Hommages au Lieutenant-Colonel Arnaud Beltrame


Arnaud BELTRAME, le visage du devoir.

..par le Gal. Vincent Desportes - le 27/03/2018.

LIBRE OPINION du général (2s) Vincent DESPORTES : Arnaud BELTRAME, le visage du devoir.

Arnaud Beltrame est aujourd’hui l’incarnation du courage, celle des valeurs militaires où l’honneur, l’abnégation, l’obsession du succès de la mission tiennent une place centrale à côté du principe d’humanité. D’autres les partagent bien sûr, mais l’armée les cultive, en sculpte les caractères de ses soldats afin qu’ils aient la force d’aller, si la Nation le leur demande, au bout de leur engagement dussent-ils, pour cela, donner leur vie.

D’autres gendarmes, d’autres marins, d’autres aviateurs, d’autres soldats, innombrables, sont allés et vont encore, chaque jour, au bout des risques qu’implique leur devoir. D’autres demain se lèveront, quels que soient les dangers, pour que la France demeure libre de l’ennemi et de l’insécurité : c’est la condition même de l’existence de notre patrie. Certains, trop rares, marquent durablement les souvenirs. Ainsi, le général de gendarmerie Guy Delfosse qui, le 27 mars 1984, « donne un magnifique exemple d’abnégation en accomplissant jusqu’au sacrifice suprême son devoir de citoyen et de militaire de la gendarmerie » : il  refuse de se plier aux injonctions de deux terroristes de la branche lyonnaise d’Action directe qui l’abattent froidement. Ou encore la section d’infanterie qui, le 27 mai 1995, baïonnette au canon, sous le feu ennemi, part à l’assaut du pont de Vrbanja sous les ordres du lieutenant Heluin et de notre actuel chef d’état-major des armées, le général François Lecointre. Parmi d’autres, ces héros sont les jalons du roman français, les incarnations du courage et de l’honneur.

Aujourd’hui, sans que les citoyens français en aient une claire conscience, au Sahel, au Levant, ailleurs dans le monde, des soldats français presque anonymes sont grièvement blessés et meurent dans l’exécution de leurs missions au service de la France. Noyés dans l’écume des jours, vite oubliés, leur courage et leur sacrifice disparaissent presque instantanément dans le brouhaha médiatique qui ne retient, un instant que les images des drapeaux tricolores drapant les cercueils alignés de la cour d’honneur des Invalides. Arnaud Beltrame, dont chacun se souviendra, les représente tous, ceux d’hier, ceux d’aujourd’hui et ceux de demain : il a, par son courage, donné un visage à la vertu militaire, celle envers laquelle George Clémenceau rappelait que la nation avait un devoir. Arnaud Beltrame, les soldats de France te remercient : tu es désormais leur visage.

Car il s’agit bien non d’un coup de tête mais de courage, le vrai, c’est-à-dire d’une décision prise en toute connaissance du danger parce qu’elle correspond au devoir et à l’honneur. Issu de l’artillerie, major de sa promotion d’élèves-officiers à Coëtquidan puis de sa promotion à l’école des officiers de la gendarmerie, Arnaud Beltrame est un officier brillant, accompli : tout le prouve dans sa carrière. C’est un homme des chemins de crêtes et des choix difficiles : il progresse à force d’engagement et de volonté, devient chuteur opérationnel au sein de l’escadron parachutiste du GIGN, est engagé en zone de combat en Irak ce qui lui vaudra la croix de la valeur militaire ...

Sa décision rapide en ces dramatiques instants du 23 mars  reflète parfaitement le sens de la mission et le rapport très particulier que le militaire entretient avec la mort. Il l’accepte une fois pour toute : lorsqu’il s’engage, il donne sa vie à la nation. Point. C’est bien là la grandeur de ce métier : je donne ma vie et je ne choisis plus les missions que l’on me donnera. Je les accepte, j’irai jusqu’au bout, quel que soit leur danger, sans esprit de recul, parce que je sers. Le militaire est au service de la France, au service des Français, jusqu’au sacrifice suprême si le devoir et l’honneur l’exigent. Arnaud Beltrame est mort pour la patrie : il est un héros qui servira de guide demain aux générations de jeunes Français qui jugeront, comme lui, que la France et sa liberté sont une cause qui mérite que l’on meure pour elle.

Les Français se souviennent davantage des noms de frères Kouachi, les terroristes de Chalie Hebdo, ou de Salah Abdeslam, l’un des cerveaux de l’attentat du Bataclan que de ceux des membres des forces de police et de gendarmerie qui ont risqué leur vie lors des assaut donnés pour mettre un terme à ces barbaries. Désormais, ils sauront mettre un visage et un nom derrière tout ce courage, ce sens de l’honneur et du devoir qui assure leur sécurité : celui d’Arnaud Beltrame.

Le 1er juin 1995 à Vannes, lors de la cérémonie en l’honneur des deux marsouins morts dans l’assaut de Vrbanja le président Chirac déclare : « les marsouins Amaru et Humblot sont morts pour une certaine idée de la France, une France qui refuse de s’abandonner à la fatalité et à l’irresponsabilité. » C’est pour la même idée de la France qu’Arnaud Beltrame a donné, le 23 mars, sa vie à la France.

 

Général Vincent DESPORTES 
(Le Monde)

 

COMMUNIQUÉ de l'ASAF - le 26/03/2018.

Le lieutenant-colonel Arnaud BELTRAME ou l’honneur de la France

COMMUNIQUÉ de l'ASAF : Le lieutenant-colonel Arnaud BELTRAME ou l’honneur de la France .

L’ASAF rend hommage au lieutenant-colonel Arnaud BELTRAME pour le magnifique exemple qu’il a donné à tous les Français. Il est pour tous un héros d’aujourd’hui autour duquel la Nation doit se rassembler et qui permet à chaque citoyen de renforcer son sentiment d’appartenir à une communauté nationale unie, forte et confiante.

D’un courage exemplaire et d’une générosité débordante, éclairé par un haut idéal de vie, cet officier avait un sens élevé de sa mission qui l’a conduit à échanger sa place contre celle d’un otage en toute connaissance des risques qu’il prenait.

Par son acceptation du sacrifice, c’est un message de résistance, de détermination et de combat qu’il envoie à nos ennemis : « Nous, Français, sommes des hommes libres. Nous aimons la vie mais ne craignons pas la mort. Nous sommes les héritiers, des Gaulois et des Francs, des Grognards et des Poilus. Nous allons nous battre et vaincre. »

Dans cette lutte à mort qui est engagée et à l’image de cet officier de Gendarmerie exceptionnel au comportement exemplaire, il est du devoir des responsables politiques de faire preuve du même courage, vertu indispensable pour mener victorieusement le combat.

Cette guerre contre le totalitarisme islamique qui ronge notre pays et fragilise sa cohésion est d’un type nouveau. Elle ne peut pas être gagnée avec les seuls moyens du temps de paix. Il faut la mener avec une rigueur sans faille : recherche offensive du renseignement, capture, neutralisation ou destruction de l’adversaire en cas de résistance.

Les Français sont toujours en quête de l’homme providentiel qui saura restaurer la grandeur de la France et la conduire vers l’excellence pour leur permettre recouvrer leur fierté et leur confiance en la France.

Mais Arnaud BELTRAME n’est-il pas cet homme, lui  dont le profil n’est en rien celui d’un politicien agile, d’un expert en économie, d’un intellectuel médiatisé ou d’un citoyen richissime ? Il a le visage d’un officier, d’un soldat qui aime passionnément sa Patrie et qui est prêt à donner sa vie pour elle et pour protéger ses concitoyens.

 

Chez lui, pas de discours fumeux, de phrases alambiquées ou de propos courtisans.
C’est un homme qui s’exprime par des actes clairs et décisifs.

Il est de ces êtres d’une autre trempe, de ces hommes et ces femmes d’élite qui suivent une règle remontant à l’Antiquité :

« Crois que la pire des choses est de préférer la vie à l’honneur et pour garder la vie, de perdre les raisons de vivre. »

La Rédaction

 

Source : https://www.asafrance.fr/item/communique-asaf.html

 

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Le sens d’un engagement - le 25/03/2018.

Apprenant l’épilogue de l’attaque de Trèbes par un fanatique musulman, nous reste, sans préjuger des mérites des autres protagonistes de cette tragédie, l’image magnifique d’un officier qui prend la place d’une femme otage.

Tout d’un coup, la réalité nous saute aux yeux dans tout ce qu’elle comporte de plus concret. Probablement parti remplir ses fonctions comme un vendredi ordinaire, un homme a été capable de réaliser à la perfection ce pourquoi il avait engagé sa vie et remplir sa mission en plénitude. Nous ignorons bien des détails et des circonstances exactes de son geste, mais la leçon est là.

Nous voilà tout d’abord rassurés. Il reste, en ces temps troublés de « déconstruction » et de mercantilisme étouffant, des hommes capables du meilleur. Tout sacrifier pour le premier venu et prêt à tout pour un idéal qui ne s’achète pas, qui ne se marchande pas et qui nous dépasse infiniment, ce n’est plus très courant. Préférer l’être à l’avoir, préférer la vertu à la médiocrité, tout perdre en un instant pour l’honneur, pour la gloire.

En sommes-nous encore capables ?

Alors qu’un quotidien fait sa une sur le sexisme imaginaire et la misogynie délirante qui seraient en cours parmi les officiers français jeunes et moins jeunes, il semble désormais que plus un seul de ses arguments ne soit recevable. Se substituant à la place d’une femme prise en otage, un officier supérieur prend en défaut et réduit à néant les calomnies de tous ces accusateurs antimilitaristes et autres féministes contrariées, à la une du matin. Préférer la galanterie à la goujaterie, choisir la place la moins confortable au risque de sa vie, par courtoisie, par éducation, ce n’est pas banal.

Y sommes-nous toujours prêts ?

Nous vient évidemment à l’esprit l’image de ce frère franciscain conventuel polonais qui s’offre de mourir à la place d’un père de famille, dans un camp de concentration, en 1941. Le martyr de saint Maximilien Kolbe trouve, ici, un écho huit décennies plus tard.

Et puisque l’éducation consiste avant tout à être à la perfection le personnage que l’on rêve de susciter, ce lieutenant-colonel aura certainement fait plus aujourd’hui pour la jeunesse du pays que tous les ministres de l’Éducation nationale réunis, fussent-ils efficaces. Qu’il en soit félicité !

Et alors qu’à peine terminant ces lignes parviennent les premières nouvelles de la gravité des blessures qui sont les siennes, le héros de cet assaut n’en retire que plus de mérite encore. Son courage nous oblige et nous réconforte.

Remerciements, compassion et fierté… merci, mon colonel !


Texte adressé par un correspondant de Christian ROGER
jumboroger.fr

Source : https://www.asafrance.fr/item/deces-du-lieutenant-colonel-arnaud-beltrame-le-sens-d-un-engagement.html


....par le Père Jean-Baptiste, Chanoine de l’abbaye de Lagrasse - le 25/03/2018.

TÉMOIGNAGE personnel sur Arnaud BELTRAME : La dimension spirituelle de son sacrifice.

C'est au hasard d'une rencontre lors d'une visite de notre abbaye, monument historique, que je fais connaissance avec le lieutenant-colonel Arnaud Beltrame et Marielle, avec laquelle il vient de se marier civilement le 27 août 2016. Nous sympathisons très vite et ils m'ont demandé de les préparer au mariage religieux que je devais célébrer près de Vannes le 9 juin prochain. Nous avons donc passé de nombreuses heures à travailler les fondamentaux de la vie conjugale depuis près de 2 ans. Je venais de bénir leur maison le 16 décembre et nous finalisions leur dossier canonique de mariage. La très belle déclaration d'intention d'Arnaud m'est parvenue 4 jours avant sa mort héroïque.

Ce jeune couple venait régulièrement à l'abbaye participer aux messes, offices et aux enseignements, en particulier à un groupe de foyers Notre-Dame de Cana. Ils faisaient partie de l'équipe de Narbonne. Ils sont venus encore dimanche dernier.

Intelligent, sportif, volubile et entraînant, Arnaud parlait volontiers de sa conversion. 
Né dans une famille peu pratiquante, il a vécu une authentique conversion vers 2008, à près de 33 ans. Il reçoit la première communion et la confirmation après 2 ans de catéchuménat, en 2010.

Après un pèlerinage à Sainte-Anne-d'Auray en 2015, où il demande à la Vierge Marie de rencontrer la femme de sa vie, il se lie avec Marielle, dont la foi est profonde et discrète. Les fiançailles sont célébrées à l'abbaye bretonne de Timadeuc à Pâques 2016.
Passionné par la gendarmerie, il nourrit depuis toujours une passion pour la France, sa grandeur, son Histoire, ses racines chrétiennes qu'il a redécouvertes avec sa conversion.

En se livrant à la place d'otages, il est probablement animé avec passion de son héroïsme d'officier, car pour lui, être gendarme voulait dire protéger. Mais il sait le risque inouï qu'il prend.

Il sait aussi la promesse de mariage religieux qu'il a fait à Marielle qui est déjà civilement son épouse et qu'il aime tendrement, j'en suis témoin. Alors ? Avait-il le droit de prendre un tel risque ? Il me semble que seule sa foi peut expliquer la folie de ce sacrifice qui fait aujourd'hui l'admiration de tous. Il savait comme nous l'a dit Jésus, qu' « Il n'y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis. » (Jn 15, 13). Il savait que, si sa vie commençait d'appartenir à Marielle, elle était aussi à Dieu, à la France, à ses frères en danger de mort. Je crois que seule une foi chrétienne animée par la charité pouvait lui demander ce sacrifice surhumain.

J'ai pu le rejoindre à l'hôpital de Carcassonne vers 21h hier soir. Les gendarmes et les médecins ou infirmières m'ont ouvert le chemin avec une délicatesse remarquable. Il était vivant mais inconscient. J'ai pu lui donner le sacrement des malades et la bénédiction apostolique à l'article de la mort. Marielle alternait ces belles formules liturgiques.

Nous étions le vendredi de la Passion, juste avant l'ouverture de la Semaine Sainte. Je venais de prier l'office de none et le chemin de croix à son intention. Je demande au personnel soignant s'il peut avoir une médaille mariale, celle de la rue du Bac de Paris, près de lui. Compréhensive et professionnelle, une infirmière, la fixe à son épaule.

Je n'ai pas pu le marier comme l'a dit maladroitement un article, car il était inconscient.

Arnaud n'aura jamais d'enfants charnels. Mais son héroïsme saisissant va susciter, je le crois, de nombreux imitateurs, prêts au don d'eux-mêmes pour la France et sa joie chrétienne.


                                                                                                                      Père Jean-Baptiste  
                                                                                             Chanoine de l’abbaye de Lagrasse

 

Source : https://www.asafrance.fr/item/temoignage-personnel-sur-arnaud-beltrame-la-dimension-spirituelle-de-son-sacrifice.html

 


Message personnel du général d'armée Richard LIZUREY, Directeur général de la gendarmerie nationale - le 25/03/2018.

DÉCÈS du lieutenant-colonel Arnaud BELTRAME : Message personnel du général d'armée Richard LIZUREY, Directeur général de la gendarmerie nationale.

Le lieutenant-colonel Arnaud Beltrame nous a quitté à l'aube, ce matin.

Mes pensées vont, en cet instant, à son épouse, Marielle, ses parents et sa famille. Elles vont aussi à ses camarades du groupement de l'Aude, de la région Languedoc-Roussillon et tous ceux qui avaient eu l'honneur de servir à ses côtés au cours de sa riche et brillante carrière. Elles vont enfin aux militaires engagés dans cette opération et à leur famille. Je leur adresse mon soutien tout particulier, en ces heures douloureuses.

Né le 18 avril 1973 à Etampes (91), le lieutenant-colonel Arnaud Beltrame a servi la France pendant plus de 22 ans.

Appelé à l'activité le 1er novembre 1995 en qualité d'officier de réserve au sein de l'école d'application de l'artillerie à Draguignan (83), il se classe parmi les meilleurs de sa promotion à sa sortie, en mars 1996. Nommé aspirant, il commande d'abord une section d'artilleurs parachutistes au 35e régiment d'artillerie parachutiste de Tarbes (65), avant de rejoindre le 8e régiment d'artillerie, à Commercy (55) où il prend la tête d'une section d'observation dans la profondeur en qualité d'officier de réserve en situation d'activité. 
Résolument engagé dans l'action, apprécié de ses chefs et de ses subordonnés, il est admis sur concours à l'école militaire interarmes de Coëtquidan (56) en 1999 et sort major de la promotion « Campagne d'Italie »en 2001. Il fait preuve d'appréciations particulièrement élogieuses au terme d'une scolarité brillante : « Courageux, il se bat jusqu'au bout et n'abandonne jamais ». Ses cadres soulignent son « esprit résolument offensif face à l'adversité ». Il choisit alors de servir en Gendarmerie, où il termine, une fois de plus, major de la promotion « capitaine Gauvenet », en 2002.

Constant dans son goût de l'effort, il rejoint le Groupement blindé de gendarmerie mobile à Versailles (78) où il commande un peloton de VBRG à l'escadron 16/1 et prépare activement les tests d'entrée du GSIGN (GIGN actuel). Energique et doté d'un important potentiel physique et mental, il réussit en 2003 les difficiles tests d'entrée de l'escadron parachutiste d'intervention de la gendarmerie nationale. Il fait ainsi partie des quelques militaires retenus parmi les 80 candidats de la session.
Chuteur opérationnel, il assume les responsabilités d'adjoint au commandant de l'escadron parachutiste d'intervention de la Gendarmerie nationale. Il participe à de nombreuses missions sur le territoire national et à l'étranger. Il est notamment engagé en Irak comme chef du détachement gendarmerie en 2005, dans des conditions particulièrement dégradées en termes de sécurité. Il conduit ainsi, au péril de sa vie, une mission complexe de récupération d'un ressortissant français menacé par un groupe terroriste, qui lui vaut d'être décoré de la croix de la valeur militaire avec citation à l'ordre de la brigade.

En 2006, il rejoint la Garde républicaine en qualité de commandant de la compagnie de sécurité et d'honneur du 1er régiment d'infanterie à Nanterre (92). Il met au service de la sécurité du Palais de l'Elysée ses grandes compétences en matière de sécurité-protection et veille, par un engagement soutenu, à maintenir son unité à un haut niveau d'excellence. Il se distingue à de nombreuses reprises qui lui valent d'être récompensé par le commandant du régiment et le directeur général de la gendarmerie.

Le 1er août 2010, il est nommé à la tête de la compagnie de gendarmerie départementale d'Avranches (50). Il y réussit de manière remarquable. A la tête de 155 gendarmes, il commande efficacement le service de ses unités et s'engage personnellement pour combattre les phénomènes de délinquance ou organiser la préparation de grands événements, tel que le 100e  tour de France. Homme de terrain, il manifeste une grande disponibilité et se distingue par son autorité naturelle et son implication sans faille. Il reçoit à ce titre un témoignage de satisfaction du commandant de région. 

Son excellente manière de servir, l'impression très favorable qu'il inspire et son MBA en Intelligence économique de l'ISC Paris lui valent d’être retenu, en 2014, pour servir au ministère de l'Ecologie, du développement durable et de l'énergie comme conseiller auprès du secrétaire général. Référent en matière d'intelligence économique, il évolue avec beaucoup d'aisance dans un environnement interministériel de haut niveau, mettant en évidence ses belles qualités relationnelles et intellectuelles. 

Nommé à l'été 2017 en qualité d'officier adjoint au commandant du groupement de gendarmerie départementale de l'Aude à Carcassonne (11), Il s'impose très rapidement comme un collaborateur précieux de son commandant de groupement, s'impliquant spécialement dans le développement de la capacité de contre-terrorisme des unités de gendarmerie de l'Aude, dans une excellente synergie inter-services. 

Le 23 mars 2018, parmi les premiers engagés sur une prise d'otage dans le Super U de Trèbes (11), n'écoutant que son courage, il n'hésite pas à se livrer au terroriste en échange de la vie d'une jeune femme. Il est abattu quelques heures après, avant que ses camarades ne donnent l'assaut pour neutraliser le terroriste. Il décède des suites de ses blessures le 24 mars 2018.
 
Décoré de la médaille d'or de la Défense nationale en 2009, il était par ailleurs titulaire de la médaille d'Honneur des Affaires étrangères – Argent depuis 2006. Le lieutenant-colonel Beltrame s'était vu decerner en 2007 une citation à l'ordre de la brigade comportant l'attribution de la croix de la valeur militaire suite à son engagement en Irak. Il était chevalier de l'Ordre National du Mérite depuis 2012.

Agé de 44 ans, le lieutenant-colonel Beltrame était marié, sans enfant. Il est mort en service commandé, dans l'accomplissement de sa mission au service de la France. 
Par son geste héroïque et son sacrifice, en toute connaissance du danger auquel il s'exposait, il est allé au bout de son engagement de soldat et de gendarme. Au nom de la Gendarmerie et mon nom personnel, je lui exprime toute notre reconnaissance et notre admiration. Son sacrifice nous rappelle la valeur de l'engagement qui est le nôtre au quotidien, pour protéger la population.

 

Source : https://www.asafrance.fr/item/deces-du-lieutenant-colonel-arnaud-beltrame-message-personnel-du-general-d-armee-richard-lizurey-directeur-general-de-la-gendarmerie-nationale.html


...par le Gal. Antoine Martinez - le 26/03/2018.

« Il n'y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu'on aime »

(évangile selon saint Jean 15, 12-17)

Par le sacrifice de sa vie pour en sauver d'autres, le lieutenant-colonel Arnaud Beltrame est entré dans la légende en devenant, sans le savoir et probablement sans le vouloir, un héros, ce

héros tant attendu et seul capable de réveiller brutalement les consciences assoupies. Seul le héros peut montrer le chemin qui doit être à présent celui de la reconquête face à la barbarie,

au séparatisme territorial instauré par le renoncement et la lâcheté des élites politiques, à la soumission à une idéologie totalitaire et mortifère. Au-delà de la confrontation de ces deux conceptions de la vie – opposant d'un côté le don de sa vie pour tuer l'autre, et d'un autre côté le don de sa vie pour en sauver d'autres – qui marque indiscutablement la victoire définitive du christianisme porteur d'espérance sur l'islamisme porteur de mort, c'est l'appel du héros qui interpelle aujourd'hui le citoyen en tant qu'homme responsable. C'est un appel qui exhume, en fait, le culte qui était voué au héros ayant marqué l'histoire du peuple et qui avait disparu depuis trop longtemps.

Ce culte du héros, qui concerne des personnages de l'Histoire dont les hauts faits sont passés

dans la légende populaire, nous enseigne que les peuples ont souvent identifié leurs valeurs

suprêmes comme la bravoure, le sacrifice, l'audace, à un individu qui en semblait porteur. Ses

exploits – qui finalement sont la traduction de la réalisation de son engagement et

l'aboutissement de sa « mission », même et surtout s'il y laisse sa vie – ont une fonction

pédagogique qui se réalise par le miroir qu'il nous renvoie et l'appel qu'il nous lance pour aller

de l'avant.

Comment et pourquoi – car il y a bien un pourquoi – le héros se révèle-t-il ? Car au-delà de ces

valeurs qui peuvent être partagées par le plus grand nombre, l'accession du héros à son statut

ne relève pas de sa volonté ou d'un calcul personnel. En effet, le héros ne se révèle que si les

circonstances se présentent, sans l'avoir théorisé, ni s'y être préparé ou l'avoir planifié. Et l’acte

de naissance du héros est paradoxalement souvent son acte de décès. La vraie vie du héros

commence souvent après une mort qui, si elle n’est pas toujours nécessaire, souligne le

courage et la violence d’un engagement voulu.

A partir du modèle d'Achille, mais également de la plupart des héros qui ont marqué l'Histoire,

on peut discerner un certain nombre de qualités que l'on peut même qualifier de vertus et qui

leur sont communes et reconnues, voire idéalisées par la légende qui leur survit. Parmi ces

vertus, on peut reconnaître une certaine noblesse dans le comportement qui conduit le héros à

affronter dignement l'adversité ou la fatalité qui l'accable et qu'il accepte avec lucidité et

résignation car il a conscience que ce qui le guide peut le perdre.

Par ailleurs, il déploie une grande énergie que certains présentent comme une expansion vitale

qui peut se manifester d'ailleurs comme du dédain à l'égard de la hiérarchie, voire de

l'insoumission face au système en place et qui l'amène à déroger aux règles de la discipline

collective. Il se signale souvent à ses contemporains par une différence qui peut flirter avec

l'insolence. On ne peut s'empêcher de penser ici à la rébellion fondatrice du mythe gaullien

avec le discours du 18 juin 1940 qui est devenu le fait glorieux qui a mené à la légende

gaullienne.

Ensuite, on ne peut qu'admettre une autre vertu évoquée de façon magistrale par Henri

Bergson dans « Les deux sources de la morale et de la religion » qui débouche sur un réel

appel du héros. Par sa force de caractère, ne se satisfaisant pas d'une obligation ou d'une

morale naturelle qui conduit chacun de nous à obéir à nos devoirs sociaux, le héros s'impose

une autre morale complète et absolue qui se traduit par le choix individuel et personnel de

modèles et qui l'amène à exercer sur les autres un véritable appel. « Pourquoi les saints ont-ils

laissé des imitateurs et pourquoi les grands hommes de bien ont-ils entraîné derrière eux des

foules ? Ils ne demandent rien, et pourtant ils obtiennent. Ils n'ont pas besoin d'exhorter; ils

n'ont qu'à exister; leur existence est un appel. Car tel est bien le caractère de cette autre

morale. Tandis que l'obligation naturelle est pression ou poussée, dans la morale complète et

parfaite il y a un appel ».

Enfin, il faut évoquer cette autre vertu caractérisée par cette ardeur généreuse qui transforme

l'héroïsme en geste d'amour. C'est d'ailleurs ce qui explique qu'il se manifeste très souvent par

le sacrifice. Car le héros possède une pensée plutôt subversive et radicalement opposée à

l'ordre établi, ce qui le conduit à passer à l'action pour mettre en œuvre ses idéaux, souvent par

des moyens d'action vertueux mais également en prenant des risques qui forcent le respect et

l'admiration. Et ce qui en fait un héros, c'est en fin de compte le fait qu'il soit prêt à tout sacrifier,

que ce soit sa vie, comme sa tranquillité ou son anonymat, pour son idéal. Et pour notre

camarade et frère Arnaud Beltrame, seule sa foi chrétienne animée par la charité pouvait lui

demander ce sacrifice suprême et surhumain.

La possession de ces vertus ne suffit cependant pas à faire apparaître le héros, à le révéler. Ce

n'est que dans l'action, paré de ces vertus, qu'il peut être reconnu comme tel et entraîner

derrière lui des foules. Mais ce sont, en définitive, des circonstances particulières qui le font

basculer vers le passage à l'acte libérateur et salvateur, parfois entraîné, non pas malgré lui,

mais sans qu'il l'ait vraiment décidé, à l'image osée de l'écrivain qui ne maîtrise jamais

pleinement son texte et est, en partie, conduit par ce qu'il écrit. De la même façon, ce sont les

hommes qui font l'Histoire sans savoir ce qu'elle sera. Et le héros n'apparaît que lorsque des

circonstances bien particulières se présentent pour déclencher son jaillissement. Cela peut se

produire dans la guerre ou le combat – et on perçoit bien ici le lien direct de l'héroïsme avec la

vocation militaire – mais également à l'occasion d'une crise morale et sociale majeure, ou au

cours d'une catastrophe ou dans certaines situations qui requièrent du courage et de

l'abnégation, en tout cas lorsqu'un péril imminent menace un pays ou un peuple.

Et nos élites politiques devraient savoir que l'unité d'un peuple se construit patiemment au fil

des siècles et que le sentiment d'appartenance à une nation, à une patrie est fondé par la

référence permanente à ses héros qui incarnent son identité. Le mythe du héros est donc

particulièrement nécessaire pour maintenir l'unité d'un peuple. C'est pourquoi le

multiculturalisme que nos élites veulent imposer est une imposture, une imposture, on le

constate, sanglante. Dans la pièce de théâtre « La vie de Galilée », Bertolt Brecht fait dire au

disciple Andrea, révolté que son maître se soit rétracté pour échapper à la mort : « Malheureux

le pays qui n'a pas de héros ! » Et Galilée de rétorquer : « Malheureux le pays qui a besoin de

héros ». Ces deux phrases résonnent aujourd'hui, la première comme un avertissement

adressé à ceux qui ont perdu tout repère, ayant oublié leur héritage historique, spirituel et

culturel et donc tout sens du collectif transmis précisément par le culte des héros, la seconde

comme une supplique lancée dans la douleur et invoquant le besoin vital du héros, comme une

imploration traduisant l'appel au héros. Tout cela nous montre qu'un peuple, un pays sans

héros, sans héroïsme n'a plus de vitalité pour résister aux coups de boutoir du destin. C'est sa

condamnation, sa disparition qui le guettent. La France, notre patrie charnelle, se trouve

aujourd'hui dans cette situation périlleuse. Et elle réclamait un héros. Il s'est montré et nous

indique le chemin. Le sacrifice de Arnaud Beltrame ne doit pas être vain. Il doit au contraire

insuffler cette vitalité et cette volonté déterminée pour résister et engager enfin le combat pour

changer les choses.

 

Le 24 mars 2018

Général (2s) Antoine MARTINEZ

Coprésident des Volontaires Pour la France

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