Un premier 14 juillet présidentiel qui aurait pu être un succès

..;par le Gal. François Chauvancy - le 16/07/2017.

La commémoration du centenaire de l’arrivée des troupes américaines en France en 1917, la présence du couple Trump, un soleil éclatant, un magnifique défilé pour montrer la puissance française à la première puissance du monde, une animation finale beaucoup plus militaire que les années précédentes avec cette brillante musique interarmées devant la tribune officielle, auraient dû faire de cette journée de fête nationale une journée extraordinaire. Il s’est même greffé en fin de cérémonie un discours présidentiel sur la place de la Concorde.

Malheureusement, l’irréparable s’est sans doute passé. Voir la colère rentrée du général de Villiers, chef d’état-major des armées, auprès du président de la République lors de la revue des troupes était édifiant. Le président d’ailleurs regardait peu les troupes préférant saluer la foule apparemment enthousiaste. Il est vrai que les défilés des deux précédents présidents de la République étaient « agrémentés » de bien des sifflets.

Malgré la réprimande subie indirectement la veille en public de la part du président de la République, Le CEMA, fidèle au poste, était présent démentant les rumeurs de démission immédiate. Il faut dire que les militaires sont un peu formatés. Ils remplissent la mission quoi qu’il en coûte et c’est ce qui permet au politique d’afficher une certaine forme de mépris envers ce comportement. Aussi, la surprise peut aussi être violente quand le militaire a le sentiment d’avoir été berné et qu’il réagit.

Le défilé a montré donc à la première puissance militaire du monde les capacités échantillonnaires françaises. Le président Trump n’a pas tweeté ce qu’il devait penser au fond de lui-même, comparant sans doute l’effort militaire des Etats-Unis avec celui de la France. La ponction des ministres de droite sur le budget des armées s’additionnant à un gel persistant des crédits devait bien l’amuser.

Aujourd’hui, le président de la république s’expliquait sur ce « conflit » avec le CEMA par presse interposée dans le Journal du Dimanche. Il évoquait la pression d’un « lobby militaro-industriel », expression d’un autre temps et montrant une certaine méconnaissance du monde de la défense. Le « lobby nucléaire » souvent évoqué en revanche ne suscite pas la même aversion sinon même l’évocation d’une quelconque réduction du budget dédié à la dissuasion nucléaire. Or, son coût officiel représente pour l’instant plus de 3,5 milliards d’euros avec des sommes futures annoncées bien plus importantes.

Etre chef des armées tel que l’impose la Constitution de 1958 nécessite de connaître le code qui définit les relations entre le politique et le militaire. N’est pas Bonaparte au pont d’Arcole, ni De Gaulle qui veut. En particulier, le général de Gaulle avait connu la guerre et avait une légitimité totale pour conduire les armées. La Constitution de 1958 est une conséquence de cette longue expérience militaire puis politique.

Le rappel hiérarchique évoqué aujourd’hui par le président de la République s’appuie sur la méconnaissance du système. Bien qu’il en avait encore l’âge, il est vrai qu’il n’a pas fait de service militaire à la différence de François Hollande par exemple. Exempté médical, il s’est battu pour être officier de réserve. Un futur haut fonctionnaire ne pouvait pas ne pas avoir fait son service.

Nul doute cependant que le général de Villiers a dû se sentir trahi d’abord par Bercy (Cf. Mon billet du 16 novembre 2014), ensuite par le président de la République. Ce sentiment de trahison que tous les militaires peuvent partager pourra difficilement inciter le CEMA à rester en poste à la fin de cette semaine sauf s’il obtient de réelles garanties. Nul doute que des généraux « macrocompatibles » soient aussi trouvés pour le remplacer.

Le 14 juillet a aussi été la commémoration de l’attentat de Nice. Il est clair que les Français ont été marqués et ont pris conscience de la menace. Des dizaines de milliers de personnes ont respecté la minute de silence sur le Champ de Mars à l’issue du concert parisien. A Nice, les cérémonies étaient fortement empreintes d’émotion. Aussi, comment expliquer aux Français que de nouvelles impasses vont être faites sur leur sécurité pour des raisons budgétaires alors que le gouvernement n’hésite pas à recapitaliser Areva à 4,5 milliards d’euros par exemple.

Aujourd’hui, avait lieu la journée nationale à la mémoire des victimes des crimes racistes et antisémites de l’État français et d’hommage aux « Justes » de France. Cérémonie nécessaire pour rendre hommage aux Justes et se rappeler que les juifs ont été pourchassés par la police parisienne. Cependant, ce qui est rappelé médiatiquement est la rafle du Vel d’Hiv. Or, cette journée de commémoration en date du 16 juillet vise aussi la responsabilité de l’Etat français, deux jours après notre fête nationale. Le président a réaffirmé la responsabilité de la France aujourd’hui. Cela mérite réflexion même si un décret de 1993 et une loi de 2000 ont instauré cette journée.

Enfin, je suis intervenu en direct pendant une demi-heure le dimanche 9 juillet 2017 dans l’émission « Arc-en-Ciel » sur Radio-pluriel, une radio franco-marocaine basée à Lyon. Le thème en était « Islam, islamiste et sécurité » (Cf. Interview en ligne sur YouTube). Cela me semblait d’autant plus intéressant qu’un de mes parents a longtemps servi dans les unités de tirailleurs marocains, ce dont j’ai témoigné lors d’un colloque ce 17 décembre 2016 aux Invalides en l’honneur des soldats marocains ayant servi la France.

Ce parent, le capitaine Chevillon qui finira sa carrière comme général de corps d’armée, est détaché au Levant en avril 1921. Il forme une compagnie méhariste en août 1921. Elle monte vers l’Euphrate dès septembre 1921 où elle tient le désert entre Alep et Deir-ez-Zor avec la mission d’assurer la sécurité des convois. Le capitaine Chevillon (Cf. Mon billet du 9 novembre 2014) commande ensuite la compagnie de Palmyre et maintient la sécurité entre Damas et l’Euphrate jusqu’en mai 1922. Par la « petite » histoire, nous retournons au Moyen-Orient d’aujourd’hui.

Interview représentant donc un exercice sensible mais intéressant sur un thème totalement d’actualité compte tenu de la semaine qui s’annonçait !