Début du chaos ou remise en ordre de la société occidentale ?

par le Gal. François Chauvancy - le 29/01/2017.



 

La société occidentale se trouve confrontée au durcissement de son système démocratique. Son expression visible est celle du questionnement sur l’exercice en démocratie de l’autorité et du respect par le citoyen de la décision prise.

Cette question se pose aussi bien dans les relations internationales que dans notre société. Les élections, symboles de la démocratie, récemment organisées ou en cours dans la société occidentale sont significatives de cette évolution.

 

En effet, elle se rend compte que le monde façonné par ses valeurs, sa puissance militaire, diplomatique, économique, intellectuelle remet en cause d’une manière mortifère cette suprématie en s’appuyant justement sur les codes de conduite qu’elle a édictée, partagées, éventuellement imposée.

 

Aujourd’hui ces règles sont instrumentalisées à son détriment et menace cette domination, son bien-être. Que ce soit par l’économie, la religion, la démographie, les règles sociales qui remettent en cause la famille, les règles aussi de toutes sortes, le rejet de toute violence légale ou légitime, le monde occidental est menacé aussi bien à l’extérieur de ses frontières qu’à l’intérieur. Ces menaces suscitent la crainte sourde de ses peuples sur la capacité de ses dirigeants à faire face et à prendre les bonnes décisions pour garantir la puissance de l’occident et la protection des populations.

 

Comment expliquer l’élection de Donald Trump sinon par ce doute qui a conduit à la demande du retour à la domination et à la souveraineté du peuple américain et de l’intérêt national ?

Comment comprendre le Brexit sinon par cette saturation des règles imposées de l’extérieur dans tous les domaines en vue de formater les peuples ?

Comment comprendre autrement ce qui est appelé d’une manière méprisante « populisme » que ce soit dans l’est de l’Europe ou en France avec le Front national de Marine le Pen ou la France insoumise de Jean-Luc Mélenchon ?

Après les élections des uns ou des autres, viennent aussi les décisions qui ont été annoncées par les élus. Beaucoup affichent leur effarement devant les décisions rapides de Donald Trump.

Oui, il a décrété la construction d’un mur contre les migrants mexicains comme d’ailleurs d’autres murs en Europe, en Israël, en Arabie saoudite sans oublier en Tunisie face à la Libye ou au Maroc depuis longtemps face au Polisario ont été construits.

Oui, il a interdit la venue aux Etats-Unis de ressortissants de sept pays musulmans mais aussi zones de recrutement de terroristes islamistes. Décision polémique car d’autres pays sont aussi de plus grands pourvoyeurs d’islamistes comme la Tunisie, mais aussi pourquoi pas à terme la France, premier pays musulman d’Europe ou la Belgique qui pourraient aussi être concernées, situation qui, intellectuellement, mériterait peut-être d’être débattue.

Surtout le changement n’est pas dans l’annonce d’un programme et des promesses mais dans leur application sans état d’âme en s’appuyant sur la légitimité de l’élection. En l‘occurrence, ce que nous montre Trump est que la décision attendue doit être prise et appliquée immédiatement, comme un politique doit le faire pour respecter ses engagements, sans se préoccuper des manifestations des opposants ou d’une application qui peut certes être remise en cause par la loi.

 

De ce qui paraît être un chaos annoncé, n’est-ce pas plutôt un rappel de l’exercice de l’autorité même si ces décisions pourraient être atténuées par des décisions de justice ? C’est aussi rappeler les règles du jeu démocratique et la réaffirmation de ce que l’on est. L’enjeu des démocraties futures est de réapprendre ce que c’est l’autorité et de réapprendre à la respecter, un comportement aussi bien à redécouvrir dans les relations internationales que sur le territoire national.

 

D’aucuns diront que ces décisions sont brutales. C’est vrai que nos sociétés veulent du dialogue, de la pédagogie, de la sensiblerie, avec les mots qui ne heurtent pas. Il suffit de regarder le vocabulaire policé utilisé au quotidien par médias et politiques : personnes vulnérables, Etats ou personnes fragiles, « droits » multiples des uns ou des autres, discrimination, repli sur soi.

Je pourrai même évoquer la question de la parité et celle du rejet de la domination de l’homme blanc, les deux questions étant plus ou moins liées. La fin de la virilité assumée, une parité érigée en dogme, le côté féminin de l’homme qui devrait s’afficher, cet homme blanc de plus de cinquante ans qui serait au pouvoir et qu’il faut combattre, tout ceci exprime un extrémisme idéologique. Il conduit à ce qui me semble être une des raisons de cette révolte se propageant dans nos sociétés contre le monde que des minorités agissantes ou une intelligentsia mondialisée veulent imposer. D’ailleurs l’islamisme radical ne s’appuie-t-il pas aussi sur cette réaffirmation de l’homme, de la virilité ?

 

Je reste par ailleurs surpris avec quelle diligence une décision politique américaine a été appliquée sans transition aussi bien aux Etats-Unis que dans le reste du monde. Malgré cette brutalité, c’est bien l’autorité qui est mise en avant et non la tergiversation que l’on pratique par exemple en France. Une décision doit être appliquée et seule la justice pourra la rectifier mais le but n’est-il pas d’abord de rappeler que des décisions fortes peuvent être prises, même impopulaires pour certains ? C’est la création d’un nouveau rapport de forces aujourd’hui nécessaire pour rappeler que la démocratie est avant tout l’expression de la volonté d’une majorité qui a élu son dirigeant.

 

Si je me réfère au discours de François Fillon d’aujourd’hui, c’est l’appel aussi à une France forte, souveraine, fière d’elle-même et de son passé, conquérante avec des décisions à prendre qui n’iront pas dans la recherche du consensus mou et qui n’aboutissent qu’à des demi-décisions et à notre affaiblissement programmé. Cette France ne sera pas celle de D. Trump mais la problématique reste la même. Comme l’exprimait aujourd’hui François Fillon « Je veux remettre de l’ordre dans le chaos français ».

 

Globalement la société occidentale à travers une partie de ses composantes veut aussi remettre de l’ordre et arrêter un déclin qui profite aux nouvelles puissances. Un exemple qui sera intéressant à suivre sera celui de l’avenir de l’ONU que les occidentaux financent en grande partie.

Sur les dix premiers contributeurs à son budget, sept sont occidentaux. 50% du budget général et 56% du budget des opérations de maintien de la paix proviennent des Etats occidentaux au profit d’une organisation qui encadre les relations entre Etats ou oriente les affaires du monde, de moins en moins à leur profit. La baisse possible de la contribution américaine (22% du budget général et 28% du budget aux opérations de maintien de la paix) contraindra les Etats se prétendant des puissances à financer d’une manière plus importante une organisation qui les favorise.

 

Ainsi la Chine, qui refuse d’appliquer une décision de la Cour internationale de justice en mer de Chine, la Russie qui use régulièrement de son droit de véto contre la politique occidentale, l’Allemagne qui dispose d’un fort excédent budgétaire, tous devront cotiser plus, tout en permettant aux Etats-Unis de continuer à bénéficier de leur statut de membre permanent, à un moindre coût tout en faisant payer les autres Etats qui revendiquent un statut international. Un chaos en perspective ou une remise en ordre des relations internationales ?

 


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