Élections américaines : Point de situation

Par le Gal. Dominique  Delawarde


S'appuyant sur la connaissance . des Etats-Unis qu'il a acquise lors de son affectation auprès de l'enseignement militaire supérieur américain, le général Dominique Delawarde livre ici l'analyse qu'il fait des programmes des deux candidats à la présidence en particulier sur les questions de politique étrangère et de défense.

 

L'élection du 7 novembre 2016 pour la présidence des États-Unis ne sera pas sans conséquences en terme de géopolitique mondiale. Les électeurs américains et les observateurs occidentaux (politiques, journalistes, simples citoyens) devraient donc s'informer vraiment sur les projets des principaux candidats avant de s'enflammer « pour ou contre » l'un ou l'autre. Posons-nous donc quelques questions:

 

La couverture médiatique occidentale de l'élection américaine est-elle impartiale ?

La réponse est non. Les médias occidentaux (agences de presse, journaux, télévisions....), dans leur quasi totalité, campent sur une position anti-Trump. Cela n'a rien d'étonnant lorsqu'on connaît l'hostilité à l'égard de Trump des principaux magnats de la presse anglo-saxonne (Murdoch, Bloomberg, pour ne citer qu'eux...). Cela n'est pas surprenant non plus lorsqu'on connaît la position de l'AIPAC (American Israeli Public Affairs Commi-tee, le lobby juif américain) qui s'est clairement prononcé en faveur d'Hillary Clinton le 24 mars 2016. La puissance de l'AIPAC et de ses relais «UE» dans les médias, la politique, la finance et les « people », suffisent à expliquer cette étrange unanimité.

 

Peut-on mieux connaître les candidats et leurs projets autrement que par les médias ?

La réponse est oui. Madame Clinton, 69 ans, est une politicienne chevronnée, épouse de gouverneur à 32 ans, première dame des États-Unis à 46 ans, elle est sénatrice de l'Etat de New-York et candidate à l'élection présidentielle de 2008, secrétaire d'État de 2008 à 2012, elle se représente à l'élection présidentielle en 2016. Elle a donc fait d'innombrables déclarations et laissé beaucoup d'écrits dont les 30 000 mails, privés ou classifiés, piratés sur son ordinateur, tous très révélateurs de ses positions et de sa personnalité. Une analyse personnelle, sans intermédiaire, de ses paroles, de ses écrits, de ses actes laisse une image bien moins flatteuse du personnage que celle que nous servent les médias, les politiques et les people occidentaux.

 

Donald Trump pour sa part est plus difficile à cerner. C'est un homme d'affaires et non un politicien professionnel. Il a donc été beaucoup moins exposé aux médias. Candidat depuis juin 2015, il est alors crédité de 5 % des intentions de vote, loin derrière Jeb Bush, avant d'écraser ses 16 adversaires lors de la primaire républicaine. Trump est plus connu pour les tours urbaines qui portent son nom et par l'émission télévisée qu'il a longtemps animée, que par ses écrits, peu nombreux. Ses positions ont fluctué, au point de le faire changer de parti à plusieurs reprises. Pour tenter de le mieux connaître, il faut écouter en direct l'intégralité de ses propos et non se contenter de ce que les médias lui font dire en sortant des phrases de leur contexte, en interprétant, tronquant et caricaturant ses discours.

 

« Si Hillary Clinton était élue, l'ingérence des États-Unis, secrète ou ouverte, continuerait toujours davantage d'être la règle »

 

Quels sont les positions de l'un et de l'autre ? Hillary Clinton est incontestablement une candidate de continuité, mais avec une attitude beaucoup plus agressive et interventionniste que celle de son prédécesseur Obama en matière de politique étrangère et de défense. Soutenue par les néoconservateurs, mais aussi très officiellement par l'AIPAC, et donc par les lobbies de la finance, des médias et des people qui lui sont liés, elle est une adepte du PNAC (Project for a Nev American Century), le « Mein Kampf » des néoconservateurs américains. Elle soutient donc l'idée d'un monde unipolaire, régente par les États-Unis, dont il faut absolument asseoir la suprématie sans partage, y compris par l'emploi de la force militaire, sans accord de l'ONU si nécessaire.

Si elle était élue, le budget américain de la Défense devrait être sanctuarisé voire augmenter, la présence militaire américaine en Europe accrue. L'OTAN serait utilisée comme bras armé de la politique anti-russe néocon-servatrice américaine, soit pour menacer, soit pour agir. En Europe de l'Est, en Amérique du Sud, aux Proche et Moyen-Orient, en Afrique, en mer de Chine, l'ingérence des États-Unis secrète ou ouverte, continuerait toujours davantage d'être la règle (en bonne application du PNAC).

Hillary Clinton a voté la guerre en Irak et en Afghanistan, soutenu l'intervention en Libye, préconisé une intervention en Syrie, appuyé le coup d'État en Ukraine organisé par son ex-sous-secrétaire d'État et fidèle adjointe Victoria Nulland, néoconservatrice enragée, très liée à l'AIPAC. Peu favorable à l'accord sur le nucléaire iranien, Hillary Clinton a fini par le voter et le défendre du bout des lèvres pour ne pas s'aliéner le soutien d'Obama dans sa course à la présidence. La Russie et les ennemis d'Israël sont ses ennemis prioritaires.

Sur le plan économique, elle est pour le maintien du système mis en place au sortir de la 2e Guerre mondiale (FMI, Banque mondiale, dollar), d'une OMC et des agences de notation anglo-saxonnes, qui favorisent le clan occidental en général et les États-Unis en particulier. Elle est pour une signature rapide d'un traité transatlantique qui lierait les économies européennes, dans un lien de vassalité, à celle des États-Unis, d'une manière aussi irréversible que possible. Elle ne se soucie guère de l'accroissement continu, inexorable et hors de contrôle de la dette américaine (20 000 milliards de dollars à ce jour).

Si elle est élue, Hillary Clinton le devra aux lobbies qui l'auront soutenue et à la puissance financière qu'ils représentent, plus qu'aux électeurs eux-mêmes. Elle devra évidemment « renvoyer l'ascenseur ». Comme son concurrent Donald Trump, elle est prête à tout pour gagner. Elle a su obtenir la bénédiction de Tel Aviv et de l'AIPAC et s'exhibe, lors des années électorales, à la Gay Pride de New York....

 

Trump est incontestablement un candidat de rupture, anti-système. S'il dispose d'un soutien populaire considérable, il s'oppose sur de nombreux sujets à l'appareil du Parti républicain dont il se réclame, et s'attire l'hostilité des lobbies les plus importants (juif, LGBT, médias, people, hispaniques, afro-américains, féministes...). Il n'est guère soutenu que par les vétérans et le lobby pour la libre détention d'armes (NRA). Il apparaît donc comme un homme plus libre que sa concurrente (peu de renvois d'ascenseurs en perspective). Son programme tient en 4 slogans de 4 mots qu'il décline à sa manière : « make America great again », « make America work again », « make America safe again », « make America one again ». En clair: « rendre à l'Amérique sa grandeur, ses emplois, sa sécurité et son unité ».

 

« Trump se prononce avec insistance contre la politique d'ingérence et d'interventions militaires tous azimuts »

 

Il se prononce avec insistance contre la politique d'ingérence et d'interventions militaires tous azimuts dans les affaires du monde, ingérences qualifiées de coûteuses et contre-productives, ce qui lui vaut une opposition farouche des néoconservateurs. Ce sera son angle d'attaque contre Hillary Clinton et son bilan de secrétaire d'État.

En Europe, il se prononce clairement contre le développement de l'OTAN, organisation qu'il juge « obsolète » et coûteuse pour les États-Unis. Il dit vouloir privilégier le dialogue avec Poutine, dont il déclare apprécier les qualités, et avec la Chine. Il annonce vouloir

faire payer aux pays bénéficiaires tout soutien ou déploiement militaire américain (Europe, Corée, Japon, Proche et Moyen-Orient, autres). S'il est élu, il devrait donc y avoir un désengagement militaire progressif des États-Unis en Europe. L'Europe aurait le choix entre payer plus pour une véritable défense européenne ou payer plus pour sous-traiter sa défense aux États-Unis....

 

« L'électorat américain est extrêmement volatil et une surprise de type Brexit est tout à fait envisageable... »

 

Soucieux d'une évolution de la dette qui affaiblit les États-Unis, il dit vouloir réorienter les milliers de milliards de dollars gaspillés dans la politique d'ingérence et d'interventions militaires dans l'économie américaine afin de la revitaliser et de favoriser l'emploi au pays. Il s'est prononcé contre le traité transatlantique de libre-échange avec l'Europe, refusant de lier l'économie américaine à des intérêts, des normes ou des règles étrangères quelles qu'elles soient. Il s'était aussi déclaré en faveur du Brexit bien avant les résultats du vote.

S'agissant de sécurité intérieure, il se prononce pour la poursuite de la construction de la clôture États-Unis-Mexique, dont les travaux, initiés par Bush et votés à une forte majorité par le Congrès en 2006 , ont déjà été réalisés sur plus de 1100 km (sur 3 140 km de frontière). Ce projet vise à limiter l'immigration de masse, génératrice, selon lui, d'insécurité et de chômage. Il souhaite le renvoi des immigrants illégaux dans leurs pays d'origine. Il prône un « durcissement temporaire » des conditions d'admission sur le territoire américain des individus de confession musulmane, tant que la situation du terrorisme islamiste restera ce qu'elle est. Rappelons qu'à la suite de Pearl Harbor, Roosevelt avait signé le décret 9066 conduisant à l'internement de 110 000 individus de souche japonaise dont 62 % de citoyens américains de la 2e génération, avec le plein appui des médias et de la population...

Porteur d'une politique beaucoup plus isolationniste que sa concurrente, Trump espère pouvoir l'emporter face à Hillary Clinton dont la réputation est loin d'être sans tache...

 

En conclusion....

 

...pour connaitre la fin de ce document, adhérez à l'ASAF et rendrez-vous acquéreur du n° 112 de la revue "Engagement" . JMR

 

 

 


CES PROPOSITIONS DE TRUMP DONT LES MÉDIAS NE PARLENT JAMAIS

...par Ignacio Romanet  - le 27/09/2016.

 

Ancien directeur du Monde Diplomatique, le journaliste Ignacio Ramonet a fait l’effort de s’intéresser à ce qui se cachait (ou à ce qui était caché) derrière ce voile teinté de fantaisie. « Comment un personnage avec de si misérables idées peut rencontrer un tel succès chez les électeurs américains qui, évidemment, ne sont pas tous décérébrés ? Quelque chose ne cadre pas », écrit-il sur le site Mémoires des luttes.

 

 DANS LES MÉDIAS DU MONDE ENTIER, L’IMAGE QUI EST VÉHICULÉE DE DONALD TRUMP EST TRÈS SOUVENT LIÉE À SES SORTIES VOLONTAIREMENT PROVOCATRICES ET CARICATURALES.

 

Source : http://www.ojim.fr/ces-propositions-de-trump-dont-les-medias-ne-parlent-jamais/

 

 

 

Ainsi, en se penchant de plus près sur le programme du candidat Républicain à la Maison blanche, le journaliste a découvert sept « options fondamentales qu’il défend, et que les grands médias passent systématiquement sous silence ». Certes, Trump met en scène des propositions et des déclarations sur les immigrés, les femmes ou encore les handicapés qui feraient fuir le premier socialiste (ou communiste) venu.

Mais ce dernier a également promis de « diminuer les prix des médicaments, d’aider à régler les problèmes des « SDF », de réformer la fiscalité des petits contribuables, et de supprimer un impôt fédéral qui touche 73 millions de foyers modestes », note Ignacio Ramonet.

 

Et ça, aucun média ne prend le risque d’en parler. Pas plus que de sa proposition d’augmenter       « les taxes sur tous les produits importés » avec également des « droits de douanes de 40% sur les produits chinois ». Aussi, Trump a frappé un grand coup en proposant d’augmenter les impôts des traders travaillant pour des fonds spéculatifs. En effet, ce dernier propose « le rétablissement de la loi Glass-Steagall (votée en 1933 pendant la Dépression et abrogée en 1999 par William Clinton), qui séparait la banque traditionnelle de la banque d’affaires pour éviter que celle-ci puisse mettre en péril l’épargne populaire par des investissements à haut risque », souligne Ramonet.

 

Opposé au traité de libre échange nord-américaine (ALENA) et transpacifique (TPP), Trump n’exclut pas de quitter l’organisation mondiale du commerce.

Un protectionnisme ayant pour seul objectif de protéger les plus faibles et les plus lésés par la mondialisation sauvage. « Dans des régions comme le rust belt, la « ceinture de rouille » du nord-est où les délocalisations et la fermeture d’usines ont fait exploser le chômage et généralisé la pauvreté, ces propos sont reçus avec enthousiasme et font renaître tous les espoirs », reconnaît ainsi le journaliste.

 

Enfin, Trump est aussi l’un des seuls candidats à s’être positionné fermement contre l’impérialisme et l’interventionnisme étasuniens.

Pour lui, il faut en finir avec cette politique étrangère d’interventions tous azimuts car l’Amérique n’en a plus les moyens ni même la vocation. Aussi, le milliardaire compte bien réformer l’Otan afin qu’il n’y ait plus de « garantie d’une protection automatique des États-Unis envers les pays membres ».

 

Pour Ramonet, au-delà du bruit médiatique autour du candidat et de ses sorties tapageuses, qu’il condamne par ailleurs, ces propositions originales « expliquent sans doute un peu mieux les raisons de son succès auprès de larges secteurs de l’électorat américain ».

 


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