infrastructures routières, ferroviaires et aéroportuaires permettant des manœuvres rapides et puissantes pour contenir et refouler l’adversaire.

Or l’Ukraine n’a plus guère d’avions et d’hélicoptères de combat pour détruire les forces russes et frapper leurs arrières. La maîtrise de l’air appartient à l’aviation russe, qui dispose encore de centaines d’avions de combat. L’artillerie ukrainienne est surclassée par son homologue, qui, en dépit de ses pertes, dispose encore d’une capacité de frappe massive, avec plus de 80% de ses moyens intacts et une capacité de production d’obus lui permettant de combattre pendant des années encore. Il a fallu envoyer des VAB français et des M-113 américains antédiluviens pour permettre aux Ukrainiens de se doter de quelques unités d’infanterie mécanisée. Ne parlons pas enfin des réseaux routier, ferroviaire et aéroportuaire ukrainiens, d’une qualité et d’une densité toute soviétique.

Il faudra du temps pour remettre en service et expédier les chars

Par ailleurs, l’Ukraine ne va pas recevoir ces 300 chars demain, ni dans une semaine. Il va falloir fréquemment remettre à niveau des blindés que les Européens, occupés à encaisser les dividendes de la paix, n’ont souvent pas correctement entretenus. Il va falloir, aussi, former les équipages ukrainiens sur des machines bien plus performantes que les leurs, certes, mais aussi bien plus difficiles à maîtriser. Il faudra sans doute des mois pour qu’un poing blindé puissant et moderne ne se constitue. Sauf que pendant ce temps la Russie ne cesse de renforcer ses positions, que des dizaines de milliers d’hommes supplémentaires, actuellement à l’instruction, sont attendus dans les semaines qui viennent en première ligne et que ses usines d’armement tournent à bloc.

Nul ne sait qui passera à l’offensive le premier. Mais une chose est certaine : si les espoirs ukrainiens reposent sur la seule mise en œuvre des chars occidentaux, ils risquent fort de voir leur poing blindé rejouer la charge de la brigade légère…

Le gras est parti, coupez dans le muscle

 

par Helmholtz Smith - Le 21/01/2023.

Il y a seulement un mois environ, la machine de propagande occidentale était persuadée que l’Ukraine était en train de gagner. Mais il y a eu un changement. Prenez l’avertissement lancé hier par le président polonais Duda : « Ils (les Russes) sont encore très forts et nous craignons qu’ils ne se préparent à une nouvelle offensive dans quelques mois ». En septembre, il était convaincu que « la Russie avait démontré sa faiblesse ». Qu’est-ce qui a changé ? Je suppose que la capture de Soledar par Wagner et la situation autour de Bakhmout ont entamé la propagande de réconfort, mais qui sait – les dirigeants occidentaux vivent dans un « bain de langue de l’illusion agréable » conçu pour écarter la réalité.

Quelle que soit la raison, la confiance en l’échec russe s’estompe. (OK – la petite-fille de Chomiak y croit encore.) Les officiels ukrainiens disent que leurs pertes sont « énormes, indigestes ». Les grands acteurs de la guerre disent que le temps n’est pas du côté de l’Ukraine. Même CNN affirme que « le temps s’écoule rapidement » et que la Russie pourrait lancer une « nouvelle offensive féroce ». Il faut faire quelque chose ! Et ce quelque chose est – attendez ! !! Ta dah !! Plus d’armes !! (Vous vous attendiez à ce que ces imbéciles aient une nouvelle idée ?). Il y a un an, l’Ukraine avait un énorme arsenal et l’OTAN lui en a envoyé beaucoup depuis. Voici une liste – 410 MBTs, 300 IFVs, 700 canons, 95 MLRS.

Ce n’est pas suffisant. La Russie a détruit la majeure partie de l’armée ukrainienne 1, la majeure partie de l’armée ukrainienne 2 fournie par l’OTAN. Il est temps de passer à l’armée ukrainienne 3 fournie par l’OTAN.

Mais les stocks de l’Occident sont vides, disent Borrell, Stoltenberg, Del Toro. « Nous avons essentiellement utilisé l’équivalent de 13 ans de production de Stinger et de 5 ans de production de Javelin ». Et ils ne seront pas remplis de sitôt. Voici une estimation du temps qu’il faudra aux États-Unis pour remplacer les munitions et les armes envoyées en Ukraine – HIMARS en cinq ans, tout le reste plus longtemps. Probablement du côté optimiste – beaucoup de goulots d’étranglement à fournisseur unique. « Nous n’avons pas encore trouvé de solution ». Non, c’est faux. Et ce sont les États-Unis qui ont une industrie de l’armement gigantesque. En Europe – ou en Allemagne en tout cas – il semble que rien de ce qu’ils ont ne fonctionne vraiment.

Plus de graisse à envoyer, il est temps de couper dans le muscle de l’OTAN.

Les premières offres pour l’armée ukrainienne 3 sont des véhicules vieux de plusieurs dizaines d’années – obsolètes oui, mais parce que leurs remplaçants n’existent pas ou sont des ratés, ils sont en fait du muscle – même s’ils sont un peu ridés. Les États-Unis ont donné le coup d’envoi de ce dernier cycle en annonçant qu’ils enverraient environ 50 VCI Bradley. La France envoie quelques AMX-10 RC et l’Allemagne promet environ 40 VCI Marder.

Mais des véhicules non blindés sont également envoyés. Nous avons appris aujourd’hui que le Danemark enverra 19 GSP Caesar à l’Ukraine. C’est tout ce qu’ils ont. La Grande-Bretagne envoie environ 30 AS 90, soit un quart de ses stocks. Les États-Unis ont pénétré dans les stocks d’urgence de munitions de 155 mm entreposés en Israël (Syriens, Irakiens, Palestiniens – vous m’écoutez ?).

Voici le reste de la déclaration de Duda : « Il était crucial de fournir un soutien supplémentaire à Kiev avec des chars et des missiles modernes ». Les chars sont la nouvelle wonderwaffe qui permettra au général Steiner de se rendre à Moscou. (Il y a un an, l’Ukraine disposait de centaines et de centaines de chars de l’ère soviétique et a reçu 400 autres chars de l’ère soviétique. Où sont-ils passés ?) Londres a été la première à donner le coup d’envoi en annonçant qu’elle enverrait 14 (14 !) Challenger 2 (environ 6% de ses avoirs) – « une lacune dans notre inventaire », selon le plus haut soldat britannique. C’est du muscle. Les Léopards allemands seront-ils envoyés ? Pour l’instant, l’Allemagne dit que non et qu’elle ne permettra pas aux autres pays d’envoyer les leurs, et les États-Unis disent qu’ils n’enverront pas leurs chars Abrams. Mais nous verrons bien – la réunion de demain à Ramstein nous en dira plus.

Les vrais étudiants de la guerre savent que « les professionnels parlent de logistique » et Brian Berletic explique ici les problèmes logistiques de tous ces différents chars. Selon toute vraisemblance, ils seront à usage unique – dès que quelque chose se casse ou qu’ils sont à court de munitions, ils seront abandonnés. Les chars ne feront pas l’affaire.

Voici ce que les médias occidentaux ne vous ont pas dit. Les forces armées russes en tant que telles n’ont pas été très impliquées jusqu’à présent. Parachutistes au début, un peu d’aviation rapide et de voilure tournante, beaucoup d’artillerie tout au long de l’opération. Mais les grands combats ont été menés par les milices du Donbass partout, Wagner au complexe de défense de Bakhmout, les Tchétchènes à Marioupol. Le gros morceau n’a pas encore été lâché.

Les forces armées russes proprement dites comptent 200 000 à 500 000 soldats armés, entraînés et équipés (beaucoup de chars – les derniers T-90 font leur apparition). Vont-elles rester complaisamment assises à regarder l’Ukraine et l’OTAN se « démilitariser » ? Ou une offensive de type « grande flèche » est-elle en préparation ? C’est à Moscou de choisir.

L’optimiste peut espérer que les annonces de wonderwaffe qui ne sont pas réellement arrivées en Ukraine sont la justification que « nous avons fait tout ce que nous pouvions » avant le décollage de l’aéroport de Kaboul Ouest.

Le pessimiste peut craindre que l’OTAN, lorsqu’elle arrivera enfin au fond du baril et qu’elle se sera coupé les bras et les jambes, n’utilise la dernière arme dont elle dispose.

Moi, je vais au magasin d’alcools – je suis trop vieux pour faire l’affaire.

source : A Son of The New American Revolution

traduction Réseau International

Leclerc en Ukraine ?

Critères techniques pour une décision politique !

Commniqué par le Gal. Bernard Janvier - Le 20/01/2023.

 

Dans une intervention devant le Sénat, Sébastien LECORNU est revenu aujourd'hui  sur les cessions de matériels à l'Ukraine et plus particulièrement celles d'engins blindés. Après avoir rappelé que les Ukrainiens avaient salué la proposition française de fournir à Kiev des AMX 10RC, le MinArm a indiqué que la demande ukrainienne de chars Leclerc était en cours d'instruction. En dépit de son caractère spécifique, l'analyse de la requête ukrainienne est conduite à l'aide de critères communs à toutes les demandes formulées par Kiev. Ces trois critères "universels" qui semblent constituer la clé de voûte de l'examen des besoins exprimés par Kiev sont présentés ci-dessous ainsi que les remarques que ces points ont inspiré à Blablachars. 

  

Le premier critère retenu par le Gouvernement pour cette analyse est le suivant : "Nous assurer que l'équipement est utilisé à des fins défensives". Avant de formuler des remarques sur ce critère, il serait intéressant de savoir comment la France pense s'assurer de l'utilisation à des fins défensives des chars transférés ? A côté de précaution oratoire, la première remarque qui peut être formulée tient à la nature même de l'engin? Un char que l'on appelle souvent d'assaut est par définition un engin offensif. Son introduction sur le champ de bataille en 1917 répondait bien à la volonté des états-majors de briser les lignes ennemies en s'affranchissant des tranchées et en éliminant les combattants. Aujourd'hui, si le char est devenu plus polyvalent et employé au sein de dispositifs flexibles, il reste avant tout un engin de combat destiné à accomplir des missions de toute nature, face à une grande variété d'adversaires. La limitation de sa seule utilisation à des fins défensives est parfaitement illusoire et priverait l'armée ukrainienne de ces chars pour d'éventuelles contre-attaques ou contre-offensives, missions ne correspondant pas du tout au critère énoncé par le gouvernement.  Les Leclerc devraient donc être affectés à des missions statiques ou ne faisant pas appel aux capacités d'agression du char, ce qui serait un peu dommageable. Avec une absence quasi totale de tout contrôle sur l'utilisation à des fins défensives des chars, le transfert de Leclerc ne peut être envisagé selon ce critère.

 

Le second critère retenu par le Gouvernement est le suivant : "Ne pas affaiblir notre système de défense". Avec un parc avoisinant les 200 unités devant être rénovées à l'horizon 2029, la question d'affaiblir notre système de défense se pose réellement en cas de transfert de 14 chars, volume qui représenterait 7% du parc total, soit un pourcentage légèrement supérieur au pourcentage britannique se situant à 6,11% du parc. A ce critère purement mathématique s'ajoute la cinématique de la rénovation, enclenchée en 2021 par une commande de 50 chars à laquelle s'est ajoutée ces derniers jours une nouvelle tranche de 50 engins, portant le total des engins à rénover à 50% du parc existant. Les engins restant soit 100 devraient faire l'objet d'une ou plusieurs commandes qui devraient être notifiées après 2023. Le calendrier des opérations de rénovation prévoit la démarrage de la production en série à partir du printemps prochain pour permettre la livraison des 18 premiers exemplaires avant la fin de l'année. A côté de ces opérations planifiées plusieurs facteurs concourent à augmenter le pourcentage évoqué plus haut. En effet, aux 18 chars immobilisés pour rénovation, viennent s'ajouter les 13 Leclerc déployés en Roumanie au sein de la Mission Aigle pour une durée prévisible d'un an, avant une probable relève qui devrait immobiliser 13 autres chars. Le nombre de chars ne pouvant pas être transférés s’élève donc à 31 engins (18+13) sur un parc total de 200. Ce parc de 169 engins affiche selon les derniers chiffres officiels une DTO (Disponibilité Technique Opérationnelle) de 80%, il est donc amputé de 33 chars correspondant aux 20% d'engins indisponibles. Le parc de Leclerc est donc composé de 136 engins réellement disponibles dans parmi lesquels il serait possible de prélever les 14 chars évoqués. En prenant en compte ces différents éléments,  le pourcentage que représenteraient ces 14 engins s'élèverait alors à 10,29% des chars Leclerc disponibles, laissant 122 chars à l'Armée de Terre. Le transfert de Leclerc à l'Ukraine pourrait donc affaiblir notre système de défense, et plus particulièrement sa composante blindée, partie intégrante de ce système.

 

Le troisième critère présenté par le MinArm est "la garantie de leur maintien en condition opérationnelle." Avant d'aller plus loin dans l'analyse de ce critère, il serait intéressant de savoir qui pourra fournir une telle garantie de MCO (Maintien en Condition Opérationnelle) dès lors que les chars seront déployés sur le territoire ukrainien ? Des maintenanciers français à moins que ce ne soit leurs homologues ukrainiens dont la formation de base prendrait  entre deux et cinq mois selon le niveau de responsabilité ? La création d'un détachement de soutien dans un pays avancé pourrait être envisagé en mutualisant cette entité avec le dispositif en place pour  les chars de la Mission Aigle, ce qui imposerait cependant la réalisation de rotations entre l'Ukraine et la Roumanie. Avec un coût unitaire mensuel de 20.000 euros, le MCO Leclerc de 14 chars pendant un an reviendrait à 3 360 000 euros hors carburant et munitions dont le coût alourdirait encore cette facture. Il faut en outre rappeler que les Leclerc français ont fait l'objet d'un contrat de maintenance notifié à Nexter en avril 2021. D'une durée de dix ans et d'un montant de 1 milliard d'euros, ce "marché forfaitaire avec engagement de résultat" comprend la gestion et la livraison des pièces de rechange, la documentation, la maîtrise et l'assistance technique des régiments, en vue de permettre l'augmentation de la DTO. En dépit ce contrat couvrant à peine les besoins de l'Armée de Terre, cette dernière pourrait tout de même chuter fortement à la suite de ce transfert, en raison des inévitables prélèvements qui ne manqueraient pas d'être effectués pour le MCO des chars fournis à l'Ukraine. Cette "double peine" associée à la difficulté de réaliser les opérations de MCO ainsi que l'impact prévisible sur la DTO des chars de l'armée de terre, ce transfert ne parait pas envisageable.

 

Cette rapide analyse du "geste fort" selon les trois critères énoncés par le MinArm démontre que le transfert de ces 14 Leclerc qui ne seront pas utilisés à des fins uniquement défensives, dont le prélèvement sur la ressource existante affaiblirait notre système de défense et dont le MCO ne saurait être garanti, ne devrait donc pas avoir lieu. Cependant, de plus en plus de signaux indiquent que ce transfert pourrait tout de même avoir lieu en dépit de son caractère totalement irrationnel pour la France et pour l'Ukraine. Celle-ci va se retrouve avec une multitude de parcs de volume "symbolique" dont le simple assemblage ne présente aucune garantie d'efficacité globale sur la suite des opérations. Comme celui des AMX 10RC, ce transfert doit être envisagé sous un angle politique comme un signal envoyé par la France à nos voisins d'outre-Rhin. L'Allemagne dont la position sur le sujet devient chaque jour plus difficile pourrait en effet accorder l'autorisation de réexportation des Leopard 2 polonais et finlandais sous l'effet de ce dernier coup de boutoir que serait le transfert par la France de 14 Leclerc !

 

Le char français si décrié depuis sa mise en service est aujourd'hui l'objet de toutes les attentions politico-médiatiques. Ses fossoyeurs d'hier qui le trouvaient trop lourd, trop cher et inutile vantent aujourd'hui ses qualités, sa capacité à changer le cours de la guerre et même à sauver l'Honneur de la France. Au delà de ces circonvolutions oratoires, ce possible transfert met surtout en lumière les renoncements et abandons français dans le domaine du combat blindé mécanisé.

Il pourrait nous obliger à "piocher" dans une ressource déjà bien maigre, ce que nous risquons de payer fort cher dans les prochaines semaines si ce transfert se réalise !

 

CNN continue la tendance à briser le récit officiel de l’Occident sur l’Ukraine.


Par Andrew Korybko – Le 18 janvier 2023 – Sa newsletter

Il ne fait aucun doute que le dernier article de CNN contredit le récit fabriqué artificiellement sur l’Ukraine que ce média lui-même a pourtant contribué à créer au cours de l’année écoulée. Juste la veille, j’avais prédit dans mon analyse pourquoi le Premier ministre polonais avait prévenu lors de son voyage à Berlin lundi que Kiev pourrait perdre, que « le récit officiel continuera de changer » et « les médias grand public vont bientôt répéter son dramatique alarmisme » ; c’est précisément ce qui s’est passé moins de 24 heures plus tard.

Aucun observateur objectif ne peut maintenant nier qu’une tendance se perçoit dans laquelle le « récit officiel » de l’Occident est brisé par les mêmes forces qui l’ont fabriqué artificiellement. CNN vient de sauter dans le train en marche avec son article en première page du mercredi. Le journaliste de la Maison Blanche, Stephen Collinson, a titré un article dans lequel il a déclaré de façon dramatique que « Biden atteint un nouveau point de basculement vital sur l’Ukraine« , ce qui contredit complètement tout ce que CNN affirmait précédemment.

 

Selon l’homme qui fait partie des principaux responsables de la perception de cet important média américain, « le temps presse également pour les États-Unis et leurs alliés d’envoyer des armes plus puissantes et de former les soldats ukrainiens à les utiliser avant cette deuxième année peut-être décisive de la guerre, qui pourrait voir la Russie lancer une nouvelle offensive féroce. » On est loin du triomphalisme prématuré de l’année dernière lorsque CNN laissait entendre que l’inévitable victoire de Kiev était un fait accompli.

De plus, dans ce qui pourrait être une première pour les médias grand public, Collinson a reconnu les critiques croissantes du milliard doré occidental contre la mendicité sans fin de Kiev en écrivant que « l’Ukraine, compte tenu de sa situation désespérée, en voudra toujours plus« . Il a également brisé le tabou en posant la question : « L’Occident s’est-il engagé à aider l’Ukraine à expulser l’envahisseur de tout son territoire ?… Ou limite-t-il ses efforts à donner à l’Ukraine suffisamment d’acier pour survivre mais pas pour gagner ? »

Bien qu’il n’ait pas directement abordé l’éléphant dans la pièce, ces deux passages pourraient être interprétés comme une allusion à la crise militaro-industrielle qui afflige actuellement les capacités de facto de ce bloc de la Nouvelle Guerre froide à continuer d’approvisionner Kiev au même rythme, à la même échelle , et comme avant. La crise susmentionnée a été officiellement reconnue par nul autre que le secrétaire à la marine de Biden la semaine dernière, qui a averti que les États-Unis pourraient bientôt devoir choisir entre répondre à leurs propres besoins ou à ceux de Kiev.

Collinson a poursuivi la tendance à briser le récit officiel de l’Occident sur l’Ukraine en remettant en question l’engagement de l’administration Biden envers elle, se demandant même si le titulaire finira par ruiner son héritage. Selon ses propres termes, « l’héritage de Biden en Ukraine – en tant qu’auteur de l’une des entreprises de politique étrangère américaine les plus importantes et les plus réussies depuis des décennies – n’aura que peu d’importance si Washington ne continue pas à financer et à armer les forces de Zelensky aussi longtemps que durera un conflit sans fin en vue. »

Il s’agit clairement d’une référence aux hauts responsables ukrainiens et aux anciens responsables américains comme le ministre de la Défense sortant, Alexey Reznikov, et l’ancien secrétaire à la Défense du second, Robert Gates, qui ont récemment fait pression pour avoir encore plus que les 100 milliards de dollars d’aide que Washington a accordés à Kiev jusqu’à présent. La somme sans précédent versée à cette ancienne République soviétique corrompue en seulement 10 mois suscite déjà beaucoup de controverses dans le pays, et on s’attend à ce que la Chambre dirigée par les Républicains tente de réduire davantage cette aide.

La libération de Soledar a vraiment été un événement important malgré tous les discours contraires des médias grand public au cours du mois dernier, car c’est ce développement récent et tout ce qu’il implique pour la bataille du Donbass qui a conduit le Premier ministre polonais, puis CNN, à changer de manière irréversible le « récit officiel » du conflit.

Mon article susmentionné expliquait également pourquoi il est clair que le conflit ukrainien a atteint une phase cruciale, dont l’essentiel a été observé en partie par Collinson, qui a accordé du crédit à mes observations militaro-stratégiques de la veille. Tout cela montre que les médias grand public ne peuvent plus mentir sur cette guerre par procuration puisque les faits sont aujourd’hui impossibles à nier purement et simplement, si ces gestionnaires de la perception espèrent conserver la moindre crédibilité aux yeux de leur public cible.

Pour cette raison, les hauts responsables ukrainiens et anciens américains mentionnés précédemment ont mené la charge avec leur lobbying au début du mois, qui a ensuite été suivi par le voyage paniqué du Premier ministre polonais à Berlin peu après la libération de Soledar. Deux jours seulement se sont écoulés entre l’éclatement autoritaire du « récit officiel » de ce conflit par ce haut responsable occidental et la reprise par CNN de l’esprit de ce qu’il a dit, ce qui montre à quel point la situations est mauvaise pour Kiev à ce stade du conflit.

Andrew Korybko

Traduit par Wayan, relu par Hervé, pour le Saker Francophone.

Ukraine. Forte pression pour obtenir des chars

Source : The Saker francophone - par Moon of Alabama - Le 19/01/2023.


Par Moon of Alabama – Le 19 janvier 2023

Le chancelier allemand Olaf Schulz subit des pressions de la part des partenaires de la coalition locale et des alliés extérieurs pour autoriser l’exportation de chars Leopard 2 allemands vers l’Ukraine.

Scholz refuse jusqu’à présent de le faire parce que les États-Unis ne sont pas disposés à donner leurs propres chars, de type M1 Abrams, à l’Ukraine :

 

L’Allemagne n’enverra pas ou n’autorisera pas le transfert de chars à l’Ukraine tant que les États-Unis n’accepteront pas de donner les leurs, a déclaré le chancelier allemand Olaf Scholz aux législateurs américains en marge du Forum économique mondial mercredi.

L’échange à Davos, décrit par trois personnes ayant connaissance de ce qui s’est dit, était respectueux dans le ton mais a montré à quel point Washington et Berlin sont éloignés au sujet des chars.

Un porte-parole de Scholz n’a pas immédiatement répondu à une demande de commentaire. Mais le chancelier a fait allusion à une sorte d’arrangement avec les États-Unis lors de son discours de Davos.

« Nous ne faisons jamais quelque chose tout seuls, mais avec d’autres, notamment les États-Unis, qui sont très importants dans cette tâche commune de défendre l’indépendance et la souveraineté de l’Ukraine« , a-t-il déclaré.

Les États-Unis ont envoyé leur secrétaire à la défense, Lloyd Austin, à Berlin pour faire pression sur Scholz afin qu’il change d’avis :

Le secrétaire à la défense, Lloyd Austin, a rencontré jeudi son homologue allemand nouvellement nommé pour des discussions qui ont pris un caractère d’urgence depuis que Berlin a posé des conditions sur les livraisons de chars à l’Ukraine.

Lors d’un appel cette semaine au président Biden, le chancelier allemand Olaf Scholz a souligné que pour que l’Allemagne débloque un paquet de chars Leopard 2 pour l’Ukraine, Washington devrait également envoyer des chars, selon un fonctionnaire allemand et un fonctionnaire américain, qui ont parlé sous couvert d’anonymat pour discuter de la conversation privée.

C’est un geste que Washington ne veut pas faire, citant la consommation élevée de carburant et le fardeau de la maintenance des chars de combat M1 Abrams de l’armée américaine. Austin espère sortir de cette impasse et persuader l’Allemagne d’envoyer des chars, selon un haut responsable de la défense américaine.

L’excuse donnée par Washington pour ne pas livrer les chars Abrams n’est pas vraiment crédible. Oui, l’Abrams à turbine consomme un peu plus de carburant que le moteur diesel du Leopard. Mais une turbine nécessite également moins d’entretien qu’un moteur diesel qui comporte beaucoup plus de pièces mobiles.

Hormis le moteur, les Abrams n’ont pas de pièces plus importantes que celles des Léopards. La formation à l’utilisation et à l’entretien de l’un ou l’autre ne diffère pas en termes de temps nécessaire ou d’intensité.

Il existe également une fausse impression, véhiculée par certains marchands d’armes (en allemand), selon laquelle des « centaines » de Léopards sont disponibles. Cela n’a aucun sens. Tous les Leopard ne sont pas semblables les uns aux autres. La variante la plus standardisée est le Leopard 2A4. En fin de compte, l’Ukraine pourrait en recevoir jusqu’à 50. Le char standard allemand actuel est le Leopard 2A7 qui a subi trois mises à niveau depuis la sortie de la version A4. Plusieurs pays disposent de versions intermédiaires, souvent dotées de leurs propres systèmes de contrôle d’armes et de communication. Il serait absurde, du point de vue de la formation et de la maintenance, de donner à l’Ukraine une panoplie de différents types de Leopard. La logistique nécessaire pour les soutenir deviendrait immédiatement irréalisable.

D’autres problèmes se posent également. Les chars de l’ère soviétique pèsent environ 40 tonnes métriques. Tous les chars de combat principaux « occidentaux » Abrams, Leopard, Challenger britannique et Leclerc français ont un poids de combat de l’ordre de 60 tonnes. Je doute que les routes rurales et les ponts ukrainiens aient été construits en tenant compte de ces chars. À quoi sert un char si vous ne pouvez pas le déplacer sans détruire vos propres voies d’approvisionnement ?

Il y a aussi l’importante question de la formation. Il ne s’agit pas seulement de la technologie du char mais de son utilisation tactique sur le terrain. L’expérience turque en Syrie a montré que de mauvaises tactiques en matière de chars entraînent inévitablement de mauvais résultats, quelle que soit la qualité des chars.

Revenons au problème initial.

Pourquoi les États-Unis refusent-ils d’envoyer des Abrams, alors qu’ils en ont des centaines facilement livrables dans divers dépôts et sites de prépositionnement ?

Le chancelier allemand semble penser que les États-Unis veulent se soustraire à leur engagement et à leur responsabilité dans la future défaite de l’Ukraine.

« Les Allemands étaient responsables de la livraison des chars, mais ils ne les ont pas livrés rapidement et pas en quantité suffisante« , pourrait devenir une excuse commode lorsque le projet néoconservateur ukrainien échouera, comme ce sera inévitablement le cas. Les États-Unis pourraient ainsi laisser à l’Europe la responsabilité d’une Ukraine démembrée et en faillite. Cela arrivera de toute façon, mais il ne faut pas faciliter les choses en laissant l’Allemagne être poussée à mener la spirale de l’escalade dans une guerre par procuration entre les États-Unis et la Russie.

Scholz aurait dû y penser quand, au début de la guerre, il a engagé son pays dans le projet ukrainien. Les conséquences étaient faciles à prévoir :

Toute consommation d’énergie aux États-Unis et dans l’UE sera désormais payée au prix fort. Cela poussera l’UE et les États-Unis dans une récession. Comme la Russie augmentera les prix des exportations de biens pour lesquels elle dispose d’un pouvoir de marché – gaz, pétrole, blé, potassium, titane, aluminium, palladium, néon, etc – la hausse de l’inflation dans le monde entier deviendra significative.

Les banques centrales « occidentales » ont toujours des taux d’intérêt pratiquement nuls et seront réticentes à les augmenter, car cela entraînerait une récession plus profonde. Il est donc probable que l’inflation dans le monde « occidental » augmentera à un rythme plus élevé que celle de la Russie.

L’évitement des relations économiques avec la Russie et la Chine signifie que l’Allemagne et son nouveau chancelier Olaf Scholz sont tombés dans le piège des États-Unis, qui veulent créer une nouvelle guerre froide. L’économie allemande sera désormais l’une de ses victimes.

Le 4 février, la Russie et la Chine ont déclaré un monde multipolaire dans lequel elles constituent deux pôles partenaires qui s’opposeront au pôle américain. L’entrée de la Russie en Ukraine en est la démonstration.

Cela montre également que les États-Unis ne sont pas disposés à renoncer à leurs pulsions suprématistes sans un grand combat. Mais alors que les États-Unis ont dépensé leur argent au cours des 20 dernières années pour semer la pagaille au Moyen-Orient, la Russie et la Chine ont utilisé ce temps pour se préparer à un grand conflit. Elles ont consacré plus de temps de réflexion à cette question que les États-Unis.

Les Européens auraient dû le reconnaître au lieu d’aider les États-Unis à conserver l’image d’une puissance unipolaire.

Il faudra un certain temps pour que les nouvelles réalités économiques s’installent. Elles changeront probablement la vision actuelle des véritables intérêts stratégiques de l’Europe.

Aujourd’hui, l’Allemagne et Scholz sont dans le pétrin que j’avais prédit au début de la guerre. La situation ne s’améliorera pas en « assumant la responsabilité » des livraisons de chars et en laissant les États-Unis s’en tirer à bon compte. Scholz doit être capable de désigner les États-Unis comme la puissance derrière la guerre lorsque les résultats finaux seront connus. Voyons donc combien de temps sa faible colonne vertébrale lui permettra de rester droit.

Les États-Unis travaillent d’ailleurs à une nouvelle escalade dans la guerre en planifiant de nouvelles attaques contre la Crimée :

L’administration Biden envisage maintenant ce qui serait l’une de ses actions les plus audacieuses à ce jour, en aidant l’Ukraine à attaquer la péninsule que le président Vladimir V. Poutine considère comme une partie intégrante de sa quête pour restaurer la gloire russe passée.

Des responsables américains discutent avec leurs homologues ukrainiens de l’utilisation d’armes fournies par les États-Unis, des systèmes de roquettes HIMARS aux véhicules de combat Bradley, pour éventuellement cibler le contrôle durement acquis par M. Poutine du pont terrestre qui sert de voie d’approvisionnement essentielle reliant la Crimée à la Russie via les villes de Melitopol et de Mariupol, occupées par les Russes.

Cependant, le président Biden n’est pas encore prêt à donner à l’Ukraine les systèmes de missiles à longue portée dont Kiev aurait besoin pour attaquer les installations russes sur la péninsule.

Cette semaine, les hauts commandants américains et ukrainiens tiendront une réunion de planification de haut niveau en Allemagne pour mettre au point la planification de l’offensive, a déclaré un autre haut fonctionnaire américain. L’exercice, a précisé le responsable, vise à aligner les plans de bataille de l’Ukraine sur les types d’armes et de fournitures que les alliés de l’OTAN fournissent.

Les États-Unis planifient toutes les opérations majeures de l’Ukraine dans cette guerre. Ils vérifient quelles armes sont nécessaires à la réalisation de ces plans. Ils ordonnent ensuite à leurs clients de l’OTAN de livrer le matériel ou du moins de payer un autre pays pour le faire. Lorsque l’opération sera finalement lancée, seuls les soldats ukrainiens et russes mourront dans leurs efforts.

« Qu’est-ce qu’on ne peut pas aimer dans tout ça« , se demande la Maison Blanche.

Eh bien, je ne pense pas que la Russie soit disposée à être la proverbiale grenouille qui bout lentement dans ce jeu d’escalade. Elle devra, à un moment donné, riposter contre les puissances qui sont à l’origine de cette guerre et pas seulement contre leur mandataire ukrainien. Je suis sûr que le Kremlin a déjà étudié les différentes options pour y parvenir.

Moon of Alabama

Traduit par Wayan, relu par Hervé, pour le Saker Francophone.

Poutine : La victoire est inévitable… Nos industries de défense égalent la production mondiale

 

par Al Manar - Le 19/01/2023.

Le président russe Vladimir Poutine a déclaré que « les industries de défense russes produisaient chaque année autant de missiles pour les systèmes de défense aérienne que d’autres fabricants dans le monde réunis », soulignant : « Cela renforce la confiance dans la victoire de la Russie en Ukraine ».

S’adressant aux travailleurs de l’usine Obukhov du consortium de l’industrie des missiles Almaz-Antey à Saint-Pétersbourg, Poutine a noté que « la Russie produit trois fois plus de missiles de défense aérienne par an que les États-Unis ».

Il a également ajouté que « les industries de défense russes produisent des missiles de défense aérienne à diverses fins en un an environ, comme tous les établissements industriels militaires du monde », notant que « la production russe est comparable à la production mondiale dans son ensemble ».

Poutine a poursuivi : « Du point de vue du résultat final et de la victoire inévitable, il y a beaucoup de choses qui n’ont pas disparu, qui sont à la base de la victoire de la Russie, dont la plus importante est l’unité et la cohésion du peuple russe. »

De même, Poutine a salué « le courage et l’héroïsme des combattants dans le cadre de l’opération militaire spéciale sur la ligne de front et a applaudi le travail du complexe militaro-industriel, des institutions, du peuple et de l’ensemble de l’économie, car chacun de ces liens: l’industrie, l’état du système financier public et la sphère sociale, le soutien aux familles qui nécessitent une attention particulière de la part de l’État et les soins de santé, touts ces élements créent la base d’un développement efficace et d’une victoire », soulignant que « la victoire est garantie sans aucun doute ».

Concernant les autorités ukrainiennes actuelles, Poutine a déclaré : « Les autorités glorifient Stepan Bandera, qui était un complice de Hitler », ajoutant que « l’armée ukrainienne continue d’utiliser des escadrons de la mort pour empêcher ses soldats de battre en retraite ou de se rendre, et continue de tirer sur des civils dans le Donbass et dans les régions avoisinantes ».

Poutine a noté « qu’il a toutes les raisons de qualifier le régime actuel de néonazi encore plus de fournir une assistance via les forces armées à ceux qui se considèrent comme faisant partie de la culture russe, qui sont des locuteurs natifs de la langue russe et qui chérissent tout autant qu’ils chérissent leur propre culture et leurs traditions », soulignant qu’il ne peut que « les protéger ».

Poutine a déclaré que « le niveau d’efficacité des entreprises industrielles russes leur permet de remplacer les produits des fabricants étrangers, qui ont quitté le marché intérieur ».

Lors de sa rencontre aujourd’hui avec les anciens combattants, à l’occasion du 80ème anniversaire de la rupture par l’armée russe du siège des forces allemandes et de leurs alliés de la ville de Leningrad (actuellement St. Petersbourg).

Poutine a confirmé, hier mardi, que « la dynamique de l’économie russe était positive l’année dernière, et le produit intérieur brut a diminué pendant 11 mois de 2,1% », s’attendant à ce « qu’il grimpe d’ici la fin de l’année à 2,5% ».

source : Al Manar

L’Ukraine a maintenant perdu l’équipement nominal de deux grandes armées. Elle en demande une troisième aux Occidentaux

 

par Moon of Alabama - Le 19/01/2023.

« Dans une certaine mesure, Bakhmut compte pour [l’Ukraine] parce que cela compte tellement pour les Russes », a déclaré un haut responsable américain, notant que le contrôle de Bakhmut n’aura pas un impact énorme sur le conflit ni ne mettra en péril les options défensives ou offensives de l’Ukraine. dans la région orientale du Donbass.

Le responsable a ajouté : « Bakhmut ne changera pas la guerre ».

Je crois que le haut fonctionnaire américain a tout à fait tort. 

Soledar et Bakhmut saignent à blanc l’armée ukrainienne. C’est pertinent. Regardez le nombre insensé d’unités ukrainiennes déployées sur ce secteur du front de seulement 50 kilomètres de long.

Source : Carte de déploiement terrestre militaire 

Je compte l’équivalent de quelque 27 formations de la taille d’une brigade dans cette région. La taille habituelle d’une brigade est d’environ 3000 à 4000 hommes avec des centaines de véhicules de toutes sortes. Si toutes les brigades avaient leur effectif complet, cette force compterait pour 97 500 hommes. 

Dans une récente interview, le commandant militaire ukrainien Zaluzhny a déclaré que son armée comptait 200 000 hommes entraînés au combat et que 500 000 autres avaient d’autres fonctions ou étaient actuellement en formation. Les forces qui sont actuellement dans la région de Bakhmut constituent 50% des forces ukrainiennes prêtes au combat.

Zaluzhny a retiré des unités d’autres fronts comme le secteur de la Kreminna et de Svatove plus au nord dans la province de Louhansk pour alimenter Bakhmut. Cela a réduit toute chance que les forces ukrainiennes dans ces secteurs soient en mesure de faire des progrès.

Ce que presque tous les rapports d’Ukraine semblent ignorer, ce sont les énormes dégâts que l’artillerie russe cause quotidiennement. 

L’Ukraine a peu d’artillerie pour répondre à cela et tout ce qu’elle a encore fond de jour en jour.

Il y a quelques semaines, l’armée russe a lancé une campagne systématique de contre-artillerie qui a depuis fait de grands progrès. 

La manière occidentale typique de détecter les unités d’artillerie ennemies est par radar. La trajectoire de vol du projectile est mesurée et les coordonnées de sa source sont calculées permettant à sa propre artillerie de réagir. Mais le radar de contre-artillerie lui-même dépend du rayonnement. Il est ainsi facilement détectable et vulnérable au feu. 

Au cours des derniers mois, la Russie a déployé un système de détection de contre-artillerie très différent avec le nom plutôt ironique de pénicilline. Pénicilline ou la pénicilline 1B75 est un système de reconnaissance d’artillerie acoustique-thermique développé par Ruselectronics pour les forces armées russes. Le système vise à détecter et localiser l’artillerie ennemie, les mortiers, les MLR, les positions de tir anti-aériennes ou de missiles tactiques avec des capteurs sismiques et acoustiques, sans émettre d’ondes radio. 

Il localise le tir ennemi en 5 secondes à une distance de 25 km (16 mi; 13 nmi). Pénicilline a terminé les tests en décembre 2018 et est entrée en service de combat en 2020.

Pénicilline est montée sur le châssis 8×8 Kamaz-6350 et se compose d’une suite de capteurs 1B75 placée sur une flèche télescopique pour le spectre infrarouge et visible ainsi que de plusieurs récepteurs sismiques et acoustiques installés au sol dans le cadre de la suite de capteurs 1B76. Il a une portée efficace pour la communication avec d’autres ressources militaires jusqu’à 40 kilomètres (25 mi) et est capable de fonctionner même en mode entièrement automatique, sans aucun équipage. Un système peut apparemment couvrir une division entière contre un tir ennemi. De plus, il coordonne et corrige un tir d’artillerie ami.

Le système Penicilline peut se cacher dans les bois et tenir sa perche télescopique pour regarder et écouter le champ de bataille. Comme il ne rayonne pas, il n’y a pas de bon moyen pour un ennemi de le détecter.

Le système repère les canons ukrainiens au fur et à mesure qu’ils tirent. Ils sont alors éliminés par un contre-feu immédiat et précis. Comme l’affirme la partie pertinente de l’artillerie de la liste des « clobbers » fournie par le ministère russe de la Défense .

Le tir de contre-batterie ukrainien contre l’artillerie russe n’est plus possible car l’équipement de détection nécessaire est éliminé et le contre-feu ukrainien est abattu par les défenses aériennes russes.

Cette campagne de contre-artillerie russe dure depuis plusieurs semaines. Il a désactivé une grande partie de ce qui restait des capacités ukrainiennes à plus longue portée. Pendant ce temps, l’artillerie russe continue d’abattre les troupes ukrainiennes qui tiennent la ligne de front. Ce n’est que lorsque toutes les parties des tranchées ukrainiennes auront été touchées par des tirs intenses que l’infanterie russe se déplacera pour nettoyer ce qui reste.

Cette forme de bataille cause d’énormes pertes du côté ukrainien alors que les forces russes n’encourent qu’un minimum de pertes.

Nous pouvons affirmer que l’Ukraine a maintenant perdu l’équipement nominal de deux grandes armées.

Au début de la guerre, l’armée ukrainienne avait environ 2500 chars, 12 500 véhicules blindés et 3500 gros systèmes d’artillerie. Il est douteux que plus de la moitié d’entre eux étaient dans un état utilisable, mais ils ont peut-être reçu suffisamment de réparations pour être utilisables.

L’armée russe affirme que la plupart d’entre eux ont été éliminés :

« 7549 chars et autres véhicules de combat blindés, 984 véhicules de combat équipés de MLRS, 3853 canons et mortiers d’artillerie de campagne, ainsi que 8 081 unités d’équipements militaires spéciaux ont été détruits au cours de l’opération militaire spéciale.

Dans son interview à l’Economist, le général Zeluzhny a demandé qu’une troisième armée lui soit livrée immédiatement :

« Je sais que je peux battre cet ennemi », dit-il. « Mais j’ai besoin de ressources. J’ai besoin de 300 chars, de 600 à 700 VCI [véhicules de combat d’infanterie], de 500 obusiers.

Comme le notait sèchement le journaliste de The Economist :

« L’arsenal supplémentaire qu’il recherche est plus important que le total des forces blindées de la plupart des armées européennes ». »

source : Bruno Bertez

Source : Revue Conflits.

Ukraine : état des lieux des armes fournies par la France

 

Ukraine : état des lieux des armes fournies par la France

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Le 4 janvier dernier, le président Emmanuel Macron a annoncé un nouveau cap dans l’aide à l’armée ukrainienne avec la livraison future d’engins blindés AMX 10RC, un véhicule emblématique sur le point d’être remplacé dans l’armée française. L’occasion de faire un point sur le matériel lourd envoyé par la France et ses alliés européens.

 

Des dons français importants…

18 Canons CAESAR

Élément important qui a beaucoup fait parler de lui dans l’actualité : le canon CAESAR. Cet acronyme désigne le Camion Équipé d’un Système d’Artillerie, un élément important et emblématique de l’artillerie française par sa modernité et ses caractéristiques techniques à la pointe de la technologie. D’une précision très élevée pour cette catégorie d’engins, le Caesar dispose d’un emport de 18 munitions pour un canon de 155mm dans lequel peuvent être utilisés différents types d’obus : explosifs, éclairants, fumigènes, obus de semonce, anti-char. Sa cadence est de six coups par minute pour une portée allant jusqu’à 50 km selon le type d’obus engagé. Entrés en service en 2008, 76 canons Caesar sont en dotation dans l’Armée de Terre entre les unités combattantes et celles de formation. 18 ont été livrés à l’Ukraine sur une commande qui était destinée à être livrée au Danemark et le même nombre a alors été commandé par l’État à Nexter pour combler cette perte. L’avantage de ce canon vient également du fait qu’il est très mobile, car monté sur un camion. Un avantage considérable dans l’artillerie. Sa mobilité atteint une vitesse de 80 km/h sur route et 50 km/h pour le tout-terrain, avec une autonomie de 600 km. Son blindage est concentré sur la cabine de conduite et est en option, il est fait pour se protéger des tirs de calibre 7,62 mm, des mines et autres EED (Engin Explosif improvisé, IED en anglais). Bien évidemment, quelques milliers d’obus ont été livrés avec, ainsi que la formation nécessaire aux artilleurs ukrainiens pour son utilisation.

Canon Caesar dans la vallée de l’Euphrate en 2018

Un lot de canons TRF1

Autre canon de l’artillerie française, la TRF1 n’a pas la particularité d’être montée sur un camion, mais d’être un canon-tracté, et ce par un camion TRM 10 000 qui permet un emport de 56 munitions dont les catégories sont sensiblement les mêmes que pour le Caesar : des obus explosifs, éclairants, fumigène et anti-char. Possédant un motopropulseur, il peut cependant se déplacer seul dans une certaine mesure, à raison de 8 km/h. Prédécesseur du Caesar, ce canon est lui aussi fait pour accueillir du 155m avec une portée de 24 à 30 km selon la munition tirée et une cadence de 6 coups par minute ou 3 coups en 15 secondes en cadence rapide. Entré en service dans les années 1989-1990 aux 11e Régiment d’Artillerie de Marine (11e RAMa) et 68e Régiment d’Artillerie (68e RA), la dislocation du Bloc de l’Est réduit la taille des commandes de l’État français passant de 180 aux 105 livrés jusqu’en 2006. Ayant participé à de nombreux conflits comme la guerre du Golfe, le TRF1 est peu à peu retiré du service au profit du canon Caesar et les 4 derniers TRF1 du 5eRIAOM (5e Régiment Interarmes d’outre-mer) basé à Djibouti sont retirés en avril 2022. L’Ukraine en achète un lot à l’entreprise S2M Equipment, spécialisée dans le rachat de matériel militaire, dont au moins 6 exemplaires ont déjà été livrés.

TRF1 du 3e RAMa lors d’un exercice interallié en Allemagne en 2013

2 Lance-Roquettes Unitaires

Le lance-roquette unitaire (LRU) est une autre composante importante de l’armée de Terre française, lui aussi visé par un potentiel remplacement d’ici 2027. Monté sur un châssis américain Bradley M270, le LRU est un standard particulier. En effet, il s’agit à l’origine de lance-roquettes multiples (LRM, en service depuis 1983) qui seront plus tard interdits pour les pays signataires par la convention d’Oslo (ou Convention sur les armes à sous-munitions) en 2008. Ainsi la France avait acquis 57 LRM avec 22 000 roquettes M26 dont 48 seront mises en service aux 1er et 12e Régiments d’Artillerie (1er RA et 12e RA). De fait, depuis 2014 seul le 1er RA possède encore treize LRU dont deux furent livrés à l’Ukraine en octobre dernier. Également équipé de munitions très précises (Roquette M31 guidées à charge creuse, les M26 ayant été interdites par la convention d’Oslo), la portée du LRU est de plus de 70km, pour une altitude pouvant atteindre environ 20km avec une autonomie de 500 km et une vitesse sur route de 70 km/h. Sa capacité d’emport est de 12 roquettes dont la précision varie de 3 à 5 mètres. Sa protection est assurée par un blindage de 25 mm de la cabine et la présence d’une mitrailleuse.

MLRS (Multi-Launch Rocket System) du 1st Regiment Royal Horse Artillery s’entraînant dans la campagne britannique.

2 batteries Crotale NG

Le Crotale désigne ici les missiles Crotale R-440 utilisés par ces batteries de l’Armée de l’Air et de l’Espace. Sur les douze possédées par cette dernière, deux ont été livrées à l’Ukraine. Ces batteries sol-air de courte portée (entre 13 et 15 km pour 6 à 9 km d’altitude) et utilisant des missiles VT1 (livrés en nombre significatif selon le ministre des Armées Lecornu), permet de lutter contre les aéronefs de tout type à basse altitude et faible vitesse. La batterie se compose donc d’une unité d’acquisition (UA) qui permet de prendre en charge jusqu’à 12 objectifs à la fois, et de deux voire trois unités de tir (UT), chaque unité étant composée de quatre missiles et également d’un radar d’acquisition et de poursuite chargé de recevoir le signal de l’UA lorsqu’une cible est désignée comme telle et affectée à une UT.

Ces missiles VT1 ont de plus une vitesse de Mach 3,5, alors que les R-440 n’allaient « qu’à » Mach 2,3. Deux missiles peuvent être tirés en quelques secondes, et le système nécessite 5 min pour être mis en batterie. Il nécessite également d’être monté sur un véhicule de transport : le P-4 R, un camion d’une autonomie de 500 km et d’une vitesse 70 km/h, avec un blindage de la cabine allant de 3 à 5 mm.

Les premières versions sont livrées dès 1971 par l’Afrique du Sud qui était à l’origine de la commande d’un tel système et les utilisa pour sa guerre de la frontière. Elles ont ensuite été utilisées dans la guerre du Kippour, en Lybie, en Irak ou encore au Tchad.

Lanceur de missiles Crotale lors du défilé du 14 juillet

60 Véhicules de l’Avant Blindé 

Presque qu’aussi mythique que la P4 et délégué au transport de troupe dans l’armée française, le VAB est en service depuis 1976 et a connu tous les théâtres d’opérations français. De plus, il a également connu les opérations marocaines au Sahara occidental, libanaises, qataries au Yémen, et donc récemment en Ukraine.

Véhicule le plus présent au sein de l’armée française avec environ 2 500 exemplaires dans le parc en 2021, 60 de ceux-ci ont été envoyés en Ukraine.

Existant en plus d’une cinquantaine de versions selon les armes dans lesquelles il sert et ses utilisations (Transmission, commandement, médical…), le VAB est généralement muni d’une mitrailleuse 7,62 mm calibre OTAN ou 12,7 mm pour les véhicules d’infanterie, il peut également être équipé d’un canon-mitrailleur de 20 mm ou de 25×137, ou bien encore de lance-missile comme sur le VAB HOT (ou Méphisto). Son blindage le protège des munitions de 7,62 mm, mais aussi des mines et des éclats en tout genre.

Les différentes mises à jour de ces dernières années ont modifié considérablement ses capacités, notamment l’emport passant de 10 hommes à 6 concernant les fantassins (dû à l’augmentation de l’équipement de ces derniers) ou encore l’autonomie descendue à 230 km à cause d’une consommation plus élevée en carburant alors qu’elle était initialement d’environ 1 000km. L’armée française prévoit son remplacement progressif par les nouveaux véhicules Griffon et Serval dans le cadre du programme Scorpion.

Les versions du VAB envoyées aux Ukrainiens ne semblent pas être spécifiées, mais d’après les images ayant tourné sur les réseaux sociaux, il s’agirait de modèles sommairement équipés.

VAB aux nouvelles couleurs de l’armée française durant le défilé du 14 juillet 2021

Des AMX 10RC au programme

Ces véhicules promis par Emmanuel Macron sont eux aussi emblématiques dans l’armée française, puisqu’arrivés en 1979 au 2e Régiment de Hussards (2e RH) et sur le point d’être remplacé aujourd’hui par le Jaguar, véhicule faisant aussi partie du programme Scorpion.

Issu des ateliers d’Issy-les-Moulineaux d’où provient son nom, il remplace l’Engin Blindé de Reconnaissance (EBR) alors en service et est en réalité la version à six roues (RC signifie Roues-Canon) de l’AMX-10P, blindé a chenille servant à l’infanterie pour le transport, le combat et l’appui remplacé aujourd’hui par le Véhicule Blindé de Combat d’Infanterie (VBCI).

Le rôle principal de l’AMX est la reconnaissance-feu, c’est-à-dire la reconnaissance et la possibilité de riposter en cas d’attaque. Une revalorisation au cours des années 2000 donnera l’AMX 10 RCR dont il resterait aujourd’hui un peu moins de 250 exemplaires dans le parc français. Il a été déployé sur de nombreuses opérations dont on pourrait noter parmi les plus notables Tempête du Désert durant la guerre du Golfe, durant les opérations françaises en Afghanistan, au Mali ou encore par le Maroc durant la guerre du Sahara Occidental, et donc prochainement l’Ukraine.

Pour l’aspect technique, l’AMX 10 RC a la particularité comme nous l’avons dit d’être sur roues et non sur chenilles, avec une autonomie de 800 km pour une allure de 80 km/h sur route et 40 km/h en tout-terrain. Son blindage le protège des projectiles de l’artillerie et des moyens calibres, et un surblindage en acier est ajouté après l’opération Tempête du Désert ce qui marque la fin de son caractère amphibie qui existait alors. Sa portée est d’environ 2 km pour le canon qui accueille des obus de 105mm et de toutes sortes : explosifs, fumigènes, à charge creuse, flèche. Ce canon est accompagné de deux mitrailleuses de calibre 7,62 mm.

Il est important de souligner également que les munitions acceptées (105 x 527R) par l’AMX 10 RC ne sont pas au standard OTAN ce qui fait que l’Ukraine sera entièrement dépendante de la France pour ce qui est des munitions.

AMX-10 RC en action durant un exercice hivernal, 4e Régiment de Chasseurs

20 véhicules blindés Bastion

Les ARQUUS Bastion sont des véhicules blindés, essentiellement utilisés pour le transport de troupes, à l’instar du VAB présenté plus haut, fabriqués par la firme française Arquus Défense. De tous les véhicules présentés dans cet article, le Bastion est le seul à ne pas être utilisé par les armées françaises puisque destiné à l’export uniquement, bien que les Forces Spéciales Françaises l’aient évalué.

Avec un châssis basé sur le VLRA (camions tout-terrains fabriqués à Saint-Nazaire par ACMAT, aujourd’hui filiale d’Arquus) ils sont équipés d’une tourelle mitrailleuse de calibre 12,7 mm ou 7,62mm qui peut-être téléopérée. Leur blindage leur assure une protection contre les armes de calibre 7,62mm, les mines et les différents éclats. Leur capacité d’emport est de 8 hommes (plus deux pilotes) et leur mobilité se caractérise par une vitesse de 110 km/h sur route pour une autonomie de presque 1 400 km.

Comme la plupart des véhicules, il possède plusieurs versions : le Bastion PATSAS (Patrouille SAS) réservée aux forces spéciales plus légère (10t au lieu de 12t), mais avec moins d’emport (5 soldats équipés). Il est équipé d’une mitrailleuse 12,7mm et peut en emporter 3 autres de 7,62mm. En 2018, un accord a été signé avec l’US Army pour concevoir une version ambulance du Bastion.

Ses principales zones de déploiement ont été le Burkina Faso dans le cadre de la lutte antiterroriste de la force conjointe G5 au Sahel, de la même manière au Mali, au Tchad et au Niger ; le Sénégal en a également acquis pour sa police et l’ONU en a fourni à la Tanzanie pour des opérations de maintien de paix.

Le prochain théâtre à son actif sera donc l’Ukraine puisque la France a décidé d’en livrer 20 exemplaires à l’armée ukrainienne.

Bastion APC fournis par les Américains aux forces populaires ougandaises en 2017

Il est important de rappeler que l’aide française aux armées ukrainiennes se compose également de missiles (Mistral, Milan…) et d’équipement individuels (Casques lourds, lunettes infrarouges, matériel médical, gilets pare-balles, rations de combat, etc.) et bien sûr d’une aide financière importante. De plus, 2 000 soldats ukrainiens devraient être formés par la France dans le cadre de la mission européenne EUNAM dont 400 le sont déjà, principalement sur les équipements livrés.

Des dons importants pourtant souvent décriés par certains, pointant du doigt une France qui ne ferait pas assez, notamment par rapport à ses voisins européens. Ainsi, concernant le matériel terrestre lourd, voici ce qu’ont envoyé nos alliés européens.

Une Europe également très généreuse

L’Allemagne

Alors que la question des Léopard 2 demandés par l’Ukraine se pose en Allemagne, nous pouvons revenir sur le matériel envoyé par l’un des plus gros contributeurs du soutien à l’Ukraine.

40 Marder

À la suite des annonces françaises à propos des AMX-10 RC, l’Allemagne a en effet annoncé l’envoi de 40 véhicules blindés Marder en usage dans ses armées, dont la livraison s’étendra sur le premier trimestre 2023. Ce véhicule de combat d’infanterie est entré en service durant la Guerre froide au début des années 1970 en Allemagne de l’Ouest. Remplacé peu à peu par le Puma depuis 2010, le Marder a connu de nombreuses versions et a notamment servi durant la seconde guerre d’Afghanistan. Avec un transport de 6 ou 7 hommes (plus 3 : pilote, tireur, chef d’engin) selon les modèles, son blindage d’acier varie entre 11 et 32 mm permettant de se protéger des calibres 7,62 mm, mais aussi des balles perforantes-incendiaires de 14,5 mm et des obus de 23 mm sur la partie frontale, voire de 25 mm aujourd’hui sur certaines versions. Il dispose de nombreux armements : un canon-mitrailleur de 20 mm (Mk20 Rh-202), un lance-missile antichar MILAN (4 missiles) ou Spike depuis 2018 et une mitrailleuse de 7,62 mm MG3. Avec une vitesse sur route allant jusqu’à 75 km/h, son autonomie dépasse les 500 km.

Les différentes versions existantes font varier les qualités ou les caractéristiques du blindage, des radars, transmissions ou encore les brouilleurs.

Marder 1A3 du 391e Bataillon de Panzergrenadiers

18 obusiers Boxer RCH 155

Autorisée d’envoyer ces pièces d’artillerie en Ukraine par le gouvernement allemand, la société KMW (Krauss-Maffei Wegmann) devra également fournir les pièces de rechange et former le personnel pour un coût total de 216 millions d’euros. Équipé d’un canon de 155 mm le RCH 155 est un automoteur capable d’atteindre au moins les 100 km/h pour autonomie de 700 km. Avec un système de chargement automatique, sa cadence est de 9 coups par minutes pour une portée de 30 km avec les obus conventionnels et jusqu’à 56 km avec certains plus spécifiques (V-LAP sud-africain). Il peut également être adapté avec un canon de 105 mm.

Boxter RCH 155

Le système MIM-104 Patriot 

Sur la même ligne que les États-Unis, d’où provient ce système, les Allemands ont décidé d’envoyer à l’Ukraine l’un de leur système antiaérien Patriot. Développé par la firme Raytheon il entre en service en 1984, mais plusieurs versions et développement existent et permettent également la lutte contre les missiles balistiques depuis le 104C/PAC-2 déployé en 1990 pour la guerre du Golfe. Ces missiles sol-air vont de Mach 2.8 à 4.1 avec une portée de 240 km pour les dernières versions et une altitude dépassant les 24 km. Avec une taille plus petite les PAC-3 permettent un poste de tir à 16 missiles contre 4 auparavant. Monté sur une remorque, le poste est tracté par un HEMTT ayant une vitesse de pointe à 100 km/h pour une autonomie d’un peu moins de 650 km. Outre le Golfe le Patriot a également connu l’Irak, la Syrie, le Japon, le Yémen et aujourd’hui l’Ukraine.

Lancement d’un missile Patriot PAC-2 Néerlandais

14 PzH 2000 

Autre obusier fabriqué par KMW, il est en service depuis 1998 et encore aujourd’hui dans plusieurs armées (Italie, Grèce, Qatar…). Ayant connu comme premier théâtre d’opérations l’Afghanistan, le PzH 2000 est une abréviation de Panzerhaubitze (Obusier blindé) et se caractérise par un canon de 155 mm pour une portée de 30 km pour les obus conventionnels et de 56 km pour les obus roquette avec une cadence importante de 9 à 10 coups par minute (les 3 premiers en 10s) et 20 coups en 2min30. Ce canon est accompagné comme armement secondaire d’une mitrailleuse MG3 de 7,62 ou d’une FN MAG du même calibre. Comme le RCH 155, le PzH 2000 est un canon automoteur avec une vitesse de 65 km/h pour 420 km d’autonomie et un emport de 60 obus possible. En plus des 7 envoyés par l’Allemagne en mai 2022, elle en a vendu également 100 en juillet dernier, les Pays-Bas en ont envoyé 8 et l’Italie un nombre inconnu.

Un PzH 2000 néerlandais en Afghanistan, 2009

4 MLRS Mars-II :

Les MLRS désignent des Multiple-Launch Rocket System dont le type MARS (Middle Artillery Range System) arrive en Allemagne en 1990, mais il est déjà en activité dans l’US Army depuis 1983. La version MARS-II envoyée en Ukraine permet de tirer des missiles guidés augmentant ainsi la précision des tirs (environ 7 mètres) et possède des améliorations GPS, de conduite de tir, etc. Les missiles du type M31 (230 mm) peuvent voler à Mach 3,4 avec une portée amenée à 80km (elle était de 60km avec la précédente M30, et est prévu à 140 km pour la prochaine version). Le MARS-II peut accueillir 12 missiles simultanément avec une cadence permettant de tous les tirer en 1 minute.

Photo d’un MLRS MARS-II issue du site de KMW

50 Véhicules de transport blindés Dingo

Encore un véhicule sortit de la société KMW. C’est un blindé de transport de troupes allant de 5 à 10 passagers selon les versions qui résiste aux mines, aux éclats d’artillerie et aux calibres « classique ». Une deuxième version arrivera en 2000 offrant une meilleure protection et une plus grande charge utile. Son armement varie entre les mitrailleuses 7,62 mm ou 12,7 mm et les lance-grenades automatiques HK GMG et son autonomie entre 700 et 1000 km selon la version (courte, longue ou GFF).

ATF Dingo 2 de la 37e Brigade de Panzergrenadier durant un exercice, juste après avoir franchi l’Elbe

37 chars Guépard

De son vrai nom Flugabwehrkanonenpanzer Gepard ou Flakpanzer Gepard est un char antiaérien germano-suisse entré en service en 1976 dont le programme a plus tard été rejoint par la Belgique et les Pays-Bas et est resté en service dans ces pays jusqu’à la fin des années 2000 et n’a à l’heure actuelle aucun remplaçant au sein de la Bundeswehr. Ce véhicule est équipé de deux canons Oerlikon KDA L/90 de 35 mm (du nom de la firme suisse ayant travaillé sur projet) tirant des obus explosifs ou pénétrants pour une portée de 6 500 m et une altitude maximale de 4 800 m. Son autonomie est de 560 km pour une vitesse sur route de 65 km/h. Ces engins furent tirés de leurs stocks puisque retirés depuis longtemps, et quelques problèmes de munitions furent à gérer étant donné que la Suisse et son immuable neutralité ne voulaient pas fournir les stocks de missiles qui lui restait.

Flakpanzer Gepard de la Bundeswehr

L’Italie

FH70

Envoyés en nombre inconnu par nos voisins transalpins, les FH70 sont des canons se rapprochant du TRF1 français. En service depuis 1978, il a notamment fait ses preuves au Liban durant la guerre civile. Doté d’un calibre de 155 mm sa cadence peut être de 3 coups en 15 secondes pour une rafale ou de 3 à 6 coups par minute pour une cadence soutenue avec une portée maximale de 30 km. De la même manière que le TRF1, le FH70 doit être tracté par un véhicule ce qui limite sa mobilité.

D’autres exemplaires ont également été envoyés par l’Estonie

Une batterie de FH70 du 21e Régiment d’Artillerie italien « Trieste »

Le système SAMP/T – Mamba

De concert, Paris et Rome vont livrer à l’Ukraine une batterie de système Sol-Air Moyenne Portée/Terrestre – Mamba (Moyen de défense Anti-Missile Balistique et Aérobie) sur les 5 que compte le 4e Régiment d’Artillerie antiaérienne italien. Ce système vise à protéger l’espace aérien contre les avions ou missiles de croisière. Pour la partie antiaérienne le système a une portée allant de 50 à 100 km selon les avions ciblés et d’une dizaine de km pour la défense antimissile utilisant les missiles Aster 30 Block 1. En France ces systèmes ont remplacé les Hawks et les Crotale. Le système se subdivise en 3 sous-systèmes : celui de la conduite de tir/radar, celui de lancement terrestre et le missile en lui-même.

Système de lancement terrestre du SAMP/T au défilé du 14 juillet

Espagne

1 système Aspide 2000

Au moins un de ces systèmes antiaérien de moyenne portée d’origine italienne a été envoyé par l’Espagne en Ukraine. Ses missiles équipaient auparavant les avions Aeritalia F-104S Starfighter en version air-air. Sur les quatre versions c’est la version sol-air du Mk1 qui fut envoyé en Ukraine par l’Espagne fabriqué à partir de 1988. La vitesse de ce missile est de Mach 2 avec une portée de 28 km et un plafond de 3,5 km.

Batterie antiaérienne italienne d’Aspide 2000

Missile Aspide 2000 de la Marine péruvienne

20 TOA M113 

De facture américaine, ces Transporte Oruga Acorazado sont en service depuis 1960 et seront progressivement remplacés en Espagne par les véhicules blindés « Dragon ». Capable de transporter 11 personnels, ce camion sur chenille a une vitesse 66 km/h sur route pour une autonomie de 480 km. Avec plusieurs versions (lance-flamme, dépannage, mortier, ambulance…) il a pour armement de défense une mitrailleuse M2 de 12,7 mm, avec en plus un blindage allant de 38 à 45 mm.

50 exemplaires ont également été envoyés par le Danemark et d’autres aussi par la Lituanie.

M113 blindé australien

Grande-Bretagne 

10 Challenger 2 (En cours de réflexion)

En service depuis 1998, ce char britannique a notamment connu la guerre d’Irak et le Kosovo. Son armement se compose d’un canon de 120 mm avec une durée de vie du tube de 500 coups et l’engin possède une capacité d’emport de 52 obus. À cela s’ajoutent deux mitrailleuses de 7,62 mm. En termes de mobilité, le Challenger 2 possède une autonomie allant de 450 à 550 km selon sa dotation en réservoirs largables. Son blindage est de type Dorchester en matériaux composites. Le gouvernement n’a pas encore statué sur l’envoi de ces chars, mais y réfléchit sérieusement. L’envoi de ce type de char ferait franchir un cap certain dans l’aide militaire offerte à l’Ukraine)

Challenger 2 durant un exercice amphibie de la 1ère Brigade Mécanisée dans le Hampshire

120 véhicules blindés

Nous ne connaissons pas la répartition exacte de ces 120 véhicules, mais il s’agit des modèles suivants :

MRAPs de type Cougar Mastiff et Wolfhound

Les MRAP (Mine Resistant Ambush Protected) sont une classe de véhicules blindés spécialement conçus pour résister aux Engins Explosifs Improvisés (EEI). Ils ont été mis en service au début des années 2000 d’après les conflits modernes où les mines et EEI représentent un risque important. Les MRAP sont utilisés dans de nombreuses armées (les Aravis en France ou les ATF Dingo en Allemagne) et sont encore utilisés dans la lutte contre la guérilla sur de nombreux terrains : Afghanistan, Égypte, Yémen, Syrie … et même par les Russes en Ukraine.

Les MRAP se divisent en 3 catégories et de multiples versions selon leurs poids, taille et utilité (anti-mines, missions sous feu ennemi, spécifiques pour certaines missions). De fait le Wolfhound est un véhicule de soutien tactique utilisé par exemple pour tracter les canons d’artillerie. Leur blindage et leur armement varie en fonction du modèle et leur mobilité se caractérise par une vitesse d’environ 100 km/h pour une autonomie de 1000 km.

MRAP Cougar danois en Afghanistan, 2011

Husky

Les Husky sont des véhicules sud-africains de soutien détecteurs de mines eux-mêmes protégés contre les mines et IED, ils sont principalement utilisés pour assurer la route d’un convoi. Entrés en service dans les années 1970, ils sont équipés de détecteurs de métaux très sensibles et sont prévus pour s’endommager de manière prévisible en cas d’explosion pour être réparés directement et rapidement sur le terrain. D’autre équipement comme un rouleau de déminage ou une mitrailleuse 7,62 sont disponibles selon les versions et son blindage protège des calibres 7,62 mm. Sa vitesse maximale est de 70 km/h.

Huskys de l’USMC en Afghanistan

35 FV-103 Spartan

Blindé utilisé pour le transport de troupes (5 passagers), le FV-103 Spartan est un véhicule britannique entré en service en 1978 de combat de reconnaissance. Il est principalement utilisé par des unités spécialisées et non pas l’infanterie allant sur le champ de bataille (artilleurs, sapeurs…). Il est protégé par une mitrailleuse de 7,62 mm FN MAG. Il existait une version FV-120 pouvant tirer des missiles MILAN et transporter des Javelin, mais elles ne sont plus en activité dans l’armée britannique. Leur vitesse sur route est de 80 km/h et 35 exemplaires auraient été envoyés en Ukraine.

FV-103 Spartan pendant un exercice amphibie dans le Hampshire

Nos alliés outre-Manche auraient également envoyé 4 MLRS Mars-II (cf. Allemagne).

Pologne

50 à 60 PT-91 Twardy

Char de combat polonais datant de 1996, le PT-91 Twardy héritier des T72 et T64. Sa mobilité est de 60 km/h pour une autonomie allant de 650 à 700 km selon les réservoirs en dotation. Il est armé d’un canon de 125 mm avec un emport de 42 obus, et d’une mitrailleuse de 7,62 mm plus une autre de 12,7 mm. Il existe de nombreuses versions, notamment pour l’armée malaisienne, modifiant quelques caractéristiques techniques modifiant sa mobilité ou sa précision de tir.

PT91 Twardy durant le défilé du 15 août, jour des Forces Armées en Pologne

230-240 T-72

Char emblématique de l’ère soviétique, le T-72 est un char qui est vu comme un T-64 simplifié donc moins couteux en service depuis 1973 et dont la production continue encore aujourd’hui. Son successeur le T-90 est plus moderne et fut envoyé dans le Donbass par les Russes. Il existe plus de quarante versions faisant varier le blindage (au moins 350 mm) ou quelques caractéristiques et améliorations techniques, mais d’une manière générale il est équipé d’un canon de 125 mm et de deux mitrailleuses de 7,62 et 12,7 mm. Sa vitesse de 60 km/h s’accompagne d’une autonomie de 500 à 700 km selon l’emport de bidons largable prévu.

En tout plus 300 T-72 furent envoyés en Ukraine avec la participation notamment de la République tchèque ou de la Macédoine du Nord (30 exemplaires)

Un T-72 iraquien de la 9e Division en 2006

40 BMP-1

Autre véhicule de combat soviétique, le BMP-1 est un véhicule de combat d’infanterie en service depuis 1966 dans l’Armée rouge. Véritable succès technologique comparé à l’AK-47, il permet d’emporter 8 passagers de manière sécurisée avec un blindage allant jusqu’à 33 mm. Il dispose d’un canon de 73 mm et d’un lance-missile antichar en plus d’une mitrailleuse de 7,62 en armement secondaire. Sa mobilité aussi importante pour l’époque est caractérisée par une vitesse sur route de 65 km/h et de 45 km/h en tout-terrain avec une autonomie de 600 km sur route et 500 km en tout-terrain. Comme la plupart de ces véhicules, de nombreuses versions existent faisant varier leur équipement, caractéristiques techniques et utilité.

En échange de 40 Marder, la Grèce a elle aussi envoyé 40 BMP-1 aux Ukrainiens sur les 122 de chaque annoncés en juin. Le même échange fut effectué par la Slovaquie avec 30 BMP-1 envoyés en Ukraine contre 14 Léopard allemands ou la Slovénie qui a envoyé 35 BMP M80A contre des Marder et Leopard.

BMP-1 capturé par les Américains en Irak durant la Guerre du Golfe, 1991

BM-21 GRAD

Le BM-21 GRAD est un LRM (lance-roquettes multiple) soviétique en service depuis 1963, « Grad » signifiant « grêle ». Dotés de canons de 122 mm, ces camions ne disposent d’aucun blindage et sont très mobiles : 75 km/h pour une autonomie de 450 km. Sa capacité est de 40 roquettes (le camion dispose de 40 tubes). Ses différentes versions et munitions lui offrent une portée de 5 à 45 km et une capacité de saturation de 1 hectare en une salve, mais nécessite 10 minutes de rechargement.

On ne connait pas le nombre exact de BM-21 GRAD envoyés par la Pologne, d’autant plus que c’est un véhicule déjà utilisé par les deux pays belligérants.

BM-21 GRAD vénézuéliens lors de la commémoration de la mort d’Hugo Chavez en 2014

BM-21 GRAD en action dans le sud de l’Ukraine, octobre 2022

Obusiers 2S1 Gvozdika 

Arrivé en service en 1972 dans l’armée soviétique, le 2S1 Gvozdika est un char équipé d’un canon de 122 mm et d’un blindage de 20 mm. Une version amphibie peut lui permettre de combattre par tempête de neige ou dans des marais. Avec une mobilité caractérisée par une autonomie de 500 km et une vitesse de 60 km/h sur route, il a connu de nombre théâtres de conflits : Tchétchénie, Golfe, Irak, Kosovo, Lybie, Syrie…

On ne sait pas exactement combien ont été envoyés par la Pologne, sachant qu’il est en dotation en Russie et également en Ukraine.

Obusier 2S1 Gvozdika de l’armée serbe

72 AHS Krab

L’AHS Krab est quant à lui un obusier polonais doté d’un canon de 155 mm entrée en service en 2008 et dont les nouveaux modèles n’ont pas tous été livrés à ce jour à la Pologne. Sa portée est comprise entre 30 et 40 km selon les obus utilisés et sa cadence est de 6 coups par minute. Sa vitesse sur route est de 67 km/h et 30 km/h en tout terrain pour une autonomie de 400 km. Sur les 72, 18 furent donnés et 54 vendus. L’Ukraine semble être sa première expérience réelle de combat.

AHS Krab exposé à Kiev en 2017

Norvège

22 M109 A2/A3

Obusiers américains en service depuis 1963, M109 qui sont les versions modernisées en milieu de vie, sont équipés de canon de 155 mm avec une portée de 18 à 30 km selon les munitions utilisées et une capacité d’emport allant de 36 obus. De même son autonomie varie de 300 à 350 km/h avec une vitesse comprise entre 55 et 60 km/h sur route et 20 et 30 km/h en tout-terrain. Pour sa protection, il possède aussi une mitrailleuse M2 de calibre 12,7 mm. Les Pays-Bas en ont également envoyé quelques-uns.

26 M109A4 furent achetés à une société belge de déstockage et des M109A5 furent donnés par les Italiens également.

M109 A3

3 MLRS Mars-II (cf. Allemagne)

De son côté nous pouvons également citer la République Tchèque qui a livré des LRM RM-70 et des BMP-1 sans que le nombre soit précisé.

Bien évidemment il s’agit ici d’une liste non exhaustive puisque ces informations ne sont pas toujours accessibles ou certaines et que nous nous sommes ici concentrés sur la France et les pays européens et plus précisément sur le matériel terrestre lourd. Ces mêmes pays et bien d’autres par conséquent non cités ont également envoyé de nombreux matériels individuels (casques, armes de poing, gilets, matériel médical…), de l’aide humanitaire et financière, sans parler des munitions de tous calibres, des missiles et des aéronefs.

The Mozart group et l'action des sociétés militaires privées Américaines en Ukraine

Source : CF2R - Note d'actualité n°604/Janvier 2023.

Dans le cadre du conflit entre l’Ukraine et la Russie, le rôle joué par la société militaire privée (SMP) russe Wagner n’en finit pas d’être commenté et d’occuper la Une des médias. Pourtant, l’entreprise russe – de son nom complet CHVk Wagner – fondée par Evgueni Prigojine et Dmitri Outkine est loin d’être la seule présente sur le théâtre des opérations. Plusieurs pays alliés de l’Ukraine, en premier lieu les Etats-Unis, mais aussi la France et le Royaume-Uni, possèdent également des SMP qui agissent ou ont agi, depuis le début du conflit entre Moscou et Kiev.

Pour rappel, les SMP emploient essentiellement d’anciens militaires, des membres des forces spéciales, des unités de police ou des services de renseignement. Ces sociétés, travaillant le plus souvent en lien avec leurs États respectifs, permettent à leurs pays d’agir à l’étranger de façon non-officielle en n’engageant pas leur responsabilité. Bien qu’il existe des règles juridiques internationales[1], les activités des sociétés militaires privées ne sont que faiblement encadrées en dehors du droit propre à chaque État.

La plus récente et la plus en vue des sociétés militaires privées américaines en Ukraine est The Mozart Group, mais elle n’est pas la seule à intervenir sur ce théâtre.

 

UNE SMP JEUNE ET ATYPIQUE

 

The Mozart Group, a été créée en mars 2022 et enregistrée au Wyoming par Andrew Milburn un ancien Marine[2]. Durant sa carrière, il a servi au sein des forces spéciales américaines en Somalie, en Irak, en Afghanistan[3], au Mali[4] et en Libye[5]. Il a été chargé des Future Operations au sein du Special Operation Command Europe (SOCCEUR)[6] et a été Deputy Commander of Special Operations Command Central (SOCCENT)[7], la composante opérations spéciales[8]de l’USCENTCOM (United States Central Command), le commandement unifié américain en charge du Moyen-Orient. Pour Andrew Milburn, le choix du nom de The Mozart Group est une référence sans équivoque au compositeur éponyme, en réponse au nom de la société d’Evgueni Prigojine[9]. De plus, l’ancien des Marines assure que son groupe, à la différence de la SMP russe, n’intervient pas les armes à la main sur la ligne de front[10].

Bien que souvent présentée sous le terme élogieux « d’ONG », par Bernard-Henri-Levy[11], ou encore de « start-up militaire » par le New-York Times[12], TMG est bien une société militaire privée car il s’agit d’un « organisme civil, privé, impliqué dans le cadre d’opérations militaires, dans la fourniture d’aide, de conseils et d’appuis militaires, et offrant des prestations traditionnellement assurées par les forces armées nationales »[13]. L’entreprise, quant à elle, refuse ce qualificatif et préfère celui d’organisation « humanitaire »[14].

TMG compterait environ 50 à 60 personnes en Ukraine[15], principalement des formateurs, le plus souvent anciens militaires ou membres des forces spéciales américaines, britanniques, irlandaises[16], néo-zélandaises, françaises[17] et estoniennes[18], auxquels s’ajoutent au moins deux interprètes[19] et des volontaires ukrainiens[20]. Ces personnels reçoivent une rémunération qui n’est pas connue avec précision,[21] mais qui doit avoisiner les 2 000 dollars par jour, comme semblent l’indiquer les offres d’emploi disponibles pour les contractors[22] déployés en Ukraine[23].

Entre mars et août 2022, le groupe aurait formé 3 000 soldats ukrainiens[24], dont un grand nombre ont rejoint les forces spéciales[25]. Les formations initiales de combattants durent de cinq à dix jours dans des centres situés à proximités des zones de combat, dans le « Donbass, ainsi qu’à Odessa et à Zaporijia »[26].

 

DES ACTIVITÉS VARIÉES

 

TMG propose plusieurs types de prestations : formation, logistique, influence et action psychologique, gestion des risques, renseignement et assistance juridique spécifique aux conflits armés.

Le groupe dispense de nombreuses formations spécialisées : médecine de combat, pilotage de drones, déminage, emploi des missiles antiaériens (Stinger) et antichars (ATGM), guerre non-conventionnelle, tir de précision (sécurisation de pièces ou de rues[27]), tactiques de combat et de patrouille en petite unité, etc. Dans le cadre du développement de ses activités, TMG recherche « des démineurs, des formateurs tactiques (…) et des professionnels de santé »[28], ainsi que des pilotes de drones. Le site internet du groupe précise que la société cherche à « recruter des instructeurs capables d’expliquer (…) le fonctionnement et l’utilisation des armes disponibles au sein de [leurs] formations ».

En matière logistique – comme elle le prouve en Ukraine[29] –, TMG assiste ses clients pour acquérir des licences commerciales, acheter et livrer du matériel militaire et de l’aide humanitaire[30] jusqu’à la ligne de front, ou pour assurer la transparence du suivi et le reporting[31]de livraisons aux unités désignées par le ministère de la Défense ukrainien. En effet, bon nombre de matériels et de biens humanitaires restent bloqués aux frontières du pays[32], posant de réelles difficultés d’approvisionnement, notamment au profit des « brigades internationales ». TMG organise également à des opérations de nettoyage des zones de combat, d’évacuation ou de soin aux blessés.

TMG conduit également des opérations d’influence visant les forces et les populations russes en exploitant sur ce que le groupe qualifie « d’échecs tactiques et opérationnels (…) et d’atrocités et de crimes de guerre commis »[33]. Par exemple, il peut diffuser des informations à grande échelle pour annihiler l’effet de surprise d’un rassemblement dans une région et inciter les combattants à déserter.

En matière de gestion des risques et de renseignement, TMG propose des « fiches » et des rapports détaillés à l’intention de gouvernements, d’entreprises, de médias, ou encore d’organisations non-gouvernementales. Ces « fiches » sont complétées par l’édition de « rapports de menaces » grâce à la collecte de renseignements de terrain et ou via les sources ouvertes (Open Source Intelligence/OSINT). Ils sont transmis aux forces spéciales ukrainiennes afin qu’elles puissent cibler les forces russes sur le terrain.

Enfin, TMG jouit d’un réseau étendu d’experts spécialistes du droit et des crimes de guerre et offre à ses clients la possibilité d’entrer en relation avec des équipes d’avocats dans le but de « s’assurer des meilleures chances de traduire en justice les responsables des atrocités commises ».

 

UNE COMMUNICATION OFFENSIVE

 

Parmi les diverses dimensions de la guerre russo-ukrainienne, la communication occupe une part prépondérante, ainsi que le montre l’utilisation massive des réseaux sociaux et des plateformes de diffusion vidéo.

The Mozart Group se démarque des autres SMP par une communication hors-norme. En effet, là où la plupart des SMP préfèrent rester discrètes, TMG communique abondamment sur les réseaux sociaux et auprès des médias, promouvant ouvertement son action en Ukraine, ce qui en fait une SMP atypique. En effet, au-delà des publications plus institutionnelles que l’on retrouve chez les autres acteurs privés de la sécurité, comme des photos et des vidéos d’entrainements et de formations[34], TMG documente ses interventions sur le terrain grâce à des vidéos partagées sur leurs réseaux sociaux[35]. Ces dernières suivent les codes classiques de ces plateformes, en publiant du contenu de courte durée, au format « vlog »[36]. Elles mettent en scène des personnes fragiles[37], des animaux[38] en détresse ou exposés au danger à proximité de la ligne de front. L’objectif est, outre la mise en avant des actions de la SMP, d’émouvoir les spectateurs[39] afin de créer de l’engagement pour obtenir des donations[40]. En effet, le groupe revendique un financement totalement indépendant provenant de donations privées[41], du crowdfunding[42] ou encore de la vente de produits divers (merchandising)[43].

Ce modèle de financement, très similaire à celui pratiqué par les influenceurs sur internet, permet à l’entreprise de mettre en avant une image bienveillante, semblable à celle d’une ONG ou d’une organisation philanthropique. Le recours à ce type de pratiques semble connaitre une véritable montée en puissance depuis le début du conflit. En effet, les appels aux dons pour soutenir l’Ukraine, organisés par des ONG ou des cabinets de conseil[44] – la plupart du temps en lien avec les autorités de Kiev ou une partie de la diaspora ukrainienne en Europe[45] – se multiplient.

TMG, par l’intermédiaire de son directeur, répond régulièrement à des interviews auprès de grandes chaines de télévision, de journaux ou encore de médias en ligne plus confidentiels. De plus, TMG et Andrew Milburn aiment utiliser des formules chocs dans leur communication, qualifiant les « actions des troupes et des dirigeants russes de génocide contre le peuple ukrainien »[46], comparant les agissements des troupes russes à ceux des nazis durant la Deuxième Guerre mondiale[47] ou encore à ceux de l’État islamique[48]. De toute évidence, les équipes de The Mozart Group maitrisent parfaitement les codes et les règles qui prévalent dans la guerre de l’information moderne.

Pourtant, TMG est loin d’être une organisation totalement autonome comme le laisse supposer sa communication. En effet, le groupe est lié à plusieurs acteurs particulièrement influents des relations ukraino-américaines. Le premier d’entre eux est l’ONG Ukrainian Freedom Fund (UFF), dont le but, depuis sa création en 2014, est de soutenir l’Ukraine en acheminant de l’aide humanitaire[49], du matériel militaire[50] et en offrant de la formation militaire et paramilitaire[51]aux troupes ukrainiennes. TMG est également membre de l’US-Ukraine Business Council (USUBC)[52]. Cette organisation que l’on peut qualifier de groupe d’influence a été fondée en 1995 et vise à « promouvoir les intérêts des entreprises américaines en matière de commerce et d’investissement sur l’important marché émergent de l’Ukraine (…). Veiller à ce que le point de vue des entreprises américaines soit connu et pris en compte dans la formulation des politiques du gouvernement américain à l’égard de l’Ukraine (…). Faciliter les contacts directs entre ses membres et les hauts responsables du gouvernement ukrainien et des chefs d’entreprise »[53]. Au sein de l’USUBC, on trouve un grand nombre d’entreprises et d’associations, principalement américaines ou britanniques. On trouve aussi des entreprises spécialisées dans les secteurs de la défense et de l’armement comme Lockheed Martin, Northrop Grumman Corporation ou encore BAE Systems[54]. Notons également que l’on peut lire sur le site de l’USUBC des tribunes choc, à l’image de celles de la journaliste Diane Francis, membre du Think Tank atlantiste Atlantic Council, qui accuse la Russie d’avoir fait « de Marioupol l’Auschwitz du XXe siècle »[55] et qui prône (l’envoi massif de matériel à l’Ukraine par les pays membres de l’OTAN et le déploiement « de forces spéciales ou de mercenaires pour saboter et endommager l’armée de Poutine ». Elle explique en substance que les « Etats-Unis ont les meilleures cartes mais [que] leurs partenaires européens sont lâches »[56].

Ainsi, The Mozart Group est parfaitement intégré dans l’écosystème de défense des intérêts américains en Ukraine. A l’instar des autres SMP, elle permet aux Etats-Unis d’agir et de soutenir l’armée de Kiev sans être directement impliqués (déni plausible)[57].

TMG est donc une SMP particulièrement médiatique dont l’action, très largement documentée, lui permet d’être sous les feux de la rampe. Mais cela ne doit pas faire oublier les activités des autres sociétés militaires privées américaines qui agissent actuellement en Ukraine.

 

L’ACTION DES AUTRES SMP AMÉRICAINES EN UKRAINE

 

Diverses sociétés militaires privées et entreprises spécialisées opéraient en Ukraine avant même que l’invasion russe n’ait lieu. Erik Prince, fondateur des sociétés Blackwater[58] et Frontier Services Group[59], a pensé un « projet de dix milliards de dollars »[60] dès 2020. Celui-ci avait pour objectif de prendre une part « importante dans le complexe militaro industriel ukrainien » afin de « fabriquer des armes et créer une armée privée en Ukraine »[61]. Par ailleurs, dès mars 2022, Erik Prince a souhaité que l’administration Biden envoie des aéronefs de type F-16 en Ukraine, ces derniers devant être « pilotés par des soldats américains à la retraite »[62].

Cet intérêt marqué pour l’Ukraine n’a eu de cesse de croitre après le déclenchement du conflit, ainsi qu’en témoignent les actions de diverses SMP au côté des troupes de Kiev[63], à l’image de Gallant Knights – qui a pu négocier un contrat de formation des commandos ukrainiens[64] – et de Mosaïc, une société spécialisée dans le renseignement, la cybersécurité et la formation, déjà présente en Ukraine avant le début du conflit[65]. Independent Security Advisors[66], dirigée par Matthew Parker, ancien vétéran de l’armée américaine, expert en formation, en lutte anti-terroriste[67] et en protection rapprochée, s’est rendu en Ukraine[68] afin de participer au recrutement de « volontaires étrangers », à la formation des « forces régulières ukrainiennes » et à la « planification tactique à la frontière avec la Biélorussie »[69]. CACI Group est également engagé sur place. Cette société travaille actuellement pour l’état-major des forces spéciales américaines[70], à qui elle fournit du renseignement technique (MASINT et SIGINT[71]). D’autres sociétés, comme AFGfree, dirigée par Perry Blackburn, œuvrent en Ukraine. Celle-ci « distribue des fournitures indispensables dans les zones interdites »[72] et réalise un audit des efforts de la « Défense territoriale ukrainienne pour recruter, former, organiser et équiper les Ukrainiens »[73], l’objectif ultime étant de créer une « stratégie cohérente (…) pour former les instructeurs aux bases du combat »[74].

Ainsi que l’observe Robert Young Pelton[75] sur la BBC, il y a une « frénésie sur le marché pour les entrepreneurs privés en Ukraine aujourd’hui »[76]. Les demandes se multiplient dans tous les domaines, « allant des missions d’extraction à l’aide logistique »[77]. Cette demande, qui se matérialise à travers les offres d’emploi consultables sur le site Silent Professionals[78], permet de confirmer indirectement l’implication toujours plus marquée des SMP américaines en Ukraine. Selon Robert Young Pelton, « des sous-traitants sont embauchés (…) pour aider à exfiltrer des personnes d’Ukraine » pour un montant total compris entre « 30 000 et 6 millions de dollars, (…) le chiffre le plus élevé concerne les groupes entiers de familles souhaitant partir avec leurs biens »[79]. L’expert explique que « d’anciens soldats multilingues prêts à se rendre secrètement en Ukraine » peuvent toucher « une belle somme pouvant aller jusqu’à 2 000 dollars par jour – plus un bonus – pour aider à sauver des familles ». Ces faits sont corroborés par la mort du citoyen américain, Willy Joseph Cancel[80], un ancien Marine américain « tué en combattant aux côtés des forces ukrainiennes » alors qu’il travaillait pour « une entreprise privée de sous-traitance militaire » dont le nom n’est pas connu.

Il est clair que les Américains sont particulièrement impliqués en Ukraine par l’intermédiaire de leurs SMP qui, forment, soutiennent, appuient et renforcent l’armée de Kiev. Leur présence dans ce conflit n’est toutefois guère différente de ce qui a pu être observé en Afghanistan et en Irak, où la complémentarité entre les autorités américaines et les acteurs privés de la sécurité était déjà très visible.

 

*

 

Bien que l’attention médiatique soit portée sur Wagner, les SMP américaines sont également présentes dans le conflit ukrainien et y jouent un rôle de premier plan à l’image, notamment, de The Mozart Group qui communique abondamment, notamment sur les réseaux sociaux. Le rôle joué par les SMP américaines est essentiel, aussi bien en matière de soutien logistique que de formation au profit des forces ukrainiennes, mais également, pour certaines, en tant que prestataires des autorités américaines qui assistent Kiev en matière de renseignement[81].

Les SMP américaines et russes ne sont pas les seules à être impliquées dans le conflit. La Biélorussie possède une société militaire privée, GardServis, qui a été chargée de la protection du président Loukachenko en cas d’extension du conflit[82]. La France, avec l’entreprise de service de sécurité et de défense (ESSD)[83] Chiron Solutions, est également présente dans le pays pour y effectuer des évacuations au profit d’entreprises et du corps diplomatique français[84]. A l’instar de TMG et de son dirigeant, le directeur du groupe français est également un habitué des médias, allant jusqu’à faire la promotion de l’action de son entreprise sur un média en ligne spécialisé dans les jeux vidéo[85].

 

 

 

 


[1] Le droit international encadrant les activités des SMP est non contraignant et laisse libre cours aux États pour imposer leur propre juridiction (cf. Valère Llobet, « La présence française en Afrique face à la menace des sociétés militaires privées russes et chinoises », Note d’actualité n°601, CF2R, novembre 2022).

[2] Duntton Jack, « Who are the Mozart Group ? Former U.S. Marine Training Ukrainians in War », Newsweek, 20 avril 2022.

[3] Barbancey Pierre, « Ukraine. Mozart contre Wagner : ce que l’on sait de la formation de combattants ukrainiens par des vétérans américains », l’Humanité, 28 avril 2022.

[4] Aubenas Florence, « Dans le Donbass, les vétérans américains du groupe Mozart jouent une petite musique de guerre », Le Temps, 21 août 2022.

[5] Gotic Ika Ferrer, « Col. Andrew Milburn: Russians are worse than ISIS », N1 Bosnia, 9 juin 2022.

[6] R. Milburn Andrew, « Breaking Ranks: Dissent and the Military Professional », Joint Force Quarterly, issue 59, 4th quarter, National Defense University Press, 2010.

[7] Colombini Stephanie, « A former U.S Special Operation commander from the Tampa area is in Ukraine training soldiers », WUSF Public Media, 13 avril 2022.

[8] Parmi ses activités l’on retrouve en plus de la conduite d’opérations spéciales, la planification et l’organisation d’exercices militaires conjoints pour les forces spéciales américaines dans la région.

[9] « Qu’est-ce que le groupe Mozart, qui entraîne les Ukrainiens au combat ? », Le Parisien, 25 août 2022.

[10] « Quand Mozart taquine Wagner pour sauver des vies en Ukraine », Le Point, 27 septembre 2022.

[11] Bernard-Henri Lévy, « Ukraine Will Win », Tablet Mag, 23 septembre 2022.

[12] Gettleman Jeffrey, « An American in Ukraine Finds the War he’s Been Searching for », The New York Times, 9 octobre 2022.

[13] Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale 2008, Volume 1 et Volume 2.

[14] Brenan David, « Notorious Wagner Group Targeting Volunteers in Ukraine, U.S. Trainer Says », Newsweek, 7 décembre 2022.

[15] « Former U.S. Marine Creates Team of Special Ops Vets to train Ukrainian Soldiers », NBC, 5 mai 2022.

[16] L.P, « Qu’est-ce que le Groupe Mozart, qui forme des Ukrainiens au combat ? », TFI Info, 23 août 2022.

[17] Atlamazoglou Stavros, « Mozart Group : How american veterans are helping ukraine win », Sandboxx, 9 mai 2022.

[18] Gettleman Jeffrey, op.cit.

[19] Ram Ed, « Mozart Group: the western ex-military personnel training Ukrainian recruits », The Guardian, 5 août 2022.

[20] Delpierre Antoine, « En Ukraine, d’anciens soldats américains créent le groupe Mozart en réponse à Wagner », TV5 Monde, 27 septembre 2022.

[21] Newton Simon, « Mozart Group: The counter to Russia’s infamous Wagner Group mercenaries », Forces Net, 7 avril 2022.

[22] Nom donné aux employés des SMP dans les pays anglo-saxons.

[23] Debusmann Jr Bernd, « Private military firms see demand in Ukraine war », BBC News, 9 mars 2022.

[24] « Qu’est-ce que le groupe Mozart, qui entraîne les Ukrainiens au combat ? », op. cit.

[25] Goodman Colby, Picard Michael, « Hidden Costs US private military and security companies and the risks of corruption and conflict », Transparency International, juillet 2022.

[26] L.P, « Qu’est-ce que le Groupe Mozart, qui forme des Ukrainiens au combat ? », op. cit.

[27] Colombini Stephanie, op. cit.

[28] « Join », The Mozart Group.

[29] « Delivering critical capabilities to Ukrainian frontline units », The Mozart Group.

[30] « Qu’est-ce que le groupe Mozart, qui entraîne les Ukrainiens au combat ? », op. cit.

[31] Le reporting comprend toutes les actions de réception et de contrôle des biens et matériels sur le front et la production de rapports de livraison.

[32] « Ukrainian Freedom Fund (UFF) Operations Update », US-Ukraine Business Council.

[33] Ibid.

[34] https://www.themozartgroup.com/news/

[35] Citons, par exemple, des comptes Facebook, Twitter, LinkedIn au nom de la société, mais également des réseaux sociaux au nom de son fondateur qui partage une partie des contenus de l’entreprise.

[36] https://twitter.com/TheMozartGroup/status/1586375232784371712

[37] https://twitter.com/TheMozartGroup/status/1585660350485110784

[38] https://www.linkedin.com/posts/andrewmilburn2020_ukraine-activity-6975362910608846848-lNJG/

[39] https://www.linkedin.com/feed/update/urn:li:activity:6989188080721141760/

[40] https://www.themozartgroup.com/donate/

[41] « Quand Mozart taquine Wagner pour sauver des vies en Ukraine », op.cit.

[42] Ingber Sasha, « The ‘Mozart Group’ Hopes to Save Ukrainians Trapped in a Steel Plant », Newsy, 28 avril 2022.

[43] https://www.linkedin.com/posts/themozartgroup_tmg-themozartgroup-military-activity-6978401078543298560-9tfM/

[44] Intelligence Online, 9 novembre 2022

[45] https://www.defendukraine.org/donate

[46] https://www.linkedin.com/posts/themozartgroup_russian-ukraine-genocide-activity-6972926640934785024-_8zk/

[47] https://twitter.com/TheMozartGroup/status/1526609197890252802

[48] Gotic Ika Ferrer, op. cit.

[49] « Ukrainian Freedom Fund (UFF) Operations Update », op. cit.

[50] Notamment des drones comme le montre cette campagne de dons. « Drones for Defenders », Ukrainian Freedom Fund.

[51] Intelligence Online, 27 juillet 2022.

[52] « U.S.-Ukraine Business Council (USUBC) Members and associate Members List», US-Ukraine Business Council.

[53] « Missions », US-Ukraine Business Council.

[54] « U.S.-Ukraine Business Council (USUBC) Members and associate Members List », op. cit.

[55] Francis Diane, « NATO : Grow a Backbone », US-Ukraine Business Council, 24 mars 2022.

[56] Ibid.

[57] Philipps Dave, « In Ukraine, U.S. Veterans Step in Where the Military Will Not », The New York Times, 3 juillet 2022.

[58] La société a aujourd’hui été renommée Academi.

[59] Llobet Valère, « Les sociétés militaires privées chinoises », Bulletin de Documentation n°24, CF2R, août 2021.

[60] Shuster Simon, « Document Reveal Erik Prince’s $10 Billion Plan to Make Weapons and Create a Private Army in Ukraine », Time, 7 juillet 2021.

[61] Ibid.

[62] De Graffenried Valérie, « Le sulfureux Erik Prince voulait envoyer des avions en Ukraine », Le Temps, 15 mars 2022.

[63] Intelligence Online, 2 novembre 2022.

[64] Intelligence Online, 8 novembre 2022.

[65] https://mosaicsec.com/.

[66] https://www.eptraining.us/about-us/.

[67] https://www.eptraining.us/instructors/matthew-parker/.

[68] Conklin Audrey, « US Army veteran going to Ukraine to assiste country’s military : ‘I don’t like what’s happening », Fox News.

[69] Intelligence Online, 15 novembre 2022.

[70] Intelligence Online, 22 septembre 2022. Pour rappel, l’entreprise aurait été impliquée dans le scandale d’Abou Ghraib (Hurley Lawrence, « U.S Supreme Court rejects defense contractor’s Abu Ghraib torture appeal », Reuters, 28 juin 2021).

[71] MASINT (Measurement and Signature Intelligence) SIGINT (Signals Intelligence) renseignement par interception électromagnétique.

[72] « US Special Forces veteran, founder of AFGfree.org Perry Blackburn », Ukrinform, 24 mai 2022,.

[73] Ibid.

[74] Ibid.

[75] Auteur canado-américain, expert des sociétés militaires privées.

[76] Debusmann Jr Bernd, op.cit.

[77] Ibid.

[78] https://silentprofessionals.org/jobs/extraction-protective-agents-ukraine/

[79] Debusmann Jr Bernd, op.cit.

[80] Kaufman Ellie, Ward Clarissa, « American killed fighting alongside Ukrainian forces in Ukraine », CNN, 28 avril 2022.

[81] Intelligence Online, 22 septembre 2022.

[82] Intelligence Online, 16 septembre 2022

[83] Les entreprises de services de sécurité et de défense (ESSD) », CF2R (https://cf2r.org/travailler-dans-le-renseignement/au-service-des-entreprises-et-des-collectivites/essd/).

[84] Intelligence Online, 22 mars 2022

 

 

Le secrétaire à la Marine de Biden a confirmé l’imminence d’une crise militaro-industrielle à propos de l’Ukraine

Source : The Saker francophone.

 


Par Andrew Korybko − Le 12 janvier 2023

Le secret le moins bien caché aux États-Unis depuis un an vient d’être révélé par le secrétaire d’État à la Marine de Biden, qui a confirmé que le complexe militaro-industriel américain pourrait bientôt avoir du mal à répondre à la fois aux besoins de son propre pays et à ceux de l’Ukraine. Defense One a révélé la nouvelle qui a ensuite été reprise tant par les médias conservateurs que libéraux, tels que Fox News et Newsweek respectivement, prouvant ainsi le sérieux des propos de Carlos Del Toro que les deux camps amplifient. Voici ce qu’il a dit :

 

« On a demandé au secrétaire de répondre aux commentaires faits lors de la conférence par l’amiral Daryl Caudle, chef du commandement des forces de la flotte américaine. Selon le journaliste, M. Caudle craignait que la marine n’en vienne à devoir décider si elle devait s’armer elle ou armer l’Ukraine. La marine en est-elle déjà arrivée à ce point ?

Del Toro a répondu : « En ce qui concerne les livraisons de systèmes d’armes pour le combat en Ukraine… Oui, c’est toujours une préoccupation pour nous. Et nous suivons cela de très, très près. Je ne dirais pas que nous en sommes encore là, mais si le conflit se poursuit pendant six mois ou un an de plus, la chaîne d’approvisionnement continuera certainement d’être soumise à des pressions difficiles. »

Le secrétaire d’État à la Marine a déclaré que la secrétaire adjointe à la Défense, Kathleen Hicks, travaillait  » en étroite collaboration avec l’industrie [de la défense], afin de l’inciter à déterminer quels sont les défis ou les obstacles qui l’empêchent d’augmenter ses propres taux de production« .

« Il est évident que ces entreprises disposent d’une importante source de revenus pour l’avenir », a déclaré M. Del Toro. « Elles doivent maintenant investir dans leur main-d’œuvre, ainsi que dans les investissements en capital qu’elles doivent réaliser au sein de leurs propres entreprises pour augmenter leurs taux de production. »

L’échange ci-dessus ne laisse aucun doute sur le fait que l’évaluation officielle du secrétaire d’État à la Marine concernant la crise militaro-industrielle américaine en Ukraine est désastreuse, ce qui signifie que ce dont le New York Times avait longuement parlé fin novembre ne peut plus être attribué à la « propagande russe » comme les trolls de la « NAFO » l’ont prétendu. Il est clair que l’on s’achemine vers un scénario à somme nulle dans lequel les États-Unis devront choisir entre répondre à leurs propres besoins minimaux en matière de sécurité nationale ou les sacrifier pour l’Ukraine.

Del Toro est dans le coup en tant que fonctionnaire en poste qui comprend manifestement à quel point la situation devient rapidement sérieuse, contrairement à l’ancien secrétaire à la défense Robert Gates et à la secrétaire d’État Condoleezza Rice qui se sont récemment joints à deux hauts responsables ukrainiens pour demander une augmentation de l’aide militaire américaine à l’Ukraine. Ni ces deux-là, ni l’actuel ministre ukrainien de la défense, Alexey Reznikov, ni l’ambassadeur d’Ukraine au Royaume-Uni, Vadim Prystaiko, n’estiment que les quelque 100 milliards de dollars que les États-Unis ont déjà accordés à Kiev sont suffisants.

Tous les quatre mettent donc imprudemment en danger les intérêts de la sécurité nationale des États-Unis, comme le comprend son secrétaire d’État à la marine en exercice, puisqu’ils font pression pour que ce pays sacrifie la satisfaction de ses propres besoins minimaux pour servir ceux de l’Ukraine. Cette observation devrait donner à tous les Américains sans exception l’occasion de réfléchir à la question de savoir s’il vaut vraiment la peine de continuer à perpétuer artificiellement cette guerre par procuration de l’OTAN contre la Russie ou s’il faut plutôt rechercher la paix.

Andrew Korybko

Traduit par Wayan, relu par Hervé, pour le Saker Francophone

Résultats splendides.

 

par Patrick Reymond - Le 14/01/2023.

 

Prenons l’humour macabre comme il se doit. Zelensky a parfaitement réussi l’opération Morgenthau en Ukraine, détruire la base industrielle et accessoirement, le peuple ukrainien, dont le total ne doit pas dépasser, désormais, 20 millions (en Ukraine).

« Au moins huit millions de personnes ont quitté l’Ukraine en 2022. Si l’on tient compte de la population des territoires perdus, il ne reste pas plus de 18 à 20 millions d’habitants dans le pays. Et en raison des restrictions sévères imposées au départ des hommes, ce sont surtout les femmes et les enfants qui quittent l’État ».

Du moins, ceux qui restent, sont ceux qui ne peuvent pas payer…

Les plus riches, aide internationale oblige, ont vu leurs fortunes augmenter de 20 milliards de $. Il fallait bien les consoler, les pôvres !

La moitié du PIB a disparu, la production minière est en berne, et l’industrielle a baissé de 50 à 90% suivant les régions…

Le pays n’est qu’une coquille désormais vide.

Seule la coquille existe encore, entre les soldats, payés au front 100 000 hryvnias (2700$) et les fortifications érigées en 8 ans, elle commence à s’effondrer avec la prise de Soledar, et Zelensky, tel Hitler, refuse tout recul. Ça tient un temps, mais aux prix de lourdes pertes, dont on disait qu’elles étaient dix fois plus lourdes que les russes, mais ce ratio bouge lui aussi, il est largement dépassé, certains affirmant qu’il atteint 30 contre 1…

Les USA battent les records de vente d’armes, en réalité, ce ne sont pas parce qu’elles sont meilleures ou plus nombreuses, c’est qu’elles sont plus chères, sans avoir une qualité adéquate. 800 milliards de budgets pour des résultats inférieurs à ceux de la Russie, qui en dépensent 65, et sans doute inférieurs aussi, à ceux de la Chine, 290 milliards. Mais dans un des cas, le complexe militaro industriel est privé, corrompt et accumule, dans l’autre, ils ont une industrie nationale…

Deripaska, qui en détenait une bonne part en Russie, a dû tout revendre à l’état. La rentabilité était incertaine, et les contrôles du FSB, incessants.

En Europe, on suit la voie Morgenthau de l’appauvrissement, du dépeuplement. Personne n’en a conscience, mais la jean-foutrerie du richofemenclimatic occupe encore tous les esprits.

Les dirigeants européens, vont finir par choisir la voie Belge : chauffage à 14° pour sauver l’industrie, ou ce qu’il en reste.

source : La Chute

Se débarrasser de Macron pour éviter la guerre mondiale : Doit-on hésiter ?

Source : Riposte laïque...par Boris Karpov - Le 10/01/2023.

Les émissions de Vladimir Soloviev sont très suivies en Russie, elles ont toujours de prestigieux invités politiques. Hier soir le député de la Douma André Viktorovitch Guruliev, membre du partie « Russie Unie » de Vladimir Poutine, a suggéré que la Russie fasse une frappe sur la France. Ceci suite à la livraison de matériel « lourd » de la France à l’Ukraine, à savoir quelques véhicules blindés AMX.

Cette livraison en elle-même ne pose pas un gros problème pour la Russie, l’AMX-10 semble en effet bien inadapté au froid et au gel, et la maintenance nécessaire est impossible en Ukraine. Sans parler du format des munitions, spécifiques, qu’il faudra donc acheminer régulièrement.

Le véritable problème de cette livraison est que Macron franchit une étape supplémentaire en livrant du matériel « lourd ». Immédiatement d’ailleurs l’OTAN a déclaré envisager très sérieusement la livraison de chars allemands et britanniques qui, eux, sont d’un autre niveau que l’AMX français.

Il ne faut pas croire que Guruliev s’est exprimé sur un coup de colère. Il n’est député fédéral que depuis 2021, et est un militaire de carrière. Commandant de la 58e Armée interarmes (janvier 2012 – août 2016) puis Commandant adjoint du district militaire sud (août 2016 – janvier 2019 ), il est aujourd’hui lieutenant général de réserve et ses avis sont très écoutés et respectés par la hiérarchie militaire et par le pouvoir politique.

Il est parfaitement clair qu’à livrer des armes à l’Ukraine, les pays occidentaux s’attaquent directement à la Russie en tuant soldats et civils Russes. Des projets de frappes sur les intérêts de l’OTAN sont d’ores et déjà dans les cartons, il ne manque que l’ordre de Vladimir Poutine.

Une première option serait de frapper les intérêts français en dehors de la France. On peut très bien envisager une attaque lourde contre une base française en Afrique, qui sera mise sur le dos des « terroristes »… C’est d’ailleurs ce qui arrive régulièrement aux bases américaines en Syrie. Bien entendu la France saurait à quoi s’en tenir, et aurait alors le choix de continuer l’épreuve de force avec la Russie. Sachant que la mesure de rétorsion suivante sera cette fois directement sur le territoire français, par exemple contre des dépôts de carburants ou mieux encore, des usines d’armement. Les cibles sont déjà clairement répertoriées et des opérateurs sur place n’attendent que le feu vert.

Un autre élément important a été discuté : il apparaît qu’en France Macron n’a aucun « successeur » potentiel ayant les mêmes positions folles sur ce dossier. Et certains de dire que si, par exemple, certains dossiers « secrets »  sur Macron étaient publiés et le forçaient à démissionner « pour raisons de santé », son successeur quel qu’il soit ne suivrait pas le même chemin vers la guerre contre la Russie, et l’OTAN en serait lourdement handicapée.

Peut-être cette solution doit-elle être envisagée au plus vite. Éliminer un homme pour éviter ou du moins retarder la guerre mondiale, doit-on hésiter ?

Version originale de l’article en français: ici.

Boris Guennadevitch Karpov
https://boriskarpov.tvs24.ru

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Merci d’avance !

 

Ukraine : Emmanuel Macron, incapable de définir un cap politique cohérent.

Source : Bd Voltaire. par frédéric Lassez - Le 09/01/2023.

 

Depuis le début du conflit, la seule chose qui ne change pas, avec , c’est qu’il change continuellement de positionnement et de politique. Une oscillation permanente entre une approche réaliste, soucieuse d’aboutir à une solution négociée à partir des revendications de chacune des parties, et un manichéisme belliciste qui transforme ce conflit en une croisade morale du bien contre le mal.

On peut facilement identifier les cycles récurrents qui le conduisent à évoluer d’un extrême à son opposé avant de revenir à son point de départ. Ainsi, au printemps 2022, on se souvient de sa petite phrase sur la nécessité de ne « pas humilier la Russie » afin que, le jour où cesseraient les combats, « nous puissions bâtir un chemin de sortie par les voies diplomatiques ». C’était la phase « réaliste ». Des propos qui avaient déclenché l’ire de Kiev et de plusieurs officiels européens. « Les appels à éviter d’humilier la Russie ne peuvent qu’humilier la France », avait rétorqué le ministre des Affaires étrangères ukrainien Dmytro Kuleba. Peu de temps avant, le Premier ministre polonais avait déjà reproché à  ses entretiens téléphoniques réguliers avec Vladimir Poutine : « On ne débat pas, on ne négocie pas avec les criminels, les criminels doivent être combattus », avait affirmé Mateusz Morawiecki.

Une deuxième séquence « belliciste » avait alors suivi, illustrée par une visite surprise à Kiev, le 16 juin dernier. Plus question, alors, de « cessez-le-feu ». « Aujourd’hui, il faut que l’ puisse résister et l’emporter », avait déclaré le Président français qui avait annoncé la livraison de nouveaux canons CAESAr. Dans Le Figaro, Isabelle Lasserre avait immédiatement célébré le « virage ukrainien d’Emmanuel Macron » ainsi que la fin du « en même temps ». De son côté, Le Monde avait noté que le Président français n’avait pas précisé ce que signifiait « dans son esprit, une éventuelle victoire ukrainienne ». Du flou, toujours du flou.

Troisième séquence, avec un retour au point de départ « réaliste », début décembre. Après son voyage aux États-Unis, la presse française annonçait qu' allait « se faire l’artisan de la paix en Europe ». Il déclarait avoir échangé avec le président Biden à propos de « l'architecture de sécurité dans laquelle nous voulons vivre demain ». Et d’ajouter qu’« un des points essentiels » pour Vladimir Poutine était « la peur que l'OTAN vienne jusqu'à ses portes » et le déploiement d'armes qui pouvait « menacer la Russie ». Il fallait donc réfléchir à la manière de donner « des garanties pour sa propre sécurité à la Russie », dans le cadre de futures négociations.

Nouvelle petite phrase qui enclenchait un nouveau cycle. Dans Le Figaro, Isabelle Lasserre faisait les gros yeux et dénonçait « ces gaffes de Macron qui isolent la France » et le retour des ambiguïtés. Kiev s’était encore fâchée mais le Président français savait par avance qu’il serait pardonné à l’occasion de la conférence internationale de soutien à l’ qu’il organisait, le 13 décembre, à Paris. Le journal Le Monde avait alors décidé d’enquêter pour comprendre la stratégie de Macron, reconnaissant que son « en même temps diplomatique » relevait du « mystère »« Il s’estime capable de jongler avec des idées contradictoires », notait l’expert François Heisbourg, qui ajoutait : « Et tant pis si personne n’y comprend plus rien. »

Dernier épisode en date avec la promesse du Président français d’envoyer des blindés légers à Kiev. « Une première pour un pays occidental », notait la presse, et, donc, un nouveau coup politique avec ce retour à une posture belliciste qui plaçait la France en tête à l'occasion d'une escalade majeure. Zelensky était ravi, Macron aussi, qui continuait à faire les gros titres.

Si la psychiatrisation de la vie politique est habituellement exaspérante, il faut reconnaître (une fois n’est pas coutume) qu’il n’est guère possible de faire autrement avec Emmanuel Macron. On ne peut, en effet, s’empêcher d’observer que sa seule cohérence, celle qui semble le mieux expliquer ses perpétuelles incohérences politiques et verbales, relève d’un besoin narcissique maladif d'occuper le devant de la scène. Contesté ou encensé, c’est toujours de lui qu'on parle.

Son incessante danse à contre-pied, dans un contexte de confrontation avec une puissance nucléaire, n’a cependant rien de risible. Bien au contraire, elle rend la politique de la France illisible et imprévisible. Au mieux, elle nous marginalise, au pire, elle fait de nous une cible. 

Le moment arrive où l’OTAN ne pourra plus dissimuler la catastrophe

 

par le colonel Douglas MacGregor

« Le moment arrive où l’OTAN ne pourra plus dissimuler la catastrophe, c’est un désastre ».

« Les Russes n’ont pas grand-chose à faire et ils ne le font pas pour le moment », analyse le colonel à la retraite de l’armée américaine Douglas MacGregor.

« La grande majorité de leurs forces se préparent pour l’offensive qui sera lancée quand le commandant du théâtre militaire décidera que c’est le bon moment. Il attend une amélioration de la météo et que le sol gèle. Il attend que tous les réservistes soient pleinement intégrés ».

L’armée de Kiev perd, « elle perd des milliers de soldats. Les Russes, quant à eux, ont très peu de victimes », poursuit-il, évoquant un « rapport de 1 pour 8 ou 1 pour 10 ».

Et de conclure : « Nous allons arriver à un moment où nous ne pourrons plus dissimuler la catastrophe sur le terrain en Ukraine ».

L’OTAN fournit de la « ferraille » militaire aux forces armées ukrainiennes

 

par Bruno Bertez - Le 06/01/2022.

Les pays de l’OTAN, menés par les États-Unis, fournissent aux forces armées ukrainiennes du matériel militaire obsolète pour remplir leurs propres entrepôts vides avec les dernières armes. Jacech Tokmak, chroniqueur de Niezależny Dziennik Polityczny (Pologne), écrit à ce sujet.

« L’aide militaire de l’Occident afflue vers l’Ukraine en un flux continu. Il convient de noter que la plupart des armes sont en mauvais état technique. L’équipement militaire a de nombreux problèmes et n’est essentiellement que de la ferraille et des ordures, ce qui est confirmé par les soldats de les forces armées d’Ukraine » indique l’article.

Des experts de l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (SIPRI) confirment également que la plupart des armes arrivent en Ukraine à partir d’anciennes réserves militaires. « Tout cela est fait pour réapprovisionner les entrepôts vides de l’UE et des États-Unis avec de nouvelles armes » écrit le journal.

« Débarrasser les entrepôts de ces armes est très bénéfique pour l’Occident. Tout d’abord, afin de procéder à la modernisation maximale de leurs propres armes. Et pendant que l’UE et les États-Unis nettoient leurs arsenaux, les forces armées ukrainiennes devraient utiliser ce qu’on leur donne », dit l’article.

Les sociétés américaines Raytheon, Lockheed Martin et Northrop Grumman bénéficieront le plus de ces fournitures, déjà en train d’attribuer des contrats pour reconstituer les arsenaux des États-Unis et de leurs alliés de l’OTAN. En Europe, les principaux bénéficiaires sont le français Thales et le britannique BAE Systems.

source : Bruno Bertez

La France va livrer des chars AMX-10RC à l’armée ukrainienne.

Source : OPEX 360 - Par Laurent Lagneau - Le 04/01/2023.

Ces derniers mois, l’Ukraine a réclamé, non sans insistance, des chars de conception occidentale, notamment des M1 Abrams américains et, surtout, des Leopard 2 allemands.

D’ailleurs, à Berlin, la demande de Kiev a fait débat… la coalition gouvernementale étant divisée sur ce sujet. En effet les libéraux et les écologistes y sont favorables… tandis que les sociaux-démocrates ont affiché leurs réticences, à commencer par le chancelier Olaf Scholz.

Selon ce dernier, livrer des Leopard 2 à l’armée ukrainienne pourrait « conduire à une escalade avec la Russie »… Et la Bundeswehr n’en a pas de trop… En outre, et au-delà des considérations pratiques [formation, logistique, maintenance, etc], il a jusqu’à présent rejeté l’idée que l’Allemagne soit le seul pays occidental à s’engager dans une telle voie.

Cela étant, Kiev a également demandé des chars Leclerc à la France. « L’examen de la demande est en cours », a confié Étienne de Poncins, l’ambassadeur de France en Ukraine, lors d’une audition parlementaire, en novembre dernier.

Récemment, le Premier ministre ukrainien, Denys Shmyhal, a remercié la France pour la livraison des dix-huit CAESAr… et affirmé que son pays serait aussi « très reconnaissant » pour des chars Leclerc.

Lors de sa visite à Kiev, le 28 décembre, le ministre français des Armées, Sébastien Lecornu, n’a pas fait d’annonce sur la fourniture de nouveaux matériels aux forces ukrainiennes. Cependant, il a exclu, du moins a priori, la livraison de chars Leclerc, dont l’entretuien serait trop complexe au regard des besoins immédiats de l’Ukraine.

Mais Kiev aura bien des chars de conception occidentale. En effet, ce 4 janvier, à l’issue d’un entretien avec Volodymyr Zelenski, son homologue ukrainien, le président Macron a annoncé que des AMX-10RCR prendrait prochainement la direction de l’Ukraine.

La France va livrer à l’Ukraine des « chars de combat légers », a en effet indiqué l’Élysée. « Le président a souhaité amplifier » l’aide militaire déjà apportée à Kiev « en acceptant de livrer des chars de combat légers AMX-10 RC », a précisé la source. Et de souligner que « c’est la première fois que des chars de conception occidentale sont fournis aux forces armées ukrainiennes ».

Pour rappel, conçu dans les années 1970, l’AMX-10RC est un char à roues d’une quinzaine de tonnes armé d’un canon de 105 mm F2 BK MECA L/48 [38 obus] et d’une mitrailleuse AA 7,62 NF1.

En service au sein de l’armée de Terre depuis 1981, il va être progressivement remplacé par l’Engin blindé de reconnaissance et de combat [EBRC] Jaguar, dans le cadre du programme Scorpion. Pour le moment, seul le 1er Régiment Étranger de Cavalerie [REC] est déjà opérationnel sur ce nouveau char.

Cela étant, et d’après les « Projets annuels de performances » publiés par le ministère de l’Économie et des Finances, la flotte d’AMX-10RC était en difficulté en 2020.

Le « parc AMX-10RC a été affecté par des problèmes techniques sur les boîtes de vitesse », pouvait-on lire dans l’un de ces documents. Et si ces difficultés étaient alors sur le point d’être résorbées, ce parc « restera structurellement en difficulté en raison de son âge et d’un approvisionnement difficile en rechanges », avait-il prévenu.

 

Ukraine : On n’a pas de pétrole… mais on a des chars en rabe !

Source : Bd. Voltaire. par Arnaud Florac - Le 05/01/2023.

La nouvelle est tombée cette semaine dans la presse : il paraît que la France, et pas n'importe laquelle, celle d', va livrer à l' des «  légers » - à roues, donc. Renseignements pris, il s'agit du modèle AMX-10 RC (RC pour roues-canon), en service dans certains régiments de cavalerie blindée, des chars qui doivent apparemment être remplacés par un nouveau modèle, le Jaguar, dans les années à venir. Normalement, donc, pas de problème : on rend service, on donne de vieux équipements qui ne servaient plus. C'est, déférence gardée envers l' ukrainienne, une sorte de bourse aux équipements, une manière d'Emmaüs militaire. On pourrait considérer que c'est comme ça, que ce n'est pas si grave et que c'est même plutôt sympa, et s'arrêter là.

On pourrait, mais on ne devrait peut-être pas. La position officielle de la France, plutôt équilibrée et intelligente, convient que les conditions ne sont pas réunies pour que l'Ukraine rejoigne l'OTAN. C'est heureux, car l'adhésion de l'Ukraine obligerait immédiatement, de facto, les pays membres de l'Alliance atlantique à lui porter secours, en vertu de l'article 5 du traité de l'Atlantique Nord. En revanche, dans un nouvel « en même temps » époustouflant de souplesse, le fait de fournir officiellement des blindés à un État souverain, qui se défend contre un autre État souverain, marque une nouvelle étape dans la dégradation des relations franco-russes. La France, après avoir fourni des canons d'artillerie, livre désormais des chars qui, quoique « légers », renforcent sa position de « cobelligérant », telle que définie par la Russie. Elle prend sa place aux côtés des autres membres de l' qui lui reprochent, dit la presse, son faible investissement financier dans la cause ukrainienne.

Nous n'avons pas de pétrole, notre électricité coûte un bras et nos boulangeries, nos restaurants ferment les uns après les autres à cause de l'augmentation du prix de l'énergie. Le litre d' flirte avec les 2 euros, la  s'installe... mais, heureusement, on apprend donc de manière fortuite que la  a des chars en rabe. C'est bien. L'histoire ne dit pas si ce matériel va être retiré à des unités combattantes ou s'il avait déjà été sorti des stocks de l' française.

À l'exception d'une menace contre les intérêts de la France, il n'y a théoriquement, dans une guerre, ni « gentil » ni « méchant ». La géopolitique selon Gulli n'a jamais produit de bons résultats : Belgrade en Serbie, Bagdad en Irak, Kaboul en Afghanistan, Pristina au Kosovo et maintenant Kiev sont là pour témoigner. Tous les conflits du « bien contre le mal », ces trente dernières années, se sont terminés en eau de boudin, avec des centaines de milliers de morts, des États faillis, des  en libre circulation, des déplacements de population, des mensonges énormes (Colin Powell à l'ONU), des villes ravagées, des régimes politiques totalement mafieux... Peut-être aurait-on pu réfléchir à deux fois avant de s'embarquer résolument aux côtés du régime de Zelensky, donc des États-Unis. Il est un peu tard, maintenant, et il ne reste plus à nos « chars légers » qu'à quitter la  au crépuscule, pour paraphraser Jean Raspail, en passant par la porte de l'Ouest qui n'est plus gardée. Et advienne que pourra..

 

Transfert pipeau de véhicules blindés de l’Otan : Bonne chance, les Ukrainiens !

Source : Riposte laïque. Le 06/01/2023.

AMX 10 RC Français

L’Otan va fournir à l’armée ukrainienne, non plus des équipements militaires datant de l’ère soviétique et provenant des pays de l’ancien camp socialiste, mais des véhicules de combat en service dans les armées des États-membres du bloc.

C’est ainsi que le président américain Joe Biden a décidé de transférer à Kiev des véhicules de combat d’infanterie M2 Bradley, le Chancelier d’Allemagne fédérale Olaf Scholz a annoncé qu’il était prêt à fournir à l’Ukraine des véhicules de combat d’infanterie Marder et le ministre britannique des Affaires étrangères James Claverly a déclaré que le Royaume-Uni était disposé à fournir des chars de combat Challenger aux forces armées ukrainiennes. Quant au président Macron, il a annoncé la fourniture à Kiev de véhicules de reconnaissance de combat AMX-10RC, classés par les experts comme « chars à roues ».

Selon le commandant en chef des forces armées ukrainiennes Valery Zaluzhny et le chef du GUR (service ukrainien du renseignement) Kirill Budanov, les forces armées ukrainiennes ont l’intention, au cours de la prochaine campagne d’hiver, d’infliger une « défaite écrasante » à l’armée russe et de retrouver les frontières de 1991. Une ambition qui nécessite le maintien à un niveau élevé du financement par l’Occident de l’effort de guerre de Kiev.

L’armée ukrainienne pourra-t-elle infliger cette « défaite écrasante » avec les véhicules blindés qui lui ont été promis ? Rien n’est moins sûr…

2400 véhicules IFV (Infantry Fighting Vehicle) M2 Bradley – mis en service en 1981 – équipent actuellement l’armée US. Le M2 est armé d’un canon automatique de 25 mm, de missiles antichars TOW et d’une mitrailleuse. Il est capable de transporter six fantassins en équipement. Principal véhicule de combat d’infanterie des forces armées américaines pendant plus de quarante ans – avec un pic durant la guerre d’Irak – le M2 Bradley sera remplacé dès 2023 par un nouveau véhicule de combat plus approprié aux conflits modernes. Le Pentagone va ainsi fourguer ses vieux M2 à l’Ukraine en prévision de l’équipement progressif de l’armée américaine par ce nouveau véhicule… Le premier lot destiné aux livraisons à Kiev comprendra une cinquantaine de M2, ce qui correspond à peu près à l’effectif d’un bataillon.

De son côté, l’Allemagne a l’intention de transférer une partie de ses véhicules de combat Marder aux forces armées ukrainiennes. Le Marder a été mis en service par la Bundeswehr en 1971 et a depuis connu plusieurs étapes de modernisation. Il a entre autres été équipé d’un blindage qui offre une protection frontale contre les canons automatiques soviétiques russes de 30 mm. Au total, l’Allemagne compte actuellement 319 Marder, Le Chancelier Olaf Scholz a annoncé que son pays se disposait à en transférer une quarantaine à l’Ukraine. Une manière de rentabiliser le remplacement progressif des Marder par le nouveau Puma au sein de la Bundeswehr…

Paris a pour sa part annoncé son intention de donner à Kiev une partie de ses 230 véhicules de reconnaissance de combat AMX-10RC, également appelés « chars à roues ». Mis en service en 1978, l’AMX-10RC était plutôt destiné à participer à des opérations de combat de type coloniales, dans des conditions climatiques africaines et sur des zones non protégées par des défenses antichars efficaces. De l’avis des experts, l’utilisation de ce « char à roues » n’est pas sérieusement envisageable dans le contexte météorologique ukrainien, contre un ennemi technologiquement avancé et bien armé comme l’est l’armée russe.

Pour ne pas paraître en reste, le Royaume-Uni a annoncé par la voix de James Claverly son intention de transférer à Kiev quelques-uns de ses chars Challenger 2 actuellement en service au sein des armées de sa Gracieuse Majesté. Une offre plus intéressante que les véhicules promis par Washington, Berlin et Paris : le Challenger 2 a en effet été mis en service en 1998 – il y a un quart de siècle quand même… -. Y aurait-il un loup ? Oui : Claverly s’est bien gardé de préciser le moindre début d’un calendrier pour ce transfert, se contentant d’indiquer qu’il se ferait « dans un avenir proche »

Ce transfert vers l’Ukraine de matériel militaire déclassé ou en voie de déclassement est d’un total cynisme et marque clairement l’intention de l’Otan de se battre contre la Russie jusqu’au dernier Ukrainien. Ce flot ininterrompu d’armes et d’argent donne au régime de Kiev l’illusion suicidaire de l’immortalité. Plus dur sera le réveil…

Source : RIAFAN

Henri Dubost

In girum imus nocte ecce et consumimur igni 

Des AMX 10 RC....de 40 ans d'âge bourrés de failles techniques majeures ... ! 
Un mauvais engin de reconnaissance, un mauvais char ... que j'ai eu l'occasion de mettre en oeuvre au 3° RH. 
Juste bon à être engagé contre les pick-up et motos au Sahel.
Les Ukrainiens ne vont pas être décus....Inapte au tir canon par temps froid, faiblement "blindé", canon très fragile, peu maniable (par exemple : "faire pivot" est très problématique). Cerise sur le gateau : Il ne "flotte" plus car "on" a augmenté son poids en renforçant le blindage.
Je ne leur donne pas un mois de survie face aux T72 Russes...
DONNER ces engins à l'Ukraine est particulièrement stupide. Outre les failles techniques citées, par ce geste la France entre de plein pieds et clairement dans la "co-bélligérance" sachant que cela ne changera pas le cours de la guerre si ce n'est que nous risquons d'avoir, en retour quelques "éclaboussures" SUR LE TERRITOIRE NATIONAL...
E.Macron doit être fier d'être le premier à fournir des chars de technologie occidentale, même s'ils sont mauvais, alors que les autres pays y regardent à deux fois. 
Plus STUPIDE que cela : Difficile de faire !
IL aurait mieux fait de les recycler comme cibles sur les pas de tir de Mailly ou Mourmelon. Au moins ils auraient servi à l'entraînement de nos tireurs.
Au bilan, ce sont encore nos impôts que disparaîtront dans le trou noir Ukrainien sans imaginer les conséquences d'un tel geste pour la France. Il est maintenant totalement inutile de se poser en négociateur pour obtenir la PAIX ...
Je suis vert.... de rage...!
JMR
NB : A ma connaissance, il n'y a pas d'AMX10 RC en stock, donc, il est probable que le 1° REC, qui est en cours d'équipement de l'EBRC "Jaguar", sera le premier à céder ses 10 RC à l'Ukraine.

Le temps des bouses

Source  : RzO International.
par Patrick Reymond - Le 07/01/2023.

On a beau m’affirmer qu’avec le temps, on se bonifie, je constate personnellement qu’il n’en est rien.

Pour les fournitures d’armes en Ukraine, on peut dire que c’est le même topo.

Le temps des bouses (et non des cathédrales) est arrivé.

Visiblement, on balaie les dépôts dans les coins, pour arriver encore à fournir.

On ressort les AMX 10RC de leur cimetière des éléphants pas roses. De fait, ces blindés n’ont jamais été testés en conditions réelles contre un vrai adversaire. Ils sont vieux, obsolètes et pour les pièces de rechange, je crois deviner une situation déplorable. De plus, toutes les armes oxydentales-oxydées, sont faites pour gaver les complexes militaro-industriels, pas pour perdurer, et la maintenance est un gouffre à pièces de rechange.

Si beaucoup de blindés russes sont soviétiques, et d’autres armements, sont anciens, eux, étaient conçus pour être robustes, simples à réparer et à entretenir. Le canon Caesar, lui, n’est pas de cet acabit, et toute la quincaillerie oxydentale-oxydée est dans le même état. Faites pour affronter des armées pygmées, incapables de faire autre chose qu’un conflit asymétrique, qu’ils ont en plus le culot de gagner.

Donc, les USaméricains enverront, eux, des Bradley. Vieux de 40 ans, ils sont à bout de souffle aussi, et ont subi des pertes considérables sur le terrain, notamment en Irak.

Finalement, il ne s’agit pour les oxydentaux-oxydés que de gagner du temps, et d’entretenir le broyeur russe.

La plupart des pourpres décérébrés se demandent quand l’Ukraine gagnera la guerre. Souvent j’ai détonné en disant qu’elle n’avait aucune chance.

La Russie a préparé une guerre d’usure, qui consistent à gérer ses ressources avec prudence (mais sans parcimonie sur le terrain) et surtout une vaste supériorité matérielle, une base industrielle énorme, capable de remplacer toutes les pertes et au delà.

Les troupes n’ont pas été gaspillées quand la situation tactique était difficile, mais à Karkhov et Kherson, les retraits ont été l’occasion de faire de la charpie des forces ukrainiennes.

Un pays de moins de 40 millions d’habitants (tombé certainement à 30), ne peut se mesurer à un pays de plus de 140 bien mieux préparé et armé.

Le but du jeu de guerre, était, au départ, de terrasser l’économie russe en quelques semaines par les sanctions, c’est devenu d’infliger suffisamment de pertes à l’armée russe pour saper le moral de la nation.

Ce but sera dur à atteindre, le souvenir de la grande guerre patriotique est vivace et entretenu, les pertes y ont été énormes, et les Russes savent ce que c’est que de perdurer.

L’économie ukrainienne a cessé d’exister, l’armée ukrainienne est à l’image de son pays, resté à l’an 1991, sans investissements, son armée était réputé corrompue. Si l’OTAN a pu la regonfler aux stéroïdes, le sevrage a été brutal.

L’arrivée de nouveaux matériels, dans des mains inexpertes, mais aussi un matériel vieux et largement obsolète, ne changera rien. De plus, il faut tout l’environnement, le biotope qui accompagne le matériel, sinon, tout devient rapidement inutile sur le terrain.

Les oxydentaux-oxidés n’ont plus de complexe militaro industriel pour fournir, ni en qualité, ni en quantité. Et la recréation d’une base industrielle prendrait des années, sans que la qualité soit au rendez vous.

Bref, c’est mal barré…

source : La Chute

Des blindés AMX 10 RC pour Kiev : Le double jeu permanent de Macron

Source : Riposte laïque - par Jacques Guillemain - Le 05/01/2023.

Fidèle à sa philosophie hypocrite du « en même temps », Macron prétend vouloir la paix mais arme toujours l’Ukraine, persistant à faire de Poutine l’unique agresseur.

Or, Paris et Berlin restent les principaux responsables de cette guerre fratricide, pour avoir saboté les accords de Minsk, en refusant de les faire appliquer par Kiev. Merkel et Hollande ont reconnu que ces accords étaient du pipeau, uniquement destinés à tromper Moscou.

Depuis 2014, ce sont les Ukrainiens qui sont les agresseurs du Donbass, une guerre mise sous le tapis qui a fait 15 000 victimes, dont des milliers de civils, avec la bénédiction de Paris et Berlin, valets de Washington.

Persistant à désosser notre armée déjà exsangue, en livrant à l’Ukraine 18 canons Caesar qui tuent des enfants du Donbass, Macron va donc fournir des chars légers AMX 10 RC, prélevés sur les 250 exemplaires qui seraient encore dans nos unités.

https://www.lavoixdunord.fr/1274471/article/2023-01-04/la-france-va-livrer-des-chars-de-combat-legers-amx-10-rc-l-ukraine

Nos soldats manquent de tout, notre armée est « au taquet » avec les Opex en Afrique, mais quand on n’a pas tout donné à Zelensky, on n’a rien donné. Plus les Occidentaux s’inquiètent du risque d’escalade et plus ils arment l’Ukraine.  Et plus notre économie est étranglée par la guerre, plus Macron veut la prolonger. 

« Depuis le début du conflit en février, la France a notamment fourni 18 canons Caesar de 155 mm d’une portée de 40 km, montés sur camion, des missiles antichars et antiaériens, des véhicules de l’avant blindé (VAB), et plus récemment des lance-roquettes ainsi que des batteries de missiles Crotale. Paris envisage aussi de fournir à Kiev six à 12 canons Caesar supplémentaires, prélevés sur une commande destinée au Danemark. »

L’AMX 10 RC est équipé d’un canon de 105 mm, un blindé léger de 25 tonnes non chenillé, avec 6 roues motrices. Très maniable sur sol sec, il est vite limité dans la boue. Il sera remplacé par le Jaguar (ci-dessous).

.               .

« C’est la première fois que des chars de conception occidentale sont fournis aux forces armées ukrainiennes ».

Certes, les chars livrés par les ex-pays de l’URSS sont d’origine soviétique, mais ne comparons pas un AMX 10, engin de reconnaissance, avec un char lourd de combat.

Quant à notre char Leclerc, nous n’en possédons plus que 200, soit l’équivalent de quelques jours de combat de haute intensité. Autant dire que notre armée fait sourire les officiers russes, qui savent que  leur industrie d’armement tourne à plein régime pour faire face à la coalition occidentale qui arme l’Ukraine.

« Les ministres de la Défense français et ukrainien vont échanger « très vite pour définir les modalités » de ces livraisons, tant sur les délais que sur le nombre de chars, a précisé à l’ AFP le ministère français des Armées. »

Emmanuel Macron, qui a réaffirmé à Volodymyr Zelensky le « soutien indéfectible » et la pérennité  de l’aide militaire française. “Jusqu’à la victoire, jusqu’au retour de la paix en Europe, notre soutien à l’Ukraine ne faiblira pas”.

« Nous nous sommes accordés avec Emmanuel Macron pour accroître notre coopération afin de renforcer significativement notre défense aérienne et d’autres capacités de défense « , a déclaré Zelensky.

Tout cela relève d’une hypocrisie sans nom. L’Otan n’a jamais voulu la paix, ni Washington, bien évidemment, ni l’Europe, qui a fait le choix de son suicide économique en se couchant devant les États-Unis comme toujours.

Une erreur qui lui sera fatale.

Car non seulement les Russes vont gagner cette guerre, non seulement la paix se fera aux conditions de Poutine avec le dépeçage de l’Ukraine, mais la débâcle otanienne sera telle que ce sont l’Otan et l’UE qui finiront par se désintégrer, avec l’émergence du monde multipolaire que réclame la planète mais que l’Occident lui refuse.

Suivez la chaîne Telegram de Boris Karpov : https://t.me/boriskarpovblog

Une victoire russe qui va bouleverser le monde pour le restant de ce siècle. Poutine sera auréolé de sa victoire auprès des peuples émergents, car il est le seul leader capable de dire non à Washington. Tous les autres se couchent misérablement, quitte à sacrifier leur pays et leur peuple à la politique d Washington.

Après l’Ukraine, ce sera le tour de Taïwan. Est-ce que Macron va continuer à faire de nos soldats les harkis de l’armée américaine et agresser la Chine ? Il en est capable, tant sa soumission à Biden est sidérante.

Quand Macron a reçu Poutine à Versailles après son élection en 2017, j’ai cru à un fructueux rapprochement avec la Russie, ce grand pays qui a offert au monde tant de grands noms de la science, de la littérature et des arts.

Hélas, n’est pas de Gaulle qui veut. Le Général doit se retourner dans sa tombe, lui qui avait gagné le respect de tous les grands de ce monde.

Quelle décadence, en trente ans, de notre France millénaire, qui fut si riche et admirée, avant de s’autodétruire, en abandonnant sa souveraineté à l’UE et à l’Otan, des entités arrogantes et dominatrices, où les nations membres n’ont plus aucun droit, hormis celui de se soumettre aux diktats de Bruxelles et de Washington.

Jacques Guillemain

Il n’y aura pas de paix en Ukraine

Source : Le Courrier des Stratèges - par François Martin - Le 23/12/2022.

Beaucoup d'analystes parlent aujourd'hui de négociations de paix en Ukraine (entre russes et américains, car ce n'est pas entre russes et ukrainiens que les choses se décident), plus parce qu'ils projettent leurs propres souhaits que parce que cela ressort de l'examen des faits. En réalité, on peut penser qu'il n'y aura pas de paix, parce que les Russes n'ont rien à donner contre elle, et parce que les Américains n'y ont aucun intérêt.

La guerre finira-t-elle par une partition et une paix armée selon une ligne suivant la division linguistique (première langue parlée, russe ou ukrainien)?

Ouvertures pour une négociation? 

Ces temps-ci, les espoirs qu’il y ait bientôt un début de négociation entre les grands belligérants, russes et américains, ont commencé à s’exprimer. Il est vrai que Vladimir Poutine a fait quelques déclarations dans ce sens. Mais Lavrov s’est empressé de préciser que cela inclurait obligatoirement, outre le maintien des oblasts annexés dans la Fédération de Russie, l’application des principales revendications de Minsk, à savoir la dénazification et la démilitarisation du reste du territoire ukrainien.

De son côté, Zelensky, parlant évidemment sous le contrôle des USA, a bien ouvert la porte à des pourparlers, mais il a précisé que cela devrait se faire après que les troupes russes se soient retirées entièrement du territoire ukrainien…. Une proposition de négociation qui tient plus de la provocation que d’une ouverture réelle ! En même temps, sa récente visite à Washington s’est conclue par un nouveau prêt de 45 Milliards de USD, preuve s’il en est que ses commanditaires n’ont pas l’intention, pour le moment du moins, de lever le pied (1).

De part et d’autre, les « ouvertures » sont très timides, mais elles semblent exister et, se dit-on, c’est peut-être le début d’un processus encourageant.

 

Pourquoi les deux parties ne veulent pas vraiment négocier

Pourtant, à regarder de plus près, il n’en est rien. En effet, comme nous l’avons écrit précédemment (2), Zelensky est l’homme lige de plusieurs groupes, en Ukraine (oligarques), aux USA (lobby militaro-industriel, CIA, groupes privés impliqués dans le processus de guerre, personnel politique) et en Europe (instances de la Commission et du Parlement) qui gagnent énormément d’argent, officiellement ou non, avec cette guerre, et qui ont un intérêt direct à ce qu’elle dure le plus longtemps possible. A chaque mois supplémentaire, ce sont des milliards de USD détournés. On peut donc penser que Zelensky continuera à pousser les choses jusqu’à ce que le sort des armes ait définitivement réglé la question, et que l’Etat ukrainien s’effondre (3).

De son côté, Poutine ne peut arrêter la guerre avant d’avoir conquis, outre Marioupol qui lui donne le contrôle de la mer d’Azov, Kramatorsk pour contrôler le Donbass et Odessa pour verrouiller la mer Noire. Toute autre politique que celle-là, à supposer que le maintien dans l’Ukraine de ces deux villes soit l’objet d’un cessez-le-feu, promettra une nouvelle guerre dans un an ou deux, tout comme les accords de Minsk (Angela Merkel a rappelé ce que tout le monde savait) n’avaient été qu’une pause pour permettre au camp américano-ukrainien de reconstituer ses forces. S’il est cohérent (et on peut penser qu’il l’est !), Poutine ne peut pas faire autrement que d’aller jusqu’au bout. Et ce qui nous conforte encore dans cette hypothèse est son changement complet de stratégie en Octobre, après la prise de Liman. Jusque là, tout montre qu’il espérait parvenir à un accord « Minsk 3 ». Après cela, tout montre qu’il a décidé d’obtenir par la force ce qu’il n’a pas pu avoir par la négociation (4).

Si ses objectifs sont bien ceux-là, qu’y a-t-il donc, pour lui, à négocier ? Que pourrait-il donner « en échange » contre la paix ? Aujourd’hui, à part le fait de conquérir tout le pays, et de le rendre ensuite contre la paix, en gardant ce qui l’intéresse, on ne voit pas très bien ce qu’il pourrait faire. Et cette hypothèse elle-même paraît bien hasardeuse, puisque, nous le savons, les Russes se méfient comme de la peste du piège de la « vietnamisation », dans lequel, dès le début, les occidentaux ont tenté de les entraîner (5). C’est la raison pour laquelle ils sont entrés en lice avec un contingent de 150.000 soldats seulement, et qu’à part la « feinte » initiale des troupes autour de Kiev, pour le reste, ils se sont bien gardés de s’aventurer dans la partie du pays qui leur est culturellement hostile. Donc ils n’iront pas occuper durablement l’Ukraine de l’ouest, même pour s’en servir comme monnaie d’échange. Pour résumé, leur stratégie, c’est : « je prends ce que je veux, un point, c’est tout ». Pas grand chose à négocier avec cela…

Mais ce scénario convient parfaitement aux américains. En effet, pour eux, à partir du moment où le sort des armes aura scellé la guerre, et même si l’opération géopolitique (déstabiliser durablement les russes) n’a pas marché, il restera une formidable opération de prédation économique,  vis-à-vis de l’Ukraine et aussi vis-à-vis de l’Europe (6). Et si celle d’Ukraine, à un moment, s’arrête, par exemple parce qu’il n’y a plus d’armée ni de gouvernement, celle d’Europe n’a aucune raison de s’arrêter.

Sur ce plan, il est clair qu’une négociation de paix serait la pire des erreurs. Elle tendrait à diminuer le fossé entre l’Europe et la Russie, si opportunément créé et approfondi par cette guerre. Elle pourrait faire perdre aux USA les bénéfices de cette opération très bien préparée depuis 2014, et très réussie, nonobstant la résistance russe. Elle pourrait entraîner une baisse de la pression politique sur l’Europe, une pression telle que non seulement nous achetons maintenant aux USA, et sans doute pour des décennies, armes, énergie et matières premières, mais nous acceptons de nous couper des approvisionnements russes et d’y fermer nos entreprises, alors que les USA ne le font pas ! Clairement, pour nos « amis américains », il ne faut surtout pas que cette situation change. S’ils ne veillaient au grain, il se pourrait même que l’Allemagne demande à la Russie d’ouvrir le gazoduc de Nordstream 2 restant valide, et de réparer les autres. Quelle catastrophe cela serait pour les USA ! Tout serait à refaire. Entre l’est et l’ouest, le feu ne doit jamais s’éteindre. C’est la condition non plus de notre vassalisation, mais de notre esclavage.

 

Vers une situation à la chypriote? ? 

Pour cette raison, il leur est indispensable (en accord tacite avec les russes…) qu’une situation de « non-belligérance armée » ou de guerre froide perdure. Ce qu’il faut, c’est qu’un équilibre non guerrier s’établisse sans règlement juridique, comme c’est le cas à Chypre ou en Corée, ou encore, ne l’oublions pas, en Ossétie du sud, en Abkhazie ou en Transnistrie. Les russes sont parfaitement à l’aise avec ce type de configuration politico-géographique, et les américains n’y verront que des avantages. Ils pourront continuer à terroriser les petits européens pour bien longtemps, en leur répétant à l’envi :  « La guerre peut repartir à tout moment ! ». Et les européens répondront tous en choeur : « Oncle Sam, nous serons toujours avec toi ! ». C’est la configuration qui nous est promise pour 50 ou 100 ans, tant que le feu ukrainien restera allumé, même sous forme de braises.

Reste une question : Pourquoi Poutine répète-t-il qu’il veut négocier, alors qu’à l’évidence, il n’y a aucun intérêt ? Pour plusieurs raisons :

D’abord, il n’a pas de risque à le dire, puisqu’il sait qu’en face, personne ne saisira la perche. Ensuite, il cherche, depuis le début du conflit, à monter les opinions européennes contre leurs gouvernements. Il a intérêt à se montrer sous un bon jour, d’une part pour contrecarrer, autant que faire se peut, la propagande ultra-belliciste montée par l’occident contre lui, d’autre part pour inciter les opinions, excédées par l’effet retour des sanctions et leur appauvrissement programmé, à exiger des négociations. Plus l’opinion deviendra pacifiste (même s’il n’a visiblement pas de buts de guerre contre l’Europe), plus il divisera et affaiblira ses ennemis.

Si les choses se passent logiquement ainsi, américains et russes se mettront donc d’accord pour ne plus se faire la guerre, sans pour autant faire la paix. Et l’Europe dans tout cela, dira-t-on ? Il faudra des dirigeants d’un sacré caractère pour sortir du piège (6). Où que l’on regarde, il ne semble pas qu’on en voie poindre à l’horizon. Sur ce plan, ce serait plutôt le désert des Tartares… 

 

Références

(1)En réalité, toutes ces sommes n’iront pas à Kiev. Comme l’explique l’analyste Douglas Macgregor, voici comment cela se passe : une partie n’est pas destinée à l’aide directe, mais à financer la reconstitution, auprès des sous-traitants militaires du Ministère de la Défense, des stocks d’armes offerts à l’Ukraine et aujourd’hui cruellement manquants dans les arsenaux américains. Pour remercier de ces commandes, les fournisseurs d’armes « rincent » leurs prescripteurs, en l’occurrence les partis, Démocrate et Républicain. Lesquels, à leur tour, « rincent » les politiciens, Démocrates et « RINO » (Republicans In Name Only), qui sont bien restés « dans la ligne »… L’incitation à la propagande et à la désinformation, même de la part de militaires de haut rang, est donc forte. Sauf avec quelques franc-tireurs, peu de chance d’avoir la vérité.

(2) Zelensky, le meilleur ami de Poutine – par François Martin – L,e Courrier des Stratèges (lecourrierdesstrateges.fr)

(3)Il fait peu de doute qu’il en soit autrement, à court ou moyen terme : l’Ukraine a souffert jusqu’ici la perte de 100 à 150.000 hommes. Elle en est à la 9ème campagne de mobilisation, et enrôle aujourd’hui de force des jeunes entre 13 et 16 ans. Tout indique qu’elle est au bout de ses possibilités. En face, la Russie dispose d’une armée de 1,2 millions d’hommes, et peut théoriquement mobiliser jusqu’à 24 millions de soldats. A qui veut-on faire croire que l’Ukraine peut gagner ?

(4)L’énigme de Kherson n’en est pas une – par François Martin – Le Courrier des Stratèges (lecourrierdesstrateges.fr)

(5)Ukraine : Vietnamisation, mais pour qui ? par François Martin – Le Courrier des Stratèges (lecourrierdesstrateges.fr)

(6) Un des objectifs cachés de la guerre en Ukraine : le dépeçage et la ruine de l’Europe – Le Courrier des Stratèges (lecourrierdesstrateges.fr)

 

Existe-t-il des lignes rouges pour les États-Unis ?

Par Moon of Alabama – Le 2 janvier 2023 - The Saker francophone.

L’administration Biden s’est jusqu’à présent abstenue d’envoyer des missiles de plus longue portée en Ukraine. Elle craint une réaction russe sévère si elle changeait cette politique. Certains bellicistes n’apprécient pas cette raisonnable retenue.

Dans le New York Times d’aujourd’hui, un ancien diplomate britannique, qui travaille désormais pour un groupe de réflexion pro-guerre, plaide en faveur de la livraison d’armes à plus longue portée à l’Ukraine.

 

Poutine n’a pas de lignes rouges

« Quelles sont les lignes rouges de Poutine ? »

Cette question, posée avec une urgence croissante alors que la Russie perd sa guerre en Ukraine mais ne relâche pas ses agressions, est censée offrir une clarté analytique et orienter la politique. En réalité, c’est la mauvaise question, car la « ligne rouge » est une mauvaise métaphore. Les lignes rouges ne sont que des harengs rouges. Il existe de meilleures façons d’envisager une stratégie.

Selon l’auteur, les lignes rouges, qui consistent à menacer l’adversaire de conséquences lorsqu’il exécute un mouvement d’escalade spécifique, n’existent pas vraiment. Les lignes rouges sont mobiles, la réponse à une violation de ligne rouge a un coût pour celui qui a tracé la ligne et les lignes rouges invitent à la tromperie – dit l’auteur.

Après avoir consacré plusieurs centaines de mots à l’argument selon lequel les lignes rouges sont un concept inutile, l’auteur affirme que l' »Occident » devrait en tracer une grande :

Les préoccupations concernant les « lignes rouges » de la Russie sont motivées avant tout par la crainte que la Russie ne recoure à l’escalade nucléaire. L’Occident devrait éviter cela en dissuadant la Russie plutôt qu’en se retenant – ou en faisant pression sur l’Ukraine pour qu’elle se retienne aussi – de peur de la « provoquer« . Il peut le faire en communiquant la certitude de conséquences graves si la Russie utilisait des armes nucléaires.

Pour mémoire : La Russie n’a jamais menacé d’utiliser des armes nucléaires en Ukraine. C’est l’administration Biden qui prétend que la Russie l’a fait.

Communiquer que l' »Occident« , c’est-à-dire les États-Unis, exécutera une conséquence grave X si la Russie fait Y, c’est tracer une grosse ligne bien rouge.

Alors quel est l’objectif de cette ligne rouge ?

La Russie n’a pas de ligne rouge : Elle ne dispose, à chaque instant, que d’un éventail d’options et de perceptions de ses risques et avantages relatifs. L’Occident devrait continuellement chercher, par le biais de sa diplomatie, à façonner ces perceptions afin que la Russie choisisse les options que l’Occident préfère.

L’Amérique l’a déjà fait. Pendant la crise des missiles de Cuba, la confrontation nucléaire la plus dangereuse à ce jour, la position de l’Union soviétique a changé en quelques jours, pour finalement accepter une issue favorable à l’Occident.

L’ancien diplomate britannique manque manifestement d’une éducation décente en histoire. Les missiles soviétiques installés à Cuba l’ont été parce que les États-Unis avaient installé des missiles Juniper de moyenne portée à capacité nucléaire en Turquie et en Grèce. Ces missiles menaçaient Moscou. Les États-Unis avaient donc franchi une ligne rouge soviétique. L’installation de missiles à Cuba étaient une contre-mesure au fait que les États-Unis en avaient installé en Turquie. Lorsque l’administration Kennedy a reconnu ce fait, elle a négocié le retrait de ses missiles en Turquie et en Grèce en échange du retrait des missiles soviétiques à Cuba.

Ce sont les Soviétiques qui ont gagné ce round de la guerre froide, pas les États-Unis.

Comme il ne connaît pas l’histoire de la crise de Cuba, l’auteur en tire des conclusions erronées :

Si la Russie est plus investie dans la subordination de l’Ukraine qu’elle ne l’était dans le déploiement de missiles à Cuba, la logique est la même. En 1962, l’Amérique a persuadé le dirigeant soviétique, Nikita Khrouchtchev, que le retrait des armes nucléaires de Cuba était, aussi désagréable soit-il, un meilleur choix que leur déploiement. De même, l’Occident devrait maintenant chercher à persuader M. Poutine que le retrait de ses forces d’Ukraine est moins périlleux que de combattre.

Selon l’auteur, pour convaincre la Russie de battre en retraite, l’« Occident » ne devrait pas se contenter de livrer des armes à l’Ukraine. Il devrait renforcer les sanctions contre la Russie pour en augmenter les coûts. Il devrait faire savoir qu’un retrait de l’Ukraine signifierait qu’il n’y aurait pas de changement de régime à Moscou. (Même si c’est en fait la finalité évidente des États-Unis).

Poursuivies avec fermeté et détermination, ces « opérations de mise en forme » diplomatiques à l’appui de la campagne militaire ukrainienne peuvent faire en sorte que l’option la moins mauvaise de la Russie s’aligne sur ce que souhaite l’Occident, beaucoup plus puissant. Une telle stratégie est le contraire de l’acceptation de lignes rouges.

Poutine […] ne devrait pas être autorisé à définir les limites de la politique occidentale. cette stratégie nécessite une réflexion rigoureuse, pas des métaphores paresseuses.

Une métaphore paresseuse revient à s’opposer aux lignes rouges tout en en traçant de nouvelles. Une métaphore paresseuse, c’est réinventer l’histoire pour en tirer la conclusion voulue mais erronée. Cet éditorial n’est pas une pensée rigoureuse mais un charabia confus.

Dès qu’il deviendra évident pour tout le monde que l’Ukraine est en train de perdre la guerre, l’administration Biden livrera probablement davantage d’armes à longue portée à l’Ukraine en lui conseillant de les utiliser contre la Russie. La Russie répondra à cela. Très probablement pas en Ukraine, mais dans un endroit et à un moment où cela fera beaucoup plus mal aux États-Unis que tout ce qui peut leur être fait en Ukraine.

Moon of Alabama

Traduit par Wayan, relu par Hervé, pour le Saker Francophone

La stratégie militaire de l’Ukraine et les intérêts nationaux des États-Unis


Par Leonid Savin − Le 18 novembre 2022 − Source Oriental Review

Les actions actuelles des FAU en direction de Kherson et le retrait forcé de l’armée russe [le 9 octobre dernier, NdT] ont inspiré un optimisme malsain à la fois à la junte de Kiev et à ses mécènes occidentaux. Il est largement admis, avec des références à divers responsables politiques et militaires occidentaux, que Kherson n’est pas un centre stratégiquement important à partir duquel il est possible de contrôler la Crimée (et de la frapper), mais un important stimulant psychologique et moral pour les Ukrainiens. Une nouvelle avancée permettra aux Ukrainiens de prendre le contrôle du canal de Crimée du Nord, c’est-à-dire de couper l’approvisionnement en eau de la Crimée. Et, en outre, Kiev renforcera sa position pour les négociations avec la Russie. Si les questions de réparations ont déjà commencé à être soulevées, les nouveaux succès peuvent encourager Zelensky à imposer les conditions les plus invraisemblables.

 

Dans le même temps, il est évident que l’Occident ne va pas réduire son aide à l’Ukraine. Il est peu probable que les résultats des élections au Congrès américain [8 novembre dernier, NdT] modifient l’attitude générale de Washington à l’égard du conflit actuel. L’UE ne montre pas non plus de signes de changement de politique jusqu’à présent.

Dans le même temps, si nous retraçons la manière dont l’Occident a agi depuis le début de l’opération militaire spéciale en février, nous découvrirons qu’il adapte ses approches, ce qui crée de nouveaux risques pour les intérêts vitaux de la Russie.

En mai 2022, le colonel à la retraite du corps des Marines américains Andrew Milburn a souligné que « la fourniture d’une aide militaire à l’Ukraine ne semble pas être alignée sur les besoins du champ de bataille… L’aide militaire devrait être axée sur les besoins réels – et c’est ici que la politique américaine s’effondre. Le besoin de tirs de précision à longue portée en est un exemple… Il n’y a pas eu de discussion sérieuse sur la fourniture aux Ukrainiens du système de roquettes à lancement multiple ou de drones de frappe à longue portée… Les hélicoptères ukrainiens ont réussi à passer à travers le gant des systèmes de défense aérienne russes [L’auteur parle de Marioupol, NdT], mais le risque de perdre des équipages rend cette méthode de réapprovisionnement prohibitive. Il aurait été relativement simple d’inonder l’air de leurres tels que des drones commerciaux bon marché, comme les différents modèles fabriqués par DJI, submergeant les défenses aériennes russes, tandis qu’une poignée de drones logistiques livraient les fournitures vitales qui auraient permis à la garnison de se battre indéfiniment ».

Au cours des derniers mois, le commandement militaire et politique américain a partiellement corrigé cette erreur, et nous avons vu l’émergence de nouveaux systèmes d’armes utilisés par la partie ukrainienne. Sans parler des volumes importants de systèmes antichars et antiaériens compacts qui sont arrivés et continuent d’arriver en Ukraine.

Il existe un autre risque, à savoir la menace pour la vie des civils. Après la provocation de l’armée ukrainienne avec le soutien de spécialistes occidentaux à Boucha, où des partisans de la réunification avec la Russie ont été tués et qui a été présentée comme des crimes de guerre de l’armée russe, ce scénario pourrait se répéter à Kherson.

Le fait est que, dès le début de l’opération, l’Ukraine a misé sur la « guérilla » afin de paralyser la logistique et les arrières de l’armée russe. Mais pas seulement. Cette stratégie passe aussi par l’identification des individus qui coopèrent avec l’administration russe.

La stratégie militaire de l’Ukraine

Comme l’écrit Jean-Franus Rattel (Université d’Ottawa), qui a fait des recherches sur cette question, « plutôt que d’affronter directement les forces russes, l’insurrection s’est principalement attachée à cibler les collaborateurs – en particulier dans le sud de l’Ukraine – et à perturber la logistique militaire russe dans l’espoir de rendre l’occupation difficile à maintenir à long terme. Les tentatives d’assassinat contre les administrateurs pro-russes et leurs collaborateurs ont été la principale tactique de l’insurrection, visant à répandre la peur et à décourager le recrutement. Parmi les 55 épisodes d’activité insurrectionnelle documentés entre le 24 février et le 2 novembre, plus de la moitié (31) concernent des tentatives d’assassinat contre des fonctionnaires sur le territoire occupé par la Russie, faisant 12 morts et 12 blessés. Le rythme des tentatives s’est rapidement accéléré tout au long de l’été, soulignant le rôle de l’insurrection et l’absence d’une contre-insurrection russe efficace. Les méthodes utilisées ont inclus des engins explosifs improvisés, des voitures piégées, des fusillades et même des agents neurotoxiques. Des listes de collaborateurs présumés ont circulé sur Internet, sans doute pour décourager les responsables pro-russes de rester en poste ».

L’auteur note les activités de propagande des cellules nazies ukrainiennes, l’émergence de groupes tels que l’« Armée des partisans de Berdyansk » et le Mouvement de résistance « Ukraine libre », qui sont très actifs sur Internet et ont publié des vidéos menaçant l’armée russe et tous ceux qui les soutiennent.

Les attaques sur le territoire russe entrent également dans ce cadre. Les insurgés ukrainiens et leurs complices en Russie ont activement saboté des voies ferrées et des lignes électriques dans les régions de Koursk et de Belgorod. Ils pourraient également avoir été impliqués dans des incidents impliquant des bases de carburant et d’armes sur le territoire russe. Selon le New York Times, les insurgés ukrainiens parviennent à traverser régulièrement les lignes ennemies et à entrer en contact avec les forces armées ukrainiennes. Ces informations sont difficiles à prouver ou à réfuter, mais les faits confirment l’activité de certaines forces, qui peuvent être qualifiées d’activité terroriste.

Jean-François Rattel conclut que « les quelques cas de confrontation directe avec les forces armées russes (par opposition aux assassinats ciblés) suggèrent une approche soigneusement exécutée visant à épuiser les forces d’occupation en se concentrant sur les collaborateurs et leurs institutions. Les assassinats ciblés sont un symbole puissant et nécessitent moins de ressources et moins de coordination entre les partisans et les forces régulières. Dans le même temps, le succès de l’insurrection à cibler les dépôts d’armes et les lignes d’approvisionnement russes souligne son rôle plus large dans les efforts militaires ukrainiens ». Par conséquent, ces techniques comportementales continueront d’être employées à court terme.

Enfin, il est risqué de modifier les orientations stratégiques des FAU sur le théâtre d’opérations. Outre le corridor terrestre vers la Crimée, les activités navales peuvent être activées et portées à un autre niveau.

Daniel Fiott, qui dirige le programme de défense et d’administration publique au Centre pour la sécurité, la diplomatie et la stratégie de l’École de gouvernement de Bruxelles, note que « l’Ukraine a fait preuve d’un haut degré de pragmatisme et d’ingéniosité sur le champ de bataille et a utilisé des drones et des missiles antinavires de fortune pour tenir la marine russe à distance. L’attaque du pont de Kertch est un exemple des limites que les forces ukrainiennes sont prêtes à franchir, même sans capacités navales.

En fonction de la mesure dans laquelle l’Ukraine repousse les forces russes, l’Occident devrait reconsidérer ses livraisons d’armes navales à Kiev. Cela pourrait commencer par un afflux plus important de missiles antinavires tels que le Harpoon, mais cela peut également signifier former les forces armées ukrainiennes à l’utilisation de micro-torpilles à partir des stocks croissants de navires de patrouille qu’elles sont susceptibles de recevoir à l’avenir. Aujourd’hui, on ne cesse de réclamer davantage de drones, d’avions de chasse et de chars, mais il est nécessaire d’envisager sérieusement la dimension navale, car les patrouilleurs ne suffiront pas à modifier l’équilibre naval face à la Russie ».

Non seulement Fiott confirme le rôle de l’Ukraine dans l’organisation des attaques, mais il se livre également à une incitation claire à l’octroi d’une aide militaire supplémentaire, en quantité et en qualité telles qu’elle puisse modifier l’équilibre actuel des forces en mer Noire.

2nd partie

Toutefois, si l’on se tourne vers les États-Unis, dont dépendent largement à la fois la capacité de combat de l’armée ukrainienne et les décisions politiques de Kiev, on peut se demander : pourquoi font-ils cela ? On peut avoir l’impression que cette position des États-Unis est dans leur intérêt national – pour continuer à arroser l’Ukraine d’armes, retardant ainsi une opération militaire spéciale de la part de la Russie et affaiblissant Moscou. À cela s’ajoutent les tentatives continues d’isoler la Russie sur la scène internationale (la plupart du temps sans succès) et les campagnes d’information constantes dans les médias occidentaux.

Cependant, il existe des désaccords au sein de l’establishment américain quant à la position exacte de Washington sur l’Ukraine. Cela est confirmé par des visions différentes de la résolution du conflit de la part du ministère américain de la défense (qui souhaiterait voir les deux parties à la table des négociations le plus rapidement possible) et de l’administration de la Maison Blanche, qui continue de plier sa ligne sur le retrait total des troupes russes du « territoire ukrainien ». C’est l’administration de Joe Biden qui fait de la situation elle-même une impasse, car après les référendums et l’incorporation à la Russie de quatre régions en 2022, qui étaient auparavant des régions d’Ukraine, il y a une compréhension différente de ce territoire. En tant que perdant, Kiev tente de se venger par la force militaire, mais du point de vue de la souveraineté de la Russie et de l’inaliénabilité de ses régions, cela est considéré comme un empiétement qui doit être réprimé par tous les moyens disponibles (y compris, incidemment, les armes nucléaires, c’est pourquoi cette question a été soulevée avec tant d’obstination par les politiciens et les médias occidentaux). Par conséquent, toute contre-attaque temporaire de l’Ukraine ne fera que prolonger le conflit actuel, entraîner des pertes inutiles et aggraver globalement la situation, principalement en Europe.

Biden and Ukraine

Le président Joe Biden, le secrétaire à la Défense Lloyd Austin, à droite, et le secrétaire d’État Antony Blinken, troisième à partir de la droite, participent à une réunion avec le ministre ukrainien des Affaires étrangères Dmytro Kuleba et le ministre ukrainien de la Défense Oleksii Reznikov, le 26 mars 2022, à Varsovie, en Pologne.

Cela soulève la question de savoir si les États-Unis ont la bonne compréhension de leurs intérêts nationaux. Bien sûr, pour parler des intérêts nationaux de ce pays, il vaut mieux passer la parole à son représentant.

Joshua Shifrinson, dans The National Interest, explique de manière assez détaillée la mauvaise compréhension de ce qui se passe de la part des décideurs des ministères américains concernés.

Pour résumer son article, il y a deux camps à Washington, dont l’un craint les succès de la Russie en Ukraine, de sorte que des mesures sont nécessaires pour limiter les capacités de la Russie. Cela se cache derrière des déclarations abstraites et sans fondement sur les menaces qui pèsent sur les autres voisins. A cela s’ajoutent les inquiétudes quant à l’agrandissement potentiel d’autres acteurs, notamment la Chine, qui pourrait profiter de la situation pour envahir Taïwan.

Le deuxième camp évoque un contexte plus large, comme le secrétaire d’État Anthony Blinken, qui a déclaré que « l’ordre international fondé sur des règles qui est essentiel au maintien de la paix et de la sécurité est mis à l’épreuve par l’invasion non provoquée et injustifiée de l’Ukraine par la Russie ».

Cette division n’est pas accidentelle et reflète la position de l’école du réalisme et de l’école du libéralisme dans les relations internationales. En réalité, cependant, les deux camps déforment ces théories, comme le confirme Shifrinson.

La vérité est qu’aucun des intérêts américains avoués en Ukraine ne résiste à l’examen. Plus important encore, croire qu’il s’agit d’intérêts américains contredit les principes fondamentaux de la grande stratégie américaine établie de longue date ; élaborer une politique fondée sur de telles préoccupations risque de créer de nouveaux dilemmes stratégiques pour les États-Unis, l’Ukraine et la Russie, d’une manière qui ne peut qu’aggraver les conséquences du conflit actuel.

Americas interest in Ukraine war

En effet, pourquoi la Russie attaquerait-elle d’autres voisins, en particulier les pays de l’OTAN, si cela devait provoquer une réaction violente ? En outre, les États-Unis n’ont jamais vraiment protégé les démocraties des autres pays. Washington a autorisé les coups d’État militaires au Pakistan et soutenu les dictatures et les dirigeants autoritaires partout et à tout moment, tant qu’ils étaient alliés des États-Unis. L’action militaire saoudienne au Yémen, pour une raison quelconque, n’a pas attiré autant d’attention que l’opération militaire russe en Ukraine, même si le conflit au Yémen a conduit à une catastrophe humanitaire.

Et où sont les preuves que la Russie détruit réellement l’ordre international existant ? Si la Russie a été contrainte de passer aux monnaies nationales, c’est parce que les États-Unis et l’UE ont bloqué l’utilisation de SWIFT pour les règlements bancaires. Si la Russie réoriente ses accords commerciaux vers d’autres pays, c’est parce que les pays occidentaux se sont révélés des partenaires peu fiables et ont bloqué (en fait, volé) les réserves d’or et de devises étrangères de la Russie ainsi que d’autres actifs.

On a l’impression que sous les accusations de destruction de l’« ordre international libéral », il y a une sorte de réaction défensive des États-Unis et des tentatives de rejeter sur les autres la responsabilité du dysfonctionnement de ce système, qui est en train de s’effondrer. Ce n’est pas la faute de la Russie si l’unipolarité est remplacée par la multipolarité pour un certain nombre de raisons objectives. Bien que la Russie soit désormais contrainte de promouvoir activement la construction de cette multipolarité afin de protéger ses intérêts et sa souveraineté. Mais d’autres pays avancent également pas à pas vers un système mondial multipolaire, ce qui démontre l’objectivité de cette tendance. Non seulement les détracteurs des États-Unis, mais même leurs alliés, comme l’UE, ont le désir de changer le statu quo, qui devient de plus en plus pesant en raison de la dépendance à l’égard de Washington. Ce n’est pas un hasard si l’Italie a suspendu ses livraisons d’armes à l’Ukraine. Peut-être d’autres membres du Commonwealth suivront-ils cet exemple. Enfin, le projet d’autonomie stratégique de l’UE lui-même suggère des plans pour un retrait progressif de l’esclavage transatlantique. Plus tôt ce sera le cas, mieux ce sera pour l’Europe elle-même.

Quant aux États-Unis, ils devraient envisager un rôle plus limité dans l’histoire du monde et assumer la responsabilité d’actions plus modestes.

Leonid Savin

Traduit par Hervé, relu par Wayan, pour le Saker Francophone

La Pologne souhaite-t-elle l’entrée de l’OTAN dans le conflit ukrainien ?

Source : RzO International.
par Germán Gorraiz López - Le 28/12/2022.

Selon le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), quelque 1,5 million d’Ukrainiens ont été accueillis de manière permanente en Pologne, lui assurant la main-d’œuvre dont elle a besoin pour pallier son déficit démographique et la fuite de la main-d’œuvre non qualifiée vers le Royaume-Uni, l’Allemagne et la Norvège.

La Pologne cherche à devenir un acteur local dans le nid de frelons de l’Europe de l’Est et à étendre son influence dans la zone ukrainienne en revendiquant son droit d’incorporer la région ukrainienne de Lviv, qui a été occupée par la Pologne de 1918 à 1939, dans la carte polonaise. Selon Sergueï Narychkine, le directeur du Service des renseignements extérieurs russe (SVR), « les dirigeants polonais ont l’intention d’organiser des référendums dans l’ouest de l’Ukraine afin d’obtenir, avec l’accord des autorités polonaises, l’annexion des terres ukrainiennes occidentales – Lviv, Ivano-Frankivsk et la majeure partie de la région de Ternopil » ce que le média polonais, Rzeczpospolita, s’est empressé de démentir. Cependant, une telle opération aurait la bénédiction de Volodymyr Zelensky, du Royaume-Uni et des États baltes et aurait pour objectif machiavélique d’installer des missiles Patriot dans ces territoires et de forcer l’Otan à intervenir dans le conflit ukrainien.

Ainsi, après qu’une roquette antiaérienne ukrainienne, n’ayant pas réussi à intercepter un missile russe, soit tombée sur le territoire polonais, la Pologne a demandé à l’Allemagne des missiles Patriot américains capables d’abattre des missiles russes à des centaines de kilomètres, alors que Varsovie dispose déjà de tels missiles sur sa base aérienne de Rzeszow.

L’objectif de la Pologne est de pouvoir utiliser personnellement les missiles Patriot pour intercepter les missiles russes et provoquer une extension du conflit avec l’entrée de l’OTAN dans le nid de frelons ukrainien dans l’espoir que Moscou interprète l’interception par la Pologne d’un missile russe sur le territoire ukrainien comme une déclaration de guerre.

Cependant, Vladimir Poutine cherche à conclure un accord de paix qui établirait que l’Ukraine n’adhérera pas à l’OTAN et que le différend ukrainien sera réglé en divisant l’Ukraine en deux moitiés, l’est du pays (y compris la Crimée et la mer d’Azov) étant placé dans l’orbite de la Russie tandis que le centre et l’ouest de l’Ukraine actuelle navigueront dans le sillage de l’UE, le président russe obtenant le contrôle total de la mer d’Azov tandis que l’Ukraine contrôlerait la mer Noire.

Quant à Joe Biden, la perte du contrôle du Congrès par les démocrates après les élections de mi-mandat en novembre signifiera que les républicains examineront de près les futures aides en armement à l’Ukraine et suivront de près ces armes pour éviter qu’elles n’entrent sur le marché noir.

D’autre part, Joe Biden pense déjà à se présenter comme candidat démocrate aux élections présidentielles de 2024 et concentrera, donc, son intérêt sur la politique intérieure, la réduction de l’inflation galopante et la prévention de la récession de l’économie américaine en 2023. Cela pourrait faciliter une prochaine rencontre personnelle entre Joe Biden et Vladimir Poutine qui mènerait à un accord de paix entre l’Ukraine et la Russie en 2023, un projet qui tentera d’être torpillé par les services secrets britanniques et par la Pologne pour impliquer l’OTAN dans le conflit ukrainien.

source : Observateur Continental

Guerre en Ukraine : Entretien avec Caroline Galactéros, présidente de Géopragma

Docteur en science politique, présidente de Géopragma, Caroline Galactéros parle de la guerre en Ukraine, de la politique occidentale, de Poutine et de la Russie et des Etats-Unis.

...entretien du Dr. Michael Vlahos avec le Col. Douglas Macgregor :

1° partie - Le 09/12/2022.

Is the war in Ukraine entering its decisive phase ?

Ces vidéos sont en version originale.

Pour les non-anglophone, utilisez la traduction automatique en activant les sous-titres puis dans "paramètres, selectionner "traduire" dans la langue de votre choix....

Ce n'est pas parfait mais permet de comprendre aisément.

JMR

2° Partie - Le 09/12/2022.

Why NATO strategic failure ? A war of deceit, denial

3) Partie - Le 10/12/2022

What is to be done? Can a corrupted US military be renewed ?

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